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  • Culture & Action Française • Quand Boutang dialoguait avec François Davin et Pierre Builly...

    Pierre Boutang interrogé par François Davin et Pierre Builly...

     

    La relation de Pierre Boutang avec l'Action Française n'est plus de l'ordre du Mouvement. Du moins pour ce qui est de l'organisation et du quotidien.

    Sa réflexion nous aide à discerner, même si nous ne nous trouvons pas forcément d'accord avec ses conclusions, ce qu'il y eut de formes historiques accidentelles, dans l'Action Française, et ce qu'elle a de foncier, d'essentiel. Qui doit être transmis et prolongé.

    Boutang, d'autre part, invite notre temps à réinventer, non seulement l'idée d'un ordre qui soit légitime et profond, mais aussi une idée du Pouvoir. Reprendre le pouvoir, en un sens, c'est aujourd'hui, le réinventer, et le reconstruire.

    Deux siècles de Démocratie enseignent qu'il n'est d'autre pouvoir libre et légitime que celui du Prince chrétien.   

     

    F.D./P.B. : Pierre Boutang, il est inutile de vous demander si vous êtes royaliste, catholique et maurrassien ?

    Pierre BOUTANG : Cela ne fait de doute pour personne, en effet. Je suis royaliste et je l'ai toujours été : c’est vraiment la seule conviction politique que j'aie jamais eue. Dans l'ordre religieux, j'ai toujours été catholique et je n'ai jamais douté sérieusement de la foi catholique : je n'ai jamais été entamé par la partie de Maurras qui était, disons « non-chrétienne ».

    Le Maurras du « Mont de Saturne » ne vous a jamais gêné ?

    Jamais ! Quand vous me parlez du « Mont de Saturne », cela me parait tout proche : c'était pendant la captivité de Maurras. J'avais fait deux ou trois articles sur le livre et j'ai reçu une longue lettre de Maurras. dans laquelle il me disait : « Vous m'embarrassez beaucoup, c'était une bluette. Vous avec voulu lui donner un sens caché, cohérent et complet, mais en réalité je n'avais pas tant cherché ! » Maurras affirmait, d'autre part. qu'il n'était pas philosophe, qu'il ne pouvait y avoir des maurrassiens. Il avait raison : quand je dis que je suis maurrassien, c'est parce que le mot est commode : cela veut dire que je suis profondément fidèle à Maurras et que ma reconnaissance est grande. Je ne dirai pas, comme Bainville que hormis le jour. je lui dois tout, car il y a l'Église mais, dans l'ordre temporel, je lui dois tout ; tout ce que j'ai appris, je l'ai appris à travers lui. Je suis resté à l'intérieur de mon choix, en sachant que mes raisons ont changé en cours de route. C’est-à-dire que je me trouve aussi fidèle à Maurras que jadis, pour des raisons très différentes de celles de mes 17 ans à la réunion de Roquemartine, mais tout autant. Tout s'est concilié assez secrètement, assez mystérieusement avec ce que j'ai pu apprendre d'autre, avec tout le reste. Lorsque Plon m'a récemment demandé de faire un vrai livre sur Maurras, j'ai répondu : « Donnez-moi dix ans ». Ils étaient un peu affolés. Nous sommes finalement convenus d'un délai de deux ans : je peux faire ce livre maintenant en toute sécurité, avec la certitude d'être fidèle à la pensée de Maurras et, en même temps, de n'être nullement fidèle à la littéralité des positions prises dans un moment donné. D'ailleurs, ce sera un « Maurras » et je ne parlerai pas surtout de l'Action française. La période qui précède la dernière guerre avait ses charges, ses lourdeurs, ses pesanteurs telles que si on jugeait Maurras et le maurrassisme en fonction de cette période, on tomberait sur des bêtises et sur ce qui heurte le plus certaines des passions qui ont suivi immédiatement. D'un autre côté, en prenant le Maurras d'avant 1914, on arriverait à des résultats très différents : lorsque j'ai lu certaines choses dans l'admirable livre du Comte de Paris avec lequel je suis d'accord sur tant de thèmes, j'ai souri - par exemple lorsqu'il indique que c'est son attitude en matière sociale qui l'aurait écarté de l'Action Française. Il est vrai qu'il y avait, à l'A.F. des ganaches effroyables, comme il y en a partout, et il est vrai qu'en dehors de prototypes d'ouvriers, de paysans, nous avions dans l'ensemble une clientèle en partie bourgeoise, en partie hobereaute et aristocratique. Maurras leur avait injecté, par son génie, certaines doctrines, mais ils ne les vivaient presque jamais profondément. Le Prince sentait que ça ne collait pas, mais, pour la doctrine, l'A.F. allait encore bien plus loin que lui en matière sociale. Les « cercles Proudhon » ne sont pas un accident ou une bizarrerie de son histoire ! Il y a quelques années, j'ai travaillé avec quelqu'un sans lequel - c'est assez curieux - De Gaulle ne serait pas tombé... Marcel Loichot ...

    Le créateur de l'Union Pancapitaliste ?

    Oui. Son idée était d'abolir la condition salariale, ce qui est profondément royaliste, et maurrassien. Abolir le salariat ! De Gaulle a voulu tenter ça avec la participation.

    Brisée par la révolte de la classe politicienne ...

    Et de l'argent ! Je pense à certaines choses admirables qu'a dites le Prince sur le Roi qui ne doit jamais être l'homme d'un parti, d'un mouvement, et encore moins d'un philosophe. C'est l'idée même dc Maurras dans « L'Avenir de l’intelligence ». Il faut que l'intelligence se soumette à quelque chose, fasse allégeance et, par là, se subordonne, dans l'ordre temporel, en s'inclinant absolument. Seulement. bien sûr, il ne faut pas que le pouvoir temporel se prenne pour un pouvoir spirituel. Mais le pouvoir spirituel, au fond, il n'y en a qu'un : Catholique. Maurras ne souhaitait pas être le pouvoir spirituel, un philosophe : il n'était philosophe que de la Monarchie, et philosophe soumis à son objet.

    Donc. en s'éloignant des aspects conjoncturels de la pensée de Maurras...

    AVT_Pierre-Boutang_2022.jpegQui ont malheureusement dominé ! Peut-être parce qu'il y avait autour de lui - c'est la rançon du génie ! - des gens qui, lorsque Maurras disait : « Il pleut » pour des raisons conjoncturelles, alors qu'il faisait plein soleil, s'écriaient : « il pleut encore plus que vous ne le dites ». Cette sottise des appareils a beaucoup nui à Maurras. Il travaillait pour 1950. Quand on lui demandait un homme d'action, après 1914 (et après l'assassinat de Marius Plateau), il s'est dit : « Que vais-je faire ? Si je leur donne un homme d'action, ou ils accepteront, et tout ira très bien, puisque je travaille pour 1950 ; ou ils partiront ; dans les deux cas, ils me laisseront travailler ». Voilà pourquoi les reproches fondés du Prince, après 1934, s'en prenaient au risque réel de créer le fascisme ; Maurras, par ses insuffisances dans l'action, a empêché la création d'un fascisme français.

    L'hommage national à Maurras sortant de prison, c'est pour vous la préfiguration d'une crainte ?

    Mais oui ! J'y étais avec quelques amis : c'était magnifique et affreux. Maurras sentait que la Monarchie pleine et entière, malgré les 40.000 personnes de la réunion, n'était pas encore assez mûre et que quelque chose d'immédiat aurait été très dangereux. Le Prince, lui, voulait aboutir et Maurras lui donnait raison, disant qu'un prétendant qui ne voudrait pas régner à tout prix ne serait pas digne de régner. « Il piaffe. Il a raison de piaffer ! » disait Maurras, alors que d'autres lui reprochaient cette impatience. Pour en revenir, d'assez loin, à De Gaulle, il avait une certaine idée de la légitimité. S'il a refusé l'Algérie au Comte de Paris, je pense qu'il a eu raison. Le Prince a eu raison de n'être pas satisfait, mais De Gaulle a eu raison de refuser. Imaginez-vous le Prince homme du Rocher Noir ? Portant le chapeau de ce qu'a dû faire Christian Fouchet ?

    Passons à un autre thème... Pensez-vous qu'on puisse faire du royalisme sans Maurras ?

    Qu'est-ce que cela veut dire « du royalisme sans Maurras » ? D'abord, il ne faut pas faire du royalisme. On est royaliste, on se battra, mais la Providence fera les choses. Oui, il faut agir, oui il faut se battre : je ne regrette pas les coups donnés et reçus ; mais il y a une limite à tout : à partir du moment où on prend une barre d'acier pour se casser le crâne, où la violence règne partout, où c'est la guerre civile, alors, non ! J'ai cru longtemps que nous aurions un grand compte à régler avec les communistes, agents d'une puissance étrangère ; je me suis aperçu finalement que d'être ainsi des agents de l'étranger était heureux car, souvent habiles et puissants, ils auraient déjà pris le pouvoir si on ne leur avait pas interdit de le prendre de l'extérieur ! Pris individuellement, les communistes ne demandent qu'à se démarquer de cet état de chose. Maurras m'écrivait un jour de sa prison : « J'ai lu un numéro de l'Humanité et je l'ai dévoré jusqu'aux marges ! », et il insistait sur la façon dont ils avaient joué le jeu national, comme ils le rejouent actuellement. Vous rendez-vous compte que Marchais a dit dernièrement : « Tout ce qui est national est nôtre !".

    Nous devons exploiter absolument à fond ce consensus national, cette idée nationale qui est profonde. Elle est, c'est vrai, transformée ; mais, remarquez bien, la Monarchie n'était pas nationaliste, les monarchistes ne l'étaient pas non plus : il est désolant et attristant, disait Maurras, qu'on ait été obligé, pour défendre la Patrie et la Nation, de créer un état d'esprit nationaliste. Les humeurs et l'état d'esprit nationalistes sont, au fond, une mauvaise chose et il faut redéfinir le nationalisme. Qu'est-ce qui dispense du nationalisme conçu comme une humeur, ou comme un chauvinisme ? C'est justement le sentiment qu'il y a une naissance, quelque chose que l'homme ne choisit pas et sur laquelle, dans l'ordre temporel, butent et la force, et l'argent et même l'opinion, en tant qu'elle est divisée. Quand Maurras disait que le suffrage universel ne peut pas se tromper sur certains points - alors qu'il se trompe quand il est fragmenté - il indiquait ce qu'on commence à sentir aujourd'hui, que le suffrage universel ne peut pas se tromper sur des points essentiels lorsqu'on aborde les questions de fond : car il n'est pas possible que les mécanismes de défense ne réagissent pas, pour l'homme et les cités créées, de la même manière que les organismes réagissent aux infections. Ainsi le suffrage universel est-il une forme limite du salut, une réaction ultime du salut. Et puisqu'aujourd'hui il est entré dans les moeurs, il équivaut tout à fait à l'acclamation du Roi par les barons, jadis. Simplement. il faut en user judicieusement, le mettre à l'abri de ces formes fragmentées dans lesquelles il est manipulé par l'argent. Ceux qui le manipulent se sont rendu compte qu'il fallait de plus en plus d'argent, puisqu'on ne pouvait plus s'en servir au plan national et que les réactions des peuples pouvaient être vives.

    Qui sont-ils ?

    Les Américains, les multinationales. Puisqu'on ne peut plus avoir assez d'argent pour développer les propagandes qui endorment le peuple, on agit au plan international, qui permet de mieux dissimuler tout cela : il s'agit d'obtenir d'un peuple comme la France son propre renoncement et sa propre démission et de les obtenir spontanément ; à cet égard. l'affaire européenne est exemplaire.

    Pour lutter contre cela. il faut d'abord « reprendre le pouvoir » ; c'est le titre d'un de vos derniers ouvrages. 

    Oui, mais attention : « Reprendre le pouvoir », ne signifie pas cela. Cela veut dire réinventer l'idée de pouvoir. Le Pouvoir n'est pas à prendre et il ne doit pas y avoir de guerre civile. La seule chose est qu'il faut rectifier les idées fausses sur le Pouvoir de telle sorte que le Pouvoir légitime puisse s'imposer.

    État d'esprit qui débouche sur l'idéal du « Prince Chrétien ».

    En effet. Le Comte de Paris n'a pas caché son accord et son assentiment complet sur ce que j'ai écrit, sur tout le livre. Cette convergence ne compromet d'ailleurs personne, puisque nous y sommes arrivés chacun de notre côté, après une expérience tout à fait indépendante.

    Dans l'entretien qu'il a accordé au Figaro-Magazine, le Prince semble exclure la primogéniture, et parler plutôt d'une sorte de cooptation dans sa famille.

    C'est très important. Dans un récent article de « Paris-Match », j'explique d'abord la dimension familiale de la Monarchie. La durée véritable est, de nos jours où l'on vit plus vieux, la durée du grand-père au petit-fils. car on a le mène temps que ses fils, à peu près, et on a les mêmes problèmes, les mêmes querelles ; mais quand on arrive au petit-fils, on a la bonne durée politique. Les imbéciles disent que, pour veiller à la vie spirituelle dés enfants, il faut des parrains jeunes ; moi, mon parrain était un vieux meunier : mon arrière-grand-père. On prenait l'arrière-grand-père pour relier symboliquement le plus lointain et le plus proche, l'avant-hier et l'après-demain. Dans la famille royale, c'est la mémé chose. Le fils aîné du Comte de Paris ne souhaite, semble-t-il, pas régner, mais il y a les deux petits-fils, Jean, 13 ans, et Eudes, 12 ans. Vous savez que le Prince suit beaucoup ses petits-fils, par conjonction de la nature et de la volonté. Je crois donc qu'il n'y a pas de difficulté insoluble dans cette famille de France qui, comme le disait Bernanos, est notre famille. La réponse à la question que vous posez est, en quelque sorte, indiquée par les faits et vient tout naturellement. Pour clore ce sujet, vous devez noter que les premiers Capétiens faisaient sacrer leur fils de leur vivant et renouveler les serments des barons. Il faut refaire accepter l'hérédité, il faut qu'il y ait une première coïncidence - comme pour les barons électeurs de Hugues Capet - puis une acceptation volontaire du peuple, se rendant compte qu'il serait trop bête de retomber à nouveau dans le suffrage universel fragmenté : la naissance, qui favorise l'unité foncière et non le principe mauvais des deux partis, le bon et le mauvais, le majoritaire et le minoritaire.

    Ce que vous dites s'applique admirablement au monde actuel. On a pu dire, par exemple, en Belgique, que le seul Belge est le Roi. Mais que pensez-vous de la Monarchie espagnole ?

    Je n'en sais rien. Je croyais, comme tout le monde, que Juan Carlos était à la fois trop docile et trop snob. Je le trouvais trop bien lavé.

    Giscardisé ?

  • GRANDS TEXTES (32) : La démocratie est-elle la fille de la Révolution française ?, par Yvan Blot.

           (Ce texte d'Yvan Blot est paru dans La Nouvelle Revue Universelle, n° 10 – décembre 2007 

            

    "Retotale" : le jeu de mot, en tant que jeu de mot, est très réussi; il serait presque amusant, car vraiment spirituel, s'il ne s'agissait d'une réalité épouvantable, que la Terreur et le génocide vendéen sont, très vite, venus illustrer. Puis, plus tard, leurs héritiers et descendants du vingtième siècle, sous les différentes formes de marxisme-léninisme, de Staline, à Mao, Pol Pot etc....

    Dans cette ample réflexion qu'il mène sur la Révolution française, Yvan Blot va bien à l'essentiel, au coeur du problème, lorsqu'il cite et rappelle cette expression, employée par un Sieyès lui-même en proie aux doutes et inquiet - sinon horrifié... - de la tournure que prenaient les évènements.

    De même, Gracchus Babeuf, pourtant adepte d'une théorie que l'on peut qualifier de pré-communiste, sera lui aussi épouvanté par ce qu'il voyait en Vendée : c'est lui, d'ailleurs, qui forgera le mot de populicide.

    "Il s'est produit des évènements que nous n'avions pas prévu..." dira benoîtement, pour sa part, Saint Just...

    Mais le fait est là, et c'est ce que montre bien ici Yvan Blot, s'appuyant, entre autres sur Robert Furet : dès les origines, dans ses germes eux-mêmes, la Révolution de 1789, triomphante en 1793, portait en elle-même le Totalitarisme : l'expression de république totale, la "rétotale", dont parle Sieyès, le dit bien...

    De par son idéologie, la République qui en est issue n'est donc pas une République à proprement parler, une Res Publica, comme elle l'est en Suisse, en Allemagne... mais une République idéologique; ce qui est, bien sûr tout autre chose, et radicalement différent.

    De même, la démocratie dont elle se réclame n'est-elle pas non plus une démocratie au sens habituel et étymologique du terme, mais, là aussi, une démocratie idéologique; ce qui est, là aussi, tout à fait autre chose, et radicalement différent.

    C'est le mérite de cette étude d'Yvan Blot que de le démontrer clairement, dans un texte concis et ramassé, donc très accessible, qui devrait ouvrir les yeux de celles et ceux qui se sont laissés abuser par les mots, et les ramener aux réalités, dépassant ainsi les mensonges et les faux mythes....  

    La conclusion d'Yvan Blot s'impose d'elle-même, elle est claire et limpide : La Suisse ou les États-Unis disposent d'une véritable République, d'une véritable Démocratie pour deux raisons : d'abord, parce qu'elles ne les considèrent que comme un mode de gouvernement parmi d'autres possibles; que comme un type de gestion des choses et des gens, parmi d'autres types possible. Ensuite, et surtout, parce que, dans ces deux pays, de très fortes Traditions nationales, historiques, religieuses sont vécues par les populations.

    La République française est d'une nature toute autre, puisqu'elle s'est, au contraire, construite sur le rejet, la négation, la lutte constante contre toutes les Traditions constitutives de la France. Parler d' "An I de la République" est très révélateur ! La République se veut la nouvelle religion, qui doit éradiquer l'ancienne et la remplacer, car elle porte en elle-même le tout (c'est pour cela qu'elle se croit, d'ailleurs, "exportable", et de là vient son messianisme...) : mais le mot "tout" est, précisément à la base du mot "totalitarisme"...

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    Alexandre Soljénitsyne, dans son Discours aux Lucs sur Boulogne, en 1993 devait déclarer :
     
    "La Révolution française s'est déroulée au nom d'un slogan intrinsèquement contradictoire et irréalisable : liberté, égalité, fraternité. Mais dans la vie sociale, liberté et égalité tendent à s'exclure mutuellement, sont antagoniques l'une de l'autre! La liberté détruit l'égalité sociale - c'est même là un des rôles de la liberté -, tandis que l'égalité restreint la liberté, car, autrement, on ne saurait y atteindre. Quant à la fraternité, elle n'est pas de leur famille. Ce n'est qu'un aventureux ajout au slogan et ce ne sont pas des dispositions sociales qui peuvent faire la véritable fraternité. Elle est d'ordre spirituel. Au surplus, à ce slogan ternaire, on ajoutait sur le ton de la menace : « ou la mort», ce qui en détruisait toute la signification"

    La Révolution française n'a pas créé la démocratie. L'a précédée la "révolution américaine" qui est moins une révolution qu'une guerre d'indépendance, et a instauré une démocratie sans recourir au bouleversement idéologique.

    Et que dire de la Suisse !

    Qu'est-ce alors que la Révolution française ? D'abord une Révolution idéologique de caractère anti-chrétien. Sa dimension religieuse lui a donné son pouvoir de fascination et son influence.

    Nous le montrerons en trois points :

    1. Une révolution largement anti-chrétienne ;

    2. Le génocide vendéen ;

    3. Le culte de l'État issu de la Révolution ;

    Et conclurons par une observation sur le rapport ontologique révolution /démocratie.

     

     

    I : UNE RÉVOLUTION LARGEMENT ANTI-CHRÉTIENNE 

     

    Selon François Furet, "la Révolution française est devenue la mère d'un événement réel" qui "a un nom : octobre 1917 et, plus généralement, Révolution russe". Dès 1920, Mathiez souligne la parenté entre les gouvernements montagnard (juin 93-juillet 94) et bolchévique - deux dictatures nées de la guerre civile et de la guerre étrangère, deux dictatures de classe opérant par la terreur, la réquisition, les taxes et se proposant, en dernier ressort, la transformation de l'humanité.

     

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     L'abbé Emmanuel-Joseph Sieyès, 3 mai 1748/20 juin 1836.

    La Liberté ? "Les députés savent désormais qu'un pouvoir plus oppressif que l'ancienne monarchie absolue peut régner en son nom." (Furet) Sieyès dit qu'il faut se méfier des idées de "Rétotale" (sic) qui remplacent la République !

     

           

    Dès le début, la Révolution française se veut "rupture totale avec le passé réel rejeté dans les ténèbres de la barbarie". Sieyès notamment parle d' "Ancien régime" dès l'été 1789. La monarchie "absolue" dispose que le souverain ne rend compte qu'à Dieu. Du coup, note Furet, "il a l'obligation de se conduire en souverain chrétien. De plus, il y a comme en Angleterre un corps de principes coutumiers : la foi catholique du souverain, le respect de la liberté et de la propriété des sujets, l'inaliénabilité du domaine royal. Au-dessus des lois mais soumis à des lois, le roi de France n'est pas un tyran. La monarchie française, état de droit, ne doit pas être confondue avec le despotisme, pouvoir sans frein d'un maître". La base de l'Ancien Régime est la religion, c'est elle qu'il faut abattre. Il y a dans la philosophie française des Lumières un élan anticlérical et anti-catholique sans équivalent dans la pensée européenne. Hume, athée, vit en paix avec les religions; Voltaire, déiste, fait la guerre à l'Église catholique. Mais le vrai moteur de la Révolution est ailleurs, dans la revendication égalitaire.  

     

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       Le 14 juillet 1789, on promène des têtes au bout des piques. François Furet l'affirme: dès cet épisode, la Terreur est en gestation, "la culture politique qui peut conduire à la Terreur est présente dans la révolution française dès l'été 1789", et la prise de la Bastille inaugure "le spectacle de sang, qui va être inséparable de tous les grands épisodes révolutionnaires".

     

           

    Le penseur majeur en est Sieyès, prêtre aigri. Son pamphlet, de 1788, l'Essai sur les Privilèges donne le "la" de ce qui, dès 1789, sera le ressort révolutionnaire, la haine de l'aristocratie. Sieyès attaque les privilèges au nom de la raison, de la science, fonde une société d'individus libres, la "nation". Dans Qu'est ce que le Tiers-État ? il livre "le grand secret de la Révolution, ce qui va constituer son ressort le plus profond, la haine de la noblesse". Moins penseur qu'homme de ressentiment, "en vidant la querelle de sa vie avec les gens bien nés, il a touché la passion la plus forte de l'opinion qui se retrouve en lui". Le fruit était mûr. Selon Furet, "entre mai et août 1789, tout l’Ancien Régime s'est effondrée... Les Français ont fait du rejet de leur passé national le principe de la Révolution. Une idée philosophique s'est incarnée dans l'histoire d'un peuple".

    La violence éclate dès le 14 juillet. Nul n'ignore la capitulation de la Bastille devant les canons pris aux Invalides, le gouverneur Launay, puis le prévôt des Marchands Flesselles assassinés, les premières têtes coupées fixées à des piques... Cette violence, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, votée le 26 août par l'Assemblée constituante, ne l'enraye pas. Mounier s'en inquiète et demande une déclaration compensatrice des "devoirs du citoyen" ; il craint l'anarchie. Si la déclaration américaine de 1776 est présente à tous les esprits, beaucoup mesurent l'abîme qui sépare la situation du vieux Royaume de celle des ex-colonies britanniques peuplées de petits propriétaires aux traditions responsables. La Déclaration de 1789, comme la déclaration américaine, énonce des droits naturels. Or, si, dans le précédent américain, ces droits (pour la plupart issus de la tradition de la Common Law anglaise) sont perçus comme précédant la société et en harmonie avec son développement, dans la France de 1789 l'accent est mis sur le "volontarisme politique" : la loi produite par la "raison souveraine" est placée en suprême garantie des lois. La porte est ouverte au constructivisme et à l'étatisme. 

     

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    François Furet : "Au-dessus des lois mais soumis à des lois, le roi de France n'est pas un tyran. La monarchie française, état de droit, ne doit pas être confondue avec le despotisme, pouvoir sans frein d'un maître..."

     

           

    S'ajoute, dès 1789, la rupture entre le nouveau régime et la religion traditionnelle. En dépit des Lumières et même si la démocratie naissante substitue "les droits de l'homme" au monde selon l'ordre divin, la rupture n'est pas délibérée. Si la religion est atteinte par la liquidation de l'Ancien régime, la révolution initialement n'a pas l'intention de substituer une nouvelle religion à l'ancienne. Mais "en déracinant l'Église catholique de la société" - le mot est de Furet -, en la privant sans indemnité de ses biens, la révolution a brutalement séparé démocratie française et tradition catholique. La mesure en scandalise plus d'un. Les choses ensuite vont vite. En février 1790, quatre mois après la mise à la disposition de la Nation des biens du clergé (pour rembourser l'abyssale dette nationale), l'évêque de Nancy veut faire reconnaître le catholicisme comme religion nationale : motion écartée, quand l'Assemblée adopte la constitution civile du clergé contestée par la majorité des ecclésiastiques. En avril 1791, Louis XVI est empêché de quitter Paris pour aller recevoir à Saint-Cloud la communion d'un prêtre de son choix. Philosophie de la liberté ? Furet : "Les hommes de la Révolution ont pensé la nation à partir de l'expulsion de l'aristocratie, étrangère à la communauté. Le conflit armé va superposer ennemi intérieur et ennemi extérieur. La philosophie des Lumières cosmopolite n'avait conquis qu'un public restreint....  Sous sa forme la plus démocratique, elle pénètre les masses populaires par un canal imprévu, le sentiment national". Par la synthèse d'un messianisme d'idées et de la passion nationale, la Révolution intègre les masses à l'État. La guerre voulue et déclarée par l'Assemblée au "roi de Bohême et de Hongrie", le 20 avril 1792, va démocratiser la gloire ! Le 10 août, le roi Louis est arrêté. Le 21 septembre, la Convention, élue au suffrage universel (seuls les militants révolutionnaires osent voter), proclame la République. Le pouvoir y sera toujours aux mains de minorités.

     

     

    II : À LA CONVENTION, UN DÉCRET RAPPORTÉ PAR BARÈRE

    ORDONNE LE GÉNOCIDE VENDÉEN...

     

     

    L’affaire de Vendée souligne la passion religieuse de la Révolution. Le ressort insurrectionnel y est religieux : les nobles ne paraissent qu'en acteurs tardifs; si le roi est invoqué, il est induit de l'appel à Dieu, à la tradition catholique. L'été 1793, la dictature du Comité de Salut Public est instaurée. Terreur et vertu sont à l'ordre du jour. Le gouvernement, par obsession idéologique, règne en faisant planer la peine de mort sur ses serviteurs comme sur tout citoyen. Le 1er août 1793, à la Convention, un décret rapporté par Barère ordonne de détruire la Vendée. Il sera appliqué à partir de janvier 1794.

    La guerre civile devient terreur organisée depuis Paris dans l'intention de détruire, outre les rebelles, population, fermes, cultures et autres "berceaux de brigands". La guillotine ne suffit plus; dès décembre 1793, Carrier a recouru aux noyades collectives. Les troupes républicaines, divisées en "colonnes infernales", ont mission de brûler sur leur chemin toute habitation et d'exterminer les populations. L'opération dure jusqu'en mai 1794. Barère déclare à la Convention : "Le Comité, d'après votre autorisation, a préparé des mesures qui tendent à exterminer cette race rebelle. L'humanité ne se plaindra pas, c'est faire son bien que d'extirper le mal" ; et Turreau, commandant en chef de l'Armée de l'Ouest: "Je vous donne l'ordre de livrer aux flammes tout ce qui est susceptible d'être brûlé et de passer au fil de l'épée tout ce que vous rencontrerez d'habitants".

    Un camp d'extermination est créé à Noirmoutier, un atelier de tannage de peau humaine à Pont-de-Cé. Pierre Chaunu a observé "Si nous n'avons jamais eu d'ordre écrit de Hitler concernant le génocide juif, nous possédons ceux de Barère et de Carnot relatifs à la Vendée". Un article L 211 -1 de notre Code pénal le stipule : "Constitue un génocide le fait en exécution d'un plan concerté tendant à la destruction partielle ou totale d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux..., de commettre l'un des actes suivants : atteinte à l'intégrité physique ou psychique, etc..." Il y a eu un génocide vendéen. 

     

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    Le 14 août 1793, dans son Rapport à la commission extraordinaire, Saint Just écrit : "...on tanne à Meudon la peau humaine. La peau qui provient d'hommes est d'une consistance et d'une bonté supérieure à celle des chamois. Celle des sujets féminins est plus souple, mais elle présente moins de solidité..."

    Gustave Thibon aimait à rappeler ce mot de Frédéric II  à Voltaire :
    "Nous avons connu, mon cher Voltaire, le fanatisme de la Religion; un jour, peut-être, connaîtrons-nous celui de la Raison, et ce sera bien pire..." 

     

           

    La terreur n'est pas liée à la situation militaire qui s'est redressée, ni aux pressions populaires. Selon Furet, "la Révolution française ne pense les résistances réelles ou imaginaires qui lui sont opposées que sous l'angle d'un gigantesque et permanent complot qu'elle doit briser sans cesse". C'est pourquoi "la Terreur est ce régime où les hommes au pouvoir désignent les exclus pour épurer le corps de la nation. Les paysans vendéens ont eu leur tour, Danton attend le sien".

    Ce constat ne signifie pas qu'il n'y a pas de différence entre 1789 et 1793, mais la culture politique qui conduit à la terreur existe dans la Révolution française dès l'été 1789. En même temps, la déchristianisation se déchaîne, anarchique. Voyez le journal d'Hébert, Le Père Duchesne, et des représentants en mission, comme Fouché à Nevers, mènent une campagne d'extirpation du culte catholique, saisi comme pratique liée à la malédiction de l'Ancien Régime. La Commune de Paris s'en mêle avec ses mascarades antireligieuses, la fermeture des églises. Un anticléricalisme populaire urbain trouve dans la Révolution un culte de substitution et la majorité de la Convention qui adopte le calendrier républicain est antireligieuse.

    Au printemps 1794, la Terreur s'institutionnalise : le décret du 27 germinal (16 avril) centralise la justice à Paris; la loi du 22 prairial (10 juin) supprime l'instruction, fonde l'accusation sur la seule dénonciation, enlève à l'accusé l'assistance d'un avocat et autorise les juges à ne pas entendre de témoins. Robespierre soutient le texte. "Cette sévérité n'est redoutable que pour les conspirateurs, les ennemis de la Liberté !" La Liberté reste fondement idéologique, mais la répression s'emballe : 1.500 exécutions du 10 juin à la chute de Robespierre, le 9 Thermidor, fin juillet. Robespierre arrêté, guillotiné, on compte parmi les vainqueurs du jour, Carrier, Collot d'Herbois, Barère.

    Les règlements de compte se succèdent au sommet de l'État impuissant, le personnel ne change pas. La Liberté ? "Les députés savent désormais qu'un pouvoir plus oppressif que l'ancienne monarchie absolue peut régner en son nom." (Furet) Sieyès dit qu'il faut se méfier des idées de "Rétotale" (sic) qui remplacent la République ! Bonaparte remettra de l'ordre, en 1799, déclarera devant le Conseil d'État: "Nous avons fini le roman de la révolution; il faut en commencer l'histoire, ne voir que ce qu'il y a de réel et de possible dans l'application des principes et non ce qu'il y a de spéculatif et d'hypothétique". Propriété, famille, ordre, religion. 

     

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    Pierre Chaunu : "Si nous n'avons jamais eu d'ordre écrit de Hitler concernant le génocide juif, nous possédons ceux de Barère et de Carnot relatifs à la Vendée".

     

  • Pourquoi le 6 février 1934 a été stérile : l'analyse de Maurice PUJO

    SPECIAL FEVRIER copie.jpgPourquoi les manifestations de janvier et février 1934, dont celle, tragique, du 6 février, n’ont pas débouché sur ce changement de régime, pour lequel l’Action française s’était toujours battue ? Maurice Pujo, après avoir conduit toute la campagne de l’Action française sur l’affaire Stavisky et dirigé l’action des camelots du Roi, en a donné l’explication en termes simples * : sans une Action française suffisamment forte et reconnue tant sur le plan de la pensée politique que de la conduite de l’action proprement dite, l'union des patriotes est stérile. Et la leçon vaut pour aujourd’hui.

    À force de le répéter, les gens du Front populaire ont fini par croire que le Six Février était le résultat d’une terrible conjuration tramée de toutes pièces par d’affreux "fascistes" contre les institutions républicaines.

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     Rien ne correspond moins à la réalité. Le 6 Février a été, à son origine, le sursaut national le plus spontané, le plus pur d’arrière-pensées. Il a été la révolte de l’honnêteté et de l’honneur français contre un scandale qui était une des hontes naturelles et cachées du régime : le pillage de l’épargne sans défense avec la complicité des gouvernants qui en ont la garde. 

     

    Sans doute, ce scandale a été mis en lumière, développé, "exploité", si l’on veut, par des patriotes conscients qui étaient les hommes de l’Action française. Là-dessus, M. Bonnevay, président de la Commission du Six Février, ne s’est pas trompé lorsqu’il nous a désignés comme les responsables de la mobilisation de l’opinion et de la rue.

    C’est nous qui avons publié les deux fameuses lettres Dalimier qui avaient été, aux mains de Stavisky, les instruments de l’escroquerie. C’est nous qui, par nos premières manifestations, avons chassé du ministère ce Dalimier qui se cramponnait. C’est nous qui, pendant trois semaines, encadrant tous les patriotes accourus à nos appels, avons fait à dix reprises le siège du Palais-Bourbon. C’est nous qui, par cette pression sur le gouvernement et les parlementaires, avons arraché chaque progrès de l’enquête, empêché chaque tentative d’étouffement. C’est nous aussi qui avons publié la preuve de la corruption d’un autre ministre, Raynaldi, et c’est nous qui, en rassemblant des dizaines de milliers de patriotes, le 27 janvier, au centre de Paris, avons chassé le ministère Chautemps qui cherchait à se maintenir [...]

    Tenter le coup ?

    Dira-t-on que nous envisagions le renversement du régime ? Eh ! nous ne cessons jamais de l’envisager ! Nous avons, dès nos débuts, proclamé que nous formions une conspiration permanente pour la destruction de la République, cause organique de nos maux, et pour la restauration de la monarchie, qui seule pourra les guérir.

    Mais, en menant la chasse aux prévaricateurs complices de Stavisky, nous n’avions pas visé, de façon préconçue, cet heureux événement. Il y avait des services immédiats à rendre à la France ; nous les lui rendions. Si, au terme de cette crise, la restauration de la Monarchie pouvait être tentée, nous n’en manquerions certes pas l’occasion. C’est seulement un fait qu’il n’y a pas eu d’occasion parce que les conditions nécessaires ne se sont pas trouvées réunies.

    C’est ce que nous devons répondre à ceux qui, nous faisant le reproche inverse de celui de M. Bonnevay, estiment que nous aurions dû "tenter le coup". Il y avait sans doute – ce qui est important – un malaise incontestable qui, au-delà des hommes au pouvoir, était de nature à faire incriminer le régime. Il y avait même, à quelque degré, dans l’esprit public, un certain état d’acceptation éventuelle d’un changement. Il y avait aussi l’inorganisation relative et le sommeil des éléments actifs chez l’adversaire socialiste et communiste. Mais ces conditions favorables, en quelque sorte négatives, ne pouvaient suppléer à l’absence de conditions positives indispensables pour avoir raison de cette chose solide par elle-même qu’est l’armature d’un régime resté maître de son administration, de sa police et de son armée. Et il faut un simplisme bien naïf pour s’imaginer qu’en dehors des jours de grande catastrophe où les assises de l’État sont ébranlées, comme au lendemain de Sedan, le succès peut dépendre d’un barrage rompu...

    Pourquoi Monk n’a pas marché

    Ce qui a manqué au Six Février pour aboutir à quelque chose de plus substantiel que des résultats "moraux", c’est – disons-le tout net – l’intervention de ce personnage que Charles Maurras a pris dans l’Histoire pour l’élever à la hauteur d’un type et d’une fonction, l’intervention de Monk. Un Monk civil ou militaire qui, du sein du pays légal, étant en mesure de donner des ordres à la troupe ou à la police, eût tendu la main à la révolte du pays réel et favorisé son effort. Un Monk assez puissant non seulement pour ouvrir les barrages de police, aussi pour assurer immédiatement le fonctionnement des services publics et parer à la grève générale du lendemain.

    La question de ce qu’on a appelé à tort l’échec du Six Février se ramène à celle-ci : pourquoi Monk n’a-t-il pas marché ?

    Répondra-t-on qu’il n’a pas marché parce qu’aucun Monk n’existait ? Il est certain que personne ne s’était désigné pour ce rôle. Mais c’est essentiellement un domaine où le besoin et la fonction créent l’organe. Il y aurait eu un Monk et même plusieurs si les circonstances avaient été telles qu’elles pussent lui donner confiance.

    Certains s’imaginent qu’ils décideront Monk par la seule vertu de leurs bonnes relations avec lui et dans quelques conciliabules de salon. Singulière chimère ! Monk éprouve très vivement le sentiment de sa responsabilité. Ce n’est qu’à bon escient qu’il acceptera les risques à courir pour lui-même et pour le pays et il a besoin de voir clairement les suites de son entreprise. Devant apporter une force matérielle qui est tout de même composée d’hommes, il a besoin de pouvoir compter, pour le soutenir, sur une force morale assez puissante. Il ne réclame pas de civils armés – c’est là l’erreur de la Cagoule – qui doubleraient inutilement et gêneraient plutôt les soldats, mais il veut trouver autour de lui, lorsqu’il descendra dans la rue, une "opinion" claire, forte et unie.

    Et cela n’existait pas au Six Février. Si les manifestants étaient unis par le sentiment patriotique et le mépris de la pourriture politicienne, ils n’avaient pas d’idée commune sur le régime qui conviendrait à la France pour la faire vivre "dans l’honneur et la propreté". De plus, les rivalités de groupes et les compétitions des chefs empêchaient même que, séparés dans la doctrine, ils pussent s’unir dans l’action.

    Depuis le début de l’affaire Stavisky jusqu’au 27 janvier où notre manifestation des grands boulevards renversa le ministère Chautemps, il y avait eu, dans l’action, une direction unique : celle de l’Action française. C’est à ses mobilisations que l’on répondait ; c’est à ses consignes que l’on obéissait. (On lui obéit même le jour où, en raison de la pluie et pour épargner un service plus pénible à la police, nous renonçâmes à la manifestation) Mais, à partir du 27 janvier, devant les résultats politiques obtenus et ceux qui s’annonçaient, les ambitions s’éveillèrent, et les groupements nationaux préparèrent jalousement, chacun de son côté, leur participation à une action dont ils comptaient se réserver le bénéfice. Cette agitation et cette division ne firent que croître, après la démission de M. Chiappe, préfet de police, survenue le 3 février.

    Aucune entente

    La Commission d’enquête a cherché un complot du Six Février. Mais il n’y avait pas un complot pour la bonne raison qu’il y en avait cinq ou six qui s’excluaient, se contrariaient et se cachaient les uns des autres. Il y en avait dans tous les coins et sur les canapés de tous les salons. On peut se rendre compte qu’il n’y avait aucune entente entre les groupes divers en examinant les rendez-vous qu’ils avaient donné pour la soirée historique, et les dispositions qu’ils avaient prises, sans parler des manœuvres qu’ils firent et dont à peu près aucune n’était d’ailleurs préméditée.

    Si, par impossible, les patriotes l’avaient emporté dans de telles conditions, s’ils avaient chassé le gouvernement et le parlement, le désaccord entre eux n’aurait pas manqué d’apparaître presque aussitôt et les gauches vaincues n’auraient pas tardé à reprendre le pouvoir.

    C’est à quoi le Monk inconnu, le Monk en puissance, devait songer. C’est pourquoi il s’est abstenu d’une intervention qui aurait été stérile. C’est pourquoi la journée du Six Février n’a pas donné de plus grands résultats.

    Maurice Pujo

     

    * étude (extraits) publiée par la Revue Universelle du 15 juillet 1938.

     

  • Nuit, Silence et Amulettes… par Champsaur

    L’auteur a passé une quinzaine d’années dans les Services Spéciaux français, dans des activités opérationnelles, SDECE nom changé en DGSE. C’est donc perplexes et éberlués que nous sommes nombreux à avoir observé le déluge sur des activités de la NSA, sigle ne signifiant nullement Nuit, Silence et Amulettes, mais National Security Agency.

     

    Ce département de la communauté du renseignement américain est très connu des professionnels ainsi que de la littérature spécialisée, ce qui représente au niveau international beaucoup de monde. Même s’il ne l’est pas du grand public …

     

    Et donc cette vague d’étonnements, de surprises feintes, d’indignations théâtrales, d’affabulations accusatrices ont certes occupé des pages et des heures de media, mais sans que l’on perçoive le but de cette agitation, qui de toute évidence ne modifiera pas l’utilisation intensive de moyens techniques sophistiqués pour la promotion des intérêts des États Unis d’Amérique. 

    nsa.jpg

    A Fort Meade, au plus près des oreilles de la NSA... :

    http://www.liberation.fr/monde/2013/06/26/a-fort-meade-au-plus-pres-des-oreilles-de-la-nsa_914019

    Les Services Spéciaux ont toujours cajolé des devises ronflantes. La DGSE affiche un Nox generat lumen, ou Ad augusta per angusta. La NSA américaine « They serve in silence ».

    Il est très cocasse de lire ou d’écouter des anciens des Services français, ayant vaguement tenu des postes de responsabilités, venir doctement offrir des explications, alors qu’ils furent plutôt inexistants lorsqu’ils étaient en fonction…

     

     

    Un peu de vocabulaire

    Une série de synonymes : codage et code secret, chiffrement et chiffre, encryptement, cryptologie, les mêmes mots pour désigner l’action rendant illisible un message. Une fonction d’un service d’écoute est de « décrypter » le signal intercepté. C’est donc la course entre l’épée et le bouclier. Il est important de souligner que la France possède depuis l’origine de cette fonction (vers 1900) les meilleurs spécialistes des codes secrets, spécifiquement en la personne des mathématiciens des laboratoires de mathématiques de Normale Sup et de l’X, tel Jacques Stern (ci dessous, ndlr).  

    jacques stern.jpg

    http://www2.cnrs.fr/presse/communique/947.htm

     

     

    Classifié : c’est la mention attribuée à une information qui décide de son niveau de confidentialité et du droit à son accès, protégé par la Loi. Les échelles de classification sont variables selon les pays. Peu d’industries en sont pourvues.

    Les natures du signal à transmettre, il n’y en a que trois : voix, texte ou image.

    Les supports : il n’y en a que deux, le fil (aujourd’hui la fibre optique), et les ondes, transitant majoritairement par satellites.

    Il n’y a que trois manières de récupérer du renseignement, ce que Richard Nixon appelait les Arts de la nuit :

    * Par source humaine (donc un agent qui trahit; un de nos maîtres nous enseignait que recruter un agent, c’est fabriquer un traitre);

    * Par intrusion clandestine dans des locaux;

    *Enfin par moyens techniques, autrement appelés interceptions.

    En dernière analyse, il n’y en a pas d’autres.

     

     

    Un peu d’histoire

    La NSA américaine fut créée formellement en Novembre 1952, en agrégeant plusieurs services d’écoutes qui fonctionnaient depuis l’entrée en guerre des États-Unis.

    (lien : http://fr.wikipedia.org/wiki/National_Security_Agency)

    JULIUS ET ETHEL ROSENBERG.jpgAvec le Projet Manhattan (fabrication de l’arme atomique), la nécessité apparut de renforcer la protection du secret contre l’espionnage soviétique dès le début des recherches (1942). Un des résultats le plus connu fut l’arrestation et l’exécution des espions soviétiques Julius et Ethel Rosenberg (photo, ndlr), les États Unis préférant essuyer une violente campagne des relais de Moscou plutôt que de dévoiler la source de leurs informations (en l’espèce les interceptions radio).

    Notons que la NSA n’a jamais réellement caché la puissance de ses moyens et son efficacité. L’action la plus spectaculaire vers le public ayant été en Juillet 1995 la déclassification de quelques archives (autour de 2.900 télégrammes soviétiques du KGB vers des illégaux aux USA, une goutte d’eau) de l’opération Venona, avec parfois des pseudonymes transparents (confirmation que Pierre COT était un agent soviétique), et d’autres conservant leur mystère (un ou une collaboratrice immédiate de De Gaulle à Alger en 1943, source soviétique, et identité connue des seuls Américains);

    (lien : http://fr.wikipedia.org/wiki/Projet_Venona)

    Au cours des cinquante dernières années la proportion de renseignements obtenus par moyen techniques a considérablement augmenté, représentant par exemple 90% de la production de la DGSE. La raison en est la facilité, moins dangereux que les deux autres procédés. De surcroit intercepter des ondes ne relève pas de l’atteinte à la vie privée. D’où la considérable montée en puissance de la NSA. Qui se chiffre par son budget. On répertorie seize services de renseignement américains pour un budget de 53 milliards $ (soit presqu’exactement la totalité du budget de la défense français; à noter que l’activiste américain Steve Aftergood avance le montant de 75 milliards $ …). Dans cette enveloppe la NSA pèse 11 milliards $, ce qui est absolument considérable (soulignons la disproportion avec le budget total de la DGSE soit 780 millions $, plus 73 millions $ de fonds spéciaux)

    La France est suspendue aux Services américains pour son propre renseignement, autant qu’elle est une cible.

    La lutte conjames woosley.jpgtre le terrorisme avancé par Washington, est un prétexte éventé depuis longtemps. Les quelques affaires dites françaises, proposées au public par nos Services dans ce domaine (DCRI) viennent de chez eux. Nous savons depuis bien longtemps que la mission de la NSA est le renseignement politique et économique dans le seul intérêt des États Unis d’Amérique, avec une surveillance tout azimut. En Mars 2000 le patron de la CIA, James Woosley (photo, ndlr), déclarait dans le Wall Street Journal que le renseignement américain espionnait tous les concurrents pour des raisons économiques.

    Une bonne synthèse du bond technologique accompli ces dernières années par la NSA est toute entière dans la revue « Wired » de Mars 2012, détaillant la construction d’un gigantesque centre de stockage et de traitement dans l’Utah :

    http://www.wired.com/threatlevel/2012/03/ff_nsadatacenter/all/ 

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Utah_Data_Center

     

    Il faut être très clair qu’il n’y a aucune possibilité de légiférer pour contrôler cette activité qui n’empiète qu’à la marge sur la vie privée. Un appel via un téléphone portable suit un circuit très complexe dont une branche est par nature en transmission radio, donc ouvertement accessible.

    Cette montée en puissance considérable de la NSA va de pair avec le développement des « data centers » où la France et l’Europe ont un retard dommageable, voire auront d’énormes difficultés à en retrouver la maitrise, si jamais…

     

    La réponse de la France à cette situation est médiocre et relève du coup de menton. Ce fut à partir de 2003 une agitation pusillanime autour du concept foireux de « l’intelligence économique », et du « patriotisme économique », beaucoup de salive, beaucoup de papiers, beaucoup de temps perdu. Alors que les Américains ont créé les structures simples pour distribuer au mieux le produit du renseignement industriel et commercial vers leur tissu économique, la France n’a cessé de se pénaliser en s’interdisant de fournir la maigre moisson de ses Services à ses entreprises. Les plus acharnés à organiser cette frontière sectaire entre l’activité économique privée et l’État, n’ont pas eu la décence de se taire depuis que les media glosent abondamment sur les activités de la NSA. Sans le talent de John Le Carré.

    Les cris de chat huant poussés par certaines autorités de la France peuvent laisser penser que les fonctionnaires ne lisent pas les journaux ! Alors qu’est public le budget de la défense américain qui est égal à la somme des budgets de la défense de tous les autres pays du monde.

    Rien n’est confidentiel dans ce qui est écrit ici et la littérature professionnelle à la disposition du public est particulièrement copieuse.

  • Alain de Benoist juge des suites de la Manif pour tous

    Boulevard Voltaire vient de publier quelques réflexions d’Alain de Benoist sur les suites des Manifs pour tous. Elles ont provoqué réactions et polémiques.

     

    En plusieurs points, pourtant, elles nous semblent poser de justes questions. C’est pourquoi nous les publions.

     

    Alain de Benoist a, sur les participants des Manifs pour tous, des mots qui peuvent blesser. Son regard sur les Chrétiens et le christianisme en général y est sans-doute pour quelque chose. Ces mots, nous ne les faisons pas nôtres. Il n'est pas commun - Alain de Benoist ne l'ignore pas - d'être capable de mobilier des foules voisines du million pour une cause quelconque ! Et il n'est pas question de nier la réalité de leurs efforts, de contester leur mérite pour les avoir accomplis.

     

    Mais que dit-il d’important ? Que dit Alain de Benoist que les gens d’Action française devraient être les premiers à se dire et faire savoir ? Tout simplement que faute d’une pensée politique ou sociale globale, une pensée sur la Cité, les Manifs pour tous n’auront pas les suites, les résultats que l’on pourrait en attendre. « On ne fait pas une révolution, dit-il, quand on n’a ni programme ni conception du monde à proposer » : il a raison. 

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    Des bonnets phrygiens, ce n'était vraiment pas ce qu'il fallait ...

    Les gens d’Action française, les royalistes, ont eu raison de participer aux Manifs pour tous, y compris à leur encadrement, et de le faire avec discrétion. Mais, parallèlement, ils doivent, nous devons tous, savoir et faire savoir qu’ils n’ont pas pour seule ou principale vocation d’en être les « supplétifs ». Cette « pensée globale » dont nous parlons, qui, en effet, a manqué aux Manifs pour tous, cette pensée « alter révolutionnaire », politique et métapolitique, qui manque à tous les partis politiques, l’Action française la propose depuis un certain temps déjà... La porter plus haut, plus fort, plus sérieusement qu’elle ne le fait aujourd’hui, ce devrait être son - notre - objectif premier.

     

    Pour le reste, Alain de Benoist parle en militant expérimenté, d’un temps où militer était un engagement de tous les jours, … de toutes les nuits, et où le militantisme englobait, cumulait toutes les formes de l’action, les plus humbles et toutes les autres...

     

    Son militantisme - ou plutôt l'objet de son militantisme - était, est, différent du nôtre. Le nôtre ce devrait être, tout simplement, de refaire une grande et puissante Action française.  

    On ne fait pas la révolution avec des gens bien élevés !

    Le 15 juillet 2013

    Alain de Benoist

    Intellectuel, philosophe et politologue.


    Entretien réalisé par Nicolas Gauthier

    Indubitablement, la Manif pour tous a suscité de nouvelles formes de protestation, à base de réseaux sociaux, à l’instar d’autres « printemps » ou de « révoltes » tout aussi informelles, tels les « Indignés » ou les « Occupy Wall Street ». Quelles leçons en tirer ?

    La Manif pour tous a été un grand succès et un incontestable échec. Le succès d’abord : ce n’est pas tous les jours que l’on parvient à mobiliser un million de personnes des deux sexes et de tous âges. Personnellement, j’aurais préféré en voir dix millions protester contre la dictature des marchés financiers et le crétinisme de la marchandise (on peut toujours rêver), mais ce n’est là qu’une opinion personnelle. D’une façon générale, on doit toujours soutenir le peuple quand il descend dans la rue pour une raison ou une autre (le mariage homo à Paris, l’augmentation du ticket de bus à São Paulo, un projet de destruction d’un espace vert à Istanbul), que ce soit en France, au Brésil, en Turquie, en Égypte ou ailleurs. C’est le plus sérieux indice du ras-le-bol. Un autre aspect positif, c’est l’apparition, en marge des manifestations, d’un certain nombre de modes de protestation originaux et inédits (les Hommen, les Veilleurs debout, etc.), qui ne se ramènent pas à une simple affaire de réseaux sociaux.

    L’échec n’en est pas moins évident : la Manif pour tous n’a tout simplement pas obtenu ce qu’elle voulait, à savoir empêcher l’adoption de la loi autorisant le mariage gay. Comme cet échec était prévisible, quoi qu’en aient pu dire les naïfs, une stratégie alternative s’imposait. On n’en a pas vu l’ombre. Tout ce à quoi l’on a assisté, c’est au sommet à des crêpages de chignons et à la base des proclamations du genre « On ne lâchera rien ». Mais lâcher quoi ? Quand on n’a rien obtenu, il n’y a rien à lâcher. Alors, on harcèle, on houspille, on fait siffler les oreilles du chef de l’État le 14 juillet, autant dire pas grand-chose. On rêve d’un « sursaut national » (hop, un sursaut !), comme on le fait depuis plus d’un siècle. Pour le « Printemps français », on repassera. La droite, de ce point de vue, ne changera jamais. Plus réactive que réflexive, elle ne sait marcher qu’à l’enthousiasme ou à l’indignation. Déterminer une stratégie révolutionnaire est au-delà de ses forces.

    Qu’est-ce qui vous frappe le plus dans la nébuleuse anti mariage pour tous ? Son homogénéité sociale ou ethnique ? Son discours politique attrape-tout ? Ou sa réticence à renverser la table ? Bref, avons-nous affaire à de véritables révolutionnaires ?

    À des contre-révolutionnaires, plutôt. C’est-à-dire à des gens qui laissent régulièrement passer les trains pour ne pas faire la « politique du pire ». La plus grande erreur des organisateurs de la Manif pour tous a été d’accepter docilement de ne pas envahir les Champs-Élysées quand un million de personnes étaient prêtes à le faire. Débordant la simple réponse aux antifa(mille), la Manif pour tous aurait alors pu prendre une véritable dimension insurrectionnelle. Ce qui aurait au moins empêché la police de truquer les images et les chiffres. Mais on ne fait pas la révolution avec la « France tranquille » des pousseurs de poussettes et des gens bien élevés. On ne fait pas une révolution quand on n’a ni programme ni conception du monde à proposer. C’est pourquoi, plutôt que de chercher à renverser le pouvoir, on est allé chercher le soutien de Raffarin et de Copé. Dès lors, la messe était dite. La Manif pour tous a éveillé des consciences, elle n’a pas structuré les esprits.

    Pas de semblant de révolution sans quelques martyrs. Là, ce fut Nicolas Bernard-Buss. Sa peine de prison était évidemment disproportionnée, mais l’émotion de ses défenseurs ne l’était-elle pas un peu également ? Comme si le vide du pouvoir allait de pair avec le flou des revendications des manifestants ?

    On a bien entendu eu raison de protester contre l’incarcération du jeune Nicolas, et contre la généralisation du deux poids, deux mesures. Le mécanisme est d’ailleurs bien rodé. Il suffit de traiter les gêneurs de « fascistes » pour permettre la mise en œuvre du programme, que Laurent Joffrin proposait en toute bonne conscience dans Le Nouvel Observateur du 13 juin dernier, de « réserver aux fascistes (…) la vigilance quand ils se taisent, la dénonciation quand ils parlent, la prison quand ils agissent ». Vigilance-dénonciation-prison : un triptyque à retenir. À ce compte-là, quand Mélenchon traite François Hollande de « capitaine de pédalo », on finira par y voir des allusions homophobes ! Cela dit, on peut protester énergiquement sans tomber dans le délire ou la paranoïa. Dire que Nicolas sera « traumatisé à vie » pour avoir fait trois semaines de taule n’est pas flatteur pour lui : je l’espère quand même capable d’en voir d’autres ! Je reçois régulièrement des courriels affirmant que nous vivons aujourd’hui quasiment dans un régime totalitaire soviétique, ce qui est un peu ridicule (tout courriel comportant des séries de points d’exclamation va chez moi immédiatement à la poubelle). Certains devraient se souvenir que, dans bien des pays, quand on est gardé à vue, on a aussi de bonnes chances d’être tué, torturé ou violé. On n’en est pas encore tout à fait là.

    Beaucoup de participants de la Manif pour tous, à commencer par la petite bourgeoisie catholique (la « Génération JMJ ») qui en constituait les plus gros bataillons, manifestaient pour la première fois. Il leur en est resté le souvenir d’une excitation qui va de pair avec une certaine ingénuité. Ils déclarent fièrement qu’ils ont été « gazés », comme s’ils avaient eu à respirer du gaz sarin ou du Zyklon B. Pour ma part, j’ai dû prendre dans ma vie une bonne trentaine de giclées de lacrymogène dans la figure sans y voir autre chose que la conséquence logique de ma présence dans une manifestation ! Au moins ces néophytes ont-ils découvert que les gentils policiers « qui sont là pour nous protéger » savent aussi se servir de la matraque. Si cela leur a permis de comprendre que lorsqu’on s’attaque à l’ordre en place (qui n’est le plus souvent qu’un désordre établi), les forces de l’ordre sont des forces ennemies, ce sera toujours cela de pris.

  • Un impôt peut-il être juste ? par François Reloujac*

    (Continuation de La Suite économique de François Reloujac)

     

    IMPOTS JUSTES.JPGChaque fois qu’un Gouvernement, qu’il soit de droite ou de gauche, se propose de créer un nouvel impôt ou d’en augmenter un ancien, il le prétend toujours plus « juste ». Tout accroissement de la pression fiscale est désormais décidé au nom de la « justice fiscale ». Or si un tel discours satisfait une partie de la population – essentiellement celle qui échappe à cette augmentation –, il exaspère toujours un peu plus l’autre partie – celle qui supporte ce surcroît de charge

    Si la compréhension du terme « impôt » ne pose pas de grosse difficulté, chacun ayant conscience qu’il s’agit de la charge financière imposée par l’Etat afin de lui permettre de financer ses propres besoins, le terme « juste » est quant à lui ambigu. D’un point de vue sémantique, cet adjectif vient du latin « justus » qui signifie « conforme au droit », « équitable ». Dès lors, on peut dire qu’un impôt régulièrement consenti par le pouvoir législatif est nécessairement juste… sauf à démontrer que la loi régulièrement votée est elle-même injuste !


     

    L’impôt juste résulte d’une loi juste

     

    Une loi régulièrement votée est juste si elle répond à trois conditions : la première, c’est que le législateur n’excède pas ses pouvoirs ; la deuxième, c’est qu’elle ait exclusivement pour but la recherche du bien commun ; la troisième, c’est que les contraintes qu’elle fait peser sur les citoyens soient « ajustées ». Compte tenu des termes mêmes de la Constitution française, il apparaît qu’un impôt régulièrement voté n’excède que rarement les pouvoirs du législateur qui sont immenses en ce domaine. Le Conseil constitutionnel est là pour y veiller. A l’inverse, il n’existe pas réellement en France d’instance chargée de veiller au respect des deux autres conditions.

     

    Dans le monde actuel, la notion de bien commun est sujette à discussion. Dans son encyclique Mater et magistra, le Bienheureux Jean XXIII la définissait comme « l’ensemble des conditions sociales permettant à la personne d’atteindre mieux et plus facilement son plein épanouissement » (§ 65). Dans un livre récent (Doctrine sociale de l’Eglise et bien commun, Beauchesne, 2010), Monseigneur Minnerath ajoute que c’est ce qui « permet aux hommes de tendre vers le bonheur ». Toute loi qui répondrait à un simple désir de puissance du législateur, qui viserait à promouvoir un simple égalitarisme entre les habitants ou qui aurait une visée purement démagogique, ne peut donc être foncièrement juste. Mais qu’est-ce que le plein épanouissement de la personne pour reprendre les mots de Jean XXIII ? Pour y voir clair, prenons un exemple. Toute personne estimant que la vie est le premier des droits de l’homme ne peut accepter l’idée que la liberté d’avortement participe à l’épanouissement de la personne. De ce fait, la partie de l’impôt servant à rendre gratuite cette opération est… « injuste ». Au regard de ces critères, une bonne partie des impôts qui pèsent sur les citoyens français peut être considérée comme foncièrement « injuste ».


     

    La répartition de la charge doit être conforme à la justice


     

    Quant au critère relatif à la répartition de la charge, il convient de s’interroger : la « justice » doit-elle conduire à une répartition égalitaire (comme dans le cas de la TVA) ou à une répartition proportionnelle aux facultés contributives (comme dans celui de l’impôt sur le revenu) ? En pratique, lorsque l’Etat a de gros besoins, la seule répartition égalitaire de la charge de l’impôt risque d’être insuffisante pour lui permettre de mener à bien ses missions ; elle peut également devenir insupportable pour une partie de la population. Il ne paraît donc pas anormal que l’Etat cherche à viser une répartition proportionnelle qui, d’ailleurs, peut être une façon de mettre en œuvre une certaine solidarité. Mais, pour que cette répartition inégalitaire soit « juste », encore faut-il qu’elle respecte trois conditions : que le montant de l’impôt soit ajusté aux missions de l’Etat, que la charge qu’il représente laisse à chacun des contributeurs la possibilité d’agir librement – c’est un aspect du principe de subsidiarité –, qu’il ne soit jamais confiscatoire.

     

    L’impôt doit être ajusté aux missions régaliennes de l’Etat (défense nationale, police, justice, diplomatie…). Tout impôt qui excède ce qui est nécessaire à la couverture de ces besoins est confiscatoire. Mais tout impôt insuffisant pour les couvrir transfère une charge sur les générations futures qui ne bénéficieront pas forcément de ces actions de l’Etat ! Aucune dépense de fonctionnement de l’Etat ne peut donc être financée par l’emprunt. Et toute dépense d’investissement financée par l’emprunt doit répondre à un souci de première nécessité (en cas de crise grave) ou à un objectif d’investissement utile à long terme. Sous prétexte qu’à certaines époques les contributeurs ont les moyens de participer à un effort particulier, il n’est pas pour autant permis à l’Etat d’accroître inutilement ses pouvoirs. Tout impôt qui permet à l’Etat de mener à bien des missions qui ne sont pas de son ressort est par nature injuste car il n’est qu’un abus de pouvoir.

     

    Toute répartition de l’impôt proportionnelle à l’importance des facultés contributives des citoyens doit être calculée au plus juste. Elle risque sinon de conduire à des situations de frustration dans la mesure où elle aurait pour effet d’empêcher les personnes en ayant les moyens – avant impôt – d’accomplir les tâches auxquelles elles tiennent, d’exercer leur solidarité vis-à-vis des plus faibles, d’entreprendre de nouvelles actions au service de la société. En un mot la répartition inégalitaire de la charge de l’impôt ne permet pas de priver qui que ce soit de sa liberté propre, laquelle est toujours un élément intrinsèque de son épanouissement.

     

    Poussons le raisonnement à l’extrême et examinons le cas de l’impôt confiscatoire, celui qui empêche telle ou telle partie de la population de gagner les sommes auxquelles elle a droit mais qui ne rapporte pas véritablement de ressources à l’Etat. Cet impôt est toujours « injuste ». Non seulement il porte atteinte à la liberté et décourage la création de richesse, mais il excite de plus la jalousie et désigne certaines catégories de la population à la vindicte des autres. Cet impôt n’est pas destiné à subvenir aux besoins légitimes de l’Etat. Il est un instrument révolutionnaire qui porte atteinte à la cohésion nationale.

     

    Souvenons-nous, enfin, que l’impôt est toujours une contrainte. Dès lors, s’il est un instrument au service de gouvernant, il n’est pas un moyen de gouverner. L’Etat a dans sa boîte divers outils : l’impôt n’en est qu’un parmi d’autres. C’est pourquoi le recours à l’impôt n’est légitime et l’impôt n’est « juste » que si l’objectif qu’il vise à obtenir ne peut pas être atteint par un autre moyen, moins douloureux.

     

     

     * Analyse économique parue dans le numéro 124 (décembre 2013) de Politique magazine

  • Réflexions sur ”liberté, égalité, fraternité”, à partir d'un texte de Dostoïevski, par Yvan Blot...

    • yvan blot,dostoievski         Yvan Blot nous a envoyé quelques réflexions, que nous publions ci-après : ("..J’ai pensé que ce texte de Dostoïevski vous intéresserait..."), Nous l'en remercions, et sommes, comme à chaque fois, très heureux de publier ses textes dans notre quotidien( rappel : le Site de Démocratie directe : http://www.democratiedirecte.fr/). 

           Il se base sur un extrait des "Frères Karamazov", tome 1 (pages 564 et suivantes) : 

           Dostoïevski, comme Kierkegaard, peut être compté parmi les fondateurs de la pensée existentielle et Nietzsche, Camus ou Heidegger ont notamment reconnu leur dette envers ce génie.  

            Dans « Les Frères Karamazov », il fait une critique impressionnante du monde moderne occidental. « Le monde a proclamé la liberté, ces derniers temps surtout, » déclare le staretz Zosima, « et nous, que voyons-nous dans ce qu’ils appellent la liberté ? Rien que de l’esclavage et du suicide ! Car le monde dit : tu as des besoins et donc satisfais les car tu as les mêmes droits que les hommes les plus riches et les plus notables. N’aie pas peur de les satisfaire, et même fais les croître. Voici la doctrine actuelle du monde. C’est en cela qu’ils voient la liberté. Et quel est le résultat de ce droit à multiplier les besoins ? Chez les plus riches, l’isolement et le suicide spirituel, et chez les pauvres, la jalousie et le meurtre, car les droits sont certes donnés mais les moyens de satisfaire ces besoins, eux, on ne les indique pas encore. (..) En comprenant la liberté comme une multiplication et une satisfaction rapide de leurs besoins, ils déforment leur nature, car ils font naître en eux une multitude de désirs absurdes et stupides, d’habitudes et de lubies des plus ineptes. Ils ne vivent que pour s’envier les uns les autres, pour satisfaire leur chair et leur vanité. »

            Dostoïevski montre ce qui est attesté par les phrénologues comme Mac Lean et ce qui avait été déjà vu par intuition chez Platon (le Philèbe notamment). Nous avons trois cerveaux : le cerveau reptilien, ou paléocortex (commun à nous et aux reptiles) qui guide l’agressivité, la faim ou l’instinct sexuel. C’est le cerveau instinctif que Platon compare à un dragon. Nous avons un cerveau affectif (limbique) commun avec les mammifères qui règle notre comportement affectif. Nous avons un cerveau néo cortex siège de l’intelligence abstraite. Lorsqu’on satisfait les besoins primaires, on accroit le poids relatif du cerveau reptilien. C’est le cas de la société moderne qui a vu depuis 1968  la criminalité quadrupler. Dostoïevski annonce aussi la révolution russe en disant que les pauvres sont frustrés par cette idéologie des droits, que leur énergie est bridée par l’alcoolisme mais que bientôt : « au lieu de vin, ils boiront du sang ». C’est ce qui s’est passé avec le Bolchevisme.

            Le staretz Zosima continue : « il n’est pas étonnant qu’au lieu de la liberté on soit tombé dans l’esclavage et qu’au lieu de servir la fraternité et l’union de l’humanité, on tombe au contraire dans l’isolement et dans la solitude (..) Voilà pourquoi s’éteignent de plus en plus dans le monde l’idée de servir l’humanité, celle de la fraternité (..) car comment abandonner ses habitudes, où donc ira ce prisonnier s’il est habitué à satisfaire ses besoins innombrables qu’il s’est inventés lui-même ? Réduit à un atome individuel, qu’ira-t-il faire du tout ? Et pour finir, plus les objets s’accumulent, plus la joie disparaît ». La fraternité reste abstraite et débouche en fait sur le refus de servir, l’absence d’amour héroïque. Le staretz oppose à cette vie de « divertissements » (Pascal) ou « esthétique » (Kierkegaard) la vie du moine qui apprend la maitrise de soi. Cela le rend libre de son ego et lui apporte la gaieté spirituelle. « Qui est capable de porter cette grande pensée (..) le richard solitaire ou cet homme libéré de la tyrannie des objets et des habitudes ?

            La Russie sera sauvée par la spiritualité des moines enracinés dans le peuple : « du peuple viendra le salut de la Russie. Le monastère russe de tout temps, a été avec le peuple. (..) le réformateur incroyant, chez nous en Russie, ne fera jamais rien, serait-il sincère dans son cœur et génial. Cela, souvenez-vous en . Le peuple verra l’athée et il le combattra, et in n’y aura plus qu’une Russie unie (c’est le nom du parti de Poutine !) et orthodoxe ! (..) Voilà notre œuvre monacale parce que ce peuple est théophore (porteur de Dieu ; idée de la sainte Russie).

            Pour Dostoïevski, « notre peuple croit encore à la justice, il reconnait Dieu » et il sait lorsqu’il agit mal. « C’est autre chose chez les grands. Eux ils veulent une société qui suive la science pour la justice par leur seule intelligence, mais sans le Christ. (..) et ils ont déjà proclamé que le crime n’existe pas, et le péché non plus. Ils ont raison de leur point de vue car si tu n’as pas de Dieu, qu’est-ce donc que le crime ?  A un autre chapitre du livre, Ivan Karamazov, le frère athée et intellectuel proclame que si Dieu n’existe pas, tout est permis ! Dostoïevski pense qu’en Europe, « le peuple se dresse contre les riches par la force, les meneurs du peuple le mènent partout vers le sang et lui enseignent que sa colère est juste. Mais leur colère est maudite parce qu’elle est cruelle ». Il annonce le totalitarisme communiste à venir.

            Pour l’auteur, le peuple est naturellement digne. « C’est quand je te respecte sans envie que je montre devant toi ma dignité humaine. En vérité, le peuple ne dit pas cela car il ne sait pas encore le dire. C’est ainsi qu’il agit (existentialisme) et qu’il reste suffisamment humble pour servir et aimer autrui. « Croyez le, cela finira ainsi : l’égalité, elle ne réside que dans la dignité spirituelle et cela, on ne le comprendra que chez nous, les Russes. (..) Nous gardons l’image du Christ, et elle luira comme un diamant précieux dans le monde entier ».

            Autrement dit, voici la leçon que nous donne Dostoïevski par la bouche du staretz Zosima :

    1/ La liberté proclamée en Occident débouche sur l’esclavage matérialiste car c’est un appel à libérer le dragon des instincts chaotique qui est en nous. Cet excès mènera l’Occident au suicide (refuis de l’héroïsme, donc du combat, incapacité à avoir des enfants par égoïsme)

    2/ L’égalité prônée conduira à des rivières de sang. Elle a comme moteur la jalousie et le meurtre et profite de la libération du reptile qui est en nous.

    3/ La fraternité suppose qu’il y ait des frères, or ce n’est pas le cas dans une société où tout le monde est prisonnier de son ego. Le refus de servir devient la norme.

     

            Ce monde d’esclaves jaloux et refusant de servir va à sa perte. Il sera sauvé par l’imitation du Christ qui est la valeur permanente du peuple russe, le peuple théophore de la Sainte Russie. Sur les armoiries de la Russie, on voit saint Georges terrassant le dragon : c’est bien le combat qu’il faut mener contre le dragon intérieur. Ce dragon a été libéré par les Lumières de l’Occident et le christianisme seul permettra de retrouver un ordre conforme à la nature humaine créée par Dieu.

            Quelles sont les valeurs universelles à opposer à la liberté des instincts, l’égalité jalouse et meurtrière et la fausse fraternité des individus refusant de servir quoi que ce soit sauf soi-même ?

            Face à la fausse liberté des droits illimités, le salut est dans la maîtrise de soi qui permet l’authenticité de la personnalité (alors que la liberté déforme la personnalité au profit de sa composante reptilienne)

            Face à l’égalité fondée sur la jalousie et qui conduit au meurtre, il faut opposer la vraie égalité qui est dans la dignité spirituelle de chacun.

            Face à la fausse fraternité, il faut opposer l’l’humilité de celui qui accepte de servir les autres, de les aimer, au besoin jusqu’à l’héroïsme (modèle christique).

            Maitrise de soi qui rend libre, dignité spirituelle pour chacun, humilité qui conduit à l’amour héroïque, telles sont les valeurs qui, selon Dostoïevski, sauveront l’humanité.  

  • L'Allemagne, l'euro et la solidarité européenne, par François Reloujac

    (Voici l'analyse financière de François Reloujac, parue dans le n° 99, de septembre, de Politique Magazine)

    En cette fin d’été, toute l’Europe a les yeux tournés vers Berlin, car même si c’est la chancelière allemande qui a fait le voyage de l’Elysée le 16 août dernier, c’est bien elle qui a dicté sa volonté au président Sarkozy.

     

    Le chef de l’État est un habile récupérateur qui présente facilement toute décision comme venant de lui. Mais, force est de constater qu’il se met souvent à la remorque d’un autre : tantôt Barack Obama, tantôt Angela Merkel. Et en ce qui concerne la politique économique européenne, c’est cette dernière qui donne le ton. Or, comme l’a expliqué Jacques Delors (l’Express, 17 août), elle est plus préoccupée par les variations de l’opinion publique allemande que par l’avenir de l’Europe.

     

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    Angela Merkel a proposé aux députés de son parti de soumettre au contrôle de la Cour de Justice de l'Union Européenne le respect par les Etats membres de la zone euro du pacte de stabilité et de croissance....

     

            Pourtant, la solution de la crise actuelle qui secoue l’euro passera obligatoirement par ce qui se décidera outre-Rhin. C’est aussi de ce même côté du fleuve qu’il faut, a minima, chercher les facteurs aggravants de cette crise. En imposant un euro fort – qui ne gênait pas leurs exportations chez leurs partenaires européens du fait que tous partagent la même monnaie – les Allemands ont poussé ces derniers à la ruine. Vis-à-vis de toutes les autres monnaies du monde, « l’euro est beaucoup trop cher, ce qui signifie que nos prix et nos salaires sont plus élevés que partout ailleurs dans le monde », constataient Gérard Lafay et Philippe Villin dans Le Monde du 25 août.

     

    L’italie contrôlée

            Le gouvernement italien, quant à lui, s’est fait dicter sa politique par la Banque centrale européenne. Dans une lettre adressée par MM. Jean-Claude Trichet et Mario Dragghi le 5 août 2011 le gouvernement Berlusconi a été sommé de privatiser les sociétés municipales (transport public, voirie, fourniture d’électricité) et de rendre plus flexible les procédures de licenciement qui existaient dans le code du travail depuis 1970… ou de renoncer aux aides de la Banque centrale ! Comme la Banque centrale européenne ne veut pas attendre, le gouvernement Berlusconi a été prié d’agir par voie réglementaire, la voie législative ayant été jugée trop longue et trop risquée.

            Le 23 août 2011, Angela Merkel intervenait devant les députés de son parti pour tenter de les rassurer. En effet, plus la date fatidique à laquelle elle devra présenter le second plan de sauvetage de la Grèce approche, plus la tension monte. En échange de ce vote, elle leur a donc proposé de soumettre au contrôle de la Cour de justice de l’Union européenne le respect, par les États membres de la zone euro du pacte de stabilité et de croissance (sic). 

            Désormais, les États, non seulement, devraient soumettre leur projet de budget annuel à la Commission européenne, mais encore la Cour de justice pourrait exiger qu’ils revoient leur budget si celui-ci, dans son vote ou dans son exécution, venait à sortir du carcan des critères de Maastricht ! Une perte de souveraineté supplémentaire… Il est vrai que, depuis l’adoption du premier plan de sauvetage, le 21 juillet, un certain nombre d’obstacles s’étaient levés sous ses pieds.

            En premier lieu, Nicolas Sarkozy avait été obligé de constater qu’il n’avait pas de majorité suffisante pour faire voter par le Parlement réuni en Congrès, l’insertion dans la Constitution de la « règle d’or » imposant un strict équilibre budgétaire quelles que soient les circonstances conjoncturelles. Et, comme il n’arrivait pas à faire basculer l’opinion dans son camp, il avait proposé de rendre cette mesure obligatoire dans tous les pays de la zone euro… se faisant ainsi le porte-parole de la Chancelière. 

            Seul, le Premier ministre socialiste espagnol, José-Luis Zapatero, avait répondu favorablement à cet appel, transmettant ainsi une véritable pilule empoisonnée  à son successeur potentiel, à quelques semaines d’élections législatives considérées comme perdues. Le Premier ministre portugais, quant à lui avait aussitôt émis des réserves sérieuses, entraînant derrière lui d’autres États dans la fronde.

            En second lieu, le 16 août, tandis qu’Angela Merkel s’entretenait avec le président Sarkozy à l’Élysée, on avait appris que, faisant cavalier seul, la Finlande avait négocié avec la Grèce un accord bilatéral subordonnant sa participation au plan de sauvetage à l’octroi de garanties particulières : que la Grèce dépose dans les caisses de l’État finlandais une somme suffisante pour que celui-ci puisse être sûr d’être remboursé à l’échéance, intérêts compris. Un tel accord qui constitue une entorse grave à la solidarité européenne a, aussitôt connu, suscité des vocations, notamment de la part de l’Autriche, des Pays-Bas et de la Slovaquie… et une réaction indignée de l’Allemagne.

            En troisième lieu, le remboursement par la Grèce, le 22 août, de la première grosse échéance de 6 milliards d’euros, obligatoirement accompagné d’un renouvellement « volontaire » des prêts accordés par les banques, avait suscité des critiques non dénuées de fondement de la part de certains juristes de banque dans tous les pays de l’Union. Cet abandon « volontaire » d’une partie de leur créance et leur souscription « volontaire » à un nouveau prêt assorti d’une simple promesse d’une garantie ultérieure par le Fonds européen de stabilité financière (FESF) – une fois que tous les Parlements concernés auraient ratifié l’accord du 21 juillet – est-il bien conforme à l’objet social des banques ?

     

    Un plan qui divise l’allemagne politique

            Les élections allemandes approchent et Angela Merkel se doit de donner des gages, d’abord à son propre parti, ensuite à ses électeurs. D’autant que le premier plan de sauvetage de la Grèce avait lui-même déjà été déféré devant la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, laquelle doit se prononcer le 7 septembre : selon les cinq universitaires qui ont introduit ce recours, le montant nécessaire pour aider la Grèce devrait mener à terme, soit à une dévaluation substantielle de l’euro, soit à une forte inflation. De plus cette aide ne peut pas être réellement contrôlée par le Bundestag, ce qui viole ses pouvoirs. Il n’est pas permis à Angela Merkel de faire le moindre faux pas. Pour autant, cela sera-t-il suffisant ? On peut en douter quand on voit que, dès le lendemain, le Président de la République d’Allemagne fédérale, Christian Wulff, a jugé la situation suffisamment grave pour sortir de sa réserve et pour prendre position sur ce plan de sauvetage de la Grèce, jugeant qu’était « discutable sur le plan légal l’achat massif d’obligations de certains pays ». Et, en bon gardien de la Constitution allemande, il n’a pas manqué de rappeler à cette occasion que « c’est le Parlement qui doit prendre les décisions, car c’est là qu’est la légitimité ». 

            Il rejoint ainsi, dans la contestation de la chancelière, Helmut Kohl qui reproche désormais à celle qu’il appelait autrefois « la petite fille », de lui casser son Europe ! Il rejoint aussi, l’ancien président du Land de Bade-Wurtemberg, Erwin Teufel, qui au début du mois d’août a critiqué les mesures prises pour lutter contre la crise de l’euro : « Quand nos représentants effacent en une nuit des critères de stabilité raisonnables mentionnés dans des traités, au mépris du droit et de la Constitution, la confiance de nos électeurs s’en va ». Sur la même longueur d’onde, le président de la Bundesbank, Jens Weidmann, s’est opposé au sein du Conseil des gouverneurs de la BCE, au rachat par cette institution des dettes grecques, irlandaises et portugaises. Pour la Chancelière allemande le plus dur reste à venir. En effet ce n’est que le 23 septembre prochain que les députés du Bundestag commenceront à examiner le deuxième plan d’aide à la Grèce, quinze jours après la décision de la Cour constitutionnelle dont on peut penser qu’au minimum elle rappellera les droits fondamentaux du Parlement. 

            Jusqu’à cette date, non seulement la Chancelière jouera son avenir politique mais elle jouera aussi l’avenir de l’euro dans une Allemagne où la confiance dans les institutions de l’Union européenne baisse chaque jour un peu plus. Et le projet, adressé le 24 août par le ministre des finances, Wolfgang Schäuble, aux leaders du Parlement, de lever le contrôle parlementaire des crédits octroyés aux pays endettés par le FESF n’est pas fait pour calmer les esprits. Le patronat allemand a lui aussi mis la chancelière en garde : nous ne défendrons pas l’euro à n’importe quel prix !

            Cela étant, comment la chancelière allemande peut-elle expliquer à ses partenaires exsangues et qui s’enfoncent dans la récession, ce refus de solidarité européenne au moment même où la Bundesbank annonce que l’indicateur de la valeur des avoirs financiers des ménages allemands n’a jamais été aussi élevé depuis qu’elle le calcule ? Alors que tous les ménages européens se sont appauvris, alors que le taux de chômage augmente partout, les avoirs financiers des ménages allemands ont augmenté de près de 4,5 % dans l’année. ■

  • Débat avec nos lecteurs, ou de nos lecteurs entre eux : un courrier sur le Kososvo....

                Le samedi 24 juillet, Sébastien nous a envoyé un message pour nous demander de "...réagir à la décison de la cour de justice internationale sur la proclamation d'indépendance unilatérale du Kosovo. En effet, contre le Droit, celle ci a déclarée cette semaine, que cette indépendance n'avait violée en aucun cas le Droit international...!!! Ce qui se joue au Kosovo est gravissime pour notre avenir, pour notre culture; l'objectif de l'Europe à la solde des grands groupes côtés en bourse est la disparition des peuples traditionnels d'Europe centrale (serbes surtout) ancrés dans la chrétienté.

               En effet Allemagne et USA lorgnent sur les ressources qui viennent via la mer noire (pétrole, minerai...) et soutiennent donc la Turquie et ses confédérés (Albanie etc) quitte à repeupler et à islamiser l'Europe au profit d'intérêts financiers.... Développez cet état de faits, informez les gens de bonnes volonté, aucun média ne dit la vérité sur la situation au Kosovo (Eglises détruites, monastères incendiés, exactions sur les chrétiens...)."

                Merci pour votre message, Sébastien. En tapant "Serbie Kosovo" dans le cadre "Rechercher", en haut à droite de la page d'accueil (juste en dessous des Devises) vous verrez apparaître huit notes dans lesquelles nous parlons de ce sujet.

                Voici celle que nous avons publiée il y a presque deux ans, le 10 août 2008, et qui remonte aux causes principales de ce que vous dénoncez justement : 

    Du Kosovo à la Géorgie : quand certains européens comprendront-ils (enfin…) le jeu que mènent les USA ?.....

              Oui, quand certains européens comprendront-ils que les USA ne cherchent qu’à torpiller depuis toujours la puissance européenne afin qu’elle ne vienne pas, ou plus, contrarier la sienne ?

              Pourquoi les USA tiennent-ils tant, par exemple, à ce que la Turquie entre dans l’Europe ? Ou, pourquoi ont-ils « joué » les musulmans et l’Islam dans l’ancienne Yougoslavie ? Où ils ont comme imposé l’indépendance du Kosovo ? Bien sûr parce que l’adhésion turque ruinerait définitivement une Europe déjà mal en point (ce qui serait donc tout bénef pour eux…) ; et parce qu’il fallait diminuer le plus possible une vieille Nation serbe, aux racines spirituelles profondes, la rattachant au monde slave et à la Russie : or les USA ne veulent surtout pas d’un rapprochement Europe/Russie, préfigurant cette Eurasie qui pourrait contrecarrer leur puissance, comme nous nous le disions au début…   


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               Mais voici que les faits, qui sont têtus comme chacun sait, se vengent. Et d’une façon qui serait presque drôle, si le comique trouvait sa place –qu’il n’a évidemment pas- dans cette tragédie. Après avoir bataillé ferme, donc, pour imposer l’indépendance du Kosovo, et amputer scandaleusement la patrie charnelle de nos alliés serbes historiques (1), voici que les USA et leurs pions (comment appeler autrement ceux qu’ils manipulent ?....) refuseraient à l’Ossétie du Sud et à l’Abkhazie l’indépendance qu’ils ont « donné de force » au Kosovo, créant de toute pièce un élément déstabilisateur dans cette zone des Balkans qui était déjà une poudrière ! Ou si l’on préfère –et cela revient strictement au même- voici que les USA et leurs pions appuient la Géorgie, qui mène contre les séparatismes Abkhazes et Ossètes le même combat qu’aurait bien voulu mener la Serbie au Kosovo, mais qu’on l’a empêché de mener ! Et cela bien à l’abri derrière leur bras armé qu’est l’OTAN……(2)

              Où sont la cohérence, la logique, la raison dans tout cela ? Ne nage-t-on pas en pleine aberration ? Une telle politique est-elle lisible, comme on dit dans le jargon ? A l’évidence, non, du moins si l’on ne réfléchit pas. Mais si l’on réfléchit un tout petit peu, alors oui, elle l’est : mais uniquement si l’on en revient à la question que nous posions au début de cette réflexion : les USA ne veulent pas d’un rapprochement Europe/Russie (rapprochement que justement les intérêts de l’Europe commandent (3). Il est donc parfaitement logique qu’après avoir diminué au maximum l’influence slave/chrétienne dans les Balkans, en renforçant au maximum l’adversaire musulman, et en suscitant ainsi de belles empoignades  futures, les USA jouent, par OTAN interposée (4), leur rôle traditionnel de démolisseur de la puissance européenne. Cette fois c’est contre l’indépendance de deux zones, qu’ils combattent objectivement ici et aujourd’hui, alors qu’ils l’ont imposée là hier. Mais c’est surtout, encore et toujours contre la Russie, dont le contentieux avec la Géorgie n’est un secret pour personne, pas plus que le soutien qu’apporte à l'inverse Moscou aux Ossètes et aux Abkhazes….

              Qui a dit que c’était compliqué, la géopolitique et la géostratégie ?..... Il ne tient qu’aux gens de ne pas être dupes. En tout cas, il est clair que si le jeu des USA peut se comprendre si l’on se place de leur point de vue (après tout, il est normal, même si c’est cynique, que les USA défendent leurs intérêts : aux européens de ne pas être les pions stupides, les idiots utiles des intérêts états-uniens….), il s’agit malgré tout d’un jeu dangereux. Sans aller jusqu’à craindre le déclenchement imminent d’une guerre mondiale avec la Russie de Poutine, redevenue forte et fière, on aimerait parfois voir la Maison Blanche être plus prudente…. Et être assuré que nos gouvernants –en France et en Europe- ne nous laisseraient pas entrainer dans ces jeux états-uniens , strictement états-uniens, et pour le seul profit des Etats-Unis.

              On a assez travaillé, dans le passé, « pour le Roi de Prusse » pour ne pas se mettre à travailler, maintenant, « pour la Maison Blanche » .....

    (1)  Voir les deux notes « Au-delà de l’ingratitude, une injustice et une folie » et « Réponse à une réponse… » dans la Catégorie « International (  1 : Europe….).

    (2)  Comment Georges Bush peut-il –sans rire…- déclarer que « la Géorgie est un Etat souverain » et que « son intégrité territoriale doit être préservée » ?..... lorsqu’on sait comment Washington a traité l’Etat souverain de Serbie et son intégrité territoriale, au Kososvo…..

    (3)  Pas seulement, et pas surtout du point de vue matériel : peut-être et même surement plus encore du point de vue spirituel…..   

    (4)  A  ce propos, qu’allons-nous re-faire dans cette galère ? De Gaulle nous avait sorti du commandement unifié. Il n’est peut-être pas inutile d’y retourner, mais certainement pas pour devenir pion docile….  

  • Anniversaire de Georges Steiner : le surprenant ”oubli” (?) d'Evène...

                Le 23 avril, c'était l'anniversaire de Georges Steiner, 80 ans, né à Paris en 1929. Le fait est mentionné par l'éphémeride d'Evene, que Le Figaro met en bonne place sur la page d'accueil de son édition électronique.

                Un petit texte, intéressant, accompagne ce rappel, suivi d'une bibliographie, intéressante elle aussi. Pourtant, on est très vite surpris, et déçu. C'est curieux : quand on connaît l'estime réciproque que se portaient les deux hommes, et quand on sait ce que Steiner pense et dit de Boutang, Pierre Boutang n’existe pas pour Evène. Il a disparu des écrans radars. Néantisé ...

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                On se perd donc en conjectures sur la cause de cet "oubli". Oubli, tout simplement ? Mais ce serait très surprenant... Épuration d'un autre âge, et censure, dûe au politiquement correct ? Mais ce serait assez inattendu en ce qui concerne Steiner, qui n'a pas craint d'écrire un ouvrage avec Pierre Boutang, et qui pense, et qui dit, que Boutang est tout simplement le plus grand philosophe, depuis Platon ! Excusez du peu ! Et de plus, dans cette biographie, on parle de Gustave Thibon, qui aurait dû, à ce compte-là, être épuré lui aussi...

     

                La vérité oblige à dire que nous ne savons rien du pourquoi du comment de tout ceci, et que l'on ne peut que le constater, tout simplement. Inutile de se perdre trop longtemps dans de vaines suppositions...

     

                Contentons-nous donc de réparer un oubli et de combler simplement une lacune -on l'appellera ainsi, faute d'élèments d'information suffisants, en se gardant de noircir trop les choses...-. Et réunissons juste les deux amis, les deux complices, qu'une biographie - par ailleurs intéressante - a curieusement séparés.

            

           

     

     

     

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    Voici, pour mémoire, la malgré tout sympathique page consacrée par Evène à Steiner :

     

    Biographie de George Steiner

    Après onze années passées à Paris, George Steiner et ses parents, d'origine juive viennoise, arrivent aux États-Unis en 1940 pour échapper à la Seconde Guerre mondiale. Très tôt, George Steiner reçoit une éducation polyglotte et son père lui fait apprendre le grec ancien à 6 ans en lui faisant croire que "L' Iliade" n'est pas traduit en allemand. Le jeune homme fréquente ensuite les universités d'Oxford et de Cambridge. Il sort diplômé en mathématiques, en sciences physiques et en lettres en 1949. Dès 1950, l'étudiant brillant est engagé comme journaliste au sein de The Economist et se fait remarquer grâce à un cours sur Shakespeare qu'il donne à l'université de Genève où il enseigne la littérature. Nommé professeur émérite à sa retraite, il continue d'enseigner au St Anne's College à Oxford. Parmi la vingtaine d'ouvrages à son actif, citons 'Tolstoï ou Dostoïeviski' en 1958 et 'Après Babel' en 1975. Il publie de nombreux ouvrages notamment 'Les Livres que je n'ai pas écrits' dans lequel l'auteur fait état de sept projets, sept absences, sept échecs supposés. Depuis 1966, George Steiner est critique littéraire au New Yorker. Son activité littéraire traverse les années et il publie notamment 'Langage et silence' en 1969, 'Martin Heidegger' en 1981, 'Le Sens du sens' en 1988, 'La Mort de la tragédie en 1993, 'Grammaires de la création' en 2001, 'Logocrates' en 2003 ou encore 'Une certaine idée de l'Europe' en 2005. Ayant beaucoup réfléchi sur les rapports entre l'art et la transcendance, George Steiner fonde sa philosophie sur le langage, le mal, la transcendance et le rapport entre la culture et la barbarie.

     

     

    PORTRAIT DE GEORGE STEINER

    La pensée symphonique

    Au lendemain d'un Salon du livre controversé mettant à l'honneur Israël et l'écriture en hébreu à l'exclusion de toute autre langue, comme l'anglais ou l'arabe, revenons sur la pensée du plus érudit des juifs, du plus polyglotte aussi. George Steiner, qui publiait en janvier chez Gallimard son dernier essai, 'Les Livres que je n'ai pas écrits', nous montre une nouvelle fois que c'est par et pour les textes qu'il appréhende les savoirs.

    D'autres célébrités liées à Steiner :
    Jean-Paul Curnier, François Jullien, Jean-Luc Marion, Michel Henry, Maurice Blanchot, Jean-François Revel, Albert Camus, Jean-Louis Schefer, Gustave Thibon, Daniel Bensaïd, Pascal Bruckner, Simone de Beauvoir, André Tubeuf, Alain Finkielkraut, Alain Renaut, John Rawls, Jürgen Habermas, Jean-François Lyotard, Alain Badiou, Luc Ferry.

    Et, sur une autre page, Evène cite :

    Chantal Delsol, Alain Badiou, Michel Foucault, Jacques Derrida, Simone Weil, Emil Michel, Cioran, André Tubeuf, Léo Strauss, Bruno Bettelheim, Luc Ferry, Gilles Deleuze, Paul Ricoeur, Emmanuel Mounier, Noam Chomsky, Jürgen Habermas, Benny Lévy, Marcel Gauchet, Claude Lévy-Strauss, Betty Friedan, Hannah Arendt.

     

    Bibliographie

    Ceux qui brûlent les livres

    de George Steiner

    [Littérature étrangère XXIe]

    Dans cet essai, Steiner expose son rapport aux livres et ce qu'il doit aux religions du livre.

     Plus sur "Ceux qui brûlent les livres"

    A cinq heures de l’après-midi

    de George Steiner

    [Littérature étrangère XXIe]

    Ville dangereuse, M. comptabilise des dizaines d'homicides par jour. Des cadavres piégés sont laissés, abandonnés ou ramassés à la tombée du jour ; seule l'odeur du sang rappelle ce qui s'est passé.

     Plus sur "A cinq heures de l’après-midi"

    Maîtres et disciples

    de George Steiner

    [Spiritualité et Religion]

    Qu'est-ce qui habilite un homme ou une femme à "enseigner" à un autre être humain, où réside la source de l'autorité ? L'enseignement authentique est le dévoilement d'un Logos révélé, diront les uns : c'est le modèle du maître qui enseigne [...]

     Plus sur "Maîtres et disciples"

    Une certaine idée de l’Europe

    de George Steiner

    [Histoire et Actualité]

    C'est avec le talent d'un imagier que George Steiner aborde son sujet de manière inattendue : "Les cafés font l'Europe, écrit-il. Ils vont de l'établissement préféré de Pessoa à Lisbonne aux cafés d'Odessa, hantés par les gangsters d'Isaac [...]

     Plus sur "Une certaine idée de l’Europe"

     

    Dix raisons (possibles) à la tristesse de la pensée

    de George Steiner

    [Philosophie]

    "Si nos processus de pensée étaient moins pressants, moins crus, moins hypnotiques, nos déceptions constantes, la masse grise de la nausée nichée au coeur de l'être, nous désempareraient moins. Les effondrements mentaux, les fuites pathologiques [...]

     Plus sur "Dix raisons (possibles) à la tristesse de la pensée"

    Tolstoï ou Dostoïevski

    de George Steiner

    [Littérature étrangère XXe]

    On a pu dire qu'en demandant à un homme - ou à une femme - s'il préfère Tolstoï ou Dostoïevski, on peut "connaître le secret de son coeur". Avec son érudition et sa verve coutumières, George Steiner explore ici les différences qui opposent [...]

     Plus sur "Tolstoï ou Dostoïevski"

    Nostalgie de l’absolu

    de George Steiner

    [Philosophie]

    La fin du christianisme et le retour du religieux sont décidément des thèmes à la mode. Sur le sujet, mieux vaut lire les ouvrages de George Steiner ou de Marcel Gauchet qui, s'ils sont très différents, ont le mérite commun de formuler les [...]

     Plus sur "Nostalgie de l’absolu"

    Grammaire de la création

    de George Steiner

    [Philosophie]

    Ce tournant de siècle est marqué par une lassitude foncière. Ontologique, dirait-on : la chronométrie intime, les contrats avec le temps qui déterminent si largement notre conscience indiquent la fin d'après-midi. Nous sommes des tard venus. [...]

     Plus sur "Grammaire de la création"

    Le Sens du sens

    de George Steiner

    [Philosophie]

    Dans ce livre, qu'il a voulu intituler 'Le Sens du sens', on trouvera le texte d'une conférence fondamentale, donnée dans les trois langues qui déterminent sa vie et son espace culturel. George Steiner considère aussi sa conférence comme [...]

     Plus sur "Le Sens du sens"

    Langage et silence

    de George Steiner

    [Philosophie]

    On a pu dire de l'oeuvre considérable de George Steiner qu'elle tourne tout entière autour du langage, de son sens et de ses conséquences morales et religieuses. On s'en convaincra aisément en lisant cet ouvrage écrit voici trente ans, par [...]

     Plus sur "Langage et silence"

    Réelles présences

    de George Steiner

    [Philosophie]

    Où peut-on trouver le sens des arts ou de la littérature lorsque les oeuvres authentiques s'effacent au profit de l'ère des commentaires journalistico-universitaires ? L'art contemporain, comme l'humanisme moderne, ont échoué car ils manquaient [...]

  • Jean-Paul Brighelli parle du film La journée de la jupe…

                 On ne présente plus Jean-Paul Brighelli, celui qui a le mérite –et surtout le courage, car il en faut…- d’appeler un chat un chat, et un crétin, un crétin. Dans La Quinzaine Universitaire - l'organe du Snalc - (n° 1312, 4 avril 2009) il a publié un article qui nous parait valoir le coup, mais que nous aurions peut-être laissé passer si un lecteur ne nous l’avait communiqué.

                 Nous vous le communiquons à notre tour, en remerciant ce lecteur. Vous aussi, si vous souhaitez voir un sujet évoqué dans ce blog, qui veut être aussi le vôtre, n’hésitez pas à nous envoyer vos suggestions, avis, commentaires en tous genres, et des documents comme celui-ci… Toute participation de nos lecteurs sera toujours la bienvenue….

                 Première précaution: Attention, publier un article de lui ne signifie évidemment pas que nous soyons toujours d'accord sur tout avec Jean-Paul Brighelli. Nous souhaitons seulement, comme d'habitude, ne pas rester dans notre tour d'ivoire et aller voir un peu ailleurs ce qui s'y passe, et s'il y a, par ci par là, quelques touffes d'herbe bien verte...

                Deuxième précaution: Attention, âmes sensibles s’abstenir ! Brighelli ne fait pas dans la dentelle : c’est une charge, c’est polémique. C’est donc, forcément, parfois un peu excessif. Mais, malheureusement, tellement vrai par tant d’aspects ! Certes,  à Henri IV ou Louis le Grand, on n’en n’est pas (pas encore…) là. Mais pour beaucoup, on y est en plein ; et pour les autres, un peu de patience, on va y arriver…

                Quant au style de Brighelli, il faut le prendre comme il est ! On aime ou on n'aime pas: c'est un peu comme pour Céline (toutes proportions gardées, bien sûr...). L'important n'étant ni le style, ni la personne, mais bien le sujet qu'il évoque, et le coup de gueule qu'il pousse. A-t-il raison ? A-t-il bien fait ?...

                 Place donc à Jean-Paul Brighelli, La Journée de la jupe. Et, peut-être, à vos commentaires....

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    « Crétin ! »

    Elle l’a dit. Elle l’a dit ? Elle l’a dit.

    Qui ? Sonia Bergerac. Bergerac comme Cyrano. Sonia comme toutes les beurettes pour qui leurs parents jouent al carte de l’assimilation, de l’intégration dans la communauté culturelle française. Bergerac, vous êtes sûr ? Une beurette ? Elle l’est – on ne le saura qu’à la fin, entre un père muet de l’avoir trop aimée, et une mère en larmes. Quand il sera trop tard. Quand elle aura été abattue par une police qui tire toujours trop vite. On achève bien les profs.

    Crétin. Adjani l’a dit.

    Adjani ? Allons donc ! Cette star si rare, invisible, qui, d’interviews en interviews, explique qu’elle a inscrit son fils dans le privé, pour éviter la catastrophe qu’est devenu l’enseignement privé en France…. Sortie de sa thébaïde pour jouer dans un film à petit budget, un objet télévisuel –qui a permis à Arte de battre des recors d’audience….

    Elle n’a pas lu Meirieu, Adjani. Elle ne sait pas que si ça va mal c’est qu’on n’a pas assez détruit. Pas assez pédagogisé. Pas assez donné de pouvoir aux IUFM, aux syndicats crypto-cathos, aux profs qui se réfugient dans les sciences de l’éducation faute de connaître leur propre discipline, aux « professeurs des écoles » qui font le Connac dans l’Hérault et ailleurs, parce qu’ils ne savent pas enseigner le b-a-ba (1), et qu’ils n’ont rien à dire aux élèves de GS.

    Crétins !

    Elle l’a dit, Sonia Bergerac . Comme moi. Avec violence et passion. Avec beaucoup d’amour pour ces élèves impossibles, suppôts d’imams, serial violeurs, barbares ! Comme tous ces élèves parqués dans des ghettos scolaires installés grâce à la Gauche (si !) dans des ghettos sociaux construits par la droite. Elle l’a dit avec beaucoup de tendresse et de colère, avec – encore à ce moment du film – un geste caressant du bout du Beretta tendu de sa main malhabile vers le groupe d’élèves pris en otage afin de leur faire, enfin, un cours de Français qui ressemble à quelque chose. Des élèves enfin terrorisés pour de bon,  parce qu’ils ne sont plus dans un mauvais jeu électronique, mais dans la vraie vie – la leur, celle où l’on n’apprend rien dans les collèges à tarif intellectuel unique, où seuls ont le droit de hurler les caïds et leurs sous-fifres. Rien. Pas même le vrai nom de Molière.

    Cette fois, ils vont le savoir. Jean-Baptiste Poquelin ! Répétez  après moi ! Ou je flingue !

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    « Mais à quoi bon ces savoirs morts ? » demande le Crétin –le vrai, pas l’élève, mais le Crétin qui a inspiré la réforme Jospin, le Crétin qui a inventé les IUFM, le Crétin de la réforme Viala, de la loi Lang, de l’amendement Ségolène, le crétin des Sciences de l’Education, le Crétin qui a refusé de siéger dans la commission qui a finalement accouché –il était temps !- de la loi 2004 sur l’interdiction des signes religieux à l’école… « A quoi bon Molière (ou la Princesse de Clèves, dirait… qui, déjà ?), à quoi bon Racine –m’dam, Racine ! Vous vous rendez compte ?  - à quoi bon Corneille (« comme le chanteur ? ») –à quoi bon La Bruyère –« m’dam, comme la plante dont on fait les pipes ? » « M’dam, Rachid, il a dit pipe ! » « Toi, sale pute… »

    -Comment tu m’as appelée ? demande alors Adjani en lui mettant un coup de boule.

    Si ! Un coup de boule ! Elle a bien fait ! Sartre expliquait dans « Réflexions sur la question juive » que les racistes, il n’y a pas moyen de leur expliquer, ils sont inaccessibles à la raison, autant commencer et finir par le coup de boule….

    « La Journée de la jupe » est un grand film anti-raciste. Le véritable anti-racisme. Celui qu’il faut enseigner. Celui que les organisations bien pensantes vomissent. L’anti-racisme d’Emmanuel Brenner (2) , de Iannis Roder (3), ou le mien (4).

    Une ministre plus dépassée que nature –un mixte improbable d’Intérieur et d’Enseignement Supérieur, beau cul bon genre- ne comprend rien à la revendication de cette prof déjantée . Comment ça, une journée de la jupe ? Mais nos mères se sont battues pour avoir le droit de porter un pantalon !

    Oui, mais voilà, dans certaines banlieues, si vous portez une jupe, vous êtes une pute. Une salope. Une taspé.

    « M’dam ! Le mec, sur le blog, il m’a traitée ! »

    Pitié pour les filles ! C’est ainsi qu’il y a trois ans (putain, trois ans et il faut encore se battre !) j’avais intitulé une Note sur ce blog (5), qui prenait la défense de ces gamines qui se voilent pour échapper à l’opprobre des cités. Pour échapper aux fantasmes des tarés-frustrés-péteux incapables de séduire, parce qu’on ne leur a pas appris les mots –et à quoi voulez-vous que servent les mots, que serve l’Ecole, si ce n’est à séduire Chloé ou Myriam, Anthony ou Peter ? Incapables –impuissants, qui relookent en douce, sur leur portable, une scène hard bricolée en interne… Eh non, chers parents de la FCPE , un portable ne sert pas à vous appeler entre deux cours, d’ailleurs, on ne vous appelle pas, ça sert à filmer Fadela ou Camille obligée à faire une pipe dans les chiottes du bahut, et à se l’envoyer entre copains, -la fille et le film. Heureusement que de plus en plus de lycées interdisent les portables !

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    Alors, la Sonia Bergerac, elle est vachement vénère ! Elle porte en elle l’exaspération de ses collègues –enfin, de certains de ses collègues : parce qu’il y a les collabos, les pactiseurs de barbarie, ceux qui viennent au lycée culotte baissée, ceux qui se trimbalent avec le Coran dans le cartable, qui le connaissent mieux que leurs élèves même –et qui s’en vantent !

     

    (1)    Rachel Boutonnet, Pourquoi et comment j’enseigne le b-a-ba.

    (2)     Emmanuel Brenner, Les Territoires perdus de la République.

    (3)    Iannis roder, Tableau noir – la Défaite de l’école.

    (4)    Jean-Paul Brighelli, Une école sous influence.

    (5)    http://bonnetdane.midiblogs.com/archive/2006/07/13/pitie-pour-les-filles.html

  • Le Prince Jean en Provence (1/3) : A Cadarache, avec les scientifiques de haut niveau du Commissariat à l'énergie atomiq

    TimbrebisRVB.jpg            Le Prince Jean s'est rendu plusieurs fois en Provence : illustrant l'image que nous avons souvent prise d'un arbre qui monte d'autant plus haut dans le ciel qu'il pousse plus profondément ses racines dans le sol, il s'est montré attentif, curieux et intéressé par tout ce qui s'y passe, et dans tous les domaines, rencontrant aussi bien la Nation Gardianne et ses traditions vivantes que les scientifiques de Cadarache préparant l'énergie du futur : les deux bouts de la chaîne pourrait-on dire....

                Le vendredi 21 juillet 2006 , il a visité le Centre  du Commissariat à l’énergie atomique de Cadarache (1).

                http://www-cadarache.cea.fr/

                http://www-fusion-magnetique.cea.fr/

                Cette visite fut l'occasion, pour le Prince, de comprendre une clé majeure du succès en matière de recherche scientifique : ce qui importe, c’est d’être en mesure de se dégager des contingences du moment, des modes et des besoins passagers, pour se donner les moyens de concevoir et mettre en œuvre un projet cohérent, lucidement pensé, réalisé avec rigueur et méthode. Ce projet doit alors être poursuivi avec une volonté sans faille, et la continuité dans l’effort doit être assurée jusqu’au bout.

                Comment celui dont la Famille symbolise et représente ce temps long, dont nous ne disposons plus depuis que nous sommes en République, pourrait-il rester insensible à un tel argument ? La personne qui a expliqué ceci au Prince a bien fait de tenir ce discours. Mais on peut, bien évidemment, rebondir sur ces paroles et étendre le propos : c'est la France elle-même, tout simplement, qui a pu être construite patiemment, et sur un millénaire, à partir d'un tel schéma...

                Mais revenons à Cadarache.....

                Le Prince fut reçu par M. Bernard Bigot, haut commissaire à l’énergie atomique, et M. Serge Durand, directeur du CEA. 

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                 La visite commença par le site du futur réacteur ITER (International Thermonuclear Experimental Réaction), qui procède d’un traité international de longue durée : outre les pays de l’Union européenne, les partenaires sont le Japon, la Russie, les États-Unis, l’Inde, la Chine et la Corée du Sud. Le traité, qui définit les apports et les charges de chacun, vise à l’installation d’un "tokamak" – abréviation russe pour chambre magnétique torique –, c’est-à-dire un réacteur nucléaire de 4e génération (schéma ci dessous).

                 Qu'est-ce qu'un Tokamak ? : http://www.itercad.org/projet_3.php

                Cette machine de 35 000 tonnes, conçue pour résister aux aléas sismiques, sera à fusion nucléaire : elle reproduira, en quelque sorte, l’énergie du soleil.          

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                Dans un contexte de concurrence difficile, avec le Japon notamment, la France a été choisie pour son expérience et son exemplarité dans la gestion de la technologie nucléaire. La mise en marche de ce prototype est prévue en 2020. Ce nouveau réacteur présente des caractéristiques remarquables, d’abord en ce qui concerne la sécurité : à la moindre perturbation des conditions de fusion, le dégagement d’énergie s’arrête immédiatement, bloquant toute possibilité d’emballement du réacteur.

                Les combustibles utilisés sont deux isotopes de l’hydrogène, le deutérium, extrait de l’eau de mer, et le tritium, plus fréquent dans la nature que l’uranium actuellement utilisé. Il n’en est besoin qu’en très faibles quantités. Ces deux éléments, portés à très haute température forment le « plasma » de fusion – comme, à l’intérieur du soleil, le plasma d’hydrogène se trouve en fusion à 15 millions de degrés. Dans le soleil, le plasma est confiné par la gravitation : ici, il le sera à l’intérieur d’un champ magnétique, comme c’est déjà le cas dans le réacteur de 3e génération Tore Supra, mis au point par le CEA, et que le prince Jean visita à cette occasion (http://www-fusion-magnetique.cea.fr/cea/ts/ts.htm).

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    Intérieur de Tore Supra, tokamak supraconducteur, en exploitation depuis 1988 à Cadarache.
     

                 Les réacteurs pressurisés européens (EPR), dérivés de cette technologie, sont en cours de construction. Le premier, pour EDF, se construit à Flamanville.

                Le produit des réactions de fusion est l’hélium, gaz chimiquement inerte et non radioactif, au lieu des gaz actuellement issus des réactions de fission qui contribuent à aggraver l’effet de serre. Les avantages de la fusion nucléaire sont donc considérables : pas de radioactivité intempestive, très peu de matière première, une énergie indéfiniment renouvelable, aucun effet de serre,... Les utilisations seront, entre autres, la production d’électricité, d’hydrogène, le dessalage de l’eau de mer, la propulsion (navale, notamment), etc. De quoi répondre aux besoins énergétiques mondiaux, alors que les ressources minérales et fossiles se font plus rares.

                Il est donc essentiel que le défi soit relevé, même s’il faudra du temps pour en arriver aux applications commerciales. Ce sera le « nucléaire durable », une des énergies de l’avenir à côté de l’hydrogène, des biocarburants, du solaire, de la biomasse (bois et résidus agricoles), l’éolien se révélant en revanche trop aléatoire.

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    Le Haut-Commissaire à l'énergie atomique présente le projet ITER au duc de Vendôme.

                Dans les félicitations et les encouragements qu’il a adressés au haut commissaire à l’énergie atomique et à ses équipes, le prince Jean a souligné que le projet français a réussi à s’imposer grâce à sa cohérence, à sa pertinence et surtout grâce à une remarquable succession de directeurs et d’ingénieurs qui lui a permis de s’inscrire dans la durée, au-delà des aléas politiques. Il a du même coup souligné le besoin vital pour la France d’une politique de recherche scientifique puissante, continue et volontaire, qui sans se laisser brider par les contingences des modes et des besoins immédiats, n’hésite pas à regarder loin, avec lucidité et détermination.

                L’exemple de Cadarache prouve à quel point notre pays en a les moyens.

     

    (1) : Pour cette note, comme pour les prochaines relatives aux déplacements et aux discours, allocutions, prises de parole du Prince, nous emprunterons un certain nombre d'informations au site Gens de France ( http://www.gensdefrance.com/gdefrance1/ ) et nous les agrémenterons de liens, de photos et de quelques commentaires.....

     

  • La première « force » (et la seule ?...) en France et dans le monde…

              A Michel Onfray, qui déclarait récemment avec dédain que tirer sur le christianisme ce serait tirer sur une ambulance, nous répondions que des deux forces en présence, christianisme et marxisme, c’était plutôt à notre très humble avis le marxisme qui était le plus mal en point ; tellement mal en point, d’ailleurs, qu’il était carrément mort...

             Le voyage de Benoit XVI en France ne vient-il pas, bien mieux que nos démonstrations, d’ apporter une preuve supplémentaire qu’en face, le christianisme ne se porte pas aussi mal que Michel Onfray et ses lunettes déformantes voudraient nous le faire croire ? Car ce voyage,  tout le montre,  a tourné au triomphe. Bien plus que les chiffres –déjà intéressants, et qu’il faut prendre en considération- c’est le message transmis et l’accueil réservé à ce message qui font le succès de cette visite.20080912PHOWWW00150.jpg

     

              « Discours d’une densité phénoménale », « un excellent professeur », « autorité morale et intellectuelle »… : on n’en finirait presque pas de recenser dans la presse -écrite ou parlée- les commentaires élogieux émis par des personnes qui n’étaient  pas toutes (et pour certaines même, loin delà…) des personnes acquises au Pape au départ !

              Il est donc bien là le grand, le vrai succès, plus que dans les 50.000 jeunes réunis sur le parvis de Notre-Dame, ou les 260.000 participants à la messe des Invalides, ou les presque 200.000 de Lourdes. Il est dans le fait que, soit qu’il ait assisté physiquement aux déplacements du Pape soit qu’il l’ait suivi à la radio, à la télé ou dans les journaux (1) , le public a massivement accompagné le Souverain pontife ; a manifesté un intérêt qui non seulement ne s’est pas démenti mais est allé crescendo ; l’a écouté avec un intérêt manifeste et soutenu.

              Pourquoi ? Parce qu’il était évident que l’on avait affaire à un guide, à un meneur, à quelqu’un capable de délivrer des paroles de vie. Pater et Magister, l’avons-nous appelé plusieurs fois dans ces colonnes. Le Pape a parlé avec autorité, calmement, posément, fermement. Il n’a rien éludé, rien évité ; il n’a pas choisi la facilité, bien au contraire ; et pourtant, ça a passé ; son message a même enthousiasmé les jeunes, et les moins jeunes : bien qu’il s’agisse d’un message difficile et fort, ou justement parce que il s’agit d’un message difficile et fort ? Et que le public sent bien, que dans la période fort troublée et fort incertaine que nous traversons, ce ne sont pas de paroles creuses, mièvres ou adoucies que nous avons besoin, mais bien de paroles qui nous ramènent à l’essentiel, qui nous indiquent les sommets et nous gardent des précipices (« Fuyez les Idoles !.... »)

              Dans le vide planétaire sidéral laissé par l’effondrement cataclysmique du marxisme et des idées révolutionnaires, qui parle encore au monde comme l’a fait le pape ? Qui propose encore quelque chose, du moins quelque chose  qui tienne la route ? Qui essaie de répondre aux faims et aux soifs des hommes et des femmes de notre temps, dont une bonne part, abusés par les faux prophètes, sont précisemment des victimes des illusions du matérialisme et de l’immense déception qu’il laisse après lui ?.....

              Il y a vingt ans, à la chute du Mur de Berlin, il y avait deux super puissances,  engagées dans une lutte à mort : c’était pendant cette époque, lointaine maintenant, et qui appartient à l’Histoire, que l’on appelait la guerre froide. Et l’on a dit, avec raison, qu’après l’effondrement du bloc de l’Est, seule restait comme super puissance celle des Etats-Unis. Mais n’est-ce pas exactement la même chose – mutatis mutandis- dans le domaine intellectuel et spirituel ? Dans cette lutte titanesque et séculaire entre les deux religions, la chrétienne et la révolutionnaire, il nous a été donné de vivre en direct, en quelque sorte, la désintégration de la religion révolutionnaire ; exactement comme des spectateurs ont pu voir se désintégrer la navette Columbia ou la première fusée Ariane V…..

              C’est fini : la religion révolutionnaire ne parlera plus jamais aux hommes ; du moins pour longtemps, elle ne les fera plus rêver, elle qui les a conduit au pire cauchemar que l’humanité ait jamais connu ! Jacques Julliard l’a exprimé mieux que nous n’aurions su le faire : « … Il n'est pas besoin de relever la tête bien haut pour savoir que l'horizon est bouché, que l'orient rouge est délavé, que le soleil levant s'est drapé de deuil. Or le fait est que jamais les socialistes ne nous ont donné une analyse convaincante de ce qui s'était passé, qui engageait pourtant la vision qu'ils se faisaient de l'avenir..."; "...rien qui nous explique pourquoi l'un des plus beaux rêves de l'humanité s'est transformé en un immense cauchemar...;...s'agit-il d'un vice intrinsèque?...." (2).

             On nous pardonnera, nous l’espérons, de nous citer nous même : « A bien y regarder – écrivions-nous récemment - et nous aurons à y revenir, il n'y a plus guère que le Pape, que l'Eglise Catholique, à tenir tête, héroïquement, au "bazar" qu'est le monde moderne, et à tracer, pour l'humanité toute entière, une autre voie que celles, avilissantes, du matérialisme sanglant des révolutions, ou du libéralisme doux de ce que nous nommons encore, par une singulière inconscience, le "monde occidental".  

              Voilà donc comment s’ouvre ce nouveau siècle. Une grand voix s’est tue, et pour longtemps : celle de la foi révolutionnaire. On comprend bien que, pour nous, c’est tant mieux ! Foi pour foi, Religion pour religion, nous préférons l’originale, celle qui se trouve aux racines de notre Histoire, qui est constitutive et partie intégrante de notre Etre profond, c'est-à-dire le christianisme qui nous est, d’une certaine façon, consubstantiel ; et qui est inséparable de ce que nous sommes, tout simplement, lui que la révolution a voulu extirper de notre sol et de nos consciences.     

     

    (1) : Il faut signaler à ce propos que, pour ce voyage, l’ensemble de la profession journalistique s’est signalé, en faisant bien son travail, souvent même très bien, et parfois même encore d’une façon remarquable. On ne compte plus les très pertinentes interventions d’un très grand nombre de journalistes et d’observateurs : on se plaint souvent –à juste titre, hélas…- d’une certaine médiocrité des médias. Elles viennent de nous montrer qu’il peut leur arriver de savoir faire, avec compétence, leur métier. Il nous a semblé que cela devait être noté….. 

    (2) : Le Nouvel Observateur, numéro 2230 du 2 août 2007. 

     

  • Entre tartufferie et piège mortel : la différence et la diversité, ou l'arnaque du siècle. III : A la France, faut-il de

                Ils vampirisent l’Afrique, et ils en sont tout fiers, les néo-colonialistes. Ils faisaient plaisir à voir, les journalistes et observateurs, ce mercredi 12 novembre 2008, en annonçant « la » nouvelle : ça y est ! enfin ! ouf ! c’est pas trop tôt ! (on en passe, et des meilleures…..)

                Vous pensiez peut-être qu’il s’agissait de la découverte du vaccin contre le Sida ? Ou de la fin du chômage de masse ? Ou du dernier sans-abri ? Alors, là, vous n’y êtes pas du tout. Mais alors, pas du tout, du tout…..

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                Non, la nouvelle du siècle, qui les faisait tant jubiler ce soir là c’était la nomination… du premier Préfet noir (1) !

                Ils vampirisent l’Afrique, disions-nous en première ligne. Mais si vous leur demandez s’ils sont pour le colonialisme, il vous jureront la main sur le cœur que non ; que c’était ignoble, le colonialisme, révoltant, honteux, répugnant ; qu’on a pillé l’Afrique (voyez les élucubrations de Jean Ziegler…) et tout le tremblement…..

                Mais qu’est-ce qu’ils font, aujourd’hui ?

                Voilà quelqu’un – le nouveau préfet – qui fait partie de l’élite du Cameroun, et qui de son propre aveu n’envisageait pas de s’installer en France. Il va donc manquer à son pays, à qui nous l’avons en quelque sorte volé. Or, et tout le monde le sait bien, la France se suffit en fonctionnaires : nous en avons le double de ce qu’il nous en faudrait, et notre sur-administration démentielle et insensée est l’une des causes majeures de nos problèmes économiques. Il est donc tout à fait inutile d’en importer d’autres pays, et surtout de pays d’Afrique noire, qui doivent se construire et à qui nous volons ainsi leurs cerveaux.

                Car l’exemple du préfet se répercute à tous les niveaux. Le pillage des pays africains est généralisé : initié par le nouveau préfet noir, un Club de la diversité a pris son essor. A Marseille, un exemple parmi tant d’autres, il est dirigé par Patrice Moundoubou, avocat de 40 ans, inscrit au barreau de Marseille. Que l’on prenne le problème par le bout que l’on voudra, que l’on tourne et vire autant que l’on voudra, il s’agit là aussi d’un membre de l’élite qui manque à son pays ; et d’un organisme dont l’action, nous le disons tout net, consiste à légaliser le pillage des ressources humaines de l’Afrique, en lui donnant une apparence de respectabilité, pour tenter de le justifier (2).

                 N’est-ce pas stupéfiant ? Ce néo-colonialisme, en plus pratiqué en toute bonne conscience, n’est-il pas à proprement parler scandaleux ? Les néo-colonialistes d’aujourd’hui continuent le colonialisme d’hier, en y ajoutant en plus l’hypocrisie de la bonne conscience ! En prétendant, en plus, faire le bien ! Leur stupéfiante bonne conscience n’est en réalité que de l’inconscience…..

                Au fait, demandez-leur s’ils sont pour des ministres blancs en Inde ou en Corée ; ou pour des préfets catholiques en Arabie saoudite. Là, pour le coup, vous les verrez, toujours avec la main sur le cœur, jurer que ce serait affreux, car il faut bien sûr respecter l’autre, le différent ; respecter les pays jaunes, les pays musulmans ; l’Indien en Inde, le Coréen en Corée, l’Arabe en Arabie…

                Et le français en France ? Lui, non ! Lui, il faudrait qu’il disparaisse ! Lui, il devrait être géré par des préfets noirs ou musulmans : et ils voudraient nous faire avaler cela, en l'appellant diversité, différence, anti racisme : n’est-ce pas grandiose !..... (fin).

    (1)     : Pierre N’Gahane, 45 ans, camerounais d’origine, se définissant lui-même comme noir africain.

    (2)     : Nous n’avons bien sûr rien, personnellement, contre les deux personnes que nous citons ici : Pierre N’Gahane et Patrice Moundoubou.

               Il s’agit de personnes aimant la France, rayonnant le français, probablement chrétiens si l’on en juge par leurs prénoms. On peinerait à trouver quelque chose qui nous déplairait, en soi, dans leurs actes ou leurs propos. C'est d'ailleurs la même chose avec Nacer Meddah, préfet de Seine-Saint-Denis, d'origine algérienne. Sa famille fut accueillie par la France dans les années 50 et, reconnaissant envers son pays d'accueil pour l'aide qu'il a reçue, il a choisi en retour de le remercier : "....Une fois mes études terminées, servir l'Etat est vite apparu pour moi comme une évidence".

               Chaque fois que nous voyons notre pays aimé et respecté, nous sommes les premiers à nous réjouir. Et lorsque nous voyons des immigrés reconnaissants envers la générosité dont notre pays a fait preuve à leur égard - et il a bien fait - nous sommes les premiers à les accueillir : une France généreuse, qui rayonne à l'extérieur et qui se fait aimer par des populations étrangères, cela nous convient parfaitement. Pour faire court, ce que nous vomissons c'est Youssef Fofana, mais cela ne nous empêche bien sûr pas, au contraire, d'accueillir Léopold Senghor !

               Ce qui est critiquable et condamnable dans la logique et le mécanisme qui se mettent en place aujourd'hui, ce ne sont bien sûr pas les personnes. C'est ce qu'il y a derrière, c'est ce mélange d'idéologie et de calcul politico-économique, cette alliance objective des trotskistes (pour casser la France) et de la fraction véreuse du patronat (pour augmenter ses profits). Les uns et les autres, avec un cynisme n'ayant d'égal que leur mauvaise foi, se fichant bien pas mal de l'intérêt national et du Bien Commun (pour ce qui est de la France); comme ils se fichent bien pas mal de l'intérêt personnel des immigrés et de l'intérêt général du continent noir (pour ce qui est de l'Afrique).

               C'est cette alliance objective là, monstrueuse et contre nature en soi, mais surtout objectivement mortelle pour la France historique que nous dénonçons sans cesse. Et pas, évidemment, des personnes au demeurant sympathiques, auxquelles rien ne nous oppose, et qui sont elles-mêmes les jouets d’une manipulation qui les dépasse.

               Nous disons juste que si nous sommes contre les délocalisations en économie, nous sommes contre toutes les délocalisations : y compris et surtout celles qui consistent à délocaliser les populations, à transplanter les Africains en Europe et en France. Ce n’est pas respecter les hommes et les femmes d’Afrique que de les considérer comme des pions interchangeables, pouvant vivre indifféremment dans leur milieu naturel ou parqués dans des habitations insalubres, et exploités par des patrons s’enrichissant sur leur dos, et les exploitant comme de la chair à profit.

               C’est parce que, nous, nous aimons vraiment l’Afrique et les Africains que nous ne faisons pas comme les néo colonialistes qui prétendent - mais en paroles seulement - aimer l'Afrique; et que nous refusons ces délocalisations de population, qui se traduisent au final par l’exploitation économique des immigrés, et la ruine par vampirisation de leurs pays d’origine.

  • Mgr de Berranger : un départ que l'on ne regrettera pas (1/2)...

                Un signe ? Peut-être. Un symbole, oui, certainement. Et même un symbole fort. On a appris que le pape avait accepté la démission d'Olivier de Berranger, évêque de Saint-Denis. Une démission annoncée en juin dernier, l'évêque - âgé de 70 ans - souhaitant rejoindre sa famille spirituelle du Prado, à Lyon.

                Cette acceptation intervenant au moment même où le pape lève l'excommunication frappant les quatre évêques de la fraternité Saint Pie X, on peut bien dire que, oui, manifestement, une page se tourne, qu'un chapitre s'achève et qu'un autre commence .....

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                Disons-le tout net : nous ne pleurerons pas Mgr de Berranger. Son départ ne nous causera aucun chagrin, et c'est sans tristesse aucune que nous le verrons partir. C'est difficile à dire, ce n'est pas très agréable et ce n'est pas forcément non plus très charitable, mais nous le disons sans animosité particulière.

                Petit retour en arrière, pour comprendre le pourquoi du comment.....

                Sans tomber dans aucune attaque ad hominem, nous ne pouvons oublier l’action quasi constante de Monseigneur de Berranger en faveur de toute immigration, ni l’action négative qu’il a toujours menée, par sa collusion permanente avec tous les groupuscules du parti immigrationniste et sanspapieristeet contre son pays et contre sa religion.

                Nous n’essaierons bien sûr pas de présenter, ici, une lecture exhaustive de tous les faits et gestes de Monseigneur de Berranger. Nous nous en tiendrons à une unique déclaration, parce que celle-ci résume bien à elle seule toute son action – on n’ose pas dire : tout son apostolat !..... - et qu'elle suffit à elle seule à montrer comment il a, nous le disions à l'instant, joué et contre sa religion et contre son pays.

               Nous voulons parler de cette scandaleuse Lettre qu’il a publiée le 1° Octobre 2007, avec Claude Schockert (évêque de Belfort-Montbéliard). C’était l’époque où l’on parlait des tests ADN, et de mieux lutter contre l’immigration clandestine...…

              Intitulée « Déclaration à propos du projet de loi sur l’immigration », Schockert et  Berranger y écrivaient cette phrase ahurissante : « …Les chrétiens refusent par principe de choisir entre bons et mauvais migrants, entre clandestins et réguliers, entre citoyens pourvus de papiers et d’autres sans-papiers …» . Ah, bon ? On ne choisit pas non plus entre voleurs et volés, violeurs et violés, assassins et assassinés ? Qu'est-ce que c'est que cette pseudo morale ? Il y a des lois, et tout le monde doit les respecter. Point barre. A moins de cataloguer tout "migrant", en soi, comme être supérieur, du simple fait qu'il est "migrant"; et donc au-dessus des lois....

               Sentant venir l’objection, Schockert et Berranger  ajoutaient vite : « …quels qu’ils soient, ils sont nos frères en humanité ».  Certes, mais ce prince de l’Eglise, chargé d’enseigner la Vérité aux autres, commet une grossière erreur, et montre qu’il ne maîtrise pas si bien ce Catéchisme qu’il est pourtant censé expliquer à autrui. L’égale dignité des personnes, c’est une chose. Sur laquelle nul ne revient. Mais là, Schockert et de Berranger confondent l’égale dignité des personnes et celle – totalement farfelue, irrecevable et scandaleuse - des comportements. Que tout homme, même criminel, reste une créature de Dieu, oui. Mais son crime, lui, est odieux. On dirait que de Berranger l’a oublié…..

                Et c'est le deuxième aspect choquant de cette Lettre, nulle part Schockert et de Berranger ne faisaient allusion aux paroles, pourtant fortes,  contenues dans le Catéchisme de l’Eglise Catholique. Comme celle-ci ( paragraphe 2241, page 459 ) : «L’immigré est tenu de respecter avec reconnaissance le patrimoine matériel et spirituel de son pays d’accueil, d’obéir à ses lois et de contribuer à ses charges. ». Nos évêques se contentaient d’en appeler à la « conformité avec le droit européen et international » (sic !).

                Évacuer ainsi toute référence à ce que l’on pourrait appeler le discours officiel de l’Église, pour ne s’en tenir qu’à des lois somme toute simplement humaines : de la part de deux messeigneurs, était-ce bien raisonnable ? Était-ce tout simplement honnête ? Et, en mettant sur un pied d’égalité les immigrés «réguliers» et les immigrés « clandestins » - comme nous l’avons vu plus haut - nos deux évêques ne se mettaient-ils pas  directement en opposition avec le Catéchisme de l’Eglise Catholique, qu’ils sont pourtant censés prêcher ?...

                Suivaient encore plusieurs critiques à peine voilées, et de fort mauvais goût, sur une prétendue mauvaise action dont se rendrait coupable le peuple français, coupable de ne pas accueillir assez largement et assez généreusement les gentils immigrés ! Critique des « mesures toujours plus restrictives à l’encontre des migrants… concessions à une opinion dominée par la peur plutôt que par les chances de la mondialisation ». Critique de  « l’imposition de tests génétiques pour vérifier les liens de parenté» à cause «d’un risque de grave dérive sur le sens de l’homme et la dignité de la famille» (ah, bon ? chercher à lutter contre la fraude et les fausses déclarations, c’est attentatoire à la dignité de l’homme ? pauvre évêque, et pauvre message !….).

                Et, enfin, éloge sans réserve, sans nuance et sans retenue du regroupement familial « qui est un droit toujours à respecter ». On l’a vu plus haut, à aucun moment le duo Schockert/Berranger ne parle des devoirs des immigrés. Pour eux, le monde est simple et facile : l'immigré a tous les droits, et aucun devoir; la France a tous les devoirs, et aucun droit. Seule la France doit. Et elle leur doit tout : papiers, travail, allocs…

                  Eux n’ont pas –pour Schockert et de Berranger- à respecter une identité, une Histoire, des mœurs, des us et coutumes…. rien ! Tout est à sens unique : tout pour les immigrés, rien pour les autochtones. On caricature un peu, mais on n’est pas très loin de la vérité …..                  (à suivre…..)