1803 : Napoléon contre la France : le "recès" de 1803
Le "Recès" de la Diète d’Empire est une résolution (ou "recès") de la dernière séance de la Diète d’Empire tenue à Ratisbonne.
Il avait été décidé, suite à l’accord entre la France et l’Autriche de 1802 et en conséquence du Traité de Lunéville, de dédommager les princes allemands des terres qu’ils avaient perdues lors de l’annexion de la rive gauche du Rhin par la France.
Mais, d’une part, certains princes, qui ne possédaient rien sur la rive gauche du Rhin, obtinrent des avantages territoriaux.
D’autre part, le "recès" bouleversait le Saint-Empire dans la mesure où les principautés ecclésiastiques disparaissaient, ainsi que 45 villes libres sur 51...
Couverture du "recès" du 25 février 1803...
Michel Mourre monte bien comment ce "recès" - qui fut aggravé par la "médiatisation" de 1806 : voir l'Éphéméride du 12 juillet - fut l’ouverture de la boîte de Pandore, et comment il inaugura une dynamique en rupture avec la politique traditionnelle française de division des Allemagnes; le "recès" - aggravé encore en 1806 par la "médiatisation" !... - lançait, en fait, le processus d’unification allemande, et devait très vite se révéler désastreux pour nous, comme on le vit en 1814/1815, et, surtout, en 1870, 1914 et 1939…
Du Dictionnaire Encyclopédique d’histoire, Tome I, page 166 :
"…À la suite des Traités de Campoformio (1797) et de Lunéville (1801), la France annexa toute la rive gauche du Rhin…
En vertu des Traités, les Princes qui avaient été dépossédés sur la rive gauche du Rhin devaient être dédommagés : après de longues négociations, le recès impérial de février 1803 remania complètement la carte de l’Allemagne.
Presque toutes les principautés ecclésiastiques ainsi que la plupart des villes libres et des petites seigneuries disparurent pour agrandir la Prusse, la Bavière, le Wurtemberg, Bade, la Hesse-Darmstadt et le Nassau.
Par cette simplification révolutionnaire, qui faisait passer "les Allemagnes" de plus de 300 États en 1789 à moins de quarante, Napoléon Bonaparte prenait le contre-pied de la politique de la monarchie, laquelle s’était employée à maintenir en Allemagne le chaos créé par les Traités de Westphalie…"
Pour ne prendre que quatre exemples, au lieu de "la croix des géographes" et de l’Allemagne divisée en plus de 300 entités, quatre régions grandissaient considérablement :
1. La Prusse passait de 2.000 km2 à 12.000, et de 140.000 habitants à 600.000.
2. La Bavière passait de 10.000 km2 à 14.000, et de 600.000 habitants à 850.000.
3. Le Bade passait de 450 km2 à 2.000, et de 30.000 habitants à 240.000.
4. Le Wurtemberg passait de 400 km2 à 1.500, et de 30.000 à 120.000 habitants.
Cette rupture avec la politique traditionnelle de la monarchie, cette "politique" (!) anti-nationale était une folie : elle détruisait l'oeuvre bienfaisante de Louis XIII et Louis XIV, de Richelieu et Mazarin, qui avaient obtenu le morcellement de l'Allemagne en plus de 350 États, par les Traités de Westphalie -"chef d'oeuvre absolu", disait Bainville - qui assuraient notre sécurité et nous donnaient la prééminence en Europe.
Cette politique suicidaire, trahison totale des intérêts nationaux de la France, fut mise en route par la Révolution et la République, et poursuivie par son "sabre", Napoléon, puis par Napoléon III : tous, Révolution, Républiques, Empires, agissant contre l'intérêt national, et - de fait - en "intelligence avec l'ennemi"…
Dans notre Album Maîtres et témoins...(II) : Jacques Bainville. voir les deux photos "Intelligence avec l'ennemi : le recès de 1803" et "la médiatisation de 1806")