Éphéméride du 13 mars
À Paris, le Jardin des Tuileries de nos jours
Il y a treize jours, dans l’année, pendant lesquels il ne s’est pas passé grand-chose, ou bien pour lesquels les rares événements de ces journées ont été traités à une autre occasion (et plusieurs fois pour certains), à d'autres dates, sous une autre "entrée".
Nous en profiterons donc, dans notre évocation politico/historico/culturelle de notre Histoire, de nos Racines, pour donner un tour plus civilisationnel à notre balade dans le temps; et nous évoquerons, ces jours-là, des faits plus généraux, qui ne se sont pas produits sur un seul jour (comme une naissance ou une bataille) mais qui recouvrent une période plus longue.
Ces jours creux seront donc prétexte à autant d'Évocations :
• 1. Essai de bilan des Capétiens, par Michel Mourre (2 février)
• 5. Quand Le Nôtre envoyait à la France et au monde le message grandiose du Jardin à la Française (13 mars)
• 7. Quand Louis XIV a fait de Versailles un triple poème : humaniste, politique et chrétien (28 avril)
• 9. Quand la cathédrale Saint-Pierre de Beauvais a reçu, au XIIIème siècle, son extraordinaire vitrail du Miracle de Théophile (28 mai)
• 10. Quand Chenonceau, le Château des Dames, à reçu la visite de Louis XIV, âgé de douze ans, le 14 Juillet 1650 (26 juillet)
• 11. Le Mont Saint Michel (11 août)
• 12. Quand François premier a lancé le chantier de Chambord (29 septembre)
• 13. Quand Léonard de Vinci s'est installé au Clos Lucé (27 octobre)
Aujourd'hui : Quand Le Nôtre envoyait à la France et au monde le message grandiose du Jardin à la Française.
Le 15 septembre 1700, s’éteignait à Paris, en sa maison des Tuileries, André Le Nôtre, dont le seul nom symbolise la perfection et l’apogée de l’art des jardins classiques.
Selon ses dernières volontés, il fut enseveli à l'intérieur de l'église Saint Roch, dans la Chapelle Saint-André, qu’il avait fait construire à ses frais.
De son tombeau, détruit et profané en 1793, subsiste seul le célèbre buste de Coysevox (ci dessous).
Lors de son approximative remise en place, après la Révolution, on restitua également la longue épitaphe autrefois gravée sur une dalle de marbre noir que supportait une figure de la Foi. Cette épitaphe, dont l’auteur demeure inconnu, n’est pas sans mérite, car elle constitue l’un des plus anciens hommages rendus à l’illustre jardinier :
"Ici repose le corps d’ANDRE LE NOSTRE Chevalier de l’ordre de St. Michel, Conseiller du Roi, Contrôleur général des Bâtiments de Sa Majesté, Arts et Manufactures de France, et préposé à l’embellissement des Jardins de Versailles et autres Maisons Royales. La force et l’étendue de son génie le rendaient si singulier dans l’art du jardinage, qu’on peut le regarder comme en ayant inventé les beautés principales et porté toutes les autres à leur dernière perfection. Il répondit, en quelque sorte, par l’excellence de ses ouvrages, à la grandeur et à la magnificence du Monarque qu’il a servi et dont il a été comblé de bienfaits. La FRANCE n’a pas seule profité de son industrie, tous les Princes de l’Europe ont voulu avoir de ses élèves et il n’a point eu de concurrent qui lui fut comparable".
Le jardin à la Française, en opposition au jardin anglais, porte à son apogée l'art de l'ordre et de la symétrie (ci dessous, les jardins du château de Champs).
Il s'inspire directement de la pensée d'Anaxagore :
"l'Esprit organise la confusion et donne forme au chaos"
(voir notre Album, Versaillles, le Palais temple du soleil)
Si l'organisation type du Jardin à la Française est fixée dès le milieu du XVIème siècle par Philibert de l'Orme au Château d'Anet, l'art du jardin classique ne prend vraiment ses lettres de noblesse que sous l'impulsion de Louis XIV, au XVIIème siècle.
Jusqu'alors, et à quelques rares exceptions près, les jardins étaient enclos, sur le modèle médiéval; ils étaient lieu de promenade et de culture potagère.
Avec Louis XIV, le jardin revêt un enjeu politique. Il marque la grandeur et la maîtrise du monarque. Le désordre de la nature se doit d'être dompté pour laisser la place à la symétrie, poussée à l'extrême, à l'ordre et à la perspective.
Une allée centrale marque le coeur de l'ouvrage, c'est l'axe de perspective (ci dessus, à Vaux le Vicomte). De part et d'autre de cet axe s'ordonnent les allées, les parterres et les bassins, les alignements d'arbres. Le tout est découpé en pièces (chambres, salles, etc) remplissant chacune une fonction sur un parcours de promenade pré-établi.
Chaque pièce et couloir sont ponctués de statues et de topiaires.
Les pièces d'eau sont les plus prestigieuses et les plus spectaculaires. Plus l'on s'éloigne du château et plus la nature est autorisée à reprendre ses droits sous la forme de bois et de prairies.
On s’accorde à voir dans les jardins de Vaux-le-Vicomte (ci-dessous), entrepris au plus tard en 1656, la première œuvre sûre de Le Nôtre. C’est à Vaux que se reconnaissent en effet pour la première fois dans toute leur ampleur les principes fondamentaux de son art, tels qu’il devait par la suite les porter à une sorte de quasi perfection :
Il convient aussi de citer le grand parterre de Fontainebleau (ci dessous), réalisé entre 1660-1664, ainsi que les jardins et la célèbre terrasse de 2.400 mètres de long de Saint-Germain en Laye (1669).
À Paris, le jardin des Tuileries reçut vers 1667 le tracé dont nous voyons encore les grandes lignes : en dégageant et en prolongeant la perspective, il amorce une dynamique qui donnera naissance à la future voie des Champs Elysées (ci- dessous). Le Nôtre a donc su transcender son art et devenir, à l'occasion, voisin et collaborateur des grands urbanistes...
Le Nôtre a également crée les Jardins de Breteuil, Chantilly, Josselin; les Parcs de Saint-Cloud et de Sceaux;
Et, bien sûr, le Parc et les Jardins de Versailles ( ci dessous, le parterre du midi, prolongé par la pièce d'eau des Suisses) et de Marly...
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