Les fractures américaines, par Antoine de Lacoste
L’Amérique est divisée comme jamais. Depuis sa fondation après sa guerre d’indépendance victorieuse, un large consensus régnait sur l’ensemble du pays. Il consistait à professer que les Etats-Unis constituent un pays à part, béni de Dieu et appelé à dominer le monde pour l’élever vers la liberté divine et démocratique en même temps. C’est sa « destinée manifeste ».
Cette foi en sa mission divine a donné à l’Amérique une vision mystique de son propre peuple. C’est ainsi que les Pères pèlerins, les célèbres Pilgrims fathers, ont façonné la conquête et la construction de ce pays. Protestants fanatiques venus des Pays-Bas ou d’Angleterre, bible dans une main et fusil dans l’autre, ils ont donné au nouveau monde son corpus idéologique qui s’imposa jusqu’à nos jours. L’ambiance était à la prière, aux références permanentes à l’Ancien Testament et au châtiment de ceux qui constituaient un obstacle à la mission donnée pour créer cette « nouvelle Israël » : élimination des ennemis de l’extérieur, comme les Indiens, ou mise au ban des dissidents de l’intérieur. La lecture du célèbre roman de Nathaniel Hawthorne, La lettre écarlate, est, à ce titre, très intéressante.