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  • Pour faire aimer la France…, par Phi­lippe SCHNEIDER.

    Face à l’islamisme, le « sépa­ra­tisme » comme dit le gou­ver­ne­ment, que faire ? A cette ques­tion, Xavier Lemoine, le maire de Mont­fer­meil, ville de la ban­lieue pari­sienne dont la popu­la­tion est en grande par­tie com­po­sée d’immigrés ou des­cen­dants d’immigrés, répond dans l’hebdomadaire « France Catho­lique » du 8 jan­vier 2021 :

    « On ne peut en vou­loir aux per­sonnes de ne pas nous res­pec­ter si on ne leur dit pas ce que la France a de plus beau. Il faut faire connaître, res­pec­ter et aimer la France. C’est ce que j’essaye de faire dans ma ville, en emme­nant par exemple des jeunes, dont cer­tains ont un casier judi­ciaire char­gé, au Puy-du-Fou. Au début, c’était un car, main­te­nant il y en a deux ! Mal­gré leur pro­fil, il n’y a eu aucun pro­blème, car ils étaient en face de la gran­deur de la France. » C’est le bon sens même mais le pou­voir ne veut pas que les Fran­çais aiment la France.

    Dans le même sens, Mgr le comte de Paris a effec­tué des visites com­men­tées de la basi­lique cathé­drale de Saint Denis et du châ­teau de Dreux avec des enfants défa­vo­ri­sés en par­ti­cu­lier venant des ban­lieues pari­siennes en particulier. 

    Nous avons aujourd’hui en France, qu’on le veuille ou non, une part impor­tante de jeunes issus de l’immigration ou immi­grés deve­nues Fran­çais. Que soit arrê­tée aujourd’hui l’immigration – ce qui est sou­hai­table – ne résou­dra pas le pro­blème. Or, soit ils sont lais­sés dans leurs « ghet­tos », à la mer­ci de groupes eth­niques orga­ni­sés vou­lant en faire des agents de leurs pays d’origine ou d’organisations isla­mistes, soit nous fai­sons en sorte de les inté­grer dans notre Patrie. Dans le pre­mier cas, ils devien­dront, pour ceux qui ne le sont pas déjà, nos enne­mis avec tous les risques de conflits, de guerres futures à l’intérieur de nos fron­tières. C’est le scé­na­rio hélas le plus pré­vi­sible aujourd’hui si la poli­tique actuelle est pour­sui­vie. Et ce ne sont pas les poli­tiques de l’urbanisme – gouffres finan­ciers – qui y chan­ge­ront quelque chose ! Ces poli­tiques ne peuvent être utiles qu’à la condi­tion d’être accom­pa­gnées par une véri­table poli­tique d’assimilation de ces populations.

    Encore faut-il savoir à quoi les « assi­mi­ler » ? Le Prince Jean, comme Xavier Lemoine et, heu­reu­se­ment, beau­coup d’autres en France, le disent bien : si nous leur mon­trons la gran­deur de la France, de son his­toire, nous pou­vons en faire de vrais Fran­çais et, alors, tout espoir est per­mis. Mais com­ment le pou­voir actuel pour­rait-il faire aimer la France et son his­toire alors qu’il dénigre tous les jours le pas­sé de notre pays et qu’il veut qu’elle dis­pa­raisse dans un ensemble supra natio­nal diri­gé par des finan­ciers apa­trides ? Je n’en prends pour preuve que les décla­ra­tions du pré­sident Macron sur notre his­toire en Afrique, Asie ou même en Europe, où il montre d’ailleurs, qu’il ne la connaît pas. Et il y a sa poli­tique – la même que celle de ses pré­dé­ces­seurs – de sou­mis­sion à l’Union Euro­péenne, donc à l’Allemagne et aux Etats-Unis d’Amérique qui nous enlève toute pos­si­bi­li­té d’action. Il faut bien se rendre compte que nous avons aban­don­né pra­ti­que­ment tous les pou­voirs réga­liens : jus­tice inféo­dée aux lois « euro­péennes », affaires étran­gères gui­dées par Washing­ton ou Ber­lin (notre auto­no­mie est de plus en plus limi­tée), mon­naie à Franc­fort et même main­te­nant défense que l’on vou­drait « euro­péenne ». Heu­reu­se­ment, ce n’est pas encore fait mais, déjà, une bonne par­tie de notre indus­trie d’armement n’est plus natio­nale. Est-ce vou­lu ? L’exemple de Laté­coère – entre autres – semble le démontrer.

    Eh oui, pour faire aimer la France, il faut d’abord un pou­voir qui montre qu’il l’aime, qui donne l’exemple, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Sans cela, il n’y aura pas d’intégration pos­sible des jeunes issus de l’immigration. C’est aus­si le pro­blème des jeunes fran­çais dit « de souche » plus ou moins loin­taine, qui n’y sont plus atta­chés « grâce », sou­vent, à la pro­pa­gande anti fran­çaise que nos enfants subissent dans la plu­part des écoles. Ces éta­blis­se­ments sco­laires dépen­dant du gouvernement !

    Nous le voyons, si toutes les ini­tia­tives indi­vi­duelles sont utiles et néces­saires, il est indis­pen­sable d’avoir une volon­té gou­ver­ne­men­tale de faire aimer la France. Et la pre­mière chose est d’avoir des per­sonnes à la tête de l’Etat qui aiment la France, la défendent, veulent lui rendre son indé­pen­dance et sa gran­deur. Or, nous le consta­tons, hélas, tous les jours, ce n’est pas le cas des indi­vi­dus qui nous gou­vernent actuel­le­ment, bien au contraire.

    Nous consta­tons que c’est dans la nature de notre régime répu­bli­cain d’avoir des gou­ver­nants de plus en plus apa­trides et anti fran­çais, à de rares excep­tions près. Et cela s’aggrave au fur et à mesure que le temps passe et qu’ils ont de moins en moins de culture fran­çaise et his­to­rique. Au moins, les « hus­sards noirs » du siècle der­nier, s’ils étaient anti­clé­ri­caux, fai­saient aimer notre nation ! Nous sommes tom­bés bien bas depuis !

    Il en serait tout autre­ment si nous avions à la tête de l’Etat un homme, une famille, qui ne soit pas tri­bu­taire des lob­bies élec­to­raux et finan­ciers. Un homme repré­sen­tant his­to­ri­que­ment la Nation Fran­çaise. Cet homme, c’est notre Roi. Il sau­rait, lui, faire aimer la France non seule­ment aux Fran­çais dit « de souche », mais aus­si à tous les autres et en faire de bons Fran­çais, atta­chés à leur pays. Et l’action du Prince Jean montre bien qu’il ne s’agit pas de « paroles en l’air ». Bien sûr, il y aurait des récal­ci­trants qui conti­nue­raient à pré­fé­rer un autre pays. Eh bien, il fau­drait les satis­faire et les prier d’y aller… C’est ce que Léon Blum a su bien faire avant la deuxième guerre mon­diale avec ceux qui ne vou­laient pas s’assimiler à la France.

    Avec notre Roi et tous les Fran­çais, nous recons­trui­rons alors notre pays. Il faut tra­vailler à son instauration.

    LA LORRAINE ROYALISTE

    284 ave­nue de la Libération

    54000 – NANCY

    Direc­teur de la Publi­ca­tion : Phi­lippe SCHNEIDER

    Rédac­teur en Chef : Jean NEDISCHER

    Source : https://www.actionfrancaise.net/blog/

  • Sécurité globale : quelle politique pour notre pays ? Le défi migratoire (partie 2), par Philippe FRANCESCHI (Consultant

    OPINION. 2022 approche et les attentes et inquiétudes des Français en termes de sécurité sont immenses. Conseiller en sécurité, notre contributeur présente les mesures à prendre, selon lui, pour redresser la barre. Premier défi : l’immigration.

    6.jpegL’assassinat de Samuel Paty par un immigré musulman tchétchène qui s’est radicalisé sur notre territoire remet en lumière, une fois de plus, la problématique plus générale de notre politique d’immigration et de droit d’asile. Les nations européennes dont la France se sont petit à petit liées les mains au fil des traités et ont organisé et amplifié l’appel d’air immigrationniste que nous connaissons aujourd’hui.

    Ce cercle vicieux qui aboutit à affaiblir l’identité européenne et la lutte contre le terrorisme islamiste nécessite que les nations européennes reprennent leur liberté d’action. C’est possible, mais en remettant en question les textes européens qui nous condamnent à cette situation et, d’une manière générale, la supériorité de la législation européenne sur les lois nationales, en faisant prévaloir le principe de « subsidiarité descendante » sur la problématique migratoire. L’assentiment des Français souverains devra se faire par référendum.

    Immigration : reprenons notre liberté d’action

    Où en sommes-nous ? Le traité sur l’Union européenne, dans sa version consolidée après le traité de Lisbonne de 2009, dispose en son article 6 que l’Union adhère à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) qui vise aussi, au-delà de la convention de Genève de 1951, à protéger quiconque, et donc les « migrants », de la torture, des peines et traitements inhumains et à ne pas les expulser vers un pays où ils courent le risque d’être victime d’un tel traitement. Cette Convention proclame aussi le droit au respect de la vie privée et familiale, ce qui recouvre le regroupement familial (art. 8). D’autre part, le 13 décembre 2011, l’Union européenne est allée plus loin en adoptant la directive « qualification » 2011/95/UE, qui fait elle-même référence à la Convention de Genève et qui consacre une « protection subsidiaire » à côté de celle du statut de réfugié traditionnel. Celle-ci est attribuée à l’étranger qui ne remplit pas les conditions d’obtention du statut de réfugié et qui prouve qu’il est exposé, dans son pays, à la peine de mort, la torture, les traitements inhumains ou dégradants, mais aussi — et c’est là que le bât blesse — à une « menace grave et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d’une violence qui peut s’étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle et résultant d’une situation de conflit armé interne ou international ». C’est évidemment la porte ouverte à l’immigration massive musulmane incontrôlée, compte tenu du nombre de conflits dans le monde. On voit donc bien comment l’étau s’est petit à petit resserré et a fini par nous étrangler. Pour aggraver la situation, la loi française n° 2012-1560 du 31 décembre 2012 poussa le raisonnement jusqu’au bout en supprimant le délit de séjour irrégulier sur notre territoire suite à plusieurs arrêts de la Cour de Justice de l’Union européenne allant dans le sens de ce qui précède.

    La loi 2018 « pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie » n’est qu’une adaptation à cette situation et a vocation à essayer vainement de réduire les délais d’attente et davantage reconduire à la frontière. Autant de vœux régulièrement formulés depuis vingt ans par les gouvernements successifs. Ce n’est pas un cap de fermeté contre l’immigration massive comme annoncé par Emmanuel Macron. Pour couronner le tout, le Pacte de Marrakech de 2018, pacte mondial « pour des migrations sûres, ordonnées et régulières » vise in fine petit à petit, à imposer une coopération en matière de migrations internationales et vient encore obscurcir l’émergence de solutions alternatives. Alors, comment sortir de cet étau ?

    Nous avons besoin de remplacer ce système par un cercle vertueux c’est-à-dire par la révision des dispositions de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) en matière d’asile et de regroupement familial, et par une réécriture plus stricte de la notion de protection « subsidiaire » de la directive « qualification » 2011/95/UE. Sinon, il nous faudra constater cette impasse et sortir de ces traités par référendum, y compris celui de Schengen, afin de renouer avec le contrôle de nos frontières nationales. Il s’agit de valoriser le principe de subsidiarité descendante qui figure dans l’esprit de l’art 5 du TFUE. Au regard des principes évoqués, il apparaît parfaitement envisageable de proposer une révision de la répartition entre les compétences exclusives et celles partagées, au regard du niveau de souveraineté à retrouver, et de vérifier si le niveau d’implication de l’Union dans les compétences partagées est bien conforme au principe de proportionnalité. Par ailleurs, il faudra évidemment rétablir le délit de séjour irrégulier sur notre territoire.

    D’autres mesures devront être prises : Le code de la nationalité mérite d’être remis à plat avec des principes fondamentaux inscrits dans la Constitution, dont le maintien du droit du sol, mais sous conditions (acquisition de la nationalité française à 18 ans, sous réserve d’une prestation de serment portant allégeance aux valeurs de la République, le parjure générant d’office la perte de la nationalité française).

    Nous devons réviser les accords bilatéraux signés avec les pays d’origine des migrants, qui facilitent actuellement l’immigration « subie » et n’ont plus de justification aujourd’hui (Algérie, Maroc, Tunisie). Il faut instaurer la préférence nationale pour les aides sociales afin d’en finir avec les pompes aspirantes de nos droits sociaux. Les regroupements familiaux et les prestations sociales qui en découlent doivent être strictement limités à une épouse et aux enfants de cette dernière. Le non-respect de cette règle par des collectivités publiques doit être sanctionné pénalement. Les reconduites à la frontière doivent être systématisées dès le refus de résider sur le territoire français notifié, tandis que les États qui refusent de reconnaître leurs ressortissants doivent être pénalisés par des mesures économiques. La règle du maintien en France des mineurs isolés doit être abrogée. Les demandes de droit d’asile doivent être effectuées exclusivement dans nos ambassades. Afin de lutter — enfin — efficacement contre les réseaux de passeurs, trafiquants de chair humaine, aux ramifications nationales, mais surtout internationales, un office central de lutte contre l’immigration clandestine sera créé. Il sera rattaché à la Police aux frontières (PAF). Le trafic d’êtres humains sera sanctionné par 20 ans de réclusion. L’objectif est de lutter contre les passeurs en empêchant les départs par bateau de la Libye et les passages par les Balkans. Enfin, la double nationalité ne sera plus autorisée pour les fonctions de député, sénateur, ministre, Premier ministre et président de la République, en raison des conflits d’intérêts évidents.

    Redonner confiance aux forces de l’ordre tout en exigeant des résultats

    La lutte contre le sentiment d’insécurité a été une imposture cherchant à masquer la réalité de la situation. L’insécurité s’est accrue alors que les effectifs et moyens des forces de sécurité intérieure et des armées ont été réduits, affectant dramatiquement la protection et la défense du pays. Une loi de programmation pour la sécurité intérieure sera nécessaire à l’instar de celle pour la Justice. Il s’agit de rassurer les forces de l’ordre sur les moyens indispensables à leurs missions incluant des investissements clairement affichés et sanctuarisés, en particulier la reconstitution en cinq ans des effectifs des forces de sécurité supprimés par Nicolas Sarkozy (14 500 suppressions de poste) et qui n’ont pas été comblés ni par François Hollande ni par Emmanuel Macron, mais aussi par des mesures sociales comme par exemple une facilitation du logement des policiers dans leur zone de travail.

    Accroître l’empreinte territoriale des forces de l’ordre

    L’État doit reprendre toute sa place régalienne dans le domaine de la sécurité. En contrepartie de l’investissement de l’État dans la mission « sécurité », une exigence de résultats sera attendue de la part des forces de sécurité intérieure police et gendarmerie qui devront accroître leur « empreinte territoriale » : nombre de patrouilles de jour, de nuit, réellement déployées au quotidien, modalités d’intervention, réserves disponibles. Elles devront reprendre le chemin de la police de voie publique ou de proximité, mission ayant glissé petit à petit vers les polices municipales qui en assurent aujourd’hui la quasi-totalité dans nombre de villes. Cela devra se traduire par une nécessaire transformation profonde de la police nationale tant au niveau de la formation initiale et continue que du commandement, ainsi qu’une nécessaire adaptation de l’organisation du temps de travail aux besoins opérationnels, comme le réclame le rapport d’octobre 2020 de la Cour des comptes sur l'organisation du temps de travail et les heures supplémentaires dans la police nationale. Son fonctionnement sera amélioré, en particulier en plaçant sous l’autorité d’un seul responsable, dans chaque département, des services de police en charge de la sécurité publique, de la police judiciaire et de la police des frontières (quand il y a lieu). Un chef, une mission, des moyens, voilà un principe qui a fait ses preuves !

    Accroître l’empreinte sécuritaire

    Au niveau de la répartition de la compétence territoriale police/gendarmerie, le critère du seuil de densité démographique est dépassé. Le critère pertinent est devenu celui du seuil géographique de « fracture sécuritaire », c’est-à-dire lorsque l’équilibre est en danger. À cet égard, au critère du volume d’effectifs appliqué à une zone, il faut substituer celui de la performance. C’est d’ailleurs ce que propose également le rapport de la Cour des comptes de mai 2021 sur le bilan du rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’Intérieur, qui demande qu’un audit soit effectué sur les redéploiements de compétence effectués jusqu’en 2015. La Cour des comptes écrit, à juste titre, qu’« il pourrait être souhaitable de prendre en compte la doctrine d’emploi et le mode d’organisation de chaque force, de façon à attribuer la compétence sur des bassins de délinquance particuliers à celle qui apparaîtrait là mieux à même de répondre aux problèmes qui s’y présentent ». À la police comme à la gendarmerie de s’interroger sur leurs territoires à « fracture sécuritaire » comme les quartiers dits de reconquête républicaine et d’y concentrer des moyens humains issus de leur zone de responsabilité encore non fracturée.

    Un « continuum de sécurité » dont il faut dénoncer les effets pervers

    D’une manière générale, la tendance au désengagement de l’État de cette mission régalienne s’il en est qu’est la sécurité doit être endiguée. En effet, le besoin accru de sécurité est patent, mais au lieu de renforcer la police et la gendarmerie nationales, l’État transfert de plus en plus depuis une quarantaine d’années une partie de cette responsabilité aux polices municipales et semble aujourd’hui prêt, selon une espèce de glissement inéluctable, à y associer les sociétés privées de sécurité. La complémentarité doit rester la règle, mais pas le transfert de responsabilité par petites touches successives. Renforcer de plus en plus les polices municipales au lieu des forces de sécurité d’État aboutit à plus de sécurité pour les villes qui en ont les moyens (le cas de Nice est emblématique). Cela engendre donc une inégalité de sécurité entre les Français. Attention donc à la cohérence avec l’exigence de sécurité partout et pour tous. Il est donc nécessaire de dénoncer la forfaiture du gouvernement actuel qui conçoit le renforcement des polices municipales et de la sécurité privée dans le cadre du concept fumeux de Police de Sécurité du Quotidien (PSQ), sous couvert d’un « continuum de sécurité » dont il faut dénoncer les effets pervers.

     

    Philippe FRANCESCHI
    Consultant en sécurité
    Philippe Franceschi, ancien officier supérieur de gendarmerie et ex-responsable du projet "contre-terrorisme Sahel" de la Commission européenne, est consultant dans le domaine de la sécurité.

    Source : https://frontpopulaire.fr/

  • Jean-Frédéric Poisson : « La prolifération de l’islam ne se nourrit que de la faiblesse de notre propre conviction à déf

    Jean-Frédéric Poisson a été député et maire de Rambouillet dans les Yvelines. Un territoire qui, une fois de plus, a été endeuillé par l’égorgement d’une fonctionnaire de police dans les locaux du commissariat. Quelques mois avant, le même département avait connu l’assassinat du couple de policiers de Magnanville et l’égorgement de Samuel Paty.

    Qui sont les responsables ? Nos principes républicains sont-ils taillés pour faire rempart à la menace islamiste ? La fermeture des frontières suffirait-elle à protéger les Français ?

    Réponses de Jean-Frédéric Poisson au micro de Boulevard .

    Vendredi, la ville de Rambouillet se retrouvait endeuillée. Un clandestin tunisien tout juste régularisé a égorgé une fonctionnaire de police de 49 ans, mère de deux enfants, au sein du commissariat de Rambouillet. C’est la première fois qu’une telle chose se produit dans cette ville.

    C’est la première fois, et si la preuve devait être faite que cela peut maintenant frapper n’importe où n’importe quand et sur n’importe qui, on le savait déjà. On se considère toujours comme un peu à l’écart de ces coups du sort. Il faut avoir en tête que le département des Yvelines n’est pas, non plus, n’importe quel département. C’est le département qui a envoyé le plus grand nombre de en Irak et en Syrie. Dans ce département, il y a des foyers de de l’ conquérant très actifs, des agressions régulières contre les forces de l’ordre et des actes de répétitifs. Les Yvelines ne sont donc pas un département aussi calme et aussi tranquille que ce que nous pourrions croire. Ce département est très bigarré, dans lequel l’ conquérant est extrêmement présent. Les Yvelines ne sont pas épargnées par tout cela. On aurait préféré rester à l’écart de cette folie.

     

    Selon vous, qui est responsable de ce qui s’est passé, vendredi, à Rambouillet ?

    La très belle chanson de Bob Dylan « Qui a tué Davey Moore » est l’histoire d’un boxeur mort sur le ring. Son entraîneur, son adversaire et l’arbitre n’ont pas fait attention et il est mort. Il y a une forme de dilution de la responsabilité. Personne ne peut prétendre sérieusement qu’aucune mesure ne garantira jamais qu’un de cette nature puisse se reproduire. Personne ne peut empêcher quelqu’un de déterminé de donner la mort à quelqu’un d’autre. Pour autant, cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas traiter les causes. Je vois deux types de causes.

    La première, c’est la complaisance que nous continuons d’avoir à l’égard de l’islam conquérant, de l’islam tout court comme système politique et comme idéologie. Dans le cœur de l’islam sont inscrits des ferments de violence. Dans la politique de l’islam est inscrite la volonté de dominer tous les esprits et de soumettre, dans la loi islamique, tous les comportements individuels. Dans la diplomatie des États musulmans est inscrit le projet de faire dominer la charia en Europe.

    Le président Erdoğan n’est que le porte-voix d’un certain nombre de pays sunnites qui veulent faire régner la loi islamique sur l’Occident. Nous ignorons tout cela et n’avons pas pris la mesure de ce bras de fer de engagé par l’islam à notre encontre. Nous faisons comme si cette percussion n’existait pas, qu’elle était aimable et comme si elle pouvait être résolue, atténuée ou amortie par des accommodements raisonnables. On nous dit que ces fameux accommodements raisonnables pourraient améliorer la situation. Je n’y crois pas du tout.

    Autant je crois que le dialogue avec les musulmans est indispensable, autant je pense que la conciliation avec l’islam est impossible.

     

    Marine Le Pen face à Gérald Darmanin avait pris grand soin de dissocier l’islamisme et l’islam.

    Cela n’existe pas. Je suis curieux de savoir ce qu’il y a derrière ces termes. Il y a une différence entre l’islam et les musulmans. Il y a l’islam comme système et doctrine d’un côté et, de l’autre côté, le rapport qu’entretiennent les croyants à ce système et à cette doctrine. Politiquement, vous pouvez travailler sur la doctrine si vous engagez un combat culturel contre les idées. C’est cela qui n’existe pas, en France. Malgré les annonces et les coups de menton, la détermination sans faille, etc., on ne voit toujours pas de grands courants orientalistes renaître en France et toujours pas de soutien à ceux qui engagent une critique rationnelle de l’islam en tant que système.

    Par ailleurs, il y a ce qui est à faire contre les foyers de résonance de cet islam conquérant. La loi contre le séparatisme a essayé d’engager deux ou trois choses assez timides. Je ne suis pas certain qu’elles produiront des effets. C’est bien sur cette relation entre les musulmans et le système intellectuel qu’est l’islam qu’il faut travailler. La distinction islam/islamisme n’a aucun sens !

     

    Ce message porté par les gens du printemps républicain démontre que la République telle qu’elle est vue et interprétée aujourd’hui n’est peut-être pas armée pour lutter contre cet islamisme radical ?

    C’est un formidable signe de faiblesse. Quel plus grand signe de faiblesse que de vouloir faire taire celui qui ne pense pas comme vous ? Trouvez-vous que cette attitude est une attitude de force ?

    Pensez-vous que c’est l’attitude de quelqu’un qui est sûr de ses propres principes et qui est à l’aise avec sa propre doctrine ?

    Quelle est cette République, paraît-il, de la tolérance, de la liberté d’expression, de la liberté de croyance et de la liberté d’association ? Quelle est cette République qui, tout d’un coup, se met à interdire ?

    Plus on renonce à traiter cette question et plus on est obligé d’entrer sur un régime d’interdiction, de privation et de contrainte pour expliquer aux musulmans qu’ils ne pensent pas droit.

    On est en train de se rendre compte que ces fameuses valeurs de la République ne veulent rien dire. Pour beaucoup de Français, c’est du vent ! Les valeurs de la République répétées en particulier aux Français musulmans ne leur parlent pas. Je ne dis pas que cela ne parle à personne, je dis simplement que cela n’a aucune efficacité sur le plan de la capacité à refaire corps et à essayer de vivre les uns à côté des autres et, encore mieux, les uns avec les autres.

    Au fond, plus on est faible sur les finalités que l’on doit poursuivre, plus on doit devenir fort sur les procédures et les méthodes. Lorsque vous êtes forts sur les fins que vous poursuivez et lorsque vous savez les énoncer clairement, vous avez besoin de moins de procédures. Je peux comprendre l’agacement des gens qui voudraient voir interdire, une fois pour toutes, le voile dans l’espace public. Mais au nom de quoi ? Je me mets à la place de certains musulmans. Pourquoi des personnes pourraient porter des voiles sur la tête lorsque des processions sont faites dans la rue pour des fêtes religieuses chrétiennes, alors que les femmes musulmanes ne le peuvent pas ? On va me dire que c’est à cause de la civilisation.

    Si vous imaginez la variété des raisons pour lesquelles les femmes musulmanes se mettent à porter le voile, vous seriez surpris. Il n’y a pas qu’une logique de soumission. Il y a aussi une logique de protection, de pudeur et d’affirmation identitaire. C’est parce que nous avons renoncé à notre idéal de civilisation que les gens vont chercher ailleurs. Au fond, la prolifération de l’islam et sa capacité à s’installer en France durablement ne se nourrissent que de la faiblesse de notre propre conviction à défendre notre civilisation.

     

    D’un point de vue très pragmatique, que faudrait-il mettre en place ? Est-ce que la fermeture des frontières et les contrôles d’immigration sont efficaces ?

    Il faut faire tout cela en ayant conscience que ce sont des signaux politiques et que cela ne va rien régler du jour au lendemain. Comme je le disais tout à l’heure, le meurtrier de Rambouillet est en France depuis dix ans. Même si vous fermez les frontières maintenant, cela ne réglera rien pour ceux qui sont déjà rentrés. Mais c’est un signal politique et l’affirmation d’une volonté. Si, effectivement, vous cessez les naturalisations pendant un temps, vous envoyez un signal politique. Si vous décidez de faire une vraie bagarre aux clandestins, et peu importe que vous n’en expulsiez que 2 ou 3 %, cela envoie tout de même des signaux politiques. Cela ne traite pas la question des attentats terroristes, mais cela envoie des messages à ceux venant des pays étrangers qui pourraient considérer qu’ils peuvent être les bienvenus en France. Cela ne peut plus être le cas.

    L’attentat de vendredi est encore une manifestation qui fait suite aux dizaines d’agression, toutes les semaines, sur tout le territoire, contre les forces de police. Un de mes amis m’expliquait que, dans la métropole lyonnaise, les forces de l’ordre sont agressées presque tous les soirs. La seule réponse du gouvernement est de dire « on sera ferme ». Mais lorsqu’on est ferme comme au tribunal de Créteil, lorsque les criminels de Viry-Châtillon ont été blanchis pour certains d’entre eux par la , ce n’est pas formidable en termes d’efficacité. Au fond, c’est la réflexion sur les causes de cette violence et sur la désespérance qui atteint le peuple français et sur le fait que nous sommes en train de toucher la limite d’un système matérialiste et d’un système de consommation. Nous sommes en train de toucher la limite de la vision individualiste du corps . Tout cela n’engendre que de la violence. Pourquoi ? Parce qu’il n’y a pas de régulation spirituelle, et je ne parle même pas de religion. Nous avons renoncé à notre ferment de civilisation, donc nous n’avons plus de régulation spirituelle. Par conséquent, la violence s’installe.

    Il y a quelque chose de presque mécanique. C’est une constante historique que nous voyons à peu près partout. Qui s’apprête à traiter ce sujet politique ? Qui s’apprête à placer le débat sur ce bon niveau politique ? Les autres sont des enjeux de gestion. Je ne suis pas contre la fermeture des frontières, je l’approuve. Je suis d’accord pour que l’on arrête de naturaliser. Je ne peux pas être accusé de complaisance à l’égard de l’islam comme doctrine. Mais la racine de tout cela est le fait que nous ne savons plus qui nous sommes. Nous sommes diversement entendus. Peut-être que, cette fois-ci, nous le serons un peu plus et, malheureusement, la fois d’après, encore davantage.

     

    Jean-Frédéric Poisson

    Président de VIA | la voie du peuple, candidat à l'élection présidentielle de 2022
  • Celui qui n’aime pas l’État, n’aime pas la France, par Dr Charles Saint-Prot.

    Direc­teur géné­ral de l’Observatoire d’études géopolitiques

    L’annonce que le gou­ver­ne­ment libé­ra­lo-macro­niste a l’intention de sup­pri­mer le corps des pré­fets s’inscrit dans une logique de décons­truc­tion qui rejoint la sup­pres­sion de l’École natio­nal d’administration (créée par le géné­ral de Gaulle) ou la haine du régime à l’égard des maires et autres élus locaux.

    6.jpgIl est impor­tant de noter que, dans l’esprit du régime, il ne s’agit pas de sup­pri­mer les pré­fets mais leur corps, c’est-à-dire que des pré­fets pour­ront être nom­més, dans l’avenir, en fonc­tion du sexe, de la cou­leur de la peau ou de leur orien­ta­tion sexuelle… Et non pas, comme l’affirme le pre­mier ministre, pour amé­lio­rer la ges­tion des cadres de l’État « selon une logique fon­dée sur les par­cours et les com­pé­tences » mais bien selon le bon vou­loir du régime et sur des cri­tères com­mu­nau­ta­ristes ! Cela s’appelle la dis­cri­mi­na­tion posi­tive et le spoil sys­tem aux États-Unis, qui semblent être le modèle de réfé­rence de celui qui est aujourd’hui pré­sident de la république.

    Bien sûr, nous n’ignorons pas les dérives du sys­tème répu­bli­cain depuis quelques décen­nies, notam­ment le fait que les pré­fets – comme tous les agents publics civils ou mili­taires- soient nom­més en fonc­tion de leur éti­quette poli­tique ou de leur affi­lia­tion à telle ou telle « socié­té secrète » favo­ri­sant les magouilles les plus éhon­tées. Mais cela ne signi­fie pas qu’il fau­drait jeter le bébé avec l’eau du bain. Com­ment ne pas voir que le régime actuel a pour véri­table obses­sion d’abaisser l’État, donc la nation.

    Car, il faut bien consta­ter que ceux qui s’ingénient à démo­lir l’État ont pour seule ambi­tion le déclin de la France. La sou­ve­rai­ne­té de l’État ne garan­tit pas seule­ment les liber­tés des citoyens, mais plus encore elle per­met de pré­ser­ver l’indépendance natio­nale qui est la plus pré­cieuses des liber­tés. Depuis plu­sieurs siècles, l’État-nation est le socle de l’ordre inter­na­tio­nal. Comme l’a­vaient déjà conçu Hen­ry IV et Sul­ly avec leur concept de «  Grand Des­sein »  visant à mettre un terme au dés­équi­libre géo­po­li­tique euro­péen incar­né par la super­puis­sance des Habs­bourg[1],  l’État-nation sou­ve­rain devient la plus haute auto­ri­té du droit inter­na­tio­nal, en 1648, avec les trai­tés de West­pha­lie qui met­tront en pièce la notion d’empire avec l’abaissement du pou­voir des Habs­bourg et l’émiettement de l’empire ger­ma­nique car celui-ci ne pou­vait se conso­li­der que contre la France. Accom­plis­sant les objec­tifs de la poli­tique tra­di­tion­nelle de la monar­chie fran­çaise, la paix de West­pha­lie, qua­li­fiée par Bain­ville de « chef-d’œuvre poli­tique du XVIIIe siècle », fit en sorte que l’É­tat-nation sou­ve­rain devint la plus haute auto­ri­té de ce droit inter­na­tio­nal moderne qui vit le jour à cette occa­sion. Les trai­tés de West­pha­lie, réaf­fir­més par le Congrès de Vienne de 1815, fixèrent le cadre de la sou­ve­rai­ne­té abso­lue des États comme prin­cipe fon­da­men­tal du droit inter­na­tio­nal. L’É­tat-nation étant le socle de l’ordre juri­dique qui se met en place, les petits pays obtiennent les mêmes droits que les grands. À la place d’une rela­tion entre domi­nant et domi­né au sein d’empires arti­fi­ciels, la coopé­ra­tion entre des États égaux en droit devient la règle. Les trai­tés de West­pha­lie ont sur­tout recon­nu que l’empire uni­ver­sel était chi­mé­rique. Ils portent condam­na­tion de tout pro­jet supra­na­tio­nal dont la mor­ti­fère construc­tion euro­péenne qui est l’expression même du mythe d’une mon­dia­li­sa­tion ren­voyant à la thé­ma­tique libé­rale, laquelle repose sur le mythe du « doux com­merce » venant se sub­sti­tuer aux conflits guerriers. 

    En consé­quence, le pre­mier sou­ci d’un pro­jet véri­ta­ble­ment natio­nal doit consis­ter à res­tau­rer l’au­to­ri­té de l’É­tat natio­nal, lequel doit retrou­ver son rôle, à com­men­cer par un enga­ge­ment public réso­lu dans les domaines réga­liens. Michel Onfray qui vient de publier La nef des fous (col­lec­tion Bou­quins) notait récem­ment que les rodo­mon­tades du ministre de l’intérieur ne doivent pas nous trom­per, il y a un déli­te­ment de l’État et la France est de plus en plus mena­cée par la guerre civile. On a vu par exemple lors de la crise sani­taire que M. Macron et son équipe pré­fère l’idéologie à la réa­li­té, refu­sant de fer­mer les fron­tières au nom du dogme ultra­li­bé­ral du lais­ser-faire, lais­ser pas­ser. N’oublions pas que les mêmes rêvent d’une armée euro­péenne, la vieille ren­gaine de la CED, c’est-à-dire d’une Europe alle­mande qui ne rêve de réduire l’arsenal mili­taire fran­çais (sur­tout le nucléaire) qui est le seul atout de la France face à une Alle­magne de nou­veau sure d’elle, domi­na­trice et arrogante.

    En résu­mé, il parait dif­fi­cile de défendre la France et les Fran­çais quand on s’ingénie à détri­co­ter l’État et qu’on adhère à tous les mythes supra­na­tio­naux – dont le sinistre mythe euro­péiste – qui ont tous pour leit­mo­tiv de vou­loir faire le sau­ter le ver­rou de la nation. L’État fran­çais ne sau­rait se lais­ser subor­don­ner à un super-État dont la concep­tion ne peut naitre, écri­vait Charles Benoit, que « chez des peuples qui n’ont ni voi­sins, ni rivaux, ni enne­mis, ni his­toire… » Les prin­cipes de la sou­ve­rai­ne­té de l’É­tat et de l’indépendance de la nation ren­voient tout uni­ment à l’idée de liber­té, laquelle serait per­due, dit Renan, « si le monde n’avait qu’une loi et qu’un maître ». Cette règle, héri­tée de la civi­li­sa­tion grecque mais igno­rée du pou­voir macro­niste, est l’une des idées fon­da­men­tales de la pen­sée fran­çaise, laquelle a tou­jours oppo­sé la mesure, garante de la dimen­sion humaine, au gigan­tisme, ten­dant au totalitarisme.

    [1] Jacques Bain­ville, His­toire de France, ch. X, Paris, Nou­velle Librai­rie natio­nale, 1924, nom­breuses rééditions.

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

  • Syrie : « Pour peser, la France doit s'affranchir de l'alliance atlantique »

     

    par Mezri Haddad
     
    Alors que la Maison-Blanche a engagé contre la Syrie et les Russes une rhétorique particulièrement belliqueuse, Mezri Haddad implore la France de résister à la tentation de rentrer dans une guerre dont les enjeux ne semblent profiter qu'aux États-Unis. Cet article [Figarovox, 12.04] est écrit avec une certaine passion, dont on voit bien les raisons, à proportion des enjeux - en dernier ressort, la guerre ou la paix - pour le monde arabe comme pour la France et l'Europe. Sur l'essentiel, Mezri Haddad se livre ici à de justes analyses. Signalons de nouveau que Mezri Haddad n'est pas un inconnu des royalistes français que lui aussi connaît bien. Nous nous rappelons avoir organisé il y a quelques années, à Marseille, entre Mezri Haddad et Jacques Trémolet de Villers, un dîner-débat sur la montée de l'islamisme en France et ailleurs, qui fut d'un grand intérêt. Nous n'avons jamais négligé ces échanges, ces relations, ces débatset nous les poursuivons ici, dans ces colonnes...  Lafautearousseau.
     
     

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    « La première victime de la guerre, c'est la vérité », disait Kipling. Si toutes les guerres sont par définition même sales et destructrices, celle qui a été livrée à la Syrie, et que certains veulent relancer et porter à son paroxysme aujourd'hui, est particulièrement nauséabonde, injuste et absurde.

    Elle restera dans les annales des grands conflits mondiaux, avec néanmoins ce constat hallucinant : si la dernière guerre mondiale a opposé les démocraties aux totalitarismes, les valeurs humanistes à l'abjection nazie, celle dont on parle aujourd'hui a réuni dans une même coalition la barbarie et la civilisation, le monde dit libre aux forces les plus obscurantistes, l'atlantisme à l'islamisme, pour abattre le « régime de Bachar », comme ils disent. 

    Dans l'euphorie d'un « printemps arabe » qui était dès ses premiers balbutiements en Tunisie un hiver islamo-atlantiste, tout a été implacablement déployé pour déstabiliser un pays qui n‘était sans doute pas un modèle de démocratie, mais qui connaissait depuis juillet 2000 de profondes et graduelles réformes politiques, sociales et économiques, louables et intrinsèquement libérales, de l'aveu même de Nicolas Sarkozy, qui avait invité à l'époque (2008) le jeune Président syrien au défilé du 14 juillet.

    Tout a été déployé, y compris cette arme de guerre redoutable et particulièrement détestable, la désinformation, avec son cortège de mensonges éhontés, de manipulations des masses, de subversions des mots. Dans cette diabolisation systématique de l'ennemi et victimisation de l'ami, l'État syrien est ainsi devenu le « régime de Bachar », l'armée arabe syrienne régulière est devenue « milice d'Assad », les terroristes sont devenus les « rebelles » ou l'« armée syrienne libre », Bachar Al-Assad s'est transformé en « tyran sanguinaire qui massacre son peuple », et les hordes islamo-fascistes, d'Al-Qaïda jusqu'à Daech, se sont métamorphosées en « combattants de la liberté » voire même en « défenseurs des droits de l'homme »…

    Rien ne pouvait justifier un tel aveuglement. Ni l'idéal démocratique auquel aspire effectivement le peuple syrien. Ni la question des droits de l'homme que le monde libre a certainement le devoir moral de défendre partout où ses droits sont malmenés. Ni le contrat à durée indéterminée entre l'émirat du Qatar et la République sarkozienne ! Ni même les prétendues attaques chimiques syriennes, qui étaient à la diplomatie française et à ses relais médiatiques ce que les armes de destruction massive furent à la propagande anglo-américaine, lors de la croisade messianiste contre l'Irak dont on connaît la tragédie et le chaos depuis. Dans ses mémoires, l'honnête homme Colin Powell, avoue regretter jusqu'à la fin de sa vie son discours devant le Conseil de sécurité des Nations Unies. Un autre discours, devant la même instance onusienne, restera, lui, dans l'Histoire : celui de la France égale à elle-même et fidèle à ses valeurs universelles, magistralement lu par Dominique de Villepin. Son successeur à la tête de la diplomatie française, qui se félicitait du « bon boulot » que le front Al-Nosra faisait en Syrie, ne peut pas en dire autant.

    Faute d'une vision stratégique et géopolitique à la hauteur des enjeux cruciaux qui se dessinaient et d'une accélération de l'Histoire qui déroutait, la France sarko-hollandienne a eu une politique autiste, aveugle et inaudible qui ridiculisait le pays de De Gaulle auprès des instances onusiennes et même aux yeux de la puissance américaine qu'elle entendait servir avec encore plus de servitude que la couronne britannique ; une politique qui positionnait la France en ennemi formel d'une amie potentielle - la Russie -, en l'extirpant d'un Moyen-Orient où sa voix portait et son rôle pesait…jadis et naguère. Plus troublant encore, cette politique qui ne manquait pas de machiavélisme suscitait des doutes quant à la volonté réelle du gouvernement français de mener une guerre globale et sans pitié contre l'islamo-terrorisme, qu'il se fasse appeler Daech, Al-Qaïda ou Al-Nosra, rebaptisé pour la circonstance Fatah Al-Sham. À l'inverse de l'ancien chef de la diplomatie française pour lequel « Bachar el-Assad ne mérite pas d'être sur terre » et « Al Nosra fait du bon boulot », Vladimir Poutine a eu le mérite de la cohérence et de la constance : « on ira les buter jusque dans les chiottes », promettait-il en septembre 1999, lorsqu'il n'était encore que le premier ministre de Boris Eltsine. En France, les fichés S sont présupposés innocents jusqu'à leur passage à l'acte !

    Le jusqu'au-boutisme droit-de-l'hommiste, l'humanisme à géométrie variable, l'homélie de l'islamisme « modéré », le manichéisme simpliste qui réduit un conflit géostratégique majeur à un affrontement entre le bien (Al-Qaïda et ses métastases) et le mal (le régime de Bachar al-Assad et ses alliés) ne peuvent plus dissimuler l'alliance objective entre le monde dit libre et les hordes barbares de l'obscurantisme islamiste. Contrairement à la propagande politique, la tragédie qui se joue en Syrie n'oppose pas un « animal qui massacre son peuple » -comme vient de le tweeter le très diplomate Trump - à des gladiateurs de la liberté qui n'aspirent qu'à la démocratie, mais un État légal et même légitime, à des hordes sauvages et fanatisées, galvanisées par ceux-là mêmes qui avaient ordonné les plus ignobles actions terroristes dans les capitales européennes. Cette tragédie se joue entre un État reconnu par les Nations Unies, qui entend reconquérir jusqu'à la dernière parcelle de son territoire tombé sous le joug totalitaire et théocratique des « islamistes modérés », et des djihadistes sans scrupule qui se servaient des civils d'Alep, de Ghouta et aujourd'hui de Douma comme de boucliers humains. Pas plus qu'à Al-Ghouta hier, quel intérêt pour le « régime de Bachar » de bombarder aux armes chimiques une ville, Douma en l'occurrence, quasiment libérée des mains criminelles des islamo-fascistes ? Les crimes de guerre imputés à Bachar dans cette ville raisonnent comme le requiem bushéen « Saddam possède des armes de destruction massive » et comme son futur refrain sarkozien, « éviter un bain de sang à Benghazi » !

    Comme l'URSS pourtant stalinienne de 1945, la Russie est aujourd'hui du bon côté de l'Histoire. N'en déplaise aux petits stratèges londoniens de l'affaire Skripal et autres russophobes primaires figés dans les eaux glaciales de la guerre froide, Vladimir Poutine a fait les bons choix stratégiques et géopolitiques. Plus insupportable encore pour les avocassiers de la civilisation et les zélotes des droits de l'homme…islamiste, il a été le seul défenseur des valeurs occidentales…en Syrie.

    De cette guerre lâche de l'islamo-atlantisme contre la Syrie, la Russie est sortie victorieuse. Même si l'État et le peuple syriens souffriront encore du terrorisme résiduel, comme beaucoup d'autres pays, y compris la France, le pays de Bachar a gagné cette guerre non conventionnelle et par terroristes et mercenaires interposés qu'on lui a livrée huit années durant.

    Dans un communiqué officiel de la Maison blanche, c'est-à-dire un tweet matinal, le président américain a menacé la Russie de ses missiles « beaux, nouveaux et intelligents », et d'ajouter dans un second « communiqué » que « notre relation avec la Russie est pire aujourd'hui qu'elle ne l'a jamais été, y compris pendant la Guerre froide ». Pour une fois, Donald Trump a parfaitement raison : la situation actuelle est plus grave que la crise des missiles de Cuba en 1962. Et elle l'est d'autant plus que c'est précisément lui qui gouverne aujourd'hui les USA et non un Kennedy, qui a su trouver à l'époque un modus vivendi avec Khrouchtchev, évitant ainsi pour les deux pays et pour l'humanité le pire.

    Plutôt que de céder à l'hybris washingtonien, de s'aligner aveuglément sur l'hyperpuissance américaine, comme la qualifiait Hubert Védrine, de guerroyer avec un Donald Trump imprévisible, volatile et inconscient du chaos qu'il peut provoquer dans la poudrière moyen-orientale, voire d'un conflit mondial, la France doit au contraire répondre à sa vocation de puissance souveraine et modératrice. L'occasion se présente au pays de Macron de reconquérir sa position dans cette partie du monde, de s'affranchir d'une alliance atlantique aux ennemis anachroniques et à la doctrine désuète, de retrouver sa singularité gaullienne. L'avenir de la France au Proche-Orient et dans le monde en général peut se redéployer cette fois-ci avec un sens aigu du pragmatisme, du réalisme et des intérêts mutuels bien compris. Il ne s'agit donc ni d'idéalisme, ni de fraternité, ni d'éthique, ni d'humanisme, ni même de « politique arabe de la France ». Il s'agit essentiellement de realpolitik et d'intérêts réciproques euro-arabes d'une part et euro-russes d'autre part: primo le combat commun contre le terrorisme islamiste qui a saigné la Syrie pour ensuite, tel un boomerang, meurtrir la France ; secundo la relance de l'Europe voulue par les Européens sans la feuille de route américaine et avec un bon voisinage du puissant russe ; tertio la reconstruction d'un pays dévasté, non point par huit années de « guerre civile », mais par une guerre lâche et sans nom, livrée par des mercenaires recrutés des quatre coins du monde, ceux-là mêmes qui se sont retournés contre leurs alliés objectifs et conjoncturels, notamment à Londres, à Barcelone, à Paris, à Nice et récemment dans l'Aude.

    Avec la nouvelle géopolitique qui se trame au Proche-Orient et les périls terroristes qui menacent la région et l'ensemble du monde, la nouvelle élite dirigeante française a forcément un rôle à jouer. Parce que ses liens avec la Syrie sont historiques autant que ses relations avec la Russie, la France doit pouvoir encore jouer ce rôle conforme à ses valeurs universelles et compatibles avec ses intérêts nationaux. Et si, à l'instar de Theresa May, qui a besoin de la fuite Skripal pour colmater la brèche du Brexit, et de Donald Trump, qui a toutes ses raisons de provoquer un conflit mondial pour se débarrasser de la vodka russe qui empoisonne sa présidence - la supposée ingérence de Moscou dans les élections américaines -, Emmanuel Macron n'a nul besoin d'impliquer la France dans un conflit qui n'est pas le sien et dont on ne conjecture pas encore les effets planétaires.   

    Ancien ambassadeur de la Tunisie auprès de l'Unesco, Mezri Haddad est philosophe et président du Centre international de géopolitique et de prospective analytique (Cigpa). Il est l'auteur d'essais sur la réforme de l'islam..
     
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  • L’école à l’épreuve du Grand Remplacement, par Jean Messiha.

    Jean Messiha prononce un discours à Paris, 20 février 2021 © ISA HARSIN/SIPA Numéro de reportage : 01005342_000054

    Une tribune libre de Jean Messiha

    Le pronostic vital civilisationnel de la France est engagé, selon Jean Messiha. La campagne de promotion de la laïcité à l’école est révélatrice des menaces que fait peser une jeunesse immigrée volumineuse et non assimilée sur le pays.

    9.jpgLes atteintes inédites au principe de laïcité sont devenues telles dans notre société que le ministre de l’Éducation Nationale a dû se fendre d’une campagne très médiatique de promotion de ce principe cardinal dans nos écoles. Une initiative dont l’intensité ne m’inspire, je dois l’avouer, aucun souvenir. Ni en tant qu’élève, ni en tant qu’enseignant à mes heures, ni en tant que parent d’élèves. Ce pilier de la République semblait si solide ! Et pourtant…

    Jean Michel Blanquer n’a pas eu tort. Mais il a tout de même fait violemment réagir les médias de gauche, de nombreux syndicats ainsi qu’une foultitude de commentateurs. En cause, les personnages des huit panneaux publicitaires vantant la laïcité. 19 écoliers, collégiens et lycéens censés représenter la jeunesse scolaire française. 

    Le ministère a peut-être grossi un peu le trait. Mais pas tant que cela

    Des décennies pourtant qu’on reproche à l’« extrême-droite » de voir des « bronzés » partout. Mais cette fois, c’est la bien-pensance qui s’émeut d’en voir autant. Et de fait cette campagne, d’ailleurs plutôt réussie sur le plan photographique avec de jeunes hautement sympathiques, expose des visages et des prénoms majoritairement issus de ce qu’il est convenu d’appeler la diversité. Jugez-en.

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    D.R.

    Milhan, Aliyah, Kellijah, Neissa, Malia, Imran Ismaïl, Elyjah : huit jeunes sur 19 incarnent la composante maghrébo-musulmane de la population française. Edene et Tidiane représentent l’Afrique sub-saharienne, tandis que Ava et Alex illustrent le métissage.  Le jeune Lenny, lui, est à peine discernable. Axelle, quant à elle, porte les traits de la jeunesse indochinoise ou chinoise.

    Surreprésentation des populations « non-blanches »

    Quid des enfants du peuple historique de métropole, sachant que c’est à cette partie du pays que la campagne s’adresse puisque les Outre-Mer, très faiblement islamisés à l’exception de Mayotte, ne sont pas touchés par la contestation de ce ciment du vivre-ensemble ? Pour le dire crûment quid des « Blancs » ? De façon « visible » nous avons Eva, Erynn, Sacha, Paloma, Romane et Simon et peut-être Inès, soit sept sur 19. Clairement, et sans jeu de mots, moins de la moitié. Pourquoi cette composition, qui n’est évidemment pas le fruit du hasard tant la « com » publique et privée est aujourd’hui obsédée par la question de la « juste » représentativité ethnique ? 

    Les critiques du ministre y voient une surreprésentation des populations « non-blanches » car ce serait elles qui posent le plus de problèmes et à qui cette grande valeur républicaine pose le plus de problèmes. Un ami me disait à ce sujet : « tu sais quand on fait une campagne de vaccination contre la grippe on ne montre pas des jeunes en pleine forme en train de faire un footing, mais plutôt des personnes âgées ». Cette explication pourrait se tenir mais la question est plus complexe que cela. Se superposent deux réalités. La première est celle du lent et grand remplacement dans les établissements publics de la jeunesse du peuple européen des origines par la jeunesse de l’immigration arabo-afro-musulmane. Le ministère a peut-être grossi un peu le trait. Mais pas tant que cela.  

    La composition ethnique présentée dans cette campagne publicitaire est en dessous de la réalité dans de nombreux territoires où les jeunes blancs ne sont plus qu’une poignée par classe, soit parce que les parents ont fui ces zones soit, quand ils en ont les moyens, ils mettent leurs enfants dans le privé. C’est moins le cas dans les établissements publics des quartiers encore « corrects » ou « huppés » des centres-villes ou des rares banlieues « préservées ». Le prix au mètre carré agissant encore comme un rempart à l’invasion, on peut y mettre ses gosses à l’école, collège et lycée sans qu’ils ne risquent de se racailliser.  

    « Se racailliser » ? – Mais c’est horrible de parler comme ça ! », zinzinulera la mafia gaucho-macrono-progressiste. Bah, ce n’est effectivement pas le langage que cette mafia utilise dans ses dîners en ville pour expliquer ses propres stratégies d’évitement. Ses chantres parleront plus pudiquement de « problèmes de niveau et de discipline », etc. Ce n’est qu’après quelques verres qu’ils commencent à se lâcher… pour finir par avouer l’inavouable réalité : « Trop d’immigrés ! Et pas n’importe lesquels. Pas les enfants du maçon portugais, du restaurateur chinois, du pizzaiolo italien, etc. ». On se comprend à demi-mots chez « ces gens-là », comme disait Brel. 

    Ne parlez pas de mixité ethnique, dites “mixité sociale”!

    Mais vous allez être rattrapés par la patrouille chers amis évasionnistes de la diversité scolaire, que vous prônez pour les classes populaires blanches. Macron, qui s’en fout car il n’a pas de gosses, et Brigitte qui a enseigné toute sa vie dans l’enseignement privé catholique, veulent « plus de mixité sociale ». Lisez : « plus de mixité ethnique » dans les coins encore à peu près français. Et c’est Emmanuelle Wargon, ministre du Logement habitant une belle villa dans la très chic banlieue est-parisienne de Saint-Mandé, qui est à la manœuvre. Avec France-Stratégie, think-tank gouvernemental, elle traque les zones encore trop blanches afin que l’on y transfère le maximum de non-blancs via le logement social. Du coup, les établissements scolaires seront plus « mixtes ». Au fond, Macron vous met face à vos responsabilités. Vous voulez plus d’immigration en votant pour lui ? Eh bien mettez vos pratiques en cohérence avec votre vote et vivez pleinement le changement de peuple en allant vous installer dans un de ces nombreux territoires où le peuple a déjà changé ! 

    Passons à la deuxième réalité. La laïcité est effectivement menacée partout en France et pas seulement à l’école. L’explication est toujours la même : le grand remplacement dans sa composante principalement islamique, réalité que la campagne publicitaire de Jean-Michel Blanquer tait sciemment comme si la laïcité était seulement une affaire de couleur de peau. En effet, la République a accueilli les Arméniens (fervents chrétiens), les Italiens, les Polonais, les Portugais, les Espagnols, etc., autant d’immigrés qui venaient de pays profondément imprégnés de catholicisme ; la République a également accueilli les Juifs d’Afrique du Nord, souvent très croyants, et naturellement les Chrétiens d’Orient, eux aussi souvent assez dévots. À quel moment cette même République a-t-elle eu à défendre la laïcité face à ces immigrations-là ? Jamais ! C’est l’islam, religion anti-laïque par nature, qui se confronte à ce qui est pour elle une aberration. La preuve est qu’à part les ex-républiques soviétiques d’Asie Centrale soumises, comme la Russie blanche, à une vigoureuse épuration anti-religieuse, et une poignée d’ex-colonies françaises de populations musulmanes mais qui ont hérité de nos institutions, le monde musulman n’est pas laïc. Soit l’islam est religion d’État, soit il est reconnu officiellement comme religion majoritaire et dominante.

    Prenons même la Tunisie dont on nous a tant vanté la quasi-laïcité. Comme le décrit très bien un article du Point du 24 janvier 2014, c’est un fantasme. Cet article affirme que « La Constitution est écrite “Au nom de Dieu le clément, le miséricordieux”, le préambule exprime “l’attachement de notre peuple aux enseignements de l’islam” et l’article premier définit, comme dans la loi fondamentale de 1959, la Tunisie comme “un État libre, indépendant et souverain, l’islam est sa religion ».

    Revenons à notre France. Face à la laïcité, la communauté musulmane se divise en trois catégories. La première catégorie est constituée d’une petite minorité de musulmans de culture qui a pleinement adopté la neutralité religieuse et la défend ardemment. Nous en voyons régulièrement des exemples admirables et courageux sur nos plateaux télé. La deuxième catégorie regroupe une part importante de la Oumma française qui « vit avec » la laïcité, tout en pestant à bas bruit contre cette manifestation de la mécréance qu’elle dénonce à la maison devant les enfants. Et enfin, troisième catégorie, il y a cette minorité qui, elle, est ouvertement contre. Sous prétexte de combat contre l’islamophobie, elle milite pour que notre société tolère la prolifération des signes de séparatisme islamique. Les premiers s’en inquiètent et ils ont raison, les seconds attendent la victoire des troisièmes pour vivre « normalement » c’est-à-dire comme des musulmans dans un pays musulman.

    Le constat est sinistre car le pronostic vital civilisationnel de la France est engagé. Notre nation a été empoisonnée par des « belles âmes » et des « grandes voix » qui, au nom d’un humanisme et d’un « progressisme » totalement dévoyés, ont livré notre société occidentale de progrès à la conquête territoriale et culturelle de peuples, non seulement non-européens mais au mieux rétifs, au pire hostiles à notre mode de vie et à nos modes de pensée. 

    Trop tard?

    Faut-il pour autant baisser les bras et se réfugier dans le fatalisme ? Il est tard. Très tard. Mais pas trop tard. Je partage l’opinion de mon ami Eric Zemmour. La France n’a pas dit son dernier mot. Ou plutôt, elle n’a pas exhalé son dernier souffle. À une autre époque et dans des circonstances beaucoup plus tragiques, les combattants de Stalingrad avaient toutes les raisons de désespérer, de croire que tout était fini, qu’ils ne pourraient jamais venir à bout des loups venus les dévorer. Et pourtant, en se battant rue par rue, maison par maison, en allant puiser au tréfonds de l’âme russe, ils ont trouvé la force de tenir puis, progressivement, de repousser l’invasion. 

    Les temps ont changé et heureusement notre combat est devenu plus idéologique, politique, médiatique, électoral, législatif et juridique. Pour sauver la France il ne sera pas nécessaire de mourir sous les bombes ou de faire face à la mitraille ennemie, mais de choisir, dans les urnes, ceux qui ont fait vœu de faire don d’eux-mêmes à la plus belle des causes. Celle de la France. Celle d’une République que nous entendons garder française.

     

    Economiste et haut fonctionnaire. Président de l’Institut Apollon.
     
  • « La décision locale est délégitimée, le lien social n’est plus tissé. »

     

    Rencontre avec un élu local qui cherche à animer son territoire en défendant une véritable proximité entre les décideurs, les relais et les habitants. 

    Vincent You, quels sont vos mandats locaux ?

    Je suis directeur d’hôpital dans le nord de la Charente, à Confolens, c’est-à-dire un hôpital de proximité avec un Ehpad. C’est important parce que beaucoup de mes convictions opérationnelles, je me les forge dans cet exercice. C’est un hôpital de 300 personnes. Je suis adjoint au maire d’Angoulême depuis 2014, en charge des finances et depuis peu du civisme et de l’engagement citoyen, et je suis vice-président du Grand Angoulême en charge de l’urbanisme et de la stratégie agricole. J’ai des journées très différentes et c’est ça qui est passionnant.

    Vous êtes l’inventeur de la clause Molière, qui vise à empêcher la venue des travailleurs détachés dans le secteur du BTP et qui a fait couler beaucoup d’encre.

    C’est en tant que directeur d’hôpital que j’y ai été amené. J’étais missionné pour reconstruire un hôpital dans la ruralité charentaise et je voulais que cet appel d’offres, qui engageait une dépense publique, avec quinze millions d’euros à la clé, bénéficie à l’emploi local. Je construis l’appel d’offres en zigzaguant au milieu du code des marchés pour que cela profite aux entreprises locales, ce que j’ai fait, et j’ai eu une surprise : entre le marché, son attribution, le choix des entreprises et le chantier, je me suis rendu compte que bon nombre d’entreprises allaient chercher des travailleurs détachés et que cela ne profitait que marginalement aux habitants, aux jeunes du coin. Quand ensuite j’ai dû rénover un Ehpad, avec un autre appel d’offres, j’ai voulu éviter le recours massif aux travailleurs détachés. Il faut bien se rendre compte que je gère l’argent de la Sécurité sociale et qu’avec les travailleurs détachés, cet argent va bénéficier aux entreprises qui payent ailleurs cette sécurité sociale, ce qui est délirant ! Je me suis rappelé qu’à Angoulême j’avais passé un marché “alimentation + pédagogie” : j’achetais des légumes à des agriculteurs qui acceptaient de recevoir sur leurs fermes les classes d’Angoulême. Avec ça, l’Espagnol était un peu trop cher, avec un trajet prohibitif ! et nous avons pu acheter local. Les professionnels du BTP, avec qui j’ai travaillé pour chercher une solution adaptée à leur secteur, m’ont dit que les conditions de travail était le problème majeur : on ne sait pas si les Polonais ou les Roumains comprennent les normes imposées. Nous avons donc mis en forme, avec des amis juristes, ce qui est devenu la clause Molière et qui a été au départ extrêmement bien accueillie : tous les élus locaux, quelle que soit leur couleur politique, espèrent des retombées locales. Elle s’est étendue tranquillement de ville en ville et de régions en régions (la Normandie, par exemple, l’a votée à l’unanimité moins une voix).

    Cette clause n’est pas une clause de préférence nationale mais une clause de préférence locale, en fait.

    De préférence francophone, plutôt. Si l’entreprise angoumoisine va chercher des gens qui parlent très bien français et qui veulent s’installer en France, la clause Molière n’empêche rien. Elle permet d’éviter l’absurde. Les opposants faisaient valoir qu’il y aurait bientôt une clause Shakespeare ou une clause Vaclav Havel, etc. : mais à y bien réfléchir, c’est normal qu’il y ait des clauses protectrices. Benoit Hamon a dit que c’était une clause Tartuffe parce que nos pères ont accueilli des Italiens, des Espagnols, des Marocains, etc., qui se sont installés en France : mais ça n’a rien à voir ! Bien sûr des travailleurs étrangers sont venus en masse et ont fini par apprendre la langue. Mais aujourd’hui le fonctionnement est totalement différent : les travailleurs détachés viennent trois semaines ou trois mois, et ils repartent chez eux avec un petit pactole. Il n’y a aucune démarche d’intégration ou d’assimilation à la société française – et je ne leur en veux pas : pour eux, c’est une occasion magnifique. C’est donc une clause de préférence francophone et aussi de respect des ouvriers : on a perdu énormément d’emplois industriels, comment accepter que dans un secteur non délocalisable les marchés se gagnent avec un low cost fondé sur la délocalisation administrative des emplois, au détriment du tissu local ?

    Mais alors, pourquoi la polémique ?

    La première étape de la clause Molière, c’est d’abord la « révolte » d’un petit élu local qui, dans son cadre professionnel, tente une expérience bien accueillie par les autres élus. C’est ensuite devenu une polémique quand Valérie Pécresse et Laurent Wauquiez ont voulu se l’approprier : avec des grands leaders visibles, la gauche n’a pas voulu suivre et la presse a expliqué que c’était de la discrimination. Alors que la gauche locale, jusqu’alors, se contentait de s’abstenir au moment des votes : c’était compliqué, pour elle, de voter contre une mesure qui améliorait le sort des ouvriers… Au final, la clause Molière version Wauquiez, qui l’avait durcie, a été annulée mais la clause Molière version Retailleau a été validée par le Conseil d’État. La mienne était plus proche de celle de Retailleau, qui l’a un peu améliorée. Donc, aujourd’hui, tout élu local qui veut éviter la prolifération du travail détaché peut utiliser une clause parfaitement licite. Si les élus n’en veulent pas, c’est un choix politique, qu’ils doivent assumer.

    Cette absurdité d’une action locale bénéfique qui rencontre, en devenant un sujet national, des oppositions purement idéologiques, l’avez-vous rencontrée par ailleurs ?

    Pas de manière aussi palpable : on ne crée pas tous les jours une solution d’envergure nationale ! Ce qui me marque, plutôt, c’est que les élus locaux sont très dépendants de l’approche juridique de leurs services, qui leur conseillent toujours d’être très prudents. Cette angoisse de la prise de risque juridique paralyse beaucoup d’initiatives. Tout le monde, ici et là, a de bonnes idées, aimerait les tester et les raconter, mais les analyses amont ont tendance à étouffer dans l’œuf les expériences. Mais le plus gros problème, et c’est mon expérience d’élu et de directeur de petit hôpital, c’est la foi qu’on met dans le gigantisme administratif : en changeant d’échelle, en mutualisant, on arriverait comme par miracle à résoudre tous les problèmes locaux. Mais c’est plutôt l’inverse. Je vois des marchés qui regroupent de nombreux acteurs hospitaliers et qui, en définitive, ne sont pas plus bénéfiques et même, avec l’échelle territoriale très vaste qu’ils supposent, arrivent à tuer les petites entreprises qui ne peuvent pas répondre localement, faute de taille critique. Il n’y a donc pas toujours des gains et il y a une casse économique importante. C’est d’autant plus problématique que les entreprises locales ont intérêt à bien travailler pour avoir d’autres marchés plus tard. Les grandes entreprises de passage se moquent assez souvent de savoir comment va vivre le bâtiment qu’elles livrent, elles ne seront plus là s’il y a un problème. À l’échelle du Grand Angoulême, nous sommes passés de seize à trente-huit communes (ce qui n’est pas énorme, certaines communautés en regroupent cent). On délégitime les maires ruraux. Si la moitié d’entre eux veut arrêter, c’est à cause de ça plus que des difficultés de gestion ou du manque d’argent public. Le maire est encore celui qui gère les problèmes quotidiens des habitants mais il n’a plus les clés… On ne sait plus quels sont les contours, quelles sont les responsabilités. Les politiques successives nous imposent de passer du modèle communes – départements – nation au modèle agglomérations – régions – Europe mais ce n’est pas rentré dans la réalité des citoyens français. Le maire, dernier élu respecté des Français, est délégitimé – sans qu’il y ait, là non plus, de gains économiques : on tue la commune et son petit périmètre, avec ses élus qui sont quasiment bénévoles et qui gèrent tout en direct, à l’économie, pour créer des services avec des périmètres élargis qui obligent à embaucher des techniciens. En transférant les compétences communales aux services, on améliore sans doute l’ingénierie en renonçant à la proximité de gestion. Et avec treize départements, la Région est un échelon désormais très éloigné…

    Votre côté expérimentateur, c’est aussi d’avoir développé la méthode Montessori dans votre Ehpad – autre test local ?

    Nous ne sommes pas les seuls. Mais justement, Montessori, c’est « aide-moi à faire seul. » Tout le système des maisons de retraite est construit sur la mesure de la dépendance des gens accueillis. On oublie que les personnes âgées, si elles ont des fragilités, gardent des capacités. Montessori consiste à maintenir ces capacités pour les faire vivre. Participer à la vie sociale nous constitue en tant qu’être humain. Maintenant, les résidents ont un rôle social, participent à la vie commune et voient leurs capacités reconnues et utilisées. Avec Montessori, en ritualisant certains gestes, la mémoire procédurale du résident, même très atteint par Alzheimer, peut reproduire ces gestes et continuer à participer à la vie collective. Montessori, au-delà de la marque, c’est du bon sens : respecter la personne humaine dans sa vieillesse, lui donner une place qui corresponde à ses passions, à son histoire et à ce qu’elle peut encore faire. Les premiers résultats de l’expérience sont très positifs : les consommations de psychotropes ont diminué d’un tiers, sans que cela ait été un objectif, et les équipes sont mobilisées parce que le projet a du sens. Et les personnes âgées retrouvent de l’initiative à un point inimaginable. Chez nous, elles ont organisé, toutes seules, au mois de septembre, un rallye auto ! Pour retourner sur les lieux où elles avaient grandi. Ce n’est pas nous qui pouvions l’imaginer, ni imaginer l’aide qui leur a été apportée, et ça n’a été possible que parce que nous leur avons donné les clés de la maison.

    Une vraie parabole par rapport à ce que vous racontiez de ces échelons toujours plus vastes et plus lointains…

    La centralisation va tuer la créativité locale. Les bonnes recettes parisiennes ne sont pas généralisables. Et avec la disparition de la taxe d’habitation, le maire n’a plus la main sur les recettes locales, l’habitant ne contribue plus aux services mis en place dans sa commune, il n’y a plus de lien entre le citoyen et le décideur. C’est aujourd’hui compensé financièrement mais, sur le fond, la décision locale est délégitimée, le lien social n’est plus tissé. 

    Propos recueillis par Philippe Mesnard
    le 21 novembre
  • Un climat de guerre civile règne sur l’Amérique, par Antoine de Lacoste

    Un climat de guerre civile règne sur l’Amérique

    La démocratie américaine connaît une crise majeure. Un climat de guerre civile y règne sur fond de vague woke terrorisant ses adversaires. Le système électoral, totalement archaïque et opaque, autorise toutes les suspicions. Les électeurs trumpistes, des « gens déplorables », refusent de voir mourir leur Amérique tandis que les élites ont adopté une nouvelle religion qui doit remplacer le vieux socle protestant.

    antoine de lacoste.jpgDepuis l’élection de Donald Trump en 2016, l’Amérique s’est divisée en deux camps qui s’invectivent, se haïssent et ne se côtoient plus. D’un côté, il y a le parti du bien : les intellectuels, les journalistes, les universités, les libéraux et libertaires des « côtes », est et ouest. De l’autre, le petit peuple blanc du centre complété par des bastions conservateurs comme le Texas, moins blanc celui-là. Clairement, l’appartenance à un camp a remplacé l’appartenance à un pays, ce qui est l’exact contraire de toute l’histoire américaine.

    Les médias, presque totalement acquis au premier camp, ont fait de Trump le responsable de cette situation qui fracture l’Amérique comme elle ne l’a jamais été. Chacun sait qu’il n’en n’est rien : l’élection de Donald Trump n’a été que le révélateur d’une situation qui couvait depuis bien longtemps. La désindustrialisation, la crise financière de 2008, l’invasion fulgurante du wokisme et des théories du genre ont mis de côté une Amérique qui, en 2016, a trouvé son champion, celui qui la défendait et la comprenait.

    Ce phénomène fondamental n’a pas été perçu par les élites, trop occupées à s’enrichir grâce à la marche triomphale de la mondialisation et à la suprématie totale de l’Empire américain. La rancœur couvait pourtant. Obama et son administration ont déployé une énergie considérable pour sauver Wall Street en 2008 mais ont laissé des millions d’Américains se faire saisir leurs maisons et entrer dans l’ère de la pauvreté. L’immigration massive venant d’Amérique centrale ou latine a engendré une inquiétude grandissante chez ceux qui sont le socle historique de l’Amérique. Marqués par un protestantisme souvent rigoureux, persuadés de « la destinée manifeste » dont ils sont les héritiers, ces petits blancs exècrent ces vents nouveaux qui leur semblent diaboliqueset ne veulent pas disparaître dans les poubelles de l’histoire.

    Assommés par l’élection surprise de Trump, les élites ont déclenché pendant quatre ans une guerre qui n’a laissé aucune place au compromis, y compris parlementaire ce qui est tout à fait nouveau. Elles étaient encouragées par le mépris abyssal dont les dirigeants démocrates faisaient preuve à l’égard de leurs adversaires : les gens qui soutiennent Trump sont « déplorables » n’a pas craint d’affirmer la délicieuse Hillary Clinton.

    Les médias ont été les chefs de file de cette croisade du bien : « Certains jours, le Washington Post publia plus de douze articles sur Trump contre seulement un ou deux sur le reste du pays » (Le Monde Diplomatique, mars 2021). Une sorte de « fureur idéologique » s’est emparée de l’Amérique (Le Figaro, 25/09/2020).

    FUREUR IDEOLOGIQUE ET WOKISME TRIOMPHANT

    Cette fureur s’est, aussitôt après l’élection de Trump, traduite par la non-reconnaissance de la légitimité de sa victoire. Trop prudents pour remettre en cause le décompte des votes (il ne faut surtout pas ouvrir la boîte de Pandore), les démocrates se sont activement lancés dans des tentatives de procédures d’impeachment qui n’ont jamais eu l’ombre d’une chance d’aboutir. Le principal grief était la supposée interférence de Moscou dans la campagne électorale, le « Russiegate ». Pendant des années les médias ont alimenté le feuilleton et la montagne a finalement accouché d’une souris : le Rapport Mueller a conclu qu’il n’y avait rien. Cela n’a pas empêché certains journalistes de décrocher le Prix Pullitzer pour des enquêtes finalement erronées : comme le Goncourt ou le Nobel, le Pullitzer est depuis longtemps la marque du néant accaparée par la bien-pensance.

    Dans ce contexte, la vague woke a pris une ampleur incroyable et a submergé la plupart des universités américaines. Des professeurs ont été renvoyés (Evergreen, Georgetown) pour des motifs surréalistes, d’autres ont été harcelés et ont préféré démissionner, tous doivent suivre des cours de remise à niveau idéologique. Les injonctions les plus baroques se sont multipliées, l’auto-censure bride toute parole publique. Un parlementaire a même conclu une prière publique par Amen et Awomen. Il fallait y penser…

    Tout cela a évidemment été accompagnée de violences multiples, surtout après l’affaire George Floyd, ce noir tué par un policier blanc, et le développement du mouvement Black Lives Mater. Des groupes de militants ont chassé des étudiants coupables de ne pas baisser la tête ou de ne pas plier le genou, d’autres ont envahi des restaurants (comme à Washington) obligeant les clients blancs à lever le poing. Le paroxysme a été atteint à Portland, dont le centre-ville a été occupé pendant des semaines par des militants anti-racistes et wokistes. La terreur a régné sur la ville en toute impunité.

    Cette « polarisation de l’opinion » est telle que des Américains quittent leur région pour s’installer sur des terres plus hospitalières. De nombreux électeurs trumpistes quittent la Californie, devenue étouffante, pour s’installer en Idaho ou plus loin au Texas. Changer de vie pour changer de voisins, cela en dit long sur la volonté de ne plus vivre ensemble.

    Pour accompagner tout cela, les médias se sont mis en ordre de marche comme jamais. Ce n’est pas une surprise : 95% de la presse et de la télévision ont soutenu Clinton puis Biden contre Trump. Mais ils sont allés très loin, la palme revenant au New-York Times qui a publié en 2019 un manifeste (le projet 1619) dans lequel il affirme que l’histoire américaine est fondée sur la racisme et l’esclavagisme. Cette vision est aujourd’hui enseignée dans de très nombreuses écoles à travers tout le pays.

    L’élection de Biden, censée apaiser l’ambiance selon les médias américains et européens, n’a rien changé, bien au contraire. Le doux Biden, dans une de ses phases de lucidité, a déclaré en janvier 2022 : « Choisissons-nous la démocratie plutôt que l’autocratie, la lumière plutôt que les ombres, , la justice plutôt que l’injustice ? ». Nous sommes bien loin d’un Président « de tous les Américains ». Il est vrai que pour le camp du bien, ceux d’en face sont « déplorables ».

    LE VOTE SOUS LE SIGNE DU DESORDRE ET DE L’OPACITE

    Bien évidemment, les doutes autour de la véracité des comptages du scrutin de 2020 qui a vu la victoire de Biden d’une courte tête, ont terriblement envenimé les choses. La fameuse invasion du Capitole le 6 janvier 2021, loin d’être une tentative de coup d’Etat, n’est autre que le symbole de l’exaspération d’un peuple (la moitié de l’Amérique), persuadé de s’être fait voler la victoire.

    Les arguments ne manquent certes pas pour mettre en cause le résultat du vote. Le système électoral américain est en effet d’un invraisemblable archaïsme désordonné, sans parler de son opacité. Chaque Etat a sa propre procédure, voire plusieurs car cela peut changer d’un comté à l’autre. On peut voter par anticipation ou non, plusieurs jours après, le nombre de jours étant extrêmement variable, par correspondance avec autorisation pour des militants de parcourir les immeubles à la recherche de bulletins (qui les remplit ?). Les machines électroniques ne sont pas toujours les mêmes et, dans bien des cas, l’électeur ne peut lire le résultat de son vote après avoir appuyé sur le bouton. Certains ont affirmé avoir lu Biden après avoir appuyé sur le bouton Trump. Et que dire de ces bulletins perforés, plus ou moins bien, autorisant toutes les interprétations . La cerise sur le gâteau étant l’absence de contrôle d’identité dans bien des votes par correspondance.

    Lorsqu’on sait que Trump avait partie gagnée avant le décompte des votes par correspondance qui ont , dans certains bureaux, donné 90% des voix à Biden, la suspicion est bien légitime.

    Tout cela n’est pas nouveau certes. Certains spécialistes de l’Amérique affirment que Kennedy avait déjà volé son élection en 1960… Dans son livre Un homme, un vote ? (Edition du Rocher, 2007), Jacques Heers raconte l’élection de 2000 : « On a compté et recompté. Pendant des jours, les journaux ont publié des photos où l’on voyait un scrutateur, perplexe et circonspect, occupé à examiner très soigneusement un bulletin, tenu délicatement entre ses doigts, face à la lumière, pour dire si un confetti à demi-détaché devait compter ou non pour une perforation. On n’en sortait pas. Chaque jour les chiffres changeaient. Les juges de la Cour suprême eurent le dernier mot et, par cinq voix contre quatre, déclarèrent que Bush l’emportait en Floride. »

    La différence avec l’époque actuelle, c’est que personne ne contesta ensuite la légitimité de Kennedy ou de Bush. Ce ne fut pas le cas pour Donald Trump, et c’est la grande nouveauté. Biden est aujourd’hui dans le même sac pour l’électeur trumpiste.

    Aujourd’hui les Américains n’ont plus confiance et ils ne sont plus que 50% à être fiers de la façon dont fonctionne leur démocratie contre 90% en 2002.

    Les réseaux sociaux de leur côté ont joué leur partition guerrière avec Twitter comme symbole qui expulsa Trump. Son rachat par Elon Musk et le renvoi de la moitié de ses employés marque un tournant important et les théories du genre ont perdu un fidèle relais.

    Malgré la victoire des progressistes, la haine est toujours là. La revue Forbes par exemple a demandé aux entreprises, sous peine de dénonciation, de ne pas embaucher d’anciens membres de l’administration Trump après leur éviction conforme au spoil system.

    UNE NOUVELLE RELIGION

    Mais d’où vient ce vent de folie qui a fait d’une grande partie de la jeunesse américaine des propagandistes acharnés du wokisme ou du Black Lives Mater ?

    Interrogé par le Figaro(25/09/2020) Joseph Bottum, professeur d’université, avance une grille d’analyse intéressante. Pour lui l’effondrement du protestantisme, notamment dans les zones urbaines, a laissé la place à un post-protestantisme dont les adeptes sont des nouveaux puritains sans Dieu qui pratiquent la religion de la culture woke. Une partie des fidèles de ces églises protestantes qui furent le socle de l’Amérique ont rejoint les évangéliques ou les catholiques, mais la plupart sont devenus des post-protestants qui ont inventé des nouveaux péchés : le racisme, l’intolérance, les atteintes à l’environnement, l’oppression. Et de conclure joliment : « Nous avons maintenant une église du Christ sans le Christ. Cela veut dire qu’il n’y a pas de pardon possible. » D’où cette ambiance de guerre civile « à feux doux ».

    Dans leur aveuglement idéologique, presque religieux donc, les progressistes veulent réduire leurs adversaires à de petits blancs racistes et aigris. La réalité est toute autre : en 2020, Trump a perdu des électeurs blancs mais en a gagné dans les communautés noires et surtout hispaniques. Ainsi, Juan Ciscomani, fils d’immigrés mexicains et candidat républicain victorieux en Arizona a bâti sa campagne sur la destruction du rêve américain par Biden et Pelosi, coupables de laisser entrer une immigration excessive et de permettre aux écoles de ne plus enseigner « les bons côtés de l’Amérique ».

    Cette crise identitaire et religieuse se conjugue toujours avec une crise sociale. Certes, elle a commencé il y a bien longtemps mais elle prend une tournure inattendue depuis le covid. Ce n’est pas un hasard si les Américains ont eu un nombre important de morts, et Trump n’y est pour rien même si cela lui a sans doute coûté l’élection.

    Les Américains sont en mauvaise santé. De 2014 à2022, ils ont perdu trois ans d’espérance de vie : les overdoses d’opioïdes et l’obésité font des ravages. On estime que 40% des adultes américains sont obèses et beaucoup, affaiblis, sont morts du covid. Mais le débat est impossible : la peur d’être taxé de grossophobe empêche la parole. La situation est si grave que l’armée a averti que 2021 avait été l’année la plus difficile de son histoire pour le recrutement des marines : les jeunes ne réussissent plus les tests physiques.

    Ainsi, comme dit le New York Times, qui y a largement contribué, les Américains « vivent dans une nation cassée ». Le consensus, provisoire, sur l’Ukraine n’y change rien : c’est à l’intérieur que le ver est dans le fruit.

    L’Amérique vit un climat de guerre civile, « à feu doux » certes, mais la haine est palpable.

  • À la découverte du ”Fonds lafautearousseau”... (12) : Pour une vraie histoire des Cent jours, Napoléon et les Provençaux

    lafautearousseau, c'est plus de 28.000 Notes ou articles (et autant de "commentaires" !), 22 Albums, 47 Grands Textes, 33 PDF, 16 Pages, 366 Éphémérides...

    Il est naturel que nos nouveaux lecteurs, et même certains plus anciens, se perdent un peu dans cette masse de documents, comme dans une grande bibliothèque, et passent ainsi à côté de choses qui pourraient les intéresser...

    Aussi avons-nous résolu de "sortir", assez régulièrement, tel ou tel de ces documents, afin d'inciter chacun à se plonger, sans modération, dans ce riche Fonds, sans cesse augmenté depuis la création de lafautearousseau, le 28 février 2007...

    Aujourd'hui : Pour une vraie histoire des Cent jours, Napoléon et les Provençaux)...

    (tiré de notre Éphéméride du 30 mars)

    (retrouvez l'ensemble de ces "incitations" dans notre Catégorie :

    Á la découverte du "Fonds lafautearousseau")

     

     1815 : Louis XVIII arrive à Gand, capitale du Royaume de France pendant les Cent-Jours...

     

    1A.jpgLe 1er mars, Napoléon est revenu de l'Île d'Elbe et a posé le pied sur le sol français, à Golfe Juan : c'est le début de l'entreprise insensée et criminelle que l'Histoire retiendra sous le nom des Cent-Jours...

    Napoléon connaît bien les sentiments royalistes de la Provence et des habitants de la vallée du Rhône, et c'est pourquoi il veut à tout prix éviter de passer au milieu d'eux, préférant l'invraisemblable "route Napoléon"...

    Chateaubriand en explique la raison, en racontant son parcours vers son exil de l'île d'Elbe, après sa première abdication, et comment il fut insulté, voire menacé de mort , par des foules toujours plus hostiles, lorsqu'il fut arrivé à Orange :

     

     De Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe, Tome I, pages 884 à 892) :

    "Bonaparte avait demandé à l'Alliance des commissaires, afin d'être protégé par eux jusqu'à l'île que les souverains lui accordaient en toute propriété et en avancement d'hoirie. Le comte Schouwalof fut nommé pour la Russie, le général Kohler pour l'Autriche, le colonel Campbell pour l'Angleterre, et le comte Waldbourg-Truchsess pour la Prusse : celui-ci a écrit l'Itinéraire de Napoléon de Fontainebleau à l'île d'Elbe... : "Le 25, nous arrivâmes à Orange; nous fûmes reçus aux cris de : Vive le Roi ! Vive Louis XVIII ! Le même jour, le matin, l'empereur trouva un peu en avant d'Avignon, à l'endroit où l'on devait changer de chevaux, beaucoup de peuple rassemblé, qui l'attendait à son passage, et qui nous accueillit aux cris de : Vive le roi ! Vivent les alliés ! A bas le tyran, le coquin, le mauvais gueux !...  Cette multitude vomit encore contre lui mille invectives... nous ne pûmes obtenir de ces forcenés qu'ils cessassent d'insulter l'homme qui, disaient-ils, les avaient rendus si malheureux... Dans tous les endroits que nous traversâmes il fut reçu de la même manière : à Orgon, petit village où nous changeâmes de chevaux, la rage du peuple était à son comble; devant l'auberge même où il devait s'arrêter, on avait élevé une potence à laquelle était suspendu un mannequin, en uniforme français, couvert de sang, avec une inscription placée sur la poitrine et ainsi conçue : Tel sera tôt ou tard le sort du tyran. Le peuple se cramponnait à la voiture de Napoléon, et cherchait à le voir pour lui adresser les plus fortes injures. L'empereur se cachait derrière le général Bertrand le plus qu'il pouvait; il était pâle et défait, ne disant pas un mot... A un quart de lieue en-deçà d'Orgon, il crut indispensable la précaution de se déguiser : il mit une mauvaise redingote bleue, un chapeau rond sur sa tête avec une cocarde blanche, et monta en cheval de poste pour galoper devant sa voiture, voulant passer ainsi pour un courrier... Mille projets se croisaient dans sa tête sur la manière dont il pouvait se sauver; il rêvait aussi au moyen de tromper le peuple d'Aix, car on l'avait prévenu qu'une très grande foule l'attendait à la poste... Il nous raconta ce qui s'était passé entre lui et l'hôtesse, qui ne l'avait pas reconnu : - Eh bien ! lui avait-elle dit, avez-vous rencontré Bonaparte ? - Non, avait-il répondu. - Je suis curieuse, continua-t-elle, de voir s'il pourra se sauver; je crois toujours que le peuple va le massacrer : aussi faut-il convenir qu'il l'a bien mérité, ce coquin-là ! Dites-moi donc, on va l'embarquer pour son île ? - Mais oui. - On le noiera, n'est-ce pas ? - Je l'espère bien ! lui répliqua Napoléon... Bonaparte, qui alors voulut se faire passer pour un général autrichien, mit l'uniforme du général Kohler, se décora de l'ordre de Sainte-Thérèse...et se couvrit du manteau du général Schouwaloff... A Saint-Maximin... il le fit appeler (le sous-préfet d'Aix, ndlr) et l'apostropha en ces termes : "Vous devez rougir de me voir en uniforme autrichien : j'ai dû le prendre pour me mettre à l'abri des insultes des Provençaux... Je ne trouve que des tas d'enragés qui menacent ma vie. C'est une méchante race que les Provençaux : ils ont commis toutes sortes d'horreurs et de crimes durant la Révolution et sont tout prêts à recommencer"..." On voudrait douter de la vérité des faits rapportés par le comte de Waldbourg-Truchsess, mais le général Kohler a confirmé, dans une "suite de l'Itinéraire de Waldbourg", une partie de la narration de son collègue; de son côté, le général Schouwaloff m'a certifié l'exactitude des faits : ses paroles contenues en disaient plus que les paroles expansives de Waldbourg. Enfin, l'Itinéraire de Fabry est composé sur des documents français authentiques, fournis par des témoins oculaires..."

     

    1A.jpgOn comprend donc bien pourquoi Napoléon détestait les Provençaux, au sens large; comme les méprisait avant lui Albitte, sinistre "représentant en mission" de la Convention à Lyon mais aussi dans le Sud-Est, avec son complice en terrorisme Crancé, l'un et l'autre grands criminels de guerre (ce sont eux que l'on évoque dans le chant fameux de La Ligue Noire : "...J'en veux foutre cent par terre / Et de sang tout inonder ! / Oui, je veux, dans la poussière, rouler Albitte et Crancé..." ). Lors de la séance de la Convention du 17 juillet 1793 - rapportée par le Moniteur, dans lequel était notée l'intégralité de débats de l'Assemblée - Albitte avait brossé le tableau d'un Midi contre-révolutionnaire, le comparant à la Vendée, se trouvant ainsi directement à l'origine de l'expression Vendée du Midi, ou Vendée provençale...(voir l'Éphéméride du 30 décembre)

    Napoléon sait donc parfaitement ce qui l'attend s'il passe par la route normale, pour "monter" à Paris : en passant par Marseille, c'est, au mieux, l'arrestation, au pire la mise à mort par une population ultra hostile à tout ce qu'ont représenté les années de l'Empire. Il décide donc d'emprunter la route des Alpes, invraisemblable et aberrante pour qui veut se rendre à Paris depuis le Sud-Est : un chemin que l'histoire officielle, évitant soigneusement d'expliquer le pourquoi de la chose, appellera pompeusement la "route Napoléon"...

    1A.jpgLouis XVIII a deux solutions : abandonner Paris et le pouvoir, ou résister, par la force, à ce coup de force. C'est cette seconde solution qu'il choisit, confiant au Maréchal Ney le commandement d'une troupe suffisante pour arrêter Napoléon. Ney, qui promettra, théâtralement, de ramener le monstre dans une cage de fer...

    On sait comment celui qui fut, malgré tout, un grand soldat, s'acquitta de sa tâche ! (il sera fusillé après la fin lamentable et catastrophique des Cent Jours : voir l'Éphéméride du 7 décembre)

    Après la trahison de Ney, la folle équipée devient véritablement ce qu'elle fut : un Coup d'Etat militaire.

    Chateaubriand parlera avec justesse, dans ses Mémoires d'Outre-Tombe, de ces "Quelques militaires dont la funeste fascination avait amenée la ruine de la France, en déterminant la seconde invasion de l'étranger..." (La Pléiade, Tome I, page 973). Un seul exemple suffit à démontrer cette "funeste fascination" et ce mauvais esprit : à Sisteron, le maire royaliste Joseph Laurent de Gombert entend bien arrêter Napoléon, à partir de sa forteresse dotée de canons : mais, pendant la nuit, quelques dizaines de militaires désarment la forteresse...

    Et Louis XVIII se retrouve devant le même dilemme, aggravé par le risque réel, avec la trahison d'une partie de l'armée, d'affrontements sanglants, inutiles et fratricides entre Français s'il essaie à nouveau d'employer la force.

    Fin politique, et conscient comme tous les esprits lucides et sensés de son temps, que l'entreprise démente de Napoléon ne peut ni durer, ni, encore moins, réussir, Louis XVIII choisit, cette fois, la solution politique : il quitte Paris, le 20 mars au soir, et, après un voyage de dix jours, va s'installer à Gand, alors en Hollande, où il sera dignement reçu, en son très bel hôtel, par le comte Jean-Baptiste d'Hane-Steenhuyse.

    Le Roi trouva l'hôtel si beau qu'il écrivit : "ce logement était préférable à tous ceux que j'avais habité lors de ma première sortie de France".

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                                    Façade arrière, donnant sur le Jardin...

    "...De notre château royal de Gand", écrivait Louis XVIII, dont "la force tranquille", "la confiance tranquille dans la force de son nom et de son droit lui ont rendu son trône", écrira Guizot...

    De Chateaubriand (Mémoires d'Outre-Tombe, La Pléiade, Tome I, page 930) :

    "Le roi, bien logé, ayant son service et ses gardes, forma son conseil. L'empire de ce grand monarque consista en une maison du royaume des Pays-Bas, laquelle maison était située dans une ville qui, bien que la ville natale de Charles-Quint, avait été le chef-lieu d'une préfecture de Bonaparte : ces noms font entre eux un assez bon nombre d'événements et de siècles..."

     

    C'est de là que, pendant toute la durée des Cent-Jours, Louis XVIII va organiser et diriger le gouvernement royal en exil, faisant ainsi de Gand la capitale du Royaume de France, jusqu'à son retour définitif à Paris, le 8 juillet 1815

    Dans la Garde qui l'avait accompagné, ou parmi ceux qui le rejoindront : les jeunes Alphonse de Lamartine et Alfred de Vigny; Guizot et Portalis; le duc de Lévis, aïeul de l'académicien qui prononcera le traditionnel éloge de son prédécesseur : Charles Maurras...

    Blacas dirigeant la Maison du Roi, le ministère fut formé avec Chateaubriand à l'Intérieur, Beugnot à la Marine, Jaucourt aux Affaires étrangères, Feltre à la Guerre, et Lally à l'Instruction publique. Louis XVIII était également accompagné des maréchaux Marmont et Victor, et fut rejoint, dans ses dernières heures d'exil, par le maréchal de Bourmont, qui fit défection à Napoléon le 15 juin, soit 3 jours avant Waterloo...

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     Pour une vision d'ensemble des Cent-Jours, voir aussi les Éphémérides des 25 février, 8 mars, 16 mars, 17 mars, 18 juin, 22 juin, 15 juillet et 20 novembre)

     

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  • Feuilleton : Chateaubriand, ”l'enchanteur” royaliste... (31)

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    Anne-Louis Girodet, Portrait de Chateaubriand,
    Saint-Malo, musée d’Histoire de la Ville et du Pays Malouin.

    (retrouvez l'intégralité des textes et documents de cette visite, sous sa forme de Feuilleton ou bien sous sa forme d'Album)

    Aujourd'hui : la bataille de Waterloo, comme Chateaubriand l'a "entendue", de loin; et la seconde abdication de Napoléon...

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    "Quelle fut la bataille de Waterloo"...

     

    Chateaubriand est à Gand, auprès de Louis XVIII, durant les Cent Jours. Il se promène "sur la grande route"; il entend, au loin, l'écho d'une bataille : c'est Waterloo...

    Des Mémoires d'Outre-Tombe, La Pléiade, Tome I, Livre XXIIIème,, chapitre XVI, pages 962/963/964 :

    "Le 18 juin 1815, vers midi, je sortis de Gand par la porte de Bruxelles; j'allais seul achever ma promenade sur la grande route. J'avais emporté les Commentaires de César et je cheminais lentement, plongé dans ma lecture. J'étais déjà à plus d'une lieue de la ville, lorsque je crus ouïr un roulement sourd : je m'arrêtai, regardai le ciel assez chargé de nuées, délibérant en moi-même si je continuerais d'aller en avant ou si je me rapprocherais de Gand dans la crainte d'un orage. Je prêtai l'oreille; je n'entendis plus que le cri d'une poule d'eau dans des joncs et le son d'une horloge de village.
    Je poursuivis ma route : je n'avais pas fait trente pas que le roulement recommença, tantôt bref, tantôt long et à intervalles inégaux; quelquefois, il n'était sensible que par une trépidation de l'air, laquelle se communiquait à la terre sur ces plaines immenses, tant il était éloigné. Ces détonations, moins vastes, moins onduleuses, moins liées ensemble que celles de la foudre, firent naître dans mon esprit l'idée d'un combat.
    Je me trouvais devant un peuplier planté à l'angle d'un champ de houblon. Je traversai le chemin et je m'appuyai debout contre le tronc de l'arbre, le visage tourné du côté de Bruxelles. Un vent de sud s'étant levé m'apporta plus distinctement le bruit de l'artillerie. Cette grande bataille, encore sans nom, dont j'écoutais les échos au pied d'un peuplier, et dont une horloge de village venait de sonner les funérailles inconnues, était la bataille de Waterloo !
    Auditeur silencieux et solitaire du formidable arrêt des destinées, j'aurais été moins ému si je m'étais trouvé dans la mêlée : le péril, le feu, la cohue de la mort ne m'eussent pas laissé le temps de méditer; mais seul sous un arbre, dans la campagne de Gand, comme le berger des troupeaux qui paissaient autour de moi, le poids des réflexions m'accablait.
    Quel était ce combat ? Était-il définitif ? Napoléon était-il là en personne ? Le monde, comme la robe du Christ, était-il jeté au sort ? Succès ou revers de l'une ou de l'autre armée, quelle serait la conséquence de l'évènement pour les peuples, liberté ou esclavage ?
    Mais quel sang coulait ! chaque bruit parvenu à mon oreille n'était-il pas le dernier soupir d'un français ? Était-ce un nouveau Crécy, un nouveau Poitiers, un nouvel Azincourt, dont allaient jouir les plus implacables ennemis de la France ? S'ils triomphaient, notre gloire n'était-elle pas perdue ? Si Napoléon l'emportait, que devenait notre liberté ? Bien qu'un succès de Napoléon m'ouvrît un exil éternel, la patrie l'emportait dans ce moment dans mon coeur; mes voeux étaient pour l'oppresseur de la France, s'il devait, en sauvant notre honneur, nous arracher à la domination étrangère.
    Wellington triomphait-il ? La légitimité rentrerait donc dans Paris derrière ces uniformes rouges qui venaient de reteindre leur pourpre au sang des Français ! La royauté aurait donc pour carrosses de son sacre les chariots d'ambulances remplis de nos grenadiers mutilés ! Que sera-ce d'une restauration accomplie sous de tels auspices ?...
    Ce n'est là qu'une bien petite partie des idées qui me tourmentaient. Chaque coup de canon me donnait une secousse et doublait le battement de mon coeur. À quelques lieues d'une catastrophe immense, je ne la voyais pas; je ne pouvais toucher le vaste monument funèbre croissant de minute en minute à Waterloo, comme du rivage de Boulaq, au bord du Nil, j'étendais vainement mes mains vers les Pyramides.
    Aucun voyageur ne paraissait, quelques femmes dans les champs, sarclant paisiblement des sillons de légumes, n'avaient pas l'air d'entendre le bruit que j'écoutais. Mais voici venir un courrier : je quitte le pied de mon arbre et je me place au milieu de la chaussée; j'arrête le courrier et l'interroge. Il appartenait au duc de Berry et venait d'Alost..."

     

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    Seconde abdication de Napoléon

     

    "...Le 19 juin cent coups de canon des Invalides avaient annoncé les succès de Ligny, de Charleroi, des Quatre-Bras; on célébrait des victoires mortes la veille à Waterloo. Le premier courrier qui transmit à Paris la nouvelle de cette défaite, une des plus grandes de l’histoire par ses résultats, fut Napoléon lui-même : il rentra dans les barrières la nuit du 21 : on eût dit de ses mânes revenant pour apprendre à ses amis qu’il n’était plus. Il descendit à l’Élysée-Bourbon : lorsqu’il arriva de l’île d’Elbe, il était descendu aux Tuileries; ces deux asiles, instinctivement choisis, révélaient le changement de sa destinée.

    Tombé à l’étranger dans un noble combat, Napoléon eut à supporter à Paris les assauts des avocats qui voulaient mettre à sac ses malheurs : il regrettait de n’avoir pas dissous la Chambre avant son départ pour l’armée; il s’est souvent aussi repenti de n’avoir pas fait fusiller Fouché et Talleyrand. Mais il est certain que Bonaparte, après Waterloo, s’interdit toute violence, soit qu’il obéît au calme habituel de son tempérament, soit qu’il fût dompté par la destinée; il ne dit plus comme avant sa première abdication : "On verra ce que c’est que la mort d’un grand homme." Cette verve était passée. Antipathique à la liberté, il songea à casser cette Chambre des représentants que présidait Lanjuinais, de citoyen devenu sénateur, de sénateur devenu pair, depuis redevenu citoyen, de citoyen allant redevenir pair...

    ...Bonaparte, prévoyant l’événement, vint au-devant de la sommation qu’on se préparait à lui faire; il abdiqua pour n’être pas contraint d’abdiquer : "Ma vie politique est finie, dit-il : je déclare mon fils, sous le nom de Napoléon II, empereur des Français." Inutile disposition, telle que celle de Charles X en faveur de Henri V : on ne donne des couronnes que lorsqu’on les possède, et les hommes cassent le testament de l’adversité. D’ailleurs l’empereur n’était pas plus sincère en descendant du trône une seconde fois qu’il ne l’avait été dans sa première retraite; aussi, lorsque les commissaires français allèrent apprendre au duc de Wellington que Napoléon avait abdiqué, il leur répondit : "Je le savais depuis un an."

    La Chambre des représentants, après quelques débats où Manuel prit la parole, accepta la nouvelle abdication de son souverain, mais vaguement et sans nommer de régence.

    Une commission exécutive est créée : le duc d’Otrante la préside; trois ministres, un conseiller d’État et un général de l’empereur la composent et dépouillent de nouveau leur maître : c’était Fouché, Caulaincourt, Carnot, Quinette et Grenier...

    ...Une députation de la Chambre des représentants étant venue le féliciter sur sa nouvelle abdication, il répondit : "Je vous remercie : je désire que mon abdication puisse faire le bonheur de la France; mais je ne l’espère pas."

    Il se repentit bientôt après, lorsqu’il apprit que la Chambre des représentants avait nommé une commission de gouvernement composée de cinq membres. Il dit aux ministres : "Je n’ai point abdiqué en faveur d’un nouveau Directoire; j’ai abdiqué en faveur de mon fils : si on ne le proclame point, mon abdication est nulle et non avenue. Ce n’est point en se présentant devant les alliés l’oreille basse et le genou en terre que les Chambres les forceront à reconnaître l’indépendance nationale."...

    ...Des plénipotentiaires furent envoyés aux alliés. Napoléon requit le 29 juin deux frégates, stationnées à Rochefort, pour le transporter hors de France; en attendant il s’était retiré à la Malmaison...

    ...L’aide de camp Flahaut voulut soutenir le rapport du ministre de la guerre; Ney répliqua avec une nouvelle véhémence : "Je le répète, vous n’avez d’autre voie de salut que la négociation. Il faut que vous rappeliez les Bourbons. Quant à moi, je me retirerai aux États-Unis."

    À ces mots, Lavallette et Carnot accablèrent le maréchal de reproches; Ney leur répondit avec dédain : "Je ne suis pas de ces hommes pour qui leur intérêt est tout : que gagnerai-je au retour de Louis XVIII ? d’être fusillé pour crime de désertion ; mais je dois la vérité à mon pays."...

    Tandis que Bonaparte se retirait à la Malmaison avec l’Empire fini, nous, nous partions de Gand avec la monarchie recommençante. Pozzo, qui savait combien il s’agissait peu de la légitimité en haut lieu, se hâta d’écrire à Louis XVIII de partir et d’arriver vite, s’il voulait régner avant que la place fût prise : c’est à ce billet que Louis XVIII dut sa couronne en 1815. (Mémoires d'Outre-Tombe, Garnier, (Tome 4, Livre V)

  • Éphéméride du 8 septembre

    1830 : Naissance de Frédéric Mistral

     

     

     

     

     

    1239 : Première représentation du Miracle de Théophile, de Ruteboeuf 

     

    8 septembre,mistral,lamartine,daudetSi l'on connait relativement bien la vie même de Ruteboeuf, et en tous cas ses moments les plus importants, on ne dispose, curieusement de presqu'aucune date en ce qui le concerne. C'est dans l'exposé suivant - très intéressant malgré son aspect un peu austère - que l'on trouve la date du 8 septembre pour la première représentation publique, à Paris,  sur le parvis de Notre-Dame, du Miracle de Théophile, oeuvre commandée au poète par l'évêque de la ville lui-même (ci contre, une partie du vitrail de la cathédrale de Beauvais, racontant le Miracle) : 

     http://books.openedition.org/pup/4481?lang=fr 

    On trouvera ce merveilleux vitrail, expliqué et commenté dans notre Ephémeride/Evocation du 28 mai : 

     

     Quand la cathédrale Saint-Pierre de Beauvais a reçu, au XIIIème siècle, son extraordinaire vitrail du Miracle de Théophile 

     

    Et, sur le lien suivant - très technique et sans intérêt pour le grand public et les non-spécialistes - un petit tableau, en haut à droite, qui donne accès à tous les textes de Ruteboeuf :  

     

    http://www.arlima.net/qt/rutebeuf.html 

     

    Bien sûr, pour le grand public, aujourd'hui, Ruteboeuf reste d'abord connu pour sa Griesche d'Hiver, ou Complainte Ruteboeuf (chantée ici par Léo Ferré) :  

    Que sont mes amis devenus
    Que j'avais de si près tenus
    Et tant aimés
    Ils ont été trop clairsemés
    Je crois le vent les a ôtés
    L'amour est morte
    Ce sont amis que vent me porte
    Et il ventait devant ma porte
    Les emporta

    Avec le temps qu'arbre défeuille
    Quand il ne reste en branche feuille
    Qui n'aille à terre
    Avec pauvreté qui m'atterre
    Qui de partout me fait la guerre
    Au temps d'hiver
    Ne convient pas que vous raconte
    Comment je me suis mis à honte
    En quelle manière

    Que sont mes amis devenus
    Que j'avais de si près tenus
    Et tant aimés
    Ils ont été trop clairsemés
    Je crois le vent les a ôtés
    L'amour est morte
    Le mal ne sait pas seul venir
    Tout ce qui m'était à venir
    M'est advenu

    Pauvre sens et pauvre mémoire
    M'a Dieu donné, le roi de gloire
    Et pauvre rente
    Et droit au cul quand bise vente
    Le vent me vient, le vent m'évente
    L'amour est morte
    Ce sont amis que vent emporte
    Et il ventait devant ma porte
    Les emporta 

     

     

     8 septembre,mistral,lamartine,daudet

     

    1830 : Naissance de Frédéric Mistral

     

    Mistral reçut le Prix Nobel de Littérature 1904.

    Il consacra la totalité de la somme d'argent qui accompagne ce prix à la réalisation de ce qui lui tenait, alors, le plus à coeur : la création du Muséon arlaten tout entier dévoué à la Provence...

    8 septembre,mistral,lamartine,daudet

    Le Mas du Juge, à Maillane, maison natale de Mistral

     

    C'est Lamartine qui l'a lancé, en le faisant connaître à la France entière par son Quarantième Entretien (extraits) :

    "...Je vais vous raconter aujourd'hui une bonne nouvelle ! Un grand poète épique est né. La nature occidentale n'en fait plus, mais la nature méridionale en fait toujours : il y a une vertu dans le soleil. Un vrai poète homérique en ce temps-ci; un poète né, comme les hommes de Deucalion, d'un cailloux de la Crau; un poète primitif dans notre âge de décadence; un poète grec en Avignon; un poète qui crée une langue d'un idiome comme Pétrarque a créé l'italien; un poète qui, d'un patois vulgaire, fait un langage classique d'images ravissant l'imagination et d'harmonie l'imagination et l'oreille; un poète qui joue sur la guimbarde de son village des symphonies de Mozart et de Beethoven; un poète de vingt-cinq ans qui, de son premier jet, laisse couler de sa veine, à flots purs et mélodieux, une épopée agreste où les scènes descriptives de l'Odyssée d'Homère et les scènes innocemment passionnées du Daphnis et Chloé de Longus mêlées aux saintetés et aux tristesses du christianisme, sont chantées avec la grâce de Longus et avec la majestueuse simplicité de l'aveugle de Chio, Est-ce là un miracle ? Eh bien ! ce miracle est dans ma main : que dis-je ? Il est déjà dans ma mémoire, il sera bientôt sur toutes les lèvres de toute la Provence...

    ...Sa physionomie, simple, modeste et douce, n'avait rien de cette tension orgueilleuse des traits ou de cette évaporation des yeux qui caractérise trop souvent ces hommes de vanité, plus que de génie, qu'on appelle les poètes populaires : ce que la nature a donné, on le possède sans prétention et sans jactance. Le jeune provençal était à l'aise dans son talent comme dans ses habits; rien ne le gênait, parce qu'il ne cherchait ni à s'enfler, ni à s'élever plus haut que nature.

    La parfaite convenance, cet instinct de justesse dans toutes les conditions, qui donne aux bergers, comme aux rois, la même dignité et la même grâce d'attitude ou d'accent, gouvernait toute sa personne. Il avait la bienséance de la vérité; il plaisait, il intéressait, il émouvait; on sentait dans sa mâle beauté le fils d'une de ces belles arlésiennes, statues vivantes de la Grèce, qui palpitent dans notre Midi."

    (Alphonse de Lamartine, Cours familier de littérature : un entretien par mois. Tome septième).

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    Léon Daudet en parle ainsi dans Souvenirs et polémiques ( Robert Laffont, collection Bouquins, 1993, p. 36-37) :


    "On l'a comparé souvent à Goethe. Il est lui-même. Ce qui frappe le plus, dans ses propos, c'est l'harmonie des plans, la perspective qu'il a dans l'esprit, comme un descendant d'aïeux qui ont longtemps contemplé le ciel étoilé et la plaine. Tel il était il y a trente ans, et plus loin encore dans mon souvenir, jugeant équitablement les hommes et les choses, célébrant son pays et poursuivant avec méthode son plan de reconstruction provinciale, dont ses amis eux-mêmes n'apercevaient peut-être pas toute l'ampleur. Il est clair, limpide comme la source, mais profond, et sa bonhomie n'exclut pas la méfiance.

    À Paris, on le discutait, on harcelait mon père : "Pourquoi n'écrit-il pas en français, votre Mistral ? Relever la langue d'oc, un patois, c'est une chimère, c'est un rêve... Daudet, votre amitié vous aveugle sur l'importance de ce mouvement." On a vu depuis qu'au contraire l’œuvre de Mistral était et est des moins chimériques, des plus utiles qui soient. Le maître de Maillane est pour la moitié dans la superbe résistance de l’Alsace-Lorraine. C'est aux armes forgées par lui, à ses méthodes, à ses principes qu'ont eu recours les mainteneurs malgré tout de l'âme héroïque de l'Alsace, de ses coutumes, de ses aspirations.

    Poète et le plus doué de tous, Hugo compris, sans comparaison possible, Mistral connaît en outre les secrets de la cité et ceux du verbe, les moyens d'étayer la cité par le verbe et réciproquement. C'est un sorcier, au sens étymologique du mot, un trouveur d'ondes jaillissantes. Il ne frappe pas en vain le roc stérile. Si vous voulez mon avis, Mistral est bien grand, mais l'avenir le fera plus grand encore. Dans les abris posés et chantés par lui, les nations opprimées iront, au cours des âges, chercher un refuge contre la force brutale. Dictionnaire, poèmes, drames, propagande, fêtes commémoratives, costumes, allocutions, exemple de la longue vie passée au même endroit, tombeau, tout cela se complète et défie le temps et l’oubli."

        "Sount mort li béu diséire, mai li vouès an clanti.

          Sount mort li bastisséire, mai lou temple es basti." 

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         Chez lui, à Maillane : "...longue vie passée au même endroit..."                 

        Voir notre album Maîtres et témoins (I) : Frédéric Mistral. (90 photos)       

     

     

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    Voici la suite - et la fin - de notre évocation de Frédéric Mistral, à travers sa poésie, que nous avons décliné en trois temps.

    Aujourd'hui, 8 septembre, date anniversaire de sa naissance, nous achevons la lecture commencée le 29 février (attribution du Prix Nobel de littérature), et poursuivie le 25 mars, jour anniversaire de sa mort.

    Et nous évoquons cette poésie au moyen de deux poèmes (ou extraits) à chaque fois, soit au total six textes majeurs, qui permettent de se faire une première idée du fond de ses inspirations

    1. Le 29 février, nous avons lu un poème que l'on qualifiera de chrétien, tant est forte et sous-jacente partout chez Mistral cette source d'inspiration : La coumunioun di sant (La communion des saints) de 1858. Puis l'enracinement dans l'Histoire provençale et dans cette Provence charnelle, à travers ses paysages et ses villes. L'amour profond pour sa terre transparaît évidemment lui aussi partout chez Mistral: "...Se quauque rèi, pèr escasènço..." (Si Clémence était reine..., Mireille, Chant II)

    2. Le 25 mars, nous avons lu un extrait d'un poème de combat, pourrait-on dire : I troubaire catalan (Aux troubadours catalans, partie I) de 1861. Puis, un poème peut-être un peu plus politique : A la raço latino (Ôde à la race latine) de 1878.

    3. Enfin, aujourd'hui - 8 septembre - nous allons voir le Mistral virgilien et homérique, paysan au sens fort et grand du terme, de l'Invocation de Miréio (Mireille). Et, pour finir - épique et historique - l'Invocation de Calendau (Calendal).

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     Illustration de Gustave Fayet, pour Mireille
     
     
     
     
        V : L'invocation de Mirèio. Le Mistral Virgilien et Homérique. 
     
     
     
    Cante uno chato de Prouvènço.                  Je chante une fille de Provence.
    Dins lis amour de sa jouvènço,                   Dans les amours de sa jeunesse,
    A travès de la Crau, vers la mar, dins li bla         À travers la Crau, vers la                                                                                   mer, dans les blés,
    Umble escoulan dòu grand Oumèro,         Humble écolier du grand Homère,
    Iéu la vole segui. Coumo èro                     Je veux la suivre. Comme c'était
    Rèn qu'uno chato de la terro,                    Seulement une fille de la glèbe,
    En foro de la Crau se n'es gaire parla.      En dehors de la Crau il s'en est                                                                          peu parlé.
     
     
    Emai soun front noun lusiguèsse            Bien que son front ne resplendît
  • Le pari d'un Islam français, par Annie Laurent

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    (article paru dans La Nef n° 345- Mars 2022)

     

    Le FORIF (Forum de l’Islam de France), créé en février dernier, prend la suite du CFCM comme interlocuteur officiel du gouvernement pour tout ce qui touche à l’islam en France.

    Explications.

     

    Le 5 février dernier, la création d’un Forum de l’islam de France (FORIF) a été entérinée officiellement par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, lors de la clôtured’une réunion constitutive de cet organisme qui s’était déroulée à Paris en présence de 80 participants musulmans venus de toute la France.

    Cette nouvelle structure remplace le Conseil Français du Culte musulman (CFCM), créé en 2003 par une démarche volontariste de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, au terme d’un processus complexe entamé dès 1989 sous la présidence de François Mitterrand, puis repris sous diverses dénominations et compétences par ses successeurs. Par ces initiatives, l’État voulait rompre avec sa pratique antérieure consistant à déléguer la gestion du culte musulman aux pays d’origine des fidèles de l’islam présents dans l’Hexagone. Il lui fallait donc un interlocuteur officiel bénéficiant d’une reconnaissance publique. Mais, devant l’incapacité des musulmans à se doter eux-mêmes d’une instance représentative adaptée au contexte français, il crut bon d’intervenir directement, confiant cette tâche au ministère de l’Intérieur tout en prenant soin de préciser qu’il n’agissait qu’en qualité de « facilitateur » puisque la loi de 1905 lui interdit de se mêler de l’organisation et de la gestion d’une religion.

    Le CFCM était donc censé corriger les échecs des diverses instances qui l’avaient précédé. Son Conseil national, doté d’un président élu et d’un bureau comprenant 9 fédérations de mosquées, était chargé de définir la ligne générale de la pratique du culte, de le représenter auprès des pouvoirs publics, de développer le dialogue avec toutes les composantes de la société civile et avec les autres religions (art. 2 des statuts); ses vingt-cinq conseils régionaux avaient pour fonction de négocier avec les préfets les questions relatives à l’organisation pratique du culte.

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    Cet organisme n’a cependant jamais réussi à s’imposer comme une autorité religieuse indépendante. Le renouvellement de ses cadres, tous les deux ans, s’opérait certes par le vote des délégués représentant les mosquées adhérentes, mais le mode démocratique de l’élection n’excluait pas les interventions de l’Algérie, du Maroc et de la Turquie – à travers leurs consulats – pour orienter leur choix. D’autres faiblesses obéraient sa légitimité : rivalités internes, orientations divergentes, incapacité à contrer l’islamisme, et même refus d’une partie des musulmans d’être rattachés à une institution confessionnelle. En 2020, sur un total de 2502 mosquées recensées en France, seules 1015 étaient représentées au CFCM, tandis que 135 relevaient du salafisme (1).

    Pour Emmanuel Macron, cette situation n’était plus tenable. Il s’employa alors à réorganiser « l’islam de France », consacrant à cette question le long discours qu’il prononça aux Mureaux (Yvelines) le 2 octobre 2020, en commençant par poser le problème. « Ce à quoi nous devons nous attaquer, c’est le séparatisme islamiste. C’est un projet conscient, théorisé, politico-religieux ». Il fallait donc, dit-il, inscrire pleinement l’islam dans le contexte républicain, de manière à empêcher « l’islamisme radical » de « créer un ordre parallèle, ériger d’autres valeurs, développer une autre organisation de la société, séparatiste dans un premier temps, mais dont le but final est de prendre le contrôle, complet celui-ci ».

    Après avoir énuméré les méthodes utilisées par les promoteurs de ce programme (déscolarisation des enfants, pratiques sportives et culturelles communautarisées reposant sur un endoctrinement qui nie l’égalité, refuse la liberté de conscience et le droit au blasphème, banalise la violence et encourage le djihad des jeunes), le chef de l’État précisait : « Ce qui est aujourd’hui notre défi c’est de lutter contre la dérive de certains au nom de la religion en veillant à ce que ne soient pas visés ceux qui veulent croire en l’islam et sont pleinement citoyens de notre République ». Face à ce qui, selon lui, relevait plus de l’idéologie que de la religion, il annonçait un arsenal législatif « très ambitieux ». Ce sera la loi du 24 août 2021 confortant « le respect des principes républicains ». Outre des pratiques liées à l’islam, telles que la délivrance de certificats de virginité, cette loi impose des obligations d’ordre général : toute association demandant des subventions publiques doit signer un « contrat d’engagement républicain » ; celles qui gèrent des lieux de cultes et les écoles privées hors contrat sont soumises au contrôle des préfets ; l’école à la maison sera interdite à la rentrée 2022, sauf dérogations.

    Macron ajoutait vouloir en finir avec la passivité et les lâchetés françaises qui avaient jusque-là permis une telle évolution en laissant se constituer un « islamconsulaire » placé sous la tutelle religieuse et politique de pays étrangers. Il dénonçait aussi l’influence « pernicieuse » du financement des activités cultuelles par des fondations privées ou étatiques porteuses de « messages de rupture » (wahabisme, salafisme, Frères musulmans). La réaction de l’islamisme aux propos présidentiels ne tarda pas. Deux semaines après, à Conflans-Sainte-Honorine, ville du même département, la République était tragiquement défiée par le meurtre de Samuel Paty.

    Dans un premier temps, le CFCM demeura l’interlocuteur de l’État. A la demande de Macron, il fut d’abord question de la signature entre les deux partenaires d’un contrat comportant une « Charte des valeurs républicaines» : le CFCM s’y engagerait à mettre un terme à toute pratique de l’islam politique, à lever toutes les ambiguïtés entretenues en son sein par certains de ses membres et à refuser toute ingérence étrangère, notamment par le biais des financements. Ces exigences devaient se retrouver dans un Conseil national des imams (CNI) alors en cours d’élaboration. Doté de prérogatives telles que la formation et la labellisation officielle des imams (y compris les aumôniers dans les armées, les prisons et les hôpitaux), avec possibilité de radiation en cas de manquement aux principes de la Charte, le CNI devait renoncer au recours à des prédicateurs étrangers, mesure annoncée par Macron pour 2024 (2). L’objectif était de rendre le culte musulman compatible avec la laïcité. Or, aucun de ces deux projets n’apu aboutir, suite à des désaccords internes relatifs au contenu de la Charte et à des contestations extérieures, certains imams refusant l’institutionnalisation de l’imamat et la tutelle du CFCM)(3).

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    Le 12 décembre 2021, las de ces difficultés, Gérald Darmanin a décrété la « mort » du CFCM, indiquant que « pour les pouvoirs publics, il n’existe plus, n’est plus l’interlocuteur de la République » (4). Son président actuel, Mohammed Moussaoui, a reconnu cet échec, envisageant l’autodissolution du CFCM en vue d’une éventuelle refonte de l’institution sous un autre nom.

    La responsabilité d’organiser et de gérer le culte musulman en collaboration avec le gouvernement incombe donc désormais au FORIF. Cette structure souple, non centralisée, est le fruit de plusieurs mois de dialogues dans les départements. Ses membres (responsables d’associations locales et nationales, personnalités reconnues pour leur indépendance et leur réflexion) ne sont pas élus ; ils ont été choisis par le ministère de l’Intérieur sur proposition des préfets. Il s’agit d’une instance consultative appelée à se réunir une fois par an pour définir les solutions à apporter aux principaux problèmes en suspens. Parmi ceux-ci, la formation des imams dans un cadre français et le contrôle public des financements étrangers sont les plus épineux. La perspective d’une nouvelle forme de représentation nationale n’est cependant pas écartée et elle devra un jour s’imposer, estime Kamel Kabtane, recteur de la grande mosquée de Lyon, conscient des faiblesses actuelles.

    Lors de la rencontre du 5 février, Darmanin s’est voulu optimiste. « Il n’existe nul motif pour penser que l’islam ne puisse pas trouver sa place, comme toutes les autres religions, au sein de la République française. Oui, l’islam est une religion française, une religion comme les autres », a-t-il déclaré (5). Pour l’heure, la fermeture de mosquées et d’écoles salafistes, ainsi que la dissolution d’associations dangereuses (6), n’ont pas empêché la culture islamiste de s’imposer dans un nombre croissant de villes, comme l’a montré le reportage Zone interdite, réalisé à Roubaix et diffusé par la chaîne M 6 le 23 janvier dernier, ce qui a valu à sa présentatrice, Ophélie Meunier, des menaces de mort proférées par des islamistes sans que l’État ne s’en indigne.

    Annie Laurent

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    ________

    • Sur ces diverses étapes, cf. A. Laurent, « Le pari d’un islam républicain », Petite Feuille verte n° 76, 2 décembre 2020.
    • 301 imams étrangers (151 Turcs, 120 Algériens et 30 Marocains) officient actuellement en France.
    • A. Laurent, « Le Conseil national des imams », Petite Feuille verte n° 77, 6 janvier 2021.
    • La Croix, 15 décembre 2021.
    • 7 février 2022.
    •  7 janvier 2022.
  • L'aventure France en feuilleton : Aujourd'hui (159), Le martyre de la cathédrale de Reims...

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    Illustration : emplacement des cinq batteries allemandes bombardant la cathédrale : Forts de Brimont et de Fresnes, villages de Vitry-lès-Reims et de Berru, Fort de la Pompelle...

     

    18 septembre 1914, "...vers huit heures quinze..." : début du martyre de la cathédrale de Reims.

    1. De Jacques Bainville, Journal (Inédit, 1914, page 94) :


    "...En s'acharnant contre la cathédrale de Reims, les Allemands savent bien ce qu'ils font. Nul peuple n'a plus qu'eux l'esprit historique et le sens de la symbolique historique. Détruire la cathédrale où étaient sacrés les rois de France, c'est une manifestation de même nature que la proclamation de l'Empire allemand dans le palais de Louis XIV à Versailles..."

    2. D'Anatole France (La Guerre Sociale, 22 septembre 1914) :


    "Les barbares ont incendié, en invoquant le dieu des chrétiens, un des plus magnifiques monuments de la chrétienté. Ils se sont ainsi couverts d’une infamie immortelle, et le nom allemand est devenu exécrable à tout l’univers pensant. Qui donc, sous le ciel, peut douter maintenant qu’ils sont les barbares et que nous combattons pour l’humanité ?..."

     

    3. De la revue "L'Illustration", numéro 3.734, 26 septembre 1914 : Bombardement de la Cathédrale de Reims, par E. Ashmead Bartlett - Récit d'un Témoin : Un des Plus Grands Crimes de l'Histoire

    Un journaliste anglais bien connu, M. E. Ashmead Bartlett, correspondant de guerre du Daily Telegraph, et trois de ses confrères américains, Richard Harding Davis, écrivain réputé, le capitaine Granville Fortescue, ancien officier de l'armée des Etats-Unis, et M. W. Gerald Dare Morgan, - ont assisté au bombardement de la cathédrale de Reims par l'artillerie allemande et à l'incendie suivi de destruction partielle qui en a été la conséquence.

    Ils ont rapporté à L'Illustration une série de photographies prises à la première heure, quand les vénérables pierres gothiques étaient encore chaudes, et M. E. Ashmead Bartlett, qui fut déjà plusieurs fois pour nous un précieux collaborateur, a résumé ici, pour nos lecteurs, son témoignage et ses impressions :

    Voici huit jours, Notre-Dame de Reims était l'une des plus fameuses et des plus belles cathédrales du monde. Avec ses innombrables sculptures, dont l'abondance n'étouffait pas, cependant, la grandeur des lignes architecturales, la façade occidentale était une merveille unique, et l'on pouvait en dire autant des sculptures qui ornaient les parois intérieures de cette même façade. Les vitraux si admirés des touristes, et principalement ceux de la grande rose de l'Ouest, entre les deux tours, où souriait, au milieu d'une cour d'anges, de rois et de patriarches, la Vierge, patronne de la basilique, comptaient parmi les plus anciens dans les églises de France.
    En ce moment, il ne demeure de cette merveille que le gros œuvre de pierre, les murailles audacieuses et la voûte qui abrite l'église. De l'admirable fouillis de statues qui animaient l'extérieur de la tour du Nord-Ouest, subsistent seulement des tronçons, des fragments; et si quelques-unes des sculptures ont échappé à la destruction, elles ont été à ce point endommagées par l'incendie qu'elles ne sont plus réparables.

    Parmi celles qui ornaient la tour du Sud-Ouest, on en distingue beaucoup qui sont sorties presque indemnes du désastre; mais d'autres se sont écroulées ou sont gravement endommagées. Quant aux belles images qui encadraient les portes, à l'intérieur de la basilique, il n'en reste qu'un amas de pierres calcinées.


    Dans le chœur, les stalles et autres boiseries, y compris la chaire du cardinal, ont été consumées. Sur les bas-côtés, les vitraux des fenêtres supérieures et inférieures ont été presque complètement ravagés; les verrières de ces chefs-d'œuvre, dont plusieurs dataient du treizième siècle, gisent sur le sol à l'état de menus fragments. Tout en respectant son cadre de pierre, la chaleur de l'incendie a endommagé sérieusement la célèbre rosace. Les toits de pierre des bas-côtés sont entièrement détruits. Enfin, des contreforts ont beaucoup souffert. L'un d'eux, sur le côté Nord-Est, a été brisé net par un obus.


    Telle est, exposée en ses grandes lignes, l'œuvre de destruction accomplie par l'armée d'un empereur qui aimait à s'intituler l'apôtre de la civilisation, et qui n'ouvrait jamais la bouche sans traiter l'Etre suprême comme son associé. La destruction de Reims occupera certainement une place des plus honorables dans l'histoire des grands crimes.

    Une question se pose à l'esprit : comment s'est accompli ce forfait et comment ses auteurs chercheront-ils à le justifier ? Je commencerai par résumer la genèse même de l'acte.
    Le 4 septembre, les Allemands pénétraient dans Reims après un premier bombardement qui avait détruit de nombreuses maisons et tué soixante habitants. Cet acte de rigueur provenait d'un malentendu : deux parlementaires allemands, chargés de négocier la reddition de la ville, n'étaient pas revenus en temps voulu. Toutefois, la cathédrale avait été épargnée.
    Le 12 septembre, durant la nuit, les troupes françaises reprirent possession de la ville. Le lendemain, elles installèrent un projecteur sur la basilique, mais l'enlevèrent presque aussitôt, après que les deux états-majors eurent convenu qu'elle ne servirait d'aucune façon aux opérations militaires. Le 37, les batteries allemandes placées près de Nogent-l'Abbesse commencèrent à bombarder Reims, et, les obus tombant dans les quartiers voisins de la cathédrale, on se prit à penser que leurs pointeurs l'avaient prise pour cible. De nombreux habitants furent tués; cependant, l'édifice ne fut que légèrement endommagé. Pour en assurer la protection, on transporta à l'intérieur 63 blessés allemands, qui furent installés sur des couches de paille dans la nef; des drapeaux de la Croix-Rouge furent arborés sur chaque tour. En outre, ces dispositions furent portées à la connaissance du commandant ennemi.
    Néanmoins, le bombardement recommença le 18, vers 8 h. 15. Cette fois, la cathédrale fut atteinte par d'énormes obus de 220, qui endommagèrent gravement les sculptures extérieures et les fenêtres inférieures du transept principal. Les verrières, datant des treizième et quatorzième siècles, volèrent en éclats. Un obus brisa une gargouille dont les débris, pénétrant par une fenêtre, tuèrent un gendarme français, en blessèrent un autre, et achevèrent deux des prisonniers blessés.
    Quand je pénétrai, l'après-midi de ce même jour, dans la cathédrale, la tristesse et la désolation de la scène m'impressionnèrent. En travers du portail gisait un vieux mendiant qui, depuis bien des années, implorait à cette même place la charité des fidèles; comme indifférent à l'effroyable drame qui se déroulait autour de lui, il était demeuré là, à demi enseveli sous les éclats de pierre et de verre, mais attendant toujours l'aumône. Le sol était couvert de débris informes; sur un tas de gravats, brillait un lustre dont la chaîne avait été coupée par un éclat d'obus. Vers le fond, les blessés allemands se blottissaient derrière les énormes piliers pour échapper à la pluie de projectiles. Une flaque de sang précisait l'endroit où le pauvre gendarme avait trouvé la mort, et, tout près, deux cadavres d'Allemands étaient étendus sur la paille. Chaque fois qu'un obus éclatait dehors, les prisonniers frissonnaient de peur, sous la pluie de débris qui tombaient du toit ou des fenêtres.
    Cette journée de vendredi s'était terminée sur un furieux combat d'artillerie. Mais, le lendemain, il parut que les Allemands étaient soudain en proie à une de ces fièvres de vandalisme qui avaient transformé Louvain en un monceau de décombres. Durant toute la matinée, leur tir s'acharna sur la cathédrale. Ce fut alors que souffrit principalement le côté Sud, près duquel sont situés le palais de l'archevêque et la fameuse salle du Tau, où avait lieu, lors du sacre des rois de France, le festin royal. Ces édifices furent complètement détruits. Plusieurs obus atteignirent la cathédrale; s'ils n'entamèrent pas les murailles, ils en détachèrent d'énormes fragments de maçonnerie. Un projectile s'abattit sur l'encoignure Nord-Est, brisant un contrefort et incendiant les poutres du toit. On peut s'étonner que ce monstrueux obus n'ait pas détruit l'édifice de fond en comble. La raison en est qu'il avait été tiré à une distance de 11 kilomètres et sous un grand angle; la force de pénétration des projectiles ainsi lancés était très réduite au moment où ils atteignaient leur but; ils arrivaient là morts, pour ainsi dire, dangereux seulement par leur explosion.
    Pendant ce bombardement, les blessés allemands étaient devenus fous de peur. Les plus valides se traînaient sur les marches des escaliers pour se réfugier dans les tours.
    Nous abordons maintenant la grande tragédie, celle dont les résultats allaient être irrémédiables. Depuis mai 1913, la tour du Nord-Ouest était en réparation, et des échafaudages l'escaladaient presque jusqu'à son sommet. Vers 4 heures, samedi soir, ces charpentes prirent feu. D'après M. l'abbé Chinot, qui se trouvait alors dans l'intérieur avec l'archevêque, le cardinal Luçon, qui, de retour du Conclave, avait regagné Reims sitôt qu'il l'avait pu, un obus serait tombé en plein sur le haut de l'échafaudage. L'incendie qui éclata instantanément aurait pu être éteint; malheureusement, le poste de pompiers le plus proche avait été détruit par un obus. Les flammes se répandirent dans le fouillis de poutres avec une rapidité incroyable; en quelques minutes, elles l'enveloppèrent d'une nappe de feu et gagnèrent les fermes de chêne des toits, qui s'enflammèrent comme des allumettes. La scène présenta un aspect d'une horreur sublime.
    A l'intérieur, le spectacle était peut-être encore plus impressionnant. Affolés, les Allemands cherchaient une issue; mais le plomb fondu qui tombait de la toiture avait incendié la paille. L'archevêque et l'abbé Chinot montrèrent le chemin aux plus valides et entraînèrent les autres vers la porte du Nord. Là, s'était rassemblée une foule qu'exaspérait l'œuvre de destruction, et les deux ecclésiastiques eurent fort à faire pour sauver la vie des prisonniers. La plupart purent être transportés dans une imprimerie voisine; mais d'autres, qui tentaient de se réfugier dans le palais de l'archevêque, furent surpris par les flammes, quelques-uns même furent assaillis par la foule indignée. On estima le nombre de ceux qui périrent à une douzaine, y compris un officier. Les autres durent leur salut au noble dévouement du cardinal et de l'abbé Chinot.
    C'est en compagnie de ce courageux prêtre que, dimanche après-midi, je pus examiner les ruines et constater l'immensité du désastre. En maints endroits, la pierre est à ce point calcinée qu'on peut, sans effort, en détacher de gros fragments. Dans la tour du Nord, une batterie de grandes cloches a complètement fondu, tandis qu'une batterie supérieure est restée intacte.
    La structure de la cathédrale n'a pas trop souffert, et je ne crois pas qu'il y ait à redouter la chute de la voûte de pierre. Certes, ce n'est pas la faute du kaiser si les murailles ne se sont pas écroulées; nous n'en rendrons grâce qu'à la distance qui séparait ses canons de cette merveille historique. Un fait certain, c'est que l'aire de destruction dans la cité rémoise s'étend autour de la cathédrale dans un rayon de 500 mètres au Nord-Est et au Sud-Ouest, et un rayon à peine moindre à l'Est et à l'Ouest. Il apparaît évident que tous les obus tombés dans cet espace étaient tirés sur la cathédrale, la seule cible que pouvaient distinguer nettement les artilleurs allemands.
    Les Vandales modernes ne peuvent apporter à leur acte ni justification ni excuse. Regrettons que l'arsenal des lois humaines n'ait pas prévu un châtiment proportionné à un tel crime. A peine pouvons-nous souhaiter que le Gilded Hun, le « Hun doré », comme nous disons en Angleterre, sente un jour s'éveiller ses remords, sous l'exécration du monde civilisé.

    E. Ashmead Bartlett

     

    Pour retrouver l'intégralité du feuilleton, cliquez sur le lien suivant : L'aventure France racontée par les Cartes...

     

    lafautearousseau

  • Éphéméride du 2 février

    Georges Mathieu, "Les Capétiens partout" (1954, au Centre Georges Pompidou)

     

     

    13 mars,germain pilon,renaissance,francois premier,henri ii,saint denis,jean goujonIl y a treize jours, dans l’année, pendant lesquels il ne s’est pas passé grand-chose, ou bien pour lesquels les rares événements de ces journées ont été traités à une autre occasion (et plusieurs fois pour certains), à d'autres dates, sous une autre "entrée".

    Nous en profiterons donc, dans notre évocation politico/historico/culturelle de notre Histoire, de nos Racines, pour donner un tour plus civilisationnel  à notre balade dans le temps; et nous évoquerons, ces jours-là, des faits plus généraux, qui ne se sont pas produits sur un seul jour (comme une naissance ou une bataille) mais qui recouvrent une période plus longue.

    Ces jours creux seront donc prétexte à autant d'Évocations :  

    1. Essai de bilan des Capétiens, par Michel Mourre (2 février)

    2. Splendeur et décadence : Les diamants de la Couronne... Ou : comment la Troisième République naissante, par haine du passé national, juste après avoir fait démolir les Tuileries (1883) dispersa les Joyaux de la Couronne (1887), amputant ainsi volontairement la France de deux pans majeurs de son Histoire (12 février)

     3. Les deux hauts lieux indissociables de la Monarchie française : la cathédrale Notre-Dame de Reims, cathédrale du Sacre, et la Basilique de Saint-Denis, nécropole royale. I : La cathédrale de Reims et la cérémonie du sacre du roi de France (15 février)

     4. Les deux hauts lieux indissociables de la Monarchie française : la cathédrale Notre-Dame de Reims, cathédrale du Sacre, et la Basilique de Saint-Denis, nécropole royale. II : La basilique de Saint-Denis, nécropole royale (19 février)

     5. Quand Le Nôtre envoyait à la France et au monde le message grandiose du Jardin à la Française (13 mars)

     6. Quand Massalia, la plus ancienne ville de France, rayonnait sur toute la Gaule et, préparant la voie à Rome, inventait avec les Celtes, les bases de ce qui deviendrait, un jour, la France (11 avril)

     7. Quand Louis XIV a fait de Versailles un triple poème : humaniste, politique et chrétien (28 avril)

     8. Les Chambiges, père et fils (Martin et Pierre), constructeurs de cathédrales, élèvent à Beauvais (cathédrale Saint-Pierre) le choeur ogival le plus haut du monde : 46 mètres 77 ! (4 mai)

     9. Quand la cathédrale Saint-Pierre de Beauvais a reçu, au XIIIème siècle, son extraordinaire vitrail du Miracle de Théophile (28 mai)

     10.  Quand Chenonceau, le Château des Dames, à reçu la visite de Louis XIV, âgé de douze ans, le 14 Juillet 1650 (26 juillet)

     11. Le Mont Saint Michel (11 août)

     12. Quand François premier a lancé le chantier de Chambord (29 septembre)

     13. Quand Léonard de Vinci s'est installé au Clos Lucé (27 octobre) 

     

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    Aujourd'hui, et puisque nous avons évoqué hier la fin des "Capétiens directs", (voir l'Éphéméride du 1er février) voici un Essai de Bilan des Capétiens, proposé par Michel Mourre, dans son incontournable Dictionnaire Encyclopédique d'Histoire. 

    Cet essai pourra être accompagné de la consultation des 18 cartes consacrées aux "Capétiens directs", dans notre album L'aventure France racontée par les cartes : de la première, "La situation au début du règne d'Hugues Capet", à la dernière "La France, de 1180 à 1328"

     

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    De Michel Mourre, Dictionnaire Encyclopédique d'Histoire, pages 748 à 750 :

    "...La réussite des Capétiens, bien étonnante si l'on songe au minuscule domaine d'Hugues Capet, entouré de puissants féodaux, s'explique par plusieurs raisons...

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    Les Capétiens créèrent une dynastie héréditaire. L'élection mit longtemps à disparaître mais elle prit assez vite la forme d'un consentement des grands. Par un heureux hasard, les Capétiens, de 987 à 1316, eurent toujours un fils pour leur succéder à leur mort. Jusqu'à Philippe Auguste, ils désignèrent et firent couronner l'héritier de leur vivant. La disparition de cette coutume au début du XIIIème siècle montre que le principe de l'hérédité monarchique était désormais incontesté.

    La plupart des Capétiens directs eurent aussi la chance de régner longtemps (Robert II, trente-cinq ans; Henri 1er, vingt-neuf ans; Philippe 1er, quarante-huit ans; Philippe Auguste, quarante-trois ans; Saint Louis, quarante-quatre ans; Philippe le Bel, vingt-neuf ans).

    À cette longévité personnelle s'ajoutait un sens profond de la tradition, un sentiment de solidarité étroite avec leurs prédécesseurs, comme si "la dynastie n'était pas seulement une suite de princes issus les uns des autres, mais une suite de volontés ne formant qu'une volonté" (G. Dupont-Ferrier).

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    Héréditaire, la succession capétienne fut en outre sévèrement monarchique : il n'y eut plus désormais qu'un seul roi, alors qu'on avait connu sous les Mérovingiens des tétrarchies (les fils et les petits-fils de Clovis), sous les Carolingiens des triarchies (Pépin le Bref et ses deux fils), et des dyarchies (Carloman et Charlemagne, Louis III et Carloman II, Eudes et Charles le Simple). 

    Un autre caractère de la succession capétienne, la masculinité, triompha en 1316, à la mort de Jean 1er le Posthume, ainsi qu'en 1328, à l'extinction des Capétiens directs, suivie par l'avènement de Philippe VI de Valois, issu de la branche cadette.

    Imbus de l'esprit de tradition, les Capétiens se distinguèrent pour la plupart par un réalisme un peu étroit mais fécond. Alors que les Plantagenêts tentèrent de construire un État franco-anglais sans avoir sûrement établi leur autorité en Angleterre même; alors que les Hohenstauffen, aux prises avec une puissante féodalité allemande, dispensèrent le meilleur de leurs forces en Italie, les Capétiens, tels des paysans arrondissant peu à peu leur champ, se bornèrent volontairement à l'idée simple de faire la France, d'être maîtres chez eux, en se gardant de toute conquête excentrique, en participant même très peu aux Croisades.  

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    Abbaye de Royaumont
     

    Leur grand souci fut d'affermir et d'élargir leur puissance foncière initiale, le domaine royal, par tous les moyens : mariages, accords divers, héritages, achats, conquêtes. À l'avènement d'Hugues Capet, ce domaine royal, fait d'éléments disparates, éparpillés entre Senlis et Compiègne au nord et la région d'Orléans au sud, avait une superficie totale qui ne dépassait pas celle de l'un de nos départements. Il était trois et cinq fois plus petit que, respectivement, les duchés vassaux de Normandie et de Guyenne. En 1328, seules la Flandre, la Bretagne, l'Aquitaine et la Bourgogne se trouvaient encore, à l'intérieur du royaume, en dehors du domaine royal.

    Tirant une force particulière du sacre, s'appuyant sur l'Église, les Capétiens exercèrent à fond leurs prérogatives de suzerain pour étendre leur autorité au détriment des féodaux. Contre ces derniers, ils scellèrent, dès le Xème siècle, l'alliance étroite du roi et du peuple, qui se manifesta avec éclat lors de la victoire de Bouvines, en 1214.

    Sans invoquer un idéal inaccessible, comme les souverains du Saint Empire, les Capétiens surent s'imposer avec une efficacité patiente, quotidienne, comme les champions intransigeants de l'ordre et de la justice. Ils assirent également leur popularité sur la fierté nationale, sur leur refus radical d'admettre, au temporel, aucune autorité supérieure à la leur, que ce fut celle de l'empereur - car ils se proclamaient successeurs directs de Charlemagne et "empereurs dans leur royaume" - ou celle du pape - car leur sacre leur conférait le pouvoir directement de Dieu seul. Ainsi l'absolutisme demeura-t-il toujours dans le droit fil de la pensée capétienne."   

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    Les fonts baptismaux de Poissy, où fut baptisé Saint Louis : c'est la raison pour laquelle il signait volontiers "Louis de Poissy"

     

     

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    1861 : Menton et Roquebrune deviennent françaises...

     

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    Par le Traité de Turin du 24 mars 1860, et après consultation populaire, la Savoie et Nice avaient déjà été rattachés à la France.

    Menton et Roquebrune, qui appartenaient auparavant à la Principauté de Monaco,  étaient en conflit avec le Prince de l'époque, Charles III. Elles s'étaient proclamées "villes libres" et, après leur vote en faveur de la France, furent rattachées au nouveau département des Alpes-Maritimes.

    Le Prince Charles III protesta vigoureusement auprès de la France pour son ingérence, mais devant les résultats de la consultation populaire (883 voix pour le rattachement à la France contre 54), le Prince préféra négocier avec l’empereur Napoléon III la cession de ses Communes (que son ancêtre Charles 1er avait achetées en 1346 et 1355).

    Le Traité du 2 février 1861 réglait définitivement cette question par la vente à la France de Menton et Roquebrune. Cavour et Napoléon III souhaitaient régler au plus vite tous les sujets annexes de l'unification italienne pour le premier, et de la réunion de Nice et de la Savoie pour le second : aussi poussèrent-ils à la roue, d'une façon efficace et qui ne laissait place à aucun obstacle, à cet agrandissement supplémentaire de la France. La Principauté de Monaco, elle, perdait les 4/5èmes de son territoire, et se trouvait réduite à une superficie de 150 hectares !...

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    Blason de Menton :

    "parti : au premier d'azur au saint Michel d'or terrassant un démon du même ; au deuxième d'argent à un citronnier au naturel posé sur un mont du même, baigné par une mer d'azur ondée d'argent, au comble d'azur chargé de trois étoiles d'argent, au franc-quartier sénestre de gueules chargé d'une lettre capitale F d'or"

     

     

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    2 fevrier,capetiens,mourre,merovingiens,carolingiens,hugues capet,philippe auguste,plantagenets,croisades,bouvines,charlemagne,saint louis,senlisCette Éphéméride vous a plu ? En cliquant simplement sur le lien suivant, vous pourrez consulter, en permanence :

    la Table des Matières des 366 jours de l'année (avec le 29 février des années bissextiles...),

    l'album L'Aventure France racontée par les cartes (211 photos),

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    et découvrir pourquoi et dans quels buts lafautearousseau vous propose ses Éphémérides  :

  • Éphéméride du 15 février

    30 juillet,sacre des rois de france,couronnement,reims,cathédrale du sacre,roi de france,sacre de reims,regalia,saint denis,louvre,sainte ampoule,galerie d'apollonIl y a treize jours, dans l’année, pendant lesquels il ne s’est pas passé grand-chose, ou bien pour lesquels les rares événements de ces journées ont été traités à une autre occasion (et plusieurs fois pour certains), à d'autres dates, sous une autre "entrée" .

    Nous en profiterons donc, dans notre évocation politico/historico/culturelle de notre Histoire, de nos Racines, pour donner un tour plus civilisationnel  à notre balade dans le temps; et nous évoquerons, ces jours-là, des faits plus généraux, qui ne se sont pas produits sur un seul jour (comme une naissance ou une bataille) mais qui recouvrent une période plus longue.

    Ces jours creux seront donc prétexte à autant d'Évocations :  

    1. Essai de bilan des Capétiens, par Michel Mourre (2 février)

    • 2. Splendeur et décadence : Les diamants de la Couronne... Ou : comment la Troisième République naissante, par haine du passé national, juste après avoir fait démolir les Tuileries (1883) dispersa les Joyaux de la Couronne (1887), amputant ainsi volontairement la France de deux pans majeurs de son Histoire (12 février)

     3. Les deux hauts lieux indissociables de la Monarchie française : la cathédrale Notre-Dame de Reims, cathédrale du Sacre, et la Basilique de Saint-Denis, nécropole royale. I : La cathédrale de Reims et la cérémonie du sacre du roi de France (15 février)

    • 4. Les deux hauts lieux indissociables de la Monarchie française : la cathédrale Notre-Dame de Reims, cathédrale du Sacre, et la Basilique de Saint-Denis, nécropole royale. II : La basilique de Saint-Denis, nécropole royale (19 février)

     5. Quand Le Nôtre envoyait à la France et au monde le message grandiose du Jardin à la Française (13 mars)

     6. Quand Massalia, la plus ancienne ville de France, rayonnait sur toute la Gaule et, préparant la voie à Rome, inventait avec les Celtes, les bases de ce qui deviendrait, un jour, la France (11 avril)

     7. Quand Louis XIV a fait de Versailles un triple poème : humaniste, politique et chrétien (28 avril)

     8. Les Chambiges, père et fils (Martin et Pierre), constructeurs de cathédrales, élèvent à Beauvais (cathédrale Saint-Pierre) le choeur ogival le plus haut du monde : 46 mètres 77 ! (4 mai)

     9. Quand la cathédrale Saint-Pierre de Beauvais a reçu, au XIIIème siècle, son extraordinaire vitrail du Miracle de Théophile (28 mai)

     10.  Quand Chenonceau, le Château des Dames, à reçu la visite de Louis XIV, âgé de douze ans, le 14 Juillet 1650 (26 juillet)

     11. Le Mont Saint Michel (11 août)

     12. Quand François premier a lancé le chantier de Chambord (29 septembre)

     13. Quand Léonard de Vinci s'est installé au Clos Lucé (27 octobre)  

     

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    Aujourd'hui : 

    Les deux hauts lieux indissociables de la Monarchie française : la cathédrale Notre-Dame de Reims, cathédrale du Sacre, et la Basilique de Saint-Denis, nécropole royale.

    I : La cathédrale de Reims et la cérémonie du sacre du roi de France... (suivant : Éphéméride du 19  février, Basilique de Saint-Denis) 

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    Voir aussi notre album (40 photos) : Reims, cathédrale du Sacre

    I : La cathédrale

     

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    • http://catreims.free.fr/ : très complet, une foule de renvois (sur les sacres, les autres cathédrales etc..) 

    • http://cathedrale.maisons-champagne.com/ : très beau, 500 photos... 

    • http://www.romanes.com/Reims/ : photos de très grande qualité, des liens vers de nombreux autres hauts lieux...

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    Si Clovis, fondateur de la première dynastie royale (les Mérovingiens), reçut le baptême à Reims, il ne fut pas "sacré" dans la cathédrale. Le premier roi de France "sacré" fut Pépin le Bref, fondateur de la deuxième dynastie royale, celle des Carolingiens (voir l'Éphéméride du 27 juillet), qui ne fut pas sacré à Reims, mais à Saint-Denis. Pépin le Bref est le père de Charlemagne, et ce sera le fils de celui-ci, Louis 1er, qui sera le premier roi sacré à Reims.

    Dans la cathédrale actuelle, de Louis VIII à Charles X, plus de trente rois de France furent sacrés. Il n'y eut que six exceptions :

    Hugues Capet (sacré à Noyon, là où l'avait été Charlemagne, pour manifester qu'il s'inscrivait dans la lignée de la dynastie Carolingienne).

     Son fils Robert II le Pieux (sacré, du vivant de son père, le 25 décembre 987 dans la cathédrale Sainte-Croix d’Orléans).

     Louis VI (sacré à Orléans, le 3 août 1108).

     Henri IV (sacré à Chartres en 1594).

     Louis XVIII et Louis-Philippe, non sacrés.

    Ce qui nous donne un total - avec Jean 1er le posthume, qui a régné officiellement mais seulement quelques jours - de trente-et-un rois de France sacrés en la cathédrale (dans la première cathédrale, Saint Nicaise, devenue cathédrale Carolingienne, puis cathédrale Notre-Dame d'aujourd'hui) :

    http://catreims.free.fr/his004.html...

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    II : La cérémonie du sacre du roi de France : un rituel ancien en continuelle évolution

     

    Connu par les Ordines, le rituel du sacre des rois de France évolue tout au long du Moyen Âge et connaît encore quelques modifications sous l'Ancien Régime

    Il consiste d'abord en une simple onction sur le front du souverain (avant 816), à laquelle s'ajoute le couronnement, la remise d'un sceptre et le serment de défendre l'Église (ordo d'Hincmar), l'apparition de l'anneau et de l'épée (Xème siècle), l'adoubement du chevalier (sacre de Philippe Auguste, 1179), le serment contre les hérétiques (début du XIIIème siècle)

    Au XIVème siècle est introduit le lever du roi et la procession depuis le palais de l'archevêque jusqu'à la cathédrale (sacre de Charles V, 1364). 

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       Couronne de Louis XV, par Augustin Duflos (1715-1774), Paris, musée du Louvre.

     

    1. Le lever du roi et la procession

    La cérémonie se déroule un dimanche, ou à l'occasion d'une grande fête liturgique (Ascension, Assomption, Toussaint).

    Arrivé la veille, le roi se prépare à son ministère en passant une partie de la nuit en prières, avant d'aller dormir au palais de l'archevêque (actuel Palais du Tau).

    C'est là qu'au lever du jour deux des pairs ecclésiastiques, l'évêque de Laon et l'évêque de Beauvais, viennent le chercher.

    Commence alors un dialogue entre le chantre de la cathédrale et le grand chambellan. Le premier frappe avec son bâton à la porte de la chambre royale :

    "Que demandez-vous ?" demande alors le grand chambellan de l'intérieur. "Le roi", répond le chantre. "Le roi dort".

    Ce rituel, fixé définitivement sous Louis XIII, est répété à trois reprises puis, à la fin du troisième dialogue, l'évêque de Laon dit : "Nous demandons Louis (ou Charles, ou Philippe...) que Dieu nous a donné pour roi".

    La porte s'ouvre alors et le roi est conduit en procession, au chant du Veni Creator, à l'intérieur de la cathédrale où l'attend le prélat consécrateur.

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    Épée du sacre des rois de France (détail), Ile-de-France (Xème-XIVème siècle), Paris, musée du Louvre.

     

    2. Les serments, la remise des regalia et l'onction royale

    Une fois le roi assis au milieu de la cathédrale, l'archevêque de Reims part accueillir la Sainte Ampoule, apportée en cortège par les moines de Saint-Remi et escortée par les barons.

    La fiole est déposée sur l'autel aux côtés des regalia, les insignes de la dignité royale conservés à l'abbaye de Saint-Denis, la nécropole des rois de France.

    Le roi prête ensuite plusieurs serments. Debout, devant le maître-autel, sur lequel sont également posés les Évangiles et un reliquaire de la Vraie Croix, il promet de défendre l'Église, de lui conserver ses privilèges canoniques, de garder la paix et la justice de ses peuples et de chasser les hérétiques.

     

    Simplement vêtu de sa tunique et d'une chemise échancrée aux différents endroits où doivent être pratiquées les onctions, le roi reçoit les insignes du chevalier, l'épée et les éperons d'or qui font de lui le bras séculier de l'Église.

     

    Prosterné devant l'archevêque, il est oint, avec le chrême de la Sainte Ampoule, sur la tête, la poitrine, entre les épaules et sur chacune d'elles, aux jointures des bras et sur les mains.

    Le roi reçoit enfin l'anneau, le sceptre (ci dessous) et la main de justice.

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          Sceptre de Charles V (détail) : Statuette de Charlemagne (vers 1365-1380), Paris, musée du Louvre (détail)

     

     

     

     

    3. Le couronnement, l'intronisation, le sacre de la reine et la remise des offrandes

     

    Les douze pairs du royaume, six ecclésiastiques et six laïcs, prennent alors place auprès du roi.

     

    L'archevêque de Reims, les évêques de Beauvais, Châlons, Langres, Laon et Noyon, les ducs d'Aquitaine, de Bourgogne et de Normandie et les comtes de Champagne, de Flandre et de Toulouse soutiennent ensemble la couronne au-dessus du roi avant que l'archevêque ne la pose seul sur la tête du nouveau souverain.

     

    Assis sur un trône dominant le jubé, le roi reçoit l'hommage de l'archevêque et des onze autres pairs, tandis que retentit à chaque fois l'acclamation "Vivat rex in æternum !", reprise par la foule. Des oiseaux sont lâchés dans l'église tandis que retentissent les cloches des églises de la ville

                

    En raison du jeune âge des souverains lors de leur avènement, peu de reines furent sacrées à Reims; sinon, la cérémonie avait lieu à l'abbaye de Saint-Denis.

                

    Si le roi est marié, c'est à ce moment de la cérémonie que prend place le sacre de la reine, laquelle reçoit à son tour deux onctions sur la tête et la poitrine ainsi que des regalia plus petits tels que couronne, anneau, sceptre, main de justice.