Ces remparts "trop bien construits" (César) qui arrêtèrent le grand Caius Julius, aujourd'hui visibles dans le Jardin des Vestiges à Marseille...
49 avant J-C : Jules César entreprend le siège de Massalia
Depuis sa fondation, et bien qu'elle ait dû affronter plusieurs périls mortels, la ville de Rome n'a cessé de grandir et d'étendre son pouvoir et sa domination : d'abord à toute la péninsule italique, puis au-delà. Mais les institutions qui avaient présidé à sa naissance et à ses premiers agrandissements ne convenaient plus à une Cité - l'URBS - dont la vocation devenait méditerranéenne.
Gouvernée d'abord par des rois, Rome devint très vite une République, mais celle-ci, malgré ses grandeurs, se révéla rapidement incapable d'assurer l'autorité nécessaire pour maintenir la cohésion du nouveau grand ensemble qui, irrésistiblement, voyait le jour. Il fallait un pouvoir fort à une ville qui tendait à l'imperium universel.
La guerre civile, pour le pouvoir, se déclencha donc, presque naturellement. Au milieu du premier siècle avant J-C, un triumvirat se forma entre trois généraux : César, Pompée et Crassus. Le troisième, de loin le moins compétent, disparut rapidement en Asie, face aux Parthes : Dion Cassius prétend que le roi Suréna lui aurait fait couler dans la bouche de l'or fondu, pour le punir de sa cupidité !
Restaient les deux très grands généraux qu'étaient César et Pompée, tous deux hommes de grande valeur. Ne parvenant pas à s'entendre, la guerre totale était inévitable... Et il fallait que, dans toutes les régions où Rome dominait, l'on se déclarât pour l'un ou pour l'autre.
Or, Massalia était l'amie et l'alliée de Rome, et ne souhaitait pas prendre parti pour des Romains contre d'autres Romains.
Le 6 avril 49 avant J-C, César se rend à Marseille; le 16, alors qu'il est en route, il écrit à Cicéron pour l’inciter à prendre parti pour lui; le 19, il arrive à Marseille, qui lui ferme ses portes. Après quelques pourparlers infructueux, César met en place le blocus de Marseille, et installe son camp sur l'actuelle place de la Joliette (Julii statio). Mais la ville est trop bien défendue, et lui résiste victorieusement. Elle ne se rendra que le 25 octobre, vaincue par la famine, non par les armes : César reste sur place et essaye vainement de conquérir la ville pendant deux mois, mais, ne pouvant perdre plus de temps - car il doit aller en Espagne affronter Pompée... - il quitte Massalia le 5 juin, laissant à son lieutenant Trebonius le soin de faire tomber la ville.
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Maquette de la Massalia antique (Musée d'Histoire de la Ville) : "...Car la mer enveloppe Marseille de trois côtés; on n'y accède par terre que du seul quatrième..." dit César (ci-après)
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César lui-même donne des renseignements très précis sur le siège...
De Jules César, La Guerre civile (De Bello Gallico), La Pléiade, Historiens romains, Tome II, page 312 :
"César fait venir les quinze anciens de Marseille (Massalia était gouvernée par une hiérarchie de Conseils, au sommet desquels étaient les quinze Timouques, ndlr). Il les engage à ne pas être les premiers à ouvrir les hostilités. Leur devoir est de suivre l'exemple de l'Italie plutôt que de se soumettre aux caprices d'un seul homme. Il fait valoir devant eux tous les arguments susceptibles d'éclairer leur entendement. Les quinze rapportent à leurs concitoyens les propos de César et reviennent porteurs de cette réponse :
"Les Marseillais voient que le peuple romain est divisé en deux parties. Ils n'ont ni qualité ni pouvoir pour décider quel est celui qui a raison. Mais comme les chefs de ces partis s'appellent Pompée et César, l'un et l'autre patrons de leur cité, l'un leur ayant donné les terres des Volques Arécomiques et des Helviens, l'autre leur ayant permis, par la conquête de la Gaule, d'augmenter leurs revenus, leur devoir est d'accorder à des bienfaits égaux une reconnaissance égale. Ils ne peuvent ni aider l'un contre l'autre, ni recevoir dans leur ville ou dans leurs ports aucun d'eux..."
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(pages 343/344) : "...Tandis que cela se passe en Espagne, le légat C. Trébonius, laissé au siège de Marseille, établit devant la ville un terrassement, des mantelets et des tours en deux endroits : l'un à proximité du port et des chantiers maritimes, l'autre sur le rivage qui touche à l'embouchure du Rhône du côté par lequel on arrive à la mer, venant de Gaule et d'Espagne. Car la mer enveloppe Marseille de trois côtés; on n'y accède par terre que du seul quatrième. Mais là aussi, le terrain attenant à la citadelle est défendu par sa nature même et par une dépression profonde qui rend son attaque longue et difficile.
Pour exécuter ce travail C. Trébonius fit venir de toute la province une multitude d'hommes et de bêtes de somme. Quand il fut en possession de tous les matériaux nécessaires il éleva un terrassement haut de quatre-vingt pieds.
II
Mais la place disposait d'une telle quantité de munitions et de machines de guerre de toute sorte qu'aucune baraque roulante, faite d'osier entrelacé, ne pouvait résister à leur puissance. D'énormes balistes lançaient des poutres de douze pieds et munies de pointes de fer, qui, après avoir percé quatre rangs de claies, allaient s'enfoncer dans la terre. Il fallut donc construire des galeries couvertes avec des pièces de bois d'un pied d'épaisseur, jointes entre elles, et qui permettaient de passer de main en main les matériaux de construction. (illustration : buste de César trouvé dans le Rhône, à la hauteur d'Arles)
Une tortue de soixante pieds venait en avant. On s'en servait pour aplanir le terrain. Elle était formée, de même, de grosses poutres, et son toit était protégé contre les projectiles enflammés et contre les pierres. Mais l'importance des travaux, la hauteur des tours et des remparts, le grand nombre de machines de guerre chez l'ennemi, retardaient la marche du siège. De plus, les Albiques faisaient de fréquentes sorties, et les assiégés s'efforçaient de mettre le feu à la terrasse et aux mantelets. Nos soldats repoussaient facilement les assaillants et les rejetaient à l'intérieur de la place, tout en leur infligeant de lourdes pertes...
VI
...Dans le combat qui s'était engagé, les Marseillais firent preuve d'une bravoure irréprochable... D'ailleurs, si l'on en venait à des corps à corps, les Marseillais, mêlés aux Albiques, tenaient bon, et leur courage n'était pas inférieur au nôtre. Des bateaux de moindre dimension lançaient de loin une grande quantité de projectiles qui faisaient parmi les nôtres, pris au dépourvu ou demeurés sans méfiance, de nombreux blessés..."
On s'était mis d'accord pour attendre l'arrivée de César, encore retenu en Espagne, pour régler définitivement le sort de la ville. Le siège semble avoir duré en tout plus de six mois, de mars à septembre 49. "La prise de la cité grecque avait coûté plus de temps que la conquête de toute l'Espagne" (Camille Jullian).
C'est à Tarragone, sur le chemin du retour, après avoir vaincu les Pompéiens, que César apprit la décision prise par les Marseillais : se rendre, vaincus par la famine, non par les armes.
Il traita la ville durement, ne lui laissant de ses riches domaines que Nice et les îles d'Hyères, et faisant démolir les remparts qui avaient osé lui résister et qu'il n'avait pu prendre de force.
De plus, à partir de cette date, c'est Arles qui fut favorisée, au détriment de Marseille, qui perdit ainsi, réellement, la prééminence...
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Sur la première victoire navale remportée par la flotte de César sur celle de Massalia, voir notre Éphéméride du 27 juin; sur la seconde, notre Éphéméride du 31 juillet; et, plus généralement, notre Évocation :
Quand Massalia, la plus ancienne ville de France, rayonnait sur toute la Gaule et, préparant la voie à Rome, inventait avec les Celtes, les bases de ce qui deviendrait, un jour, la France...)
Les Basques puis les Celtes constituent les premiers peuplements connus de la Gaule, qui allait devenir la France. Sur ces deux populations premières vint se greffer l'influence décisive des Grecs et des Romains : voilà pourquoi nous évoquons largement, dans nos Éphémérides, les pages fondatrices de notre identité profonde que nous devons à l'Antiquité : voici le rappel des plus importantes d'entre elles, étant bien entendu qu'un grand nombre d'autres Éphémérides traitent d'autres personnalités, évènements, monuments etc... de toute première importance dans le lente construction du magnifique héritage que nous avons reçu des siècles, et qui s'appelle : la France...
En réalité, si la conquête de la Gaule était nécessaire à César pour sa prise du pouvoir à Rome, il faut bien admettre que "le divin Jules" avait été appelé à l'aide, en Gaule, par les Gaulois eux-mêmes, incapables de s'opposer au déplacement massif des Helvètes, quittant leurs montagnes - en 58 avant J.C - pour s'établir dans les riches plaines du sud ouest; César vainquit les Helvètes à Bibracte (voir l'Éphéméride du 28 mars); cinq mois plus tard, envahis par les Germains d'Arioviste, les Gaulois le rappelèrent une seconde fois : César vainquit et refoula les Germains au-delà du Rhin (voir l'Éphéméride du 5 août); et, cette fois-ci, auréolé de ses deux prestigieuses victoires, et gardant plus que jamais en tête son objectif premier (la conquête du pouvoir à Rome), César ne voulut plus se retirer de cette Gaule où on l'avait appelé, et dont la conquête serait le meilleur tremplin pour ses ambitions politiques à Rome... Il fallut six ans à Vercingétorix pour fédérer les divers peuples de Gaule contre le sauveur romain : le soulèvement général commença par le massacre des résidents romains à Cenabum (l'actuelle Orléans), en 52 (voir l'Éphéméride du 23 janvier); le 28 novembre de la même année, Vercingétorix remporta la victoire de Gergovie (voir l'Éphéméride du 28 novembre); mais, moins d'un an après, enfermé dans Alésia, Vercingétorix vécut l'échec de l'armée de secours venue à son aide de toute la Gaule (voir l'Éphéméride du 20 septembre) : il capitula une semaine après (voir l'Éphéméride du 27 septembre). Emmené captif à Rome, il fut mis à mort six ans plus tard, en 46 (voir l'Éphéméride du 26 septembre)...
Cependant, dans sa conquête des Gaules, César n'eut pas seulement à lutter contre les tribus gauloises proprement dites : il s'opposa également à Massalia, puissance amie et alliée de Rome, mais qui ne voulut pas choisir entre César et Pompée lorsque la guerre civile éclata entre ceux-ci : César réduisit Massalia, mais avec difficulté (voir nos trois Éphémérides des 19 avril, 27 juin et 31 juillet)...
Enfin, pour être tout à fait complet avec le rappel de ce que l'on peut trouver dans nos Éphémérides sur ces pages de notre Antiquité, mentionnons également nos trois Éphémérides traitant de :
• la victoire sur les Cimbres et les Teutons, remportée par Caius Marius, oncle par alliance de Jules César en 86 (il avait épousé sa tante, Julie, et mourut en 86 : voir l'Éphéméride du 17 janvier);
• l'assassinat de Jules César en 44 Avant J-C (voir l'Éphéméride du 15 mars);
• notre évocation de Massalia, sa puissance et son rôle à l'époque (voir l'Éphéméride du 11 avril)...
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1054 : Mort du Pape Saint Léon IX
Bruno d'Eguisheim-Dagsbourg fut couronné pape le 12 février 1049 sous le nom de Léon IX. Avec la "réforme Grégorienne", c'est bien lui qui a commencé le redressement de l'Église à cette époque, même si c'est Grégoire VII qui a, finalement, laissé son nom à cette réforme qui devait mettre près de trois siècles à s'imposer...
Elle s'articulait autour de trois points majeurs :
1. Affirmation de l'indépendance du clergé : les laïcs ne peuvent plus intervenir dans les nominations, notamment les Empereurs germaniques, avec qui s'ouvre ainsi la Querelle des Investitures;
2. Réforme du clergé : celui-ci sera dorénavant mieux formé et mieux instruit, et l'Église impose le célibat des prêtres;
3. Affirmation du rôle du Pape : en 1059, le pape Nicolas II crée le Collège des cardinaux, qui élit le nouveau pape, et la Curie pontificale (le "gouvernement" de l'Eglise) prend son essor...
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Léon IX est le seul pape alsacien de l'histoire, et reste comme l'initiateur de la "réforme Grégorienne" : nominis.cef.fr/contenus/saint/1004/Saint-Leon-IX.html