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Actualité Europe - Page 45

  • Catalogne : Points d'Histoire et réalités d'aujourd'hui

    Carles Puigdemont hier soir devant le Parlement catalan 

     

    Publié le 11 octobre 2012 - Actualisé le 20 octobre 2017

    En deux mots.jpgS'il faut rechercher les sources et les responsabilités les plus déterminantes dans les graves événements d'Espagne, il serait léger de ne voir que les apparences. Peut-être un peu de recul n'est-t-il pas de trop et permettrait de les mieux comprendre.

    Ce qui se produit en Catalogne est grave parce qu'une Espagne en ébullition, en convulsion, rejouant les scénarios des années 30 mais dans le contexte postmoderne, n'empoisonnerait pas que sa propre existence. De sérieuses conséquences en résulteraient en France et en Europe. De nombreux et d'importants équilibres nationaux et transnationaux s'en trouveraient rompus. On ne sait jamais jusqu'où, ni jusqu'à quelles situations, sans-doute troublées pour la longtemps.

    L'unité de l'Espagne, on le sait, ne date pas d'hier. Elle est constante au fil des cinq derniers siècles, à compter du mariage d'isabelle la Catholique, reine de Castille, et de Ferdinand d'Aragon, les rois sous le règne desquels l'Espagne acheva de se libérer de l'occupation arabe en prenant Grenade, dernier royaume maure de la Péninsule [1492| ; et où Colomb, cherchant à atteindre les Indes par l'Ouest, découvrit l'Amérique. S'ouvrait ainsi, après le règne de Jeanne la folle, unique et malheureuse héritière des Rois Catholiques mariée à un prince flamand, le règne de Charles Quint, lui-même prince Habsbourg de naissance flamande, sur les terres duquel, après la découverte de Colomb, le soleil ne se couchait pas. Le règne suivant, celui de Philippe II, marque l'apogée de la puissance de l'Espagne et de la dynastie Habsbourg qui y règnera jusqu'au tout début du XVIIIe siècle. Ces règnes couvrent deux premiers siècles d'unité espagnole, et, malgré de multiples conflits et convulsions, deux brèves républiques, dont la seconde sera sanglante et conduira à la Guerre Civile puis au long épisode franquiste, l'unité de l'Espagne, sous le règne rarement glorieux des Bourbons, ne fut jamais vraiment brisée les trois siècles suivants, jusqu'à l'actuel roi Philippe VI.

    Mais si elle fut sans conteste toujours maintenue au cours de cette longue période de cinq ou six siècles, l'unité de l'Espagne, surtout pour un regard français, ne fut non plus jamais tout à fait acquise, tout à fait accomplie. Et si la monarchie a toujours incarné l'unité, la république, effective ou fantasmée, a toujours signifié la division de l'Espagne. Ainsi aussitôt qu'en avril 1931, la seconde république fut instaurée à Madrid, l'Espagne, de fait, en connut deux, l'une à Madrid et l'autre à Barcelone. Ce que vit l'Espagne d'aujourd'hui, l'Espagne d'hier l'a déjà connu.

    L'Histoire - le passé - mais aussi la géographie, liées l'une à l'autre, y ont conservé un poids, une présence, inconnus chez nous. L'Espagne n'a pas vraiment vécu d'épisode jacobin ...

    Bainville a raison, hier comme aujourd’hui, lorsqu’il observe que la péninsule ibérique se divise d'Est en Ouest en trois bandes verticales, définissant trois « nationalités » qui sont aussi zones linguistiques : la catalane, la castillane et la portugaise. Curieusement, le Portugal accroché au flanc Ouest de l'Espagne n'a jamais pu lui être durablement rattaché. Partout ailleurs, les particularismes sont restés vivants, jusqu'à, parfois, l'agressivité et la haine, comme on l'a vu au Pays Basque et comme on le voit encore en Catalogne. 

    De ces particularismes, la langue est le premier ciment ; Dans l’enclave basque, en Catalogne, et, même, dans la lointaine Galice, où l'on parle le galicien en qui se reconnaît l'influence du portugais. Ces langues ne sont pas de culture, ne ressortent pas d'un folklore déclinant à peu près partout, comme chez nous. Elles sont d'usage quotidien et universel, dans les conversations entre soi, au travail comme à l'école, à l'université, dans les actes officiels, la presse, les radios et télévisions, etc. Comme Mistral l'avait vu, ces langues fondent des libertés. Le basque et le catalan sont, mais au sens mistralien, des langues « nationales ». Le catalan, toutefois, est aussi langue des Baléares et, à quelques variantes près, de la région valencienne, jusqu'à Alicante ... 

    A cette liberté linguistique se combine un fort sentiment d'appartenance à des communautés vivantes, vécues comme historiques et populaires, chargées de sens, de mœurs et de traditions particulières très ancrées, parfaitement légitimes et toujours maintenues.

    C'est donc non sans motifs que la monarchie post franquiste institua en Espagne 17 « communautés autonomes » ou « autonomies » qui vertèbrent le pays. On célébra partout ces libertés reconnues, transcription contemporaine des antiques « fueros » concept à peu près intraduisible en français, qui signifie à la fois des libertés et des droits reconnus, que les rois de jadis juraient de respecter, sous peine d'illégitimité.

    Le mouvement donné instituait un équilibre, fragile comme tous les équilibres, et qu'il eût fallu - avec autorité et vigilance - faire scrupuleusement respecter.

    C'est bien ce que Madrid n'a pas fait lorsque les équilibres commencèrent à être rompus en Catalogne. A y regarder de près, le système des partis, des alliances électorales et de gouvernement, n'a fait ici comme ailleurs que susciter et attiser les divisions latentes, tandis qu'à Madrid ce même système jouait en faveur du laisser-faire, autrement dit de l'inaction.

    Les choses, contrairement au Pays Basque longtemps ravagé par le terrorisme, se sont passées en Catalogne sans violence mais, on le voit bien aujourd'hui, avec efficacité. Après un temps de renaissance catalane, libre, heureuse de vivre ou revivre, et satisfaite des nouvelles institutions, est venue l'heure des surenchères, de la conquête progressive des pouvoirs de fait par les catalanistes les plus sectaires. Un exemple suffit pour en juger et c'est, depuis bien longtemps déjà, l'interdiction de fait, quasi absolue, de l'espagnol à l'école et à l'université de Catalogne, privant d’ailleurs la jeunesse catalane du privilège du bilinguisme qui était jadis le sien dès la petite enfance. Madrid a laissé faire et plusieurs générations, toute une jeunesse, élèves et professeurs, ont été formées dans la haine de l'Espagne. Il eût certainement fallu interdire cette interdiction, rétablir partout l'espagnol dans ses droits de langue nationale ; c'est tout spécialement par la culture : école, université, médias, univers intellectuel, qu'un petit clan d’indépendantistes s'est progressivement emparé de quasiment tous les pouvoirs en Catalogne. Les anti-indépendantistes qualifient à juste titre leurs menées de coup d'Etat. Mais, ce coup ne s'est pas déroulé en un jour, il s'étale sur plusieurs décennies.

    En somme, au long des dites dernières décennies, minée par le jeu délétère des partis, paralysée par sa faiblesse, Madrid a tout laissé faire, tout laissé passer, y compris l'inacceptable, y compris l’installation progressive d’une hostilité envers l’Espagne, qui a gagné une petite moitié des Catalans et coupé la société en deux parties adverses. Du beau travail ! Jusqu'à ce qu'à l'heure des échéances, ne reste plus à Madrid comme solution que l'usage de la force et de la violence. La responsabilité du gouvernement espagnol, ses atermoiements, nous semblent indéniables.

    Du côté catalan, les partis révolutionnaires, d’implantation ancienne en Catalogne, ont fait leur travail habituel ; il n’est guère utile de s’en scandaliser. Mais sans-doute est-ce l'engagement indépendantiste des partis de centre-droit qui a rendu possible tout ce à quoi nous sommes en train d'assister.

    Si les choses devaient tourner mal Outre-Pyrénées, et cela est bien possible, il ne faudrait pas oublier que - par-delà le légitime traditionalisme catalan - les présidents de centre-droit qui ont longtemps dirigé et président encore la région - Messieurs Jordi Pujol, Artur Mas et Carles Puigdemont, leurs partis et leurs soutiens - y auront une large part de responsabilité. Au détriment de la Catalogne et de l’Espagne, mais aussi de la France et de l’Europe.  

    Retrouvez l'ensemble de ces chroniques en cliquant sur le lien ci-dessous

    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Espagne - Catalogne ... Lafautearousseau a publié récemment ...

    4oftqdou.jpgRappel des principaux articles sur ce sujet, publiés récemment dans Lafautearousseau  ...

    (Cliquez sur les liens) 

     

     

    Discours de roi et paroles de président ...

    Catalogne : Points d'Histoire et réalités d'aujourd'hui

    Toujours la Catalogne

    Au bord du précipice

    L'armée espagnole fait mouvement vers la Catalogne

    Catalogne : Mariano Rajoy deviendra-t-il Mariano Kerenski ?

    Macron dit à Rajoy son « attachement à l'unité constitutionnelle de l'Espagne ». Il a bien fait !

    Référendum catalan : « L'indépendance n'est qu'un slogan »

    Le paradoxe de la Catalogne, identitaire et ... remplaciste

    Barcelone : « No tinc por »

    Terrorisme & Société • Barcelone : que les coupables (les vrais) soient enfin dévoilés   

  • Discours de roi et paroles de président ...

     

    En deux mots.jpgL'interview d'Emmanuel Macron a fait couler beaucoup d'encre, beaucoup de salive et de longues heures d'antenne sur toutes les chaînes, les jours d'avant, d'après, et le dimanche soir fatidique où elle fut donnée, quoique, de l'aveu général, Macron n'y ait pas dit grand-chose, en tout cas rien de substantiel, et que cette interview n'ait été rien d'autre qu'un « exercice de style ».

    C'est ce que Roger Karoutchi en a dit et qui semble assez juste. Macron s'est défendu d'avoir seulement cherché à rattraper un peu de sa popularité perdue. C'est pourtant bien, nous semble-t-il, à une heure quinze de pédagogie sans substance sur l'essentiel, à quoi nous avons été conviés dimanche soir. Une heure de reprise en mains du peuple français, en mode purement gestionnaire du quotidien. Et l'on a commenté cette insignifiance à perte de vue dans les médias, essentiellement, d'ailleurs, pour savoir si le Chef de l'Etat avait ou non réussi sa « prestation ». Car la parole présidentielle est devenue une « prestation » aux yeux médiatiques et les Français ne la jugent pas autrement. Nous vivons en régime d’opinion et ce sont là ses médiocres vertus. Il est en charge de l'accessoire, non plus de l'essentiel. Grandeur et décadence de la Vème république ...

    Quoique démocratique, l'Espagne nous a donné il y a à peine quelques jours un exemple inverse, au cœur d'une crise qui menaçait de la briser et l'en menace encore. En quelques cinq minutes d'un discours d'une grande fermeté, le roi, qui s'exprime peu, ne s'occupe, à l'inverse du président de la République française, ni des APL, ni des modalités de licenciement, ni de la durée d'indemnisation du chômage, souverain d'une monarchie qui a peu à voir avec ce que fut la monarchie française, ce roi est soudain sorti de son silence, de sa réserve, avec une autorité et une force tranquille qui ont surpris, pour se prononcer sur l'essentiel, sur l'unité, la cohésion entre Espagnols, l'intégrité, la pérennité de son pays. Et pour condamner avec la dernière sévérité, presque avec violence, les indépendantistes catalans. Ces cinq minutes d'un discours royal ont suffi à donner un coup d'arrêt au processus de désintégration de l'Espagne entamé à Barcelone. Et l'on nous dit d'Outre-Pyrénées qu'il s'en est suivi, dans toute l'Espagne, y compris en Catalogne, un formidable sursaut du sentiment national qui s'exprime par des manifestations españolistas quotidiennes dans tout le pays. C'est qu'il y a en Espagne un pouvoir qui, malgré sa faiblesse apparente, est soustrait au régime d'opinion, soustrait à l'élection, un pouvoir en charge du pérenne et de l'essentiel. Et ce pouvoir est le sommet de l'Etat.

    Même faible, même imparfait, on ne dira jamais assez le bienfait du système dynastique.   

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

    A lire dans Lafautearousseau ...

    Catalogne : Points d'Histoire et réalités d'aujourd'hui

    Au bord du précipice

    L'armée espagnole fait mouvement vers la Catalogne

    Espagne : Le roi Felipe VI s'est exprimé dans un discours d'une fermeté sans précédent

    Barcelone : « No tinc por »

  • La BCE nous annonce des faillites bancaires à venir

     

    Par Marc Rousset

     

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    Mise à part l’erreur grotesque de Macron dans la fusion Alstom/Siemens, tout va toujours très bien en matière économique selon les médias… Cependant, une dépêche du 27 septembre de l’agence Reuters, retransmise par l’AGEFI (Agence économique et financière), nous informe « que le secteur bancaire européen est surdimensionné et pourrait avoir besoin d’une cure d’amaigrissement, probablement à travers des fusions ou des fermetures ».  

    Ces propos ont été tenus par madame Danièle Nouy, qui n’est autre que la responsable de la supervision bancaire au sein de la Banque centrale européenne. Et d’ajouter : « Au final, il semblerait que le secteur bancaire européen soit devenu trop gros. Et nous pouvons en voir au moins l’une des conséquences : de nombreuses banques dans la zone euro ne gagnent pas leurs coûts du capital. Il semble que beaucoup trop de banques se font concurrence pour attirer des clients. Il y a de bonnes chances que la taille du secteur bancaire doive en effet diminuer. » Propos de vérité mais propos lénifiants de haut fonctionnaire européen qu’il importe de traduire aux Européens : ça va « barder » dans le secteur bancaire, des faillites sont à venir. 

    Il suffit de voir la vérité en face et d’écouter son bon sens : pourquoi la directive BRDD de l’Union européenne qui permet de chypriser et de ponctionner les comptes des clients ? Pourquoi la loi Sapin 2, qui permet de bloquer les comptes de l’assurance-vie s’il n’y a pas des dangers imminents ou des risques d’incendie un de ces jours prochains à la demeure ? 

    Les premiers feux annonciateurs se sont, en fait, déjà subrepticement déclarés : la Deutsche Bank qui a été sauvée par des fonds d’investissement des pays du Golfe, des rumeurs de rachat de la Commerzbank par la BNP, le rachat de deux banques vénitiennes par Intesa Sanpaolo avec 4.000 suppressions d’emploi et 17 milliards d’euros d’engagements pour l’État italien, le sauvetage de Monte Paschi avec sa perte abyssale de trois milliards d’euros, les 350 milliards d’euros de créances douteuses dans les actifs des banques italiennes.

    En Espagne, Banco Popular avait renforcé à trois reprises son capital pour cinq milliards d’euros et cela n’a pas empêché son sauvetage en hâte par Banco Santander. Et voilà que maintenant, nonobstant les problèmes en Catalogne qui augmentent les risques économiques, bancaires et financiers, on parle de Liberbank comme d’une nouvelle banque en difficulté ! Or, Liberbank, créée en 2011, n’est rien d’autre que le mariage forcé de trois « cajas » (banques d’épargne) : Cajastur, Caja de Extremadura, Caja Cantabria. Le titre, qui valait encore 1,7 euro à fin août, ne vaut plus aujourd’hui que quelques centimes. 

    Quant à la Grèce, pays en faillite qui ne tient que par des prêts nouveaux européens, son système bancaire détient des titres de la dette souveraine grecque, ce qui fait que les banques grecques seraient immédiatement en faillite si l’État grec devenait insolvable.

    Le comble, c’est le Crédit agricole, qui a fait une expérience catastrophique en Grèce et a essuyé de très lourdes pertes pour se retirer à tout prix de ce pays. Attiré par l’appât du gain, il recommence la même erreur en Italie ! Il vient d’acheter, le 29 septembre 2017, trois caisses d’épargne italiennes pour 130 millions d’euros après que le Fonds interbancaire de garantie des dépôts italiens a décidé de prendre à sa charge trois milliards d’euros de créances douteuses.

    C’est Napoléon qui disait : « L’argent n’a pas de patrie ; les financiers n’ont pas de patriotisme et n’ont pas de décence ; leur unique objectif est le gain. »  41LRKbfMFHL._SL300_.jpg

    Économiste
  • Catalogne : Points d'Histoire et réalités d'aujourd'hui

    Carles Puigdemont hier soir devant le Parlement catalan 

     

    En deux mots.jpgS'il faut rechercher les sources et les responsabilités les plus déterminantes dans les graves événements d'Espagne, il serait léger de ne voir que les apparences. Peut-être un peu de recul n'est-t-il pas de trop et permettrait de les mieux comprendre.

    Ce qui se produit en Catalogne est grave parce qu'une Espagne en ébullition, en convulsion, rejouant les scénarios des années 30 mais dans le contexte postmoderne, n'empoisonnerait pas que sa propre existence. De sérieuses conséquences en résulteraient en France et en Europe. De nombreux et d'importants équilibres nationaux et transnationaux s'en trouveraient rompus. On ne sait jamais jusqu'où, ni jusqu'à quelles situations, sans-doute troublées pour la longtemps.

    L'unité de l'Espagne, on le sait, ne date pas d'hier. Elle est constante au fil des cinq derniers siècles, à compter du mariage d'isabelle la Catholique, reine de Castille, et de Ferdinand d'Aragon, les rois sous le règne desquels l'Espagne acheva de se libérer de l'occupation arabe en prenant Grenade, dernier royaume maure de la Péninsule [1492| ; et où Colomb, cherchant à atteindre les Indes par l'Ouest, découvrit l'Amérique. S'ouvrait ainsi, après le règne de Jeanne la folle, unique et malheureuse héritière des Rois Catholiques mariée à un prince flamand, le règne de Charles Quint, lui-même prince Habsbourg de naissance flamande, sur les terres duquel, après la découverte de Colomb, le soleil ne se couchait pas. Le règne suivant, celui de Philippe II, marque l'apogée de la puissance de l'Espagne et de la dynastie Habsbourg qui y règnera jusqu'au tout début du XVIIIe siècle. Ces règnes couvrent deux premiers siècles d'unité espagnole, et, malgré de multiples conflits et convulsions, deux brèves républiques, dont la seconde sera sanglante et conduira à la Guerre Civile puis au long épisode franquiste, l'unité de l'Espagne, sous le règne rarement glorieux des Bourbons, ne fut jamais vraiment brisée les trois siècles suivants, jusqu'à l'actuel roi Philippe VI.

    Mais si elle fut sans conteste toujours maintenue au cours de cette longue période de cinq ou six siècles, l'unité de l'Espagne, surtout pour un regard français, ne fut non plus jamais tout à fait acquise, tout à fait accomplie. Et si la monarchie a toujours incarné l'unité, la république, effective ou fantasmée, a toujours signifié la division de l'Espagne. Ainsi aussitôt qu'en avril 1931, la seconde république fut instaurée à Madrid, l'Espagne, de fait, en connut deux, l'une à Madrid et l'autre à Barcelone. Ce que vit l'Espagne d'aujourd'hui, l'Espagne d'hier l'a déjà connu.

    L'Histoire - le passé - mais aussi la géographie, liées l'une à l'autre, y ont conservé un poids, une présence, inconnus chez nous. L'Espagne n'a pas vraiment vécu d'épisode jacobin ...

    Bainville a raison, hier comme aujourd’hui, lorsqu’il observe que la péninsule ibérique se divise d'Est en Ouest en trois bandes verticales, définissant trois « nationalités » qui sont aussi zones linguistiques : la catalane, la castillane et la portugaise. Curieusement, le Portugal accroché au flanc Ouest de l'Espagne n'a jamais pu lui être durablement rattaché. Partout ailleurs, les particularismes sont restés vivants, jusqu'à, parfois, l'agressivité et la haine, comme on l'a vu au Pays Basque et comme on le voit encore en Catalogne. 

    De ces particularismes, la langue est le premier ciment ; Dans l’enclave basque, en Catalogne, et, même, dans la lointaine Galice, où l'on parle le galicien en qui se reconnaît l'influence du portugais. Ces langues ne sont pas de culture, ne ressortent pas d'un folklore déclinant à peu près partout, comme chez nous. Elles sont d'usage quotidien et universel, dans les conversations entre soi, au travail comme à l'école, à l'université, dans les actes officiels, la presse, les radios et télévisions, etc. Comme Mistral l'avait vu, ces langues fondent des libertés. Le basque et le catalan sont, mais au sens mistralien, des langues « nationales ». Le catalan, toutefois, est aussi langue des Baléares et, à quelques variantes près, de la région valencienne, jusqu'à Alicante ... 

    A cette liberté linguistique se combine un fort sentiment d'appartenance à des communautés vivantes, vécues comme historiques et populaires, chargées de sens, de mœurs et de traditions particulières très ancrées, parfaitement légitimes et toujours maintenues.

    C'est donc non sans motifs que la monarchie post franquiste institua en Espagne 17 « communautés autonomes » ou « autonomies » qui vertèbrent le pays. On célébra partout ces libertés reconnues, transcription contemporaine des antiques « fueros » concept à peu près intraduisible en français, qui signifie à la fois des libertés et des droits reconnus, que les rois de jadis juraient de respecter, sous peine d'illégitimité.

    Le mouvement donné instituait un équilibre, fragile comme tous les équilibres, et qu'il eût fallu - avec autorité et vigilance - faire scrupuleusement respecter.

    C'est bien ce que Madrid n'a pas fait lorsque les équilibres commencèrent à être rompus en Catalogne. A y regarder de près, le système des partis, des alliances électorales et de gouvernement, n'a fait ici comme ailleurs que susciter et attiser les divisions latentes, tandis qu'à Madrid ce même système jouait en faveur du laisser-faire, autrement dit de l'inaction.

    Les choses, contrairement au Pays Basque longtemps ravagé par le terrorisme, se sont passées en Catalogne sans violence mais, on le voit bien aujourd'hui, avec efficacité. Après un temps de renaissance catalane, libre, heureuse de vivre ou revivre, et satisfaite des nouvelles institutions, est venue l'heure des surenchères, de la conquête progressive des pouvoirs de fait par les catalanistes les plus sectaires. Un exemple suffit pour en juger et c'est, depuis bien longtemps déjà, l'interdiction de fait, quasi absolue, de l'espagnol à l'école et à l'université de Catalogne, privant d’ailleurs la jeunesse catalane du privilège du bilinguisme qui était jadis le sien dès la petite enfance. Madrid a laissé faire et plusieurs générations, toute une jeunesse, élèves et professeurs, ont été formées dans la haine de l'Espagne. Il eût certainement fallu interdire cette interdiction, rétablir partout l'espagnol dans ses droits de langue nationale ; c'est tout spécialement par la culture : école, université, médias, univers intellectuel, qu'un petit clan d’indépendantistes s'est progressivement emparé de quasiment tous les pouvoirs en Catalogne. Les anti-indépendantistes qualifient à juste titre leurs menées de coup d'Etat. Mais, ce coup ne s'est pas déroulé en un jour, il s'étale sur plusieurs décennies.

    En somme, au long des dites dernières décennies, minée par le jeu délétère des partis, paralysée par sa faiblesse, Madrid a tout laissé faire, tout laissé passer, y compris l'inacceptable, y compris l’installation progressive d’une hostilité envers l’Espagne, qui a gagné une petite moitié des Catalans et coupé la société en deux parties adverses. Du beau travail ! Jusqu'à ce qu'à l'heure des échéances, ne reste plus à Madrid comme solution que l'usage de la force et de la violence. La responsabilité du gouvernement espagnol, ses atermoiements, nous semblent indéniables.

    Du côté catalan, les partis révolutionnaires, d’implantation ancienne en Catalogne, ont fait leur travail habituel ; il n’est guère utile de s’en scandaliser. Mais sans-doute est-ce l'engagement indépendantiste des partis de centre-droit qui a rendu possible tout ce à quoi nous sommes en train d'assister.

    Si les choses devaient tourner mal Outre-Pyrénées, et cela est bien possible, il ne faudrait pas oublier que - par-delà le légitime traditionalisme catalan - les présidents de centre-droit qui ont longtemps dirigé et président encore la région - Messieurs Jordi Pujol, Artur Mas et Carles Puigdemont, leurs partis et leurs soutiens - y auront une large part de responsabilité. Au détriment de la Catalogne et de l’Espagne, mais aussi de la France et de l’Europe.  

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Toujours la Catalogne

     

    par Gérard Leclerc

     

    2435494823.jpgIl y a huit jours, j’abordais – dirais-je imprudemment ? – la question du referendum en Catalogne, en vue de l’indépendance de cette région.

    Je dis imprudemment, parce que, n’ayant pas une connaissance directe du problème, j’en étais réduit à des considérations un peu générales. Depuis lors, nous nous sommes aperçus que l’éventuelle indépendance de la Catalogne nous entraînait vers des conséquences très graves. Les indépendantistes ont donné le sentiment de dominer la situation, avec une adhésion populaire massive, mais la réplique est venue hier avec la contre-manifestation de Barcelone. Il y avait eu, entretemps, la très ferme déclaration du roi d’Espagne, qui montrait bien comment le pays était touché dans sa chair vive. Et nous sommes, de toute évidence, à la veille d’une épreuve de force.

    Si les séparatistes prononcent, dans les jours qui viennent, une déclaration d’indépendance unilatérale, la réaction de Madrid sera immédiate. Le premier ministre espagnol, Mariano Rajoy, a déclaré que la constitution l’autorisait à suspendre l’autonomie de la Catalogne. Le pouvoir central pourrait ainsi administrer directement la région, abolissant l’autorité locale. On peut craindre alors des affrontements directs, et certains évoquent même le précédent de la guerre civile. Dès lors, on ne peut que formuler tous les vœux pour un règlement pacifique du conflit. C’est ce que réclamaient, ces jours-ci, beaucoup de manifestants, qui suppliaient que l’on se parle entre parties adverses.

    Un ami rencontré hier matin, originaire de la Catalogne, me donnait une idée de l’état de tension où vivent les habitants, dans un climat souvent très idéologique, et même sous la menace de représailles pour qui n’accepte pas la ligne séparatiste. Un tel témoignage direct n’a fait qu’accroître ma perplexité et ma crainte. C’est une grande erreur de croire que les cadres nationaux sont dépassés à l’heure de l’Europe et de la mondialisation. Notre équilibre politique est à la merci d’une crise qui peut ébranler toutes les structures de notre continent.  

    Gérard Leclerc

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 9 octobre 2017

  • Au bord du précipice

    Manifestation anti-indépendantiste monstre, hier à Barcelone

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

    logo lundis.jpgL’Histoire en a décidé ainsi : mieux qu’espagnole, la Catalogne est l’Espagne elle-même, au même titre que sont l’Espagne toutes les provinces et communautés autonomes du royaume.

    Elle jouit à ce titre d’une liberté et d’une marge de manoeuvre inconnues des « régions » de France. Encore un coup : elle est riche et prospère et tire l’essentiel de cette richesse et de cette prospérité de son hispanité même, car c’est bien avec le reste du pays qu’elle entretient l’essentiel de ses rapports commerciaux et financiers. 

    Pourtant tout se passe comme si une clique d’endoctrinés fanatiques avait réussi à convaincre une partie importante, quoique minoritaire, de la population catalane que Madrid est l’ennemi et que tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes catalan. Le « catalanisme », folie sectaire ou dérive nationalitaire, est manifestement vécu comme une mystique et les Catalans non indépendantistes réduits au silence par des anathèmes définitives (« traîtres », fascistes »), ce qui rappelle furieusement les pratiques des révolutionnaires français ou des partis communistes. 

    La faute du gouvernement de Madrid aura été de négliger cet aspect irréductible du mouvement, de penser qu’une succession de pressions suffirait à désarmer la crise et de laisser se mettre en place un processus qui semble échapper désormais à tout contrôle. D’où cette « bataille d’irresponsables » selon l’expression (pour une fois satisfaisante) de M. Guetta (France Inter, 2 octobre) entre MM. Rajoy et Puigdemont. En fait, on ne négocie pas avec des jusqu’au-boutistes radicalisés manifestement prêts à entraîner « leur » Catalogne fantasmée dans une fuite en avant suicidaire, 

    Répressif ou conciliant, le gouvernement de Madrid a et aura toujours tort aux yeux des indépendantistes, ce qui « oblige » le roi d’Espagne à user de ses prérogatives. Felipe VI a donc parlé. Discours de bonne facture et ferme dans la forme, « acte fort » (LFAR, 4 octobre). Certains regretteront sans doute qu’il ait peut-être trop attendu et pu donner ainsi l’impression de simplement prendre parti : chef de l’Etat, il était de son devoir de pallier au plus tôt l’inconsistance politique de M. Rajoy, non pas pour menacer la Catalogne à travers sa minorité indépendantiste au nom du « droit », de la « démocratie » et de la « constitution » (termes déjà utilisés par M. Rajoy) mais plutôt pour exalter l’Espagne et en appeler à tous les Catalans. 

    Madrid dispose de moyens de pression et d’intervention tels (d’ordre politique et économique mais aussi policier et militaire ou encore judiciaire) qu’on a du mal à imaginer que la Généralité de Catalogne puisse aller au-delà d’une simple déclaration d’indépendance qui restera lettre morte. Il n’empêche : avec la Catalogne, c’est l’Espagne qui est au bord du précipice. Les événements montreront vite si Felipe VI n’est que le rempart de la légalité ou s’il incarne la légitimité de toute l’Espagne.  •

  • Guillaume Bigot : Macron à la Sorbonne, ou l'art du contresens historique

     

     Entretien par Alexandre Devecchio

     

    ENTRETIEN - Guillaume Bigot revient ici [Figarovox, 27.09] sur le discours du Président de la République à la Sorbonne. Pour lui, les propositions avancées par Emmanuel Macron sont anachroniques et pas réalistes. Nous retrouvons dans ces analyses, dont l'essentiel nous paraît juste, une qualité que nous mettons très haut, parce qu'elle est la marque de notre école de pensée : le réalisme - opposé à l'idéologie.  LFAR   

     

    XVM3eaf87e4-a396-11e7-ab8c-64d6818da779-100x100.jpgLe discours d'Emmanuel Macron à la Sorbonne est-il un discours historique ? 

    Oui mais en un sens paradoxal car il risque de rester comme le discours le plus anachronique jamais prononcé par un Président de la République.

    L'Europe recule partout et en particulier en Allemagne avec le scrutin de dimanche dernier qui a révélé la montée en puissance de l'extrême droite eurosceptique (AFD) et d'un parti libéral (FPD) qui refuse toute mutualisation des dettes européennes et tout nouveau transfert financier en direction de l'UE.

    Le discours de la Sorbonne fait furieusement songer à la formule qu'employaient les détracteurs de Mao : « Nous sommes au pied du mur, au bord du gouffre, vive le grand bond en avant !   »

    Macron à la Sorbonne a dépensé tant d'énergie, tant de fougue et tant de souffle sur son vélo d'appartement européiste, qu'il en deviendrait presque touchant.

    Tout de même, à travers ce discours, on sent poindre une volonté farouche de relancer le moteur franco-allemand ?

    Le jour où Alstom est absorbé par une entreprise allemande, notre Président célèbre l'union toujours plus étroite de la France et de l'Allemagne. Macron aurait voulu incarner la soumission de Paris à Berlin et de la politique à l'économique, il ne s'y serait pas pris autrement.

    C'est étonnant cette incapacité à saisir le sens des symboles : Alstom incarne parfaitement la technologie française, Alstom, c'est le TGV. Airbus ne va pas tarder à suivre.

    On célèbre aussi Macron le fin tacticien mais son plaidoyer pour le couple franco-allemand n'était pas seulement indigne de Machiavel, cette déclaration enflammée à la Chancelière ignorait la leçon introductive du manuel du parfait dragueur : « Si je te fuis, tu me suis et si tu me suis, je te fuis » ! Si le Chef de l'Etat voulait vraiment relancer la relation franco-allemande, il aurait dû faire mine de se détourner de son partenaire. Là, peut-être Berlin aurait daigné s'intéresser à Paris.

    Que pensez-vous de l'idée d'un budget renforcé pour la zone euro ?

    On nous présente ce budget européen comme un projet keynésien : la relance ne marche plus à l'échelle française, relançons à l'échelle continentale. Or, c'est un formidable tour de passe-passe.

    Si vous êtes Irlandais et partisan d'une relance européenne, il est cohérent que vous souteniez l'idée d'un budget européen. Mais il suffit de considérer la position de la France par rapport à la moyenne des prélèvements obligatoires et des dépenses publiques pour se rendre compte de la supercherie.

    Nous nous situons largement au-dessus de cette moyenne de la zone euro, même réduite au noyau dur. Prenons l'exemple de l'IS dont le taux est de 34,4 en France et de 30 en Allemagne, la convergence européenne, c'est un alignement vers le bas. Une fois que vous aurez aligné les fiscalités, les Smic, nous aurons renforcé les forces du marché.

    Le système est très pervers : sous prétexte de disposer de plus de protection à l'échelle continentale, on se retrouvera avec plus de protection en Irlande et moins en France. Sous prétexte de dépenser plus pour tous, on dépensera moins pour nous. L'Europe n'est pas un bouclier face à la mondialisation, c'est un turbo. Or, on peut tout reprocher à Macron sauf sa cohérence : raboter les dépenses et déchaîner les forces du marché, c'est bien ce qu'il veut. D'ailleurs, il vient de signer le CETA.

    Ce que l'on nous vend comme une relance continentale revient à faire de la renonce continentale si je puis dire.

    C'est un moyen de faire passer en force une politique ultralibérale et de la graver dans le marbre des traités. Si ce funeste projet de budget et de gouvernement économique de la zone voyait le jour, cet « Euroland » serait le seul « État » avec l'URSS à inscrire une certaine politique économique dans les traités comme pour dire: ceci est la vérité scientifique, il faut la mettre à l'abri de l'inconstance et de l'ignorance des peuples.

    Vous ne croyez donc pas à la pertinence d'un budget européen ?

    Mes restes de cours d'économie monétaire me laissent à penser que sans budget unique, cette monnaie unique est condamnée à disparaître à court terme (cf. les travaux de l'économiste Robert Mundell sur les zones monétaires optimales). Mais d'un autre côté, le budget européen, c'est forcément le transfert du pouvoir légitime au-dessus des Etats.

    Le budget de la zone euro soulève donc la question de son illégitimité et de son inefficacité. Soit on transfère le fruit d'impôts nationaux et on n'a pas un euro de budget de plus à l'arrivée. Soit, on crée un impôt européen et là on n'entre dans la post démocratie.

    Le consentement à l'impôt est le fondement de la démocratie politique. Qui va décider de lever cet impôt européen et qui va décider de son emploi ? Le parlement européen, mais qui connaît ses députés européens ? Jamais ce scrutin n'a pris. Dans aucun pays. Les élections européennes servent partout de défouloir électoral pour des enjeux politiques nationaux.

    Même sans créer de nouvel impôt, si vous transférez à un organisme non élu l'emploi disons des 40 milliards de l'Impôt sur les sociétés, vous commettez une forfaiture démocratique.

    Plus de monnaie nationale et plus de budget national, nous n'avions déjà plus accès à la pédale de frein et à l'accélérateur, là c'est le volant politique qui sera retiré au peuple français. Nous entrerions là dans les eaux saumâtres de la haute trahison.

    L'Europe, noyau dur peut-elle marcher ?

    Oui mais elle impose le consentement des peuples sinon le lancement de cette Europe à deux vitesses serait doublement illégitime. Illégitime au plan européen d'abord. Imaginez que vous êtes actionnaire d'une société et qu'une partie des autres actionnaires décident, pour mieux défendre leurs intérêts, de créer une entreprise dans l'entreprise et d'en changer les règles, ce serait inacceptable.

    De même, les Etats membres qui seront exclus du noyau dur seront fondés à exiger un référendum européen puisque certains Etats membres veulent changer la nature en fait comme en droit de l'UE.

    Ce qui est vrai à l'échelle continentale, l'est cent fois plus à l'échelle nationale : opérer un tel saut fédéraliste, en appliquant les mesures envisagées par Macron sans solliciter l'avis du peuple souverain serait un parjure démocratique.

    La mise en œuvre de la relance européenne voulue par Macron passe donc par la tenue d'un référendum et ce référendum sera perdu.

    A vous suivre, il semblerait que le projet de construire une Europe fédérale, supra nationale serait une utopie sinon une idéologie ?

    C'est exactement cela. C'est la dernière idéologie du XX ième siècle.

    On ne peut s'empêcher de relever les énormes contradictions dont sont capables les adeptes de l'Europe au service de leur idée fixe. Prenons l'exemple du protectionnisme. Les mêmes qui fustigent le protectionnisme à l'échelle nationale (Macron assume cette position qui consiste à penser que le protectionnisme est néfaste en tant que tel) veulent ériger des barrières ou des taxes (carbone, sociale, etc.) à l'entrée de la zone euro.

    On prétend attirer les grandes institutions de la City à Paris et on propose une taxe sur les transactions financières. En fait, l'Europe est un cas typique de fanatisme : il rend aveugle, sourd et finalement imperméable à la contradiction.

    Vous pouvez difficilement débattre avec les européistes. Le réel ne pèse rien pour eux. Il faut plus d'Europe ! Mais pourquoi ? « Mais parce qu'il faut plus d'Europe !» répondent en chœur les possédés de l'idée européiste. Et ils croient sincèrement régler tous les problèmes en brandissant leur fétiche.

    Nous sommes menacés par le djihad, vite une armée européenne et un renseignement européen ! Nous souffrons des effets de la pollution, vite une agence européenne. Les mouvements migratoires s'amplifient, vite un office Européen des migrations (on notera au passage la proposition savoureuse d'une école des hautes études pour clandestins !).

    C'est plus qu'une politique déclamatoire, c'est une politique incantatoire. Il suffit de prononcer le mot magique Europe et hop les difficultés s'aplanissent. Appréhendés à l'échelle continentale, les défis semblent devenir plus petits et,soudain, faciles à résoudre.

    Or, non seulement la coopération européenne est un gage d'épouvantable complexité politico-administrative telle qu'elle aurait même dégoûté les bureaucrates byzantins mais la coopération européenne ne revêt aucun sens si les pays qui y participent ne partagent pas des objectifs et des intérêts communs. Croit-on vraiment qu'en intégrant des espions lettons ou grecs dans une future agence européenne de renseignement, on sera mieux protégé qu'en renforçant la coopération avec le MI 6 ou la NSA?

    Macron vous classerait sans doute dans la catégorie des « esprits chagrins ». Rien dans ses propositions ne semble trouver grâce à vos yeux ? Pas même l'extension d'Erasmus ?

    Qui peut être hostile au fait que la jeunesse voyage ? Certainement pas moi qui dirige une école de commerce qui organise une année entière obligatoire d'études à l'étranger.

    Pourtant, au risque de passer pour un grincheux, cette extension d'Erasmus n'est ni aussi bonne ni aussi audacieuse qu'elle paraît. En réalité, dans l'auberge espagnole d'Erasmus on parle surtout et de plus en plus globish. Chaque année, l'école de commerce que je dirige envoie des centaines de jeunes étudier à Barcelone, Madrid, Turin, Francfort, Vienne ou Copenhague.

    Or dans quelle langue sont-ils enseignés ? Dans quelle langue communiquent-ils avec les autres Européens ? Dans un mauvais anglo-américain. Nous sommes très loin de l'esprit d'Erasme, des humanités européennes et de l'apprentissage de la variété des langues du vieux continent. L'UE est un rouleau compresseur à aplanir la diversité des cultures européennes. L'euro culture unifiée promue par Erasmus, c'est celle de Zuckerberg et de Britney Spears, pas celle de Goethe ni de Dante.

    Surtout, la promotion de l'amitié entre la jeunesse française et allemande par le Traité de l'Elysée, par exemple, avait cette vertu de rapprocher des peuples qui hier encore étaient encore pétris de préjugés et dont les parents s'étaient battus. Nous sommes plus d'un demi-siècle plus tard, le risque de guerre intra européenne est nul.

    Si Macron avait été Bonaparte ou De Gaulle, s'il avait été le visionnaire que l'on décrit, il aurait lancé un programme « Averroès » pour promouvoir les échanges avec le monde arabe ou « Senghor » pour l'Afrique ou « Pouchkine » pour la Russie. Notre président de la République est, en fait, conformiste à pleurer.

    Mais au moins, mutualiser notre défense semble une nouveauté prometteuse ?

    La CED date de 1954 et l'Europe de la Défense de Mitterrand, on ne peut pas dire que ce soit une idée neuve en Europe !

    Il y a surtout une raison invincible pour que cette idée soit vouée à l'échec. L'Europe de la Défense ne se fera pas parce qu'elle existe déjà et qu'elle s'appelle l'OTAN. Sa chaîne de commandement est une laisse qui remonte jusqu'au locataire de la Maison Blanche.

    Toutes les initiatives d'Europe militaire sont venues de Paris et toutes se sont toujours heurtées au même obstacle : les Allemands se sentent mieux protégés par le Pentagone que par nous. Les Allemands ou les Néerlandais vont d'autant moins être tentés de financer et de participer aux projets kaki de Macron que Trump les a mis en demeure de payer leur défense.

    Voilà encore un sujet dont il ne faut pas parler mais la vertu budgétaire des pays du nord de l'Europe s'apprécie aussi au fait qu'ils n'ont que très peu de dépenses militaires. Les Allemands qui vont devoir payer pour se protéger ne vont certainement pas financer en hommes, en matériel ni même en euros les opérations françaises en Afrique.

    Là aussi le bât blesse, les différents pays européens n'ont pas d'alliés, ni de territoires d'outre-Mer à défendre. Ils ne peuvent ni ne veulent mener une politique mondiale, ni même régionale.

    En résumé, le catalogue de la foire-farfouille européenne est surtout un catalogue de nostalgies et de vieilles lunes. On dirait une friperie : on y retrouve la taxe Tobin, la taxe carbone, la CED, le noyau dur et l'Europe à géométrie variable de Fabius, les frontières gérées en commun donc Schengen approfondie ; Erasmus en version XXL, etc.

    L'Europe n'est-ce pas un horizon exaltant pour les jeunes Français ?

    L'Europe ne fait pas rêver la jeunesse française. Pourquoi ? D'abord parce que le vieux continent est d'abord un continent de vieux. L'Allemagne qui est très représentative à cet égard du reste du continent est un pays qui compte 16 millions de retraités. Outre-Rhin, la moyenne d'âge de l'électorat est de 56 ans. L'électeur français moyen a 35 ans.

    La France est l'un des rares pays européens à faire des enfants et à envie de voir s'ouvrir en grand les fenêtres du monde. Chaque année, le peuple français croît de 500 000 âmes. Chaque année, le peuple allemand perd 500 000 personnes. La France rêve de grand large et Macron lui montre la direction de la maison de retraite européenne.   

    Guillaume Bigot est directeur général du groupe Ipag Business School, essayiste et membre du club souverainiste Les Orwéliens.

     

    1630167502.jpgXVM8d8b71a4-8f2b-11e7-b660-ef712dd9935a-150x200.jpgAlexandre Devecchio est journaliste au Figaro, en charge du FigaroVox. Il vient de publier Les Nouveaux enfants du siècle, enquête sur une génération fracturée (éd. du Cerf, 2016) et est coauteur de Bienvenue dans le pire des mondes (éd. Plon, 2016).

    Alexandre Devecchio

     

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    Le cynisme européiste d’Emmanuel Macron

  • L'armée espagnole fait mouvement vers la Catalogne

     

    Par Javier Portella

    En dehors de ce que nous avons écrit nous-mêmes sur le sujet, nous avons suivi les désormais gravissimes événements de Catalogne, à travers les articles compétents et autorises de Javier Portella, parus dans Boulevard Voltaire. Nous continuons aujourd'hui à le suivre en parfaite communion d'idées [Boulevard Voltaire, 5.10] sans savoir de quoi l'actualité d'Outre-Pyrénées aura été faite à l'heure où ces lignes paraîtront.  LFAR

     

    77dae4cee53d71a6de676a118bdb1379.jpeg.jpgUne vingtaine de camions de l’armée de terre sont partis hier soir d’une base militaire près de Saragosse (Aragon) pour Barcelone, où ils sont arrivés ce matin à l’aube. Il s’agit, certes, de camions de logistique destinés à appuyer les forces de la police et de la Guardia Civil (équivalent de la gendarmerie), le matériel lourd emmagasiné dans les casernes catalanes devant suffire amplement. C’est, de toute façon, un signe et un premier pas vers un affrontement qui apparaît de plus en plus comme inévitable face à l’entêtement des sécessionnistes qui ne seraient prêts à parler que d’une seule chose : des conditions de la reddition de l’Espagne face à leurs exigences d’indépendance.

    Mais ils oublient que, pour que l’ennemi se rende, il faut d’abord avoir gagné la guerre. La vraie : non pas la guerre de propagande, qu’ils ont certes gagnée avec la pantalonnade du faux référendum de dimanche et les erreurs et bêtises commises par Rajoy. Quant à la guerre pour de vrai, les sécessionnistes disposent certes de 17.000 Mossos d’Esquadra (la police autonome). Mais c’est tout. Donc…

    Mardi soir, le roi a enfin parlé. Il s’est adressé à la nation dans une allocution empreinte du langage diplomatique propre à un monarque, mais suffisamment plein de clarté et de fermeté pour que tout le monde ait compris le message. L’essentiel a tenu en deux phrases : l’une présente, l’autre absente. La phrase que Philippe VI n’a pas prononcée, c’est quelque chose dans le genre « Ouvrir la voie à des négociations avec les rebelles », des négociations qui, comme je le disais, ne pourraient concerner que les conditions de reddition – quelque chose qui était encore présent (« dialogue » fut le mot employé) dans le message prononcé par le timoré Rajoy dimanche soir. La phrase que, par contre, le roi a bel et bien prononcée, c’est « La déloyauté inadmissible de la part du gouvernement de la Generalitat », avec l’avertissement sous-jacent : si vous continuez sur cette voie, l’article 155 de la Constitution sera appliqué (article qui prévoit la suspension de l’autonomie d’une région). 

    De l’autre côté, il semble clair que le gouvernement séditieux s’apprête à proclamer formellement, lundi prochain, la République indépendante de Catalogne. Il s’agit de savoir maintenant si le gouvernement de l’Espagne attendra ce moment pour appliquer l’article 155 et arrêter les chefs de la sédition (pour l’instant, le chef de la police autonome a déjà été mis sous examen par le juge d’instruction) ou s’il prendra déjà de telles mesures d’ici à lundi. 

    Mais la question essentielle n’est pas là. La grande question est : comment les séditieux vont-ils réagir ? Que vont-ils faire, puisqu’il est exclu qu’ils se laissent tout simplement faire ? Ou, pour le dire autrement, ne disposant pas de forces militaires, iront-ils jusqu’à envoyer des manifestants se faire tuer devant les chars ? Espérons et prions pour que leur folie et leurs outrances n’arrivent pas jusque-là.

    Post-scriptum : j’apprends à l’instant, de sources très sérieuses – les événements se précipitent comme un tourbillon –, l’existence d’un mécontentement de plus en plus grand au sein de l’armée. Il s’exprimerait notamment à travers une organisation regroupant des militaires haut gradés qui a pour nom Alerta. Mais tout cela reste à confirmer. 

    Écrivain et journaliste espagnol

     

    A lire dans Lafautearousseau ...

    En deux mots : Barcelone : « No tinc por »

    Le paradoxe de la Catalogne, identitaire et ... remplaciste

    Catalogne : Mariano Rajoy deviendra-t-il Mariano Kerenski ?

  • Le cynisme européiste d’Emmanuel Macron

    Le discours d'Emmanuel Macron à la Sorbonne

     

    Par François Marcilhac

     

    3466611312.jpg« Une Europe souveraine, unie, démocratique  »  : le titre du discours de Macron à la Sorbonne, le 26 septembre, suffit à prouver le tour de passe-passe, comme hier la «  fédération d’États-nations  » inventée par Jacques Delors – une fausse synthèse d’éléments inconciliables pour faire passer la pilule. Selon Delors, une Europe fédérale ne remettait pas en cause l’indépendance des nations, puisqu’elle préservait les États, ce qui était évidemment contradictoire  ; selon Macron, il convient d’attribuer à l’Europe les attributs de la nation  : la souveraineté, l’unité et un régime politique – la démocratie – reposant sur l’existence d’un imaginaire demos européen. Opposées en apparence dans leur formulation, les deux supercheries, aussi fédéralistes que ringardes, sont identiques. Macron regarde l’avenir dans le rétroviseur des «  pères fondateurs  ». Comme s’il s’était trompé d’époque. Comme s’il n’avait pas vu que l’Europe ne fait plus rêver des peuples qui, d’ailleurs, y ont toujours vu autre chose que leurs voisins  : pour les démocrates-chrétiens, surtout français, la garantie de la paix en sortant de l’histoire grâce à la constitution d’un ersatz de chrétienté  ; pour d’autres, notamment les Allemands, la possibilité de retrouver à plus ou moins long terme “leur” suprématie continentale – la «  destinée manifeste  » à la sauce germanique  ; pour d’autres encore, une assurance-indépendance contre un voisin – russe – jugé par nature menaçant. Et pour beaucoup, la possibilité d’appartenir à un club économique et monétaire permettant d’assurer leur développement, appartenance qui, ayant ses contraintes, peut se retourner en cauchemar car l’Europe est tout sauf solidaire – les Grecs l’ont appris à leurs dépens. Quant au Royaume-Uni, qu’il ait été dehors ou dedans (mais toujours à moitié), il est fidèle à la doctrine de Churchill  : le projet européen, c’est bon pour les nations continentales.

    Histoire, identité et horizon

    Macron a beau pérorer que l’Europe est «  notre combat  », «  notre histoire, notre identité, notre horizon  », il mêle là encore une platitude – l’Europe est en un sens «  notre histoire  » – à deux affirmations idéologiques. En quoi serait-elle «  notre combat  » – Quel «  citoyen  » européen serait prêt à mourir pour Gdansk davantage que pour Dantzig  ? – ou «  notre identité  »  ? Comme s’il existait une identité européenne préexistante aux identités nationales qui n’en seraient que les déclinaisons alors que, bien au contraire, l’identité européenne n’a jamais été que le carrefour des identités nationales. Non, évidemment, que ce dialogue n’ait eu d’incidence sur la culture de chacun des peuples qui y ont, inégalement du reste, participé dans l’histoire. Mais jamais ce dialogue n’a fini par constituer le brouet insipide d’une identité européenne. Enfin, en instituant l’Europe comme «  notre horizon  », Macron rétrécit singulièrement celui de nations historiques comme l’Espagne, le Portugal, le Royaume-Uni (dont il justifie ainsi la sortie) ou évidemment la France, dont les horizons se confondirent toujours avec la terre entière – reculant, comme il se doit, au fur et à mesure que ces nations avançaient. «  Notre horizon  » ne saurait se limiter au «  petit cap du continent asiatique  » (Paul Valéry).

    Macron a évoqué les «  pères fondateurs  », eux qui, instrumentalisant le traumatisme de deux guerres mondiales dont les nations furent avant tout les victimes et à peine la cause occasionnelle, conçurent aussitôt leur projet comme un asservissement du politique à l’économique au plus grand profit de l’hégémonie américaine. Il est vrai que c’est de cette idéologie matérialiste que Macron est le héraut. Idéologie consumériste qui constitue le brouet insipide européen que nous évoquions à l’instant. C’est pourquoi, disciple de Monnet, il veut explicitement substituer le «  débat scientifique  » au «  débat politique  » et abandonner l’Europe aux «  experts  », c’est-à-dire aux lobbies.

    Un souverainisme de repli  ?

    Aussi, après Mitterrand à Strasbourg en 1995 – «  le nationalisme, c’est la guerre  » –, a-t-il beau dénoncer en «  continuateur  » plus qu’en «  révolutionnaire  » (Pierre-André Taguieff) «  nationalisme, identitarisme, protectionnisme, souverainisme de repli  », «  idées qui se présentent comme des solutions préférables  » auxquelles il avoue, deux lignes plus haut, préférer «  les bourrasques de la mondialisation  »  : ses propos n’en font que mieux ressortir son aveuglement et son cynisme. Aveuglement devant la résurgence, partout dans le monde, singulièrement en Europe, d’un besoin d’identité face, précisément, aux dégâts culturels, plus encore qu’économiques, du mondialisme. Car avant d’être des «  idées  », «  nationalisme, identitarisme, protectionnisme, souverainisme de repli  » traduisent un besoin de persévérer dans l’être auquel c’est le mondialisme, par ses ravages, qui risque de donner un visage peu amène – et le succès relatif de l’AFD en Allemagne n’est pas forcément pour nous réjouir. Il en est de même du faux nationalisme catalan, sur fond d’égoïsme économique  : que traduit-il sinon un “chacun pour soi” que le mondialisme favorise  ? Macron est dans le domaine des idées, ou plutôt de l’idéologie. Aux prétendues idées de repli, il oppose une Europe qui «  ne vivra que par l’idée que nous nous en faisons  ». Idée en l’occurrence sonnante et trébuchante, puisqu’elle consiste à faire de l’Europe un open space – parlons macronien – du mondialisme, comme le montre l’entrée en vigueur, avant même sa ratification par les parlements nationaux, du CETA, traité de libre-échange euro-canadien, auquel Macron a toujours été favorable. C’est là tout son cynisme. Faire servir, comme les «  pères fondateurs  », une idée apparemment généreuse à la mise en coupe réglée des peuples et des civilisations sous un impératif de primauté de l’économique cachant la volonté de puissance de l’Argent sans rivages. La souveraineté, l’unité et la démocratie dont il rêve, ce sont celles des marchés dictant leur loi à des peuples submergés, à l’identité éclatée. Il est vrai  : «  Moi je n’ai pas de ligne rouge, je n’ai que des horizons.  »

    C’est à Giscard, qu’il fait penser. “Jeune” président (plus jeune même), centriste et atlantiste, il mêle lui aussi, en libéral-libertaire assumé, volonté de faire éclater les cadres de la société (l’avortement et le divorce pour Giscard, la PMA et bientôt la GPA et l’euthanasie pour Macron) et dépassement du national au profit d’une Europe mondialisée. Giscard est l’instigateur de l’élection du Parlement européen au suffrage universel, du regroupement familial puis de la Constitution européenne, devenue le traité de Lisbonne. Pour Macron  : listes européennes transnationales, Europe à deux vitesses pour forcer le passage au fédéralisme, budget «  du cœur de l’Europe  », valorisation du «  défi  » migratoire. Et comme Giscard à l’époque, peut-être notre «  pionnier  » se pense-t-il trop jeune pour prendre sa retraite après deux mandats nationaux et se voit-il déjà le premier président de l’Europe. Mais il faut auparavant diluer la France dans le grand tout européen. Bien sûr, les Allemands, Merkel en tête, n’ont pas les mêmes projets, surtout en matière budgétaire. Les Français ont toujours été les seuls «  Européens  ». Alignement explicite sur le «  modèle allemand  », que viendra sanctionner un nouveau «  traité de l’Élysée  », en matière sociale (la «  convergence  »), monétaire (la dogmatique austéritaire) et migratoire, bradage des derniers fleurons de notre industrie au profit du capitalisme d’outre-Rhin (Alstom dernièrement)  : les Allemands se contentent de ramasser ce que Macron leur offre. Ils savent que la condition d’une Allemagne toujours plus forte est une France toujours plus «  européenne  », c’est-à-dire toujours plus faible.  

     

  • Espagne : Le roi Felipe VI s'est exprimé dans un discours d'une fermeté sans précédent

     Palais Royal de Madrid

     

    Le roi d'Espagne a rompu le silence hier, en fin de journée. 

    Les Echos titraient hier soir, à 22 h 15 : « Le roi d'Espagne attaque durement les dirigeants catalans » C'est en effet ce qui ressort de ce discours.

    Nous avons choisi de reprendre ci-dessous quelques extraits du commentaire du Huffington Post.

    Mais l'écoute du discours du roi s'impose. Malgré une très médiocre traduction, il est sous-titré, en français.  LFAR

     

     

    Le commentaire du Huffington Post - 3.10.2017 - 21 h 26 

    Une prise de parole exceptionnelle pour le garant de l'unité de l'Espagne. Dans un discours d'une rare fermeté, le roi Felipe VI a accusé mardi 3 octobre les dirigeants indépendantistes de la Catalogne de menacer la stabilité de l'Espagne, comme vous pouvez le voir dans la vidéo ci-desus. 

    L'épreuve de force entre le gouvernement central et les dirigeants catalans, qui menacent de déclarer l'indépendance, a plongé l'Espagne dans sa crise la plus grave depuis (...) 1977. Dans une charge aussi rare que cinglante, Felipe VI a accusé les dirigeants catalans de s'être placés « en marge du droit et de la démocratie » en organisant le référendum de dimanche. 

    « Avec leur conduite irresponsable, ils peuvent même mettre en danger la stabilité de la Catalogne et de toute l'Espagne », a dit le souverain qui ne s'était pas exprimé sur la crise depuis dimanche. L'Etat doit assurer « l'ordre constitutionnel en Catalogne », a-t-il ajouté dans une allocution télévisée. 

    Face à cela, « c'est la responsabilité des pouvoirs légitimes de l'Etat d'assurer l'ordre constitutionnel et le fonctionnement normal des institutions, le respect de l'Etat de droit et l'autonomie de la Catalogne », a déclaré Felipe VI, sur le trône depuis 2014.

    Aux termes de l'article 155 de la Constitution, jamais encore invoqué, le gouvernement peut obliger une région à respecter ses obligations constitutionnelles si elle les viole ou si elle « porte gravement atteinte à la l'intérêt général de l'Etat ».

  • Notre vieil « ennemi héréditaire », l'Angleterre ...

     

    En deux mots.jpgSi l'on doutait que les journalistes - notamment de radio et de télévision - fussent attelés sans relâche et sans vergogne à une fonction de pure et classique propagande, l'affaire du Brexit, la façon très monolithique, très « formatée » dont elle n'a cessé d'être présentée, en donne une illustration tout à fait claire. Le bourrage de crâne parle chez nous un langage moins brutal, plus doucereux, que celui des régimes totalitaires d'autrefois ou même d'aujourd'hui, mais le résultat est le même. Sans qu'on soit sûr qu'il ne soit pis.

    Les médias n'ont pas désarmé avec le temps. France Inter annonçait encore samedi matin, sous une forme à peine hypothétique, la fonte à venir des effectifs de la City. Ces derniers n'ayant plus d'autre choix que de gagner Frankfort ou ... Paris.

    À ce que l'on dit dans les cercles éclairés, Paris, en effet, ambitionnerait même de ravir à la City sa place de premier rang. On ne demanderait pas mieux dans ces colonnes, si c'était sérieux. Il est permis, peut-être même normal, d'essayer. On ferait bien, toutefois, à notre avis, de ne pas trop y compter. La place et le potentiel de la City dans les opérations financières du monde lui est acquise depuis si longtemps, les liens qu'elle a tissés partout sont si étroits, les habitudes si ancrées, que le plus probable est qu'elle la conservera.

    On se plaît encore à Paris, Bruxelles, et ailleurs, à supputer que le Brexit pourrait bien ne pas aller à son terme, que les Anglais pourraient, en langage gaullien, « caler» , faire machine arrière ; que les négociations de sortie de l'U.E. pourraient ne pas aboutir avant longtemps ; que l'économie anglaise en supporterait de si funestes conséquences qu'elle s'en repentirait assez vite... Bref, toutes espèces de circonstances de nature catastrophique devant amener, en matière européenne, l'opinion britannique à s'inverser.

    Cela nous paraît méconnaître la situation, notamment économique, de l'Angleterre post-Brexit, en réalité nettement plus florissante que la nôtre en ce moment, tout autant que la psychologie du peuple anglais et de ses gouvernants.

    L'Histoire nous enseigne plutôt que les Anglais - peuple et Institutions - après avoir longtemps débattu, s'être affrontés âprement sur la ligne à suivre, une fois la décision prise, s'y tiennent jusqu'à avoir atteint leurs objectifs. De l'entêtement des Britanniques, l'Histoire nous donne maints exemples : la période napoléonienne qui ne s'achève qu'à Waterloo, comme la Seconde Guerre mondiale que l'Angleterre a menée seule, face aux puissances de l'Axe, après le défaut de la France en juin 40, et jusqu'à ce que Russes et Américains entrent dans le conflit. De Gaulle dira qu'elle fut l'âme de cette guerre, finalement gagnée, et c'est sans doute vrai.

    51dW11FzjZL._SX195_.jpgL'actuel ministre des Affaires Etrangères de Grande Bretagne, Boris Johnson, l'ancien maire de Londres, a écrit sur Winston Churchill un gros livre foisonnant, écrit à la va comme je te pousse, construit le plus anarchiquement du monde, mais bourré de faits, d'anecdotes, de mots d'esprit et surtout rempli d'admiration pour le courage, l'héroïsme même, le patriotisme et le profond loyalisme monarchique de son grand homme, dont il est patent qu'il est son modèle et son exemple. Son livre enseigne ces vertus.

    Typique du fonctionnement des institutions britanniques, auxquelles les Français entendent généralement fort peu de chose, une sorte de maturation en cours chez les tories et, probablement, chez l'intéressé lui-même, semble en ce moment devoir pousser Boris Johnson vers le 10 Downing street, où il pourrait bien un jour assez proche succéder â la pâle mais décidée Thérèsa May. Sans-doute est-elle aussi parfaite patriote anglaise que lui, mais sans son panache.

    Ainsi, les fonctionnaires de Bruxelles devraient avoir affaire dans les mois qui viennent â de redoutables et efficaces négociateurs, tandis que les acteurs réels de toutes les formes d'activité européenne, économique et autres, seront - sont déjà - pressés de mettre en place les accords - désormais bilatéraux - qui permettront de la poursuivre. Avec ou sans Brexit, l'Angleterre ne cesse pas d'exister, les réalités de transcender les bouts de papier et les idéologies.

    La France ne devra pas être en reste, n'aura pas avantage à s'enfermer dans son tête à tête de plus en plus inégal avec l'Allemagne. L'égoïsme anglais, quoique sous d'autres formes, n'est pas moindre que celui de notre grand voisin d'Outre-Rhin. Face à cet égoïsme, celui de notre vrai et vieil « ennemi héréditaire », nous aurons souvent à dresser le nôtre, à défendre nos intérêts bec et ongles. Mais, en la circonstance, nous devrions avoir, avec l'Angleterre - et en tirer quelque parti - ce point de convergence fondamental : son obstination à conserver sa souveraineté.  •

    Retrouvez l'ensemble de ces chroniques en cliquant sur le lien ci-dessous

    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Catalogne : Mariano Rajoy deviendra-t-il Mariano Kerenski ?

     

    Par Javier Portella

    Nous avons dit presque par accro, aussitôt après l'attentat islamique de Barcelone [Cf. Lien ci-dessous] ce que nous pensons fondamentalement de la question catalane. Sur la situation née du référendum de dimanche dernier, qui, bien-sûr intéresse la France et l'Europe, Javier Portella donne ici une analyse où rien ne manque : connaissance de la situation, clarté et hauteur de vue [Boulevard Voltaire, 2.10]. Nous ne pensons pas autrement que lui, même si, d'un point de vue français, nous ne nous serions sans-doute pas exprimés avec la même radicalité. En tout cas, le point est fait, les justes appréciations sont portées.   LFAR

     

    77dae4cee53d71a6de676a118bdb1379.jpeg.jpgIl y a quelque chose de fascinant, je vous assure, à suivre sur le terrain, à chaud – je me trouve ces jours-ci à Barcelone -, les prolégomènes d’une révolution. Certes, c’est on ne peut plus déchirant et angoissant de voir comment ton pays est en train d’être dépecé avant de tomber dans l’abîme. Mais ce qui devient fascinant, c’est de voir, de constater, jour après jour, le degré absolu de bêtise et de traîtrise de la part des Kerenski sans la collaboration desquels il ne pourrait jamais y avoir aucune révolution.

    En l’occurrence, leur claudication remonte à très loin : à quarante ans, lorsque le nouveau régime dit démocratique, craintif et espérant amadouer le fauve, a entrepris la cession la plus complète des ressorts du pouvoir : depuis la police jusqu’à l’enseignement et l’endoctrinement médiatique. Sans oublier l’argent : c’est à 55 milliards d’euros que s’élève, à l’heure actuelle, la dette de la Generalitat envers l’État espagnol. Si celui-ci fermait le robinet, pas un seul policier, pas un seul fonctionnaire, pas un seul des dirigeants de la sédition n’aurait touché, ce 30 septembre, son salaire. En espagnol, on appelle ça « ser, tras cornudo, apaleado ». En français, être cocu et content.

    Les résultats obtenus par tous les collabos objectifs de la sécession – depuis Juan Carlos 1er et son fiston jusqu’à l’ensemble des dirigeants de droite, de gauche et du centre – sont maintenant là : une région, la Catalogne, irréconciliablement, mortellement scindée en deux ; et une nation, l’Espagne, vieille de plusieurs siècles, qui risque d’être démembrée. C’est ainsi qu’elle deviendrait le premier État-nation européen à périr. 

    « Mort à l’État-nation ! », « Vive l’Europe des mille petites régions ! », vont s’écrier certains, tandis que d’autres – les mondialistes qui souhaitent et le Grand Remplacement et le Grand Éparpillement conduisant à la mort des peuples et des nations – vont se frotter les mains. Il faut, certes, œuvrer pour la grande Europe, pour l’Europe vécue en tant que patrie charnelle, puissante, grande, belle. Mais cette Europe, qui passe certainement par la reconnaissance des particularités et les droits de ses régions, ne passe nullement par la dissolution de ces grandes unités de langue, de culture et d’histoire que sont les peuples devenus nations depuis des siècles. 

    Que va-t-il se passer maintenant en Catalogne ? La révolution gronde, c’est évident. Mais non seulement la révolution sécessionniste. L’autre aussi : celle commandée par les gauchistes et les communistes de CUP, Podemos et Esquerra Republicana, qui voient dans l’indépendance le premier pas vers la dissolution du pays et la révolution totalitaire de leurs rêves. Plus les eaux seront troubles, plus et mieux pourront-ils y pêcher. Or, il s’agit d’une révolution d’un type nouveau. Non pas la révolution des prolétaires (ou prétendus tels), mais celle des bobos. La première révolution du XXIe siècle, la révolution 2.0, celle du « dernier homme », que dirait Nietzsche, la révolution de l’Homo festivus, que dirait Philippe Muray.

    La grande question est, dès lors : les enfants de l’angélisme, les bobos à l’esprit Bisounours qui ont, dans un air de fête, occupé tout le week-end les écoles pour rendre possible la tenue, dimanche, d’un simulacre de référendum, les révolutionnaires de ce prétendu « populisme de gauche » qui recueille le plus grand nombre de voix dans les seuls quartiers huppés, en un mot tous ces gens si gentils et charmants, vont-ils être capables de dresser des barricades et d’y laisser vaillamment, s’il le faut, leur peau ?

    On peut en douter. Tout comme on peut douter que, lorsque lundi ou mardi la République indépendante de Catalogne sera proclamée, Mariano Rajoy ose prendre les mesures que la loi commande et le moindre bon sens exige : état d’urgence, suspension de l’autonomie de la Catalogne et arrestation du président Carles Puigdemont et des principaux dirigeants du coup d’État.  

    Écrivain et journaliste espagnol

     

    A lire dans Lafautearousseau ...

    En deux mots : Barcelone : « No tinc por »

  • Macron dit à Rajoy son « attachement à l'unité constitutionnelle de l'Espagne ». Il a bien fait !

     

  • Europe & dénatalité • Couples « politiques » et couples princiers ...

    Les conjoints des chefs d'Etat au sommet de l'OTAN, le 25 mai 2017  

    Publié le 11.7.2017 - Actualisé le 30.9.2017 

    Par Péroncel-Hugoz

    Informé par des statisticiens chrétiens des Etats-Unis, notre chroniqueur s’est penché sur le phénomène de « dénatalité » constaté récemment parmi le haut personnel politique en Europe occidentale. A lire ou relire au moment où une majorité de « politiques » sans postérité planchent sur l'avenir de l'Europe ...

     

    peroncel-hugoz 2.jpgL’élection cette année à la présidence française d’Emmanuel Macron (39 ans, né en 1977), le plus jeune chef d’Etat français depuis Napoléon Bonaparte (Premier consul à 30 ans, en 1799) a suscité l’attention de chercheurs catholiques nord-américains, dont le journaliste Phil Lawler, connus pour investiguer dans les affaires intimes de leurs contemporains. Ils en ont déduit, par exemple, que si le président Macron reste marié à son épouse actuelle, Brigitte Trogneux (née en 1953, 64 ans, mère de trois enfants par son mariage précédent avec un certain M. Auzière qu’on donne pour « financier »), il n'aura pas de postérité. 

    Sur cette lancée, la curiosité démographique de nos chrétiens anglo-saxons les a conduits à dresser la liste des grands dirigeants d’Europe occidentale, mariés ou « en couple » - mais sans le moindre enfant. Cette liste est longue ; en voici « les stars » : la chancelière allemande, la Première ministre britannique ainsi que les chefs de gouvernement hollandais, suédois, écossais, italien, etc. Le Grand-Duché de  Luxembourg bat, si l’on ose dire, tous les records avec le tout-puissant président en exercice de la Commission européenne, marié sans postérité, et son compatriote le Premier ministre du minuscule Etat luxembourgeois, époux…d’un autre homme. Cette union officielle entre personnes de même sexe est légale depuis 2015 dans cette monarchie catholique créée en 1867 sur une base historique plus ancienne. 

    Lors du sommet du Pacte atlantique, ce printemps, à Bruxelles, les téléspectateurs du monde entier ont pu voir, avec stupéfaction pour pas mal d’entre eux, la photo des « premières dames » dont les époux participaient à ce sommet. A côté de la reine des Belges et de la « compagne » du Premier ministre belge, on notait la présence de Mme Trump en grand décolleté, de Mme Macron en robe courte, de Mme Erdogan, empaquetée en bleu, et enfin celle du « mari » du chef du gouvernement luxembourgeois… 

    Ce que ces chrétiens américains, férus de statistiques matrimoniales européennes, n’ont pas relevé, c’est le contraste abyssal entre la dénatalité en Europe occidentale, symbolisée par cette photo qu’on n’ose plus guère appeler de « famille » et le grand nombre d’enfants animant la plupart des cours européennes (Danemark, Norvège, Suède, Angleterre, Hollande, Belgique, Luxembourg, Liechtenstein, Monaco, Espagne) mais aussi la plupart des familles royales seulement prétendantes (Portugal, Italie, Grèce, Bulgarie, Allemagne, France, etc.). 

    Un constat s’impose : les couples politiques ne voient guère plus loin que leur propre vie ou carrière tandis que les couples princiers, ayant l’habitude héréditaire de la continuité nationale, essaient, eux, de se projeter dans l’avenir.

    Rendez-vous dans 50 ou 100 ans !  


    Lire : Philippe d’Edimbourg - Une vie au service de Sa Majesté, par Philippe Delorme, Tallandier, Paris, 2017. 300 p. avec cahier de 24 photos

    Péroncel-Hugoz

    Repris du journal en ligne marocain le360 du 7.07.2017