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Rechercher : Rémi Hugues. histoire & action française. Rétrospective : 2018 année Maurras

  • Éphéméride du 4 Janvier

    Place Royale de Bordeaux (aujourd'hui, dite "de la Bourse")

     

     

     

    1782 : Mort d'Ange-Jacques Gabriel 

     

    Premier architecte du roi, et jouissant de toute la confiance de Louis XV, on lui doit quelques unes des plus belles réussites architecturales de notre Patrimoine.

    Véritables merveilles, expressions achevées d'un art et d'une civilisation raffinées parvenues à leur apogée, les constructions d'Ange-Jacques Gabriel symbolisent et résument parfaitement la société du XVIIIème siècle français, arrivée au plus haut degré de perfectionnement.         

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    Portrait, par Jean-Baptiste Greuze
     
     

    À Versailles, il réalisa le Petit Trianon :

     

              http://eosclio.blogspot.com/2009/05/ange-jacques-gabriel-petit-trianon.html

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    ...et l'Opéra :

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    Salle transformable, l'Opéra fut inauguré en grande pompe le 16 mai 1770, pour le mariage du futur Louis XVI avec Marie-Antoinette, qui scellait le renversement des alliances et mettait fin à la guerre multi-séculaire entre la France et la Maison d'Autriche : pour l'occasion, l'Opéra fut successivement salle de banquet (incessamment renouvelée, la foule des spectateurs est évaluée à 200.000 personnes...), théâtre, salle de bal, salle de spectacle (huit cents personnes se retrouvèrent sur la scène, avec des chars et des chevaux).  

             

    À Paris, Gabriel réalisa la Place Louis XV (aujourd'hui de la Concorde) et l'École Militaire;

    À Compiègne, il reprit complètement l'ancien château, l'embellit et le transforma. Le 14 mai 1770, Louis XV, qui se plaisait beaucoup à Compiègne, y accueillera Marie Antoinette, qui avait quitté Vienne le 21 avril précédent pour venir épouser le futur Louis XVI (voir l'Éphéméride du 21 avril);

    À Bordeaux, il réalisa la  Place Royale (aujourd'hui de la Bourse, ci dessous).

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    D'autres renseignements sur Ange-Jacques Gabriel dans notre Éphéméride du 23 octobre...
     
    "Qui n'a pas vécu dans les années voisines de 1789 ne sait pas ce que c'est que le plaisir de vivre" (Talleyrand)

     

     

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    1790 : Naissance de Berryer

     

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    Photographié par Nadar

     

    Avocat d’un immense talent, Pierre Antoine Berryer fut un grand défenseur du peuple, grand perdant de la révolution de 1789. Il devint royaliste par empirisme en voyant la condition ouvrière et les désastres révolutionnaires.

    À la Chambre, il fut le porte-parole de l'opposition Légitimiste, et protesta fermement contre le Coup d'État du 2 décembre 1851 :

     

    BERRYER.pdf 

     

    Comme tout député, il a droit à sa biographie officielle :

    http://www.assemblee-nationale.fr/sycomore/fiche.asp?num_dept=9068

     

    Sa réputation est telle qu’elle a donné lieu à "La Berryer" :

    http://laconference.typepad.fr/conf2/la-confrence-berryer.html

            

    Quelques jours avant sa mort, le 18 novembre, il envoya une lettre au comte de Chambord, dans laquelle il témoignait de son inaltérable fidélité à la cause légitimiste :

           

    Ô Monseigneur, Ô mon Roi,

    On me dit que je touche à ma dernière heure. Je meurs avec la douleur de n'avoir pas vu le triomphe de vos droits héréditaires, consacrant le développement des libertés dont la France a besoin. Je porte ce vœu au Ciel pour Votre Majesté, pour Sa Majesté la Reine, pour notre chère France. Pour qu'il soit moins indigne d'être exaucé par Dieu, je quitte la vie armé de tous les secours de notre Sainte Religion.

    Adieu Sire, que Dieu vous protège et sauve la France.

    Votre fidèle et dévoué sujet,

    Berryer

     

     

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    1794 : Marseille "Ville sans nom". 

     

    4 janvier,ange-jacques gabriel,louis xv,versailles,petit trianon,opéra de versailles,place de la concorde,place de la bourse,marseille,ville sans nom,camus,braille,bergsonPar un de ces innombrables et grandiloquents Décrets, dont on ne sait plus trop s'il faut en rire ou en pleurer, la Convention rebaptise Marseille Ville sans nom, pour la punir de son fédéralisme :  

    "Les représentants du peuple considérant que la commune de Marseille a la première sonné le tocsin de la rébellion dans le Midi... arrêtent : le nom de Marseille sera changé; la Convention nationale sera invitée de lui en donner un autre; provisoirement elle reste "sans nom" et portera cette dénomination.

    Fait au Port-la-Montagne (Toulon), 15 Nivôse, an II (4 janvier 1794 ndlr) ".
     

    Proclamation de Barras et Fréron (12 décembre 1793) :

    "On parle de république une et indivisible, et le fédéralisme est ancré dans les coeurs ! Il semble circuler avec le sang et la vie. On parle de soumission aux lois, et on se permet de discuter si on les exécutera. On parle d'obéissance à la Convention nationale, seul centre de l'unité républicaine, et on élève sans cesse une lutte criminelle de volontés particulières contre la volonté générale… conduite rebelle et fédéraliste… Voilà l'esprit de Marseille, un esprit d'égoïsme, d'intérêt, de cupidité, de fédéralisme, d'isolement, de domination."

     Du représentant en mission Maignet au Comité de Salut Public :

    "On veut que Marseille n'existe plus, mais je voudrais qu'elle existât, mais qu'elle existât purgé de tous les traîtres qui ont cherché à lui faire perdre l'estime et la considération qu'elle s'était acquise par les services qu'elle avait rendus à la patrie".

     

    Marseille retrouvera son nom nom un mois plus tard, le 12 février 1794.

    Elle aura eu finalement plus de chance que Bourg-en-Bresse ou Saint Pierre des Corps, devenues pour un temps Bourg régénéré et La Clarté Républicaine !

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    Pourtant... : "Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs."
    (Article 35 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1793 !)
     
     
     
     
  • Feuilleton : ”Qui n 'a pas lutté n'a pas vécu”... : Léon Daudet ! (23)

     

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     (retrouvez l'intégralité des textes et documents de ce sujet, sous sa forme de Feuilleton ou bien sous sa forme d'Album)

    Aujourd'hui : Un autre Hugo (2/6)

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    ndlr : ce sujet a été réalisé à partir d'extraits tirés des dix livres de souvenirs suivants de Léon Daudet : Paris vécu (rive droite), Paris vécu (rive gauche), Député de Paris, Fantômes et vivants, Devant la douleur, Au temps de Judas, l'Entre-deux guerres, Salons et Journaux, La pluie de sang, Vers le Roi...

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    À Hauteville House, Victor Hugo transforma entièrement la maison, abattit des cloisons, et fit notamment construire sur le toit le "look out", ce belvédère vitré qui devait devenir son cabinet de travail...
    Par temps clair, il pouvait apercevoir, au loin, les côtes de France.

     

     

    Un autre Hugo (II) : description de la maison...

     

    Du chapitre VI (et dernier) de "Fantômes et Vivants", continuation immédiate des lignes précédentes, pages 306 à 311 :

    "Voici comment m’apparut Hauteville-House en juillet 1885 :
    Au rez-de-chaussée, la salle à manger, tapissée de faïences rares et belles qui se groupaient en un H gigantesque, au-dessus de la cheminée.
    Un fauteuil, fermé par une chaîne de fer, représentait "le siège des ancêtres".
    Une Sainte Vierge tenant dans ses bras l’Enfant Jésus était transformée en Liberté par les vers suivants :


    "Le peuple est petit, mais il sera grand;
    Dans tes bras sains, ô mère féconde,
    O Liberté sainte au pas conquérant,
    Tu portes l’enfant qui porte le monde."


    C’est là une forme très typique de la sottise de Hugo. De même qu’il démolissait de beaux meubles anciens, dénichés habilement par lui chez les bric-à-brac, pour en composer des meubles extravagants, de même il détournait les objets, les symboles, les formules de leur destination traditionnelle et les adaptait à sa situation, à son cas, à sa personne, avec une tranquille impudeur.
    À Hauteville-House, au lendemain de sa mort, sa vision du monde était ainsi très apparente : un Dieu vague, planant dans l’espace. Au-dessous, la terre, mue par quelques hommes de génie, bons en tant qu’écrivains, ou méchants en tant que conquérants. Au centre des premiers, les dépassant tous, lui, Hugo. Au-dessous encore, les peuples, masse auguste et sage, mais martyrisée par les rois, les empereurs et les prêtres.
    Le jeu consistait pour Hugo, représentant des génies et délégué de Dieu, à briser les entraves des peuples. Il s’en acquittait verbalement chaque jour, de cinq heures du matin à midi, sans débrider.
    Au rez-de-chaussée encore, une salle de billard; un salon dit des "tapisseries", orné de tableaux de famille par Louis Boulanger — notamment une Mme Hugo au grand front, aux yeux placides; une petite pièce renfermant une peinture de diableries flamandes, dans le genre de Breughel le Vieux, qui nous frappait vivement, Georges et moi, alors jeunes gens.
    Au premier étage, deux luxueux salons : l’un rouge, orné d’admirables broderies de jais, représentant des fables, et d’un baldaquin en lampas frangé d’or, soutenu par six esclaves grandeur nature, qui de l’autre main supportent des torchères.
    Le second salon, bleu, d’un style plus simple, prolongé par une terrasse donnant sur la mer.
    Au deuxième étage : la galerie de chêne, toute en bois sculpté et travaillé, attenant à une "chambre de Garibaldi" où Garibaldi n’a jamais couché, et pour cause.
    Au troisième étage, le look out vitré; trois pièces exiguës, étouffantes en été, glaciales en hiver, ornées de panneaux peints représentant la légende du beau Pécopin, où Hugo couchait et travaillait sur un matelas au ras du sol. Car il vivait dans une inspiration perpétuelle, assailli par tous les démons du rythme, de la métaphore, de la syntaxe, se délivrant d’eux sur des bouts de papier de toutes formes et de toutes couleurs, à l’aide de l’écriture et du dessin.
    Sa méthode de dessinateur, très conforme à sa méthode de poète, consistait à jeter de l’encre sur du papier, puis à modeler, et développer le hasard de la tache, en y laissant jouer la lumière par les blancs.
    Il avait le pâté sublime. Néanmoins ce procédé le contraignait à représenter invariablement des burgs au clair de lune, des pendus également au clair de lune, ou des grotesques à longue barbe, tels que "son ami de cœur, nommé Goulatromba."

    "Homme de qui jamais un juron ne tomba."

    Cette demeure déjà hétéroclite par sa composition et l’assemblage des styles, était en outre remplie de devises, quelques-unes formant calembour.
    Une d’elles, adressée à Vacquerie, était ainsi conçue :
    Ora, i, clama.
    C’est-à-dire : Prie, Va, Crie… Horrible ! D’ailleurs si Vacquerie eût adressé au ciel une prière, c’eût été sans doute pour lui demander de le débarrasser, par les voies les plus rapides, du rayonnement de la gloire de Hugo.
    Ne pouvant l’effacer, cette gloire, il s’était collé à elle ; mais j’ai toujours pensé — et je n’étais pas le seul — que cette fameuse amitié n’avait été qu’une haine de près.
    Un grand nombre de portraits de Hugo et des siens, la plupart sur verre, dits daguerréotypes, nous apparaissaient à mesure que nous faisions, en nous émerveillant, l’inventaire de la coquille phénoménale du plésiosaure de Guernesey.
    La plupart le représentaient, lui, dans le plein de sa force et de sa tension, fort différent du patriarche, attendri entre ses petits-enfants, qu’a conservé et transmis la légende démocratique.
    Imaginez un front immense et bombé d’hérédo; suspendue à ce front, une face dure et glabre aux lèvres minces, tenant du mauvais prêtre et du cabotin; entre ce globe et ce masque, les conjoignant, deux yeux implacables et bleus, visionnaires froids de la réalité. Là-dessous un corps trapu mais petit, fait pour porter des poids considérables, y compris celui des années.
    Tel était, avant l’heure sénile et adoucie, le puissant individu que le gouvernement impérial condamnait à la solitude et au repliement sur soi-même.
    Je le définirais un animal verbal, chez qui l’instinct comprimé s’échappait en périodes et en images, sans aucune reprise de ces jets impétueux par la raison.
    Autour de lui, dans ces mêmes photos, les siens : sa malheureuse femme, ses fils engourdis par l’exil, sa fille Adèle, héritière du front et du masque. Tous semblaient dominés, écrasés, aplatis, réduits au rôle de subalternes, de souffre-génie.
    On sent bien, devant ces images, que, sans Juliette Drouet à sa porte, il aurait certainement éclaté..."

  • Feuilleton : ”Qui n 'a pas lutté n'a pas vécu”... : Léon Daudet ! (26)

     

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     (retrouvez l'intégralité des textes et documents de ce sujet, sous sa forme de Feuilleton ou bien sous sa forme d'Album)

    Aujourd'hui : Un autre Hugo (5/6)

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    ndlr : ce sujet a été réalisé à partir d'extraits tirés des dix livres de souvenirs suivants de Léon Daudet : Paris vécu (rive droite), Paris vécu (rive gauche), Député de Paris, Fantômes et vivants, Devant la douleur, Au temps de Judas, l'Entre-deux guerres, Salons et Journaux, La pluie de sang, Vers le Roi...

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    Un autre Hugo (V) : mytho/mégalomane halluciné ?..

     

    De "La tragique existence de Victor Hugo" :

    1. Pages 182/183/184 (premières lignes du Chapitre VIII) :


    "Dans la chambre de sa nouvelle villa Hauteville-féerie, à Guernesey... Juliette, vieillie et goutteuse, lisait un volume dépareillé de la "Vie des Saints"...
    Hugo entra, solide et fier en dépit des années, mais avec le visage flétri et brouillé de ceux qui prolongent trop loin un intense appétit sexuel.
    - Ah ! ah ! Juju, te voilà encore dans tes bondieuseries !... J'ai à te parler sérieusement et dans le sens de tes lectures. Écoute-moi.
    Elle posa le livre. Il s'assit près d'elle, tendrement :
    - Tu vas comprendre, car tu n'es pas comme cette malheureuse Adèle, qui ne comprend rien...
    - Que tu es dur !
    - Juste, tout simplement. Donc après avoir été labouré et ensemencé par mon William Shakespeare, qui est ce que j'ai écrit de mieux en prose, j'ai senti, dans cette solitude de l'exil, que mon esprit faisait un grand bond, au-delà du temps et de l'espace, et que les éléments allaient me parler... les éléments, c'est-à-dire la mer, la nuit, le vent et les étoiles.
    Déjà, à la mort de Léopoldine, j'avais eu une sensation analogue, mais moins forte. Il y a, ici-bas, entre la nature et l'homme, un immense secret, qu'ont entrevu ceux que l'on appelle les prophètes. Il me semble que je suis un prophète...
    - Je l'ai toujours pensé. Tu en as les allures et le ton.
    - En outre, le spiritisme m'a appris à entrer en communication avec les morts. Mais les morts connaissent-ils le grand secret ? C'est ce que je me suis demandé et j'ai conçu deux volumes dont l'un s'intitulerait la "Fin de Satan" et l'autre "Dieu". C'est là que je mettrai mes révélations, en poèmes bien entendu, le vers étant mon langage naturel.
    - C'est une idée magnifique et digne de toi. Ainsi tu fonderais une religion nouvelle ?
    - Cela se pourrait. Je garderais une grande partie de la religion de Jésus-Christ, tout ce qui concerne l'amour des humbles et la pitié.
    J'assiérais ma doctrine sur la démocratie et la mystique des foules, la mystique populaire : "Vous me retrouverez en Galilée..."
    Moi, Victor Hugo, le peuple français me retrouvera à Paris, où m'appelleront, je le sens, je le vois dans l'air, d'extraordinaires, de terribles évènements.
    - Quand cela, mon Victor ?
    - Avant peu...
    ...On lui avait tellement répété qu'il était un demi-dieu, puis un dieu, puis un dieu et demi, qu'il avait fini par s'en persuader et que ces ouvrages changeraient la face du monde..."

    2. Pages 190/191 :


    "Un soir que Paul Chenay avait moins bu que de coutume, Hugo, toujours en quête du Grand Secret, lui proposa une promenade nocturne à pied.
    Il s'agissait d'aller au nord de l'île, à Lancresse, où se trouvaient des pierres prétendues druidiques.
    Ils se mirent en route vers dix heures et, marchant d'un bon pas, atteignirent leur but vers minuit et demie.
    C'était le bord de la mer, hanté par des courlis et autre oiseaux sauvages. Les larges pierres brillaient sous la lune et le bruit des flots était comparable à la rumeur d'une immense foule.
    Hugo n'avait point parlé à son compagnon de son dessein mystagogique, le jugeant trop sommaire pour comprendre cela.
    À un moment donné, élevant d'un ton sa formidable voix de bronze - "trop belle pour ce qu'il avait à dire", selon ses collègues de la Chambre des Pairs - il apostropha les pierres et les druides, les conjurant, ainsi que l'Océan, de lui livrer leur secret.
    Sous la forme interrogative, le grand lyrique dégoisait, tantôt en vers, tantôt en prose, des souvenirs de lecture et des adjurations passionnées, tout le bric-à-brac de sa mémoire, comparable à celui de sa demeure et de la villa de Juliette. Puis il attendait les réponses contenues dans le bruit des vagues, celui du vent et les cris des oiseaux marins...


    "Importunaequae volucres... tempore quanquam illo, tellus quoque et aequora ponti..."


    Il récitait ainsi des vers de Virgile, les prodiges annonçant la mort de César, avec des pauses pendant lesquelles son visage, éclairé par la lune, sous son vaste front, était grandiose et terrifiant.
    Tantôt il tendait les bras vers le ciel dans un geste d'imploration; tantôt il les ramenait, comme désemparé, vers le sol.
    Cette mimique éperdue donnait l'impression d'un rite étrange, d'un culte inconnu ou d'un accès de folie.
    Chenay, partagé entre l'admiration et la crainte, expliquait par la suite :
    "J'en étais baba. Ce qu'il y a de sûr, c'est qu'on pouvait croire, en effet, à un dialogue entre ce sacré type et les éléments. Le ciel et l'eau lui passaient la réplique et il tonnait, il tonnait comme Jupiter lui-même."
    Cette séance effarante dura jusqu'à l'aube, avec le caractère d'une querelle, qui va progressivement s'apaisant.
    Hugo, pour finir, s'agenouilla sur la roche et remercia les forces naturelles de lui avoir, non pas tout dit - c'était impossible en une fois ! - mais lâché de grands morceaux de la vérité totale et universelle; et Chenay songeait : "Quel type que celui qui a passé la nuit à ces exercices, et qui, ce soir, ira peloter Éva !"
    Comme ils redescendaient sur Saint-Pierre-Port, les cabaretiers ôtaient leurs volets..."

  • Dans le monde et dans notre Pays légal en folie : revue de presse et d'actualité de lafautearousseau...

     

    Le Figaro on X: "Une bagarre a éclaté ce mercredi après-midi à l'aéroport  Paris-Charles-de-Gaulle : un groupe a tenté de forcer l'accès au hall  d'embarquement pour empêcher l'expulsion d'un militant kurde sous

    Bagarre à l'aéroport de Roissy : des élus communistes étaient parmi les énergumènes protestant contre l'expulsion d'un autre énergumène, kurde, sous OQTF (sous réserve de confirmation, on annonce, sur tweeter : Margaté Marianne, Pierre Barros, Raphaelle  Primet, Sandra Regol, Thomas Portes, Ian Brossat, Danièlel Simonnet - qui avait reçu, en son temps, avec sa copine députée LFI Obono, le très antisémite Corbyn, exclu du Parti Travailliste, justement, pour cause d'antisémitisme ! - Annie Gafforelli...) 

    Finalement, le Kurde a été expulsé : BON DÉBARRAS !

    AUX SUIVANTS !

    Mais : ils se prennent pour qui, ces élus ? 

    Être élu donne-t-il tous les droits ?

    Question subsidiaire : est-ce que "PCF" veut dire "Parti-chienlit français" ?

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    1. Marion Maréchal n'a pas confiance en Nicole Belloubet pour lutter contre l'islamisme à l'école : NOUS NON PLUS !

    "Je n’ai aucune confiance en @NBelloubet pour lutter contre l’islamisme ! Je rappelle que lors de son passage au ministère de la Justice, elle avait fait libérer 13 000 détenus pendant le COVID."
     
    (extrait vidéo 1'18)
     
     

    2. Sur OpexNews :

    "La France négocie avec la #Belgique pour relancer une filière souveraine de balles destinées aux armées et aux forces de sécurité. L'association impliquera deux industriels : le breton Nobel Sport et le liégeois FN Herstal."

     

    3. Sur ce coup, d'accord avec Arnaud Montebourg :

    "La commande publique est antipatriotique en France […]. Il faut botter les fesses de l’Ugap pour que cette centrale achète Français et entraîne avec elle les collectivités locales ! Tous ceux qui se battent pour le #madeinFrance attendent cela..."

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    3 BIS. Et là aussi :

    "Lorsque j’entends "quand on veut, on peut", tout de même ! Faisons le bilan : Alstom Power détruit par les Américains, Lafarge acheté par les Suisses, Essilor conquis par les Italiens, Arcelor démonté par un Anglo-Indien, Technip capturé par un Texan, Alcatel cédé à un Finlandais, Pechiney démantelé par les Canadiens, Naval Group humilié par les Australiens, avant de se refaire avec les Hollandais, et l’uranium au Niger capturé par les Russes au son de la musique de Wagner. Quand on veut, on peut ? Alors, pourquoi n’a-t-on pas voulu ?...

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    5. Lu dans Les Échos (extrait/entame de l'article d'Anne Bauer) : Les robots marins d'Exail à l'offensive sur tous les marchés du déminage 

    "Exail Technologies, société du groupe familial Gorgé, est en compétition aux quatre coins de la planète pour offrir ses services dans la lutte contre les mines sous-marines. Forte du rachat l'an dernier d'iXblue, l'ETI mise plus que jamais sur les drones marins.

    Exail Technologies, un nom à retenir, car il pourrait remporter des compétitions dans le monde entier dans le domaine en plein essor de la guerre contre les mines sous-marines. Ex-Groupe Gorgé, Exail Technologies réunit depuis la fin de l'année 2022 les activités de robotiques sous-marines de la filiale historique ECA à Toulon avec les spécialités de la société iXblue, créateur du drone de surface Drix et spécialiste des centrales inertielles et des sonars. Son PDG Raphaël Gorgé ne regrette pas son recentrage sur la robotique marine et sous-marine, un marché en plein essor et en pleine transformation.

    En 2017, l'entreprise avait remporté avec Naval Group le marché du déminage pour la Belgique et les Pays-Bas, un marché de 500 millions d'euros pour un système de lutte contre les mines en mer entièrement robotisé. Depuis, Exail Technologies a recensé plus d'une dizaine d'appels d'offres en cours ou à venir pour renouveler les flottes de guerre des mines de nombreux pays côtiers. La PME familiale est, par exemple, en lice dans la compétition lancée par l'Australie, qui devrait se dénouer cet été. Thales a été éliminé, Saab est encore dans la course..."

    Japon, Australie, Nouvelle-Zélande, Corée du Sud, Arabie saoudite, Emirats arabes unis, Brésil et Etats-Unis ont commandé le drone de surface Drix d'Exail, utilisé par l'Agence américaine d'observation océanique et atmosphérique (NOAA) et l'Ifremer.
    Japon, Australie, Nouvelle-Zélande, Corée du Sud, Arabie saoudite, Emirats arabes unis, Brésil et Etats-Unis ont commandé le drone de surface Drix d'Exail, utilisé par l'Agence américaine d'observation océanique et atmosphérique (NOAA) et l'Ifremer. (IXBlue)

     

    6. Visite de Macron au Brésil (sur OpexNews) :

    La France et le Brésil vont coopérer sur un "nouveau programme de sous-marins", notamment à propulsion nucléaire, et sur la construction d'hélicoptères. Et peut-être "relancer la discussion sur les Rafale, car je considère que rien n'est jamais perdu", a lancé Emmanuel Macron."

    (article en anglais)

    https://www.politico.eu/article/emmanuel-macron-france-brazil-luiz-inacio-lula-da-silva-non-alignment-submarines/

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    7. De Pierre Liscia :

     

    À DEMAIN !

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  • Dans le monde et dans notre Pays légal en folie : revue de presse et d'actualité de lafautearousseau...

    Europe : attention, DANGER !

    L'avertissement d'Alexandre Devecchio :

    "Pendant que l'on parle de #Gaza, on oublie les véritables enjeux de cette élection européenne. Et notamment le maintien au non d'un minimum de souveraineté pour les nations européennes. La fin du vote à l’unanimité au Conseil de l’Union, remplacé par le vote à la majorité qualifiée y compris sur les questions de défense et de politique extérieure, signifierait le basculement définitif dans un système supranational et post-démocratique... 50 personnalités appellent à un référendum sur ce sujet d'importance historique."

    Dans Le Figaro, l’appel de 50 personnalités pour un référendum sur «le tour de vis fédéraliste» de l’Union européenne (cliquez sur l'image pour l'agrandir, puis utilisez le zoom pour pouvoir lire le texte) : évidemment dédié par nous à Macron, qui veut une Europe fédérale...

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    1. Pas gentil du tout, certes, pour LFI (vous savez, "les revenants de la section des piques de 1793") mais tellement réjouissante, cette chanson de 2'20 que Goldnadel aimerait voir devenir virale (nous aussi) :

    "Cette chanson sur les Insoumis, drôle et excellente musicalement, doit devenir l’hymne de tous les résistants aux brutes et aux salauds qui veulent nous faire la peau."

    https://x.com/GWGoldnadel/status/1783249091259978177

     

    2. Comment ne pas être d'accord avec Marion Maréchal ?

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    3. La France et l'Allemagne (les ministres Lecornu et Pistorius) se sont mis d'accord, nous dit-on, sur le projet commun de "char du futur"; qui sera, nous dit-on encore "un équipement militaire révolutionnaire". Le contrat détaillé devrait être prêt au début de l’année prochaine, ce qui est ambitieux, déclare toutefois le ministre allemand.

    Il est trop tôt pour affirmer ceci ou cela, et il est plus prudent d'attendre et voir...

    Cependant, on peut d'ores et déjà noter ceci : sans même parler de leurs autres problèmes (affaissement démographique et danger de plus en plus réel d'un immigration turque aux ordres d'Erdogan; sérieux problèmes économiques dans l'automobile, l'un de leurs points forts...) nos ennemis allemands viennent de subir coup sur coup deux revers de taille :

    la perte du gazoduc Nordstream (qui leur promettait, croyaient-ils, un approvisionnement assuré)...

    et la prise de conscience, bien tardive, que les USA (dont ils s'étaient fait le 51ème État, par haine de la France) se contrefichaient d'eux et de l'Europe.

    Du coup, eux qui "achètent états-unien" depuis des décennies (comme plusieurs autres pays européens...) se mettent à se souvenir que, par exemple, la France est le seul pays capable de construire, tout seul, comme un grand, l'excellentissime Rafle, par exemple. Et qu'elle est la seule puissance nucléaire réellement indépendante du continent (les Anglais ayant deux "verrous" états-uniens concernant leur force de frappe).

    Du coup, le problème redevient politique : si les Allemands (et d'autres) se mettent à "travailler" avec nous, plutôt qu'avec les États-désunis, pourquoi pas ? Et même, tant mieux ! Si, et seulement si nous disposons d'un pouvoir politique qui saura faire respecter les intérêts nationaux, et qui ne se laissera pas "manger la laine sur le dos", comme disent nos amis québécois...

    Le ministre français de la Défense Sébastien Lecornu rend visite à son collègue allemand Boris Pistorius à Berlin en juillet 2023.

     

    4. Cette sur-administration, ces normes sans fin qui nous étouffent et nous ruinent... Dans Points de Vue, le haut-fonctionnaire Christophe Eoche-Duval démontre le trop-plein de normes, différents Codes à l'appui :

     "...Si vous voulez comprendre la crise agricole, voici le Code rural en 1965, la France était première puissance agricole d'Europe, et le voilà en 2023..."

    (extrait vidéo 1'28)

    https://x.com/LeFigaroTV/status/1783068266279084166

    Normes françaises, la course folle

     

    5. Dans Valeurs : Le Sète Olympique FC condamné par l’État pour avoir arboré un symbole islamique sur son logo... 

    https://www.valeursactuelles.com/societe/le-sete-olympique-fc-condamne-par-letat-pour-avoir-arbore-un-symbole-islamique-sur-son-logo

     

    6. Le saccage paris continue... D'accord avec Dominique Dupré-Henry :

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    7. Au Québec... De Nouvelle Alliance :

     

     

    À DEMAIN !

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    Normes françaises, la course folle
  • Dans le monde et dans notre Pays légal en folie : revue de presse et d'actualité de lafautearousseau...

     

    "Je suis un peu étonné que des gens qui défendent un Parti communiste qui a collaboré avec les nazis me donnent des leçons de démocratie (...) et me traitent de facho" (Michel Onfray).

    Retour en images sur le Printemps de la liberté d'expression, où Naulleau et Onfray ont été pris à partis par des énergumènes, "faux antifas/vrais terroristes", au cri de "fachos", "nazis" et autres cingleries de foldingues dont l'extrême-gauche terroriste a le secret...

     

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    Flamme olympique à Marseille : revivez la parade nautique - Les Nouvelles  Publications

    Un moment magnifique et un "premier acte" des J.O. très réussi avec l'arrivée du Belem dans le Vieux port de Marseille...

    Ci-dessous, le remarquable tifo des supporteurs de l'OM : Massalia écrit en alphabet grec et l'échange de la coupe entre Gyptis et Protis, devenu "échange de la flamme" : superbe ! Bravo à ces supporteurs, à leur travail considérable et si beau, à ce salut bienvenu à nos Racines et aux traditions fondatrices de notre Être profond...

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    Il ne restait plus au Belem qu'à passer devant le buste de Louis XIV qui orne la façade de la Mairie, le tout sous l'oeil bienveillant de la Bonne Mère, mais aussi, à sa gauche, de l'église Saint laurent (l'église du petit peuple des pêcheurs de la Marseille "d'avant"); et, à sa droite, de l'Abbaye de Saint Victor, dont un abbé devint le pape Urbain V : grandiose...

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    1. De Guillaume Bigot :

    "Dans l’idéologie de nos gouvernants, les émeutes sont comparables à des catastrophes naturelles : imprévisibles et impossibles à empêcher. En réalité, les émeutes résultent de leur politique migratoire."

    (extrait vidéo 1'11)

    https://x.com/Guillaume_Bigot/status/1787762777198661830

    Emeutes en banlieues : la faute à qui ?

    La faute au Système, et en particulier à Chirac et à ses maudits et scélérats décrets de 75/76, dits "de regroupement familial" mais qui, en réalité ont programmé, installé et IMPOSÉ le changement de peuple.

    Et, bien entendu, sans jamais demander son avis au Peuple français...

    On voit, on a les résultats, aujourd'hui...

     

    2. On en a marre des "marches blanches" ! On nous refait à chaque fois le coups de "Je suis Charlie" : on va dans la rue, on marche, "sans haine" (!!!!!) puis on rentre chez soi, puis ça recommence : et encore une marche blanche et etc... etc... Encore d'accord avec Guillaume Bigot :

    "La marche blanche est un bâillon qui empêche les Français de crier leur ras le bol."

    (extrait vidéo 1'39)

    https://x.com/Guillaume_Bigot/status/1787916367984796122

    Institut Iliade

     

    3. Danger : Frères Musulmans ! Marion Maréchal a raison : il faut fermer - d'urgence - leur institut de formation ("formation" ?, "déformation" conviendrait mieux !) de Château-Chinon :

    "Monsieur le Ministre @GDarmanin, j’observe avec intérêt votre soudaine prise de conscience de la gravité de la menace des Frères musulmans. Mais alors qu’attendez-vous pour fermer leur institut de formation, l’IESH de Château-Chinon ?"

    (extrait vidéo 5'39)

    https://x.com/MarionMarechal/status/1787841552707878914

    IESH, l'école Frériste qui forme nos imams depuis 30 ans – CLILCEA

     

    4. "Une chronique absolument remarquable de Gaspard Proust", pour reprendre l'expression de Mathieu Bock-Côté, avec qui nous sommes totalement d'accord :

     

    5. Le commencement de la fin pour l'éolienicide ? On peut l'espérer... De Fabien Bouglé (sur tweeter) :

    1. Aux USA... :

    "Les américains ont compris que les #éoliennes et les panneaux solaires c'est la FIN. "Hémorragie sur les fonds durables aux ÉTtats-Unis. Les investisseurs ont retiré près de 9 milliards de dollars des fonds d'investissement durables américains au premier trimestre"

     

    Hémorragie sur les fonds durables aux Etats-Unis

    2. ...Et en Finlande :

    "POLLUTION ÉOLIENNE La Finlande met en pause les #éoliennes ! "La Finlande met le déploiement de l’éolien en mer en pause Le gouvernement finlandais a rejeté 16 demandes d’autorisation d’exploitation pour des projets de parcs éoliens en mer."

     

    6. Ne pas oublier... De Laurent Ozon (sur tweeter) :

    "Il y a 22 ans, l'OTAN commençait le bombardement de la Serbie, pour lui arracher le Kosovo et en faire un État mafieux, devenu depuis la plaque tournante de tous les trafics et un centre de recrutement de mercenaires envoyés notamment en Syrie quelques années plus tard."

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    LE KOSOVO EST SERBE,

    ET IL LE REDEVIENDRA !

     

    7. Statue de la Vierge d'Alès criblée de balles : d'accord avec Gilbert Collard, mais : pourquoi pas lancer une cagnotte pour trouver ces 17.000 euros, somme malgré tout modique ?

    "Alès: La vierge de l'Ermitage a été criblée de balles dans l'indifférence de la mairie, du département, de la région et des médias, sauf Cnews : c'est notre patrimoine qu'on mitraille et le cœur d'une foi qui a fait la France !"

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    À Alès, la vierge de l'Ermitage a été criblée de balles et une cagnotte est envisagée pour la réparer. L'association qui gère le site a reçu un devis de 17 000 € pour les réparations... On attend la suite, et des nouvelles pratiques pour "donner"...

     

     

    À DEMAIN !

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  • Dépistage du Covid-19 : pourquoi la France est encore loin de l'objectif de 700 000 tests virologiques par semaine.

    Source : https://www.francetvinfo.fr/

    Pour réussir le déconfinement, le gouvernement table sur 700 000 tests virologiques par semaine. L’enquête de la cellule investigation de Radio France montre que cet objectif sera très difficile à atteindre. Révélations sur les véritables chiffres du dépistage, et sur des robots de test chinois installés dans la plus grande improvisation.

    "Testez, testez, testez." Depuis le 16 mars 2020, c’est le message très clair martelé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans le cadre de la lutte contre le coronavirus. Mais en France, les retards s’accumulent dans l’organisation de ce dépistage, poussant même le gouvernement à mandater un cabinet privé afin de l’assister "dans le développement des capacités de production nationale" de tests. Le 28 avril 2020, le Premier ministre, annonce "700 000 tests virologiques à partir du 11 mai" et la mise en place de "brigades" dans chaque département, chargées d’identifier les contacts des personnes présentant des symptômes du coronavirus Covid-19. "À la sortie du confinement, nous serons en capacité de massifier nos tests", assure Édouard Philippe. Mais qu’en est-il réellement ?

    "Le nombre de dépistages a connu de fortes fluctuations au cours des dernières semaines. Il varie entre 200 000 et 270 000 tests par semaine", assure le ministère de la Santé à la cellule investigation de Radio France. Mais sur quoi reposent ces chiffres ? Difficile de le savoir. L’observatoire Géodes de Santé publique France ne centralise pas et n’actualise pas toujours ces données. Les bulletins épidémiologiques régionaux sont disparates. Santé publique France n’a pas été en mesure de nous donner un chiffre précis. Il n’existe pas de système d’information automatisé. Les manques apparaissent aussi dans les bases de données mondiales comme celle de l’université d’Oxford. La collecte des chiffres relève du parcours du combattant.

    Des estimations du nombre de tests incomplètes

    Pendant plusieurs semaines, lors de son point quotidien sur la progression de l’épidémie, le directeur général de la santé, Jérôme Salomon, évoquait le nombre de tests réalisés, à l’hôpital et dans les laboratoires de ville. Puis cette mention a disparu. En agrégeant les données publiques disponibles, 149 800 tests virologiques ont été réalisés la semaine 18 (du 27 avril au 3 mai 2020) en France. Très loin donc des 300 000 tests avancés par la direction générale de la Santé. Quant à l’objectif affiché des 700 000 dépistages hebdomadaires à partir du 11 mai, aucune donnée détaillée ne vient l’étayer. Selon des chiffres disponibles sur le site de Santé publique France, depuis le 24 février, 831 174 tests virologiques ont été réalisés, à la fois dans les hôpitaux publics et dans les laboratoires privés de ville (respectivement 627 464 et 203 710). Un peu plus de 830 000 tests en 10 semaines d’épidémie quand on parle d’en faire 700 000 par semaine, on se dit qu’il va falloir mettre le turbo !

    Santé publique France affirme dans son bulletin épidémiologique hebdomadaire : "Les sources de remontées d’information que nous utilisons ne sont pas exhaustives et ne préjugent pas de la capacité à diagnostiquer en France". Si les données hospitalières semblent complètes, celles remontées par les laboratoires de ville sont amputées d’environ un tiers. "Sur 88 plateaux techniques, seuls 55 font leur remontée à l’ARS", précise François Blanchecotte, président du Syndicat des biologistes (SDB). Il s’agit du réseau 3 Labo (Eurofins Biomnis, Cerba et Inovie) qui a automatisé la transmission des données.

    Or dans certaines régions, le Grand Est ou la Bretagne par exemple, ce réseau est sous-représenté. Selon les données qu’ils publient, les quatre départements bretons ne réalisent qu’une moyenne de 54 tests par semaine depuis le 12 mars ! Dans les faits, corrige l’agence régionale de santé (ARS) de Bretagne, 798 prélèvements hebdomadaires en moyenne ont été analysés dans les laboratoires de ville depuis cette date. Il faudrait donc les prendre aussi en compte. Sauf qu’il est impossible de s’y retrouver dans ces données. Car chacun cuisine son bulletin épidémiologique hebdomadaire à sa façon. Les Bretons comme la région Centre-Val de Loire ne reportent que les tests virologiques positifs. "Tous les systèmes d’information ne sont pas en place et nous devons faire le travail d’enquête quotidien à la main", reconnaît Pascal Durand, directeur du premier recours à l’ARS Occitanie.

    Un objectif "difficilement atteignable"

    Partout les graphiques en attestent : la montée en puissance des tests n’existe pas. Ils ont démarré en février pour les premières régions touchées, puis ils ont augmenté jusqu’au 23 avril. Ensuite, leur nombre stagne. Depuis le 20 avril, il diminue même chaque semaine, soit le contraire des propos répétés du Premier ministre, Édouard Philippe, et du ministre de la Santé, Olivier Véran. Aujourd’hui, selon notre décompte, la France n’a en fait jamais dépassé les 150 000 tests par semaine. C’est dire si la marche pour atteindre les 700 000 est haute. Pour le président du Syndicat national des biologistes des hôpitaux (SNBH), Xavier Palette, "c’est impossible d’arriver à 700 000 tests en une semaine. Il manque des surblouses, des kits de prélèvement, du personnel…"

    C’est encore un peu le bazar : tous les lieux de prélèvements n’ont pas encore été recensés vers la plate-forme censée centraliser ces données.

    Xavier Palette, Syndicat national des biologistes des hôpitaux (SNBH) à franceinfo

    "Cette liste est en cours de consolidation", répond la direction générale de la Santé. "La connexion informatique ne fonctionne pas partout, poursuit Xavier Palette. Mon labo n’est pas encore connecté à la base nationale. Pour l’instant, on fait remonter nos résultats avec des tableurs Excel. Je doute qu’on soit vraiment prêts le 11 mai." "700 000 dépistages, Ã§a me paraît difficilement atteignable, estime aussi Jean-Paul Feugeas, président du Syndicat national des médecins biologistes des CHU (SNMBCHU). Pas tellement par manque d’automates mais à cause des problèmes de logistique." "J’affirme que dans le privé, on a la capacité de faire plus de 140 000 tests par jour, assure en revanche François Blanchecotte, le président du Syndicat des biologistes. Bien sûr, s’il arrive un foyer de contamination important, on risque de manquer de bras pour prélever dans un temps court beaucoup de personnes. Mais dans mon labo, en Indre-et-Loire, j’ai 100 000 tests dans mes frigos… pour seulement 1 000 demandes par jour à Tours. Je pourrais faire beaucoup plus."

    La réquisition tardive des laboratoires non médicaux

    Comment en est-on arrivé-là ? Dans un premier temps, seuls les laboratoires hospitaliers avaient été mobilisés. L’épidémie progressant, les laboratoires de ville ont été ajoutés au dispositif. Dès la fin mars, les laboratoires agro-vétérinaires, (ils sont 72 en France), ou encore ceux de la gendarmerie, de la police et les laboratoires de recherche publique sont intégrés au dispositif. Les autorités ont répondu favorablement à la proposition de nombreux biologistes."La PCR [Polymerase Chain Reaction ou réaction de polymérisation en chaîne, méthode employée pour détecter le virus] a été inventée par des chercheurs. C’est un outil qu’on utilise tous les jours dans nos laboratoires de virologie, donc on le maîtrise", rappelle une biologiste du CNRS.

    Nous sommes alors le 20 mars. L’Inserm et le CNRS lancent un inventaire du matériel et des hommes et femmes disponibles dans leurs laboratoires. Cinquante équipes sont identifiées. L’État en publie la liste, et précise qu’ils vont contribuer à hauteur de 100 000 tests par semaine. Sauf que "depuis, plus rien", raconte Pierre-Paul Zalio président de l’École normale supérieure (ENS) Paris-Saclay. "À notre niveau, on était capable d’apporter un laboratoire avec un niveau de protection élevée, trois machines de PCR avec le personnel qualifié propre à un laboratoire de virologie, et le matériel pour réaliser les extractions d’ARN. Or le besoin exprimé par les hôpitaux portait justement sur la phase d’extraction." Le décret permettant aux préfets et aux agences régionales de santé de réquisitionner ces laboratoires non médicaux paraît le 5 avril. Le timing pour un dépistage massif semble donc encore bon.

    Problème : un laboratoire commence à tester, puis un deuxième, mais en quantité très réduite. Aujourd’hui, selon l’Inserm, qui pilote le dossier, seuls une quinzaine de laboratoires seraient impliqués. La liste ne nous a pas été fournie en dépit de nos demandes répétées. Il semble qu’une sorte de deuxième sélection ait été faite mais dans l’opacité. "Par des retours oraux, des conversations, j’ai compris que le choix fait, c’était celui de privilégier les grosses structures", décrypte Pierre-Paul Zalio pour qui "ça part de l’hypothèse que 'big is beautiful', une hypothèse qui mériterait d’être vérifiée". Pour ce chercheur, "on peut se demander si ce qui peut faire la force de la réponse d’un système de santé, c’est sa plasticité ou la hiérarchisation de son organisation […]."

    Si le système hospitalier français a résisté à la vague épidémique, c’est parce qu’il s’est mobilisé, a su réallouer les ressources en temps réel, à partir de ce qu’exigeait le terrain. 

    Pierre-Paul Zalio, président de l’ENS Paris-Saclay à franceinfo

    "On aurait pu avoir la même approche avec la recherche publique, avoir plus de confiance dans ce que les chercheurs savent faire", estime Pierre-Paul Zalio. "On verra s’ils ont eu raison de faire la fine bouche sur des petites structures qui, mises bout à bout, auraient permis de faire 50 000 tests par semaine", grince un biologiste du CNRS déçu par l’opacité du processus de décision.

     

    Des volontaires recalés

    Se passer des petites structures, soit. Mais que dire alors de celles qui ont mis en avant une technique de dépistage massif, mais qui n’a pas encore été homologuée ? 19 200 tests en une fois avec un seul robot : c’est ce que peut par exemple faire l’Institut de génomique humaine de Montpellier. "Quand on a vu la pénurie de matériel dont parlait les médias [écouvillons, réactifs], on s’est demandé comment mettre sur pied un protocole d’analyse simplifié économe en réactifs et plus sûr, afin d’éviter tout risque de contamination des personnels quand ils manipulent les prélèvements nasaux", explique Moncef Benkirane, le directeur de cet institut. Ce protocole repose sur la technique de séquençage du génome du virus évitant l’étape de purification longue et gourmande en réactifs. C’est ce qu’on appelle la PCR NGS. "La machine fournit le résultat deux jours après", précise Moncef Benkirane pour qui tout laboratoire qui a des capacités de séquençage massif peut suivre cette "recette". Pour la mettre en œuvre, il faut toutefois qu’elle soit homologuée par le CNR-Pasteur, le centre national de référence. Est-ce que cette évaluation sera effectuée rapidement ? Combien de protocoles seront sur la ligne d’arrivée ? Contacté, l’Institut Pasteur n'a pas été en mesure de nous répondre.

    Une fois ce sésame obtenu, il faudra encore convaincre le ministère de la Santé d’accepter cette méthode très éloignée de la PCR faite par les biologistes médicaux avec des kits tout prêts. "Il n’y a pas d’improvisation possible dans ce dossier. Il est normal d’être évalué", estime Moncef Benkirane qui refuse de polémiquer. Mais on peut s’interroger sur le fait de passer à côté d’une technique qui permet de tester aussi massivement et pour un moindre coût puisque les développements et les salaires des chercheurs sont déjà financés par le CNRS. "Les décisions sont certes compliquées à prendre, regrette Pierre-Paul Zalio, à la tête de l’ENS Paris-Saclay, mais notre système français est très bureaucratique et manque de capacité à décider vite. Il y a de la latence, de l’opacité, des enjeux de territoires institutionnels. C’est dommage."

    Les laboratoires vétérinaires peu sollicités

    Les laboratoires départementaux d’analyse (LDA), également appelés laboratoire agro-vétérinaires, sont, eux aussi concernés par le décret du 5 avril. Il y en a 72 en France. 45 ont déjà été réquisitionnés par les préfets ou les ARS, selon Aurèle Valognes, présidente de l’Association française des directeurs et cadres des laboratoires vétérinaires publics d'analyses (Adilva) et directrice du LDA de la Mayenne. Dans la stratégie des 700 000, leur capacité est évaluée à 23 500 tests par semaine. Mais seuls 13 LDA ont commencé à tester et encore, bien au-dessous de leur capacité. "On pensait que ça allait démarrer plus brutalement", constate Guillaume Fortier, directeur de Labeo, l’un des plus gros laboratoires vétérinaires.

    Actuellement, le CHU de Caen me demande 350 prélèvements par jour mais depuis le début, je répète que je peux en faire 2 000 par jour. 

    Guillaume Fortier, directeur de Labeo à franceinfo

    Est-ce parce qu’elles n’appartiennent pas au monde médical que ces équipes sont si peu mobilisées ? Certains en sont persuadés. "Ajouté aux lourdeurs d’un système de santé ultra stratifié, on perd en échange d’informations, en confiance", selon l’un des responsables de ces laboratoires non médicaux. Il faut revoir l’organisation et simplifier la chaîne de décision." En attendant, ce sont les deux acteurs historiques, les laboratoires de biologie médicale de ville et des hôpitaux sur qui va reposer la stratégie du dépistage massif.

    Des robots chinois commandés en urgence

    Pour tenter d’atteindre cet objectif de 700 000 tests par semaine, la France s’est notamment tournée vers la Chine. C’est ainsi que fin mars, vingt machines ont été commandées par la direction générale de la Santé, au nom de l’État français, à la société MGI qui appartient au groupe chinois BGI (Beijing Genomics Institute). Ces robots chinois sont des machines haut-débit MGISP-960 qui permettent d’effectuer plus de 2 000 tests de dépistage par jour, en augmentant le débit d’extraction des acides nucléiques dans les échantillons à analyser. Selon nos informations, dix-neuf sites ont été choisis pour recevoir ce matériel (l’AP-HP ayant reçu deux machines) : l’hôpital de la Croix-Rousse, à Lyon (avant que le robot ne soit transféré dans un hôpital militaire), les CHU de Montpellier, Dijon, Strasbourg, Lille, Poitiers, l’hôpital Broussais à Paris, les CHU de Rouen, Rennes, Toulouse, Nancy, Tours, Marseille, Nantes, Orléans, Bordeaux et Clermont-Ferrand. Deux laboratoires privés, Médylis, à Lons-le-Saunier et Cerballiance CÃ

  • ”La” république, ou ”cette” république ? Peut-il y avoir (en France...) une ”bonne” République ? Débat avec D.C...(1/3).

                 L'avantage avec les commentaires que postent nos lecteurs ou -comme ici- les messages ou les questions qu'ils nous envoient directement à maisaquilafaute ? c'est, tout simplement, mais c'est essentiel, qu'ils font réfléchir, et qu'ils obligent à préciser toujours plus et toujours mieux tel ou tel point délicat. Ils permettent ainsi, dans un échange fécond, de progresser dans l'approfondissement et -ce sera probablement le cas cette fois- dans la formulation de nos idées.

                 D.C. nous a ainsi envoyé plusieurs courriers, auxquels nous en avons en partie répondu, mais en privé, en interne, en quelque sorte. Pourtant, à la réflexion (son premier courrier date de mai !), et comme le problème qu'il soulève est important, il nous a semblé utile de porter à la connaissance de tous le débat qui s'est engagé, afin que d'autres puisent apporter leur contribution.

                 Le point de départ semble simple, mais il emmène tout de suite très loin, beaucoup plus loin... D.C. pense que nous devrions modifier notre formulation et ne pas/ne plus attaquer "la" République. S'agirait-il seulement de sémantique, et de changer simplement un mot ? Bainville aimait à rappeler que c'est par les mots qu'on désigne les Idées, et que c'est sur les Idées qu'on s'entend. Autant dire qu'en attirant l'attention sur un mot, D.C. va -et c'est tant mieux, nous obliger à remuer, pour les préciser, plusieurs Idées.

                Allons-y...

                Voici le premier message (du 19 mai):
     
                ".....Je partage les principes mentionnés dans l'article du 11 mai 2009 (1, voir l'article ci dessous, en fin de note).

           Cependant, depuis bien longtemps il est historiquement démontré que la République ne peut se concevoir autrement que comme la res publica (le bien commun).

                 Or, nous connaissons le poids des mots. Il serait donc plus juste et judicieux, d'en finir avec l'opposition factice entre République et Monarchie que certains royalistes entretiennent commodément au plus grand avantage des républicanistes qui font de même. Ce qu'il faut à mon avis dénoncer, ce n'est pas la République qui ne peut et ne doit être que la res publica, ni la démocratie en tant que telle,  mais bien la Présidence de la République qui accapare tout, même le débat public tout en nuisant au bon fonctionnement de notre démocratie, et ce, en comparaison avec la Monarchie. Car qui peut mieux que le Roi présider à la res publica, notre bien commun en tant que Chef de l'Etat, à la fois véritable arbitre, garant de l'unité nationale et de la continuité historique de l'Etat, indépendant des partis politiques, des intérêts particuliers, des clans et des groupes de pression. Selon l'adage " le Roi ne saurait mal faire ". Sur la base de la Vème République, du moins ce qu'il en reste, en clarifiant et développant les prérogatives du Chef de l'Etat en tant qu'arbitre et garant, en restituant au 1er ministre la responsabilité de la politique gouvernementale devant le Parlement et en réformant le Sénat pour une représentation plus réelle des corps constitués et des mouvements politiques, la Monarchie en France aux sources du parlementarisme avec les Chartes de 1815 et 1830, pourrait, sur la base d'une Vème république restaurée, agir, en s'inspirant de la formule du Roi Louis-Philippe, selon laquelle : " le trône n'est pas un fauteuil vide".

                Qu'en pensez- vous ? Et de grâce stigmatisons la Présidence de la République mais pas la République, qui est seulement aux mains d'une oligarchie, dont le Roi précisément en la présidant comme le meilleur des républicains, à l'image de Juan Carlos en Espagne, mais avec encore plus de prérogatives, pourrait la garantir au plus grand profit de la nation toute entière. Approuver une nouvelle constitution comme le nouveau pacte capétien entre la dynastie et les Français, au service de la France, serait de confier la présidence de notre res publica, notre bien commun, de manière permanente au Roi et à ses successeurs, en clef de voûte de nos institutions."

    Et voici le deuxième message de D.C., en réponse à notre première réponse:

                 "...Ce qui, à mon avis, mine la société jour après jour, ceux sont les injustices, notamment sociales, consécutives à l'ultralibéralisme mis en oeuvre depuis 20 ans de manière planifiée, et étendu à l'Union européenne.

                C'est aussi la confiscation du pouvoir par une oligarchie politique.

                Pour ces deux raisons majeures, la tête de l'Etat doit être libérée de l'emprise des partis politiques et de leurs écuries présidentielles, pour qu'il existe à cette place un véritable arbitre et garant de la démocratie, pour notre res publica, à savoir le Roi.

                Dans mon esprit, il ne s'agit pas d'interdire les partis politiques, mais qu'ils restent à leur place, celle qu'ils n'auraient jamais dû ou pu quitter, à savoir le Parlement. Si le Gouvernement procède d'une certaine manière du Parlement devant lequel il demeure responsable, il procède aussi du  Roi qui y aurait aussi son mot à dire, lors de sa nomination et au cours de son fonctionnement, par toute sorte de moyens constitutionnels, même si de ce point de vue, il est fondamental qu'il demeure irresponsable ou inviolable. Et dans ce schéma, le Roi a nécessairement un rôle éminent dans les domaines régaliens de l'Etat, en plus de ses autres prérogatives, ce qui n'est pas rien. Quant au Parlement, les partis politiques n'ont pas seuls, vocation à représenter le corps électoral, une réforme du Sénat peut venir équilibrer l'Assemblée nationale, et la Monarchie peut se permettre l'introduction d'une proportionnelle plus représentative des opinions. Toute la société en serait transformée et la démocratie plus vivante, avec plus de justice sociale et de libertés.

                S'il faut donner un nom à ce que nous dénonçons communément, le mot République, ne me semble pas approprié, l'oligarchie me semble plus adéquat, elle désigne la confiscation du pouvoir par une minorité qu'elle soit de droite ou de gauche, qui de plus, sur l'essentiel, est convertie à l'ultralibéralisme."
    (à suivre...).

    (1) : pour mémoire, voici l'article du 11 mai, intitulé "Un Prince qui "porte le tout....." , que vous pouvez retrouver dans la Catégorie "Autour du Prince Jean !....

                 "Quelques grammes de douceur dans un monde de brutes...". Ce fut, il y a quelque temps, le slogan choisi pour ses produits par une marque réputée.

                 Dans son domaine, et dans son genre, quelle bouffée d'oxygène et d'air pur nous a offert le Prince Jean, entre les remugles des comptes de Julien Dray et les intrigues tordues de Bayrou/Ségo préparant ce qu'ils espèrent être leur revanche en 2012 !

                 Pendant quelques jours, on a comme sorti le tête de l'eau, on a respiré autre chose, on a pensé à autre chose: à la France, tout simplement. A son Histoire, à son avenir, à son être profond.

                 Et il est vrai que cela nous a changés, et que cela a fait du bien.....

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          Lorsqu'il parlait des Papes, en général, Jean Guitton avait coutume d'employer une formule très belle. Un pape, disait-il, c'est quelqu'un qui porte le tout. La définition est fort pertinente, en effet. Et l'on mesure le poids d'une telle charge...

                Mais ne pourrait-on, d'une certaine façon, appliquer cette manière de voir les choses au politique ? Il suffit de lire les journaux: de quoi ont parlé François et Ségolène - on aurait dit un fait exprés - la semaine précédant le mariage du Prince ? De leurs scores et de leurs pronostics pour la prochaine présidentielle. Une élection dont, soyons justes, l'actuel Président ne se désinteresse nullement, lui qui, après avoir laissé entendre qu'un seul mandat l'occuperait assez, laisse dire maintenant partout qu'il sera bien là.. en 2012 !

                Que portent-ils, tous les trois ? Le tout, ou le simple poids de leurs ambitions ? Poser la question, c'est y répondre....

                Et c'est du reste normal, et ce n'est pas là-dessus que nous les critiquons. Il est normal que, dans leur ordre, les candidats se préparent aux échéances. Ce qui ne nous parait pas normal, et même franchement mauvais, malsain et facteur d'affaiblissement pour la France, c'est qu'il n'y ait pas d'espace a-démocratique, dans l'Etat, permettant de faire sa place au temps long.

                Notre projet royaliste n'est pas une révolution des institutions, mais leur amélioration, leur perfectionnement, leur enrichissement, par l'adjonction, à la tête de l'Etat, de cette autorité stable et durable que nous avons connue pendant mille ans, et dont nous sommes privés depuis l'instauration de la République. Alors que, pour reprendre le mot de Christine Ockrent les anglais (et, plus généralement, les pays européens qui vivent en monarchie...) ont la chance d'avoir la reine d'Angleterre, ce qui n'est pas notre cas.....(1)

    (1): Voir la note "Quelle chance il a eue, Tony Blair !...", dans la catégorie "République ou royauté ?...".

  • Tout ce qui est Racines est bon... : Vauban classé au Patrimoine mondial de l'Humanité

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              On en a beaucoup parlé, à juste titre, et un peu partout : le réseau des sites majeurs de l'architecte militaire de Louis XIV  a été ajouté à la liste du patrimoine mondial de l'Unesco.     

                  Du moins douze des quatorze sites conçus en France par Vauban et candidats au titre de Patrimoine mondial de l'humanité ont été classés par l'Unesco : «Bazoches n'a pas été retenu, car il ne s'agit que de l'aménagement d'un château du XIIe siècle et Belle-Ile non plus, car sa citadelle a été atteinte dans son intégrité par un hôtel. Dommage car ce sont tous deux des sites privés», note Jean-Louis Fousseret, président du réseau des sites majeurs de Vauban, maire de Besançon, et initiateur du projet. Quoi qu'il en soit, c'est une belle victoire posthume pour Vauban, qui se voit ainsi consacré au plus haut niveau juste après qu'on ait dignement célébré son tricentenaire en 2007 (1). 

                  Durant sa vie, Vauban a bâti quelque 250 ouvrages militaires, du petit fortin à la ville fortifiée, dans les limites actuelles de la France mais aussi au-delà, car les frontières fluctuèrent au gré des guerres. Il s'illustra autant dans le plan d'ensemble (la fameuse «ceinture de fer», protégeant le «pré carré» de Louis XIV) que dans le détail : par exemple tandis qu'il sanctuarisait le littoral Ouest en utilisant chaque rocher et chaque relief, il faisait aussi remplacer les fusils à mèche des soldats, trop visibles de nuit, par des fusils à silex, évidemment plus discrets.            

                  On trouvera une foule d’explications et de renseignements très utiles sur l’excellent site dédié à Vauban et à son œuvre : http://www.sites-vauban.org/rubrique.php3?id_rubrique=41 ; et de très belles photos aériennes sur le site : http://www.linternaute.com/sortir/les-citadelles-vauban-vues-du-ciel/2007-l-annee-vauban.shtml

                 Mais pourquoi, au fait, s’intéresser et se réjouir de cette consécration universelle que reçoit aujourd’hui celui qu’il n’est nullement exagéré d’appeler un génial bâtisseur ?

                 Par simple gloriole, pour une certaine image de la France ? Oui, bien sûr, il est toujours agréable de recevoir une telle récompense, mais –comme dirait l’autre…- « C’est un peu court, jeune homme !.... ».

                 Pour les retombées économiques que cette distinction ne manquera pas d’avoir, par le biais du tourisme, sur les économies locales ? Là non plus, on ne va pas bouder son plaisir, et si ce classement apporte un surcroît d’activité, tant mieux ! Mais ce serait franchement mesquin de ne voir que ce côté des choses ; et les considérer seulement, ou surtout, sous cet aspect économique et mercantile, ce serait assurément, là aussi, prendre le problème du mauvais bout de la lorgnette.

                 En réalité, il y a au moins trois bonnes raisons de se réjouir de cette reconnaissance.

      

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               D’abord, Vauban est un excellent exemple de ce que peut être et de ce que peut faire une véritable écologie, dans le respect de la Nature, de la Création. Il a en effet toujours oeuvré dans le sens de l'intelligence des environnements –toujours différents- où il était appelé à travailler, avec amour et respect  pour tous les pays, tous les terroirs, appliquant le grand principe de Bacon « On ne commande à la nature qu’en lui obéissant ». Et la Nature le lui a bien rendu : il suffit de voir la saisissante beauté de ces forteresses dont il a parsemé la France, (et qui apparaît plus nettement encore aujourd’hui avec les vues aériennes dont, bien sûr, à l’époque nul ne disposait…) ; il n'est que d'admirer les époustouflants paysages de montagne, réellement à couper le souffle, qu’il a su composer dans sa volonté tenace de rester toujours en harmonie avec les données de la géographie…..

                Ensuite, non content de respecter la Nature, Vauban a respecté l’Homme, et dans tout ce qu’il a fait il a toujours privilégié l’économie de vies humaines. Saint Simon –qui avait pourtant la dent dure…- disait de lui qu’il était « …le plus avare ménager de la vie des hommes » : beau compliment ! Qu'il s'agisse de défendre une ville (et donc de soutenir un siège) ou d'en attaquer une (et donc de mener un siège, en terme savant, la "poliorcétique") Vauban a innové, ou amélioré, en le systématisant, tout ce qui pouvait permettre d'écourter un siège, donc d'économiser des vies.

              S'agissait-il d'attaquer ? Il codifie la technique d'approche en faisant creuser trois tranchées parallèles très fortifiées reliées entre elles par des tranchées de communications en ligne brisée pour éviter les tirs défensifs en enfilade. S'agissait-il de défendre (ce qui nous intéresse ici, avec ses citadelles) ? Plus rien ne "tient", depuis son invention, face à l'artillerie. Vauban n'a donc pas eu pas l'ambition insensée de construire des forteresses inexpugnables. Il a plutôt cherché à gagner du temps, en obligeant l'assaillant à immobiliser des effectifs dix fois supérieurs à ceux de l'assiégé. Et en le fixant suffisamment longtemps pour qu'une armée de secours vienne le prendre à revers, l'obligeant donc à lever le siège....  L'idée centrale étant de briser l'assaut ennemi en le fragmentant, afin de casser la vague assaillante, donc la rendre moins puissante, et pouvoir la disperser plus rapidement.

              Certes, comme l'oeuf de Colomb, c'est facile à dire; mais lui  l'a fait. En les améliorant à l'extrême, et en les portant pour ainsi dire à toute la perfection possible, il a ainsi définitivement imposé la fortification "en étoile"; il a systématisé l'abaissement des murs, offrant donc moins de prise à l'artillerie et a ses ravages (les "ouvrages rasants"); et systématisé aussi la protection des soldats derièrre d'épais remblais de terre, destinés justement à arrêter la course des boulets; et surtout il a multiplié les "forts détachés"... Ne disait-on pas, devant tant d'ingéniosité et de rationnalisation, à ce point systématisées: "Ville attaquée par Vauban, ville prise. Villé défendue par Vauban, ville imprenable..." ?

                 Cette humanité profonde, qui touche à l’Humanisme -comme son respect de la Nature est un respect de la Création, et donc du Créateur...- est un essai vigoureux pour adoucir, autant qu’il était possible, les rigueurs et les atrocités des conflits. Quelle différence avec la barbarie qui devait naître avec la levée en masse révolutionnaire, occasionnant par contre-coup les levées en masse des autres pays, et jetant toute l’Europe, masses contre masses, dans d’épouvantables boucheries !.....

                 Enfin Vauban c’est aussi et surtout Dieu et le Roi.  Quelle noblesse dans cette sorte de profession de foi, lorsqu’il écrit : "…Le Roi me tenant lieu de toutes choses, après Dieu, j'exécuterai toujours avec joie tout ce qu'il lui plaira de m'ordonner, quand je saurai même y devoir perdre la vie." Il a porté au plus haut point les vertus propres à notre Histoire et à ce vieux peuple, façonné par deux millénaires d’un héritage gréco-romain et chrétien fécond et vivifiant

                Louis XIV l'a bien jugé quand, à l'annonce de sa mort, il a sobrement déclaré qu'il avait été un « bon Français », parlant de lui avec beaucoup d’estime et d’amitié : " Je perds un homme fort affectionné à ma personne et à l’État ".....

    (1)   Les choses ne s’arrêteront peut-être pas là. Jean-Louis Fousseret a évoqué, en conclusion de la soutenance du dossier de candidature, le projet de créer dans sa ville, Besançon, un centre international consacré au patrimoine légué ou inspiré par Vauban. «En effet, on retrouve son influence sur tous les continents … à Québec , mais aussi au Mexique, au Maroc (Essaouira), à Saint-Pétersbourg, à Madagascar ou au Japon (Hokkaido).» En somme, il va devenir urgent de s'intéresser aux enfants de Vauban……

  • « Le procès de l’Europe » de Jean-François Mattéi, par Pierre de Meuse

    PdM AG DREUX 026.jpgJean-François Mattéi nous a donné il y a déjà trente mois un nouveau sujet de réflexion avec un livre intitulé « le procès de l’Europe ». La lecture de cet ouvrage est, comme toujours, pleine d’enseignements et même dispensatrice de plaisir. Jamais, en effet, on n’y trouve d’austères périodes, ni surtout de langage obscur ou ampoulé comme malheureusement de nombreux philosophes nous en infligent trop souvent le déchiffrement. Non, Mattéi parle en clair, dans un français hellénique, nous donnant sans cesse à penser avec le jeu des étymologies, un exercice que nous ont transmis les grecs, et qui révèle le sens des mots cachés sous l’acception commune. Parler avec élégance et naturel des choses graves et essentielles est le propre des grands esprits. Ils ne sont pas très nombreux par les temps qui courent. A l’érudition et la clarté, Mattéi ajoute le courage, puisque le sujet de son livre est  la culpabilisation de l’Europe et sa mise en accusation par la pensée dominante. A-t-on le droit de vouloir que l’Europe soit autre chose qu’un marché ou une expression géographique ? Peut-on être fier de son identité européenne alors que tant de penseurs, de Julien Benda à Bédarida, en passant par Frantz Fanon, pointent du doigt les crimes qui jalonnent l’Histoire de notre vieux continent, simple excroissance à l’extrémité de l’Asie ? Mattéi, non seulement se refuse à plaider coupable, mais réclame le non-lieu.  

    Avec sa connaissance exceptionnelle de la philosophie, notamment celle de Platon, mais aussi des sciences et de la musique, le philosophe montre comment la connaissance et la mesure du monde ont été possibles, non seulement par l’expérience de la main, comme l’ont fait toutes les cultures humaines, mais par deux inventions des grecs : la logique et l’abstraction, qui procèdent par généralisation et progression dialectique. Ainsi les Européens ont accumulé des inventions permettant de dominer la nature comme personne ne l’avait fait avant eux. Grâce à eux, selon Mattéi, le monde est devenu intelligible. De sorte qu’aujourd’hui, s’il existe encore des sciences et des musiques propres à certaines cultures, personne ne conteste que LA science et LA musique sont celles que les Européens ont conçues. Les fils de l’Europe ont créé un modèle universel de la raison et l’ont offert à l’humanité. Leur société, ouverte sur les autres et sur l’extérieur, a permis l’invention de l’humanisme. En effet, c’est l’Europe et l’Europe seule, éclairée par la pensée grecque et le christianisme, qui a imaginé que l’homme, l’homme en soi, pouvait exister. Et Mattéi d’égrener les étapes de cette naissance : de la Magna Carta à la controverse de Valladolid et aux bills of Rights, jusqu’à la déclaration des Droits de l’homme de 1948.mattei en attente.jpg

     

    Bien sûr, l’Europe a déraciné des cultures, au cours de ses conquêtes, mais elle ne fut pas la seule à le faire, ce qui est indiscutable, car toutes les cultures ont prospéré sur la ruine de celles qu’elles avaient dominées. De plus, ces cultures ne pouvaient pas survivre à  l’irruption d’une abstraction qu’elles n’étaient pas en mesure d’assimiler : « La vie de l’anthropologie européenne signe, quoi qu’on fasse, la mort des cultures indigènes. La voix de la nature s’éteint quand les signes de l’écriture apparaissent : le monde ne résiste pas à la prise du concept » (p.91). D’autre part, l'auteur estime que beaucoup ne méritaient pas de se perpétuer, à cause de leur cruauté ou leur brutalité, comme les Aztèques ou les Incas. Mattéi écarte donc l’accusation, qu’elle concerne la colonisation ou la traite, dont il souligne que ce n’est pas l’Europe qui a inventé l’esclavage, mais que c’est elle qui l’a aboli. Enfin, il montre que c’est aussi l’Europe qui a fait des autres cultures les objets d’un regard neutre et attentif, grâce à la distanciation, le « regard éloigné » dont parle Lévi-Strauss. A mesure que les langues et les légendes des pays conquis disparaissaient, les savants, plus tard les ethnologues les recueillaient pieusement et même amicalement.                                              

    Reste la question ultime, et la seule à notre avis, qui mérite qu’on la pose, car elle concerne notre survie : nous reste-t-il, à nous Européens, une identité qui nous soit propre ? Pouvons-nous espérer transmettre à nos enfants quelque chose qui n’appartienne à personne d’autre qu’à nous ? Mattéi répond, formellement oui, mais son argumentation attend encore quelques précisions pour être vraiment convaincante.  

    Le philosophe passe en revue les critiques de ceux qui refusent d’admettre que l’Europe possède une identité exprimée par une culture propre, qui la distinguerait radicalement des autres cultures. Ainsi, il donne l’exemple d’Alain Badiou, pour qui « l’Europe vide ou évide la pensée », Denis Guenoun : « le vide est son avenir positif » ; Ulrich Beck : « vacuité substantielle et ouverture absolue ». En bref, tous proclament que l’identité de l’Europe est impossible et que le seul destin de l’Europe est de devenir étranger à soi. On pense immanquablement à Lévi-Strauss qui se demandait ironiquement « comment nous métisser nous-mêmes ? ». Citant  Pierre Manent, Mattéi constate la permanence et la nocivité de cet interdit jeté sur l’identité de l’Europe.   

    Pourtant, on ne peut pas vouloir une chose et son contraire. Si, comme le dit Mattéi, « la raison européenne s’est toujours identifiée à son ouverture vers l’Universel » (p.182), si la culture européenne n’est pas une culture mais une métaculture, alors elles ne nous appartiennent pas, et c’est à bon droit que les philosophes précités, quelle que soit parfois leur médiocrité, nous emprisonnent dans nos promesses inconsidérées. Si l’Europe est une Idée offerte aux autres hommes, de quel droit voulons nous l’accaparer dans notre chair ? En somme, le modèle universel de la rationalité peut il encore avoir une identité ? L’universalité du droit édifiée sur les modèles des Lumières est-elle compatible avec l’affirmation de ce qui nous est propre ? Et pour finir : peut-on encore se considérer comme une culture si l’on s’affirme comme une « culture supérieure », surtout si cette affirmation est acceptée par les autres cultures ? Les historiens savent que le peuple qui impose sa vision à l’empire qu’il a conquis perd toujours son particularisme.  

    Afin de répondre à cette question restée sans réponse valable, quelle que soit la forme sous laquelle on l’énonce, il convient de se demander si l’Europe ne s’est pas empoisonnée avec ses propres concepts. Elle a, nous dit l’auteur, créé le modèle d’une « société ouverte ». Peut-être trop ouverte, au point de détruire toutes les légitimes différences ? Elle a, poursuit-il, osé l’ouverture à l’ « homme ». Mais qu’est-ce que l’homme ? Croit-on qu’après avoir fabriqué un tel concept, il va rester sagement limité aux passions humaines communes, à la littérature ou aux fins dernières ? Et laisser intacts traditions, langues, religions et particularismes ? Et les Droits de l’Homme dont le Pape Pie IX disait qu’ils étaient « une monstruosité », non pas parce qu’ils sont des droits, mais parce qu’ils se prétendent attachés à l’homme. Souvenons nous enfin de ce fameux quolibet de Maistre : « l’homme, je ne l’ai jamais rencontré ! » 

    Osons nous demander, en espérant que notre éminent ami ne nous en tiendra pas rigueur, s’il ne conviendrait pas, au lieu d’accepter sans réserve tout l’héritage accumulé depuis l’École  de Salamanque jusqu’aux Lumières, de faire sécession de cette Europe mentale, incompatible avec notre survie, et de nous demander à quel moment les choses ont commencé à déraper. Une telle démarche nous permettrait, comme disent les juristes, d’accepter la succession « sous bénéfice d’inventaire ». Après tout avons-nous toutes les raisons de nous glorifier de notre cadeau de la raison universelle offert au monde ? Le voyageur peut constater aisément en visitant les pays de tous les continents,  que  le monde s’enlaidit à mesure et à proportion de son européanisation. C’est le visage hideux de la modernité, certes, mais comme le montre Mattéi, c’est notre œuvre.                      

    Or, de Vico à Herder, à Maistre, Donoso Cortès et Spengler, nombreux furent les penseurs qui contestèrent et rejetèrent « l’idée d’une intelligibilité qui régirait aussi bien le monde que l’homme », refusèrent «  l’idée de raison universelle » et espérèrent « en finir avec l’idée linéaire menant l’humanité vers le progrès » (p.121). Avaient-ils tort, ou n’étaient-ils pas européens ?  

    mattei,europe,moderniteOsons aussi regretter que notre Europe contemporaine n’ait pas conservé comme les grecs classiques, à côté de leur philosophie, une poésie épique, qui façonnait les esprits et les volontés vers les vertus vitales. Osons déplorer encore que notre société ait perdu le sens du tragique, dont Mattéi nous dit qu’il « s’enracine dans le théâtre des Grecs plus que dans leur philosophie », ajoutant que «  c’est toujours cette dernière qui donne le la ».  

    N’allons pas jusqu’à souhaiter, comme Platon qui exigeait que les poètes restassent en dehors de la cité, réserver le même sort aux philosophes, afin que l’Europe, telle Ulysse « abandonne son nom de « Personne », Ουτις, lorsque le fils de Laërte aura retrouvé, avec la terre natale, son identité (p.93). 

    ___________________

    Jean-François Mattéi, Procès de l’Europe, Grandeur et misère de la culture européenne, PUF, 22 €, 264 p.

  • Mémoire • Homélie de la messe de requiem pour le roi Louis XVI, à Saint-Germain-l'Auxerrois

     

    Prône de la messe de Requiem pour le roi Louis XVI, le samedi 21 janvier 2017, il y a exactement deux semaines, en l’église Saint-Germain-l’Auxerrois, par le P. Jean-François Thomas s.j. 

    Monseigneur, Madame, mes chers Frères,

    Si le Roi des rois a connu une telle déréliction et une telle solitude lors de son passage parmi nous, il ne faut point être surpris qu’un roi terrestre digne de sa mission doive connaître une souffrance identique par imitation du Maître. Les succès humains sont toujours entachés d’une certaine prosternation devant les règles du monde et ceux qui les inspirent. Un fils de saint Louis, par son sacre, plie la nuque sous les insignes royaux et devient un serviteur du Christ, et donc de ses frères, se condamnant à ne pas être compris ou aimé s’il demeure fidèle.

    Les deux sceptres

    Le 11 juin 1775, dans la cathédrale Notre Dame de Reims, Louis XVI reçoit les deux sceptres : la main de justice, symbole de vertu et d’équité, ornée de la dextre divine bénissant, aide le roi à guider les égarés, à relever ceux qui sont tombés, à récompenser l’humilité et à confondre l’orgueil ; le sceptre royal, marque de puissance, rappelle au roi ses devoirs de mener une vie droite, de lutter contre le mal pour le bien de son peuple chrétien et d’aider chacun à demeurer sur un chemin de justice. Le Roi était pieux et il comprit la symbolique de tous les rites de son couronnement, désirant restaurer l’élan religieux brisé dans le royaume par la décadence et l’immoralité du siècle des Lumières. Il accepta le poids de la couronne et avec elle les épines qui le rendraient de plus en plus conforme à Celui qui l’avait revêtu de son autorité. Il entra ainsi, seul, dans sa fonction, entouré par la médiocrité tintamarresque de son époque. Dieu allait permettre que ce roi, le plus vertueux de tous depuis bien des règnes, connût l’abjection la plus complète, le dénuement, la trahison, la mort ignominieuse.

    L’homme seul

    Cette solitude vécue par le Roi, il ne la subit pas mais il l’embrassa, chaque jour davantage, alors qu’il avançait vers le sacrifice et vers le martyre. C’est là que réside son héroïsme et, osons le dire, sa sainteté. Un parcours identique fut suivi, cent trente ans plus tard, par Nicolas II et sa famille. Seulement la Russie moderne, de nouveau orthodoxe, a eu l’humilité de reconnaître son crime et de canoniser ces victimes de la violence diabolique. La France, elle, n’a pas eu le courage de confesser son péché, de courber la tête et l’Eglise catholique se désintéresse des vertus de ce Roi. La solitude consentie du Roi nous renvoie à la solitude qui est la nôtre depuis que nous l’avons assassiné en commettant ce parricide. Ce qui surgit du bain de sang de la révolution, et qui nous poursuit comme un spectre, est l’homme que nous sommes, dans toute sa faible nature, se condamnant à errer seul dans le monde par orgueil car il repousse désormais toute dépendance et toute servitude vis-à-vis du transcendant. De tout temps, cet homme a aimé la rhétorique, qu’elle tombât de la tribune ou de la chaire, du comptoir de bar ou d’un fauteuil d’académie. Cependant, la rhétorique révolutionnaire, mijotée par les soins pernicieux des philosophes de ce siècle enténébré, poussa l’homme dans un gouffre dont il ne remonta jamais. Les rhéteurs et les orateurs de Quatre-vingt-treize ont tous été engloutis par leur propre fureur, laissant l’homme, c’est-à-dire nous, leurs fils hélas, tout pantelants et pataugeant dans notre bourbier, ceci jusqu’à ce jour, puisque nous avons refusé de crier notre solitude de damnés et d’implorer le pardon. Léon Bloy écrit dans La Chevalière de la Mort : « Une rhétorique telle qu’on en avait jamais vu chez aucun peuple, apparut en ces temps, comme un météore prodigieux, annonciateur désorbité de la débâcle universelle. (…) Sous le masque sanglant d’une rhétorique transcendante poussée jusqu’à l’égorgement et jusqu’à la terreur suprême, l’homme immuable, le misérable Homme de la Chute, suait et haletait dans son éternelle lamentation. »

    Les consolations spirituelles

    Louis XVI fut privé de tous les dictames humains à partir de 1789 et il ne mit plus son espérance que dans les consolations spirituelles. Le 11 mars 1791, il écrivait dans une lettre adressée à un des précepteurs du Dauphin : « Parlez-lui et toujours avec respect de Dieu, de ses attributs et de son culte : prouvez-lui que l’autorité des rois vient de Dieu ; et que s’il ne croit pas à la puissance du Maître des rois, il sera bientôt la victime de ces hommes qui ne croient rien, méprisent l’autorité, et s’imaginent être les égaux des rois. Qu’il apprenne dès à présent, que la religion est digne de tous ses hommages ; que l’incrédulité et la fausse philosophie minent sourdement les trônes, et que l’autel est le rempart des rois religieux. Méfiez-vous de tous ces principes erronés, enfants perdus de la nouveauté, de l’esprit du siècle, et du poison de l’incrédulité. Loin de lui tous les ouvrages où la philosophie prétend juger Dieu, son culte, son église et sa loi divine. »

    « Mon frère, bientôt je ne serai plus… »

    Au fur et à mesure qu’il perdit de son pouvoir, il gagna en autorité naturelle car il s’en remit sans crainte entre les mains du Créateur. Ce que Bossuet souligna dans son oraison funèbre du grand Condé, pourrait s’appliquer à Louis XVI : « Lorsque Dieu forma le cœur et les entrailles de l’homme, il y mit premièrement la bonté comme le premier caractère de la nature divine, et pour être comme la marque de cette main bienfaisante dont nous sortons. » Cette bonté du Roi est éclatante dans les pires jours de son asservissement, de son emprisonnement, de son accusation, de sa condamnation. Il écrit du Temple, à Monsieur de Malesherbes, un de ses avocats : « Je ne me fais pas illusion sur mon sort ; les ingrats qui m’ont détrôné ne s’arrêteront pas au milieu de leur carrière ; ils auraient trop à rougir de voir sans cesse, sous leurs yeux, leurs victimes. Je subirai le sort de Charles I, et mon sang coulera pour me punir de n’en avoir jamais versé. » Et à Monsieur, son frère, il avoue dans une missive du 28 avril 1792 : « Lorsque la tempête brise le vaisseau, il ne reste au passager que le courage de la résignation ; c’est à peu près ma position. Les périls qu’on me fait appréhender, n’altéreront jamais ce que je me dois comme Roi, et comme chef d’une des premières nations du monde. » Le 11 août 1792, n’ayant plus d’illusion sur l’issue de son sort, il lui demande : « Mon frère, bientôt je ne serai plus, songez à venger ma mémoire, en publiant combien j’aimais ce peuple ingrat. Un jour rappelez-lui ses torts, et dites-lui que je lui ai pardonné. »

    1759951582.jpgExemple immortel…

    Extraordinaire vengeance que celle qui avoue son amour et qui répond à l’offense par le pardon ! Il s’agit là de la solitude et de l’horreur de la Croix. L’imitation est parfaite, et ceci sans ostentation et sans faux semblant car il ne s’agit pas d’une de ces déclarations grandiloquentes, ne prêtant pas à conséquence, dont sont familières les personnalités civiles et religieuses de notre époque. Nous connaissons trop, depuis deux siècles, ce qu’est la miséricorde républicaine qui écrase sans pitié ses ennemis comme lors de l’épuration de la Libération ou les événements de 1962, ou la mansuétude religieuse des autorités qui n’hésitent pas à rejeter ou à persécuter ceux qui n’ont pas l’heur de leur plaire. La déclaration d’amour et de pardon de Louis XVI n’est pas sournoise ou politique. Elle jaillit du cœur car elle y était enracinée depuis longtemps. Louis XVI est devenu grand dans cette solitude, dépassant la gloire de François Ier ou de Louis XIV. Le chaos révolutionnaire a fait émerger, malgré lui, ce que la monarchie de droit divin possédait de plus précieux, et que nul autre régime ne pourra jamais atteindre : une communion profonde et inaltérable avec Dieu duquel toute autorité légitime découle. Les révolutionnaires, dans leur cruauté satanique, ont rendu l’exemple de Louis XVI immortel et inégalé.

    … et fructueuse infortune

    Notre pays, plus que jamais, devrait méditer sur la fructueuse infortune solitaire du Roi qu’il a décapité. Tous les candidats possibles pour occuper la plus haute charge dans notre terre ancestrale ne seront jamais capables d’atteindre une telle altitude car leur ambition ne repose pas sur cet amour et ce pardon uniquement reçus dans le sacre par le souverain. Dieu ne permettra de restaurer le trône qu’à un homme habité par cette passion pour son peuple, ceci jusqu’à accepter de verser son sang malgré l’ingratitude.

    Ecoutons ces vers profonds du grand poète catholique oublié, Armand Godoy, dans Ite Missa est : 

    « Ce n’est pas pour moi que je demande ta miséricorde.

    Ce n’est pas pour moi : c’est pour les autres, pour mes pauvres frères.

    J’attends à genoux que ta clémence, Agneau de Dieu, m’accorde

    La fin de tous leurs désespoirs et de toutes leurs colères.

    J’attends à genoux que le souffle infernal de la Discorde

    Devienne azuré baiser de violettes printanières

    Et que l’Angoisse aux voix multiples et l’Ennui monocorde

    Se taisent à jamais sous le chant lumineux des rosaires.

    J’attends à genoux que la sinistre et ténébreuse horde

    Des crimes soit le clair essaim des caresses tutélaires.

    J’attends à genoux que ta clémence, Agneau de Dieu, m’accorde

    La fin de tous les tourments, la fin de toutes les misères.

    Ce n’est pas pour moi que je demande ta miséricorde.

    Ce n’est pas pour moi : c’est pour les autres, pour mes pauvres frères. »

     

    Nous attendons nous aussi que la divine Providence redonne à notre royaume orphelin le père que nous ne méritons plus. Des pages douloureuses de notre histoire vont s’ouvrir devant nous. Qui saura résister ? Qui saura demeurer fidèle aux dons insignes accordés jadis à cette terre ? Qui saura aimer et pardonner dans une solitude accablante ? Qui saura offrir sa tête pour le salut des autres ? Qui saura monter les marches de l’échafaud en regardant le ciel où le soleil commencera de se lever ? Il nous faut implorer et nous convertir, et ne jamais cesser d’espérer.   

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  • Trouvères et troubadours, par Frederic Poretti-Winkler.

    2737274333.76.jpgLa femme alors était sublimé dans les rapports comme dans les approches et parfois jusqu’à l’excès. C’est alors un véritable « culte » de celle-ci dans un respect profond. Thibaut IV de Champagne écrira des vers inoubliables déposés aux pieds de la reine Blanche de Castille : « Dame quand je fus devant vous. La première fois que je vous vis. Mon cœur allait si bondissant. Qu’il vous resta quand je m’en fus. Alors il fut mené sans rançon. Captif dans la douce prison. Dont les piliers sont de désir. Les portes de belle vision. Et les anneaux de bon espoir. » Plus tard Joinville, champenois, écrira en prose, accompagnant Louis IX (Saint Louis) en croisade en 1248. Vaucouleurs obtint sa charte de franchise lors de son passage, il était alors sénéchal de Champagne.

    frédéric winkler.jpg« Cette charte existe encore aux Archives nationales et porte au revers, de la main du chevalier : « Ce fut fait par moy » » (Georges et Régine Pernoud, Le tour de France médiévale, L'histoire buissonnière).
    Les trouvères et troubadours furent de toutes les couches de la société du plus grand au plus humble, écoutons Adam de la Halle :
    « Or verrai a vostre don. Se courtoisie i est fine. Je vous aim sans traïson…
    De biauté sans mesprison. Plus fort cuers s’i enrachine ».
    A votre don je verrai. Si la courtoisie y est fine. Je vous aime sans traîtrise…
    De beauté sans méprise. Plus fort un cœur s’y enracine.
    Ou ce chevalier champenois Gace Brulé :
    « De bien amer amors grant sen me baille, Si me trahit s’a ma dame n’agree. La voluntez pri Deu que ne me faille, Car mout m’est bon quant ou cuer m’est entree; Tuit mi panser sunt en li, ou que j’aille, »
    De bien aimer Amour me donne grand goût, Et il me trahit si je ne plais à ma dame.
    Je prie Dieu que sa volonté ne me fasse défaut, Car cela m’a fait du bien quand elle est entrée dans mon cœur. Toutes mes pensées vont à elle, où que j’aille…
    « En baisant, mon cuer me toli. Ma dolce dame gente ; Trop fu fols quant il me guerpi. Por li qui me tormente.
    En me donnant un baiser ma douce et gente dame me vola mon cœur. Je ne fus que trop fou quant il me laissa pour celle qui me tourmente… Disait Gui de Pontiaux. Une légende, le « Roman du châtelain de Coucy » (XIIIème s.) que je cite, afin de montrer l’époque et le tableau des mœurs vécues, est celle du châtelain Gui de Coucy, mort lors de la IVème croisade sous les murs de Saint Jean D’Acre, en 1191. Celui-ci avait laissé comme mission à son écuyer d’apporter son cœur à la dame qu’il honorait : la châtelaine Gabrielle de Vergy, sans doute en réalité la Dame de Fayel (ou Faël). Le mari de la dame, prévenu, fit préparer ce cœur lors d’un repas, qui fut mangé avant d’en révéler la vérité. La dame refusa après de se nourrir et mourut…

    Tant ai en li ferm assis mon corage. Qu'ailleurs ne pens, et Diex m'en lait joïr !
    C'onques Tristanz, qui but le beverage, Pluz loiaument n'ama sanz repentir ;
    Quar g'i met tout, cuer et cors et desir, Force et pooir, ne sai se faiz folage ;
    Encor me dout qu'en trestout mon eage. Ne puisse assez li et s'amour servir.
    Je ne di pas que je face folage, Nis se pour li me devoie morir,
    Qu'el mont ne truis tant bele ne si sage, Ne nule rienz n'est tant a mon desir;
    Mout aim mes ieuz qui me firent choisir; Lors que la vi, li laissai en hostage
    Mon cuer, qui puiz i a fait lonc estage, Ne ja nul jour ne l'en quier departir.

    Mon coeur lui est profondément attaché.
    Je ne pense à nulle autre. Dieu ! Être un jour avec elle !
    Jamais Tristan, lui qui but le philtre, n'a aimé sans réserve d'un amour plus loyal.
    Je m'y donne tout entier, cœur, corps, désir, force et pouvoir. J'ignore si c'est folie,
    pourtant que je doute encore que ma vie soit assez longue. Pour la servir et pour l'aimer.
    Ma conduite, je l'affirme, n'a rien d'insensé, même si son amour me mène à la mort,
    car je ne trouve au monde ni plus belle ni plus sage. et personne autant qu'elle ne comble mon désir ; J'aime mes yeux qui surent la remarquer. Au moment où je l'ai vue, je lui ai laissé mon cœur en otage; depuis il ne l'a pas quittée, jamais je ne chercherai à le reprendre…

    D’autres chevaliers malheureux se retrouvèrent dans cette légende, écoutons Colin Muset :
    Li chastelains de Couci ama tant. Qu'ainz por amor nus n'en ot dolor graindre;
    Por ce ferai ma conplainte en son chant, Que ne cuit pas que la moie soit maindre.
    La mort mi fet regreter et conplaindre. Vostre cler vis, bele, et vostre cors gent;
    Morte vos ont frere et mere et parent. Par un tres fol desevrement mauvés.

    II. Por qui ferai mes ne chançon ne chant, Quant je ne bé a nule amor ataindre
    Ne jamés jor ne quier en mon vivant. M'ire et mon duel ne ma dolor refraindre?
    Car venist or la mort por moi destraindre, Si que morir m'esteüst maintenant!
    C'onques mes hom n'ot un mal si tres grant. Ne de dolor au cuer si pesant fais.

    Le châtelain de Coucy aima si profondément que jamais personne n'éprouva, à cause de l'amour, une plus grande douleur; aussi dirai-je ma complainte en reprenant son chant : je ne crois pas que la mienne soit moindre. La mort me fait regretter et plaindre votre clair visage beau, votre gentil corps. Frères, mère et parents vous ont mise à mort, par une très folle et mauvaise séparation.
    Pour qui ferai-je désormais chansons et chants quand je n'aspire plus à atteindre aucun amour, quand je n'aspire plus, jusqu'à la fin de mes jours, qu'à maîtriser mon ire, ma tristesse et ma douleur? Que la mort vienne pour me délivrer! Si seulement il fallait que je meure maintenant ! Jamais homme n'eut un mal aussi grand, ni de douleur au cœur un si lourd fardeau.
    Il est intéressant de lire dans le poème courtois de Conon de Béthune les valeurs de la chevalerie, dans ses chansons de croisade lorsqu’il dit :

    Ahi ! Amours, con dure departie. Me convendra faire de la meillour
    Qui onques fust amee ne servie ! Deus me ramaint a li par sa douçour
    Si voirement que m'en part a dolour ! Las! qu'ai je dit ? Ja ne m'en part je mie!
    Se li cors vait servir Nostre Seignour, Li cuers remaint du tout en sa baillie.

    Pour li m'en vois souspirant en Surie. Quar nus ne doit faillir son Creatour.
    Qui li faudra a cest besoig d'aïe. Sachiez que il li faudra a greignour ;
    Et saichent bien li grant et li menour. Que la doit on faire chevalerie,
    Qu'on i conquiert paradis et honor, Et pris et los et l'amour de s'amie.

    Dieus est assis en son saint hiretage ; Or i parra se cil le secourront
    Cui il jeta de la prison ombrage, Quant il fu mors en la crois que Turc ont.
    Sachiez cil sont trop honi qui n'iront, S'il n'ont poverte u vieillece ou malage ;
    Et cil qui sain et joene et riche sunt. Ne pueent pas demorer sans hontage...

    Qui ci ne veut avoir vie anuieuse, Si voist pour Dieu morir liez et joieus,
    Que cele mors est douce et savereuse. Dont on conquiert le regne precïeus,
    Ne ja de mort nen i morra uns seus, Ainz naisteront en vie glorieuse.
    Qui revendra, mout sera eüreus : A touz jours maiz en iert Honors s'espeuse.

    Dieus! tant avom esté preu par huiseuse ! Or i parra qui a certes iert preus.
    S'irom vengier la honte dolereuse. Dont chascuns doit estre iriez et honteus
    Car a no tanz est perdus li sains lieus. U Dieu soufri pour nous mort angoiseuse.
    S'or i laissom nos anemis morteus, A touz jours mais iert no vie honteuse.

    Las! Je m'en vois plorant des ieus du front. La u Dieus vuet amender mon corage ;
    Et sachiez bien qu'a la meillour du mont penserai plus que ne di au voiage.

    Hélas! Amour, comme il sera dur de me séparer de la dame meilleure qui fût jamais aimée et servie! Que Dieu me ramène à elle, dans sa douceur, aussi vrai que je me sépare d'elle avec douleur! Pauvre de moi! Qu'ai-je dit? Je ne la quitte pas vraiment. Si le corps s'en va servir Notre Seigneur, le cœur demeure du tout en son pouvoir.
    A cause d'elle, je m'en vais en soupirant en Syrie, car nul ne doit manquer à son Créateur. Celui qui, en ce besoin, lui faillera, sachez qu'il lui faillera en plus grand; et sachez bien, les grands et les petits, que c'est là que l'on doit faire chevalerie, que là on conquiert paradis et honneur, prix et louange et l'amour de son amie.
    Dieu est assiégé en son saint héritage. Maintenant il apparaîtra comment le scourront ceux qu'Il jeta hors de la prison ténébreuse quand Il fut mis à mort sur la croix, que les Turcs ont. Sachez que ceux-là sont honnis qui ne partiront pas, à moins qu'ils soient dans la pauvreté ou la vieillesse ou la maladie ; et ceux qui sont sains et jeunes et puissants ne peuvent rester ici sans honte…
    Qui ne veut vivre ici-bas une vie pleine d'ennuis, qu'il aille mourir pour Dieu dans la liesse et la joie, car la mort est douce et savoureuse, par laquelle on conquiert le royaume précieux; et pas un seul ne mourra de mort, mais tous naîtront à une vie glorieuse; celui qui reviendra sera très heureux: à tout jamais Honneur sera son épouse.
    Dieu! Nous avons longtemps été preux par oisiveté ! Maintenant il apparaîtra qui sera preu en vérité, et nous irons venger la honte douloureuse dont chacun doit être irrité et honteux, car en notre temps a été perdu le lieu saint où Dieu souffrit pour nous une mort d'angoisse; si maintenant nous y laissons nos ennemis mortels, notre vie en sera honni à jamais.
    Hélas! Je m'en vais, pleurant des yeux de mon front, là où Dieu veut amender mon cœur; et sachez bien qu'à la meilleure (femme) du monde je penserai en ce voyage plus que je ne dis.
    Pardonnez cette citation un peu longue mais elle représente l’esprit de nos ancêtres, comme leurs priorités dans leur vie d’homme. L’essentiel alors était l’invisible et non les fruits du matérialisme comme aujourd’hui. Il serait intéressant d’analyser d’ailleurs si cela rend plus heureux les hommes, permettez-moi d’en douter. Il ne serait pas long d’observer autour de soi, la réalité de notre monde contemporain avec sa misère morale, dont le taux de suicide, tabou sociétal, doit être caché…

    Et li chevaliers qui l'a escoutee mist pié fors d'estrief, descent en la pree, devant li se mist a genouz : «Bele, vez ci vostre ami douz.». Merci, merci, douce Marote, n'ociez pas vostre ami douz !
    Quand il l'a entendue,le chevalier hors de l'étrier a mis le pied. Dans la prairie, il est descendu, devant elle, il s'est agenouillé. - Belle, le voici, votre ami doux. Pitié, pitié, douce Marote, ne tuez pas votre ami doux ! (A la Fontenele)

    F. PORETTI-Winkler (L'Ethique de la Reconquete, à suivre...)

  • Caroline Galactéros : « Pourquoi la France ne (devait) pas s'associer aux frappes en Syrie »

    Croit-on le peuple syrien dans son ensemble à l'unisson des opinions occidentales ? 

     

    Une analyse de Caroline Galactéros

    Alors que la France vient de frapper la Syrie, en représailles aux attaques chimiques supposées, Caroline Galactéros plaide pour un sursaut d'indépendance nationale. Selon elle, la France ne doit pas s'aventurer dans une nouvelle coalition. Cette tribune brillante écrite avant que les frappes aient eu lieu [Figarovox, 11.04] apporte un éclairage dont le champ est vaste, très complet, comme toujours réaliste et solidement documenté. Le tout conduit avec un remarquable courage intellectuel. Sur un sujet où les intérêts de la France et de la paix sont évidemment engagés.  LFAR  

     

    2286962327.jpgLa messe semble dite et une atmosphère de veillée d'armes plane sur Paris, tandis que le jeune prince d'Arabie Saoudite quitte la capitale et que notre président est en étroit dialogue avec son homologue américain. La France pourrait, en coordination avec Washington, frapper de manière imminente les forces du régime syrien en représailles d'une nouvelle attaque chimique imputée de manière «très probable» mais en amont de toute enquête, aux forces de l'abominable tyran Assad soutenu par les non moins affreux régimes russe et iranien.

    Il faudrait agir vite, se montrer ferme, intraitable, juste ! Il s'agirait là d'un « devoir moral » ! On a bien entendu et lu. Le discours moralisateur sur la sauvegarde des civils innocents, pourtant inaudible après sept ans de guerre et de déstabilisation de la Syrie, est toujours le même. C'est là le comble du cynisme en relations internationales, que nous pratiquons pourtant sans états d'âme depuis des décennies. Pendant ce temps, la guerre silencieuse du Yémen continue. Ces civils-là n'existent pas, ne comptent pas.

    Mais certaines images de guerre et de civils otages d'une sauvagerie généralisée irritent plus que d'autres nos consciences lasses d'Européens déshabitués de la violence et gonflés d'une prétention à connaître, dire et faire le Bien. Soit.

    Mais agir contre qui ? Qui faut-il punir ? Le régime de « l'animal Assad », comme l'a appelé Trump ? L'Iran ? La Russie ? Vraiment ? Et si ce trio noir que l'on désigne exclusivement depuis des mois à la vindicte populaire internationale n'était qu'un leurre, proposé à notre indignation sélective pour ne pas réfléchir à nos propres incohérences ?

    Personne ne se demande pourquoi cette nouvelle attaque chimique arrive maintenant, au moment même où la Ghouta orientale repasse sous contrôle gouvernemental syrien et parachève sa reconquête territoriale, face à des groupuscules rebelles rivaux globalement en déroute et plus que jamais prêts à se vendre au plus offrant pour survivre et espérer compter ? Personne ne s'autorise à douter un instant, quand le ministre russe des affaires étrangères rapporte que les observateurs du Croissant rouge syrien envoyés sur place n'ont rien vu ressemblant à une attaque ? Serguei Lavrov ment-il carrément au Conseil de Sécurité des Nations unies ou bien faut-il penser que Moscou ne contrôle pas tout ce qui se fait au plan militaire sur le théâtre ? Ou que des éléments de l'armée syrienne elle-même agiraient en électrons libres ou auraient été « retournés » ? À qui profite le crime ? C'est cette vieille question, mais toujours pertinente, qui paraît désormais indécente.

    Quel serait pourtant l'intérêt de la Russie de laisser perpétrer une telle attaque, alors que, ne nous en déplaise, bien davantage que notre « Coalition internationale », elle cherche la paix, l'organise pragmatiquement, et est la seule depuis sept ans à engranger quelques résultats qui évidemment contreviennent à nos intérêts et à ceux de nos alliés régionaux ?

    On semble aussi avoir totalement oublié une donnée fondamentale du conflit : les malheureux civils de la Ghouta, comme ceux des ultimes portions du territoire syrien encore aux mains des « rebelles » djihadistes ou de Daech, sont des boucliers humains, peut-être même, en l'espèce, sacrifiés par ces mêmes apprentis démocrates suppôts d'al-Qaïda et consorts pour entraîner l'Occident dans une guerre ouverte avec Moscou et Téhéran.  

    Car si l'on quitte le microscope pour la longue-vue, il est permis de décrire à partir de cette dernière séquence syrienne un contexte stratégique global infiniment préoccupant pour l'Europe, et singulièrement pour la France, qui risque de prendre les avant-postes d'une guerre qui n'est pas la sienne, dont elle fera les frais et qui neutralisera durablement l'ambition présidentielle affirmée de prendre le leadership politique et moral de l'Union européenne. Nos amis allemands ou italiens sont d'ailleurs moins cynico-idéalistes, mais plus prosaïques que nous. Ils avancent prudemment, vont et viennent entre Beyrouth et Damas pour pousser leurs pions en cette phase douloureuse et recueilleront les fruits de notre marginalisation radicale quand la reconstruction syrienne arrivera.

    La ficelle est si grosse et la pelote si bien déroulée depuis des mois qu'on ne la voit plus en effet. On punit la Russie. On la punit d'être la Russie, déjà, et d'avoir réussi son retour sur la scène mondiale. On la punit de vouloir la paix en Syrie et de chercher à la mettre en musique politiquement à Astana ou à Sotchi. On la punit d'avoir sauvé Damas et son régime diabolisé du dépècement qu'on leur promettait et qui s'est fracassé sur la résilience populaire et gouvernementale syrienne et a déjoué partiellement au moins la confessionnalisation des affrontements politiques et sociaux que l'Occident encourage, sans en comprendre le danger insigne pour ses propres sociétés, et notamment en Europe.

    La guerre en Syrie a été gagnée militairement par l'armée gouvernementale. Militairement, mais pas politiquement. Cette victoire sur le terrain au prix d'une guerre brutale (comme toutes les guerres, même celles menées depuis les airs et qui n'ont de chirurgicales que le nom), nous est proprement insupportable car cela nous force à faire la paix, ce que nul ne veut mis à part… Moscou. Ah, Moscou ! L'impudent Vladimir Poutine trop bien réélu qui nous nargue avec sa coupe du monde, où des millions de gens vont découvrir un visage de la Russie qui ne les terrifiera pas.

    Et puis derrière Moscou, on vise évidemment Téhéran, dont Israël, en pleine idylle officielle avec le centre mondial du salafisme - l'Arabie saoudite - qui a toutefois opportunément décidé de faire peau neuve, ne peut tolérer l'émergence régionale, tant le niveau sociétal, culturel, technologique et commercial de ce pays lui fait de l'ombre bien au-delà de la seule crainte d'un (dés)équilibre stratégique modifié par sa nucléarisation ultime.

    Bref, nous sommes en train de tomber dans un vaste piège qui se joue sur plusieurs fronts, et de nous ruer, en croyant ainsi exister, sur le premier os qu'on nous jette. De ce point de vue, l'affaire Skripal pourrait bien n'avoir été que le hors-d'œuvre de la séquence actuelle. Elle a posé le premier étage d'une repolarisation politique et sécuritaire de l'Europe autour de Londres, et surtout sous la bannière de l'OTAN. Car c'est là l'ultime manœuvre : remettre au garde-à-vous les Européens qui, depuis l'arrivée de Donald Trump et le Brexit, s'étaient pris à rêver d'une autonomie européenne en matière de politique et de défense… Péril suprême pour le leadership américain sur le Vieux Continent, heureusement contrebalancé par les rodomontades de quelques nouveaux Européens qui refusent leur arasement identitaire et mettent à mal tout projet d'affranchissement sécuritaire collectif. Le Secrétaire américain à la défense, le général Mattis, a d'ailleurs été très clair : les Européens doivent en effet consacrer 2 % de leur PIB à la défense, mais pour acheter des armes américaines et demeurer dans l'orbite otanienne évidemment, l'Alliance constituant le cadre naturel et nécessaire de la défense de l'Europe. Fermez le ban !

    Nous sommes donc en train d'être clairement repris en main par l'OTAN, mais on ne s'en rend pas compte car on nous vend la nécessité d'une solidarité sans failles, donc manichéenne, face à une « offensive russe » pour diviser l'Europe (comme si nous n'étions pas assez grands pour nous diviser nous-mêmes) et dominer le Levant. C'était probablement l'objet de l'affaire Skripal comme de la présente montée au front sur la Syrie. La volte-face aujourd'hui même d'Angela Merkel sur le projet Northstream-2 ne fait qu'amplifier cette polarisation. Moscou est poussé à se crisper donc à s'isoler par tous les moyens. Par les sanctions, par les vrais faux empoisonnements d'espions en plein Londres et jusqu'à cette décision allemande qui ne peut que durcir la position russe en Syrie et assurer la montée des tensions, le Kremlin n'ayant plus d'autre alternative que de jouer le tracé Qatari qui passe par la Syrie… Redoutable manœuvre anglo-américaine donc, à laquelle Paris et Berlin semblent ne voir que du feu.

    Il faut donc s'y résoudre : l'Amérique d'Obama a vécu. Celle de Trump et de ceux - néoconservateurs de toutes obédiences - qui l'environnent très fermement désormais, a radicalement changé de posture. Certes le président américain annonce son souhait de quitter la Syrie, mais il avoue pouvoir changer d'avis si l'Arabie saoudite payait le coût de cette présence ! On ne peut être plus clair et c'était aussi tout le sens de son premier voyage à Riyad au printemps dernier: réassurer l'allié du Quincy (dont le Pacte éponyme était rendu caduc par la nouvelle indépendance énergétique américaine) contre 400 milliards de dollars de contrats pour l'économie américaine. Et puis, tandis qu'il déclare au grand dam de ses généraux et pour tromper son monde qu'il veut partir, il se consolide une vaste zone d'influence américaine à l'est de l'Euphrate avec les FDS arabo-kurdes.

    Washington, dans le vaste mouvement de repolarisation du monde, entend en tout état de cause demeurer le môle principal d'arrimage d'un Occident qui doute face à une Chine qui structure à son rythme et via un affrontement de basse intensité mais tous azimuts, un véritable « contre-monde ». L'Amérique, fébrile, joue son va-tout pour renverser la vapeur d'un ordre international qu'elle ne contrôle plus mais qu'elle veut encore dominer coûte que coûte. Elle veut l'affrontement pour réinstaller sa préséance face à Moscou, Téhéran et Pékin, cible ultime de l'intimidation. C'est là pourtant un combat profondément à contresens de l'évolution du monde. Affligés du syndrome postmoderne de la vue basse et celui de l'hybris technologique, nous oublions que la vie est longue.

    Au-delà, cette affaire, comme d'innombrables autres, met en évidence une évolution dangereuse : la substitution à la réalité non d'une image déformée, mais carrément d'une autre réalité et le retour de la tentation de la guerre préventive préemptive, qui évite d'enquêter. La question est vraiment très grave pour l'essence même de la politique internationale. Préfère-t-on l'image au réel, les fake news à l'analyse, le sensationnalisme à la rigueur ?

    Alors que voulons-nous ? Ce sera bientôt clair : si nous voulons sauver la Syrie, il nous faut surtout ne pas nous joindre à une coalition qui agira hors de tout mandat de l'ONU et qui portera le poids d'une guerre dont le peuple syrien est la dernière roue du carrosse et sera la victime immédiate. La grande question est donc : mais que vient faire Paris dans cette galère ? On se trompe comme souvent d'ennemi, d'allié, de posture, de tout en somme. Et si l'on essayait l'audace, le courage et la singularité ? Notre siège au Conseil de Sécurité, que guigne l'Allemagne de plus en plus ouvertement, en serait relégitimé. Nous posons-nous seulement la question de notre intérêt national (qui ne se réduit pas à des contrats d'armement) et des raisons pour lesquelles on nous sert ainsi l'injonction d'un alignement sur le thème du Bien contre le Mal et de la guerre préventive ?

    La France est désormais, en Syrie comme ailleurs, au pied du mur. Elle a l'occasion inespérée de faire valoir une approche prudente et rigoureuse, une voix pour la paix, une singularité. Nous avons déjà une influence au plus bas dans la région. Si nous voulons compter de nouveau, nous devons regarder la réalité dans les yeux et admettre que « nous avons eu tout faux » depuis 2011. Il n'est jamais trop tard et notre président peut encore choisir de compter véritablement au regard de l'Histoire et dans le cœur des peuples

    Une guerre contre l'Iran et la Russie n'est pas la nôtre. Elle ne correspond nullement aux intérêts stratégiques français, ni à ceux de l'Europe. Nous avons déjà si naïvement collé aux Britanniques qui veulent quitter l'Union, sans preuve et par principe, dans l'affaire Skripal. Pourquoi cette fuite en avant ?

    Dans ce nouveau grand jeu, la France a encore l'opportunité inespérée de compter plus que son poids démographique ou même économique ne le lui permet, en affirmant une singularité et une cohérence. Plus que jamais le réalisme, aux antipodes du cynisme, doit être le bouclier et la lance de notre nouvelle posture internationale. Il nous rapproche non d'une justice abstraite mais de l'équité et de la clairvoyance. La France n'a pas le droit et aucun intérêt à être malhonnête dans son interprétation des faits. Elle a tout à gagner à la lucidité et elle doit d'urgence montrer au monde comme aux peuples et pouvoirs du Moyen-Orient qu'on ne l'égare ni ne la soumet si facilement.  

    Docteur en science politique et colonel au sein de la réserve opérationnelle des Armées, Caroline Galactéros est présidente du think tank Geopragma. Auteur du blog Bouger Les Lignes, elle a notamment publié Guerre, Technologie et société (éd. Nuvis, 2014).

  • Robert Ménard : « Estrosi, c'est une droite qui a honte d'elle-même », par Géraldine Woessner.

    Source : https://www.lepoint.fr/

    Le maire de Béziers revendique une parole décomplexée et étrille les leaders de la droite traditionnelle.

    Des étoiles à nouveau alignées… Et une ambiance morose. Quelque 200 élus du Rassemblement national se réunissent à Fréjus (Var) ce week-end, pour une rentrée politique qui marque le lancement de la campagne de Marine Le Pen.

    Officiellement, le parti se sent les voiles gonflées : la sécurité, angle mort de la politique d'Emmanuel Macron, est à nouveau au premier rang des préoccupations des Français, et la droite parle de tant de voix qu'elle reste inaudible. « Ensauvagement », « localisme », « souverainisme »… Les idées longtemps portées par le Rassemblement national sont à la mode.

    Et pourtant, les élus RN ont pris le train, vendredi soir, en traînant des pieds : le parti, financièrement à genoux, a mangé la poussière aux dernières municipales. « C'est un répulsif », tranche le maire de Béziers, Robert Ménard, élu en 2014 avec le soutien du RN (et réélu ce printemps au premier tour), mais qui n'en a jamais été membre. Et qui, aujourd'hui, s'impatiente : si Marine Le Pen et son parti ont longtemps incarné et servi les idées des électeurs les plus à droite, les mêmes plombent aujourd'hui leurs chances, pense-t-il, d'accéder au pouvoir. Entretien.

     
    Le Point : Écouterez-vous le discours de Marine Le Pen dimanche ?

    Robert Ménard : Bien sûr, avec attention. Elle est une actrice incontournable de la scène politique, et j'ai des sympathies avec ce qu'elle dit sur de nombreux sujets, comme l'identité ou l'immigration, même si je n'ai jamais caché mes divergences. Mais je n'y crois plus beaucoup… Je n'arrive pas, aujourd'hui encore, à faire abstraction du débat de l'entre-deux tours, qui a montré un certain nombre de limites. En même temps, je plaide coupable, parce que j'ai cru qu'au fond Marine Le Pen aurait beaucoup de mal à se relever de ce débat-là, or elle a retrouvé le même niveau d'électorat qu'il y a trois ans.

    Si elle est candidate à la présidentielle de 2022, vous lui prédisez une défaite…

    Je pense que, aujourd'hui, elle n'est pas en position de gagner. Ça l'exaspère quand je dis cela, mais cela n'a rien contre elle ; je pense simplement que le courant de la droite qu'elle incarne n'est pas suffisant pour gagner. Le discours qu'elle tient sur les questions économiques n'est pas en phase avec ce dont notre pays a besoin.

    J'ai beaucoup de mal à voir les différences entre les programmes du RN et de M. Mélenchon sur les questions économiques et sociales.

     

    C'est-à-dire ?

    Marine Le Pen n'arrive pas à reconnaître qu'une personne qui n'est pas de son bord politique puisse, parfois, avoir raison. Sur la réforme de la SNCF, même si je serais allé plus loin que lui, Emmanuel Macron a fait de bonnes choses. Et sur les retraites aussi ! Pardon, mais on ne peut pas continuer, comme le fait le Rassemblement national, à faire croire aux Français qu'un statu quo soit envisageable, vivable, ou même souhaitable ! Je ne partage pas les analyses très gauchisantes du RN sur les questions économiques et sociales. Mais cela ne veut pas dire qu'on ne peut pas travailler ensemble.

    Pour vous, Marine Le Pen se « mélenchonise » ?

    J'ai beaucoup de mal à voir les différences entre les programmes du RN et de M. Mélenchon sur les questions économiques et sociales. Il n'y en a quasiment pas ! Or, je pense que la France n'a pas besoin de ce discours un brin racoleur.

    Rien n'est possible sans elle, et rien n'est possible contre elle.

    Quel avenir voyez-vous pour votre courant de pensée ?

    Aujourd'hui, Marine Le Pen occupe un espace qui est suffisamment important pour empêcher l'existence de toute autre candidature à droite de la droite. Rien n'est possible sans elle, et rien n'est possible contre elle. Est-ce que quelque chose est possible avec elle ? C'est la question que je me pose à longueur de temps…

    La droitisation de l'électorat, mesurée dans plusieurs enquêtes, ne profite à aucun parti. Marine Le Pen réfléchit à quitter la présidence du RN pour « prendre de la hauteur », tirant aussi la leçon de la victoire de Louis Aliot aux municipales, qui a conquis Perpignan en fuyant toute mention du Rassemblement national. Est-ce une bonne stratégie ?

    Je me souviens de discussions avec Marine Le Pen avant les élections de 2017. Je lui ai dit : « Tu dois quitter le FN, c'est le meilleur signe que tu puisses donner pour les gens qui ont envie de voter pour une femme solide, capable de nouer des alliances. » C'est une nécessité absolue ! On va voir si elle le fait… Mais est-ce que ce sera suffisant ? Non. La victoire passe par des efforts programmatiques, et par une façon d'être différente. Les gens n'en peuvent plus des partis politiques ! Du sien comme des autres.

    Avec Louis Aliot, êtes-vous en train de construire une notabilité en dehors du parti ?

    Ce que je constate, c'est que Louis a gagné les élections sans le logo de son parti, et qu'il a tout fait pour faire oublier qu'il était au RN. Les dernières élections ont été pour eux un échec total  ! Leur seule victoire, Perpignan, se fait contre eux en termes d'image. Alors oser présenter la victoire à Perpignan comme une victoire du RN, il ne faut pas manquer de culot ! Mais il a eu totalement raison, et c'est ce qu'il faut qu'on fasse dans toute la France.

    Vous voulez dissoudre le RN ?

    Non, mais il faut construire autre chose. Personne ne veut d'un nouveau parti. On veut des gens capables de s'entendre, à la fois avec Marine Le Pen, et avec une droite de gouvernement plus raisonnable, afin de trouver une candidature qui arrive à associer ces deux électorats. Cela s'est vu dans l'Histoire.

    Que préconisez-vous, s'il n'y a plus de parti ?

    Notre courant de pensée est incapable aujourd'hui de gagner des élections, on les perd systématiquement. Que faire ? La première solution est de se dire que puisque aucune personnalité n'émerge, laissons passer notre tour en attendant que, dans sept ans, Marion Maréchal ou d'autres viennent remplir ce vide. On peut, deuxième hypothèse, soutenir une candidature de témoignage, comme celle de Jean-Frédéric Poisson (mais personne ne peut penser sérieusement qu'il puisse gagner les élections). Troisième hypothèse : on regarde du côté de la droite de gouvernement, chez les Républicains, et on en cherche un qui serait moins inexistant, moins insipide que les autres…

    Dans cette galaxie, François-Xavier Bellamy se distingue : il respire l'honnêteté. Mais peut-il incarner un vote populaire, pas uniquement versaillais ? Je n'en suis pas sûr. Quatrième hypothèse : on reconnaît que la politique, ce sont des alliances et des compromis, et on essaie d'aider une nouvelle fois Marine Le Pen. Enfin, dernière hypothèse : on peut imaginer une candidature de rupture, avec une personnalité audacieuse. Une candidature d'envie, de souffle, d'ambition, qui sache se mettre à distance des partis politiques, qui mènerait une candidature de liberté, époustouflante, une campagne qui brûle ses vaisseaux…

    Marion Maréchal ? Le général de Villiers ?

    Je ne vais pas passer ma vie à attendre qu'une jeune fille se décide à vouloir faire de la politique. Et je ne suis pas de ceux qui pensent que parce que tu es galonné, tu es en état de diriger un pays. N'est pas de Gaule qui veut, et on n'est plus en 1940, ni en 1958. Je pense aujourd'hui, mais j'extrapole peut-être, que les expériences et les succès que l'on engrange, certes au niveau d'une ville, certes au niveau d'une agglomération, certes dans le Midi, indiquent qu'il y a quand même un passage possible… À côté du RN, pas contre lui.

    Vous avez eu des mots peu amènes envers Christian Estrosi, qui appelle les élus LR à faire alliance avec Emmanuel Macron. « C'est la droite châtrée », dites-vous…

    Honnêtement, le maire de Nice se fout de la gueule du monde. Il va à la niche ! C'est une droite qui a honte d'elle-même. Sur les questions du terrorisme, de l'identité, de l'immigration, M. Macron n'a rien fait avancer. Leur problème est que, à droite, aucun candidat n'émerge. Qu'est-ce qui différencie M. Baroin de M. Macron ? Rien. Absolument rien, rien de rien. Ils font carrière à droite, à gauche, au milieu : ils font carrière ! Et Mme Pécresse… Elle est de droite, Mme Pécresse ? C'est une douce plaisanterie. Ces gens sont à mille lieues de ce à quoi j'aspire.

    Comment l'ancien fondateur de Reporters sans frontières vit-il le procès des attentats de Charlie Hebdo, de Montrouge et de l'Hyper Cacher ?

    Quand je lis, dans un sondage qu'a commandé Charlie, que 37 % des 15-24 ans aujourd'hui font passer leurs convictions religieuses avant les valeurs de la République (et le taux est de 74 % chez les jeunes musulmans !), je suis effrayé. Mais quel échec pour nous, quel échec ! On constate un recul dans la tête des gens, parce qu'on ne défend pas ce qu'on est. Regardez combien, dans la classe politique, ont des prudences de Sioux, et parlent des caricatures de Mahomet comme d'une « provocation » ? Je dois dire que j'ai trouvé très beaux les mots du Premier ministre, qui a dit : « Toujours Charlie. » C'était juste. Si j'ai envie de détester l'islam et que des gens ont envie de détester le christianisme, ils sont libres de le faire ! C'est ce qui fait notre pays. Dieu sait si ce journal m'a étrillé, mais je me bats pour que les journaux comme Charlie Hebdo existent. La liberté d'expression, de parole, de presse, doit être défendue sans limites. En dehors des appels explicites à la violence, tout est tolérable et tout doit être toléré.

    Y compris une politique-fiction représentant une élue de la République (Danièle Obono) en esclave ?

    Je comprends très bien qu'on puisse être blessé, personnellement, par un certain nombre de choses, mais ce qui peut être dit en est une autre ! À travers ce feuilleton, Valeurs actuelles voulait rappeler que les Africains eux-mêmes ont nourri la traite, et l'esclavage dans les pays musulmans. Des Africains ont vendu des Africains. On peut être maladroit dans la forme. Mais on n'aurait plus le droit de dire cette vérité ? Aujourd'hui, l'émotion est tellement prégnante dans le débat public que toute précision raisonnable, historique, n'a plus sa place. Écrivez ce que je viens de dire, vous verrez les emmerdes que vous allez avoir…

    L'autocensure est un poison. Il n'y a plus besoin de procès : le simple fait d'être montré du doigt et menacé de poursuites par une association fait de vous un coupable, parce que la presse va se jeter dessus, et entraîner l'opinion. La presse est tellement moutonnière, elle chasse en meute… Cinquante articles diront que vous avez été « mis en cause ». Ma femme, députée, a son compte Twitter bloqué depuis un an et demi, pour avoir dit avec humour, au moment du débat sur la fessée, que la petite Greta Thunberg en mériterait une !

    Mais ils nous cassent les couilles, avec leurs éoliennes !

    Vous ne semblez pas fou d'écologie… Il y a quelques jours, vous avez déclaré qu'il faudrait « mettre une bombe et faire péter toutes ces éoliennes ». Bref : vous êtes opposé à

  • « Le but de la politique est de garder la population inquiète… », par l'abbé Michel Viot.

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    L’abbé Michel Viot critique l’usage politique de la crise sanitaire – et la politique de la peur.

    Qui d’entre nous ne connaît pas ce personnage ? Très peu sans doute. Qui sait que son nom est souvent accompagné de « vengeur » masqué ? Sans doute moins de gens.

    2.jpgIl est fort probable que son souvenir flottera bientôt dans les consciences, et qui sait, s’incarnera à la fin de notre pandémie. Mais pour que Zorro intervienne, il faut que la violence se déchaîne, que des injustices flagrantes aient été commises, que d’autres, pires encore se laissent entrevoir. Peur et violence doivent donc diriger notre société sans Dieu, pour que ne comptant plus sur le secours divin, elle l’attende d’un homme. Le personnage de Zorro en est le symbole.

    Aussi, parce qu’il y a fort à craindre que cette république soit en marche vers la dictature, il me semble plus que temps d’exhorter à l’arrêt, devant la liberté, comme mon épagneul sait si bien le faire pour débusquer un perdreau !

    Je ne reviendrai pas sur les débuts de la pandémie et son effrayante gestion. De nombreuses voix l’ont dénoncée. Mais comme prêtre je me sens obligé de revenir sur la douloureuse question de l’assistance aux malades, aux mourants et aux familles, sans oublier les services funéraires.

    Je commence par balayer devant ma porte ! Dans un certain nombre d’endroits des prêtres se sont confinés, et des églises sont demeurées fermées pour les enterrements ! Nous avons eu, nous prêtres catholiques, et je dis bien nous, la lâcheté d’accepter de ne plus célébrer de messes publiques, y compris pendant la semaine sainte et à Pâques. Certes le gouvernement l’avait interdit ! Mais est-ce une excuse ? Non !

    Et voici pourquoi. Pendant qu’il nous interdisait d’accomplir notre ministère, il permettait des activités autrement plus dangereuses en matière de contamination, comme les transports en commun ou la fréquentation des super marchés. Les mesures sanitaires prises par nos évêques pour tous les sanctuaires auraient dû rassurer des responsables politiques raisonnables. Mais l’idéologie régnait à la place de la raison depuis le début de l’épidémie, c’est à dire un état d’esprit d’affirmation de sa volonté de puissance du côté de l’Etat, et un esprit de timidité du côté de l’Eglise catholique, laissée seule par les autres religions pratiquées en France, n’ayant pas comme elle, les mêmes obligations religieuses. Pour elles, le sanitaire a tenu lieu d’excuse. Elles ont plié en fait devant l’esprit matérialiste de ce temps, tout comme nous, pendant notre obéissance servile aux décisions du gouvernement. Nous nous sommes réveillés en plaidant devant le Conseil d’Etat qui nous a donné raison et la vie religieuse catholique a pu reprendre presque normalement. Je dis presque, parce que le couvre-feu de 18h nous gêne considérablement et risque de troubler gravement la Semaine Sainte, et la célébration de Pâques en rendant impossible le très bel office de la Vigile pascale. En fait, ce maintien acharné du couvre-feu qui ne sert à rien sur le plan sanitaire, le premier Ministre lui-même a reconnu qu’il n’avait pas été utile à grand chose. Et quand on voit les grands rassemblements de personnes qu’il provoque dans les transports en commun, on peut se demander s’il ne contribue pas à propager le virus. Mais c’est un ingrédient parmi d’autres pour entretenir le climat de peur. L’existence de cette mesure violente maintient dans les consciences la présence du danger, donc de la peur.

    Par ailleurs, on s’obstine à ne pas réellement soigner les malades du Covid. Des médicaments existent pourtant, je l’ai expérimenté et dit. Pourquoi ne pas proposer aux malades cet essai, sans danger, car les médicaments en question sont anciens et leurs effets connus ? Non on préfère laisser dans l’angoisse, encore la peur, avec le risque de mort pour les personnes âgées. Celles-ci, dans encore beaucoup trop d’endroits ne peuvent pas voir leur famille, pas plus que le prêtre d’ailleurs, selon les options philosophiques des directeurs de maisons de retraite. Car c’est surtout l’administration hospitalière, et non les soignants qui mangent du curé. Elle aurait pourtant dû se rendre compte depuis longtemps que le curé est aussi indigeste que la nourriture qu’elle sert à ses malades !

    Ce mépris des liens familiaux, cette méconnaissance de leur importance devant la mort relève de crime contre l’humanité. Ce qui distingue l’homme de l’animal, c’est son besoin de rites funéraires, religieux ou laïques, autrement dit de signes qui maintiennent la communauté humaine unie et présente, avant, pendant et après la mort. Et seul le rite religieux peut en fin de compte tenir et garder son sens en situation d’épidémie. Le rite laïc, comme la précaution sanitaire relèvent tous deux du matérialisme. Et la peur de la mort, encore la peur, dans une société matérialiste l’emportera toujours sur l’amour du prochain.

    Nos dirigeants s’obstinent dans une stratégie fondée sur l’idée fausse qu’on ne peut pas soigner correctement le Covid, sur la seule solution vaccinale, dans un flou qui explique les doutes de beaucoup de nos concitoyens, et surtout sur la mise au grand jour d’un secret de polichinelles, le manque de lits dans nos hôpitaux, signe d’une démission du service public qui ne date pas d’hier.

    Aussi, avant d’aller plus loin, il faut maintenant émettre une hypothèse concernant l’utilisation de la peur, conjuguée à la violence. Il faut situer cela dans la question de la manipulation des foules et l’usage de l’inconscient dans la publicité. Il n’est pas étonnant que ce soit le neveu de Freud, Edward Bernays, qui fut le premier à théoriser cela dans son livre Propaganda paru en 1928 aux États Unis. Il n’hésitera pas à écrire « La manipulation consciente et intelligente des opinions et des habitudes du peuple est un élément essentiel dans une société démocratique. ». Pour lui , seule une minorité peut penser, trop d’opinions ou d’informations nuisent, parce que la masse est incapable de penser. Il faut la guider par des impulsions, des émotions et des habitudes. Il relève le rôle important du médecin pour inspirer confiance. En matière de vente, mais cela peut s’étendre à d’autres domaines, on utilisera donc l’image médicale pour pousser à acheter un produit. C’est ainsi que Bernays, employé par une marque de cigarettes, incitera les femmes à fumer comme leur médecin homme, jouant du même coup sur l’idée de promotion et de libération de la femme. Citons encore Bernays « La propagande ne mourra jamais. Les hommes intelligents doivent se rendre compte que la propagande est l’instrument moderne qui leur permet d’arriver à leurs fins et qui contribue à organiser le chaos. ». Un contemporain de Bernays, Mencken écrira au début du XX ème siècle « le but de la politique est de garder la population inquiète et donc en demande d’être mise en sécurité, en la menaçant d’une série ininterrompue de monstres, tous étant imaginaires. ».

    Même si les noms de ces précurseurs des dirigeants politiques actuels sont oubliés aujourd’hui, ils ont produit nombre de disciples, car ils ont en fait mis leurs pas dans ceux des révolutionnaires des Lumières du 18 ème siècle, qui eux aussi méprisaient le peuple, et par différents journaux savaient manipuler l’opinion, jusqu’à l’utilisation de la peur, qui dans son raffinement deviendra terreur ! Même si le peuple n’en a pas toujours conscience aujourd’hui , il ressent tout ce mépris et toutes ces agressions. Il se prépare, souvent sans le savoir à des réponses violentes, qu’il voudra à la hauteur de ce qu’on lui a fait subir. Mais chacun sait que l’engrenage de la vengeance est sans fin. Les petits Zorro individuels, seront en quête d’un Super Zorro, fédérateur de toutes les vengeances. Toutes les épidémies ressenties comme grandes ont toujours généré ces sentiments là, au cours de l’histoire, captant les pensées et les détournant de toute autre question. C’est pourquoi cette pandémie, ne changera pas la mentalité de cette société matérialiste, qui se veut de plus en plus athée, et je partage le pessimisme de mon Archevêque dans son très beau livre sur la mort (Mgr Michel Aupetit, La mort, méditation sur un chemin de vie. Editions Artège). « Allons-nous entendre l’alerte ? Rien n’est moins sûr. L’exemple du sida nous montre comment, face à une nouvelle pandémie transmissible, nos sociétés vont chercher davantage à se protéger qu’à changer la vie. »

    On le voit encore aujourd’hui avec le coronavirus où le premier réflexe fut celui de la protection vis à vis d’autrui. Au grand commandement de l’amour transmis par le Christ « aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. »(Jean 13, 34) a succédé cette injonction « Protégez-vous les uns les autres. »( pp 97-97).
    Et comme on estimera toujours que la protection n’est pas assez efficace, parce des gens qu’on estimera asociaux refuseront le vaccin, ou trafiqueront des passeports de santé, on se cherchera un Grand Protecteur pour mettre de l’ordre, au prix de l’abandon des libertés essentielles. Mais il faut que les esprits soient mûrs et le moment propice ! D’où le zèle d’une grande majorité de chaînes de télévision qui doivent, sans doute rechercher le prix de l’excellence anxiogène !

    Et pourtant les signes de dérangements mentaux se multiplient, les actes de violence de même ! Imperturbables, la très grande majorité des médias continue à donner des informations niaises et à distiller la peur. Aucun grand débat n’est organisé sur la vérité des statistiques faites sur la pandémie, les avantages ou désavantages des différents vaccins. Le trouble donne l’impression d’être sciemment entretenu. Il est vrai que Paul de Gondi, Cardinal de Retz (1613-1679) a écrit dans ses mémoires « on ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment. », et comme nous sommes en réalité déjà en période électorale, je crois utile d’ajouter cette autre phrase du même auteur « Ceux qui sont à la tête de grandes affaires ne trouvent pas moins d’embarras dans leur parti, que dans celui de leurs ennemis. ». Même si l’auteur de ces propos n’a pas réussi dans ses ambitions, ses paroles semblent toujours influencer ceux qui commandent. Ou bien ils connaîtront le sort du Cardinal de Retz, séducteur égoïste autant que narcissique, mais non pas sans talent. Ou, grâce au masque, ils apparaîtront comme des Zorro providentiels, mais, faute de vrai talent, pour combien de temps ?

    Source : https://www.lesalonbeige.fr/