Quelques réflexions, après le ”de Gaulle” de France 2, à l'occasion du 18 juin (1) : les coupables...
On pourrait dire bien des choses sur ce téléfilm. On s'en tiendra ici, comme nous le disons chaque fois, non à la critique cinématographique traditionnelle -qui n'est pas de notre ressort- mais aux leçons politiques.....
Et la principale d'entre elles est cette évidence hallucinante, dès les premières images, dès les premiers instants, de "débâcle", de "débandade", de catastrophe "pire que toutes les précédentes" de notre histoire; cette impréparation manifeste de la France et de son armée au conflit, qui happe littéralement le spectateur, sans fioritures, dès le début du film.
Et la question vient d'elle même, s'impose d'évidence: Mais qui est responsable de tout cela ? Qui est coupable ? Qui était au pouvoir, "avant", et porte donc la responsabilité de cette impréparation et des catastrophes infinies qui s'en sont ensuivies, tant civiles que militaires ?
De toute évidence, même s'il faut remonter jusqu'au pacifisme militant hérité de la première Guerre mondiale, c'est bien le Front populaire qui est en cause. Et la Chambre -inchangée depuis sa victoire, le 3 mai 1936, avec 378 sièges contre 220. (Radicaux:106, Communistes: 72, Socialistes: 149), jusqu'à une débâcle dont elle porte la plus grande part de responsabilité.
Michel Mourre écrit, par euphémisme, que "le Front Populaire n'allait pas se montrer, au pouvoir, à la hauteur des grands espoirs qu'il avait eveillés". Alors que, manifestement, la guerre arrivait, il est frappant de voir comment, par pacifisme -donc par idéologie- ou par incompréhension des problèmes, manque de courage, d'intelligence ou tout simplement de lucidité, la Chambre du Front Populaire n'a pas utilisé les trois années dont elle disposait pour armer la France et la préparer à la guerre.
De Gaulle a raconté à son fils Philippe comment il était, un jour, sorti furieux d'un entretien avec Léon Blum: à lui, De Gaulle, qui le pressait de prendre des mesures afin de renforcer les capacités militaires du pays, Blum venait de répondre en substance qu'il ne pouvait pas, lui le pacifiste de toujours, voter des crédits militaires....
On connaît la suite.... que nous rappelle crûment, sans fioritures ni circonlocutions, le téléfilm. Qui nous l'assène, même....
Ce fut la même Chambre du Front Populaire, et la même majorité de gauche, qui devait s'enfuir en toute hâte et dans la plus grande panique, le 10 juillet 1940, non sans avoir au préalable voté les pleins pouvoirs... au Maréchal Pétain !
Et dont ceux qui sont à la fois les supporteurs et les héritiers reviendront, en 1945, pour imposer une vérité officielle dont l'un des premiers buts sera, justement, de faire oublier cette responsabilité écrasante, et première, de leur "camp", dans la défaite et toutes les horreurs qui en découlèrent ! On les verra alors, en 45 et depuis, hurler d'autant plus fort que leur responsabilité était immense, et évidente.
C’est d’ailleurs la responsabilité globale de tout le « système » qui est en cause, c’est lui qui s’effondre, l’été 40, droite et gauche confondues, car Paul Reynaud n’est pas un homme de gauche et ses velléités guerrières feront long feu ; l’Etat Major militaire, par son immobilisme, n’est pas, non plus, tout à fait innocent de la défaite. A vrai dire, c’est un courant de défaitisme généralisé, celui du « système », en tout cas sa résignation au pire, qui provoque l’effondrement de juin 40 … Sur ce point, comme plus tard sur d’autres, Charles De Gaulle et Jacques Benoist-Méchin sont paradoxalement d’accord … Car De Gaulle n’était pas le seul à vouloir ardemment une armée moderne pour la France.....
Par un prodigieux tour de passe passe, qui doit tout à la chance historique et à l'habileté tactique (2) les continuateurs/héritiers des premiers collabos réussirent -en 1945- à occulter le fait qu'il y avait eu autant -sinon largement plus...- de collaborateurs à gauche qu'ailleurs; et autant -sinon largement plus...- de résistants ailleurs, qu'à gauche; chez nous, par exemple, dans les rangs des traditionalistes. En somme, et en forçant à peine, on pourrait dire que, lors de la sinistre Epuration, les premiers collabos liquidèrent-ils -au propre et au figuré- une partie des premiers résistants.....
A noter, toutefois, et pour s'en réjouir, que cette vérité officielle se fissure et craque de toutes part aujourd'hui, le meilleur exemple en étant donné, justement, par ce téléfilm de France 2.....
(1) : "Ce jour-là tout a changé: l'Appel du 18 juin", film TV de Félix Olivier, avec Michel Vuillermoz (de Gaulle) et Christian Rodska (Churchill).
(2) : alors que, pour ne parler que de nous, Maurras, déjà très âgé, et isolé, manqua de soutiens et de conseils et, à l'évidence, d'habileté tactique et manoeuvrière....