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LAFAUTEAROUSSEAU - Page 1388

  • Attentats à Paris et à Bruxelles : « C'est l'ennemi qui nous désigne »

     

    Pour comprendre la guerre qui oppose l'Europe à l'islamisme, Mathieu Bock-Côté nous invite à redécouvrir Julien Freund. [Figarovox 1.04] A travers Freund, il nous invite ici à renouer avec les fondements du politique, à rejeter l'universalisme radical, à refuser ce que Maurras eût appelé les nuées, à opérer ce que Thibon nommait retour au réel. « Contre le progressisme qui s'imagine pouvoir dissoudre la pluralité humaine dans une forme d'universalisme juridique ou économique et le conflit politique dans le dialogue et l'ouverture à l'autre ». Sa conception du politique et de l'histoire, son anthropologie même, nous ramènent à Bainville et Maurras. A toute l'école d'Action française. Face à cet épuisement de l'identité européenne - dont le constat nous est familier grâce à Jean-François Mattei - Mathieu Bock-Côté nous conduit, comme jadis Pierre Boutang, à la redécouverte d'une pensée qui sauve. Une pensée des profondeurs qui ressurgit des lointains de notre Histoire. Nous sommes ici dans un paysage familier.  Lafautearousseau  

     

    Mathieu Bock-Coté.jpgPendant un bon moment, la figure de Julien Freund (1921-1993) a été oubliée. Il était même absent du Dictionnaire des intellectuels français paru en 1996 au Seuil, sous la direction de Jacques Julliard et Michel Winock, comme si sa contribution à la vie des idées et à la compréhension du monde était insignifiante. Son œuvre n'était pas rééditée depuis 1986. L'ancien résistant devenu philosophe qui refusait les mondanités parisiennes et la vision de la respectabilité idéologique qui les accompagne œuvrait plutôt en solitaire à une réflexion centrée sur la nature du politique, sur la signification profonde de cette sphère de l'activité humaine.

    Son souvenir a pourtant commencé à rejaillir ces dernières années. Après avoir réédité chez Dalloz en 2004 son maître ouvrage, L'essence du politique, Pierre-André Taguieff lui consacrait un petit ouvrage remarquablement informé, Julien Freund: au cœur du politique, à La Table Ronde en 2008. En 2010, certains des meilleurs universitaires français, parmi lesquels Gil Delannoi, Chantal Delsol et Philippe Raynaud, se rassemblaient dans un colloque consacré à son œuvre, dont les actes seront publiés en 2010 chez Berg international. Son œuvre scientifique y était explorée très largement.

    Mais ce sont les événements récents qui nous obligent à redécouvrir une philosophie politique particulièrement utile pour comprendre notre époque. L'intérêt académique que Freund pouvait susciter se transforme en intérêt existentiel, dans une époque marquée par le terrorisme islamiste et le sentiment de plus en plus intime qu'ont les pays occidentaux d'être entraînés dans la spirale régressive de la décadence et de l'impuissance historique. Freund, qui était clairement de sensibilité conservatrice, est un penseur du conflit et de son caractère insurmontable dans les affaires humaines.

    Freund ne croyait pas que l'humanité transcenderait un jour la guerre même si d'une époque à l'autre, elle se métamorphosait. Le conflit, selon lui, était constitutif de la pluralité humaine.

    Dans son plus récent ouvrage, Malaise dans la démocratie (Stock, 2016), et dès les premières pages, Jean-Pierre Le Goff nous rappelle ainsi, en se référant directement à Freund, que quoi qu'en pensent les pacifistes qui s'imaginent qu'on peut neutraliser l'inimitié par l'amour et la fraternité, si l'ennemi décide de nous faire la guerre, nous serons en guerre de facto. Selon la formule forte de Freund, « c'est l'ennemi qui vous désigne ». C'est aussi en se référant au concept d'ennemi chez Freund qu'Alain Finkielkraut se référait ouvertement à sa pensée dans le numéro de février de La Nef.

    En d'autres mots, Freund ne croyait pas que l'humanité transcenderait un jour la guerre même si d'une époque à l'autre, elle se métamorphosait. Le conflit, selon lui, était constitutif de la pluralité humaine. Et contre le progressisme qui s'imagine pouvoir dissoudre la pluralité humaine dans une forme d'universalisme juridique ou économique et le conflit politique dans le dialogue et l'ouverture à l'autre, Freund rappelait que la guerre était un fait politique insurmontable et que l'accepter ne voulait pas dire pour autant la désirer. C'était une philosophie politique tragique. Mais une philosophie politique sérieuse peut-elle ne pas l'être ?

    La scène commence à être connue et Alain Finkielkraut l'évoquait justement dans son entretien de La Nef. Freund l'a racontée dans un beau texte consacré à son directeur de thèse, Raymond Aron. Au moment de sa soutenance de thèse, Freund voit son ancien directeur, Jean Hyppolite, s'opposer à sa vision tragique du politique, en confessant son espoir de voir un jour l'humanité se réconcilier. Le politique, un jour, ne serait plus une affaire de vie et de mort. La guerre serait un moment de l'histoire humaine mais un jour, elle aurait un terme. L'humanité était appelée, tôt ou tard, à la réconciliation finale. Le sens de l'histoire en voudrait ainsi.

    Freund répondra qu'il n'en croyait rien et que si l'ennemi vous désigne, vous le serez malgré vos plus grandes déclarations d'amitié. Dans une ultime protestation, Hyppolite dira qu'il ne lui reste plus qu'à se réfugier dans son jardin. Freund aura pourtant le dernier mot : si l'ennemi le veut vraiment, il ira chercher Jean Hyppolite dans son jardin. Jean Hyppolite répondra terriblement : « dans ce cas, il ne me reste plus qu'à me suicider ». Il préférait s'anéantir par fidélité à ses principes plutôt que vivre dans le monde réel, qui exige justement qu'on compose avec lui, en acceptant qu'il ne se laissera jamais absorber par un fantasme irénique.

    Un pays incapable de nommer ses ennemis, et qui retourne contre lui la violence qu'on lui inflige, se condamne à une inévitable décadence.

    La chose est particulièrement éclairante devant l'islamisme qui vient aujourd'hui tuer les Occidentaux dans leurs jardins. Les élites occidentales, avec une obstination suicidaire, s'entêtent à ne pas nommer l'ennemi. Devant des attentats comme ceux de Bruxelles ou de Paris, elles préfèrent s'imaginer une lutte philosophique entre la démocratie et le terrorisme, entre la société ouverte et le fanatisme, entre la civilisation et la barbarie. On oublie pourtant que le terrorisme n'est qu'une arme et qu'on n'est jamais fanatique qu'à partir d'une religion ou idéologie particulière. Ce n'est pas le terrorisme générique qui frappe les villes européennes en leur cœur.

    On peut voir là l'étrange manie des Occidentaux de traduire toutes les réalités sociales et politiques dans une forme d'universalisme radical qui les rend incapables de penser la pluralité humaine et les conflits qu'elle peut engendrer. En se délivrant de l'universalisme radical qui culmine dans la logique des droits de l'homme, les Occidentaux auraient l'impression de commettre un scandale philosophique. La promesse la plus intime de la modernité n'est-elle pas celle de l'avènement du citoyen du monde ? Celui qui confessera douter de cette parousie droit-de-l'hommiste sera accusé de complaisance réactionnaire. Ce sera le cas de Freund.

    Un pays incapable de nommer ses ennemis, et qui retourne contre lui la violence qu'on lui inflige, se condamne à une inévitable décadence. C'est ce portrait que donnent les nations européennes lorsqu'elles s'imaginent toujours que l'islamisme trouve sa source dans l'islamophobie et l'exclusion sociale. On n'imagine pas les nations occidentales s'entêter durablement à refuser de particulariser l'ennemi et à ne pas entendre les raisons que donnent les islamistes lorsqu'ils mitraillent Paris ou se font exploser à Bruxelles. À moins qu'elles n'aient justement le réflexe de Jean Hyppolite et préfèrent se laisser mourir plutôt que renoncer à leurs fantasmes ?

    Dans La fin de la renaissance, un essai paru en 1980, Freund commentait avec dépit le mauvais sort de la civilisation européenne: « Il y a, malgré une énergie apparente, comme un affadissement de la volonté des populations de l'Europe. Cet amollissement se manifeste dans les domaines les plus divers, par exemple la facilité avec laquelle les Européens acceptent de se laisser culpabiliser, ou bien l'abandon à une jouissance immédiate et capricieuse, […] ou encore les justifications d'une violence terroriste, quand certains intellectuels ne l'approuvent pas directement. Les Européens seraient-ils même encore capables de mener une guerre » ?

    On peut voir dans cette dévitalisation le symptôme d'une perte d'identité, comme le suggérait Freund dans Politique et impolitique. «Quels que soient les groupements et la civilisation, quelles que soient les générations et les circonstances, la perte du sentiment d'identité collective est génératrice et amplificatrice de détresse et d'angoisse. Elle est annonciatrice d'une vie indigente et appauvrie et, à la longue, d'une dévitalisation, éventuellement, de la mort d'un peuple ou d'une civilisation. Mais il arrive heureusement que l'identité collective se réfugie aussi dans un sommeil plus ou moins long avec un réveil brutal si, durant ce temps, elle a été trop asservie ».

    Le retour à Freund est salutaire pour quiconque veut se délivrer de l'illusion progressiste de la paix perpétuelle et de l'humanité réconciliée. À travers sa méditation sur la violence et la guerre, sur la décadence et l'impuissance politique, sur la pluralité humaine et le rôle vital des identités historiques, Freund permet de jeter un nouveau regard sur l'époque et plus encore, sur les fondements du politique, ceux qu'on ne peut oublier sans se condamner à ne rien comprendre au monde dans lequel nous vivons. Si l'œuvre de Freund trouve aujourd'hui à renaître, c'est qu'elle nous pousse à renouer avec le réel. 

    FigaroVox

    Mathieu Bock-Côté                       

    Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie et chargé de cours aux HEC à Montréal. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (VLB éditeur, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille: mémoire, identité et multiculturalisme dans le Québec post-référendaire (Boréal, 2007). Mathieu Bock-Côté est aussi chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada.

  • Loisirs • Culture • Traditions ...

  • La dernière livraison de La nouvelle REVUE UNIVERSELLE Hiver 2016 ...

     

    Prenez connaissance du sommaire  détaillé de cette nouvelle et excellente livraison de la Revue universelle (ci-dessus). A lire absolument, à ne pas manquer.

    Commentaire relevé dans le blog :

    « Dans ce rayonnement d’intelligence qu’est le Revue Universelle, où l’on peut picorer au hasard, une mention spéciale à la contribution d’Antoine de Crémiers qui rend limpide une matière aussi hermétique et aride, que le finance internationale, et surtout la composition du tonneau de poudre sur lequel le monde est assis. Avec la même inconscience des dirigeants de la planète, que lorsqu’une banque comme UBS dut rayer 34 milliards USD de ses actifs en une semaine, en 2008. La mère de famille ne peut pas se permettre une telle erreur dans son budget. Ici les administrateurs de la banque avaient inscrit au fil des ans des actifs qui n’existaient pas … Un détail quoi … »

    Jean Louis FAURE, mercredi, 15 octobre 2014 

     

    Abonnements : La nouvelle revue universelle, 1 rue de Courcelles, 75008 PARIS - 4 numéros par an - Tarif :  m Normal, 1 an, 70 €  m Soutien, 1 an 100 €  m Normal, 2 ans, 130 € m Réduit, 1 an (étudiants, chômeurs) 40 €. Étranger et DOM-TOM : 77 €

     

    SOMMAIRE 

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  • Société • Il faut dire adieu à Simone de Beauvoir

     

    Adieu mademoiselle, la défaite des femmes est un brûlot antiféministe qui se place sous la tutelle protectrice de la compagne de Jean-Paul Sartre. Audacieux, mais non dénué de contradiction, selon Zemmour, qui oppose à Eugénie Bastié, sa propre analyse. Laquelle n'est pas non plus dénuée de justes arguments [Figarovox du 6.04]. Controverse ? Pourquoi pas ? Une raison de plus de lire au plus tôt le livre d'Eugénie Bastié !  LFAR 

     

    ZemmourOK - Copie.jpgTout a été déjà écrit. Chaque nouvelle génération doit affronter cette loi d'airain. Et il faut un mélange d'audace et de présomption pour ajouter quand même son propre texte sur la pile. Eugénie Bastié ne manque ni de l'une ni de l'autre. Cette jeune femme a donc choisi d'inscrire son nom sur la liste - déjà longue - des féministes critiques. La tâche est aisée : les femmes peuvent seules critiquer le féminisme - mais la voie est encombrée : de l'inconvénient d'être née à la fin du XXe siècle.

    Bastié rejette les Femen, la théorie du genre, Judith Butler et Éric Fassin, le mariage pour tous, la PMA, la GPA. Elle dénonce un « féminisme dévoyé » dont « l'horizon n'est plus l'égalité des droits, mais l'interchangeabilité des êtres », qui planifie la « déconstruction des identités » et pense « la différence comme une discrimination ». Cet ancien « garçon manqué » chante la joie d'être une « fille réussie ». Elle écrit ses plus belles pages pour repousser l'existence d'un « droit à l'avortement ». Elle s'inscrit dans la lignée des Élisabeth Badinter ou Sylviane Agacinski, auxquelles elle ajoute une pincée bienvenue de christianisme. Elle retrouve la pertinence de leurs analyses mais n'évite nullement l'écueil de leurs contradictions.

    Elle ouvre son livre sur un hommage appuyé à Simone de Beauvoir. Notre auteur fait allégeance à l'icône : « Le lecteur sera-t-il tenté de jeter le bébé féministe avec l'eau de ce néoféminisme dévoyé. Il aurait tort de céder à cette mauvaise tentation… Est-il encore possible, en 2016, de se dire féministe en Occident ? L'ambition du présent essai est de montrer pourquoi et comment on peut répondre par la positive à chacune de ces questions. »

    Sauf qu'elle n'y parvient pas. Elle fait avec le féminisme ce que les apôtres du « padamalgam » font avec l'islam, et ce que les compagnons de route du communisme ont fait avec le marxisme. Et c'est le même échec. Comme tout l'islam est dans le Coran, et tout le communisme dans Marx, tout le féminisme est dans Beauvoir, bon ou mauvais. Beauvoir est à Butler ce que Lénine fut à Staline, ou le Mahomet de La Mecque au Mahomet de Médine : un paravent rhétorique, un rideau de fumée, un pieux mensonge. Eugénie Bastié elle-même passe son temps à nous en fournir les preuves les plus accablantes. Tout le monde connaît le célèbre « On ne naît pas femme, on le devient » ; mais on évoque moins le « Je rêvais d'être ma propre cause et ma propre fin ». Et pourtant, ces deux phrases fondent la théorie du genre et autres queer theory de Judith Butler. Si on devient femme, comment ne pas le devenir ? Étape suivante, logique, irrécusable. Et déjà prévue par Beauvoir elle-même, qui avait bien compris que la spécificité féminine - celle dont tout découlait - était bien sûr la maternité : « son malheur, disait-elle en parlant de la femme, c'est d'avoir été biologiquement vouée à répéter la vie ». C'est pour cette raison qu'elle refusa d'avoir un enfant et n'a jamais caché son mépris pour « les pondeuses ».

    Tout le reste est aussi dans Beauvoir : l'alliance des féministes avec les mouvements antiracistes naît dans la fascination de la compagne de Sartre pour le FLN et les Noirs américains. Une fascination qui a amené ces héritières au déni de Cologne! C'est le mâle blanc hétérosexuel qui est leur ennemi commun. Leur cible à abattre. Qui fut aussi le fondement de l'autre alliance décisive, celle des années 1970, entre les mouvements féministes et homosexuels. Et qui finira de la même façon en piège intégral, comme s'en lamente notre auteur : « Objectivement, femmes et homosexuels n'ont pas les mêmes intérêts… En faisant de la maîtrise des corps le critère de la libération, il (le féminisme) a désigné le corps féminin comme terrain d'expérimentation et futur cobaye. » Mais qui a défilé en criant « mon corps m'appartient » ? Qui s'est battu pour le droit au divorce, considéré comme une liberté pour les femmes ? « Les femmes sont les premières victimes de la dislocation de la famille occidentale. Ce sont les pères qui fuient. Ce sont elles qui restent seules à éduquer les enfants. Le droit a comme un arrière-goût amer. » Un goût de répudiation.

    Un faux progrès qui se paye cher

    C'était écrit d'avance. Le féminisme est un libéralisme qui ramène la gauche à ses sources. Il exalte l'individu et le contrat, au détriment de la famille et de la nation. C'est un faux progrès qui se paye cher. Par les femmes et les hommes. N'en déplaise à notre auteur, c'est Houellebecq qui a raison : la conversion à l'islam a pour source première la volonté des jeunes hommes de retrouver une virilité et une domination ruinées par quarante ans de féminisme. Au contraire de ce que pense Eugénie Bastié, nous subissons une féminisation de la société, qui s'affirme dans ses valeurs les plus sacrées : pacifisme, principe de précaution, négociation, consultation, psychologisation, hiérarchie délégitimée. Et dans les comportements de ces hommes occidentaux qui refusent de se battre, assument leurs sentiments et laissent couler leurs larmes, et préfèrent allumer des bougies et « refuser la haine » plutôt que de venger leurs femmes ou leurs enfants massacrés par les djihadistes.

    2258380137.pngNotre auteur touche juste lorsqu'elle pointe: « Le féminisme est devenu le refuge du nouvel ordre moral » ; mais elle ignore qu'il en a toujours été ainsi. Elle vante la féministe à l'ancienne George Sand ; mais on lui rappellera ce qu'en disait Baudelaire : « La femme Sand est le Prudhomme de l'immoralité. Elle a toujours été moraliste. Seulement elle faisait autrefois de la contre-morale. » Elle compare les obsessions grammaticales des féministes à la « novlangue » dans 1984 d'Orwell ; mais les femmes savantes de Molière contrôlaient déjà le langage de ces malotrus de mâles. « J'entends le rire de Beauvoir, et c'est à lui que je dédie ces pages », nous avait-elle lancé en guise de défi au début de son livre. À la fin, malgré ses tentatives talentueuses et culottées, elle a perdu son pari ; et j'entends le rire de Molière, le rire de Baudelaire, le rire de Bossuet, et son fameux rire de Dieu qui rit de ceux qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes ; et c'est à eux que je dédie cet article. 

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    Adieu mademoiselle, la défaite des femmes, Eugénie Bastié, Éditions du Cerf, 220 p., 19 €.

    Eric Zemmour           

     

  • Culture • L’excellence à la française a 250 ans

     

    Par Camille Pascal

    Camille Pascal fait partie de ces agrégés sachant écrire qui participent éminemment de cette excellence à la française menacée par les équarrisseurs égalitaristes aujourd'hui encore dominants. Le concours de l’agrégation, inauguré en 1766, fête cette année son 250e anniversaire. Camille Pascal rappelle ici opportunément qu'il n'est donc pas une création de la république mais de la monarchie française [Valeurs actuelles, 1.04].  LFAR

     

    Camille%20Pascal_22222222222222.pngDeux siècles et demi après son inauguration, l’agrégation est plus que jamais dans la ligne de mire d’une administration égalitariste.

    Le concours de l’agrégation, inauguré en 1766, fête cette année son 250e anniversaire. Ceux qui pensaient que cette clé de voûte de notre méritocratie républicaine était une invention de Jules Ferry ou, à tout le moins, de Bonaparte, en seront pour leurs frais. L’agrégation est un héritage de l’Ancien Régime, finissant à une époque où l’esprit des Lumières inspirait au despotisme éclairé ses dernières réformes. L’expulsion des jésuites ayant laissé bien des collèges sans maîtres, il fallut les remplacer. L’idée de recruter des enseignants laïcs sur le modèle des mandarins chinois, soumis à un concours difficile, s’imposa. Cette « chinoiserie » à peu près contemporaine de la pagode de Chanteloup a, par la suite, survécu à tous les régimes au point de s’identifier à une République qu’elle a pourtant précédée. C’est ainsi que la figure de « l’agrégé sachant écrire » attachée à Jaurès ou à Pompidou est devenue une sorte de mythe de la vie politique française qui permet, de temps à autre, à un jeune agrégé d’échapper à sa classe pour partir à la conquête du pouvoir et de ses cimes plus ou moins enivrantes.

    Ces carrières aussi rares que fulgurantes masquent une réalité beaucoup moins légendaire. Si l’agrégation reste l’un des concours les plus exigeants au monde, elle est aujourd’hui la victime de l’égalitarisme absurde qui règne depuis bientôt un demi-siècle sur notre éducation nationale.

    Un agrégé de l’université — entendez par là un agrégé reçu au concours externe —, après avoir été soumis à une préparation intensive pendant une période qui peut compter plusieurs années, a non seulement démontré qu’il pouvait être un véritable spécialiste sur les diverses questions inscrites à son programme mais aussi un généraliste capable de faire la démonstration d’une profonde culture. En effet, et sans vouloir offenser quiconque, la leçon « hors programme » qui attend un « agrégatif » d’histoire ou de lettres classiques est à l’épreuve dit de « culture générale » de certains concours administratifs ce qu’une leçon inaugurale du Collège de France est au Jeu des mille francs.

    La France peut donc s’honorer d’avoir formé et de disposer d’un corps d’enseignants d’élite qui ne sont pas uniquement des « éducateurs » ou des « répétiteurs » mais de véritables intellectuels rompus à l’art de la synthèse autant que de l’analyse, et lestés d’une culture qui leur permet de transmettre le coeur de ce qui fait l’identité de notre civilisation et même de quelques autres !

    Pour prix de leurs capacités et de leurs mérites, les agrégés sont payés un salaire qui n’excédera jamais trois fois le Smic et, contrairement à leur statut, une grande partie d’entre eux reste cantonnée en collège par une administration qui se méfie d’eux. La vieille lune communiste qui rêvait d’un seul corps enseignant depuis le primaire jusqu’au lycée a la vie dure.

    À l’heure où la question de la transmission est au coeur du débat public, la France dispose d’une force qu’elle a décidé de sous-employer quand elle ne projette pas de la faire disparaître. Car ne doutons pas qu’après le latin et le grec les agrégés qui enseignent ces matières “bourgeoises” seront les prochains à se trouver inscrits sur la liste des équarrisseurs de l’excellence. 

     Camille Pascal  

  • Loisirs • Culture • Traditions ...

  • Sport & Société • Football : PSG-Qatar vs City-Abou Dabi

     

    Non au match du déracinement, vive Leicester ! C'est du moins ce qu'écrit notre confrère et blogger David Desgouilles, avant même que la compétition en question ne se joue. Les sportifs seront-ils d'accord ? En tout cas, sa dénonciation de l'océan de fric qui recouvre le sport mondialisé d'aujourd'hui, comme du déracinement corrélatif  qui l'envahit, nous l'approuvons. Evidemment.  LFAR  

    6 Avril 2016

    sans-titre.pngCe soir, l’amoureux de football que je suis ne regardera pas le match opposant Paris à Manchester City en quart de finale de la Ligue des champions. Il se trouve que la résiliation de mon abonnement à Canal + ne m’a pas incité à basculer vers la chaîne qatarie BeInSport qui retransmettra le match. Il arrive un moment où il faut mettre ses actes en conformité avec ses convictions. Le football mondialisé de mercenaires que j’exècre repose essentiellement sur les droits télés, et donc sur les abonnements aux chaînes à péage.

    Ce match est justement emblématique de ce football-là. Le Paris SG appartient depuis quelques années au fond souverain de l’Etat qatari ; Manchester City l’avait précédé en devenant la propriété d’un dignitaire richissime d’Abou Dabi. Ces deux clubs, qui n’ont jamais gagné cette compétition, dépensent des sommes folles depuis l’arrivée de leurs propriétaires actuels afin de rattraper les autres géants européens, Bayern de Munich, Barcelone et Real Madrid. Certes, Abou Dabi a été bien plus dépensier que le Qatar, mais au match du déracinement, c’est bien le PSG qui a déjà gagné le match. Son adversaire joue la continuité avec son histoire ancienne alors que le club français préfère faire du passé table rase ; City souhaite miser sur la formation et aligne davantage de joueurs anglais que Paris de joueurs français ; le club britannique maintient un lien avec ses supporteurs alors que le PSG les remplace petit à petit par des spectateurs friqués. Bref, si on devait avoir une préférence entre ces deux clubs mondialisés, elle irait vers celui de la perfide Albion, ce à quoi il est impossible de me résoudre, aussi je préfère ignorer le match.

     

    Puisque nous en venons au football du pays de Sa Gracieuse Majesté, terminons sur une note d’espoir. De l’autre côté du Channel, c’est actuellement Leicester City, un club au budget lilliputien par rapport aux géants de la Premier League, qui domine le championnat le plus réputé et le plus dépensier du monde. Emmené par le jeune français N’Golo Kanté qui a ébloui le match Pays-Bas-France de son talent, ce petit poucet a aujourd’hui de bonnes chances de remporter le titre. Un peu d’air frais, enfin, dans cet océan de fric. 

    David Desgouilles

  • Livres • Réarmer la France

     

    par Nicolas Julhiet

     

    Rioufol-385x600.jpgIvan Rioufol, plume bien connue des colonnes du Figaro, revient avec un nouvel essai après De l’urgence d’être réactionnaire en 2012. Le titre, La guerre civile qui vient, est aussi provocateur que le précédent. Là encore, pour l’auteur, il y a urgence : la France – comme l’Europe – est face à un péril comme elle n’en a plus connu depuis longtemps : celui de l’islam radical, le « totalitarisme du XXIe siècle ». Les récents attentats ayant rythmé l’actualité, en France, depuis l’affaire Merah en 2012 jusqu’à ceux de novembre 2015, n’en sont, pourtant, que la sanglante partie émergée.

    Toute la face immergée est sondée et analysée par l’essayiste. Il faut voir la longue série des causes : l’abandon de toute politique sérieuse d’immigration au niveau national, qui devrait passer par un contrôle renforcé des arrivants ; la démission des élites face au péril islamiste : « la classe politique, seule ne fera rien. Elle ne croit plus en la France », prévient Ivan Rioufol ; la percée des islamistes radicaux et des islamologues complaisants, partout en Europe ; le travail de désinformation réalisé par les progressistes aveuglés par leur idéologie.

    Ce sont des dizaines d’exemples que l’auteur utilise pour appuyer sa démonstration ; les prodromes sont déjà là de cette « guerre civile qui vient ». Tous les ferments sont, pour lui, réunis. Est-ce, dans ces conditions, un énième essai apocalyptique, destiné à prendre la poussière comme tant d’autres ?

    Eh bien, non ! Ivan Rioufol cherche à trouver des parades, à entretenir l’espoir que cette « guerre civile » peut être évitée, que l’heure appartient aux « insoumis », comme il les nomme, qui doivent se lever : « Le temps est venu pour eux de tenir tête aux démolisseurs de la nation, aux nouveaux conquérants et à leurs porteurs d’eau. » Mais le salut ne viendra, pour lui, ni de l’État, ni de la classe politique, encore moins d’un homme providentiel. « C’est à la société civile elle-même, forte de ses expériences, de ses expertises et de ses indignations » que revient cette lourde charge.

    Notre pays ne peut plus s’offrir le luxe du temps et du choix : « la France, blessée, meurtrie, est à un moment charnière de son destin », avertit Ivan Rioufol. Il invite donc les Français à se réarmer et à se préparer à l’affrontement qui pourrait survenir. Ce sursaut d’optimisme ne prétend pourtant pas échapper à la réalité. La guerre est déjà là et elle ne fait que commencer. 

    La guerre civile qui vient, d’Ivan Rioufol, éditions Pierre-Guillaume de Roux, 198p., 19 euros. 

  • Cinéma • Les Visiteurs 3 ou le vrai visage de la Terreur, vus par Jean-Christophe Buisson

     

    Jean-Christophe Buisson a vu Les Visiteurs 3 - La Révolution. Il estime que Jean-Marie Poiré et Christian Clavier ont pris le parti inédit et courageux de se saisir à bras-le-corps de cette page sombre de l'histoire de France. Sans complexe ni manichéisme [Figarovox - 7.04]. Jean-Christophe Buisson est homme de goût et de jugement. Il n'affiche pas grande inclination pour la période révolutionnaire. Pas plus que nous qui lirons son avis avec attention et ... sympathie.  LFAR 

     

    PHOace7ebf0-cac5-11e3-ae1d-fb39e4002cc5-300x200.jpgDepuis 1870 et l'instauration de la République en France, la Révolution a plutôt bonne presse. Le mot lui-même est synonyme universel de progrès, de nécessité, d'avancée, qu'il concerne un nouveau médicament, la mécanisation des outils agricoles ou les régimes alimentaires. Politiquement, il sonne comme une promesse d'avenir radieux : même le maréchal Pétain, instituant pourtant un régime aux accents résolument contre-révolutionnaires, se sentit obligé de reprendre le terme, invitant la France à se lancer dans une « Révolution nationale ». Et nous ne parlons pas d'Hitler et de sa « révolution nationale-socialiste »… Quant à l'événement lui-même, bien que Lénine, Trotski, Mao, Pol Pot et quelques autres dictateurs sanguinaires s'en fussent réclamés à corps et à cris (surtout ceux de leurs millions de victimes), il n'en garde pas moins, dans les livres d'Histoire comme dans la classe politique ou médiatique dominante, auréolé d'un prestige certain. 1789, c'est neuf, donc c'est bien.

    Bien sûr, une école de pensée contre-révolutionnaire qui va de Louis de Bonald à Charles Maurras s'est attelée, depuis deux siècles, à insister sur ses noirs aspects et ses fâcheuses conséquences. Mais la somme de ses réussites (droit de vote, Droits de l'Homme, abolition de l'esclavage, établissement d'une Constitution, création d'une Assemblée nationale, émancipation des Juifs, liberté de la presse, etc.) est jugée supérieure à celle de ses désagréments (guerre civile en Vendée, guerre contre la moitié de l'Europe, destruction des communautés traditionnelles, confiscation ou destruction des biens du clergé, loi Le Chapelier interdisant les regroupements professionnels et la grève, etc.). Cette vision globalement positive de la Révolution a conduit les cinéastes à la représenter, à de rares exceptions près (le sublime Le Duc et l'Anglaise, d'Eric Rohmer) de manière globalement positive. La Bastille vidée plutôt que les prisons remplies. La joie illuminant le visage des paysans libérés du servage plutôt que la grimace des propriétaires et des prêtres sur le point d'être raccourcis. Des foules qui réclament du pain plutôt que des têtes. La terrine plutôt que la Terreur.

    Dans Les Visiteurs - La Révolution, Jean-Marie Poiré et Christian Clavier, coauteurs du scénario, ont pris le parti inédit et courageux de se saisir à bras-le-corps de cette page sombre de l'histoire de France. Sans manichéisme, sans faux-fuyants, sans complexe. Leur film est un divertissement qui s'appuie sur une tragédie - c'est souvent une excellente recette (voir La grande vadrouille, La Vache et le prisonnier, Monsieur Batignole, etc.). Il débute en janvier 1793 et court jusqu'à la Grande Terreur. On y voit (furtivement mais réellement) des prêtres et des nobles de tous âges emprisonnés, puis conduits à l'échafaud comme des bêtes à l'abattoir. On y voit des hommes et des femmes dont la seule ambition révolutionnaire est de s'emparer du bien des anciens possédants pour en profiter à leur tour, quitte à substituer une inégalité sociale à une autre. On y voit des bourgeois confisquer le processus révolutionnaire pour chiper la place des aristocrates. On y voit un Robespierre glaçant, sinistre, terrifiant (remarquablement interprété par Nicolas Vaude) décider, en compagnie de ses amis du Comité de Salut public réunis autour d'un bon dîner au champagne, qui, demain, méritera la mort (« exterminer les ennemis », disait l'un de ses zélés membres, Couthon, annonçant par là quelques génocides futurs…). On y voit, en face, un preux chevalier du XIIe siècle pétri de valeurs qui ont pour noms courage, honneur, noblesse d'âme (Godefroy Amaury de Malefète, comte de Montmirail, d'Apremont et de Papincourt, dit le Hardi et alias Jean Reno) refuser la fatalité et préférer risquer sa vie que salir son nom en cédant, comme d'autres, à une mode égalitariste et progressiste qui est la négation de son éducation et de son statut de fidèle vassal de Louis VI le Gros. On le voit, à l'annonce de la mort de Louis XVI, se jeter à genoux et réciter le Pater Noster après avoir crié « Le Roi est mort, vive le Roi! ». Pui s'échapper de prison en assommant ses gardes pour gagner Paris afin de libérer Louis XVII de sa prison du Temple et « remettre le Dauphin sur le trône ». Puis s'étonner sincèrement de se retrouver face-à-face à un Noir habillé aux couleurs de la Révolution (« Les Sarrasins sont parmi nous ! »). Et enfin, écrasé par la puissance ennemie, décider de revenir dans son château pour le reprendre, les armes à la main, à ses nouveaux propriétaires car « si tu perds ta terre, tu perds ton âme ».

    Autant de scènes et de formules qui, bien sûr, font hurler les si prévisibles thuriféraires habituels de Robespierre et de la Terreur. Ils trouvent bien entendu ce film « réactionnaire ». Quitte à oublier la somme considérable de saynètes du film ridiculisant (donc dénonçant) aussi les familles d'Ancien Régime engoncés dans leurs rites et leurs mentalités parfois détestables. Mais pour ces gens-là, sur ce sujet-là, il ne saurait être question d'objectivité, de neutralité, d'honnêteté intellectuelle, d'équilibre, de mesure. Leurs slogans n'ont pas changé depuis deux siècles : pas de liberté pour les ennemis de la liberté, la vérité est révolutionnaire, etc. Montrer la Révolution sous son jour sanglant aussi, c'est forcément être suspect d'antirépublicanisme, d'antipatriotisme, de révisionnisme. Même s'il s'agit de cinéma. Même s'il s'agit de la réalité historique. Mais ils n'aiment pas la réalité. Ni celle d'hier ni celle d'aujourd'hui. C'est à cela qu'on les reconnaît. 

    Jean-Christophe Buisson

    Jean-Christophe Buisson est journaliste et écrivain. Il dirige les pages culture et art de vivre du Figaro Magazine. Il est notamment l'auteur d'Assassinés (Perrin, 2013).

  • Des flots ininterrompus

     

    par Jean-Baptiste d’Albaret

     

    A l’heure où nous bouclons ce numéro, les terroristes ont encore frappé. Trois jours après l’arrestation du dernier responsable en vie de la tuerie du 13 novembre à Paris, Salah Abdeslam, l’aéroport et le métro de Bruxelles ont été visés par des attaques meurtrières. C’est-à-dire que les terroristes, en dépit d’une présence policière massive, ont frappé, dans une sorte de riposte, le cœur du quartier européen de la capitale belge. Ainsi est l’ennemi islamiste : tapi au sein des populations, trouvant refuge dans des quartiers où il est protégé, il peut frapper n’importe où, n’importe quand, avec une rapidité d’exécution sans faille. L’idéologie dominante qui, il y a peu encore, osait parler d’« actes isolés », de « loups solitaires », voire même de simples « déséquilibrés », vole en éclat de façon dramatique. La vérité, c’est que le djihadisme, structuré et organisé, possède des réseaux et des relais partout en Europe. Nos élites dirigeantes ont laissé prospérer un communautarisme islamique en se voilant la face pour ne rien voir. Pour ces bonnes âmes, l’islam n’est-il pas la religion des réprouvés ? Leur responsabilité est aujourd’hui écrasante. Du renversement de Kadhafi, au moment même où le monde arabe implosait sous le coup de « printemps » prétendument « démocratiques » mais qui bénéficièrent d’abord aux islamistes de toutes obédiences, à la gestion de la crise syrienne, aboutissant au financement et à l’armement de groupes islamistes radicaux à seule fin de faire tomber Bachar al-Assad, le même humanitarisme manichéen a prévalu pour aboutir à ce désastre. Désastre consommé avec la décision abracadabrante et unilatérale d’Angela Merkel d’inviter tout le monde en Europe, provoquant un exode massif vers le Continent.

    Plus encore que la menace d’un Brexit, la crise migratoire pourrait porter le coup de grâce à une Europe qui ressemble de plus en plus à une citadelle assiégée, hérissée de barbelés. On le lira dans les pages de ce numéro de Politique magazine. Après 1,25 million de migrants en 2015, 250 000 sont déjà arrivés en Europe depuis le début de l’année, dont 150 000 en Grèce selon l’Organisation internationale pour les migrations. L’Allemagne d’Angela Merkel prévoit ainsi d’accueillir jusqu’à 3,6 millions de personnes d’ici à 2020 ! Loin de se tarir, le flot migratoire continue de jaillir sans interruption.

    Ce n’est pas l’accord signé le 18 mars entre Ankara et l’Union européenne qui résoudra le problème tant il paraît d’ores et déjà voué à l’échec. Pays en faillite et à l’état déficient, la Grèce n’a évidemment pas les moyens de fermer la « route de la mer Egée » ni de contrôler efficacement ses frontières. Organiser le renvoi systématique des arrivants vers la Turquie, même avec l’aide de l’Union européenne, est tout simplement pour elle une « tâche herculéenne », comme l’a dit, dans un trait d’humour involontaire, le président de la Commission, Jean-Claude Juncker. Et c’est Erdogan qui se frotte les mains ! Une fois de plus, le régime turc, passé maître dans l’art du double-jeu, roule les Européens dans la farine.   

    Au terme de cet accord – concocté en toute opacité, selon son habitude, par Angela Merkel –, la Turquie empoche 6,6 milliards d’euros, en principe destinés à financer l’accueil des quelques 2,7 millions de réfugiés qu’elle abrite déjà sur son sol. Mais elle repart aussi avec la promesse d’une libéralisation des visas pour ses compatriotes et d’une prochaine réouverture des négociations d’adhésion à l’Union européenne. Pendant ce temps, ses forces armées continuent de massacrer les Kurdes qui sont nos alliés dans la lutte contre l’état islamique. état islamique qui vient de revendiquer les attentats de Bruxelles. Comprenne qui pourra… 

    Rédacteur en chef de Politique magazine

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    Avril 2016 - Editorial

  • « La bien-pensance ou l'aveuglement démocratique » vus par Les Echos

    « Combien d'attentats, combien de tragédies faudra-t-il encore avant que l'on ouvre les yeux ? » C'est la question que pose le philosophe dans le livre « Contre la bienveillance ». - Photo Shutterstock
     

    Les Echos, où règne naturellement l'idéologie libérale, ont publié le 1er avril, signé de son rédacteur-en-chef, Daniel Fortin, l'article inhabituel qu'on va lire. Il traite du dernier ouvrage d'Yves Michaud, Contre la bienveillance, où se trouvent vigoureusement remis en cause quelques uns des dogmes fondateurs de la doxa régnante. Nous ne les énumérons pas : on les retrouvera au fil de l'article. Certes, il ne s'agit pas  d'autre chose que de « revenir aux conditions strictes de l'appartenance républicaine », ou encore au « contrat social des Lumières », mais on verra comment, en matière de diplomatie, de lutte contre l'islamisme, de dénonciation des bons sentiments, y compris droits-de-l'hommistes, le philosophe et son commentateur brisent les tabous et finissent par pointer, à travers nos élites défaillantes, droite et gauche confondues, la perversion de nos démocraties. Daniel Fortin explique ainsi la démarche du philosophe : « A sa manière, il est le produit d'une autre radicalisation en marche. Celle de la sphère intellectuelle française. » De cette évolution de la sphère intellectuelle française, nous traitons, ici, depuis de longs mois. A travers de fort nombreux ouvrages, articles, ou déclarations de toutes sortes. Les lecteurs de L'Avenir de l'intelligence reconnaîtront que se met ainsi en place l'une des conditions essentielles de toute éventuelle renaissance française. Acceptons-en l'augure.  Lafautearousseau.   

     

    h15_logo_echoshome.jpgPour le philosophe Yves Michaud, notre modèle démocratique, pétri d'une vision morale du monde, n'a plus les moyens d'affronter les menaces actuelles. 

     

    Imaginons un instant l'accueil que l'on aurait réservé à ce livre il y a seulement quelques mois. Représentons-nous l'effet qu'auraient produit des phrases comme : « L'islam ne pourra être accepté sans réserve que le jour où il reconnaîtra explicitement et inconditionnellement démocratie, pluralisme, liberté d'expression… » ; ou encore : « Le fait du fondamentalisme nous force à prendre conscience que l'accès automatique, somnolent et passif à la communauté politique ne peut plus avoir cours et doit faire place à un serment civique… » Que n'aurait-on glosé alors sur des propos réactionnaires, stigmatisants, droitiers, indignes de notre démocratie ouverte et tolérante ? Aujourd'hui, rien de tout cela. Yves Michaud, l'auteur de ces phrases, peut désormais cogner à son aise sur notre naïveté « droits-de-l'hommiste », sur notre démocratie des « bons sentiments », sans que ça lui vaille le moindre procès en sorcellerie.

    A sa manière, il est le produit d'une autre radicalisation en marche. Celle de la sphère intellectuelle française face à la répétition de l'innommable sur notre sol ou chez nos proches voisins : « Charlie », Bataclan, Bruxelles, d'autres encore. Combien d'attentats, combien de tragédies faudra-t-il encore avant que l'on ouvre les yeux ? C'est la question que pose le philosophe dans le livre « Contre la bienveillance », à mettre entre les mains de tout candidat à la future élection présidentielle.

    Yves Michaud est l'un des fondateurs de l'Université de tous les savoirs en 1998. Plutôt de gauche tendance chevènementiste, même s'il juge désormais périmés les traditionnels clivages politiques. Sa conviction, dit-il, il l'a forgée bien avant la nouvelle vague terroriste qui a frappé notre pays. Mais celle-ci l'a plus que confortée. Selon Yves Michaud, notre modèle démocratique, imbibé d'une vision morale du monde, pétri de bienveillance, animé par l'émotion, n'a plus les moyens d'affronter les menaces d'aujourd'hui : la montée du fondamentalisme religieux, celle du populisme et le désordre des nations. « Nous avons affaire à une situation fondamentalement nouvelle, en complet basculement, qui rend caduques nos manières anciennes de penser. La crise d'une situation est toujours aussi une crise des concepts pour l'appréhender. »

    Nommer les choses

    Dans son collimateur, un Parti socialiste aseptisé, à court d'idées, bêtement bien-pensant, asséché par ses années de hollandisme sans vision. Pas de pitié non plus pour Bernard-Henri Lévy et Bernard Kouchner, responsables d'une vision trop « humanitaire » d'un monde où seuls les rapports de force doivent fonder les politiques. Requiem, aussi, pour une droite déboussolée par la montée du populisme d'extrême droite, qu'elle tente de trianguler en le suivant sur des terrains aussi spongieux que l' « identité nationale » chère à Nicolas Sarkozy alors à l'Elysée.

    Yves Michaud, lui, a pris le parti de mettre les mots sur les choses, de les nommer, quitte à choquer. Les attentats en France ? Arrêtons de parler de « loups solitaires », écrit-il. « L'islam sunnite, en attendant le moment où il deviendrait tolérant et s'ouvrirait à la critique, est aujourd'hui une religion obscurantiste, intolérante et antidémocratique. » Le populisme ? Le fruit de multiples fractures (jeunes/vieux, français de souche/immigrés, riches/pauvres, personnel à statut/travailleurs précaires, jeunes éduqués/jeunes délaissés) qu'on a laissé prospérer faute de vouloir regarder la réalité telle qu'elle est.

    La conséquence est double : le vote extrême progresse et, surtout, il touche toutes les catégories sociales selon les fractures auxquelles il répond. Ce qui rend d'autant plus datée une réponse « de gauche » ou « de droite » aux problèmes. Le chaos géopolitique ? Il creuse la tombe d'une politique étrangère romantique qui veut, par exemple, que la France soit la seule nation européenne à engager des troupes sur les théâtres militaires étrangers alors que nos voisins se contentent de missions humanitaires.

    A bien des égards, Yves Michaud flirte avec les lignes. A force d'en découdre avec notre aveuglement démocratique, à force de désigner les ennemis de notre société, à force de s'en prendre aux élites, on finit par s'interroger : n'est-il pas lui-même atteint par ce mal populiste dont il dresse le constat ? Et, au fond, où veut-il vraiment en venir ?

    L'auteur, heureusement, ne se contente pas d'un énième pamphlet sur la perversion de nos démocraties. Sa proposition est toute simple : il faut en revenir aux conditions strictes de l'appartenance républicaine, réaffirmer que l'état de citoyen confère des droits mais aussi des devoirs. Bref, ressusciter le contrat social des Lumières, qui n'était nullement un blanc-seing, mais un engagement autour de valeurs communes. Ce livre dérange, car il nous met en face d'une culpabilité que l'on commence seulement à exprimer. Il contient à coup sûr quelques ingrédients sur lesquels pourront être à nouveau réunies les conditions d'un vivre-ensemble, pour parler comme la gauche morale. 

    Daniel Fortin
  • Retour sur André Bercoff et « ma cabane au Panama...»

     

    Par Jean-Louis Faure

    Repris des commentaires [7.04] à propos de l'article d'André Bercoff, publié dans Lafautearousseau, hier, jeudi, 7 avril.

     

    Un peu de technique

    La masse de documents qui a été « pompée » des ordinateurs de Mossack Fonseca signe une opération demandant de très gros moyens informatiques. Si d’origine privée, nécessairement financée, mais plus probablement décidée par les Services d’un Etat, ou peut être les deux en collaboration. Autre signature, l’informatique de Mossack Fonseca est ultra sécurisée, il faut donc des moyens d’attaque très sophistiqués, sachant que la protection chez ces « avocats » a été installée par des entreprises étrangères …

    Un peu de géographie

    Quand on va se promener à Panama, on est dans une colonie américaine. Un côté très émouvant pour des Français : le cimetière en bordure du canal où reposent nos compatriotes qui ont laissé leur vie dans le projet irréalisable de monsieur de Lesseps (construire un canal à niveau des deux océans).

    Un peu de politique

    Quand on traite des affaires à Panama, on découvre très vite que la finance et le courant d’affaires sont entre les mains de la communauté de monsieur Soros …

    Un peu de bon sens

    La maison Mossack Fonseca est très connue de tous les services juridiques et financiers des grandes entreprises de par le monde, il n’y a donc aucun scoop. Contrairement aux vociférations organisées par l’immonde, ils offrent avant tout un service de domiciliation visant à masquer les opérateurs réels dans des négociations où ils ne veulent pas apparaître. La fuite fiscale est assez secondaire.

    Un peu d’histoire

    Rien d’illicite. Avec des adresses aux iles Tortola pour être encore plus étanche. Très utilisé par tous les Services spéciaux du monde, assurant une coupure nette entre un pays commanditaire et un coup tordu. Que faisait le trésorier de la campagne de Hollande, Jean Jacques AUGIER, aux iles Caïmans ?

    Des écrans off-shore furent la technique de voyous utilisée par le Crédit Lyonnais pour flouer Tapie dans la vente d’Adidas (voir un excellent résumé dans Wikipédia : Bernard Tapie charge le Crédit lyonnais de vendre Adidas ; la banque se livre à une expertise minutieuse de l'affaire, et réalise que sa valeur est certainement bien supérieure au prix minimum demandé par Bernard Tapie dans son mandat (plus de deux milliards de francs). L'état-major de la banque conçoit donc un plan : se porter acquéreur d'Adidas, au prix minimum demandé par Bernard Tapie, et revendre la société au prix fort et à son seul profit par la suite, via des sociétés offshore (iles Caïmans) pour préserver l’anonymat des opérations.

    Si l’enquête sur les affaires de Cahuzac n’avait pas été bâclée (le même couple Van Ruymbeke – Jean Veil qui a œuvré contre Kerviel), on aurait trouvé que l’ami Jérôme a corrompu toute l’administration de la Santé au profit des plus grands labos français.

    Nous rejoignons André Bercoff sur la consternante niaiserie au sommet de notre pauvre pays.

    Sur ce sujet comme sur tellement d’autres, la communauté journalistique est absolument au dessous de tout.

  • La Semaine de MAGISTRO, une tribune d'information civique et politique

     

    MAGISTRO Adossée à des fondamentaux politiques avérés, Magistro, une tribune critique de bon sens, raisonnée et libre, d'information civique et politique. 

    A tout un chacun

    Philippe BILGER Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole  La douleur et la peine sont perpétuelles !

    Du côté des élites

    Paul RIGNAC  Essayiste, écrivain  L’inversion des valeurs

    Jacques BICHOT Economiste, démographe, Professeur émérite à l'Université Lyon 3 - Ancien président de Familles de France   La loi n’est pas un bon instrument de gouvernement

    Ivan RIOUFOL  Journaliste politique  Les vrais responsables du malheur belge

    Maxime TANDONNET  Haut fonctionnaire, ancien conseiller pour les affaires intérieures et l’immigration au cabinet du Président de la République  Le déni d'un massacre antichrétien

    En France

    Roland HUREAUX  Essayiste   Hollande dans l'engrenage de la guerre

    Avec l'Europe

    Gérard-François DUMONT   Recteur, démographe, Professeur à la Sorbonne  Migrations, géopolitique

    Antoine ASSAF  Ecrivain philosophe franco-libanais  Quel avenir pour l'Europe avec l'islam radical ?

    De par le monde

    Jean SALVAN   Officier, général de corps d'armée (2S)  Terrorisme et finances

    Françoise THIBAUT Professur des universités  De Bogor à Auckland

    Jean-Luc BASLE    Economiste, ancien directeur de Citigroup New York    Stagnation séculaire et attentats islamistes

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  • Syrie : une lettre-témoignage du prince Jean de France

    Messe d'accueil au patriarcat grec-melkite catholique de Damas

     

    Le Prince Jean fait part dans la lettre ci-après de son récent voyage en Syrie où il vient de passer la semaine de Pâques. Le Duc de Vendôme, déjà engagé pour les chrétiens d’Orient, a accepté l’invitation de Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon, initiateur de ce voyage.

     

    david-niviere5.jpgLe chemin de Damas


    « Aidez nous à rester chez nous ». C'est par ces mots que les chrétiens de Syrie accueillent la délégation d'une quarantaine de personnes menée par monseigneur Rey en Syrie et dont je fais partie. Cinq jours de rencontres qui resteront profondément gravés dans mon âme.

    Cette semaine pascale nous mène de Damas à Homs en passant par un certain nombre de villages chrétiens le long de la frontière libanaise. C'est une zone stratégique plutôt stable que l'armée et ses affiliés, dont le Hezbollah, ont reprise au printemps 2014, après trois ans de combats qui ont laissé des traces, même si ici ou là subsistent quelques poches islamistes.

    Commencer par Damas où Saint Paul a été baptisé n'est pas anodin, la Syrie est le berceau des communautés chrétiennes. C'est le patriarche grec-melkite catholique Grégoire III Laham, un homme de 84 ans, mais portant la joie et la determination sur son visage, dans ses gestes et ses paroles, que nous rencontrons le premier jour. Tous les évêques et les prètres avec lesquels nous parlons ensuite sont taillés dans le même roc joyeux, pasteurs de leurs brebis dans les difficultés et les moments d'espérance.

    Yabrud, Qusayr, Rableh, Maaloula, Sednaya, des villages chrétiens - araméens, grecs, arméniens, syriaques, ... - catholiques ou orthodoxes, tous détruits, où les familles ont onnu le martyre. C'est le cas d'Antoine, à Maaloula, exécuté pour sa foi sur le perron de sa maison, devant sa femme Antoinette. Je lui ai promis que notre petite Antoinette prierait pour elle et sa famille. Elle a commencé hier.

    « Aidez nous à rester chez nous, pour repartir à nouveau, reconstruire nos lieux de vie. dans un pays stabilisé ». Après trois ans de guerre, depuis le printemps 2014, les familles se réinstallent. C'est d'abord le prêtre ou l'évêque qui revient et ensuite autour de lui les familles chrétiennes et les quelques familles musulmanes qui ont vécu en paix avec les chrétiens. Les églises sont reconstruites, les maisons et les écoles aussi. Que des beaux visages joyeux, pleins de vie et d'espérance, celle du Christ ressuscité.

    Si je peux terminer ainsi ce court témoignage, je souhaite remercier monseigneur Rey pour son invitation, SOS Chrétiens d'Orient pour l'organisation de ces rencontres et les personnes de la délégation pour les échanges que nous avons eus, en particulier toute cette jeunesse engagée, qui m'ont permis de vivre intensément cette semaine pascale auprès de nos frères syriens. 

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    Domaine Royal de Dreux, le 4 avril 2016

     

    Photos reprises du site Prince Jean de France

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    Le patriarche Grégoire III Laham et Monseigneur Rey

     

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    Village détruit de Qusayr

     

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    Maaloula, village où Antoine est mort pour sa foi chrétienne

     

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    Chantier de reconstruction de la cathédrale Notre Dame de la Paix à Homs

     

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    Une famille chrétienne qui s'est réinstallée à Qusayr

     

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    Le Duc de Vendôme dans une rue désertée de Homs

     

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    Vue de la Vallée des Chrétiens au pieds du Krak des Chevaliers

     

    PRINCE JEAN DE FRANCE