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Rechercher : Rémi Hugues. histoire

  • Guy Bertran de Balanda : quatre ans déjà, toujours présent !

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     "La" photo préférée, prise aux États-Unis, lors d'une de ses visites chez l'un de ses fils, Axel, qui vit et travaille là-bas...

    À l'occasion de ce quatrième anniversaire de l'entrée de Guy dans le vrai Royaume, nous lui dédions ce compte-rendu paru dans L'Action française du 21 Février 1910, (et en "Une", s'il-vous plaît, excusez du peu !...) de la magnifique réunion publique tenue la veille, à Perpignan (voir ci-dessous)...

    Comme chaque année, la famille de Guy organisera une Messe en la cathédrale d'Aix, suivie d'un repas familial, devenu une tradition maintenant. Je suis convié et, naturellement, je serai présent, comme les trois années précédentes, à l'invitation de Bénédicte et Florence (soeurs aînée et cadette de Guy) et de Pierre et Hugues (ses frères) à cette prochaine Messe en la Cathédrale Saint Sauveur d'Aix et au repas/réunion familiale qui s'ensuivra. Je serai accompagné par notre Rédacteur en chef Jean-Baptiste Collomb, qui a si bien connu Guy, et nous vous représenterons tous, vous qui avez connu et apprécié Guy mais ne pourrez être sur place ce jour-là...

    François Davin, Blogmestre

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    Dans la "Une" de L'Action française du Lundi 21 Février 1910 :

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  • Le Comte de Paris décoré (2/2): du Président au Chef de la Maison de France....

               Nous avons, en son temps, relaté la cérémonie au cours de laquelle le Comte de Paris a reçu, des mains de Nicolas Sarkozy, les insignes de Chevalier de la Légion d'Honneur, à titre militaire. Nous complétons aujourd'hui cette première note (du 21 mai 2009, que nous repassons ci-après) en reproduisant le discours de l'Allocution prononcée pour l'occasion par le Chef de l'Etat.

                Il n'est en effet pas inutile de revenir sur cette allocution, et de réfléchir un peu sur le sens des paroles que le President a adressées au Chef de la Maison de France. En se souvernant que Nicolas Sarkozy n'était nullement obligé de dire ce qu'il a dit là, et qu'il aurait pu, soit confier ce rôle à l'un de ses subordonnés, soit se cantonner dans des généralités protocolaires. Or, les mots ont un sens, et si -bien évidemment...- parler n'est pas tout, il n'en demeure pas moins que -et c'est le cas ici- parler de cette façon, avec ces mots, ces témoignages de respect,  c'est déjà, en soi, une forme d'action...

                Une autre réflexion, bien différente: il est piquant de constater que ces paroles illustrent bien le paradoxe de Nicolas Sarkozy : il est lui-même dans son époque et de son époque, qui oublie ses racines au même moment ou elle en redécouvre le besoin…..

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                                                                               I : Le Comte de Paris promu Chevalier de la Légion d'Honneur, à titre militaire....

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                Nous vous l'annoncions dans notre reportage feuilleton consacré au mariage du prince Jean et de Philoména: le Comte de Paris, Chef de la Maison de France, devait recevoir, le 18 mai 2009, la Légion d’Honneur, à titre militaire, des mains du Président Nicolas Sarkozy.


                C'est chose faite: au cours d'une cérémonie d’une durée de 45 minutes, qui à eu lieu ce lundi à l’Elysée, en présence notamment des Princes Jean, duc de Vendôme, et Eudes, son frère, duc d'Angoulême, le Comte de Paris a été promu au grade de Chevalier de la Légion d'Honneur.

                Lorsqu'il était encore le Comte de Clermont, Henri d'Orléans avait déjà reçu la croix de la Valeur Militaire, en 1959, après avoir servi durant de nombreuses années dans les rangs de la Légion Etrangère. Il avait reçu le baptême du feu lors de la Guerre d'Algérie.

                Il n'est pas rare qu'une telle distinction soit remise, à titre militaire, à un membre de la famille d'Orléans. Servir, et dans le cas présent servir dans l'Armée française, est en effet une tradition bien ancrée dans cette famille. Le dévouement et l'esprit de sacrifice militaire y ont souvent été poussés jusqu'à l'héroisme, et parfois même jusqu'au sacrifice suprême, comme ce fut le cas pour le Prince François, l'un des onze enfants du précédent Comte de Paris, et donc frère de l'actuel Comte de Paris, mort pour la France en Algérie en 1960, près du village de Michelet.....

                 Nous présentons nos félicitations au Chef de la Maison de France pour cette distinction qui vient de lui être attribuée, et nous nous associons pleinement à la joie de sa Famille.

                                                                    II : Allocution du Chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy.

     

    Monseigneur, Madame, Mesdames et, si vous me le permettez, chers amis,

    C’est un plaisir, mais plus encore un honneur, de vous accueillir ce soir au Palais de l’Elysée, ainsi que votre famille, pour vous remettre, Monseigneur, les insignes de chevalier de la Légion d’honneur à titre militaire. Vous êtes né, Monseigneur, en 1933 en Belgique. A cette époque, depuis 1886 et jusqu’en 1950, la loi française frappait d’exil le chef de la famille de France et son fils aîné. Toute votre enfance, vous la passerez loin de votre pays, en Belgique, au Brésil, au Maroc, en Espagne et au Portugal, au gré des lieux de résidence de votre père et des évènements tragiques qui secouèrent l’Europe et le monde jusqu’à ce que vous ayez l’âge de 12 ans.

    En 1947, par un décret spécial du Président Vincent Auriol – la loi d’exil n’a pas encore été abrogée –, vous êtes autorisé à séjourner en France pour y faire vos études. Vous les ferez à Bordeaux, puis à Paris en sciences politiques.

    En 1957, vous rejoignez l’armée et, comme tous les jeunes garçons de votre génération, vous partez en Algérie : c’est le début de votre carrière militaire.

    Vous vous illustrez à plusieurs reprises : en novembre 1958 dans la région de Constantine ; le 20 février 1959 dans celle de Morsott ; et surtout, en mars de la même année, près de Châteaudun -du- Rhumel, où votre intervention permet de surprendre et de mettre en déroute une bande rebelle importante. Vous serez cité à l’ordre de la division pour cet exploit. Tous ceux qui vous ont vu servir en Algérie ont en mémoire votre sang-froid, votre courage, votre engagement.

    Revenu en France, vous restez au cœur du conflit algérien en coordonnant les services de renseignement pour le compte du Secrétariat général de la défense nationale. Après les accords d’ Evian, vous rejoignez le cinquième régiment de hussards en Allemagne ; puis, de 1963 à 1968, vous serez officier-instructeur à la Légion étrangère. Vous effectuerez à cette occasion une dernière mission en Afrique du Nord.

    Vous êtes resté très attaché à la famille des légionnaires, aux hommes que vous y avez croisés, et plus globalement à l’armée dans son ensemble et à ce qu’elle représente pour la Nation. La distinction que je vous remettrai dans quelques instants vous a été décernée à titre militaire : c’est une précision qui, à vos yeux, revêt une importance particulière.

    Vous entamerez ensuite une carrière civile : au Crédit lyonnais pendant six ans ; puis avec votre propre entreprise à compter de 1974, pour aider nos PME  et nos PMI à l’exportation.

    Très vite toutefois, vous consacrerez une bonne partie de votre temps à des activités d’intérêt général, fidèle en cela à l’histoire de votre famille, qui a toujours eu à cœur de servir la France et les Français.

    En 1981, vous créez le Centre d’Etudes et de Recherches sur la France Contemporaine, une association qui deviendra, en 1999, l’Institut de la Maison Royale de France. Son but est de réunir des personnes de toutes sensibilités, de toutes situations, de toutes confessions, dans une grande exigence de tolérance et de respect pour l’identité et l’expérience de chacun. Dans le cadre de cette activité, vous effectuez de nombreux déplacements et vous allez à la rencontre des Français, quelle que soit leur condition, quelle que soit leur origine.

    Vous êtes l’auteur de plusieurs ouvrages, dont la principale ligne directrice est une réflexion inquiète et critique, et en même temps exigeante et généreuse, sur notre pays, notre civilisation, les menaces qui pèsent sur elle et les ressorts qu’il conviendrait de mobiliser pour inventer une autre manière de vivre, plus solidaire, plus harmonieuse, et plus conforme à ce que vous estimez être la nature spirituelle de l’homme.

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    Le Comte de Paris reçoit les insignes de chevalier de la Légion d’honneur à titre militaire, des mains du Président Nicolas Sarkozy : « …l’immense héritage intellectuel, culturel, politique, patrimonial, artistique, qu’ont légué à la Nation ces « quarante rois qui, en 1000 ans, firent la France ». »



    Vous êtes également peintre et vous avez publié, il y a quelques années, un recueil de vos peintures consacré à la France, cette France que vous aimez profondément.

    Monseigneur, il n’est sans doute pas facile de naître avec « l’histoire en héritage », pour reprendre le titre de l’un de vos livres, que vous avez publié en 2004.

    Vous n’avez jamais caché les souffrances endurées du fait de votre enfance en exil, des rigueurs de votre éducation, de l’autorité de votre père. Votre famille a connu de grandes douleurs, ainsi que des divisions. Elle a connu plus encore, et vous-même particulièrement, la calomnie, le mensonge, les rumeurs.

    Loin de vous enfermer dans le ressentiment ou dans l’amertume, vous avez transformé ces épreuves en une vie de tolérance, de respect, de générosité, d’humanité. Parce que vous savez ce que c’est que d’être jugé, vous ne vivez pas dans le jugement des autres, mais dans la compassion et la compréhension.

    Depuis la mort de votre père, vous êtes le chef de la famille de France. Votre action s’illustre par une volonté de réconciliation et d’apaisement qui vous honore, et dont je suis sûr qu’elle portera des fruits.

    En ces temps de crise économique, où tant de gens se tournent vers l’Etat, la République n’oublie pas ce que l’Etat doit à vos ancêtres.

    Ce sont eux qui, les premiers, en firent le socle de la Nation. Ce sont eux qui le dotèrent d’une organisation, d’administrateurs et de principes fondamentaux. La France a connu beaucoup de régimes politiques depuis 1789, mais jamais elle n’a renié cet Etat patiemment construit au long des siècles.

    La France n’a pas davantage renié l’immense héritage intellectuel, culturel, politique, patrimonial, artistique, qu’ont légué à la Nation ces « quarante rois qui, en 1000 ans, firent la France » ; en particulier ceux de la dynastie capétienne, dont vous êtes héritier, et qui, de loin, ont dominé l’histoire de la monarchie française.

    Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si votre fils, le Prince Jean, s’est marié il y a quelques jours à Senlis, là-même où Hugues Capet fut choisi comme roi, en 987, avant d’être sacré à Noyon.

    Et c’est pourquoi, je suis heureux, mais également fier, comme je l’ai dit au début de ce discours, de vous remettre ce soir, Monseigneur, les insignes de chevalier de la Légion d’honneur.

     

    Nicolas Sarkozy

  • Éphéméride du 25 avril

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    1792 : la guillotine employée pour la première fois... (illustration : Le dialogue des carmélites, d'après Georges Bernanos)

     

     

     

    1214 : Naissance du futur Louis IX (Saint Louis)         

     

    Il naît à Poissy, où il sera baptisé, et signait volontiers, pour cette raison, Louis de Poissy. 

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    Les fonts baptismaux de Poissy, où fut baptisé Saint Louis 

    De Jacques Bainville (Histoire de France, chapitre V, Pendant 340 ans, l'honorable maison capétienne règne de père en fils) :

    "...En 1236, Louis IX est majeur. Il vient d'épouser Marguerite de Provence. Mariage politique qui prépare la réunion d'une autre province. Mais les époux ont d'étranges affinités. Leurs sentiments sont les mêmes. Le saint roi a près de lui une véritable sainte. Quel est ce règne étonnant qui s'ouvre ? Oh ! si le phénomène est d'une incomparable beauté, s'il est unique dans l'histoire, il n'échappe pourtant pas à une sorte de règle. Le règne de saint Louis succède à ce qu'on pourrait appeler, en forçant un peu les mots, le rationalisme du temps de Philippe Auguste. C'est une réaction. La royauté capétienne a déjà vu Robert le Pieux succéder à Hugues. Saint Louis représente un retour à l'idée du prêtre-roi. Il est en harmonie avec son temps, celui de saint Thomas d'Aquin, marqué par un renouveau de foi chrétienne. Toutes proportions gardées, c'est ainsi qu'après les encyclopédistes, le début du dix-neuvième siècle verra le Génie du christianisme et une renaissance religieuse.

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    Enluminure représentant le roi et sa mère, Blanche de Castille           

     

    Mais la monarchie a grandi, Louis IX, ce n'est plus le pieux Robert qui s'enfermait dans son oratoire. La monarchie a des devoirs, des traditions, une vitesse acquise. Saint Louis continuera ses prédécesseurs. Seulement il les continuera en développant un élément que, jusqu'à lui, la dynastie capétienne n'avait qu'à peine dégagé. Les qualités de sa race, il les poussera jusqu'à la vertu, jusqu'à la sainteté. La royauté française était un peu terre à terre. Par lui, elle prendra un caractère de grandeur spirituelle dont elle gardera toujours le reflet. On a remarqué que la plupart des autres maisons royales ou impériales d'Europe avaient pour emblèmes des aigles, des lions, des léopards, toutes sortes d'animaux carnassiers. La maison de France avait choisi trois modestes fleurs. Saint Louis a été la pureté des lis... 

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    ...À l'intérieur également le règne de saint Louis fut celui de la justice. Ce ne fut pas celui de la faiblesse : il eut la justice des justiciers et savait fort bien faire pendre, même les barons. Il y a aussi une sainteté de l'ordre et des lois. Louis IX continua l'œuvre des légistes, - il en avait pour amis, - en l'adoucissant de christianisme et d'humanité. "Bataille n'est pas voie de droit", disait-il pour refuser les "jugements de Dieu". C'est comme juge royal, sous le chêne de Vincennes, que son souvenir est resté populaire. Il ne se contentait pas de prêcher d'exemple. Il organisait les tribunaux, la procédure. Il mettait le "Parlement" au-dessus des autres juridictions. C'est sous son règne que cette cour d'appel et de justice reçoit ses attributions principales. Et le Parlement jouera un grand rôle dans notre histoire. En unifiant le droit, il unira la nation. Il renforcera l'État en éliminant peu à peu les justices féodales, jusqu'au jour où le Parlement lui-même, devenu pouvoir politique, sera un danger pour la monarchie.

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    Réformateur judiciaire, saint Louis fut aussi un réformateur de la société. Il pousse à la libération des serfs, il étend le droit de bourgeoisie. Surtout il organise les corporations. L'existence et les droits de l'ouvrier reçoivent protection dans un "ordre social chrétien", inscrit au célèbre Livre des Métiers. Si la figure de saint Louis est devenue si vite idéale, si elle est restée légendaire, ce n'est pas seulement parce que ce roi était bon, juste et charitable. C'est parce que, sous son règne, par "la bonne droiture", comme disait Joinville, la France était devenue plus prospère, la vie plus douce, plus sûre, plus humaine. Il léguera à la monarchie capétienne et à la France une renommée qui ne s'effacera plus.

    Ce pieux roi, il ne faudrait pas le prendre pour un roi clérical. Pas plus que celle de Philippe Auguste, sa monarchie n'est une théocratie. Le roi n'est pas l'esclave du clergé, dont la noblesse n'est pas davantage l'associée. C'eût été trop simple ! À chaque instant, les intérêts diffèrent, les conflits et les compétitions éclatent. La piété, la sainteté même de Louis IX le rendaient plus indépendant qu'un autre dans ses relations avec l'Église parce qu'il était insoupçonnable du point de vue de la foi. Michelet remarque avec raison que, s'il n'y avait eu saint Louis, Philippe le Bel n'eût peut-être pas osé entrer en lutte avec le pape..."

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    Voltaire - dans son Essai sur les moeurs - écrira à propos de Saint Louis :

                "Il n'est pas donné à l'homme de porter plus loin la vertu".

     

     

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    1507 : Le mot "Amérique" employé pour la première fois

              

    C'est le géographe Martin Waldseemüller qui est le premier à utiliser le nom Amérique, à Saint Dié des Vosges, dans son  "Introduction à la cosmographie...". 

    Il y écrit :

    "...Aujourd'hui ces parties de la terre (l'Europe, l'Afrique et l'Asie) ont été plus complètement explorées, et une quatrième partie a été découverte par Amerigo Vespucci, ainsi qu'on le verra plus loin. Et comme L'Europe et L'Asie ont reçu des noms de femmes, je ne vois aucune raison pour ne pas appeler cette autre partie Amerigé c'est-à-dire terre d'Amerigo, d'après l'homme sagace qui l'a découverte. On pourra se renseigner exactement sur la situation de cette terre et sur les coutumes de ses habitants par les quatre navigations d'Amerigo qui suivent".

    On lit bien le mot Americi sur le texte de gauche, à la ligne neuf :

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    1566 : Mort de Louise Labé

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    Je vis, je meurs; je me brûle et me noie :
     

    Je vis, je meurs; je me brûle et me noie;
    J'ai chaud extrême en endurant froidure :
    La vie m'est et trop molle et trop dure.
    J'ai grands ennuis entremêlés de joie.

    Tout à un coup je ris et je larmoie,
    Et en plaisir maint grief tourment j'endure;
    Mon bien s'en va, et à jamais il dure;
    Tout en un coup je sèche et je verdoie.

    Ainsi Amour inconstamment me mène;
    Et, quand je pense avoir plus de douleur,
    Sans y penser je me trouve hors de peine.

    Puis, quand je crois ma joie être certaine,
    Et être au haut de mon désiré heur,
    Il me remet en mon premier malheur.

     

    • http://coulmont.com/labe/

     

     

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    1792 : Premier emploi de la guillotine

          

    Nicolas-Jacques Pelletier, voleur de grand chemin, qui a frappé un citoyen pour lui extorquer ses assignats, est la première personne a être exécutée au moyen de la Guillotine.

    25 avril,louis ix,blanche de castille,bainville,capetiens,saint louis,philippe le bel,fleur de lys,parlement,michelet,amérique,louise labé,guillotineC'est le 10 octobre 1789 que le docteur Guillotin avait présenté son système devant l’Assemblée nationale : "Avec ma machine, je vous fais sauter la tête en un clin d’œil, et vous ne souffrez point.". Le journal polémiste royaliste, Les Actes des Apôtres, qui avait pris le parti de s'opposer à la Révolution en cultivant la moquerie et l'ironie, tourna en dérision cette nouvelle lubie de révolutionnaires, et en fit une chanson : c'est l'une des choses qui contribua le plus à attacher à cette machine le nom de Guillotin. 

    Le 20 janvier 1790, Guillotin ré-exposera les divers points concernant son projet sur l’exécution capitale et, le 3 juin 1791, le député Le Pelletier-de-Saint-Fargeau proposa d’inscrire dans le code pénal, la définition célèbre : "Tout condamné à mort aura la tête tranchée". Le 25 septembre, puis le 6 octobre 1791, les législateurs adoptèrent les articles 2 et 3 du Code pénal qui s’énoncent ainsi :

    2. La peine de mort consistera dans la simple privation de la vie, sans qu’il puisse jamais être exercé aucune torture envers les condamnés.

    3. Tout condamné à mort aura la tête tranchée.

    La guillotine, d’abord installée dans la Cour du Carrousel, fit sa première apparition sur la Place de la Révolution (ex Place Louis XV, aujourd'hui Place de la Concorde) en octobre et novembre 1792 pour décapiter, devant l'emplacement de leur forfait, les auteurs des vols des bijoux de la Couronne conservés au Garde-meuble (Ministère de la marine).

    Elle fit sa seconde apparition le 21 janvier 1793, pour décapiter Louis XVI.

    Du 11 mai 1793 au 9 juin 1794, soit pendant treize mois, elle fonctionna sans discontinuité, érigée entre la statue de la Liberté et le Pont-Tournant (entrée du Jardin des Tuileries). C’est là que Marie-Antoinette fut suppliciée, le 16 octobre 1793.

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    "Ci-gît toute la France", caricature royaliste sous la Terreur... 

     

    En tournée, la guillotine fut installée trois jours durant Place de la Bastille, puis Place du Trône-Renversé (anciennement Place du Trône, aujourd'hui, Place de la Nation), revint Place de la révolution pour deux jours après le 9 thermidor (27 juillet 1794) pour l'exécution des amis de Robespierre, puis une dernière fois, en mai 1795, pour celle des émeutiers du 1er prairial.

  • Éphéméride du 10 mai

    1752 : Jean-Étienne Guettard formule l'hypothèse que les Monts d'Auvergne (les Puys) peuvent être d'anciens volcans éteints... 

     

    Géologue, minéralogiste, naturaliste, Guettard est né le 22 septembre 1715 (à Étampes) et mort le 6 janvier 1786, à Paris.        

    D'Eugène Caustier (dans Les entrailles de la terre) :

    10 mai,louis xv,maupeou,choiseul,fleury,bainville,louis xvi,revolution,1789,parlements"Il n'est personne aujourd'hui qui n'ait entendu parler des volcans d'Auvergne, et cependant leur découverte ne remonte guère à plus d'un siècle. C'est, en effet, en 1751 qu'un membre illustre de l'Académie des Sciences, Guettard, annonça, à la grande surprise du monde savant, qu'il existait au centre de la France des volcans éteints semblables à ceux qui sont en activité en Italie.

    Jusque-là ces montagnes régulièrement coniques, qui constituent la Chaîne des Puys, aux environs de Clermont, et qui se dressent sur le plateau comme de gigantesques taupinières, avaient été considérées comme des amas de scories abandonnées par les métallurgistes de l'Antiquité. Guettard, qui était contemporain de Buffon et qui, le premier, dressa des cartes géologiques, avait parcouru l'Europe en tous sens.

    Et c'est au retour d'un voyage en Italie que, passant par Clermont-Ferrand et Volvic, il fut frappé des ressemblances de ces monts d'Auvergne avec le Vésuve. C'est alors qu'il s'écrie : Volvic, Volcani vicus !

    Voici ce qu'écrit Guettard en 1752 :

    10 mai,louis xv,maupeou,choiseul,fleury,bainville,louis xvi,revolution,1789,parlements"Les montagnes d'Auvergne, qui ont été, à ce que je crois, autrefois des volcans... sont celles de Volvic (ci contre) à 2 lieues de Riom, du Puy-de-Dôme proche de Clermont et du Mont d'Or... Ce fut à Moulins que je vis les laves pour la première fois... et étant à Volvic, je reconnus que la montagne n'étoit presque qu'un composé de différentes matières qui sont jetées dans les éruptions des volcans... Le reste de la montagne n'est qu'un amas de pierres ponces, noirâtres ou rougeâtres, entassées les unes sur les autres sans ordre ni liaison... Les bancs de pierre de Volvic suivent l'inclinaison de la montagne."

     

    Guettard est également le premier à avoir signalé les schistes ampéliteux de la Ferrière-Béchet; ayant acquis à Montpertuis une terre qui fournissait beaucoup de kaolin, il réussit le premier à fabriquer avec cette matière une porcelaine analogue à celles de la Chine et du Japon; enfin, il est aussi le premier à avoir déterminé - en 1775 - la nature de ces débris fossiles nommés encrines, pierres étoilées, entroques.

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    www.annales.org/archives/x/guettard.html 

     

    www.chainedespuys.com/ 

     

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    1774 : Mort de Louis XV, Louis XVI roi de France...

     

    Pourquoi et comment, à partir de cette date fatidique, les évènements s'enchaînent-ils d'une façon aussi implacable, pour aboutir quinze ans après au grand drame national - et international... - de la Révolution ?

    C'est ce qu'explique magistralement le remarquable chapitre XIV de l'Histoire de France de Jacques Bainville, La Régence et Louis XV : en rappelant les Parlements, exilés par son grand-père, Louis XVI stoppe la révolution royale, et rend inévitable - par les insupportables blocages de la société que cela induit - l'autre révolution, celle qui marquera la fin d'un monde...

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    "...Le départ de Choiseul fut suivi du coup d'État de Maupeou (ci dessous; voir l'Éphéméride du 19 janvier). On néglige trop, d'ordinaire, cet évènement dans le règne de Louis XV. Les Parlements, dont les attributions s'étaient grossies au cours des âges, étaient devenus un obstacle au gouvernement. L'opposition des Cours souveraines, celles des provinces marchant d'accord avec celle de Paris, devenait un grand péril politique. Les Cours étaient allées jusqu'à proclamer leur unité et leur indivisibilité. Elles agissaient de concert, repoussaient les édits sous la direction du Parlement de Paris, décernaient même des prises de corps contre les officiers du roi.

    "Cette étonnante anarchie, dit Voltaire, ne pouvait pas subsister. Il fallait ou que la couronne reprît son autorité ou que les Parlements prévalussent." C'était un pouvoir qui se dressait contre le pouvoir et, en effet, l'un ou l'autre devait succomber.

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    Le Vicomte René-Nicolas de Maupeou, Marquis de Morangles et de Bully.
     
    Il est l'artisan du renvoi des Parlements par Louis XV :
    "Y a-t-il un seul souverain ? Ou la France est-elle soumise à douze aristocraties ?"
     
    Apprenant leur rappel par Louis XVI, trois ans après, il eut ce mot : "J'avais fait gagner au roi un procès de trois siècles. Il veut le reperdre, il est bien le maître". Certains de ses proches affirment qu'il aurait ajouté : "il est perdu..."
     

                

    Depuis le temps de la Fronde, la monarchie avait eu à compter avec cette magistrature indépendante, sa propre création, presque aussi vieille qu'elle même et qui, peu à peu, lui avait échappé.

    Louis XIV avait résolu la difficulté par la méthode autoritaire et grâce à son prestige. Pendant son règne, les Parlements avaient été soumis. Ranimés par la Régence, ils s'étaient enhardis peu à peu, et leur opposition, fondée sur le respect des droits acquis, était devenue plus nuisible à mesure que l'État et l'administration s'étaient développés, avaient eu besoin d'organiser et de rendre moderne une France constituée pièce à pièce, reprise, pièce à pièce aussi, sur le vieux chaos de l'Europe féodale.

    Les ministres du dix-huitième siècle, jusqu'au malheureux Calonne, ne tarissent pas sur la difficulté de gouverner un pays qui avait mis huit cents ans à former son territoire, à réunir des villes et des province dans les circonstances et aux conditions les plus diverses, où l'on se heurtait, dès que l'on voulait changer, simplifier, améliorer quelque chose, à des exceptions, à des franchises, à des privilèges stipulés par contrat.

    À la fin du règne de Louis XV, il apparut que les Parlements, en s'opposant aux changements, par conséquent aux réformes et aux progrès, mettaient la monarchie dans l'impossibilité d'administrer, l'immobilisaient dans la routine, et, par un attachement aveugle et intéressé aux coutumes, la menaient à une catastrophe, car il faudrait alors tout briser pour satisfaire aux besoins du temps. La résistance que la monarchie avait toujours rencontrée dans son œuvre politique et administrative, résistance qui avait pris la forme féodale jusqu'au temps de Richelieu, prenait alors une forme juridique et légale, plus dangereuse peut-être, parce que, n'étant pas armée, elle n'avait pas le caractère évident et brutal d'une sédition.

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    "Cette étonnante anarchie ne pouvait pas subsister.
    Il fallait ou que la couronne reprît son autorité ou que les Parlements prévalussent." (Voltaire).
     
    Le même Voltaire qui écrivait à d'Alembert :
     "Quoi, les boeufs-tigres pleurent ? On ne rend plus la justice ? Les plaideurs sont réduits à s'accommoder sans frais..." 
     
     
     

    Choiseul avait essayé de gouverner avec les Parlements en leur donnant les Jésuites en pâture, en flattant leurs sentiments jansénistes, en tirant même de leur sein des ministres et des contrôleurs généraux. L'effet de cette politique était déjà usé. Il ne restait plus qu'à recourir aux grands moyens. En 1771, Maupeou, chargé de l'opération, supprima les Parlements et la cour des aides. À leur place furent institués des "conseils supérieurs". La vénalité des charges était abolie, la justice devenait gratuite. C'était une des réformes les plus désirées par le pays. La suppression des Parlements, acte d'une politique hardie, permettait de continuer cette organisation rationnelle de la France qui, depuis des siècles, avait été entreprise par la monarchie. La voie était libre.

    Ce que Bonaparte, devenu Premier Consul, accomplira trente ans plus tard, pouvait être exécuté sans les ruines d'une révolution. De 1771 à 1774, l'administration de Terray, injustement décriée par l'histoire, mieux jugée de nos jours, commença de corriger les abus. Elle adoucit d'abord, avec l'intention de les abolir ensuite, les impositions les plus vexatoires; elle organisa ces fameux vingtièmes qui avaient soulevé tant de résistances; elle s'occupa enfin de créer des taxes équitables, telle que la contribution mobilière, reprise plus tard par l'Assemblée constituante, en un mot tout ce qui était rendu impossible par les Parlements...

    Si nous pouvions faire l'économie d'une révolution, ce n'était pas en 1789, c'était en 1774, à la mort de Louis XV. La grande réforme administrative qui s'annonçait alors, sans secousses, sans violence, par l'autorité royale, c'était celle que les assemblées révolutionnaires ébaucheraient mais qui périrait dans l'anarchie, celle que Napoléon reprendrait et qui réussirait par la dictature : un de ses collaborateurs, le consul Lebrun, sera un ancien secrétaire de Maupeou. Il y a là dans notre histoire une autre sorte de continuité qui a été malaperçue..." 

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    Charles-François Lebrun (1739-1824) - Troisième Consul, Prince-archi-trésorier, duc de Plaisance     
     
      
        

    "...Nous allons voir comment ces promesses furent anéanties dès le début du règne de Louis XVI par le rappel des Parlements. Alors seulement la révolution deviendra inévitable.

    Lorsque Louis XV mourut, s'il y avait du mécontentement, il n'était pas incurable. S'il y avait de l'agitation, elle était superficielle. L'ancien régime avait besoin de réformes, il le savait, et l'immobilité n'avait jamais été sa devise. Que de fois il s'était transformé depuis Hugues Capet ! Sans doute le succès allait aux faiseurs de systèmes parce qu'il est plus facile de rebâtir la société sur un plan idéal que d'ajuster les institutions, les lois, l'administration d'un pays aux besoins de nouvelles générations. De là l'immense succès de Jean-Jacques Rousseau, le simplificateur par excellence. Mais, depuis le bienfaisant coup d'État de 1771, il n'existait plus d'opposition organisée. Le pouvoir s'était bien défendu, n'avait pas douté de lui-même. Jamais Louis XV n'avait consenti à convoquer les États généraux, comprenant que, ce jour-là, la monarchie abdiquerait. On la blâmait, on la critiquait, ce qui n'était pas nouveau, mais elle ne donnait pas de signes de faiblesse.

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    "le simplificateur par excellence..."  
     
     

    Les "affaires" du temps, celles de Calas, du chevalier de la Barre, de Sirven, de Lally-Tollendal, causes retentissantes que Voltaire plaida au nom de la justice et de l'humanité, n'eurent d'autres répercussions politiques que d'aider au discrédit des parlementaires par qui les condamnations avaient été prononcées. Choiseul fut renvoyé, les parlements cassés sans qu'il y eût seulement des barricades comme sous la Fronde. Quant aux autres plaintes, aux autres accusations, elles étaient de celles auxquelles bien peu de gouvernements échappent. Les réductions de rentes et de pensions, réductions si nécessaires, auxquelles Terray procéda sous Maupeou, furent appelées banqueroutes; d'une disette et de spéculations sur les blés, sortit la légende du "pacte de famine"; les favorites du roi, Mme de Pompadour et Mme du Barry, furent trouvées scandaleuses. Cependant il y avait eu à d'autres époques des moments plus graves pour la royauté, plusieurs fois chassée de Paris. Si des esprits sombres annonçaient des catastrophes, on ne distinguait nulle part les préparatifs ni le désir véritable d'une révolution.

    Gouverner est toujours difficile, mais ne l'était pas plus pour la monarchie à ce moment-là qu'à un autre. Quand on y regarde de près, la situation était plus complexe à l'extérieur qu'à l'intérieur. Louis XV avait encore accru le royaume de la Lorraine et de la Corse. Mais les deux guerres de Sept Ans avaient montré que le problème était de moins en moins simple. Il fallait conserver sur le continent les avantages que nous avait légués le dix-septième siècle, empêcher des bouleversements en Allemagne, nous méfier des ambitions de la Prusse. Cependant, avec l'apparition de la Russie, la question d'Orient prenait un nouvel aspect. La Turquie était menacée de démembrement; la Pologne notre alliée nécessaire, était menacée de ruine (le premier partage est de 1772).

    Enfin nous avions à effacer les plus graves des effets du traité de Paris si nous ne voulions pas renoncer aux colonies et à la mer, au nouveau genre d'expansion que les grands peuples européens recherchaient, si nous ne voulions pas abandonner les océans et le monde à l'Angleterre. Questions maritimes et coloniales, question d'Allemagne, question d'Orient : voilà ce qui va occuper le règne de Louis XVI et, par une grave faute initiale, le rappel des Parlements, provoquer le drame de 1789..."

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    1788 : Naissance d'Augustin Fresnel

     

  • Livres • La nouvelle charge d'Éric Zemmour : « Un quinquennat pour rien »

     

    Par Vincent Trémolet de Villers

    51NfV+cckmL.jpgDans un ouvrage appelé à nourrir toutes les polémiques, l'auteur du Suicide français revient avec force sur la bataille civilisationnelle à mener contre l'islam, devenu l'un des pivots autour duquel s'articule la vie de la société française. De cet ouvrage, Vincent Tremolet de Villers donne ici [Figarovox, 02.09] une remarquable recension. Il l'ouvre sous le signe de Cassandre, dans la filiation de qui il situe Zemmour. Ce rôle fut longtemps attribué à Jacques Bainville. « Le grand Bainville » : ainsi le nomme Zemmour, qui l'a beaucoup lu. Par deux fois Bainville fut hanté par le sentiment tragique des deux guerres mondiales du siècle dernier dont il avait prévu avec exactitude quels mécanismes les déclencheraient. On peut accorder quelque crédit, aujourd'hui, aux analyses de notre situation, d'où Zemmour tire ses craintes et ses prévisions. Quant aux quelques motifs d'optimisme que Vincent Tremolet de Villers avance au terme de sa chronique, sans les rejeter, il nous semble qu'elles ne pourraient avoir quelque pertinence, elles aussi, que dans la mesure où la France aurait préalablement accompli cette révolution culturelle que Zemmour appelle de ses vœux.   Lafautearousseau  

     

    902697296.jpgCassandre ne s'était pas trompée. En voyant entrer le cheval dans Troie, pendant que la foule se réjouissait autour de l'animal de bois, elle s'alarmait, en vain, de l'entrée de l'ennemi dans la ville. Grâce à Apollon, elle avait le don de divination, mais pas celui de persuasion. Elle disait vrai, mais elle était maudite et personne ne l'écoutait. Eric Zemmour n'a pas reçu d'Apollon le don de divination, mais la nature l'a doté, par le verbe et l'écriture, de la passion de convaincre. Quand il n'est pas d'accord, Zemmour le fait savoir, quand il est d'accord, il arrive qu'il considère qu'il l'a déjà dit.

    Cassandre assumée, le chroniqueur du Figaro et du Figaro Magazine alerte la France depuis des années. Hier, il tempêtait sur sa souveraineté menacée, aujourd'hui il affirme que son identité est en péril de mort. Deux ans après Le Suicide français, son précis de décomposition au succès phénoménal, l'essayiste récidive.

    Un quinquennat pour rien* apparaît, au premier abord, comme un livre de chroniques. L'ouvrage réunit cinq ans d'humeurs éditoriales prononcées le matin au micro de RTL. La vie des Français sous le règne de François Hollande défile. De Manif pour tous en zlatanisation du football, de Leonarda en déroutes électorales, de Christiane Taubira en Anne Hidalgo, le bretteur tourne autour de ses cibles et, à la fin de l'envoi, les touche.

    Ce quinquennat, malheureusement, ne se réduit pas aux cravates mal nouées, aux frais de coiffure et à la langue disloquée - « La France, elle est… » - du chef de l'Etat. C'est aussi le mandat durant lequel la parenthèse enchantée s'est refermée. A Paris et à Vincennes, à Saint-Denis et au Bataclan, les balles assassines ont sifflé « la fin de la fin de l'histoire » (Finkielkraut): plus de 250 victimes, des blessés par centaines et le drapeau du Califat qui flotte dans les esprits et sur les téléphones portables de milliers de gamins de nos banlieues. De ces tragédies, Zemmour a tiré une longue méditation qui ouvre son livre. Un texte incisif et profond qui aurait pu, à lui seul, composer un petit ouvrage. Un texte violent aussi, tant il exprime la crainte qui étreint son auteur, le sentiment de vindicte qu'il éprouve envers ceux qui nous ont emmenés jusque-là, l'effrayante réalité d'un pays au bord du chaos.

    Le scandale, soyez-en sûr, aura lieu. Les vigies de Twitter s'allieront aux ligues de vertu pour tenter, une fois encore, de le faire taire. Elles se jetteront sur ses formules volontairement provocatrices : « Le cri de guerre révolutionnaire qui épouvantait à Valmy les lansquenets prussiens a été adouci en chanson sirupeuse pour adolescentes romantiques » ou encore « l'islam est incompatible avec la France ». Zemmour, viré d'i-Télé pour des propos qu'il n'a pas tenus (une traduction malheureuse et erronée d'un journal italien avait déclenché l'hallali), habitué des tribunaux et des poursuites, s'en moque. Il ne calcule plus. Son angoisse est d'un autre ordre : elle est existentielle. Ecoutons-le : « La sémantique est essentielle dans cette histoire. Un étranger qui arrive dans un autre pays sur la demande de celui-ci est un immigré. Un étranger qui vient dans l'illégalité est un clandestin. Des étrangers qui viennent par milliers, par centaines de milliers, demain par millions, sont des envahisseurs. Un migrant doit pouvoir se déplacer. Un réfugié doit être accueilli. Un envahisseur doit être repoussé. »

    On l'a compris : à l'entendre, la France n'est pas seulement en guerre contre l'Etat islamique ou le terrorisme, mais contre un islam conquérant qui voudrait que Paris soit Bagdad et que les minarets éteignent les cloches, que les voiles couvrent les visages, que les mécréants se cachent. Comme l'homme écrit droit avec des lignes courbes, il fait un détour (brillant et discutable) par Mme de Staël et la germanophilie du XIXe siècle, rappelle l'aveuglement pacifiste des années 1930, convoque Stendhal et la comtesse de Boigne. Les précautions n'ont jamais été son fort et cette fois, c'est l'islam que Zemmour interroge sans y ajouter le suffixe « isme », les adjectifs « radical » ou « fondamentaliste ». « Si demain il y avait 20, 30 millions de musulmans français bien décidés à voiler leur femme et à appliquer les lois de la charia, on ne pourrait préserver les lois de la laïcité que par la dictature. C'est ce qu'ont compris en leur temps Atatürk, Bourguiba ou même Nasser. »

    « Honte et dégoût », entendra-t-on. Certes. Mais que dire alors de Boualem Sansal ? L'auteur de 2084 (Gallimard) affirme, en effet, de livres en interviews que « l'ordre islamique tente progressivement de s'installer en France ». Et Hani Ramadan ? Le frère de Tariq, lui, ne cache pas son jeu. L'islam, explique-t-il, « est une organisation complète qui englobe tous les aspects de la vie. C'est à la fois un Etat et une nation, un gouvernement et une communauté. C'est également une morale et une force, ou encore le pardon et la justice. C'est également une culture et une juridiction, ou encore une science et une magistrature ».

    Une loi totalisante ? « Les Européens, du plus pieux des pratiquants au bouffeur de curés invétéré, pensent tous la religion sur le modèle inconscient du christianisme, précise Rémi Brague. Ils réduisent donc la religion à ce qu'ils observent dans les diverses confessions chrétiennes : des actes de culte, la prière, éventuellement des jeûnes et des pèlerinages. Ce qui n'en relève pas est censé être extérieur à la religion. Or, pour l'islam, la religion consiste essentiellement à appliquer la loi divine. » Et les musulmans modérés ? C'est qu'ils sont « modérément musulmans », répond Zemmour.

    Cette fois, l'auteur du Suicide français va au-delà du diagnostic. A le lire, il est encore temps pour réagir. Mais, plus encore que les solutions policières ou militaires, Zemmour appelle de ses vœux « un état d'urgence moral » qui ferait sortir nos élites du confort intellectuel. « Seule une révolution culturelle peut nous permettre de gagner la guerre de civilisation qui se déroule sur notre sol. » Retour à la république assimilationniste, réduction des droits individuels, extraction volontaire du modèle multiculturel de l'Union européenne, arrêt de l'immigration. Eric Zemmour note avec justesse que l'élection de François Hollande s'est ouverte, à la Bastille, au milieu des drapeaux algériens, marocains ou turcs, et que son mandat s'achève sur les trois couleurs de notre drapeau national.

    Ce texte lui vaudra d'être traité de boutefeu et d'irresponsable. On lui reprochera de « faire le jeu » du Front national et de l'Etat islamique. On ressortira le lexique olfactif - rance, nauséabond… Certains voudront l'interdire, d'autres collationneront ses « dérapages » comme une contractuelle remplit soigneusement son amende. C'est tout l'inverse qu'il faudrait faire. La raison devrait l'emporter sur la passion. La démonstration sur les disqualifications. En toute liberté, nous devrions discuter cette terrible vision. Rappeler que les déterminismes culturels et religieux peuvent être surmontés. Qu'il est encore possible de restaurer une communauté de destin. Qu'une grande majorité de Français musulmans refuse le salafisme. Se souvenir de nos soldats de l'autre rive de la Méditerranée morts au champ d'honneur durant les deux guerres mondiales. Soutenir à bout de bras ceux pour qui la France primera toujours sur « l'Oumma ». Mettre en lumière les réformateurs qui, comme leur demandait le général al-Sissi, appellent l'islam à « une révolution religieuse contre sa violence »…

    Eric Zemmour n'est pas un « polémiste » comme on le qualifie paresseusement. Cet écrivain est le courageux porte-voix des angoisses collectives. Il trempe sa plume dans la plaie béante d'une France blessée et tétanisée : Albert Londres appelait cela un journaliste. 

    Zemmour appelle de ses vœux « un état d'urgence moral » qui ferait sortir nos élites du confort intellectuel. « Seule une révolution culturelle peut nous permettre de gagner la guerre de civilisation qui se déroule sur notre sol. »

    * Un quinquennat pour rien, d'Eric Zemmour, Albin Michel, 368 p., 22,90 €. En librairie le 7 septembre.

    Vincent Trémolet de Villers

  • Éphéméride du 16 novembre

    1952 : Mort de Charles Maurras

     

     

     

    1700 : "Messieurs, voici le roi d'Espagne"... 

     

    Louis XIV accepte le testament de Charles II de Habsbourg, mort sans descendance, qui avait offert son royaume au Duc d'Anjou (ci-dessous, de toutes façons arrière-petit-fils de Philippe IV) en vue d'éviter la séparation de l'Espagne et de son Empire.

    Louis XIV est ainsi directement à l'origine des "Bourbons d'Espagne" (voir l'Éphéméride du 5 septembre)

    Le Roi soleil avait longtemps réfléchi, et beaucoup hésité, car l'acceptation du testament impliquait une guerre certaine avec la plupart des puissances européennes, emmenées par l'Angleterre.

    Le Duc d'Anjou prendra le nom de Philippe V, fondant la dynastie des Bourbons d'Espagne, dont descend l'actuel Roi Felipe VI...

    Il restera plusieurs mois en France, avant d'entrer en Espagne en 1701 : Versailles est ainsi le seul palais royal au monde à avoir abrité, et pendant un temps assez long, deux souverains régnants. 

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    La phrase célèbre "Il n'y a plus de Pyrénées", que Voltaire attribue à Louis XIV, semblerait plutôt avoir été prononcée par l'ambassadeur d'Espagne, Castel dos Rios.

    Mais la Guerre de Succession d'Espagne sera longue (plus de 10 ans) et terrible. Au bord de la défaite, à la suite de nombreux revers, la France sera finalement sauvée par les victoires du Maréchal de Villars à Malplaquet (voir l'Éphéméride du 11 septembre), puis à Denain (ci dessous, voir l'Éphéméride du 24 juillet).

    La France n'a eu qu'à se louer, plusieurs fois au cours de son histoire, de ce choix heureux de Louis XIV, qui nous assurait la paix du côté du Sud-ouest. Dans son Journal (Tome III, 1927/1935), Bainville y revient une nouvelle fois, à l'occasion par exemple de la note du 10 janvier 1931, consacrée à la mort du Maréchal Joffre (page 120) :

    Il y redit que, si Joffre a bien gagné la bataille de La Marne, "...la Troisième République a eu le rare bonheur, qui n'était échu à aucun régime avant elle, d'être affranchie de soucis du côté des Pyrénées... Notre démocratie a joui sur cette frontière d'un bienfait que lui avait valu Louis XIV, comme elle a joui sur la frontière belge du bienfait de Louis-Philippe..."

     

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                Dans notre catégorie Lire Jacques Bainville, voir la note XIII :

     Installer un Bourbon sur le trône d'Espagne : le "bon choix", la décision heureuse de Louis XIV

     

     

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    1867 : Naissance de Léon Daudet

     

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    Que trois hommes aussi différents et, chacun, d'une personnalité aussi affirmée aient pu durant toute leur vie - à partir du moment où ils se sont rencontrés - être et rester amis au quotidien, dans le même mouvement et les mêmes locaux, sans la moindre "dispute" notable, voilà qui constitue une exception remarquable dans l'histoire politique...

     

    Lorsqu'on parle de Charles Maurras, de Léon Daudet et de Jacques Bainville, c'est  peut-être la première chose qu'il convient de signaler (voir l'Éphéméride du 9 février - naissance et mort de Jacques Bainville; l'Éphéméride du 20 avril - naissance de Charles Maurras; l'Éphéméride du 1er juillet - mort de Léon Daudet; et l'Éphéméride du 16 novembre - naissance de Léon Daudet et mort de Charles Maurras)...

     

    Ce cas unique d'amitié a été magnifiquement évoquée par Jacques Bainville dans les quelques mots de remerciements qu'il prononça au siège du journal, à l'occasion de son élection à l'Académie française :

     

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     Voir notre album : Maîtres et témoins (III) : Léon Daudet

     

    Comment mieux évoquer Léon Daudet qu'en mettant en exergue son extra-ordinaire amitié avec Charles Maurras, et les raisons profondes de cette amitié ? C'est Henri Massis qui nous les donne, dans son très intéressant Maurras et notre temps : cette amitié littéralement exceptionnelle a bien été l'essentiel de sa vie !... :

    "...Le tempérament de Léon Daudet exigeait une entière liberté. C'est parce que l'Action Française la lui a donnée, cette liberté, que Daudet a pu développer tous ses dons, toutes les puissances de sa nature. Les richesses, les infinies curiosités de cet esprit si ample dans ses profondeurs, tout ce qu'il y avait en lui de vivant et de fort, l'Action Française a su l'intégrer, s'en accroître.

    "Si nous n'avions pas Daudet, nous serions un journal de professeurs !" disait Maurras. L'amitié de Léon Daudet et de Charles Maurras avait accompli ce miracle, et si l'on songe que ces deux personnalités si entières étaient loin de coïncider en tous points, il y eut là une sorte de merveille ! Rien jamais ne détendit ces liens; les épreuves ne firent que renforcer leur amitié en la sublimant...

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    Je ne me suis jamais disputé une seule fois en vingt ans avec Maurras", disait Léon Daudet avec une fierté où il y avait du bonheur. Et à Saint-Rémy-de-Provence, sur la tombe de son ami, Maurras nous a livré leur secret : "Notre amitié, dit-il, avait à sa base un respect profond, le respect de nos différences de goût, de caractères, le respect de nos raisons d'être où chacun avait besoin de se complaire et d'aboutir.
     
    Quand, le 21 mars 1908, Maurras et Daudet s'attelèrent ensemble au journal, les bonnes langues leur donnaient de trois à six mois de cohabitation possible; elle devait durer plus de trente ans, et la mort seule les sépara. Leur accord parfait tenait au plus vif de leurs esprits et de leurs âmes . Au terme du voyage, quand détaché de presque tout, le regard déjà fixé sur le visage d'un autre monde, Daudet songeait aux seules choses qui lui importassent encore, il les ramassait toutes en ce trait suprême : "Ma prière du soir... et ma vie pour Charles Maurras !"
     
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    Il y avait chez Léon Daudet, sous la spontanéité de ses mouvements, la vivacité de ses appétits, une aspiration non moins instinctive à l'harmonie, à l'équilibre, à l'ordre, un désir de perfection humaine qui, chez lui, prenait sa forme dans l'image qu'il se faisait de l'artiste supérieur, de l'homme de génie, et Maurras, à ses yeux était de ces hommes là. Leurs esprits se rejoignaient, en dépit des différences, dans ce quelque chose d'organisé qui est au fond des grandes constructions de la logique et de la raison.
     
    Tout, au reste, chez Léon Daudet tendait à la synthèse, jusqu'à ce sens du surnaturel si puissant en lui, et qu'il ne faut pas confondre avec l'illimité. S'il avait soif d'infini dans la pensée, le précis, le concret le réel, l'attiraient invinciblement. Oui, ce visionnaire possédait le "sens synthétique" par excellence. Tous les appoints de la connaissance et de l'expérience nourrissaient ses visions, mais rien ne lui faisait tant horreur que le rêve vide, inorganique par essence. L' "universel créé", c'était sa pâture, à lui Daudet - mais seul l'ordre le divinise qui permet à la liberté intérieure d'y atteindre et d'étendre son champ.
     
    Voilà ce que Maurras lui avait fait redécouvrir, et sa rencontre avait été pour lui une illumination de tout l'être. "Quel homme !" s'écriait Daudet au spectacle que, rien qu'en vivant, Maurras lui offrait. Et je ne sais pas de plus belle définition de Maurras, fils du Stagirite, que celle où Daudet le nomme : "stratège de l'esprit, battant toutes les places rétives, avec l'aide de Minerve, et les forçant par les mots".
     
     
    La devise personnelle de Daudet était : Qui n'a pas lutté n'a pas vécu !

     

     

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    1945 : Création de l'UNESCO, installée à Paris

     

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    Au 79 Place de Fontenoy, dans le VIIème arrondissement de Paris, tout à côté des Invalides (mais beaucoup moins beau !) le siège de l'Organisation.

    C'est l'UNESCO qui est à l'origine des lieux et sites majeurs inscrits au Patrimoine mondial de l'humanité : la France est citée quarante cinq fois dans ce Palmarès :  

    http://whc.unesco.org/fr/etatsparties/FR/

     

  • Éphéméride du 15 février

    30 juillet,sacre des rois de france,couronnement,reims,cathédrale du sacre,roi de france,sacre de reims,regalia,saint denis,louvre,sainte ampoule,galerie d'apollonIl y a treize jours, dans l’année, pendant lesquels il ne s’est pas passé grand-chose, ou bien pour lesquels les rares événements de ces journées ont été traités à une autre occasion (et plusieurs fois pour certains), à d'autres dates, sous une autre "entrée" .

    Nous en profiterons donc, dans notre évocation politico/historico/culturelle de notre Histoire, de nos Racines, pour donner un tour plus civilisationnel  à notre balade dans le temps; et nous évoquerons, ces jours-là, des faits plus généraux, qui ne se sont pas produits sur un seul jour (comme une naissance ou une bataille) mais qui recouvrent une période plus longue.

    Ces jours creux seront donc prétexte à autant d'Évocations :  

    1. Essai de bilan des Capétiens, par Michel Mourre (2 février)

    • 2. Splendeur et décadence : Les diamants de la Couronne... Ou : comment la Troisième République naissante, par haine du passé national, juste après avoir fait démolir les Tuileries (1883) dispersa les Joyaux de la Couronne (1887), amputant ainsi volontairement la France de deux pans majeurs de son Histoire (12 février)

     3. Les deux hauts lieux indissociables de la Monarchie française : la cathédrale Notre-Dame de Reims, cathédrale du Sacre, et la Basilique de Saint-Denis, nécropole royale. I : La cathédrale de Reims et la cérémonie du sacre du roi de France (15 février)

    • 4. Les deux hauts lieux indissociables de la Monarchie française : la cathédrale Notre-Dame de Reims, cathédrale du Sacre, et la Basilique de Saint-Denis, nécropole royale. II : La basilique de Saint-Denis, nécropole royale (19 février)

     5. Quand Le Nôtre envoyait à la France et au monde le message grandiose du Jardin à la Française (13 mars)

     6. Quand Massalia, la plus ancienne ville de France, rayonnait sur toute la Gaule et, préparant la voie à Rome, inventait avec les Celtes, les bases de ce qui deviendrait, un jour, la France (11 avril)

     7. Quand Louis XIV a fait de Versailles un triple poème : humaniste, politique et chrétien (28 avril)

     8. Les Chambiges, père et fils (Martin et Pierre), constructeurs de cathédrales, élèvent à Beauvais (cathédrale Saint-Pierre) le choeur ogival le plus haut du monde : 46 mètres 77 ! (4 mai)

     9. Quand la cathédrale Saint-Pierre de Beauvais a reçu, au XIIIème siècle, son extraordinaire vitrail du Miracle de Théophile (28 mai)

     10.  Quand Chenonceau, le Château des Dames, à reçu la visite de Louis XIV, âgé de douze ans, le 14 Juillet 1650 (26 juillet)

     11. Le Mont Saint Michel (11 août)

     12. Quand François premier a lancé le chantier de Chambord (29 septembre)

     13. Quand Léonard de Vinci s'est installé au Clos Lucé (27 octobre)  

     

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    Aujourd'hui : 

    Les deux hauts lieux indissociables de la Monarchie française : la cathédrale Notre-Dame de Reims, cathédrale du Sacre, et la Basilique de Saint-Denis, nécropole royale.

    I : La cathédrale de Reims et la cérémonie du sacre du roi de France... (suivant : Éphéméride du 19  février, Basilique de Saint-Denis) 

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    Voir aussi notre album (40 photos) : Reims, cathédrale du Sacre

    I : La cathédrale

     

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    • http://catreims.free.fr/ : très complet, une foule de renvois (sur les sacres, les autres cathédrales etc..) 

    • http://cathedrale.maisons-champagne.com/ : très beau, 500 photos... 

    • http://www.romanes.com/Reims/ : photos de très grande qualité, des liens vers de nombreux autres hauts lieux...

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    Si Clovis, fondateur de la première dynastie royale (les Mérovingiens), reçut le baptême à Reims, il ne fut pas "sacré" dans la cathédrale. Le premier roi de France "sacré" fut Pépin le Bref, fondateur de la deuxième dynastie royale, celle des Carolingiens (voir l'Éphéméride du 27 juillet), qui ne fut pas sacré à Reims, mais à Saint-Denis. Pépin le Bref est le père de Charlemagne, et ce sera le fils de celui-ci, Louis 1er, qui sera le premier roi sacré à Reims.

    Dans la cathédrale actuelle, de Louis VIII à Charles X, plus de trente rois de France furent sacrés. Il n'y eut que six exceptions :

    Hugues Capet (sacré à Noyon, là où l'avait été Charlemagne, pour manifester qu'il s'inscrivait dans la lignée de la dynastie Carolingienne).

     Son fils Robert II le Pieux (sacré, du vivant de son père, le 25 décembre 987 dans la cathédrale Sainte-Croix d’Orléans).

     Louis VI (sacré à Orléans, le 3 août 1108).

     Henri IV (sacré à Chartres en 1594).

     Louis XVIII et Louis-Philippe, non sacrés.

    Ce qui nous donne un total - avec Jean 1er le posthume, qui a régné officiellement mais seulement quelques jours - de trente-et-un rois de France sacrés en la cathédrale (dans la première cathédrale, Saint Nicaise, devenue cathédrale Carolingienne, puis cathédrale Notre-Dame d'aujourd'hui) :

    http://catreims.free.fr/his004.html...

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    II : La cérémonie du sacre du roi de France : un rituel ancien en continuelle évolution

     

    Connu par les Ordines, le rituel du sacre des rois de France évolue tout au long du Moyen Âge et connaît encore quelques modifications sous l'Ancien Régime

    Il consiste d'abord en une simple onction sur le front du souverain (avant 816), à laquelle s'ajoute le couronnement, la remise d'un sceptre et le serment de défendre l'Église (ordo d'Hincmar), l'apparition de l'anneau et de l'épée (Xème siècle), l'adoubement du chevalier (sacre de Philippe Auguste, 1179), le serment contre les hérétiques (début du XIIIème siècle)

    Au XIVème siècle est introduit le lever du roi et la procession depuis le palais de l'archevêque jusqu'à la cathédrale (sacre de Charles V, 1364). 

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       Couronne de Louis XV, par Augustin Duflos (1715-1774), Paris, musée du Louvre.

     

    1. Le lever du roi et la procession

    La cérémonie se déroule un dimanche, ou à l'occasion d'une grande fête liturgique (Ascension, Assomption, Toussaint).

    Arrivé la veille, le roi se prépare à son ministère en passant une partie de la nuit en prières, avant d'aller dormir au palais de l'archevêque (actuel Palais du Tau).

    C'est là qu'au lever du jour deux des pairs ecclésiastiques, l'évêque de Laon et l'évêque de Beauvais, viennent le chercher.

    Commence alors un dialogue entre le chantre de la cathédrale et le grand chambellan. Le premier frappe avec son bâton à la porte de la chambre royale :

    "Que demandez-vous ?" demande alors le grand chambellan de l'intérieur. "Le roi", répond le chantre. "Le roi dort".

    Ce rituel, fixé définitivement sous Louis XIII, est répété à trois reprises puis, à la fin du troisième dialogue, l'évêque de Laon dit : "Nous demandons Louis (ou Charles, ou Philippe...) que Dieu nous a donné pour roi".

    La porte s'ouvre alors et le roi est conduit en procession, au chant du Veni Creator, à l'intérieur de la cathédrale où l'attend le prélat consécrateur.

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    Épée du sacre des rois de France (détail), Ile-de-France (Xème-XIVème siècle), Paris, musée du Louvre.

     

    2. Les serments, la remise des regalia et l'onction royale

    Une fois le roi assis au milieu de la cathédrale, l'archevêque de Reims part accueillir la Sainte Ampoule, apportée en cortège par les moines de Saint-Remi et escortée par les barons.

    La fiole est déposée sur l'autel aux côtés des regalia, les insignes de la dignité royale conservés à l'abbaye de Saint-Denis, la nécropole des rois de France.

    Le roi prête ensuite plusieurs serments. Debout, devant le maître-autel, sur lequel sont également posés les Évangiles et un reliquaire de la Vraie Croix, il promet de défendre l'Église, de lui conserver ses privilèges canoniques, de garder la paix et la justice de ses peuples et de chasser les hérétiques.

     

    Simplement vêtu de sa tunique et d'une chemise échancrée aux différents endroits où doivent être pratiquées les onctions, le roi reçoit les insignes du chevalier, l'épée et les éperons d'or qui font de lui le bras séculier de l'Église.

     

    Prosterné devant l'archevêque, il est oint, avec le chrême de la Sainte Ampoule, sur la tête, la poitrine, entre les épaules et sur chacune d'elles, aux jointures des bras et sur les mains.

    Le roi reçoit enfin l'anneau, le sceptre (ci dessous) et la main de justice.

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          Sceptre de Charles V (détail) : Statuette de Charlemagne (vers 1365-1380), Paris, musée du Louvre (détail)

     

     

     

     

    3. Le couronnement, l'intronisation, le sacre de la reine et la remise des offrandes

     

    Les douze pairs du royaume, six ecclésiastiques et six laïcs, prennent alors place auprès du roi.

     

    L'archevêque de Reims, les évêques de Beauvais, Châlons, Langres, Laon et Noyon, les ducs d'Aquitaine, de Bourgogne et de Normandie et les comtes de Champagne, de Flandre et de Toulouse soutiennent ensemble la couronne au-dessus du roi avant que l'archevêque ne la pose seul sur la tête du nouveau souverain.

     

    Assis sur un trône dominant le jubé, le roi reçoit l'hommage de l'archevêque et des onze autres pairs, tandis que retentit à chaque fois l'acclamation "Vivat rex in æternum !", reprise par la foule. Des oiseaux sont lâchés dans l'église tandis que retentissent les cloches des églises de la ville

                

    En raison du jeune âge des souverains lors de leur avènement, peu de reines furent sacrées à Reims; sinon, la cérémonie avait lieu à l'abbaye de Saint-Denis.

                

    Si le roi est marié, c'est à ce moment de la cérémonie que prend place le sacre de la reine, laquelle reçoit à son tour deux onctions sur la tête et la poitrine ainsi que des regalia plus petits tels que couronne, anneau, sceptre, main de justice.

  • L’islam est -il une religion ?, par Annie Laurent.

    Annie Laurent me l'avait annoncé il y a peu, elle le fait : voici le premier des deux articles qu'elle a publié dans la Petite feuille verte (le n° 74) et nous recevrons courant octobre le second (n°75).

    Bonne lecture, et un grand merci à Annie Laurent !

    François Davin, Blogmestre

     

    Il est une affirmation qui se répand : il serait inconvenant de désigner l’islam comme une religion, puisqu’il a une conception totalitaire de l’Etat et qu’il légitime la violence et toutes autres pratiques incompatibles avec les principes hérités du christianisme (esclavage, loi du talion, polygamie, dissimulation, etc.). Cependant, l’islam rend un culte à Allah. Dès lors, comment faut-il comprendre ce qui peut sembler contradictoire ? Autrement dit, l’islam est-il, oui ou non, une religion ? Et comment justifier la réponse à donner à cette question ?

    Pour clarifier ce nœud complexe, voici deux nouvelles Petites Feuilles Vertes. Dans la première (n° 74), Annie Laurent aborde l’aspect strictement religieux de l’islam. Dans la suivante (n° 75), qui sera envoyée courant octobre, elle examinera la dimension idéologique de l’islam...

    Annie_Laurent.jpgLa question posée par le titre peut surprendre. Elle mérite pourtant d’être examinée de près, compte tenu des implications de plus en plus nombreuses et variées de l’islam dans des domaines qui sortent du cadre strictement religieux (sociaux, juridiques, militaires, politiques et géopolitiques). En fait, la dimension religieuse de l’islam est en principe inséparable de ses aspects temporels. C’est pourquoi, s’il est impossible de nier à l’islam la qualité de religion, il convient d’en préciser le sens et les spécificités afin de le situer dans le concert des religions du monde.

     

    QU’EST-CE QU’UNE RELIGION ?

     

    Le Petit Larousse propose deux définitions conjointes pour le mot « religion » : « Ensemble de croyances et de dogmes définissant le rapport de l’homme avec le sacré » ; « Ensemble de pratiques et de rites propres à chacune de ces croyances ». Dans la religion, il y a donc une « orthodoxie » (ce qu’il faut croire) et une « orthopraxie » (ce qu’il faut faire).

    Pour Rémi Brague, le monde des religions se présente sous une forme plus complexe : « Le fait qu’on admette l’existence d’un principe suprême de l’Être, qu’il s’agisse d’un absolu abstrait ou d’un Dieu personnel, ne constitue pas encore une religion. Pour que celle-ci naisse, il faut aussi que l’on soit au clair sur la voie qui permet d’accéder à cet Absolu ou à un Dieu. Cet élément manque, par exemple, chez les philosophes grecs de la période classique. Aristote, qui admet l’existence d’un Premier Moteur immobile et l’appuie sur des démonstrations, allant jusqu’à lui donner le nom de “dieu ” (theos), ne conçoit pas ce dieu comme constituant l’objet d’une religion ». Aristote était donc l’adepte d’un « monothéisme non religieux » (Sur la religion, Flammarion, 2018, p. 18 et 48). Brague souligne aussi l’existence de religions inventées, de type monothéiste : le dieu des déistes des Lumières, l’Etre suprême de la Révolution française, etc. (Ibid.).

    Alain Besançon s’intéresse lui aussi à la diversité religieuse dans le monde. « Beaucoup de religions païennes connaissent, au-dessus du peuple des dieux, un dieu supérieur qui tend à absorber en lui les divinités subordonnées […]. Le vieux dualisme de la religion perse se résout, dans la doctrine de Zoroastre, au monothéisme autour d’Ahoura Mazda. Les Sikhs croient en un seul Dieu, absolu, éternel, créateur, transcendant » (Problèmes religieux contemporains, Éd. de Fallois, 2015, p. 173).

     

    L’approche chrétienne

     

    Le monde du religieux est varié et ne revêt pas toujours la conception que s’en font les chrétiens dans leur approche des religions. Car ils n’en restent pas spontanément à la simple phénoménologie qui les décrit : monothéistes, polythéistes, païennes, et même civiles (la laïcité serait-elle la religion de la République française ?). Si l’on privilégie l’expression « traditions religieuses de l’humanité », comme le fait le Magistère catholique depuis quelques décennies, on opère un premier tri à partir du « contenu » relativement transcendant ou, au contraire, sécularisé, du phénomène religieux. On évite ainsi l’indifférenciation avec les opinions philosophiques et métaphysiques. Mais la ligne de partage, dans l’approche chrétienne, est plus profonde et se situe dans la réalité de ce que sont les religions : l’une est révélée, les autres sont naturelles. Il faut ajouter que certaines religions mêlent en une seule dénomination plusieurs de ces caractéristiques.

    Dans un souci de clarté, il convient donc de s’interroger sur les particularités de l’islam comme religion, et ceci dans un certain nombre de registres.

     

    L’ISLAM : MONOTHÉISME ET RÉVÉLATION

     

     Les musulmans croient en un Dieu unique, créateur et juge (Allah), auquel ils vouent un culte approprié et prescrit. Ils croient aussi que leur religion est celle qu’Allah a voulu pour tous les hommes, au point de l’avoir inscrite dans leur nature dès la création d’Adam, et qu’Il l’a « rappelée » (Coran 19, 51) aux peuples égarés (juifs, chrétiens, païens) par le Coran incréé, en se servant de Mahomet, chargé de clore le cycle prophétique au VIIème siècle.

     

    Quel lien avec la Bible ?

     

    L’islam est fréquemment classé parmi les religions monothéistes, abrahamiques ou religions du Livre. Ces formulations servent à le présenter comme apparenté au judaïsme et au christianisme. Pourtant, des différences essentielles opposent l’islam au christianisme.

    • Dans le christianisme, Dieu Se révèle à travers l’histoire biblique, Il se fait connaître aux hommes par l’Incarnation de son Verbe, Jésus-Christ, sauveur du monde. Il est Amour dans son Être même, ce qui s’exprime par la Trinité des Personnes divines.
    • L’islam présente un Dieu Un et seulement Un. « Impénétrable» (Coran 112, 2), « Incommunicable » (6, 50), Il reste étranger aux hommes, inconnu en son mystère. Les musulmans adorent un Dieu qu’ils ne peuvent pas connaître en Lui-même.

    C’est pourquoi, souligne R. Brague, « la façon même dont Dieu est supposé être un est loin d’être identique pour toutes les religions dites “mono-théistes” : “mono-” n’y a pas toujours le même sens. Il y a, si l’on peut dire, plus d’un “un” » (op. cit., p. 49).

    « Toute la richesse de l’autorévélation de Dieu, qui constitue le patrimoine de l’Ancien et du Nouveau Testament, a été, en fait, laissée de côté dans l’islam », notait le pape Jean-Paul II (Entrez dans l’espérance, Ed. Plon-Mame, 1994, p. 152).

     

    Pas de théologie en islam

     

    Significative est à cet égard l’ignorance par l’islam du concept de théologie, science qui consiste à scruter le mystère de Dieu. Les musulmans reçoivent une doctrine dictée par le Coran qui reprend une partie des éléments de la Bible en les déformant pour les inscrire dans une perspective qui n’est pas celle du salut. De fait, cette « dictée » ou « descente » de l’écrit sur Mahomet, comme la conçoit l’islam, exclut la participation active de celui-ci qui n’est qu’un « transmetteur » selon la volonté d’Allah.

    • Allah a fait descendre sur toi [Mahomet] le Livre et la Sagesse et t’a enseigné ce que tu ne savais pas(Coran 4, 113).
    • Ô Envoyé ! Transmets ce qu’on a fait descendre sur toi de la part de ton Seigneur (Coran 5, 67).

    Pour sa part, l’Eglise a retenu le concept essentiel d’inspiration des Ecritures . L’humanité des auteurs bibliques comme instrument est activement assumée dans le processus de révélation : c’est un mystère d’alliance, d’emblée dialogal, continuellement renoué et repris. Le dominicain islamologue Guy Monnot peut en déduire : « Souvenons-nous que pour l’islam, la religion révélée est la religion du Livre et non de la Parole ! » (France Catholique, n° 2475 – 18 novembre 1994, p. 23).

    La conclusion s’impose alors : « L’islam, qui ne reconnaît pas la Bible comme authentique, n’a pas le même dieu que le judaïsme et le christianisme, parce qu’il ne raconte pas sur Lui les mêmes histoires » (R. Brague, op. cit., p. 49). Cf. PFV n° 58 – L’islam est l’Histoire : un rapport ambigu.

    Ne faut-il pas dès lors considérer le Coran comme une élaboration humaine ? Telle est l’opinion du jésuite et islamologue égyptien Samir-Khalil Samir : « L’islam est l’œuvre d’un homme qui a vécu une expérience spirituelle réelle, mais qui vivait en son temps, dans son contexte socio-culturel désertique fait de guerres et d’attaques de tribus contre tribus » (Site Aleteia, 10 janvier 2018).

     

    Islam et paganisme

     

    A.Besançon va jusqu’à voir dans l’islam une forme de paganisme : « L’idée de Dieu, telle qu’elle se forme dans diverses régions du monde païen, ne semble pas si différente de celle que se forme l’islam […]. Allah ressemble à l’Un de Plotin par son éloignement radical » (op. cit., p. 174). Pour lui, l’islam instaure un rapport idolâtrique au divin (ibid., p. 31, 178, 231). R. Brague, qui le rejoint sur ce point, ajoute : « L’idolâtrie n’est jamais plus dangereuse et mortifère que là où l’idole est unique» (op. cit., p. 89).

    N’est-ce pas dans ces registres – païen et idolâtrique – que s’inscrivent les gestes de vénération des pèlerins de La Mecque envers la Pierre noire encastrée dans l’angle oriental de la Kaaba (Cube), ancien temple païen dont Mahomet a fait la « Maison d’Allah » ? Pensons aussi à l’inflation des prescriptions extérieures et ostentatoires des rites (il faut être vu priant et jeûnant), considérées comme supérieures à l’intériorité, ou encore à l’association entre le djihad et la piété pour l’établissement de la religion dans le monde.

    Enfin, cela ne concerne-il pas aussi le Coran et Mahomet ?

    D’une part, le Livre est coéternel et consubstantiel à Allah

    • La Mère du Livre se trouve auprès de Lui (Coran 13, 39).

    D’autre part, le nom de « l’Envoyé d’Allah » figure dans la chahâda (profession de foi islamique) : « Il n’y a pas d’autre dieu qu’Allah et Mahomet est son Prophète ».

    Les lois qui punissent le blasphème, en vigueur dans certains pays musulmans, concernent le Coran et Mahomet au même titre qu’Allah.

     

    FOI ET CROYANCES

     

    La religiosité marque profondément l’attitude des musulmans. Elle s’exprime en tout temps et en tout lieu – avec un puissant sens du sacré, peut-être lié à l’absolue transcendance divine -, suscitant parfois l’étonnement des non-croyants, voire l’admiration des chrétiens.

    On sait que ce fut le cas de Charles de Foucauld lors de son voyage au Maroc, comme il en a lui-même témoigné. « L’islam a produit en moi un profond bouleversement. La vue de cette foi, de ces hommes vivant dans la continuelle présence de Dieu, m’a fait entrevoir quelque chose de plus grand et de plus vrai que les occupations mondaines » (Pensées intempestives, dérangeantes et incorrectes, L’œuvre éd., 2011, p. 17). Cette expérience l’a renvoyé, paradoxalement à son Baptême enfoui – et c’est emblématique –, telle une préparation lointaine de son retour au Christ et à l’Eglise.

     

    Religiosité et vertu de religion

     

    La religiosité se réfère à la vertu de religion, déjà admise chez les philosophes de l’Antiquité païenne. Besançon cite à ce propos Cicéron : « La religion présente ses soins et ses cérémonies à une nature d’ordre supérieur que l’on nomme divine » (op. cit., p. 181). Saint Thomas d’Aquin la considère comme une vertu morale inhérente à la Justice : il s’agit de rendre à la divinité, connue par la raison naturelle, ce qui lui est dû. Le mot dîn, qui désigne en arabe la religion, signifie d’ailleurs également « dette ».

    La vertu de religion n’est donc ni surnaturelle ni théologale. Elle n’implique pas la foi. C’est d’ailleurs ce qu’a précisé la Déclaration Dominus Iesus sur l’unicité et l’universalité salvifique de Jésus-Christ et de l’Eglise, publiée le 6 août 2000 à l’occasion du grand jubilé par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, alors présidée par le cardinal Joseph Ratzinger.

    • « On doit donc tenir fermement la distinction entre la foi théologale et la croyance dans les autres religions. Alors que la foi est l’accueil dans la grâce de la vérité révélée, qui permet de pénétrer le mystère, dont elle favorise une compréhension cohérente, la croyance dans les autres religions est cet ensemble d’expériences et de réflexions, trésors humains de sagesse et de religiosité, que l’homme, dans sa recherche de la vérité a pensé et vécu, pour ses relations avec le Divin et l’Absolu.
    • Cette distinction n’est pas toujours présente dans la réflexion actuelle, ce qui provoque souvent l’identification entre la foi théologale, qui est l’accueil de la vérité révélée par le Dieu Un et Trine, et la croyance dans les autres religions, qui est une expérience religieuse encore à la recherche de la vérité absolue, et encore privée de l’assentiment à Dieu qui se révèle. C’est là l’un des motifs qui tendent à réduire, voire même à annuler, les différences entre le christianisme et les autres religions » (§ 7).

    « La confusion entre foi et religion est certainement une des plus graves de celles qui gênent les chrétiens dans leur perception de l’islam » (A. Besançon, op. cit., p. 183).

     

    POUR CONCLURE 

     

    Rémi Brague affirme : « Le christianisme est la seule religion qui ne soit qu’une religion et rien d’autre. Toutes les autres religions ajoutent au religieux une dimension supplémentaire » (op. cit., p. 40).

    Le Christ a réalisé dans sa Personne et sa Pâque la démythisation de toute religion. Il instaure le culte en esprit et en vérité, en s’offrant lui-même au Père pour racheter les hommes du péché. La religion ne consiste donc plus en des sacrifices d’animaux ni en des rites extérieurs (comme dans l’islam), mais dans le sacrifice de la volonté propre et de sa propre vie par amour en retour ; afin de s’inscrire par Lui, avec Lui et en Lui, dans la communion trinitaire. Tel est l’enseignement de l’Eglise jusqu’au Concile Vatican II inclus (cf. notamment la Constitution dogmatique sur la Révélation divine, Dei Verbum).

    Ce n’est donc pas par hasard, mais par une juste compréhension de la foi des chrétiens, que les dirigeants païens condamnaient les disciples du Christ comme « sans dieu » (athées) et « sans religion ». Et ce n’est p

  • La guerre d’indépendance américaine de 1812, méconnue et racontée par Sylvain Roussillon [Interview].

    En 1812-1814, alors que le monde a les yeux tournés vers l’Europe, embrasée par les guerres napoléoniennes, une autre guerre se déroule sur le continent américain. Elle oppose les États-Unis d’Amérique à l’Angleterre.

    La Guerre de 1812-1814 , appelée aussi Seconde Guerre d’indépendance américaine, aurait pu s’appeler « Naissance d’une Nation ». Les Etats-Unis entrevoient le formidable potentiel qui est le leur sur un continent d’où les puissances européennes vont être chassées. Les conséquences de la Guerre de 1812-1814 sont toujours bien présentes.

    7.jpgCette guerre a forgé une nation dans les épreuves, bien davantage que la première Guerre d’indépendance n’avait été en mesure de le faire.

    Ce conflit est retracé dans un nouveau livre passionnant signé Sylvain Roussillon, livre qui retrace les batailles navales et terrestres et les enjeux diplomatiques du conflit et qui est le premier ouvrage écrit en français sur le sujet.

    L’autre guerre d’indépendance américaine – Sylvain Roussillon – 18€ – l’Artilleur (Toucan)

    Nous avons interrogé M. Roussillon pour plonger dans une histoire méconnue.

    Breizh-info.com : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

    Sylvain Roussillon : Je suis né en 1965, j’ai longtemps été un militant politique actif avant de me tourner vers une carrière plus institutionnelle. Parallèlement à cela, je suis président d’un Etablissement Privé d’Enseignement Universitaire.

    Je suis un passionné d’histoire. J’ai déjà publié en 2012 un livre sur les volontaires étrangers pro-nationalistes durant  la Guerre d’Espagne, intitulé Les Brigades internationales de Franco, qui vient d’être traduit et édité en Espagne. En 2019, j’ai rédigé un petit opuscule sur les origines du PCF. Enfin, au mois de novembre prochain, paraitra L’Epopée coloniale allemande, avec une préface de Rémi Porte et une postface de Bernard Lugan ; l’œuvre est consacrée à l’histoire de la colonisation allemande.

    Breizh-info.com : Dans quel contexte se déroule la guerre d’indépendance américaine de 1812 ? Et à l’International, quelles sont les répercussions ?

    Sylvain Roussillon : La guerre de 1812 se déroule dans un contexte pour le moins complexe. La vie politique américaine est déchirée entre deux grands partis aux vues radicalement opposées. Tout d’abord, le Parti Fédéraliste, le père de l’indépendance américaine, avec une lecture encore très « européenne » des rapports de force économiques, politiques et diplomatiques. D’un autre côté, le Parti Républicain-Démocrate qui souhaite une rupture franche avec le Vieux-Monde, notamment l’ancienne puissance tutélaire des Britanniques. Ces derniers n’ont d’ailleurs pas digéré leur défaite dans  la guerre d’indépendance et ne désespèrent pas de reprendre la main, d’une manière ou d’une autre, sur les anciennes colonies rebelles. Ils sont poussés dans cette démarche par plusieurs milliers d’Américains loyalistes, réfugiés au Canada. Ajoutons à cela les prémisses de la Conquête de l’Ouest, avec les premiers heurts vraiment sérieux face à des nations amérindiennes organisées, et peu désireuses d’être encore refoulées plus loin.

    Les répercussions à l’international ne se font pas sentir immédiatement. Les Etats-Unis sont à l’époque une puissance de seconde voire de troisième zone. Quant à l’Europe, elle est bien plus préoccupée par les débuts de la Campagne de Russie et le franchissement du Niemen par l’armée française, ou encore par les violent combats qui déchirent la péninsule ibérique, que par ce petit conflit américano-britannique balbutiant.

    Breizh-info.com : Qui sont les grandes figures, politiques et militaires de l’époque en Amérique ?

    Sylvain Roussillon : Le Président des Etats-Unis est à l’époque le républicain-démocrate James Madison, élu en 1808 et réélu en 1812. Considéré que l’un des principaux rédacteurs de la Constitution américaine, il s’est éloigné des fédéralistes qu’il juge trop timorés à l’égard de l’agressivité britannique.

    James Monroe, qui représente l’aile la plus radicale des républicains-démocrates, est Secrétaire d’Etat de Madison. Il prend une part active dans la conduite de la guerre. Elu président des Etats-Unis en 1816, c’est lui qui, fort de l’expérience de cette guerre de 1812-1814, établira la fameuse « Doctrine » qui porte son nom. Aujourd’hui encore, celle-ci dicte les rapports que les Etats-Unis entretiennent avec le reste du continent américain et le reste du monde. Tout d’abord, les Amériques du Nord et du Sud sont fermées à la colonisation et à toute forme d’ingérence. Ensuite, toute intervention européenne dans les affaires du continent sera perçue comme une agression et une menace pour la sécurité et la paix. Le non-interventionnisme américain, initialement partie intégrante de la « Doctrine Monroe » disparaitra, comme chacun peut le constater, à la fin du XIXème siècle…

    Sur le plan militaire, les Américains feront plusieurs erreurs de « casting » au début du conflit, privilégiant des officiers politiquement acquis à la cause républicaine-démocrate, plutôt que compétents. Un figure militaire se détache néanmoins du lot, celle d’Andrew Jackson. Vétéran des guerres indiennes dans le sud des Etats-Unis, c’est lui qui inflige aux Britanniques, avec l’appui notable des francophones de Louisiane, la plus grosse défaite de ce conflit lors de la bataille de la Nouvelle-Orléans. Il sera à son tour président des Etats-Unis de 1828 à 1837.

    Breizh-info.com : Dans quel camp se situent les principales tribus indiennes ?

    Sylvain Roussillon : Les nations indiennes sont majoritairement hostiles aux Etats-Unis. Le chef shawnee Tecumseh tente même, avec le soutien des Britanniques, de créer une sorte d’état, une Confédération indienne, pour s’opposer à l’expansionnisme américain. Tecumseh est le premier amérindien à obtenir un grade de général dans une armée occidentale, britannique en l’occurrence. Il est tué en 1813, et sa confédération se désagrège. Mais cette même année, la tribu des Red Sticks, de la nation des Creeks, prend les armes dans le sud. Il faut cependant noter que quelques nations demeurent fidèles aux Américains, comme les Cherokees ou les Choctaws. Mais c’est plus l’exception que la règle. Les grands perdants de ce conflit seront, comme souvent, et peut-être toujours, aux Etats-Unis, les nations indiennes.

    Breizh-info.com : Qu’est-ce qui explique que cette guerre soit beaucoup plus méconnue que la première guerre d’indépendance ?

    Sylvain Roussillon : D’une part, ainsi que je l’ai souligné, l’Europe est engagée dans la période des guerres napoléoniennes, et ce conflit du bout du monde, avec cet embryon de nation que constituent alors les Etats-Unis n’intéressent pas grand monde à l’époque. En outre, la paix qui est signée en 1814 (même si les combats vont encore durer quelques mois, le temps que l’ensemble des belligérants en soit informé) conclut à un Statu quo ante bellum. Il n’y a donc ni annexion, ni modification substantielle des frontières et des territoires. Les effets de cette guerre méconnue se feront sentir bien plus tard.

    Il est cependant fort dommage, notamment en Europe, que ce conflit et ses conséquences aient été si peu étudiés. En effet, la Guerre de 1812-1814 est un évènement majeur dans l’histoire des relations internationales des Etats-Unis. Bien plus que la Guerre d’Indépendance qui, si elle reste importante symboliquement, n’a pas les mêmes répercussions internationales. Ce n’est d’ailleurs pas par hasard que certains historiens appellent ce conflit, « Seconde Guerre d’Indépendance américaine ».

    Quelles ont été les conséquences de cette guerre ? Porte-t-elle en elle déjà les germes de la guerre de sécession ?

    Sylvain Roussillon : La première des conséquence de cette guerre est économique. Les Etats-Unis, qui importaient d’Europe l’essentiel de leurs produits manufacturés, sont contraints, à cause du blocus naval britannique, de développer leur propre économie de transformation. C’est cette guerre qui véritablement fait entrer les Etats-Unis dans l’ère de la Révolution industrielle. C’est cette guerre qui va rapidement transformer cette nation rurale en un géant industriel, notamment dans les états du nord, ce qui ne sera pas sans impact sur la Guerre de Sécession à venir.

    Par ailleurs, en 1814, malgré cette paix « sans vainqueur ni vaincu », les Américains éprouvent un curieux sentiment d’invincibilité. N’ont-ils pas, effectivement, tenu tête, seuls, à la première puissance navale et militaire de l’époque, celle-là même qui vient de terrasser la France après plus de 20 ans de conflits et de coalitions. C’est véritablement de cette guerre que nait le sentiment « national » américain. Plus que la Guerre d’Indépendance, la Guerre de 1812 est le véritable creuset du patriotisme des Etats-Unis.

    Enfin, quitte à me répéter, cette guerre donne naissance à la « Doctrine Monroe » qui demeure, malgré les aléas historiques et politiques, la ligne de conduite quasi-permanente des Etats-Unis en matière de politique étrangère depuis sa mise en œuvre.

    Les rapports de ce conflit avec la Guerre de Sécession sont indirects mais bien réels. L’éveil industriel et urbain du nord, construit notamment sur l’exploitation massive d’un sous-prolétariat irlandais, puis bientôt allemand et italien, s’oppose à un autre modèle économique, rural et servile, dans le sud. De surcroît, les deux économies entrent en concurrence au sujet des droits de douane. Le nord, dont l’industrie manufacturière est encore bredouillante, a besoin de ces droits pour contrer la concurrence européenne, tandis que le sud, très exportateur de coton et de tabac, souhaite des barrières douanières les plus faibles possibles. La rivalité entre les deux modèles est effective, provoquant des tensions politiques. au cœur d’un Sénat équilibré, avec 11 états esclavagistes et 11 états non esclavagistes. L’admission du Missouri au sein de l’Union, en 1820, risque de faire basculer le Sénat dans le camp des états esclavagistes. Le président James Monroe élabore alors le « Compromis du Missouri » qui vise à figer les équilibres. C’est ainsi qu’une partie du Massachusetts est détachée de cet état pour former le Maine et ainsi rétablir l’équilibre avec 12 états esclavagistes et 12 états non esclavagiste. Ce compromis durera bon an, mal an, jusqu’à son abrogation en 1854. Cette abrogation réveille les passions et enclenche une dynamique qui conduit à la création du Parti Républicain, défenseur des intérêts économiques du nord. La victoire du candidat du Parti républicain, Abraham Lincoln, lors de l’élection présidentielle de 1860, contre un Parti Démocrate divisé entre partisans de l’esclavage et partisans d’un retour à un nouveau compromis, conduit à la sécession des états esclavagistes du sud. En ce sens, on peut dire que ce sont les « hommes de 1812 » qui posent une partie du décor de la future Guerre de Sécession.

    Breizh-info.com : Est-ce que vous recommanderiez certains films, certains livres sur cette période en Amérique ?

    Sylvain Roussillon : Il n’y a pratiquement pas d’ouvrages en langue française sur le sujet, ou alors il s’agit de travaux qui traitent d’éléments très précis au cœur même du conflit. Mon livre fait un peu figure d’exception, et c’est probablement pour cette raison qu’il est entré dans les syllabus de certaines universités québécoises. Il y a bien quelques films, téléfilms ou séries, mais beaucoup sont inédits en français. Citons tout de même, la série Taboo, sortie en 2017 et qui se passe dans le contexte historique de cette guerre. A titre personnel, je conseillerais, même si cela reste très hollywoodien, et très centré sur la personnalité du pirate francophone Jean Laffite, un des principaux acteurs de la bataille de la Nouvelle-Orléans en 1814, Les Boucaniers, sorti en 1958, avec Yul Brynner, Charton Heston et Charles Boyer.

    Le sujet demeure donc encore largement à explorer pour les francophones.

    Propos recueillis par YV

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  • Sur le blog ami du Courrier Royal : la France des Lys : 6 villes royales où il fait bon flâner.

    La France compte de nombreuses villes marquées du sceau des Rois de France et riches d’un patrimoine historique remarquable. Découvrez six escapades à Fontainebleau, Bourges, Versailles, Saint-Germain-en-Laye, Chantilly et Reims.

    Un environnement naturel souvent exceptionnel, une histoire particulière, un patrimoine préservé… Les villes royales ou princières méritent une visite. Zoom sur 6 villes au charme intact.

     

    Bourges : une cathédrale, des marais et un palais

     

    Des petites rues étroites, des maisons à pans de bois, un palais et, de toute sa hauteur, une cathédrale Saint-Etienne que l’on contemple à des kilomètres. Quel festival! Le vaisseau de pierre gothique construit à partir de 1195 n’en finit pas d’étonner: long de 120 mètres, il se singularise par son absence de transept et de cloche mais aussi par cinq portails finement ouvragés. L’ancienne capitale du Berry, haut lieu de l’Histoire de France offre bien d’autres surprises: les rois capétiens résidaient dans le palais royal qui longeait le rempart gallo-romain, Louis VII y célébra son mariage avec Aliénor d’Aquitaine en 1137 et la ville fut le refuge du duc de Berry et dauphin- futur Charles VII en 1418 lorsque Paris tomba aux mains des Bourguignons. Au XXIe siècle, Bourges conserve cet héritage dont le flamboyant palais gothique érigé du temps de sa puissance par le grand argentier de Charles VII, Jacques Cœur entre 1443 et 1451.

    Les hôtels particuliers en cœur de ville sont quant à eux devenus des musées parmi lesquels l’atypique musée des Meilleurs Ouvriers de France, situé face à la cathédrale. Les savoir-faire de deux cents métiers de l’artisanat, du commerce et de l’industrie s’y exposent. À deux pas, la nature s’invite avec les marais classés de l’Yèvre et de la Voiselle. Seuls marais maraîchers encore existants en France, ils couvrent près de 135 hectares… à arpenter à pied ou à vélo. Les parcelles appartiennent aujourd’hui à quelques 1400 propriétaires jardiniers.

    Renseignements .: Office du tourisme de Bourges 

     

    Versailles : Le château, un marché historique et des escapades en pleine nature

     

    Ville du roi Louis XIV et de sa cour, Versailles (Yvelines) attire toute l’année une foule de visiteurs. Incontournable, le château vous éblouira avec les appartements privés du roi et de la reine, le Palais des Glaces et ses 357 miroirs, reflétant surfaces dorées et lustres de cristal de la pièce. Vous pourrez déambuler dans son parc et au-delà des jardins vous lancer dans une visite guidée à vélo, une balade à pied ou même naviguer sur le canal en barque…  www.chateauversailles.fr. À deux pas du château, ne manquez pas l’opéra Royal à l’acoustique exceptionnelle. Pour une escapade en famille en plein air, le Hameau de la Reine reste aussi un classique avec ses chaumières, les cours d’eau ou les animaux de la ferme royale.

    Côté ville, le Marché Notre-Dame -élu plus beau marché d’Île-de-France vaut la visite! Construit sous Louis XIII, il regorge toujours de produits frais et régionaux. Le très ancien quartier Saint-Louis vous transporte quant à lui au XVIIIe siècle avec ses ruelles pittoresques encadrées d’hôtels particuliers avec l’ombre de son église. Au détour d’une rue, vous trouverez la salle du Jeu de Paume, où les députés des États généraux se réunirent à l’aube de la Révolution, le 20 juin 1789.

    Renseignement : Office de tourisme Versailles

     

    Reims : ville des sacres, de l’art déco, des cités-jardins et de caves pleines de bulles

     

    En Champagne-Ardenne, Reims résume toute l’Histoire de France. Lieu du baptême de Clovis par l’évêque Rémi en 496 et des sacres royaux –de 1027 à 1825-, elle abrite la belle cathédrale Notre-Dame: parmi ses 2300 sculptures, un Ange au Sourire veille, installé sur le portail nord de la façade principale. Ce séraphin décapité pendant les bombardements de la grande guerre symbolise la ville martyre, pilonnée pendant quatre années. La reconstruction a permis d’édifier de superbes bâtiments Art déco privés ou publics à découvrir à partir du parvis de la cathédrale. Au fil de votre déambulation se dévoilent le cellier, les halles du Boulingrin, la bibliothèque Carnegie et de nombreuses façades d’immeubles qui font la fierté des Rémois… Autres surprises, les douze cités-jardins comme celle du Chemin-vert, installée en périphérie de ville, l’une des plus grandes d’Europe avec ses charmantes maisons de style alsacien et une église Saint-Nicaise qui abrite des œuvres de Maurice Denis et René Lalique! Les amateurs de bulles légères pourront quant à eux descendre dans les caves des grandes maisons pour tout savoir sur le champagne.

    Renseignement : Office du tourisme de Reims

     

    Chantilly : un château, des chevaux, des pots et des canaux

     

    Un château Renaissance, des Grandes écuries, un immense potager…. Faites un saut à Chantilly dans les Hauts-de-France! Cette jolie perle picarde nichée au creux de la forêt possède un château d’une blancheur immaculée, conservé à l’identique selon les directives de son dernier propriétaire, Henri d’Orléans, Duc d’Aumale (1822-1897), cinquième fils du roi Louis-Philippe, dernier roi des Français. Posé sur l’eau, le lieu aujourd’hui propriété de l’Institut de France possède un magnifique parc de 115 hectares créé par Lenôtre -sa création préférée. Le château fut aussi le théâtre de l’inventivité culinaire du grand cuisinier Vatel, à l’origine de l’onctueuse crème Chantilly! Mais n’hésitez pas à vous balader aussi dans la ville aux belles maisons bourgeoises à petites tuiles. Elle recèle d’autres surprises dont d’autres musées bien moins connus. Place Versepuy, l’ancienne chapelle Saint-Laurent du centre gériatrique de la Fondation Condé abrite l’incroyable collection de pots de la pharmacie Condé à découvrir sur rendez-vous (ou lors des Journées du patrimoine): 119 pots à pharmacie en faïence peinte du XVIIIe siècle qui racontent la médecine d’autrefois: poudres, onguents, pilules de cynoglosse pour un meilleur sommeil, résine de Gaïac.

    Autre objet de curiosité, le musée de la Dentelle, dédié à l’arachnéenne dentelle noire aux délicats motifs floraux, spécialité textile cantilienne dont raffolait la reine Marie-Amélie, épouse du roi Louis-Philippe. Enfin, une promenade pédestre le long des canaux permet de découvrir une autre facette de la ville à partir de l’esplanade de la Canardière: la vallée de la Nonette, ancienne zone industrielle et ouvrière aux XIXᵉ et XXᵉ siècle).

    Renseignement : Office de Tourisme

     

    Fontainebleau : une résidence impériale, du grès, des hôtels particuliers

     

    Philippe Le Bel y meurt (29 novembre 1314), Louis XIII y reçoit le baptême (14 septembre 1606), la Révocation de l’Édit de Nantes y est signée (18 octobre 1685), Louis XV et Marie Leszczynska y célèbrent leur mariage… Arpenter Fontainebleau, c’est toucher 800 ans d’Histoire! La véritable star, c’est bien sûr le château, à l’entrée de la ville: il accueille chaque année plus de 540 000 visiteurs (chiffres 2019). Sa longue restauration n’est toujours pas achevée: après le théâtre impérial, le boudoir turc, le salon jaune et celui des Dames d’Honneur de l’Impératrice, le magnifique escalier en fer-à-cheval où Napoléon 1er fait ses adieux à la garde le 20 avril 1814 devrait retrouver son éclat en mars 2022. Une mise en beauté sans fin pour l’ancienne maison des rois, résidence préférée de l’Empereur qui compte 1 530 pièces, quatre cours, de très beaux jardins, un grand canal: de François Ier à Napoléon III, un parcours très riche vous attend! De quoi faire beaucoup d’ombre au reste de la cité bellifontaine qui mérite elle aussi d’y déambuler. La forêt qui l’entoure a ainsi fourni le grès pour certains édifices bellifontains. Pour mieux connaître cette autre facette de la cité impériale, un “parcours du grès” se déploie dans toute la ville: vous découvrirez ses beautés architecturales: venelles, hôtels particuliers, couvent ou église…

    Renseignement : Office du tourisme

     

    Saint-Germain-en-Laye: un château, un belvédère et des bunkers

     

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    Lieu de naissance de Louis XIV, cette ville des Yvelines reste imprégnée de son royal passé. Résidence favorite de Louis VI le Gros (1108-1137), Saint-Germain-en-Laye a aussi ouvert les bras à de nombreux artistes, de Molière et aux Dumas père et fils. Le musicien Claude Debussy y est né – sa maison natale est aujourd’hui un musée et le peintre Maurice Denis y avait son atelier. Classé monument historique depuis 1863, le château construit sous François 1er doit à Napoléon sa transformation en musée d’Archéologie nationale. À deux pas du RER, vous pourrez visiter l’une des plus importantes collections d’Europe, du Paléolithique au Moyen Âge! Lancez-vous ensuite dans une longue balade des jardins de l’ancienne résidence royale aménagés par le paysagiste Le Nôtre. La promenade de 2 km culmine avec une terrasse spectaculaire qui embrasse la vallée de la Seine.

    Tout aussi surprenant, à deux pas du château, un blockhaus de la Seconde guerre où vivaient les officiels allemands détonne un peu! A vous de découvrir la vingtaine d’autres bunkers disséminés dans toute la ville… Enfin, Saint-Germain-en-Laye séduit par ses quartiers tranquilles dont celui de “l’ilôt Saint-Christophe”. Il concentre une quinzaine d’artisans d’art  (encadreur d’art, tapissier, sculpteurs de bronze et de papier…) dont vous pouvez admirer le savoir-faire.

    Renseignement : Office de Tourisme de Saint Germain-en-Laye

     

     

    Sources : https://le-courrier-royal.com/

    https://www.facebook.com/lecourrierroyal

  • Face à l'islamisme. Partie 2 : l'unité est-elle suffisante pour vaincre ?, par Jean-Philippe Chauvin.

    Pour l’heure, si le combat civilisationnel n’est pas inutile et, même, nécessaire (comme Georges Bernanos le pensait et le clamait), c’est par l’action du politique que l’idéologie islamiste (j’ai bien écrit « idéologie », je ne parle pas, ici, de religion ou de spirituel) peut être réduite aux plus faibles et aux plus inoffensives proportions, et je doute que l’actuelle République soit en mesure de le faire efficacement, piégée qu’elle est par ses « valeurs » elles-mêmes et le fait qu’elles négligent trop souvent ce qui, dans notre propre être historique et spirituel, a permis à la France de durer et de se transmettre :

    jean philippe chauvin.jpgje renvoie, pour me faire mieux comprendre, au discours du 18 juin 1940 du général de Gaulle qui, lui, évoque d’autres valeurs (pas forcément républicaines...) pour appeler à la résistance, dans une posture d’Antigone face aux Créon du moment... Que des monarchistes comme Rémy, Cordier ou Honoré d’Estienne d’Orves, y aient retrouvés les accents de leur propre révolte contre l’occupation allemande n’est pas une coïncidence ni une erreur, mais participe d’une logique politique éminemment royaliste et capétienne que, étrangement, le doctrinaire Maurras n’a pas suivi, comme s’il avait eu peur que cette résistance difficile ne ruine totalement l’unité française face à l’ennemi : mais il est des moments où il faut savoir prendre le risque de « l’aventure » pour retrouver la liberté, y compris au détriment (temporaire) de l’unité (mais ce terme n’est-il pas, trop souvent, confondu avec l’idée de consensus, plus « lâche » - parfois à tous les sens du mot - ?) qui, de fait, aura toujours plus de chance de renaître et de se renforcer quand le sort aura tranché, à la suite des vainqueurs. Si l’unité française peut être la finalité de l’action politique, ce qu’Anatole France lui-même suppose dans les quatre tomes de son  « Histoire contemporaine », elle doit sans doute se ressourcer régulièrement, y compris par les ruptures avec ce « consensus » qui, parfois, peut mener, non à l’harmonie et à l’équilibre de la nation historique et civique, mais à la « démission globale » : l’histoire nous le prouve régulièrement et parfois bien cruellement, ce sont les « minorités énergiques » (une formule de Maurras que méditera aussi… Lénine !) qui entraîne les populations et qui, par le dissensus, aspirent à créer un nouveau consensus autour de leur idéologie ou de leur liberté. Le rôle de l’État est d’assurer, non le consensus mou propre aux démocraties incertaines (et l’on a vu à quoi cela pouvait aboutir dans les années 1930…), mais d’incarner l’unité « intemporelle » du pays, non pas forcément ou seulement « horizontalement » (de façon juste contemporaine) mais bien plutôt « verticalement », au-delà du moment présent et dans l’enracinement en une « fidélité créatrice » qui relie les siècles entre eux, et que certains nomment l’identité, à la suite de Fernand Braudel.

    Malgré les discours d’un Chef de l’État qui ne méconnaît pas la nécessaire altitude de sa fonction sans être toujours capable de la pratiquer, les attitudes « munichoises » devant la barbarie restent ancrées au sein même de l’École, comme le souligne l’historien Georges Bensoussan (toujours dans le numéro de Marianne publié mercredi) : « (…) A force de ne pas être suivis, voire d’être considérés parfois comme les responsables premiers de la situation conflictuelle qu’ils dénonçaient, en bref d’avoir « provoqué » des élèves déjà par ailleurs « victimes de tant de discriminations » (autrement dit, d’être des « professeurs maladroits », ce qui revient à ramener un problème politique à une question de savoir-faire pédagogique), beaucoup ont fini par se taire. Il est vrai aussi qu’un chef d’établissement, soucieux de sa carrière, n’a pas intérêt à faire état d’une multiplication d’incidents. Le fonctionnement de l’Éducation nationale lui-même est en cause, tant il nourrit le conformisme. Les enseignants courageux – ils sont nombreux – sont désarmés. » Et l’historien de poursuivre, dans un élan qui dépasse une République que, d’ailleurs, il ne cite plus, comme si la magie du terme (le sortilège, diraient certains dont je peux être) ne faisait désormais plus d’effet : « Les islamistes, dont la visée n’est pas seulement de se séparer de nous mais de détruire notre univers culturel, sont servis par le poids du nombre conjugué à la lâcheté des uns comme à la stupidité d’un certain « gauchisme culturel ». D’un autre côté, en quarante ans, la bourgeoisie d’affaires a aidé à constituer cette masse de manœuvre d’un prolétariat étranger qui a tiré les salaires vers le bas et plongé dans le désarroi social et culturel les classes populaires françaises. » Cet abandon des classes populaires considérées comme « trop coûteuses » (à cause des lois sociales et de la hausse des salaires constante et accélérée depuis la fin des années 40) par la République dominée par les intérêts financiers et économiques, a eu des conséquences délétères : l’immigration de masse, ainsi utilisée comme le moyen idéal pour le patronat de contourner les revendications ouvrières, a pu ensuite servir de vivier pour ceux qui s’appuyaient sur les conditions misérables faites aux nouveaux venus pour les enjoindre à la « révolte » (voire à la « conquête », si l’on suit quelques-uns des « prêcheurs de haine ») contre le pays d’accueil.

    Car, il faut le dire : la République n’a pas toujours été généreuse avec ses nouveaux « invités », comme elle avait été profondément injuste avec ceux qui avaient pourtant combattus sous le drapeau tricolore, ces fameux harkis parqués en des conditions indignes dans quelques camps du sud de la France… Mais la République a cru ensuite qu’elle pouvait « acheter » la paix sociale dans les quartiers où elle avait entassées les nouvelles populations par quelques aides et autres allocations qui lui évitaient de répondre aux questions sociales et, même, civilisationnelles, posées par la Société de consommation, ce « grand remplacement » des anciennes sociétés enracinées et traditionnelles par une société fondée sur l’argent et l’individualisme, sur cette loi de la compétition permanente qui fait oublier les valeurs de partage et d’entraide. Les « gauchistes », déçus après Mai 68 par une classe ouvrière « nationale » en définitive peu motivée par les mots d’ordre de « révolution sociale », se sont alors tournés vers le « lumpenproletariat » venu des anciennes colonies pour parvenir à leurs fins et établir la domination de leur bien-pensance mondialisée, dans l’imitation d’une « Internationale » fantasmée issue d’une lecture rapide de Marx et Trotski… Mais l’islamisme, dont la véritable naissance date de l’année 1979 et de la chute de la monarchie persane de Reza Pahlavi, a été plus fort car il s’appuyait sur un appel au retour aux sources identitaires et religieuses, sources négligées par la Société de consommation persuadée que son modèle signifiait la fin de l’Histoire : nous vivons là les conséquences de l’aveuglement de la République française face à un phénomène qu’elle n’a pas saisi quand elle aurait encore pu en éviter la victoire en Iran, cette victoire (dans le monde chiite) provoquant, en réaction mimétique et par crainte de voir « l’hérésie » chiite entraîner tout le monde islamique derrière lui, la naissance de l’islamisme, se revendiquant d’un sunnisme extrémiste (malgré ceux qui le pratiquaient tranquillement), dont nous subissons désormais les attaques sur notre territoire.

    Ce que M. Bensoussan, venu de la Gauche historique, a compris, c’est que la République a failli et, sans qu’il le dise, il me semble qu’il ne croit plus guère que la République telle qu’elle est aujourd’hui puisse vaincre l’hydre islamiste : « C’est un combat perdu s’il n’y a pas une réforme de certaines institutions publiques. Si nous n’imposons pas un véritable pluralisme des idées et des intellectuels dans les médias financés par l’argent public. Le chœur des pleureuses mobilisé après la décapitation de ce malheureux professeur d’histoire suscite le malaise. La déploration est un discours de vaincus. » Et, là encore, la réponse est éminemment politique : un État fort, soucieux de renouer avec sa tradition de conciliation de l’autorité et des libertés, assez solide au sommet pour permettre une véritable décentralisation et redonner aux provinces (et pas seulement aux régions administratives aux frontières parfois trop artificielles pour être crédibles) la possibilité d’agir et de faire aimer « l’ensemble français », ce n’est pas qu’une option, c’est une nécessité. Car l’École elle-même n’est rien d’autre que l’un de ces instruments susceptibles de relayer une stratégie politique qu’elle n’élabore pas par elle-même : pas d’État fort, alors pas de colonne vertébrale solide à l’école ! Mais, dans le même temps, l’État doit-il régenter l’École ? La préserver, oui, mais la régenter ? La question mérite d’être posée, en attendant quelques éléments de réponse plus précis.

    Ne plus être dans les larmes et la peur, et fonder une nouvelle unité de la France, à la fois plurielle et commune. N’est-ce pas ainsi que la France pourra défaire l’islamisme, et j’emploie le verbe « défaire » à dessein, car il s’agit aussi de cela ? Détruire quelques réseaux ne suffira pas, mais défaire l’idéologie islamiste n’est possible que si l’État sait « faire et refaire » : « faire France », au sens politique, pour « refaire des Français », au sens civique et civilisationnel.

    Face à l’islamisme, on ne pourra pas faire longtemps l’économie du débat sur l’État, son sens comme ses institutions…

     

    (à suivre)

    Source : https://jpchauvin.typepad.fr/

  • Sur le Cercle Aristote, Roland Hureaux : Jésus roi des Juifs.

    Pour aller plus loin :

    Roland Hureaux revient avec nous sur son ouvrage Jesus Christ Roi des Juifs sur l'histoire du Christ et son histoire politique.

  • Sur Figaro Vox, plaidoyer pour une souveraineté industrielle, par Eric Delbecque.

    L’usine Michelin de la Combaude poursuit ses activités malgré la crise sanitaire. Clermont-Ferrand, le 10 avril 2020.

    THIERRY ZOCCOLAN/AFP

    La crise démontre que la souveraineté industrielle conditionne notre sécurité nationale, considère le spécialiste des questions de guerre économique Éric Delbecque. Il appelle à abandonner la logique du capitalisme financier pour rebâtir notre tissu industriel et repenser l’aménagement de notre territoire.

    Le Covid-19 a hélas réussi là où de nombreux spécialistes avaient échoué durant bien des années. Il démontre que la souveraineté industrielle n’est pas un concept ringard de nostalgique des grands programmes gaullistes mais une condition de la sécurité de la nation. L’intervention du Chef de l’État a évoqué ce point de façon claire: certaines productions méritent d’échapper aux simples «lois» du marché et ne peuvent pas être confiées à d’autres pays, Chine en tête. Il faut saluer cet effort de réinvention chez un homme qui n’avait pas placé cette question au centre de ses préoccupations jusqu’à présent. Précisons une fois encore, sur ce point comme sur d’autres depuis les gilets jaunes, qu’il apparaît trop facile de rejeter sur Emmanuel Macron l’intégralité de la responsabilité de tous nos abandons. Son prédécesseur n’a guère brillé en la matière: on peut même affirmer qu’il a résolument accompagné la désindustrialisation de l’Hexagone, et qu’il montra une totale indifférence aux problématiques de la guerre économique, de l’autonomie stratégique et des phénomènes de dépendances multiples mettant en danger la sécurité nationale au sens le plus large. À partir d’aujourd’hui, il faudra juger sur pièces…

    Nous fûmes, en France, les dindons de la farce de la mondialisation de bas étage.

    En fait, voilà 30 ans que nous déconstruisons tranquillement notre souveraineté en commençant par pulvériser les briques économiques. Celles-là mêmes qui nous permettent de ne pas être à la merci de la bonne volonté des autres lorsque l’essentiel sera en question et que chaque nation se concentrera d’abord sur la santé et la préservation des siens. Il est d’ailleurs difficile de le leur reprocher… Nous fûmes, en France, les dindons de la farce de la mondialisation de bas-étage (il en existe une plus intéressante, qui peut rapprocher les peuples et accroître les coopérations et les solidarités). Nos élites, toutes couleurs politiques confondues, publiques comme privées et académiques, firent semblant de croire que les rapports de force et les règles ordinaires de l’échiquier international de la puissance avaient disparu comme par magie. Impossible de laisser partir nos usines à l’autre bout de la planète et d’imaginer que l’on n’en subira jamais les conséquences.

    La France n’a plus le droit désormais de se tromper: l’heure est à l’élaboration d’une solide doctrine sur ce thème précis. La base a été énoncée lundi par le président de la République: «il nous faudra rebâtir une indépendance agricole, sanitaire, industrielle et technologique française et plus d’autonomie stratégique pour notre Europe. Cela passera par un plan massif pour notre santé, notre recherche.» Pour réussir à relever ce défi, il faut cependant aller plus loin dans la définition de secteurs stratégiques tels que la Défense, la sécurité, l’énergie et quelques autres. À commencer par la santé, dont on saisit dorénavant à quel point elle exige d’être qualifiée de stratégique! Aller plus loin, c’est identifier des Entreprises d’intérêt local essentiel (EILES), PME traditionnelles, «Gazelles» et «Licornes», qui ne produisent pas forcément des boulons spécifiques pour les blindés ou les satellites, mais qui se révèlent capitales pour freiner la désertification d’un territoire (par leur nombre de salariés sur un espace fragile, des activités porteuses d’innovations fortes, etc.) ou pour sécuriser une population (par exemple la production de masques). Travail de titan? Sans doute. Néanmoins absolument nécessaire.

    Ce qui repose sur la collaboration de nombreux acteurs implique d’exclure toute arrogance technocratique.

    Il est clair que c’est aussi une manière de promouvoir le Made in France et la French Tech (sous réserve que l’on ne laisse pas le reste du monde la piller allègrement). Il serait sain de revenir à quelques raisonnements de bon sens: commencer par sanctuariser des entreprises indispensables à la continuité d’activité nationale, à la vie ordinaire en situation dégradée, afin de ne pas craindre de perdre les manettes, le contrôle de nos destinées. S’attaquer par conséquent (puisque les deux thèmes sont en partie connectés) à la rénovation de la «France périphérique», en refaçonnant son futur économique et industriel, bref se pencher de nouveau sur l’aménagement du territoire en ne s’abandonnant pas hypocritement au capitalisme financier le plus aveugle aux finalités non négociables de l’intelligence territoriale. Il ne s’agit pas bien sûr de nationaliser compulsivement mais d’épauler les organisations productives dans leur effort pour demeurer un moteur de prospérité des territoires (commune, département, région) dans lesquels elles s’enracinent. Ce qui repose sur la collaboration d’un grand nombre d’acteurs, non sur l’éviction de tel ou tel, et demande impérativement d’exclure toute arrogance technocratique (ou bureaucratique) qui persiste à jouer la partition du bon élève qui sait tout.

    Ce qui implique de créer de véritables Comités stratégiques d’intelligence territoriale (CSIT) pilotés par les préfets de région et intégrant les conseils régionaux, ainsi que les représentants structurant de la vie économique locale (associations professionnelles, grands opérateurs du service public, syndicats, etc.). Ces Comités, qui ne sont pas une idée totalement neuve (le Préfet Rémy Pautrat, dont l’auteur de ces lignes avait l’honneur d’être l’un des collaborateurs à cette époque, porta cette lumineuse idée dès 2005, sans grand succès sur la durée), auraient pour mission de se livrer à un vaste examen de ré-identification et d’enrichissement d’une liste des secteurs prioritaires rafraîchissant la notion de secteur stratégique, ou tout au moins essentiel, au niveau local (où figurerait l’agriculture, les transports). Cette dynamique de ciblage fin s’ajouterait à celle, nationale, de travail sur les SAIV (Secteurs et activités d’importance vitale) et les entreprises de souveraineté nationale. Dans ces enceintes pourrait naître le travail de renaissance de nos tissus industriels locaux: on pourrait y faire le point sur les savoir-faire industriels perdus ou sur le chemin de la disparition et décider de mesures correctives (notamment dans le domaine de la formation) pour recréer une autonomie de production. L’ensemble de la réflexion sur la rénovation économique des territoires trouverait là un instrument adapté, reposant sur la coordination de l’État et des régions, une intelligence collective, une combinaison de volontés réellement coopératives, accompagnée par l’ensemble des partenaires nécessaires (privés, publics, universitaires, sociaux).

    Le coronavirus nous offre une dernière chance de ne pas nous laisser engloutir par une logique budgétaire intégriste.

    Par ailleurs, nous ne pouvons plus nous passer d’un centre d’impulsion permanent sur cette question de l’autonomie économique stratégique, de la souveraineté industrielle indispensable à notre avenir national et européen. Le temps est donc venu de créer un secrétariat d’État à la sécurité économique, rattaché au Premier ministre, dont la vocation serait de donner corps à cette notion. De la même façon que l’on comprend aisément la notion de sécurité sanitaire, il devient urgent de fédérer sous ce vocable de «sécurité économique» l’ensemble des impératifs, relevant de la sécurité nationale, que sont la relocalisation d’activités vitales sur notre sol, la cristallisation de l’idée de souveraineté industrielle (qui implique de stopper certaines logiques mortifères de la société de marché sauvage) et la défense des écosystèmes économiques locaux, sur nos territoires, qui doivent être préservés ou rénovés si l’on veut éviter de dévaler toujours plus vite la pente glissante nous ayant conduits aux gilets jaunes, et que l’on envisage chaque jour avec un peu plus d’appréhension. Le sondage effectué par ODOXA pour l’agence COMFLUENCE avec Les Échos et Radio classique est éclairant: 61 % des personnes interrogées estiment que «nos sociétés ne pourront plus jamais fonctionner comme avant et que notre rapport aux autres, à l’environnement, à la croissance, et à la mondialisation changera profondément». Plus loin, 57 % pensent que l’une des plus grandes leçons de cette crise sera que «les entreprises françaises vont devoir relocaliser leurs productions et repenser leurs responsabilités sociétales». Le Covid-19 fait office de lanceur d’alerte: porteur de mort et de malheur, de solitude et de douloureuses interrogations, il nous offre cependant une dernière chance de ne pas nous laisser totalement engloutir par une logique budgétaire intégriste qui ne nous donne comme seul droit que celui de compter les morts…

     

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    Expert en sécurité intérieure, Eric Delbecque est colonel de réserve de la Gendarmerie Nationale et membre du conseil scientifique du CSFRS (Conseil Supérieur de la Formation et de la Recherche Stratégiques). Il est directeur du pôle intelligence économique de COMFLUENCE. Il fut conseiller défense auprès du Ministre de l’Intérieur (2009-2012) et responsable de la sécurité de Charlie Hebdo après l’attentat de 2015. Docteur en Histoire contemporaine, diplômé de Sciences Po et de la Sorbonne, conférencier à l’IHEDN (Institut des Hautes Études de Défense Nationale), au CHEMI (Centre des Hautes Études du Ministère de l’Intérieur), et à l’École de Guerre Économique, il a enseigné à Sciences-Po, l'ENA, l'ENM et à l'EOGN (École des Officiers de la Gendarmerie Nationale). Il est spécialiste des questions de guerre économique, l’auteur de nombreux ouvrages sur l’intelligence économique et la sécurité notamment L’intelligence économique pour les nuls (First, 2015).

  • Annie Laurent : L’islam, mythes et réalité

     

    Par Anne Bernet

     

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    Anne Bernet a interrogé Annie Laurent à l’occasion de la publication de son livre l’Islam aux Editions Artège, un livre clair qui s’adresse à tous ceux qui veulent comprendre le pourquoi et le comment de la situation actuelle, en Europe et particulièrement en France. 

    Annie Laurent, vous publiez un nouveau livre sur l’islam*, issu des textes que vous écrivez dans le cadre de l’association Clarifier**. Quel est le rôle de cette dernière ?

    Comme son nom l’indique, cette association, que j’ai fondée avec quelques amis, a une vocation pédagogique qui concerne explicitement l’islam dans toutes ses dimensions.

    Partant du constat que beaucoup de nos compatriotes sont déconcertés par le développement de cette religion en Europe, et qu’en même temps, ils errent dans le maquis des confusions, des approximations, des discours convenus et autres faux-semblants, nous voulons leur offrir des informations et des analyses fiables pour leur permettre de porter un regard lucide et vrai sur cette nouveauté à laquelle ils n’étaient pas préparés. L’association Clarifier espère aussi contribuer à l’élaboration d’attitudes fondées sur la raison et non seulement sur l’émotion, car il ne s’agit pas d’opposer un système à un autre, sous peine de céder à une approche idéologique. C’est pourquoi l’intelligence des réalités islamiques est indissociable d’un regard de bienveillance à porter sur les musulmans.

    Vous tenez sur l’islam un discours clair, justement. Et vous n’hésitez pas à démontrer l’erreur qui consiste à considérer la violence et l’intolérance islamistes comme des dévoiements d’une « religion de paix et d’amour ». Pouvez-vous nous expliquer comment s’est forgé ce mythe bien-pensant ?

    Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’Occident s’est laissé gagner par le pacifisme, attitude qui nie l’existence d’ennemis. Mais, malheureusement, cette utopie ne correspond pas à la réalité. Depuis le péché d’Adam et Éve, le mal est entré dans le monde. Il ne va pas s’évaporer comme par enchantement ! Par ailleurs, la décolonisation a engendré chez les Européens un complexe qui les pousse à l’auto-culpabilisation, au dénigrement de leur histoire et de leur identité, et à l’idéalisation de la culture des « autres », même si celle-ci comporte des aspects incompatibles avec les fondements de notre civilisation. Il est urgent d’en finir avec ces idées malsaines et mortifères.

    Précisément, pouvez-vous nous donner un aperçu de ces incompatibilités ?   

    Selon moi, la plus importante concerne l’anthropologie et c’est peut-être la moins perçue. L’Europe, largement façonnée par la culture chrétienne, a mis la personne au centre de son projet civilisationnel. Ce concept s’enracine dans l’enseignement biblique selon lequel l’homme et la femme sont créés « à l’image de Dieu » (Gn 1, 27). Or, Dieu, tel qu’Il se révèle, est un Dieu personnel, Un en Trois Personnes, comme l’exprime le dogme de la Trinité. C’est de là que découle la dignité inviolable et inaliénable de l’homme, ainsi que sa liberté jusque dans sa conscience. Le Coran fait l’impasse sur ces magnifiques réalités : Allah soumet l’individu à une adoration servile et à l’autorité arbitraire d’une Loi (la charia) qui ne cherche pas forcément son bonheur, l’être humain étant inapte au dépassement moral ; Il l’enferme dans un carcan de devoirs, sous la surveillance constante de l’Oumma (la Communauté des musulmans) qui veille à ce qu’il ne s’écarte pas de sa religion, considérée comme « naturelle » ; Il instaure une supériorité des musulmans sur les non-musulmans, de l’homme sur la femme ; Il justifie le recours à la violence et l’injustice, notamment pour faire triompher l’islam. D’où bien des malentendus dans un langage qui semble partagé avec une religion comme le christianisme. Ainsi en est-il de la miséricorde (en islam, le pardon de Dieu est aléatoire et le talion entre hommes autorisé), de la paix (concevable là où l’islam domine), etc. Ces exemples illustrent l’aspect totalisant de l’islam, idéologie religieuse qui mêle le temporel et le spirituel, excluant donc la laïcité.

    Bizarrement, nos féministes ne s’insurgent guère contre la place faite aux femmes dans l’islam. Pourtant, elle n’est guère avantageuse…

    On retrouve là l’expression du complexe dont j’ai déjà parlé, à quoi il faut sans doute ajouter le rejet de tout ce qui peut provenir de la conception chrétienne. Mais le jour où nos féministes subiront le joug de l’islam, elles déchanteront peut-être… 

    L’on évoque parfois la nécessité d’une « modernisation » de l’islam. Vous en démontrez pourtant l’impossibilité…

    Plutôt que d’impossibilité, je préfère parler d’obstacles, afin de ne pas enfermer tous les musulmans dans un cadre immuable et de ménager la liberté de ceux qui oeuvrent avec sincérité et courage à cette rénovation, indispensable à la paix du monde. Je vois deux obstacles structurels aux blocages qui entravent cette évolution. Il y a d’abord le statut « incréé » du Coran, considéré comme un Livre dicté en toutes lettres (arabes) par Allah Lui-même, donc sans que l’homme ait eu sa part dans la rédaction, comme c’est le cas avec la Bible. L’islam ignore d’ailleurs le concept d’inspiration. Ce Livre est réputé immuable et intangible. En outre, l’islam, du moins dans le sunnisme, que professent la plupart des musulmans, ne s’est pas doté d’une autorité magistérielle habilitée à délivrer une interprétation revêtue du sceau de l’authenticité. C’est pourquoi les intellectuels qui veulent vraiment adapter l’islam aux nécessités de notre temps, courent un double risque : soit être considérés et parfois jugés et condamnés pour ce crime comme des apostats, soit demeurer marginaux.

    Vous êtes l’une des meilleures spécialistes du drame des chrétiens d’Orient. Qu’en est-il, au fait, de leur sort en terre d’islam ?

    Depuis l’apparition de la religion de Mahomet, au VIIsiècle, et les conquêtes qui ont suivi, les chrétientés des pays concernés au Proche-Orient (Etats arabes, Iran, Turquie) et en Afrique n’ont cessé de décliner numériquement. Outre le djihad, la dhimmitude imposée par les pouvoirs musulmans a été – et demeure parfois – l’une des causes principales de cette diminution. Ce statut juridique impose aux chrétiens (mais aussi aux Juifs et aux Sabéens) des servitudes dans tous les domaines (religieux, politique, social, etc.), le but étant de les humilier jusqu’à ce que, n’en pouvant plus, ils abjurent leur foi pour embrasser l’islam. Demeurer chrétien en terre d’islam relève de l’héroïsme et nous devons admirer les disciples du Christ qui tiennent à rester chez eux pour témoigner de l’Évangile, ceci jusqu’au risque du martyre.

    Vous vous adressez en particulier aux catholiques, en posant les limites du dialogue interreligieux avec les musulmans. En quoi, selon vous, l’Église actuelle fait fausse route ?

    La Bible nous montre un Dieu qui n’a cessé d’aller à la rencontre de l’humanité jusqu’à s’incarner Lui-même en Jésus-Christ. Les chrétiens, enfants de Dieu par le baptême, sont donc invités à imiter leur Seigneur, comme l’ont d’ailleurs fait les apôtres, puis les missionnaires de tous les temps. La mondialisation actuelle a poussé l’Église, attentive aux signes des temps, à élargir cette démarche à tous ses fidèles et à l’organiser. Cependant, les maux dont j’ai déjà parlé, tels que le pacifisme et le complexe post-colonial, ont aussi pénétré les milieux chrétiens, si bien que l’on a perdu de vue la finalité du dialogue qui est d’annoncer le salut à tous les hommes, donc aussi aux musulmans car ils y ont droit. Il en est résulté le relativisme actuel. Or, un dialogue qui exclut la vérité devient une démarche mondaine dépourvue d’une authentique charité, comme l’ont rappelé plusieurs documents magistériels depuis le concile Vatican II.

    Comment voyez-vous l’avenir proche de l’Europe confrontée à l’islam et quels remèdes préconisez-vous ?

    Il est indéniable que l’heure est grave. Si l’Europe veut vraiment relever le défi de l’islam, elle doit donner aux musulmans qu’elle accueille un vrai désir de s’intégrer en renonçant à leur culture. Pour cela, les sociétés européennes doivent proposer un modèle de société attrayant. Cette démarche passe par un renoncement au laïcisme et la restauration d’une saine laïcité (unité-distinction, selon la formule de Benoît XVI) ainsi que par la restauration d’une Cité vertueuse, sans craindre la vertu de force, qui n’est pas synonyme d’agressivité mais revêt une réelle dimension morale. La réponse au défi de l’islam est donc tout à la fois politique, morale et spirituelle.     

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    * L’Islam, pour tous ceux qui veulent en parler (mais ne le connaîsent pas encore)Préface de Rémi Brague, Éd. Artège, 287 p, 19,90 € 

    ** Association Clarifier,  Galaxy 103, 6 bis rue de la Paroisse, 78000 Versailles
    www.associationclarifier.fr 

    Iman shiite - Politique Magazine

    Un Iman shiite dans une moquée de Téhéran parle à une assemblée de femmes

    Anne Bernet
  • Feuilleton : ”Qui n 'a pas lutté n'a pas vécu”... : Léon Daudet ! (2)

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     (retrouvez l'intégralité des textes et documents de ce sujet, sous sa forme de Feuilleton ou bien sous sa forme d'Album)

    Aujourd'hui : l'enfance et l'adolescence heureuse... Qui êtes-vous, Léon Daudet ?...

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    ndlr : ce sujet a été réalisé à partir d'extraits tirés des dix livres de souvenirs suivants de Léon Daudet : Paris vécu (rive droite), Paris vécu (rive gauche), Député de Paris, Fantômes et vivants, Devant la douleur, Au temps de Judas, l'Entre-deux guerres, Salons et Journaux, La pluie de sang, Vers le Roi...

     

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    L'enfance et l'adolescence heureuse...

    Qui êtes-vous, Léon Daudet ?

     

    Léon Daudet, la critique sans moraline - Causeur
     

    Vous naissez à Paris, en 1867, d'Alphonse Daudet (1840-1897) et de Julia Daudet (1844-1940), née Allard, épouse et collaboratrice littéraire d'Alphonse Daudet.

    Vous avez la chance de naître dans une famille heureuse, aimante, unie, dans laquelle l'affection, débordante, s'étend même au cousinage : envers, par exemple, ces cousins restés en Provence, chez qui, vous et vos parents, vous vous rendez souvent; ce qui vous permet, bien que parisien, "de naissance et de vie", de ne jamais perdre le contact avec vos origines méridionales, et de garder toujours, pour ainsi dire, un pied dans votre terre ancestrale, vous qui écrivez "Paris est tellement incorporé à ma substance que partout où je suis je l'emporte avec moi et que, même en exil, je l'arpente en tous sens, c'est le cas de le dire, les yeux fermés..." (Paris vécu, 1ère série, Rive droite, page 39)... : vous avez la "double nationalité", en quelque sorte !

    On verra, dans les documents suivants, l'affection et la tendresse immense que vous aviez pour vos parents : en ce qui concerne votre père, le mot "vénération" n'est pas si éloigné de ce que vous éprouviez pour lui...
    Si votre mère mourra très tard (le 23 avril 1940, deux ans à peine avant vous) votre père tant aimé, lui, mourra jeune, à 57 ans (en 1897) et sera ainsi enlevé prématurément à votre affection (au même âge que le sera Jacques Bainville, emporté, lui, par un cancer de l'œsophage). On lira dans ce Feuilleton - tirés de "Devant la douleur" - quelques extraits des pages que vous consacrez à sa terrible maladie nerveuse - le tabes dorsalis, affection de la moelle épinière - qui l'avait amené à se rendre, avec vous, qui l'accompagniez toujours, à Lamalou-les-Bains, station thermale de l'Hérault...

    Vous êtes le premier de trois enfants, avec votre frère cadet Lucien (né en 1878) et votre sœur Edmée (dont le parrain était Edmond de Goncourt, aux origines de la célèbre Académie, dont vous avez été membre dès l'origine, et qui mourut d'ailleurs à Champrosay, dans la demeure de vos parents).

    En 1891, vous épousez Jeanne Hugo, petite-fille de Victor Hugo. Le mariage fait scandale, car il est uniquement "civil". D'ailleurs, malgré la naissance d'un fils - Charles - il ne durera pas, et vous vous séparerez en 1895.

    Vous l'avez écrit, dans vos Souvenirs : vous êtes entré brièvement dans la famille Hugo, pour en sortir presqu'aussitôt, et célébrer votre second et véritable mariage, durable et heureux - malgré tout... - celui-là...
    En 1903, vous épousez votre cousine germaine, Marthe Allard, surnommée Pampille, dont vous avez trois enfants : Philippe, né en 1909, assassiné par des anarchistes manipulés par la police politique en 1923; François, qui sera médecin et journaliste; et leur sœur Claire.

    Votre vie va défiler, ici et maintenant, dans la suite de ce feuilleton, jusqu'à cette année de 1942 au cours de laquelle, atteint d'une hémorragie cérébrale, vous, le provençal d'origine, mais né à Paris, êtes revenu dans votre Provence originelle, pour y décéder, le 1er juillet, à Saint-Rémy-de-Provence, dans le mas voisin du mas d'Angirany, où résidait alors la famille Mauron.

    "Qui n'a pas lutté n'a pas vécu" : telle est la fière devise personnelle que vous avez adoptée.
    En partant à votre découverte, on verra que ce n'étaient pas là des mots en l'air, ou une belle formule, mais creuse.
    Vous avez lutté pour de vrai, consacrant votre vie à vos idéaux, et l'on verra que les moments glorieux et joyeux qui ont jalonné votre engagement ont été accompagnés d'autres, tragiques et douloureux : ce n'est donc pas en vain que vous avez choisi votre devise, qui fut tout sauf un "effet de style", une phrase bien tournée; vous en avez vraiment fait votre règle de vie, pour le meilleur et pour le pire, à votre façon et selon votre manière d'être : toujours enjoué et joyeux, bouillant et comme animé d'un mouvement perpétuel, à la limite parfois de l'hyperactif et du volcanique...

    Une anecdote (on pourrait en citer cent autres...) vous décrit à merveille, dans votre tempérament et votre façon d'agir : c'est lorsque, par votre intervention à la Chambre, vous avez fait tomber le cabinet Briand.
    Nous sommes le mardi 10 janvier 1922; vous prévenez vos amis : "J'interpelle, d'ordre de Maurras"; vous êtes encouragé par votre ami Magne, député royaliste de Nîmes dans cette Chambre "bleu horizon" où vous êtes élu, vous, de Paris (3ème secteur, XVIème arrondissement) : "...Mais pousse-les bien, hein, vieux Léon, les quelques paroles (me dit Magne avec l'accent de chez nous), et donne-leur l'impression du feu de Dieu...".
    Le "feu de Dieu" ou, comme on dit aussi, en provençal, "un tron de l'air", voilà ce que vous avez été. Le mot "tron" signifiant tonnerre, foudre, et l'expression familière "tron de l'air" étant souvent employée pour un enfant insupportable, un vrai démon... On parle aussi, en provençal, d' "estrambord", c'est-à-dire de "débordement de vie" : régal pour vos amis, crainte et inquiétude pour vos adversaires, c'est bien ce que vous avez été, à la Chambre mais aussi toute votre vie durant, avec votre "estrambord" : un "tron de l'air", un "feu de Dieu", une "surabondance de vie", comme vous le dites de Forain, employant - pour parler de lui - une expression qui convient si bien - pour parler de vous - ...
    D'ailleurs, dans "Député de Paris" (page 115) vous vous en amusez : "...La nature m'a doué, sous le rapport du volume de la voix. Quand j'ai affaire, comme c'était le cas à la Chambre, à quelques braillards, je commence par les épuiser, en les excitant, en les désignant nommément, en me fichant d'eux, en répliquant aux injures et aux blagues par d'autres injures et d'autres blagues. Là-dessus, le Président intervenait, grondait mes insulteurs et les rappelait à l'ordre (quel ordre ?), me grondait et me rappelait à l'ordre..."

    Le moment est venu de suivre votre longue existence (75 ans), qui se confond avec l'histoire de France, à partir du moment où vous rencontrez Charles Maurras - d'un an votre cadet : il est né en 1868 - et où vous avez été littéralement subjugué par son intelligence et le don qu'il avait fait, lui aussi, de son existence, à la Patrie et au Bien commun ("J'entrai en politique comme on entre en religion.." écrira-t-il).

    Vous rencontrerez aussi Jacques Bainville, et de là naîtra une amitié unique entre vous trois. Une amitié telle que seule la mort vous séparera, vous trois que, pourtant, tout séparait, à ne considérer que les aspects relevant de vos personnalités et de vos goûts très différents.

    Et cela, pourtant, pendant seulement la moitié de votre vie : plus d'un en sera surpris, mais, né en 1867, vous n'êtes devenu définitivement royaliste qu'en 1904, à 37 ans, même si vous aviez commencé déjà à évoluer en ce sens depuis 1899 et la "Déclaration de San Remo" (on y reviendra...). Renouant ainsi avec la tradition royaliste "interrompue" de votre ascendance paternelle : alors que vos deux amis et complices Maurras et Bainville ont été royalistes très tôt, et très jeunes, vous avez donc passé, vous, à peine un peu plus de temps avec vos amis royalistes (38 ans "dedans") qu'avant de vous joindre à eux (37 ans "dehors" ou "avant"). Et, si eux furent royalistes presque "dès le début", pourrait-on dire, vous avez passé, vous, une bonne partie de votre existence - la première - pendant laquelle l'idée du royalisme vous aurait semblé - on le lira plus bas -une "bizarrerie" !...

    Mais, n'allons pas trop vite, et commençons par le commencement : racontez-nous votre existence, depuis ses débuts, et, dites-nous : qui êtes vous, Léon Daudet ?