S’il y n’y avait, comme cela semble vraisemblable, qu’un seul fait vraiment positif dans le remaniement qui vient de s’opérer, c’est, à l’évidence, la suppression du secrétariat d’état aux droits de l’homme, parce qu’il avait été immédiatement et essentiellement perçu comme le droit, pour tout le monde, et naturellement, avant tout, pour la France, grande donneuse de leçons, en la matière, de s’occuper des affaires des autres, de juger leur capacité à pratiquer, chez eux, les règles de la démocratie et d’exiger de leur part mille autres choses encore qui ne nous regardent pas.
Comme toujours, en pareil cas, ce « moralisme » n’est productif d’aucun résultat, si ce n’est les rebuffades et l’inimitié des pays auxquels on prétend l’imposer et qui ont de fort bonnes raisons de nous prier de nous mêler de nos affaires et de balayer devant notre porte. Le pays qui a guillotiné son roi et sa reine, martyrisé un dauphin innocent promené des milliers de têtes sanglantes au bout de ses piques, qui a décrété en termes fort nets le génocide vendéen, dont un souverain a déclaré, à propos des jeunes Français envoyés se faire tuer dans des guerres sans issue, qu’il avait « deux cent cinquante mille hommes de rente », un pays qui chante encore aujourd’hui un hymne national où l’on appelle de ses vœux, curieuse notion, « qu’un sang impur abreuve nos sillons », est-il fondé à s’ingérer dans les affaires des autres, fussent-ils arabes, africains, russes ou chinois ? Il s’expose surtout, tout simplement, à se faire renvoyer dans ses cordes.
C’est ce qui nous est arrivé avec le secrétariat d’état confié il y a deux ans à Rama Yade. Et c’est même ce dont s’est aperçu Bernard Kouchner, bien qu’il ait ainsi lui-même contredit et démenti l’engagement de toute sa vie en faveur du funeste « droit d’ingérence ».
Le secrétariat d’état aux droits de l’homme nous a coûté relativement cher, ces deux dernières années. Il a vécu. Il n’y a vraiment aucune raison sérieuse de pleurer sa disparition.