Économie : rien ne va plus dans le monde
Par Marc Rousset
« Les actions sont en plein bitcoin », a pu déclarer un gestionnaire d’actifs, comparant les marchés boursiers surévalués aux bulles des crypto-monnaies en train d’éclater.
Le CAC 40 a déjà perdu 7 % depuis le début de l’année, Vallourec 65 % et Valeo 58 %, tandis que les banques françaises, balayées par les tensions en Italie, affichent des baisses comprises entre 20 % et 30 %. Le CAC 40, soutenu par les groupes de luxe, a perdu cependant moins que Francfort (13,5 %), Milan (14,5 %), Londres (10 %).
Le déclin du prix du pétrole est inquiétant car il signifie que l’économie mondiale s’affaiblit. Le simple fait que de plus en plus de banquiers centraux achètent de l’or dans le monde doit aussi être considéré comme un signal d’alerte.
Jusqu’à ce jour, l’échéance inéluctable de la faillite des finances publiques dans le monde a été repoussée par le soutien abusif des banques centrales. Le déficit de la France de 83 milliards d’euros ne doit pas être comparé seulement aux fameux 3 % du PIB qui rassurent, mais aux recettes fiscales de 245 milliards d’euros de notre pays, soit 30 % de ces dernières. La France doit être comparée à une entreprise qui, depuis quarante ans, connaîtrait une perte abyssale de 30 % de son chiffre d’affaires ! Au bout d’une seule année, tout chef d’entreprise – n’importe où dans le monde – qui présenterait un compte d’exploitation semblable serait immédiatement démis de ses fonctions par les administrateurs de la société.
La BCE, face à la catastrophe qui s’annonce, mettra fin effectivement, en décembre 2018, à son programme de rachat d’actifs (« QE ») de 2.600 milliards d’euros, mais elle songerait à reporter à l’automne 2019 ou à fin 2019 le relèvement de taux annoncé pour l’été 2019. Il est probable que les trois tours de vis de 0,25 % de la Fed pour l’année 2019 seront, eux aussi, soumis aux aléas de la conjoncture. Mais les banques centrales sont cependant obligées, un jour ou l’autre, de remonter les taux pour briser le cercle vicieux : baisse des taux et augmentation de l’endettement. Sinon, la partie se terminera par la perte de confiance, la fuite devant la monnaie et l’écroulement du système financier hyper-endetté.
Aux États-Unis, l’euphorie du consumériste « Black Friday », repris en anglais dans le texte par les petits singes copieurs européens à court d’idées nouvelles pour vendre encore davantage, masque les déceptions des classes aisées, suite à l’effondrement de 9 % de Wall Street depuis début octobre. L’immobilier et les ventes de véhicules fléchissent, suite à la hausse des taux. Toys“R”Us a fermé ses 800 magasins. Sears est au bord de la liquidation. J.C. Penney, avec ses 865 magasins, est aux abois, tandis que les géants de la distribution Home Depot, Target et Walmart souffrent en se faisant massacrer à Wall Street. À noter qu’en France, Casino, Auchan et Carrefour luttent aussi à contre-courant, suite à la gloire éphémère perdue des hypermarchés.
La dette des ménages américains (marché hypothécaire, crédit revolving, crédit automobile, cartes de crédit et prêts étudiants) a atteint le niveau record de 13.500 milliards de dollars. Pour diminuer leur déficit, les Américains seront, un jour, obligés de dévaluer le dollar alors que la hausse des taux le réévalue, d’où les problèmes insurmontables à résoudre aux États-Unis, du style quadrature du cercle.
En Grèce se fait entendre le chant du cygne Aléxis Tsípras, qui prétend, avec son projet de budget miracle 2019, « avoir fait mentir les Cassandre qui prédisaient le désastre de l’économie du pays ». Le désastre est pourtant là avec, malgré l’émigration, un taux de chômage de 19,9 %, un parti d’opposition conservateur avec 16,5 points d’avance sur SYRIZA et des taux d’emprunt prohibitifs à dix ans à 4,5 %, contre seulement 3,4 % pour l’Italie et 0,7 % pour la France. « Ce budget est un trompe-l’œil démagogique à visée électorale, qui ne change rien et empêche la Grèce de redémarrer », dénonce Olivier Delorme, historien spécialiste de la Grèce.
En fait, le danger sévit partout dans le monde : à elle seule, la dette privée en dollars d’environ 230 % du PIB chinois pourrait provoquer une crise mondiale d’envergure, selon l’économiste japonais Kevin Lai, de Daiwa Capital Markets. La chute de la monnaie chinoise provoquerait, en effet, une crise de la dette en Chine, susceptible de dégénérer en désastre mondial. ■