Il y a, aujourd’hui, deux domaines où l’Eglise romaine, très sage en beaucoup d’autres, nous paraît se tromper radicalement. Il faut en traiter avec le respect qui lui est, naturellement, dû, mais il n’y a aucune raison - même si nous ne contredisons pas de gaité de coeur la haute figure du pape Benoît XVI - de ne pas exprimer notre pensée sur ces deux points qui, après tout, ressortent du domaine politique :
1. l’encyclique Caritas in Veritate croit pouvoir constater l’unification du monde. Elle le fait, il est vrai, dans sa logique propre, sa dynamique interne : elle y voit l’édification de la Cité de Dieu. A-t-elle raison ? Nous ne le croyons vraiment pas. Primo, parce que les exemples contraires de « déconstruction » de grands ensembles politiques, qu’ils fussent bons ou mauvais, tout au long du siècle dernier, et encore aujourd’hui, abondent, sans qu’il soit vraiment besoin de les citer. Comment peut-on les ignorer ? Secundo, parce que ce qui, en effet, s’unifie, ou, pour mieux dire, s’uniformise, le fait par le bas. Si nous raisonnions chrétiennement, nous y verrions, plutôt, l’œuvre du mal. Politiquement, ce n’est pas la Cité de Dieu, au sens catholique, qui se construit, dont on peut penser, même si l’on n’est pas chrétien, qu’elle élèverait les peuples, les nations et les civilisations. Mais celle du grand vide marchand où l’homme, mais aussi les cités, les nations, les civilisations du monde, perdent leur âme. En la matière, l’optimisme romain est confondant. Jusqu’à preuve du contraire, nous ne voyons aucune raison de le faire nôtre.
2. Sur la question de l’immigration, l’Eglise ne cesse de prêcher l’accueil de l’étranger à des peuples qui, pourtant, s’épuisent à en accepter bien plus qu’il n’est raisonnable. Pourquoi la sagesse romaine n’en voit-elle pas les limites, aujourd’hui largement franchies ? Elle s’exprime au nom de la charité due à tout homme et, sur ce terrain, nous la comprenons, nous partageons son souci. Nous ne sommes pas plus sauvagesqu’elle ! Nous ne voulons de mal à personne. Mais l’Europe est, aujourd’hui, confrontée, d’ailleurs en grande partie à son initiative et de son fait, à un problème sociopolitique de première ampleur qui brise de très anciens et très profonds équilibres : une invasion sans précédent par un prolétariat étranger à sa nature et à sa tradition, qui met en péril sa stabilité, son ordre, son identité même et jusqu’à son existence. Il faut, dit Rome, rechercher « des solutions justes ». Soit. Nous en sommes d’accord. Mais, à ce titre, des nations, une civilisation comme les nôtres, dont, à tous les sens du terme, la richesse, humaine, culturelle, spirituelle, est immense et remonte à quelques millénaires, ont toute raison de vouloir préserver et continuer de développer, sans qu’elles soient brutalement bouleversées, et, probablement, détruites, leurs identités historiques propres. Qu’en pense donc Rome ?
Même si elle doit toujours être écoutée avec respect, L’Eglise n’a pas reçu, de son fondateur, les promesses de l’infaillibilité en tous domaines. Nous avons appris de Lui qu’il faut « rendre à César ce qui est à César ». Pour ce qui est de notre destin politique, c’est nous qui en sommes – ou devrions en être – maîtres. En l’occurrence, forts ou défaillants, comme, autrefois, les rois se France se voulaient empereurs en leur royaume, c’est nous qui sommes – ou devrions être - César.