UA-147560259-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

LAFAUTEAROUSSEAU - Page 1220

  • D'accord avec Mathieu Bock-Côté : Soljenitsyne n'était pas un libéral !

     

    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpg

    Également dans le Figaro, Soljenitsyne a été défini comme « conservateur libéral » (Chantal Delsol). Cette tribune de Mathieu Bock-Côté n'est certes pas une réponse à cette affirmation à tous les sens du mot hasardeuse. Mais sa réflexion au fil des lignes et des idées conduit à une tout autre compréhension de la pensée du grand Russe. Beaucoup plus profonde et plus juste selon nous. [Le Figaro, 23.11]. Nous faisons suivre cette tribune du discours intégral d'Alexandre Soljenitsyne aux Lucs-sur-Boulogne - en 1993, il y a 25 ans - où il dit le fond de sa pensée sur toute forme de révolution. LFAR

     

    tile00x02.jpg

    La commémoration des 100 ans de la naissance de Soljenitsyne permet de revenir sur une existence qui a incarné de la manière la plus exigeante qui soit la figure de la dissidence au XXe siècle.

    Elle permet aussi de revisiter l'œuvre d'un homme qui a théorisé la résistance au totalitarisme, en décryptant de quelle manière il pervertit l'âme humaine et déstructure les repères fondamentaux de la conscience. Soljenitsyne ne s'imaginait pas en lutte contre une forme radicalisée de la dictature mais contre un régime politique inédit, broyant la part la plus intime de l'être humain.

    On le sait, pour Soljenitsyne, l'institutionnalisation du mensonge est la marque distinctive du totalitarisme. Orwell l'avait noté, il veut forcer l'homme à dire que 2 + 2 = 5. À la manière d'un régime idéocratique, il pose une vérité officielle, à laquelle tous doivent souscrire, surtout lorsqu'elle est contraire à la vérité effective des choses. Le totalitarisme oblige l'homme à dire le contraire de ce qu'il pense, et même le contraire de ce qu'il voit. Plus encore, il doit le dire avec enthousiasme. Devant les savants officiels du régime,il doit répéter les «vérités» décrétées, même si, au fond de lui-même, il lui arrive encore de les savoir fausses. Milosz avait noté que ce dédoublement de l'être provoque une forme de schizophrénie.

    « La piété, qu'elle soit patriotique ou religieuse, n'est pas l'ennemie de la liberté : elle peut même l'alimenter »

    La première forme de résistance au totalitarisme consiste alors à oser dire la vérité, en appelant un chat un chat. Mais où trouver la force pour résister au totalitarisme? Comment tenir devant un dispositif qui prétend confisquer le sens de l'histoire et qui ne veut voir dans ses opposants que le bois mort de l'humanité ou des résidus historiques insignifiants? Pourquoi lutter quand on en vient à se croire vaincu d'avance? La dissidence n'est-elle qu'un témoignage moral sacrificiel à classer sous le signe du martyre? C'est ici que Soljenitsyne se distingue: l'écrivain n'a jamais douté de sa victoire. Même en exil, il était persuadé de pouvoir un jour revoir son pays libéré et ayant renoué avec ce qu'on appellerait aujourd'hui son identité.

    Plusieurs l'ont noté, la philosophie de Soljenitsyne était ancrée dans un patriotisme russe et une foi orthodoxe profondément enracinés - elle ne se réduisait pas à un libéralisme fade, étranger à la transcendance, enfermant l'homme dans une conception aussi matérialiste qu'horizontale de l'existence. Si on préfère,elle s'enracinait à la fois dans un ensemble de traditions nationales et religieuses, comme ce fut souvent le cas dans la dissidence des nations d'Europe de l'Est, qui conjugua le plus naturellement du monde identité et liberté. La piété, qu'elle soit patriotique ou religieuse, n'est pas l'ennemie de la liberté: elle peut même l'alimenter.

    Le totalitarisme entend soumettre l'homme intégralement, pour fabriquer ensuite l'homme nouveau à travers le contrôle complet de tous les mécanismes de socialisation. Mais l'homme n'est pas intégralement manipulable. Sa naissance dans une nation historique particulière qui demeure pour lui une source précieuse d'identité et sa quête spirituelle qui le pousse vers les fins dernières révèlent une nature humaine que le pire ordre social ne peut jamais complètement écraser et à partir de laquelle l'aspiration à la liberté peut rejaillir. La conscience de sa filiation comme celle de sa finitude fondent paradoxalement pour l'homme la possibilité de sa liberté. C'est parce qu'il était rattaché au monde par les racines les plus profondes et par ses aspirations les plus élevées que Soljenitsyne a su résister au communisme.

    « Soljenitsyne l'avait vu avant tout le monde : l'Occident n'est pas lui-même immunisé contre le totalitarisme »

    Soljenitsyne l'avait vu avant tout le monde: l'Occident n'est pas lui-même immunisé contre le totalitarisme. La démocratie contemporaine en reconduit certains schèmes à travers le fantasme d'une pleine maîtrise du vivant ou de l'existence sociale, où se laisse deviner encore une fois la figure de l'homme nouveau, qu'on voudrait aujourd'hui sans sexe, sans parents, sans patrie, sans religion et sans civilisation. Il est bien possible que nos traditions les plus profondes soient encore une fois celles qui nous permettront de résister à l'hubris d'une modernité qui assujettit l'homme en prétendant l'émanciper.

    Et comme on lisait hier la Pravda en apprenant à la décoder, on lit aujourd'hui entre les lignes de certains journaux pour décrypter la part du réel que le régime diversitaire ne peut dévoiler sans se fragiliser. Qu'il s'agisse de l'idéologie du genre, du multiculturalisme qui déracine les peuples et les expulse mentalement de chez eux en diabolisant le désir d'avoir un chez-soi ou de la névrose du politiquement correct qui enferme le monde de la pensée dans un monde parallèle, fondé sur la falsification du réel, il faudra aussi retrouver le courage de dire la vérité.  

    Mathieu Bock-Côté 

    À lire aussi dans Lafautearousseau ...    

    D'accord avec Arnaud Guyot-Jeannin : Soljenitsyne n’était pas un conservateur libéral, mais un antimoderne radical !   
    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017). 
  • L'Action Française dans la Grande Guerre [9] LʼArmistice et ses suites. Une paix à la Pyrrhus

    La SDN - Genève  

     

    Un nouvel ordre mondial 

    Le président du Conseil Georges Clemenceau sʼest fait, lui reprochent en substance Bainville, le caniche du président américain Woodrow Wilson (photo), qui, de concert avec les 800px-Ww28.jpgBritanniques, craignent quʼune avancée des troupes jusquʼà Berlin, ainsi quʼune partition de lʼex-IIème Reich, favoriseraient une trop grande domination française sur le continent européen. 

    Les Français, lʼAction Française incluse donc, qui entendaient faire lʼéconomie dʼune nouvelle guerre contre le voisin allemand, se virent soupçonner par les Anglo-Saxons de se vouloir substituer à lʼAllemagne en tant que puissance ambitionnant de modeler à son profit une Europe qui deviendrait alors le terrain dʼune hégémonie sans partage. 

    Après 1918 la France dut ainsi se contenter dʼobéir au nouvel ordre wilsonien, imposé de lʼintérieur par les radicaux Clemenceau et Édouard Herriot, lʼami du fervent partisan de la création de la Société des Nations (S.D.N.) René Cassin[1].

    Aux yeux des penseurs de lʼAction Française, ni le traité de Versailles, ni le projet de mise en place de la S.D.N., ni même le principe des nationalités, qui prescrit le droit des peuples à disposer dʼeux-mêmes, ne sont légitimes. Mais, étonnamment, la révolution bolchevique ne leur semble pas une si terrible chose... tant quʼelle ne traverse pas les frontières hexagonales. 

    Révolution en Russie 

    slide_16.jpgAinsi Bainville espérait le triomphe des spartakistes Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht (photo) en Allemagne, agrandissant le foyer révolutionnaire à la patrie de Karl Marx, qui était restée une hyperpuissance industrielle en dépit de la guerre, son territoire nʼayant pas été le théâtre de combats. Peut-être Bainville ne mesurait point lʼeffet considérable de contagion quʼaurait provoqué la victoire spartakiste sur le reste du monde, et la capacité militaro-industrielle dont aurait disposé le communisme mondial. 

    Pour lui, le bolchevisme était dʼessence asiatique, mongole. Le bolchevisme traduisait selon lui la part asiatique de lʼidentité dʼun pays-continent à cheval entre lʼEurope et lʼAsie, tiraillé depuis trois siècles entre cette idiosyncrasie « mongole » et celle occidentale, que Pierre-le-Grand mit particulièrement en avant. 

    À la date du 6 février 1918, figure dans le Journal de Bainville le raisonnement suivant : « La Russie offrait lʼexemple dʼun collectivisme asiatique couronné par la dictature tsarienne. En trois cents ans, les Romanov nʼont pu démongoliser leur Empire et Nicolas II a fini par succomber à la lutte entre la tendance orientale et la tendance occidentale. Aujourdʼhui, cʼest lʼAsie qui lʼemporte avec le maximalisme, et le socialisme intégral se réalise par la dictature du prolétariat. »[2]               

    lenin-speaking-quizards-696x464.jpgToutefois la révolution dʼOctobre nʼest pas venue de lʼest mais de lʼouest, des grandes centres urbains, Moscou et Saint-Pétersbourg en premier chef, et les idées révolutionnaires (socialisme, nihilisme, populisme...) se sont répandues au XIXème siècle par le truchement des instituteurs, qui en étaient les principaux colporteurs dans les endroits les plus reculés, en Sibérie et dʼailleurs. Lesquels instituteurs avaient été formés dans les universités du pays, qui se trouvent en majorité à lʼouest.      

    Red_Guard_Vulkan_factory.jpgEn outre, avec le recul historique, si lʼon observe les mutations quʼont connues des pays communistes tels que la Chine ou le Vietnam, on peut plutôt soutenir quʼun régime marxiste-léniniste est un facteur dʼoccidentalisation – sans doute le plus efficace de tous car se présentant sous les traits dʼune critique radicale de la culture occidentale – ; vraisemblablement ce qui amenait Bainville à croire dans cette « asiaticité » du communisme est son messianisme sans frontières, dʼinspiration largement judaïque[3]. Marx était, ne lʼoublions pas, le descendant dʼune lignée de rabbins. Il est à cet égard possible que Bainville « mongolisait » les bolcheviques car il voyait en eux un groupe fortement influencé par des descendants de Khazars, appelés ensuite ashkénazes.      

    Or Hannah Arendt nʼa pas manqué dʼinsister sur lʼ « européanité » de la communauté juive moderne – en témoigne le phénomène Haskalah dont Marx fut avec Freud le plus célèbre résultat – lorsquʼelle avançait que « lʼélément juif » était « cosmopolite et inter-européen »[4]

    Sous les tranchées, lʼÉtat-monde en gestation 

    300px-Bundesarchiv_Bild_102-00678,_Genf.-_Haus_des_Völkerbundrates.jpgDu reste, il y avait quelque rapport entre lʼinternationalisme prolétarien et lʼuniversalisme démocratique qui guida ceux qui établirent la S.D.N. Bainville ne se montrait pas farouchement hostile à ce Saint-Siège profane que le protestant idéaliste Emmanuel Kant appelait de ses vœux dès la fin du XVIIIème siècle dans Idée dʼune histoire universelle dʼun point de vue cosmopolitique. Mais Bainville estimait, le 18 janvier 1918, quʼelle aurait une valeur seulement si la menace allemande était écartée : « Pour que la Société des Nations […] entre dans les faits, il faut dʼabord que lʼAllemagne ne puisse plus nuire. »[5] Une S.D.N. qui reconnaîtrait une Allemagne une et indivisible, considérait-il, serait inepte autant quʼillégitime.  (A suivre)  ■ 

    [1]  http://lafautearousseau.hautetfort.com/archive/2018/05/02/ce-menacant-monsieur-cassin-6048031.html
    [2]  Jacques Bainville, ibid., p. 206.
    [3]  Jean Bouvier, « Les révolutionnaires du yiddishland », Vingtième siècle, n°3, 1984, p. 115-117.
    [4]  Hannah Arendt, Sur lʼantisémitisme. Les origines du totalitarisme, Paris, Gallimard, 2002, p. 40.
    [5]  Jacques Bainville, ibid., p. 202.

    Articles précédents ...

    L'Action Française dans la Grande Guerre [1] La guerre sans l'aimer
    L'Action Française dans la Grande Guerre [2] Un prescripteur d’opinion de plus en plus important 
    L'Action Française dans la Grande Guerre [3] L’Union Sacrée : un ralliement ?
    L'Action Française dans la Grande Guerre [4] L’Union Sacrée : un ralliement ?
    L'Action Française dans la Grande Guerre [5] L’« affaire des panoplies »
    L'Action Française dans la Grande Guerre [6] Guerre totale contre lʼEurope
    L'Action Française dans la Grande Guerre [7] Guerre totale contre lʼEurope
    L'Action Française dans la Grande Guerre [8] LʼArmistice et ses suites. Une paix à la Pyrrhus

     

    lafautearousseau

  • « La Rébellion cachée » à Marseille, jeudi 29 novembre ... C'est ce soir ! Venez-y !

     

    Marseille

    Jeudi 29 novembre à 19 h

    Lafautearousseau vous invite à la projection du film

    « La Rébellion cachée »

    La vérité sur le génocide vendéen, matrice de tous les génocides modernes, une dénonciation rigoureusement historique du totalitarisme révolutionnaire.

    Lieu de l'événement : Salle Jean Eudes, 14 rue St Adrien 13008 (rue qui longe le côté gauche de la Basilique du Sacré-Cœur) - PAF 8€ (Etudiants et jeunes 5€). 
    Renseignements & réservations : 06 08 31 54 97 - lafautearousseau@outlook.fr
  • Le temps du blasphème

     

    Par Philippe Mesnard
     

    maxresdefault.jpg

    Quand Marlène Schiappa apostrophe par SMS Cyril Hanouna – car toujours les Puissants ont eu à cœur de dialoguer avec l’Art – pour lui rappeler qu’il existe un délit d’entrave à l’IVG, simplement parce qu’un citoyen exprime son opinion dans une émission de divertissement, elle montre qu’elle ignore la loi – ou plutôt qu’elle se moque des textes exacts et ne veut en retenir que l’esprit : on ne touche pas à l’IVG, devenue idole du Progrès. C’est tabou !

    Et ceux qui critiquent doivent être condamnés. Émile Duport, des Survivants, avait blasphémé et Hanouna, qui lui offrait une tribune, était bien près d’être inculpé d’assistance à blasphémateur. L’ironie étant qu’au moment même où Schiappa menaçait de fulminer l’anathème, l’Irlande abrogeait le délit de blasphème, qui n’existe donc plus que dans les pays musulmans. Muriel Robin, dans l’émission de Ruquier – continuons de fréquenter des sommets –, intimait l’ordre de se taire à un chroniqueur qui ne brûlait pas assez d’encens devant Fogiel et ses GPA illégales.

    Schiappa n’est qu’un exemple, certes significatif puisque c’est un membre du gouvernement, de ce nouveau goût pour ce genre d’accusation : avoir outragé ce qui est sacré ! Un homme n’a plus médiatiquement le droit de se défendre quand une femme l’accuse, car nier la vérité de la parole de la victime féminine, c’est commettre un crime encore plus affreux que celui dont on est accusé – même quand on est innocent.

    Anne-Marie Le Pourhiet remarquait que le néo-féminisme est au-dessus des lois, ou plutôt qu’il produit sa propre loi : qu’il soit anathème celui qui n’avoue pas !

    D’autres blasphèmes sont peu à peu institués : on comprend bien que qui se réclame du nationalisme n’est qu’un galeux, un chien, un lépreux qui mérite d’être jeté hors de la société pour avoir outragé le « vivre-ensemble » ; qu’un « blanc » ose célébrer une vie « noire », et le voilà accusé du blasphème d’appropriation culturelle ; qu’un juge ose enquêter sur Mélenchon, et voilà ce dernier qui éructe qu’il est sacré et intouchable – ce qui est grotesque même si les conditions de cette enquête sont en elles-mêmes un scandale ; cela dit, la France insoumise n’hésite pas à expliquer que cette perquisition est « digne de la nuit des longs couteaux », ce qui est un tantinet exagéré, et qu’on a blasphémé contre le texte sacré qu’est l’article 12 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 ; la Cour européenne des droits de l’homme, de son côté, n’hésite pas à déclarer sacré le mariage entre homosexuels au point qu’elle trouve blasphématoire le refus de certains maires de le célébrer, se contentant de déclarer irrecevable, en octobre 2018, la requête qu’ils avaient introduite dans ce sens en 2015 : comme dirait Kouachi, on ne discute pas avec les blasphémateurs, on les fait taire. La même CEDH vient de confirmer la condamnation d’une Autrichienne, qui avait affirmé que Mahomet était pédophile puisqu’il avait épousé une fillette de six ans et consommé son mariage avec elle, ses propos « menaçant la paix religieuse ». Gérard Davet et Fabrice Lhomme, journalistes au Monde, qui viennent de publier une enquête sur la France islamiste en Seine-Saint-Denis, se rendent compte, stupéfaits, qu’ils sont accusés d’avoir blasphémé en n’entonnant pas l’antienne obligatoire d’un islam irréprochable.

    Et Macron ne veut pas commettre le blasphème de froisser l’Allemagne en donnant une « expression trop militaire » à la célébration d’une victoire remportée militairement sur l’Allemagne…

    Une nouvelle religion se met en place depuis quelques décennies, et se sent aujourd’hui ou assez assurée ou assez menacée pour ne plus supporter aucune contradiction : oser contredire n’insulterait pas seulement l’intelligence mais serait une violence sociale dangereuse et insupportable. Cette nouvelle religion se fonde sur un oubli complet du passé. Pierre Nora déclarait dans Le Figaro : « Le passé s’est éloigné. Les plus jeunes n’éprouvent plus le sentiment d’une continuité historique de Jules César à Napoléon, auparavant si vif. La coupure est nette. La dictature du présent et l’oubli de la longue durée entraînent la fin de ce qui a été le ressort de la transmission : le sentiment de la dette. La conviction, qui a pesé sur les hommes pendant des siècles, que nous devons à nos parents et à nos ancêtres d’être ce que nous sommes. Les Français de 2018 ne se perçoivent plus comme les débiteurs de leurs devanciers. »

    Cette religion assure la promotion d’un terrifiant avenir univoque aux couleurs des droits de l’homme qui, pourtant, ensanglantent le monde depuis plus de deux siècles.

    Ce nouveau siècle sera bien religieux. Sale temps pour les blasphémateurs qui n’entendent pas se convertir.  

    Philippe Mesnard
  • Il est encore temps de lire le numéro de novembre de Politique Magazine et de s'y abonner ...

     

    Au sommaire de ce nouveau numéro :

    1914-1918 : les leçons de la guerre.

    Dossier : 1918-2018, un siècle après la victoire. 

    IVG : de l'inconvénient de rappeler la loi. 

    L'ITALIE : cauchemar de l'Europe de Bruxelles.

    Et aussi dans ce numéro…  54 pages d’actualité et de culture !

    couv-174-300x420 - Copie.png

    Sommaire du mois

    S’abonner à Politique magazine

  • L'Action Française dans la Grande Guerre [8] LʼArmistice et ses suites. Une paix à la Pyrrhus

     Tableau représentant la signature de l’armistice dans le wagon du maréchal Foch. 

    De droite à gauche, le général Weygand, le maréchal Foch (debout) et les amiraux britanniques Wemyss et Hope (assis), le ministre d’État allemand Erzberger (en manteau sombre, de dos), le capitaine de la Royal Navy Marriott (debout en arrière-plan), le Generalmajor Winterfeldt de la Deutsches Heer (avec casque à pointe), le comte Oberndorff des Affaires étrangères (en manteau clair chapeau à la main) et le Kapitän zur See Vanselow de la Kaiserliche Marine (tête nue en arrière-plan).

     

     

    L'armistice et ses suites. Une victoire à la Pyrrhus 

    Jusquʼici nous avons surtout insisté, en traitant du rôle joué par lʼAction Française pendant la Première Guerre mondiale, sur les causes de celle-ci. Au fond son irruption serait – cʼest notre thèse – le fruit de la congruence de l’expansionnisme pangermaniste de la Prusse et du bellicisme antinomiste maçonnique, que Charles Maurras érigea en véritables fléaux minant la France. 

    Maintenant il est question dʼétudier les conséquences géopolitiques de la Grande Guerre. Pour clore cette série dʼarticles publiée à lʼoccasion du centenaire de le 119910292_o.jpglʼarmistice du 11 Novembre 1918, nous nous bornerons à rappeler ce que lʼAction Française – et Jacques Bainville en premier lieu – pensait dudit armistice qui mettait fin à quatre ans de combats, dont lʼintensité fut sans précédent, et qui déboucha sur un certain nombre de traités de paix dont le plus important parmi eux fut le « diktat » de Versailles (photo)

    Bainville annonce la chute du Reich 

    Notons dʼabord que Bainville ne fut pas surpris par la défaite de lʼAllemagne. Dès le début de lʼannée 1918 il lʼavait en effet anticipée. Ce quʼil écrit dans son Journal en date du 31 janvier 1918 en atteste : 

    2670193225.jpg« Le 27 janvier, jour de la fête de Guillaume II (photo), tandis que nos soldats entendaient des chants et des hymnes monter des tranchées allemandes, plus de 200 000 ouvriers faisaient grève à Berlin. Le même jour, une élection partielle pour le Reichstag, à Bautzen, mettait aux prises un socialiste et une conservateur annexionniste. Le socialiste lʼemportait et sʼemparait dʼun siège de la droite, mais à quelques centaines de voix seulement sur près de vingt mille électeurs. La motion de paix du 19 juillet a eu pour elle, à Bautzen, la majorité. Mais le programme des annexions a encore recueilli un nombre de suffrages important. 

    Ce que nous voyons et ce que nous apprenons de lʼAllemagne confirme ces indices : il apparaît que deux courants en force encore sensiblement égale se partagent lʼopinion publique allemande. Il y a ceux, et leur nombre grandit, qui sont las de la guerre, ceux qui nʼen peuvent plus des privations et de souffrances. Et il y a ceux qui veulent que ces misères soient endurées jusquʼà ce que lʼAllemagne soit récompensée de son miracle dʼénergie par un surcroît de grandeur et de richesse. 

    Tel est le conflit. Selon le mot juste du Vorwaerts, lʼarc allemand a été trop tendu. Le militarisme prussien a demandé aux peuples dʼAllemagne des efforts qui dépassent les possibilités humaines. Cet excès devait finir par entraîner une réaction. Il devait finir par se payer. Le parti militaire doit lutter aujourdʼhui pour obtenir de nouveaux sacrifices, et lʼAllemagne les consentirait plus volontiers si elle croyait encore à la victoire. Mais la foi nʼy est plus. 

    Le discours que Scheidemann a prononcé à la Commission principale du Reichstag est important à cet égard. Cʼest un signe des temps que le chef socialiste ait pu railler ceux quʼil appelle ironiquement les Schertsieger, ces partisans de la victoire par la force du glaive dont le grand tort est de nʼavoir jamais remporté nulle part de succès décisif. Quʼune nuance de ridicule commence à sʼattacher au militarisme prussien, que les Allemands eux-mêmes, si peu subtils, en viennent à sentir que le matamore pangermaniste nʼest plus en harmonie avec les circonstances, cʼest un symptôme nouveau et quʼon ne saurait négliger. Il est plus significatif encore que Scheidemann ait protesté contre le gaspillage de vies humaines quʼentraînerait la nouvelle offensive projetée sur le front occidental par le haut commandement et contre la vanité des plans de lʼétat-major. 

    Il est peu probable dʼailleurs que le parti militaire se laisse intimider si facilement. Il compte encore des appuis sérieux dans lʼopinion publique elle-même et il ne paraît pas près de renoncer à la partie. Sʼil le faut, il nʼhésitera pas à user de la répression. 

    Seulement, jusquʼici, son outrance a fait plus quʼautre chose pour troubler et pour gâter les esprits en Allemagne... Le militarisme prussien joue à découvert. Cʼest un jeu qui nʼest pas sans danger. Cʼest aussi le vrai jeu. »[1] 

    Ce jeu à découvert aura finalement perdu lʼAllemagne. Le soulagement et la joie ressentis par les Français au moment de lʼannonce de lʼarmistice, lʼAction Française les partage à peine. Pour Maurras et les siens la paix obtenue nʼest pas satisfaisante. Cʼest un faux-semblant, une paix illusoire, à la Pyrrhus, qui en a lʼapparence mais pas la consistance. 

    Cette paix est donc transitoire, illusoire : « LʼAction Française fut un des rares journaux où lʼon comprit que lʼarmistice ne marquait rien de plus quʼune suspension des hostilités. À quelles fins ? Pour combien de temps ? Les décisions à prendre au cours des quelques mois à venir le diraient. Toute lʼénergie des royalistes tendit alors vers la conclusion dʼune ʽʽpaix françaiseʼʼ, de la paix qui, selon eux, devait le mieux servir les intérêts nationaux. […] LʼAction Française réclamait, en effet, la division de lʼAllemagne, lʼannexion par la France de Landau et de la Sarre et dʼune sorte de protectorat français sur le reste de la Rhénanie. »[2] 

    1115522324.jpgLes conditions de la paix posées à Versailles ne satisfont aucunement Bainville, qui, le 8 mai 1919, écrit un papier dans LʼAction Française au titre aussi perspicace que prophétique : « Une paix trop douce dans ce quʼelle a de dur. » Il y développe une thèse lumineuse qui prend la forme dʼun chiasme : le traité de Versailles est trop faible dans ce quʼil a de dur, trop dur dans ce quʼil a de faible(A suivre)  ■ 

    [1]  Jacques Bainville, Journal, Paris, Plon, 1948, p. 204-205.

    [2]  Eugen Weber, LʼAction Française, Paris, Stock, 1964, p. 137.

    Articles précédents ...

    L'Action Française dans la Grande Guerre [1] La guerre sans l'aimer
    L'Action Française dans la Grande Guerre [2] Un prescripteur d’opinion de plus en plus important 
    L'Action Française dans la Grande Guerre [3] L’Union Sacrée : un ralliement ?
    L'Action Française dans la Grande Guerre [4] L’Union Sacrée : un ralliement ?
    L'Action Française dans la Grande Guerre [5] L’« affaire des panoplies »
    L'Action Française dans la Grande Guerre [6] Guerre totale contre lʼEurope
    L'Action Française dans la Grande Guerre [7] Guerre totale contre lʼEurope

     

    lafautearousseau

  • Café Histoire de Toulon ce mercredi 28 novembre : l'abbé Fabrice Loiseau évoque le pape Pie IX

     

    L'abbé Loiseau entame pour le café Histoire, une série de causeries sur les papes « modernes ». Il va évoquer Pie IX, qui commença son règne par des réformes qui le firent acclamer comme un libéral. Acculé à une politique défensive par les révolutionnaires, emprisonné, exilé, il fut un souverain contesté, mais un Père ardemment aimé, ce qui lui permit de donner à son génie religieux un retentissement universel. L'on découvrira ainsi ce qu'est le célèbre texte du Syllabus, le « catalogue des erreurs modernes ». 

    Le Grall, Pub associatif des missionnaires de la Miséricorde (adhésion 1 €)
    377 avenue de la République, 83000 Toulon
    La soirée pourra se poursuivre autour d’une pizza (Participation aux frais)
    Contact : cafehistoiredetoulon@gmail.com
  • Gilets jaunes : cette fois c’est différent. Reportage de Politique Magazine au coeur de l'actualité

     

    photo-14-450x600.jpgNotre reportage dans la manifestation Gilets jaunes du 24 novembre le prouve : c’est la France profonde qui s’est montrée ce jour-là. Une France qui durcira sa contestation car elle n’a plus le choix. 

    Ils sont venus de toute la France pour montrer leur ras-le-bol. Leur but ? Obtenir gain de cause. Hors de question, pour cette France qui bosse et a du mal à boucler ses fins de mois, de faire machine arrière. « S’il le faut on reviendra », nous ont dit plusieurs manifestants. Peu de Parisiens dans le cortège de samedi, mais des Jurassiens, des Tarnais, des Auvergnats, etc. (Photo : « Macron, rends-nous notre pognon ».)

    L’un d’eux est arrivé avec deux amis la veille au soir et a dormi dans un hôtel Formule 1. Il explique que, dans sa région, les bus cessent de fonctionner à 19h. Lui part au travail à 21h.

    « C’est pas comme à Paris ou les grandes métropoles, ici vous avez tout. Nous, on est obligé de prendre la voiture. »

    À elle seule, l’essence lui coûte désormais plus de 100 euros par mois. « C’était la goutte d’eau. Les médias ne parlent que de l’essence, ils nous font passer pour des beaufs, mais c’est un tout ».

     

    Paris est verrouillé.

    « J’ai vu mes parents galérer toute leur vie. Et moi je continue à galérer. Il y en a marre », nous a dit un jeune habitant d’un petit village. Un peu plus tard, dans un abri protégé des gaz lacrymogènes incessants, un homme originaire de Brioude montrera avec fierté sur son téléphone les blocages organisés par les gens restés au pays. Des barrages en pleine campagne, là où les populations sont livrées à elles-mêmes.

    Ce que nous avons vu samedi, ce sont les difficultés, voire la détresse, de cette France rurale et périphérique. Une France abandonnée par nos gouvernants au profit du commerce avec la Chine, au profit de la finance mondialisée, au profit des banlieues immigrées aussi. Une France qui bosse et qui ne peut plus s’en sortir. Une France manuelle qui paye la désindustrialisation, le retrait des services publics, la concentration du travail et du capital dans les grandes métropoles. Mais une France qui vit, une France souriante malgré tout, une France qui dégage beaucoup de dynamisme.

     

    La révolte des campagnes sur les Champs-Elysées. 

    Ce que nous avons compris, c’est que le mouvement va se durcir. Car cette France-là a de moins en moins à perdre. La froideur inflexible de l’exécutif, de plus en plus perçue comme de l’arrogance, n’a rien arrangé. Dans le cortège, nous pouvions sentir du dégoût envers le président de la République. Du dégoût aussi pour l’accueil musclé qui leur a été réservé, avec des centaines de camions de CRS, des grenades assourdissantes et des canons à eau. « Vous êtes payés avec nos impôts ! » avons-nous entendu des dizaines de fois. « Vous êtes fiers de vous ?! Vous attaquez le peuple ! », criaient en bon nombre des manifestants qui découvraient ce type de rapport de force.

     

    Les Gilets jaunes dressent des barricades. 

    Des « casseurs », ces Gilets jaunes ? Ben voyons… Certains médias industriels mettent en avant des incidents qui ont eu lieu à 21h ou plus tard, alors que la manifestation était terminée. Mais tout observateur présent lors du grand chamboulement des Champs-Elysées (les forces de gendarmerie ont usé de gaz lacrymogène dès 11 heures du matin) a pu constater qu’aucune vitrine n’a été cassée, qu’aucune voiture n’a été visée. Il a vu les pompiers se faire protéger par des Gilets jaunes. Oui, nous avions bien affaire à une France habituellement sans histoires.

     

    « Ils plieront ».

    Elle était venue pour se montrer près du palais présidentiel, pour descendre les Champs-Élysées, et pour obtenir gain de cause. En face, les forces de l’ordre avaient pour mission d’effacer leur visibilité et de faire évacuer les lieux. Le face-à-face a été musclé. Six heures durant, les CRS ont usé de gaz hyper-irritants à forte dose, balancé des grenades assourdissantes dans le public, usé de canons à eau jusqu’à plus soif, et même utilisé quelques fois des flash-ball. Pendant ce temps, les manifestants et quelques habitués de la castagne ont tenté d’avancer, ont mis le feu à leurs barricades, ont jeté des projectiles pour défendre leurs positions.

     

    Paris, 24 novembre. L’affrontement s’intensifie.

    Cette journée du 24 novembre laissera des traces. Car l’on voit mal le gouvernement se protéger derrière de tels barrages de CRS tous les week-ends. On le voit mal accepter de voir « la plus belle avenue du monde » en feu un samedi de fréquentation. Surtout, on le sent vulnérable aux pertes associées aux blocages des grandes chaines de magasin – les Sephora, les Casino, les Carrefour, les H&M et autres textiles fabriqués à 3 euros en Thaïlande – presque tous détenus par des fonds financiers situés aux Etats-Unis, au Qatar, en Chine, à la Barbade, aux îles Caïmans… La seule journée de blocage du 17 novembre avait provoqué des manques à gagner de plusieurs millions d’euros pour ces multinationales. Celles-là même qui influent tant sur la politique de l’Union européenne et auprès desquelles le président Macron porte une oreille très attentive.

     

    Les forces de l’ordre tirent des gaz irritants dans les petites rues adjacentes aux Champs-Elysées.

    L’écart entre le vécu des populations locales et les conséquences des choix politiques actuels est désormais trop grand. Qu’importe la forme que prendra la contestation à l’avenir. Qu’importent les amendes astronomiques et les peines de prison. Sans inflexion du gouvernement, cette France continuera de se montrer. Car elle est ne veut pas mourir à petits feux.  

    couv-174-300x420.png

    Reportage de Louis Anders

    La « plus belle avenue du monde » : de la fumée s’élève des Champs-Elysées (depuis l’esplanade des Invalides).

     

  • Économie : rien ne va plus dans le monde

    Par Marc Rousset    

    3890715347.jpg

    « Les actions sont en plein bitcoin », a pu déclarer un gestionnaire d’actifs, comparant les marchés boursiers surévalués aux bulles des crypto-monnaies en train d’éclater.

    Le CAC 40 a déjà perdu 7 % depuis le début de l’année, Vallourec 65 % et Valeo 58 %, tandis que les banques françaises, balayées par les tensions en Italie, affichent des baisses comprises entre 20 % et 30 %. Le CAC 40, soutenu par les groupes de luxe, a perdu cependant moins que Francfort (13,5 %), Milan (14,5 %), Londres (10 %).

    Le déclin du prix du pétrole est inquiétant car il signifie que l’économie mondiale s’affaiblit. Le simple fait que de plus en plus de banquiers centraux achètent de l’or dans le monde doit aussi être considéré comme un signal d’alerte.

    Jusqu’à ce jour, l’échéance inéluctable de la faillite des finances publiques dans le monde a été repoussée par le soutien abusif des banques centrales. Le déficit de la France de 83 milliards d’euros ne doit pas être comparé seulement aux fameux 3 % du PIB qui rassurent, mais aux recettes fiscales de 245 milliards d’euros de notre pays, soit 30 % de ces dernières. La France doit être comparée à une entreprise qui, depuis quarante ans, connaîtrait une perte abyssale de 30 % de son chiffre d’affaires ! Au bout d’une seule année, tout chef d’entreprise – n’importe où dans le monde – qui présenterait un compte d’exploitation semblable serait immédiatement démis de ses fonctions par les administrateurs de la société.

    La BCE, face à la catastrophe qui s’annonce, mettra fin effectivement, en décembre 2018, à son programme de rachat d’actifs (« QE ») de 2.600 milliards d’euros, mais elle songerait à reporter à l’automne 2019 ou à fin 2019 le relèvement de taux annoncé pour l’été 2019. Il est probable que les trois tours de vis de 0,25 % de la Fed pour l’année 2019 seront, eux aussi, soumis aux aléas de la conjoncture. Mais les banques centrales sont cependant obligées, un jour ou l’autre, de remonter les taux pour briser le cercle vicieux : baisse des taux et augmentation de l’endettement. Sinon, la partie se terminera par la perte de confiance, la fuite devant la monnaie et l’écroulement du système financier hyper-endetté.

    Aux États-Unis, l’euphorie du consumériste « Black Friday », repris en anglais dans le texte par les petits singes copieurs européens à court d’idées nouvelles pour vendre encore davantage, masque les déceptions des classes aisées, suite à l’effondrement de 9 % de Wall Street depuis début octobre. L’immobilier et les ventes de véhicules fléchissent, suite à la hausse des taux. Toys“R”Us a fermé ses 800 magasins. Sears est au bord de la liquidation. J.C. Penney, avec ses 865 magasins, est aux abois, tandis que les géants de la distribution Home Depot, Target et Walmart souffrent en se faisant massacrer à Wall Street. À noter qu’en France, Casino, Auchan et Carrefour luttent aussi à contre-courant, suite à la gloire éphémère perdue des hypermarchés.

    La dette des ménages américains (marché hypothécaire, crédit revolving, crédit automobile, cartes de crédit et prêts étudiants) a atteint le niveau record de 13.500 milliards de dollars. Pour diminuer leur déficit, les Américains seront, un jour, obligés de dévaluer le dollar alors que la hausse des taux le réévalue, d’où les problèmes insurmontables à résoudre aux États-Unis, du style quadrature du cercle.

    En Grèce se fait entendre le chant du cygne Aléxis Tsípras, qui prétend, avec son projet de budget miracle 2019, « avoir fait mentir les Cassandre qui prédisaient le désastre de l’économie du pays ». Le désastre est pourtant là avec, malgré l’émigration, un taux de chômage de 19,9 %, un parti d’opposition conservateur avec 16,5 points d’avance sur SYRIZA et des taux d’emprunt prohibitifs à dix ans à 4,5 %, contre seulement 3,4 % pour l’Italie et 0,7 % pour la France. « Ce budget est un trompe-l’œil démagogique à visée électorale, qui ne change rien et empêche la Grèce de redémarrer », dénonce Olivier Delorme, historien spécialiste de la Grèce.

    En fait, le danger sévit partout dans le monde : à elle seule, la dette privée en dollars d’environ 230 % du PIB chinois pourrait provoquer une crise mondiale d’envergure, selon l’économiste japonais Kevin Lai, de Daiwa Capital Markets. La chute de la monnaie chinoise provoquerait, en effet, une crise de la dette en Chine, susceptible de dégénérer en désastre mondial. ■  

    41LRKbfMFHL._SL300_.jpg

    Économiste
    Ancien haut dirigeant d'entreprise
  • L'Action Française dans la Grande Guerre [7] Guerre totale contre lʼEurope

    Maurras et Proudhon

     

    Nationalisme intégral et anarcho-syndicalisme 

    Avant-guerre une alliance tout à fait étrange au premier abord avait commencé à se cristalliser. Cette alliance avait été suscitée par lʼAction Française, qui entendait discuter directement avec ceux à qui, supposément, ils sʼopposaient de façon diamétrale : les partisans du syndicalisme révolutionnaire, héritiers de la pensée de Pierre-Joseph Proudhon notamment. Lʼobjectif était de les convaincre du bien-fondé du royalisme, le principe monarchique étant au fond « lʼanarchie + UN  (le Roi) », pour reprendre une fameuse formule.      

    berth.jpgLe 17 novembre 1911 a lieu la première réunion du Cercle Proudhon. Ses principaux organisateurs sont Henri Lagrange, Georges Valois et Gilbert Maire. Un proche de Georges Sorel, connu pour sa définition du « mythe », qui encore aujourdʼhui fait autorité dans les sciences sociales, et qui est considéré comme le « frère ennemi » de Jean Jaurès, est la prise de guerre la plus importante des tenants du nationalisme intégral : Édouard Berth (photo), ancien socialiste devenu disciple, outre Sorel, de Charles Péguy. Berth partageait avec Maurras une aversion pour le parlementarisme dit démocratique, ainsi quʼune grande admiration pour lʼAntiquité. 

    À partir de janvier 1912 le groupe édite une revue trimestrielle appelée les Cahiers du Cercle Proudhon. Pour la République ce rassemblement de lʼultra-gauche et de lʼultra-droite était dangereux, car il rendait possible une convergence de la classe ouvrière et de la classe moyenne dirigée vers un objectif commun, la dissolution de la République, représentée par une putain se vendant au bourgeois pour les uns et par une gueuse pour les autres. Lʼanti-France voyait émerger une force bâtie sur lʼunion des contraires, qui pouvait lui être fatale. Un mouvement qui célébrerait autant le martyre vendéen que le martyre des ouvriers grévistes de Fourmies. 

    Pour lʼobservateur dʼaujourdʼhui, il peut paraître impensable que le syndicalisme révolutionnaire de Sorel puisse être miscible dans le royalisme nationaliste de Maurras.      

    En réalité les deux mouvements ont en commun de sʼopposer à lʼÉtat moderne qui au gouvernement des hommes substitue lʼadministration des choses. Au jacobinisme ils préfèrent le fédéralisme, lʼautonomie des « petites patries », des collectivités locales, dont les libertés sont bafouées par une République centralisatrice qui nie tout particularisme, prélève impôts et taxes à outrance et protège les intérêts dʼune élite nouvelle, une aristocratie financière qui vit de la rente que lui procure le crédit, cʼest-à-dire, aujourd’hui, lʼargent quʼelle prête à lʼÉtat.      

    4234346337.jpgRappelons également que lʼautre grande figure du nationalisme avec Maurras, Maurice Barrès (photo), se revendiqua pendant longtemps socialiste. Il « ne craignait jamais dʼinsister sur lʼunion intime des idées nationalistes et socialistes. […] Cʼest lui qui, le premier, fit voisiner nationalisme et socialisme sous forme imprimée, dans la Cocarde, quʼil publia de septembre 1894 à mars 1895. Dans les pages de celle-ci, on trouvait associés des compagnons aussi peu faits pour sʼentendre que René Boylesve, Charles Maurras, Frédéric Amouretti, Camille Mauclair et des syndicalistes extrémistes, tels que Augustin Hamon et Fernand Pelloutier. »[1]      

    thumbnail.jpgAu fond La Cocarde était une sorte de préfiguration des Cahiers du Cercle Proudhon. Il est à ce sujet important de prendre en considération ce quʼécrivait Maurras au point de départ de la guerre dans LʼAction Française du 2 août 1914, dont le titre en une était « La France sous les armes », en réaction à lʼassassinat de Jean Jaurès : 

    « Ma jeunesse a connu des socialistes presque chauvins. Il en était même dʼantisémites, dont quelques-uns se retrouvèrent, à lʼaffaire Dreyfus, contre Dreyfus ou bien sur un terrain de stricte neutralité. Lʼhypothèse dʼun socialisme nationaliste nʼétait pas plus improbable quʼune autre vers lʼannée 1894. […] Il eût été possible de prévoir comme de savoir. Lʼhistoire mieux interrogée aurait dû prévenir M. Jaurès et les socialistes qui le subissaient tous quʼils tournaient le dos à leur siècle. Lʼévolution, comme ils disent, ne va pas à lʼunité, mais bien à la diversité. Nous sommes moins près des États-Unis dʼEurope, Bainville vous lʼa souvent dit, quʼaux temps des Vergennes et des Choiseul, qui en étaient moins près quʼHenri IV, au moment du projet de paix perpétuelle, dont le simple rêve était de beaucoup inférieur à cette Unité du monde chrétien que le Moyen-Age a réalisée. Cette diversification croissante emporte des risques de guerre croissants. » 

    Le propos de Maurras consiste au fond à reprocher à ceux qui ont pris la tête du mouvement socialiste, et donc au premier chef Jaurès, de manquer de réalisme, de prendre, pour le dire trivialement, leurs désirs pour des réalités. Sa critique rappelle celle que faisait Marx à lʼencontre des socialistes français quand il les taxait dʼutopiques et de doux rêveurs. 

    De plus Maurras soutient que si les choses avaient pris une autre tournure, socialistes et royalistes auraient très bien pu se coaliser et travailler, main dans la main, à saper les bases de la société moderne, libérale et démocratique. Même l’antisémitisme ambiant à droite comme à gauche, fin XIXe – début XXe siècle, rassemble les deux courants. Il suffit de lire  ces lignes écrites par Proudhon dans Césarisme et christianisme – « Le Juif est par tempérament anti-producteur, ni agriculteur, ni industriel, pas même vraiment commerçant. Cʼest un entremetteur, toujours frauduleux et parasite, qui opère en affaires, comme en philosophie, par la fabrication, la contrefaçon, le maquillage... Sa politique en économie est toute négative ; cʼest le mauvais principe, Satan, Ahriman, incarné dans la race de Sem »[2] – pour constater quʼil y avait alors un certain nombre de points dʼaccord entre ces deux écoles de pensée, en particulier dans leur dénonciation de lʼutilitarisme et du matérialisme propre à la société bourgeoise moderne.          

    Le cercle Proudhon fut, précisément, dissout durant lʼété 1914, au moment de la mobilisation.          

    Aux yeux des républicains la mobilisation fut ainsi un moment de grâce. LʼUnion Sacrée eut pour eux le mérite de mettre un terme à lʼalliance des nationalistes intégraux et des socialistes radicaux. 

    La synergie, par nature, est réputée décupler la force dont disposent initialement les parties qui la composent. Ce rapprochement des forces anti-système, si elle sʼétait consolidée, aurait pu briser la République. Mais le militarisme prussien, aiguillé par la boussole maçonnique, voulut que les événements advinssent autrement.  (A suivre)  ■ 

    [1]  Eugen Weber, LʼAction Française, Paris, Stock, 1964, p. 88.
    [2]  Cité par Rolland Villeneuve, Dictionnaire du diable, Paris, Omnibus, 1998, p. 792.

    Articles précédents ...

    L'Action Française dans la Grande Guerre [1] La guerre sans l'aimer
    L'Action Française dans la Grande Guerre [2] Un prescripteur d’opinion de plus en plus important 
    L'Action Française dans la Grande Guerre [3] L’Union Sacrée : un ralliement ?
    L'Action Française dans la Grande Guerre [4] L’Union Sacrée : un ralliement ?
    L'Action Française dans la Grande Guerre [5] L’« affaire des panoplies »
    L'Action Française dans la Grande Guerre [6] Guerre totale contre lʼEurope

     

    lafautearousseau

  • A nos arrière-neveux

     

    par Louis-Joseph Delanglade
     

    sinistra-italiana_una-nuova-proposta-il-documento_sfondo-rosso-170204 - Copie.jpg

    Vendredi 23, 8h20, l’invité  du « Grand Entretien » de France Inter est M. Bourg, philosophe et professeur à l’Université de Lausanne.

    On apprend très vite qu’il a quitté la fondation de Nicolas Hulot (dont il était vice-président) pour s'engager en politique aux côtés de l'ancienne ministre socialiste de l'Écologie Mme Batho, avec laquelle il va présenter « très probablement » une liste pour les élections européennes en mai prochain. Intello et écolo : cela a le mérite d’être clair et on peut s’attendre au pire. Et ce fut le pire.

    46519025_1790347791075305_8373125128229224448_o.jpgNon pas sur le fond (on peut même trouver pertinente sa proposition d’un I.S.F. vert pour financer la transition écologique) mais dans le ton employé à l’égard de ceux qui, si peu que ce soit, n’entrent pas tout de suite et sans barguigner dans le moule de l’écologie militante - en l’occurrence, au vu de l’actualité, les fameux « gilets jaunes ». Mépris et condescendance pour ceux que le « sachant » qu’il est considère à l’évidence (même si les mots ne sont pas employés) comme des ploucs, des beaufs, des ringards. 

    Toute personne sensée préférera évidemment respirer un air pur et entendre le chant des petits oiseaux mais quand l’écologie devient religieuse, qu’elle constitue, à travers ses grands-prêtres (MM. Cohn-Bendit et Hulot), ses évangélisateurs (ce M. Bourg par exemple), ses sectateurs prétendument sincères (peut-être les plus dangereux, comme Mme Duflot ou M. Goullet de Rugy) ou opportunistes (tous ces politiciens convertis, comme MM. Hamon, Mélenchon, Juppé…Macron), une forme d’obligation morale que l’on entend imposer à tout prix, sans vouloir prendre en compte ses effets collatéraux, elle est insupportable. Cette écologie-là, qui relève du fanatisme, refuse bien entendu de voir dans les principes révolutionnaires  démocratiques la cause des maux qu’elle prétend combattre.  

    N’en déplaise pourtant aux « élites » (terme désormais péjoratif), il existe bel et bien des « Gaulois réfractaires » qui veulent d’abord survivre. Dernier avatar du « pays réel », la « France périphérique » des sociologues contemporains ne veut pas mourir. Elle a plus ou moins compris que le libéralisme économique et culturel, l’immigration de masse, la mondialisation, la mettent en danger de mort. Ces gens-là ont le tort d’être d’ici et de vouloir vivre au pays : péché impardonnable dans le paradis mondialisé, multiculturel et aseptisé qu’on veut nous faire rejoindre à marche forcée. 

    fontaine-03.jpgSauver la planète est le nouveau credo : mais pour quoi, pour qui, sauver la planète, donc accessoirement la France ? Réponse : c’est l’héritage que nous transmettrons à nos enfants. On respirera peut-être mieux mais on peut craindre que ce soit dans une France exsangue : ne pouvant plus accéder à des logements de centres-villes « gentrifiés », ne voulant plus supporter l’impossible cohabitation dans des cités submergées par les vagues migratoires, les « Gaulois » se sont réfugiés dans la périphérie des métropoles urbaines et les petites villes de province, parfois même à la campagne. La guerre fiscale menée par l’Etat les condamne à terme. Plus d’école, plus de gare, plus de commerces… bientôt le désert. Si rien ne change, que vont-ils devenir ? Leur sort ne semble pas intéresser M. Bourg. « Mes arrière-neveux me devront cet ombrage » écrit La Fontaine : l’ombrage y sera peut-être, mais peut-être pas les arrière-neveux.   

  • L'Action Française dans la Grande Guerre [6] Guerre totale contre lʼEurope

     Film Au revoir là-haut 

     

    Guerre totale contre l'Europe  

    Si lʼon sʼessaye à prendre de la hauteur, on en vient vite à partager le point de vue du pape Benoît XV qui voyait dans la Première Guerre mondiale un « suicide de lʼEurope ». Or, ne peut-on pas même aller plus loin en se demandant sʼil sʼagit plutôt dʼun meurtre contre lʼEurope ? Ce qui implique que lʼAction Française, pourtant dirigée par de fins esprits, à-qui-on-ne-la-fait-pas, aurait été dupée par ceux qui auraient prémédité ce meurtre de, pardonnez du peu, dizaines de millions dʼâmes. 

    « Homicide » volontaire des peuples européens 

    Un tel angle dʼattaque reprend peu ou prou les réflexions de lʼhistorien américain dʼorigine luxembourgeoise Arno Mayer, réflexions quʼil développe dans son ouvrage Political origins of the New Diplomacy, publié en 1959. Sa thèse est la suivante : le « Grand Capital », craignant une crise internationale gravissime, aurait favorisé la guerre pour écraser le prolétariat.      

    Deux films récents sont imprégnés par cette vision des choses. Au revoir là-haut, réalisé par Albert Dupontel et qui est sorti en 2017, montre la difficulté de la « sortie de guerre » pour les Poilus, cʼest-à-dire du retour à la vie civile pour les anciens combattants, tout en pointant du doigt les profiteurs de guerre, des marchands de canons aux politicards stipendiés, tous rouages essentiels de la « Bancocratie », en passant par les margoulins de la pire espèce, qui sʼengraissent par le truchement du tas encore chaud des cadavres en mal de sépulture digne. 

    105595.jpgLe second est plus ancien. Il sʼagit du film Les enfants du marais de Jean Becker (1999), qui commence au moment de la démobilisation, et dépeint les différentes strates de la société française de lʼentre-deux-guerres. À la dérobée, le spectateur apprend au détour dʼune conversation entre gens de bonne compagnie, à lʼintérieur du salon richement décoré dʼun capitaine dʼindustrie, que lʼélite capitaliste nʼen a pas eu assez avec la boucherie de 14-18. Craignant, à la manière dʼun Ortega y Gasset, lʼirruption dʼune révolte des masses, le bon bourgeois lâche : « Il nous faudrait une bonne guerre ». 

    En nous appuyant sur ce quʼenseigne la sociologie réticulaire, lʼon en parvient, visant le but de déterminer les mécanismes profonds sur lesquels repose le fonctionnement du capitalisme – comment, en somme, sʼarticule sa dynamique indomptable et féroce –, à la conclusion selon laquelle la franc-maçonnerie joue un rôle décisif dans ce déploiement. Des personnes aussi différentes, pour ne pas dire antagonistes, que Karl Marx et Léon Trotsky dʼune part, et Henri Delassus et Ernest Jouin dʼautre part, en sont arrivés à une telle affirmation.      

    La franc-maçonnerie, que Charles Maurras décrivait comme un « quartier » du pays légal, autrement dit lʼun des quatre états confédérés dressés contre la France de Clovis, de Jeanne dʼArc et de Saint Louis, constitue le réseau interne de coordination de la mécanique capitaliste, sa courroie de transmission occulte. Des éléments factuels vérifiables mettent en lumière que la Grande Guerre a résulté de la volonté de la coterie maçonnique. Celle-ci est la vraie responsable de la Première Guerre mondiale, et non le nationalisme, nʼen déplaise à MM. Mitterrand et Macron. 

    Dans la revue LʼUnivers du 12 novembre 1882, on peut lire : « Les plans de subversion universelle, les projets abominables qui tendent à couvrir lʼEurope de ruines et de sang en vue de substituer partout la République aux monarchies, lʼidéal matérialiste et révolutionnaire à lʼidéal spiritualiste et chrétien, sortent aussi des ateliers et des convents maçonniques. »      

    1711052148.jpgDe surcroît, à lʼoccasion dʼune visite, le 23 juin 1916, de lʼempereur Guillaume II (photo) à lʼabbaye de Maredret, en Belgique, celui-ci pose cette question à lʼabbesse son hôte, Mère Cécile de Hemptinne : « Savez-vous une des grandes causes de la guerre ? » Elle lui répond par la négative. Et le kaiser Hohenzollern de lui répartir : « Les franc-maçons ».      

    À la fin du conflit, en 1918, le Grand Orient de France prononce cette sentence : « La guerre actuelle est profondément révolutionnaire. Elle prépare un ordre nouveau ». Il suffit, pour se convaincre de la véracité de ces faits, de consulter la plateforme Gallica, où la Bibliothèque nationale de France (B.N.F.) publie en ligne une pléthorique documentation historique numérisée[1]

    Outre la Première Guerre mondiale, la franc-maçonnerie fut à lʼorigine de l’instauration de la République dite française. Justement, une initiative était vue comme très menaçante aux yeux des républicains à lʼorée de la Grande Guerre.   (A suivre)  ■ 

    [1]  Cf. lʼinterview de Thierry Maquet publiée par LafauteàRousseau le 17 novembre 2018.

    Articles précédents ...
    L'Action Française dans la Grande Guerre [1] La guerre sans l'aimer
    L'Action Française dans la Grande Guerre [2] Un prescripteur d’opinion de plus en plus important 
    L'Action Française dans la Grande Guerre [3] L’Union Sacrée : un ralliement ?
    L'Action Française dans la Grande Guerre [4] L’Union Sacrée : un ralliement ?

    L'Action Française dans la Grande Guerre [5] L’« affaire des panoplies »

     

    lafautearousseau

  • Culture • Loisirs • Traditions

    Ce visuel est destiné à marquer l'unité des articles du samedi et du dimanche, publiés à la suite ; articles surtout culturels, historiques, littéraires ou de société. On dirait, aujourd'hui, métapolitiques. Ce qui ne signifie pas qu’ils aient une moindre importance.  LFAR

  • Patrimoine • Versailles ou le Soleil à la fête [II]

    Henri de Gissey, Le Grand Carrousel donné par Louis XIV dans la cour des Tuileries à Paris, pour célébrer la naissance du dauphin 

    La diversité des lieux

    En chantier permanent, Versailles et ses jardins sont le théâtre de nombreuses improvisations. Saint-Germain et Fontainebleau offrent de grandes salles de spectacles, mais c’est l’éphémère et le surprenant qui dicteront l’organisation des divertissements non moins somptueux à Versailles. Comme nous l’avons vu plus avant, c’est à travers d’ingénieux mécanismes, de scènes et décors démontables, de théâtres de verdure et en trompe-l’œil, que le roi divertit sa cour. Le château ne pouvant, quand les Plaisirs de l’île enchantée sont joués, accueillir les six cents invités. À travers ces architectures provisoires faites de treillages et de jeux d’eau, le roi permet aussi au peuple de se divertir et de piller les buffets.

    Cependant, à mesure que les travaux du château avancent, le roi accueille de plus en plus souvent en intérieur, en témoigne le premier souper donné dans le château à l’occasion d’une grande fête telle que les Fêtes de l’Eté de 1674. Ce n’est qu’en 1682 que Louis XIV décide de construire un théâtre dans l’aile Nord du château. Jules Hardouin-Mansard et Vigarani sont sollicités pour cette entreprise mais les travaux commencés resteront inachevés. Les pièces de théâtre et de musique continuent ainsi d’être jouées sur des scènes éphémères avec cependant une évolution : le manège de la Grande Écurie récemment bâtie accueille Persée de Lully, puis un théâtre est construit dans la cour des Princes, où sont jouées des comédies. Au Trianon de marbre, Louis XIV assiste à des opéras dans une salle initialement dévolue à la comédie. Progressivement, les divertissements prennent place dans des lieux dédiés, à l’image de l’appartement, au cœur de l’agenda festif des gentilshommes de la cour.

    Les soirées d’appartement sont une occasion privilégiée pour les sujets de se rapprocher du roi. L’étiquette est suspendue le temps d’une soirée pour qui a été invité. Dans ses Mémoires, le duc de Saint-Simon en parle ainsi : elles se déroulent trois fois par semaine, entre sept et dix heures du soir. À cette occasion, le roi offre à ses invités musique, jeux et rafraîchissements. Le Mercure galant, journal fondé en 1672 par Donneau de Visé, traite ainsi des soirées d’appartement à la cour de Versailles : elles suivent un protocole particulier, en dehors des grandes cérémonies publiques. Le duc d’Aumont, Premier Gentilhomme de la Chambre, s’occupe des invitations en accord avec le roi. La garde est restreinte et la liberté de parler est entière. Les appartements, richement ornés, sanctuarisent un espace d’intimité entre le souverain et sa cour. Le roi passe ainsi de table en table, d’un jeu à un autre, et ne souhaite pas que l’on s’interrompe ni ne se lève pour lui. Donneau de Visé écrit : « On dirait, d’un particulier chez qui l’on serait, qu’il fait les honneurs de chez lui en galant homme. » Le cabinet du Billard est installé dans le salon de Diane, le salon de Mercure est réservé au jeu de la famille royale. Avec le temps, le roi se rend de moins en moins à ces soirées, leur préférant les soirées chez Madame de Maintenon pour travailler avec ses ministres. Cependant, il désirait toujours que ses sujets jouissent des plaisirs qu’il leur prodiguait. Quiconque s’attachait à plaire au roi se rendait à ces soirées.

    Les nombreux jeux de la cour

    Les grandes fêtes comptent de nombreuses déclinaisons hétéroclites. « Louis XIV aimait les femmes et le pouvoir […] il s’amusa et amusa la noblesse à des ballets et à des carrousels. » [1] dit Anatole France. Cette diversité des jeux sanctuarise le rythme de vie de la cour, habituée aux grandes manifestations festives comme aux événements plus intimes. Parmi les jeux de soirée d’appartements, on compte les cartes ou le billard que Monsieur et Monseigneur affectionnent particulièrement. De nombreux jeux apparaissent et disparaissent ainsi au gré des modes : le piquet, le trictrac, le whist, ou encore le brelan, le joc vers 1675, le lansquenet en 1695.

    Mais les jeux prennent souvent plus d’ampleur. À l’occasion de la naissance du Dauphin, le 1er novembre 1661, est organisé un carrousel l’année suivante les 5 et 6 juin 1662. Le carrousel est d’origine italienne, le terme est issu de la contraction de deux mots latins : « carrus-soli », qui signifie « char du soleil ». Il est hérité des tournois médiévaux, intermédiaire entre les parades équestres et les jeux de guerre italiens, et consiste en un jeu militaire composé d’une suite d’exercices à cheval exécutés par des quadrilles de seigneurs richement vêtus, entremêlés de représentations allégoriques tirées de la fable ou de l’histoire.

    L’événement se tient devant le palais des Tuileries. On aménage pour l’occasion la place en carrière, en plaçant devant un amphithéâtre. Un pavillon destiné à recevoir les reines, Marie-Thérèse et Anne d’Autriche, est dressé et prend la forme d’une architecture croisant les ordres dorique et ionique. Dans les étages supérieurs et inférieurs de la tribune richement ornée de velours violet garni de fleurs de lys, plusieurs personnalités de la cour prennent place. Le premier jour, entre dix-mille et quinze-mille personnes sont rassemblées sur la place, parmi lesquelles beaucoup d’étrangers et les notables parisiens. Le roi entre en scène suivi de Monsieur – le frère du roi –, du prince de Condé, du duc d’Enghien et du duc de Guise. Ils arrivent par la rue Richelieu, vêtus à la romaine dont le roi prend la figure de l’empereur portant un casque d’or serti de diamants et paré de roses. Son costume est fait de brocart d’argent rebrodé d’or et de pierres précieuses. Le harnois de son cheval et de couleur feu et d’éclats d’or, d’argent et de pierreries. Il est entouré de cavaliers musiciens dits de la brigade romaine et s’en va saluer la reine. Le second groupe de cavaliers est vêtu à la perse, et commandé par Monsieur. Le troisième est vêtu à la turque, et commandé par le prince de Condé. Le quatrième est vêtu à la mode des Indes, et commandé par le duc d’Enghien. Paraît enfin le duc de Guise, vêtu en roi des sauvages d’Amérique, dont le chapeau est garni de branchages. Au total, on estime à plus de mille le nombre de cavaliers lors de ce ballet équestre qui se poursuit par les courses de têtes contre une tête de turc et une autre de méduse. Le second jour est celui des courses de bagues : elles consistent à enfiler à la lance, en plein galop, une bague pendue par une ficelle à une potence. D’origine guerrière, cette tradition s’est adoucie depuis la mort d’Henri II en 1559, blessé à l’œil par un éclat de lance de bois. Bien que ce type de divertissement tende à s’effacer, le Grand Dauphin lui-même organise des carrousels en 1685 et 1686 : le premier est celui des « Galans Maures », où les participants sont coiffés de têtes de dragons, de harpies, trompes d’éléphants, bouquets de plumes, le second celui des « Galantes Amazones », donné dans la cour des grandes écuries. Il s’agit d’un divertissement galant, où « trente dames et trente seigneurs auront le plaisir de divertir la cour à leurs dépens. » [2] écrit la marquise de de Sévigné dans une de ses lettres.

    Au contact de la nature dans la campagne giboyeuse de Versailles, la chasse est un sport particulièrement prisé par les Bourbons, notamment par Louis XIII qui aimait à se retirer dans son pavillon de chasse pour chasser le gibier à plumes ou le gros. Sous Louis XIV, la vénerie royale a la taille d’un petit village, et représente plusieurs centaines de chiens et de chevaux, et six cents personnes en ont la charge. La chasse à courre est un divertissement marquant la domination du roi sur la nature, à laquelle participe un public restreint resserré autour de la figure du souverain. À la fin du XVIIe siècle, Louis XIV crée le Grand parc de chasse. C’est un vaste domaine clos par un mur dès 1683, avec une superficie de 11 000 hectares, forêt de Marly comprise, à la fin du règne. Pour assouvir son amour de la chasse, Louis XIV l’inscrit à l’étiquette : le matin, le roi gouverne, l’après-midi, il chasse. Parfois mais rarement, elle remplace même le conseil quand la journée est belle. Cette chasse prend deux formes : la chasse à tir se tient dans le grand parc, la chasse à courre en forêt. Le grand veneur accompagne le roi et a le privilège de se tenir à sa proximité. Ce privilège est tel que, sous le règne de Louis XV, Dufort de Cheverny rapporte : « Mon assiduité à la chasse plaisait au Roi. Je redoublai et M. le duc de Penthièvre me rencontrant un jour me dit : « Le Roi vous permet de prendre l’habit de l’équipage ». Il m’aurait donné un gouvernement, il ne m’aurait pas fait plus plaisir. » [3] À l’instar des soirées d’appartement, la chasse est un divertissement prisé des gentilshommes désireux de participer aux heures de détente royale.

    La France fait une spécificité de ces fêtes qui, peu à peu, font du royaume le cœur du divertissement européen où s’épanouit le mythe français. Cette idée fait l’objet de la troisième partie de cet abrégé.  (à suivre)   

    capturrre-58140.png

    Antoine Trouvain, Le Jeu de Portique, Deux fils du Grand Dauphin : duc d’Anjou (futur Philippe V d’Espagne) et duc de Berry (Charles de France), prince de Galles et comte de Brionne


    [1Anatole France, Le Génie latin, p. 140.

    [2Lettre 899

    [3N. Dufort de Cheverny (1731-1802), Mémoires sur les règnes de Louis XV et Louis XVI et sur la Révolution. 

    logo-rouge-et-noir.png

    Le Rouge et le Noir