Shania Twain et Donald Trump
Shania Twain
Par Mathieu Bock-Côté
Dans cette tribune du Journal de Montréal [26.04] Mathieu Bock-Côté dénonce - brillamment comme toujours - l’emprise du politiquement correct sur la vie publique. Ses arguments font mouche. Comment ne pas l'approuver ? LFAR

Étrange titre, n’est-ce pas ? Mais à drôle de situation, drôle de titre.
Il y a quelques jours, la chanteuse canadienne Shania Twain a confié au journal britannique The Guardian qu’elle aurait voté pour Donald Trump en novembre 2016, si elle avait été américaine. Elle ne semblait pas particulièrement enthousiaste à son endroit. Mais entre deux maux, comme on dit, elle voulait choisir le moindre.
Scandale ?
On sera d’accord, ou non. On se rappellera quand même que la moitié des Américains a fait le même choix et qu’on ne saurait y voir qu’une collection d’ignares, de malheureux, d’homophobes, de racistes et de sexistes, comme l’avait suggéré Hillary Clinton. Il doit bien y en avoir quelques millions dans le lot qui ne méritent pas notre mépris, non ?
Et de toute façon, si nous sommes tous obligés de voter pour le même candidat, à la manière d’une obligation morale, pourquoi organiser des élections ?
Ne nous faisons pas d’illusions : ils sont nombreux à se le demander aujourd’hui. Ils ne font plus confiance au peuple. Alors ils préfèrent confier le pouvoir aux tribunaux, décrétés plus sages parce qu’affranchis des humeurs populaires. Mais je m’éloigne du sujet...
Pauvre Shania ! Elle aurait peut-être dû se taire et savoir que nous vivons dans un simulacre de démocratie, où les gardiens de la vertu idéologique s’assurent que nous ne sortions pas du corridor étroit de la pensée correcte. Elle aurait dû savoir qu’en confessant sa préférence électorale, elle ferait naître une tempête.
Et c’est ce qui est arrivé !
La « trumpophobie » est telle, aujourd’hui, qu’il suffit de ne pas détester à temps plein le président américain pour susciter une crise d’hystérie. Alors Shania, pénitente comme une artiste qui a peur de perdre son public, s’est excusée sur les médias sociaux. Elle a appris les bonnes prières, avant de les réciter. Elle s’est mise dans la foule qui hurle contre Donald Trump, et en a même rajouté, pour que l’on comprenne bien qu’elle faisait pénitence. Elle a rappelé qu’elle était contre toute forme de discrimination, et tout le tralala. On s’en doute. Elle aurait même pu ajouter qu’elle n’aime pas qu’on martyrise les animaux, histoire de gagner quelques points de vertu.
Excuses
Succès relatif, néanmoins. Sur les médias sociaux, on en a vu douter d’une si prompte conversion. Alors en plus d’être une trumpienne modérée autoproclamée, Shania Twain est aussi accusée d’être une menteuse et une girouette. Charmante semaine pour la star canadienne...
Ce petit épisode est néanmoins révélateur d’un vrai problème : l’emprise du politiquement correct sur la vie publique. Il étouffe les débats. Il nous oblige à rétrécir sans cesse le périmètre des propos acceptables. Dans le cas de Trump, par exemple, on ne peut plus se contenter d’être puissamment contre sa politique : on doit être moralement scandalisé à temps plein par sa présence à la Maison-Blanche, sans quoi, on nous accusera de complaisance à son endroit.
Cela devient lassant. •

Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (VLB éditeur, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012) de La dénationalisation tranquille (Boréal, 2007), de Le multiculturalisme comme religion politique (éd. du Cerf, 2016) et de Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).
BILLET - Pour Éric Zemmour, la rencontre entre les deux Corées est historique. Une détente diplomatique rendue possible grâce à Donald Trump, qui par son imprévisibilité fait peur à Kim Jong-un.


Qu’est-ce qu’une nation ? Cette question, attachée à une célèbre conférence de Renan prononcée à la Sorbonne en 1882, continue de travailler la philosophie politique et les sciences sociales ; même elles en proposent rarement une définition satisfaisante, et encore moins exhaustive. La nation, nous dit Delannoi, est à la fois politique et culturelle. C’est une communauté politique avec un substrat historique particulier, qu’on ne juge pas a priori interchangeable avec un autre. Ces deux dimensions ne coïncident pas toujours, ou du moins se recoupent souvent imparfaitement. Delannoi entend d’abord définir la nation comme forme politique singulière, qu’il distingue de la cité et de l’empire, en rappelant qu’elle semble le plus à même d’accueillir et de permettre l’expérience de la démocratie dans la modernité. Mais Delannoi le note bien, « la plupart des théoriciens récents de la nation et du nationalisme ont envers leur objet d’étude une attitude allant de l’hostilité à la condescendance » (p.17). La remarque est très fine : ceux qui étudient la nation sont généralement en mission pour la déconstruire, comme si elle représentait un artifice historique vieilli. L’antinationalisme est habituel dans l’enseignement universitaire en plus d’être la norme chez les intellectuels qui considèrent généralement l’attachement à une nation historique et à sa souveraineté comme une forme de crispation identitaire. Cette absence radicale d’empathie pour ceux qu’on appellera les gens ordinaires attachés à leur patrie fait en sorte qu’on fera passer toute forme de patriotisme pour une forme de xénophobie. La modernité radicale est l’autre nom du refus du particulier.

A propos de notre citation de Nietzsche mise en ligne hier, J.G. de Wargny a posté, dans les commentaires, les intéressantes réflexions qui suivent. Le sujet n'est pas anodin : les médias sont un élément essentiel de notre décadence. Merci pour cette réaction !
On ne pouvait mieux résumer en quelques mots le discrédit qui caractérise cette profession.

Je suis ensuite rentré à Paris pour assister à mon premier conseil d’administration de l’Institut Jérôme Lejeune. Cet institut scientifique travaille sur la trisomie 21 par la recherche, la consultation et la formation. (Photo ci-contre : Recherche à l'Institut Jérôme Lejeune)



Les médias sont à la fois partiaux et ignorants. En particulier à notre sujet... Ils ne s'expriment sur Maurras, sur nous-mêmes, qu'à coup de clichés, toujours les mêmes, sans savoir et sans comprendre. Leur « pensée » apparaît mécanisée. Et bien-sûr leur vocabulaire aussi ; il est de ce fait totalement prévisible, parfaitement
