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Actualité Europe - Page 40

  • Exact diagnostic d'Alain de Benoist : « l’Union européenne est prise dans une dynamique de désintégration »

    Le triumvirat italien (De droite à gauche) : Salvini, Conte, Di Maio

     

    Par Alain de Benoist

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpgDans cet entretien donné à Boulevard Voltaire [9.06] Alain de Benoist développe d'intéressantes analyses sur la situation de l'Europe après les changements politiques intervenus en Italie. Nous en avons nous-mêmes traité dans un même esprit. Les analyses convergent. Alain de Benoist y ajoute d'utiles remarques, fruits de sa lucidité et de sa connaissance des dossiers.  LFAR   

     

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    Avec la constitution, en Italie, d’un nouveau gouvernement reposant sur l’alliance de la Ligue et du Mouvement 5 étoiles, respectivement représentés par Matteo Salvini et Luigi Di Maio, tous deux nommés vice-Premiers ministres, assistons-nous à un nouvel épisode de ce « moment populiste » dont vous dessiniez les contours dans l’un de vos récents essais ?

    Malgré la tentative de coup d’État légal du président Mattarella qui, s’arrogeant des droits que la Constitution italienne ne lui accorde pas, et avant de se raviser devant le tollé soulevé par son attitude, a tenté le 27 mai de mettre son veto à la constitution de ce nouveau gouvernement pour complaire à la Commission de Bruxelles et aux marchés financiers, les représentants de la Lega et du Mouvement 5 étoiles sont arrivés au pouvoir. Les sondages montrent qu’ils ont l’appui d’une nette majorité du peuple italien, auquel ils affirment vouloir « redonner la parole » tout en rompant dans pratiquement tous les domaines (immigration, austérité, revenu de citoyenneté, système fiscal, etc.) avec la vulgate dominante. Il est évident que l’élection d’une majorité souverainiste et « anti-système » en Italie, pays fondateur du Marché commun et troisième économie de l’actuelle Union européenne, est un véritable coup de tonnerre. C’est, en effet, ce type d’événement que laissait prévoir mon livre Le Moment populiste.

    Cela dit, il suffit d’examiner dans le détail la composition du nouveau gouvernement italien pour constater que ce n’est pas, à proprement parler, un gouvernement populiste. Ce qu’on peut dire, en revanche, c’est qu’il s’en rapproche. Giuseppe Conte, le nouveau président du Conseil, n’a en tout cas pas éludé la question : « Si populisme, a-t-il dit, signifie être capable d’écouter les besoins des personnes, alors nous le revendiquons ! »

    Quelles sont les chances de ce gouvernement « anti-système » de parvenir à mettre en œuvre avec succès sa politique ?

    Les obstacles seront évidemment nombreux, soit qu’ils viennent de l’inexpérience relative des nouveaux gouvernants, soit qu’ils tiennent à l’irréalisme de certaines de leurs propositions, soit encore qu’ils résultent de rivalités ou de divergences de vues entre la Ligue et le mouvement 5 étoiles qui, pour être l’un et l’autre opposés au « système », ne sont néanmoins pas d’accord sur tout et s’adressent aussi à des électorats socialement et géographiquement différents (la Ligue étant surtout implantée dans le nord et 5 étoiles dans le sud).

    Mais le principal danger viendra, bien sûr, des marchés financiers et des technocrates de l’Union européenne qui, comme cela s’est déjà passé en Grèce, feront tout ce qui est en leur pouvoir pour faire capoter le programme de ce nouveau gouvernement. On se souvient de la petite phrase de l’Allemand Günther Oettinger, commissaire européen au Budget, assurant que « les marchés financiers vont apprendre aux Italiens comment voter ». Et aussi de l’article du Financial Times qualifiant Salvini et Di Maio et, avec eux, leurs 17 millions d’électeurs de « barbares » (Salvini répliquant aussitôt : « Nous préférons être des barbares que des domestiques. »). On voit mal, dans ces conditions, les instances européennes accepter l’annulation de tout ou partie de la dette publique italienne, comme le réclame le nouveau gouvernement…

    Reste, aussi, à dissiper quelques équivoques. Le nouveau gouvernement affirme, ainsi, que la Russie est « à percevoir, non pas comme une menace, mais comme un partenaire ». Mais comment pourra-t-il combattre les sanctions prises contre la Russie alors qu’il a aussi confirmé son « appartenance à l’Alliance atlantique, avec les États-Unis comme allié privilégié ». Le nouveau gouvernement va-t-il, par exemple, refuser les nouvelles bombes atomiques B61-12 que les États-Unis se préparent à déployer en Italie contre la Russie ?

    Cet événement est, en tout cas, une pierre de gros calibre jetée dans le jardin d’Emmanuel Macron. Et à l’échelle de l’Europe ?

    C’est en effet une très mauvaise nouvelle pour Emmanuel Macron, qui a tout misé depuis son élection sur une relance de la construction européenne. Or, l’Union européenne est, aujourd’hui, prise dans une véritable dynamique de désintégration. L’Italie se dote d’un gouvernement à l’exact opposé de toutes les orientations macroniennes au moment même où, en Allemagne, l’ère Merkel est en passe de s’achever, où l’Espagne, qui vient elle aussi de changer de gouvernement, continue à se débattre dans le psychodrame catalan, où le populisme gronde en Autriche, en Slovénie, au Danemark et ailleurs, où la Grande-Bretagne n’en finit pas de négocier les conditions de son Brexit et où le groupe de Visegrád a quasiment fait sécession par hostilité aux diktats européens en matière migratoire.

    Cette érosion des partis institutionnels au profit des mouvements « populistes » est le résultat de trente ans de frontières ouvertes, de délocalisations et de déclin des classes moyennes. Marcel Gauchet écrivait récemment que « le clivage actuel est celui de la France sans avenir contre la France pour laquelle l’avenir n’est pas un problème ». Ce diagnostic peut se transposer aisément à toute l’Europe, au point que l’on peut se demander si les prochaines élections européennes ne révéleront pas une quasi-majorité d’eurosceptiques. Ce serait alors le début de la fin.  

    Intellectuel, philosophe et politologue

     
     
    Entretien réalisé par Nicolas Gauthier 
  • Ralliement

     

    Par Hilaire de Crémiers

     

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    Les Irlandais ont répondu « oui » au référendum qui portait abrogation de l’amendement constitutionnel interdisant l’interruption volontaire de grossesse. 

    À 66,5 % des votants. C’était le vendredi 25 mai. L’avortement sera donc légal jusqu’à trois mois de grossesse et, sur justification médicale, entre trois et six mois. Le Premier ministre Leo Varadkar, d’origine indienne et lui-même homosexuel affiché, s’est félicité de cette « révolution tranquille ». Ce référendum fait suite à celui de 2015 qui avait autorisé le prétendu mariage homosexuel. La catholique Irlande qui, il y a encore vingt ans, se refusait à ce genre d’évolution dite « sociétale », rejoint le troupeau européen des peuples qui se suicident, dans la pratique qui sera généralisée et, sans le dire, quasi obligatoire sous contrainte morale, d’une « culture de mort » qu’avait véhémentement dénoncée en son temps saint Jean-Paul II. En la circonstance, la voix souveraine de l’Église ne s’est pas fait entendre. Et c’est, peut-être, ce qu’il y a de plus grave.

    La lecture des éditoriaux du Monde et de Libération – on n’ose pas avancer d’autres titres ! – donne à comprendre, avec les mêmes arguments continuellement ressassés, quel plan diabolique oriente tout cet ensemble de décisions auquel l’Europe institutionnelle a amené tous les pays d’Europe ou presque ! Au nom des droits de l’Homme, le permis de tuer et de forniquer comme on veut, autant qu’on veut. Avec interdiction d’interdire sous peine de délit et de crime. Et ces lois sont les bases intangibles du nouvel ordre social : Sodome et Gomorrhe, et l’infanticide généralisé ! Exultation des médias : un référendum qui donne envie de référendum, écrit Le Monde. Restent encore cinq pays qui ne sont pas tout à fait alignés, dont la Pologne. C’est donc une évidence pour la haute morale qui guide nos maîtres à penser : il faudra réduire cette opposition. La Pologne est dénoncée ; l’Europe s’en occupe. Chypre devra y passer et il ne faudra pas oublier jusqu’à la petite principauté d’Andorre ! La même loi pour tous ! Et, après, qui osera se plaindre de la dégradation des mœurs, de l’effondrement de la natalité, de l’effroyable abandon moral de la jeunesse ? Et qui osera s’étonner des progrès de l’islam et de l’islamisme ? Il n’est pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir.

    « La France continue dans la même voie. Elle en arrive à la révision de ses lois de bioéthique. Pourquoi cette révision et à quoi sert-elle ? Politique magazine en fait son dossier de ce mois-ci. C’est, évidemment, capital. »

    Toute l’astuce consiste, en se servant de sondages dont on ne sait que trop comment ils sont fabriqués, à invoquer une opinion présentée comme majoritaire pour contourner l’obstacle d’une intelligente, forte, constructive opposition qui, par sa seule existence et la seule vérité de son argument, devrait arrêter toute tentative de passer outre. Eh bien, non ! Le rapport de synthèse du Comité consultatif national d’éthique, remis le mardi 5 juin, laisse la porte ouverte à toutes les transgressions. Notre dossier aide à comprendre le pourquoi et le comment.

    Le 23 mai à l’Élysée, le président Macron recevait en dîner privé différents partenaires des travaux préparatoires. La question portait sur la PMA et la GPA ; les représentants des opposants au changement de loi étaient, comme par hasard, minoritaires. L’Élysée a fait savoir que le président, maintenant, se réservait la question. A été annulé l’évènement national qui devait clore les États généraux de la bioéthique début juillet. Tout est reporté en septembre. La Manif pour tous, de son côté, a déjà envoyé aux autorités son propre rapport de 400 pages. Il est à espérer qu’il sera reçu et lu.

    Vient un moment où la vérité doit être dite. Il n’y a pas de synthèse possible dans un « en même temps » supérieur entre le vrai et le faux, le bien et le mal, le juste et l’injuste, le oui et le non. L’opinion ne fait pas la loi. Une majorité d’opinions favorables ne donne pas raison à une loi en soi criminelle et profondément immorale ; elle ne crée pas un droit de tuer, n’ouvre pas une possibilité de tripatouiller la vie humaine et de livrer au marché ovocytes, spermes, embryons, ventres, enfants et familles. Qu’est-ce que vaut l’opinion en pareil cas ? Ou ce qu’on appelle telle ? Surtout quand elle est manipulée ? Par l’argent et par des puissances plus ou moins cachées qui obéissent à des mots d’ordre ?

    Il faut en finir avec ces ralliements pseudo-démocratiques qui asservissent les uns après les autres tous les peuples chrétiens. Pour le plus grand profit de leurs ennemis ! Il est temps de dire : non licet. Vraiment souverain, c’est-à-dire libre, sera celui qui le dira avec autorité.      

    Hilaire de Crémiers

  • L'Italie, problème ou solution de l'Europe ?

     L'Italie ferme ses ports à l'Aquarius, le bateau qui porte secours aux migrants

     

    Par Eric Zemmour

    Le Figaro magazine dans sa dernière livraison [8.06] a publié cette chronique d'Eric Zemmour qui pose les vraies questions et y apporte de justes réponses. A preuve cette interrogation : « Un pays peut s'inquiéter de la révolution « populiste » italienne : c'est l'Espagne. Qui va remplacer Lampedusa ? Cadix ? Malaga ? ». Au soir où nous écrivons, il semble que ce devrait être Valence... Alors, une révolution populiste, bientôt, en Espagne aussi ?  LFAR

     

    687294929.jpgLa situation en Italie est révélatrice de tous les atermoiements de l'Union.

    « Le bon temps pour les clandestins est fini ; préparez-vous à faire les valises.» Le patron de la Ligue, Matteo Salvini, a le sens de la formule qui fait mouche. Ce n'est pas un hasard s'il a choisi le poste de ministre de l'Intérieur, laissant à ses alliés du mouvement M5S les ministères sociaux. À ce poste, on peut encore montrer qu'un État déterminé a les moyens d'agir. Encore faut-il qu'il le soit.

    C'est toute la question posée par l'affaire italienne. Celle de la légitimité démocratique est derrière nous. Elle s'est réglée par un compromis à l'italienne: les vainqueurs des élections ont renoncé à « leur » ministre des Finances europhobe ; le président de la République italienne et les milieux européens de Bruxelles qui le soutenaient ont renoncé à empêcher une majorité «populiste» de gouverner. 

    « On croit toujours en France que l'immigration est un phénomène qu'on ne peut maîtriser, une sorte de fatalité qu'on doit subir. C'est faux »  Éric Zemmour

    B9715977905Z.1_20180608234215_000+GFMBEN2UR.2-0.jpgDésormais, c'est à Salvini de jouer. D'abord parce que l'immigration fut le thème qui l'a porté au pouvoir. Ensuite parce qu'il doit montrer qu'il peut expulser massivement les clandestins (il a promis 500.000 renvois) et arrêter la déferlante migratoire sur les côtes italiennes. Salvini s'en est déjà pris aux ONG qui, sous couvert d'humanisme, sont les complices des passeurs. Il devra utiliser la marine italienne non pour sauver les migrants mais pour les arrêter, voire détruire leurs barques. Il devra enfin tenir tête aux juges européens qui ne manqueront pas de dénoncer des pratiques contraires aux « droits de l'homme ». Osera-t-il ? Il devra aussi faire pression sur les pays de l'autre côté de la Méditerranée - Tunisie, Maroc et, au-delà, les autres pays d'Afrique pour qu'ils reprennent leurs ressortissants. Au temps de Ben Ali en Tunisie et de Kadhafi en Libye, ces pays bloquaient les migrants pour qu'ils ne se déversent pas sur l'Europe - preuve que c'est possible. L'Algérie n'hésite pas à renvoyer brutalement les migrants qui essayent de s'installer chez elle.

    On croit toujours en France que l'immigration est un phénomène qu'on ne peut maîtriser, une sorte de fatalité qu'on doit subir. C'est faux. Les mouvements démographiques sont une guerre qu'on veut gagner ou qu'on accepte de perdre. Comme le note l'historien Pierre Vermeren, le milliard de Chinois pauvres n'a jamais débarqué dans le Japon riche parce que l'État japonais s'est organisé pour qu'il en soit ainsi. Aux États-Unis, depuis l'arrivée de Trump, l'immigration venue du Mexique s'est beaucoup réduite.

    Emmanuel Macron et les dirigeants de l'Europe répètent que chaque nation ne peut rien faire seule et que la question migratoire ne pourra être résolue qu'ensemble. C'est exactement l'inverse. Ensemble, les Européens ont prouvé qu'ils ne font rien. Les États qui l'ont décidé ont bloqué toutes les routes migratoires - la Hongrie en est le meilleur exemple. Et la Pologne montre qu'il est possible d'accueillir une immigration choisie: ils ont accepté des Ukrainiens et refusé les musulmans. Un pays peut s'inquiéter de la révolution « populiste » italienne : c'est l'Espagne. Qui va remplacer Lampedusa ? Cadix ? Malaga ?  

  • Société • Avortement : la normalisation éthique de l’Irlande

     

    Par Yves Morel

     

    Par referendum, le 25 mai, les Irlandais ont dit « oui » à la légalisation de l’avortement, qui sera entièrement libre jusqu’à trois mois de grossesse, autorisé sur justification médicale entre trois et six mois.

    Ils bouclent ainsi le cycle de la légalisation de la décomposition des mœurs, commencé avec l’institution du divorce, en 1995, puis du mariage homosexuel en 2015. La très catholique Irlande rejoint donc le camp des peuples décadents, avides de droits illimités, ennemis du devoir, abêtis, aliénés par leurs fausses libertés vénéneuses, et préparant leur ruine.

    L’avortement, instrument du suicide de notre civilisation

    Car soyons lucides : un peuple qui identifie la liberté à la jouissance sans entrave, et qui institue comme un « droit fondamental », le meurtre de milliers d’enfants à naître, s’achemine sur son extinction. En effet, il renonce alors à vivre, se moque de disparaître à longue échéance. Et les prodromes de cette disparition sont repérables. L’immigration a profondément modifié la composition des populations ouest-européennes, désormais « polyethniques » et « multiculturelles ». Ce n’est qu’une étape : avec la différence de fécondité et de natalité, nos pays connaîtront bientôt le Grand Remplacement. La légalisation de l’avortement est un auxiliaire puissant de ce retournement démographique sans précédent. L’Irlande était un môle de résistance à la décrépitude et aux grandes invasions d’ores et déjà commencées ; elle ne l’est plus.

    On ne respecte pas des peuples décadents et abêtis

    On déplore que nos immigrés ne respectent pas nos mœurs occidentales. Mais comment pourraient-ils respecter et vouloir imiter des peuples qui sacrifient, avec une belle inconscience, leurs valeurs de civilisation les plus précieuses, leurs enfants à naître, leur foi, leur morale, leur avenir, leur existence même ? Comment n’inclineraient-ils pas, au contraire, à mépriser ces peuples, à dénoncer leur immoralité, leur veulerie, et à les agresser, par le terrorisme, notamment, en attendant de les asservir ?

    La question de l’avortement est au cœur de celle de la survie de notre civilisation, avec, d’ailleurs, celle de la contraception. Contraception et avortement, légalisés, ont pour but et pour effet de dissocier la sexualité des devoirs et de la responsabilité inhérents à toute vie sociale. La satisfaction des désirs sexuels devient ainsi une fin en soi, et n’est plus ordonnée à une finalité spirituelle, éthique, et proprement sociale. Partant, elle favorise l’irresponsabilité. Hommes et femmes deviennent des bêtes, qui copulent sans se soucier en rien de donner un sens à leur acte, et des implications de celui-ci pour l’individu lui-même, le couple (fût-il éphémère) et la société. Avec cette différence que les animaux sont soumis à leur instinct, lequel les ordonne à la perpétuation de leur espèce. Au contraire, nos contemporains, « libérés » par la contraception et l’avortement, ne sont soumis à rien, sinon, plus que jamais, à leurs pulsions, ayant la possibilité de se dérober à la responsabilité de leur acte. Des individus prisonniers de leur libido, et sans souci de leur dignité, de celle de l’espèce humaine, et de l’avenir de leur civilisation : voilà ce que font de nous la contraception et l’avortement. Des individus atomistiques, dénués de conscience, de vie spirituelle, de morale. Avec de telles loques, un peuple ne peut bâtir rien de durable. Et, par là, il ne peut éduquer les enfants qu’il fait encore. Des adultes égoïstes, matérialistes et hédonistes ne peuvent tenir lieu de modèles. C’est d’ailleurs bien pour cela que les jeunes ne respectent plus leurs parents, ni les adultes en général : on ne s’incline pas devant de telles gens.

    A n’en pas douter, les Irlandais ont fait le mauvais choix : celui de nous rejoindre dans l’entreprise du suicide de notre civilisation.n   

     Yves Morel

    Docteur ès-lettres, écrivain, spécialiste de l'histoire de l'enseignement en France, collaborateur de la Nouvelle Revue universelle 
  • Italie : Retour sur le coup de force de Mattarella

     

    Par Yves Morel

    Un coup de force qui est une nouvelle preuve du mépris des l’Europe et des marchés pour la souveraineté des peuples. 

    Un déni de démocratie

    Une nouvelle crise politique en Italie ? Non, un scandale, cette fois-ci. Le président de la République italienne a invalidé le suffrage de ses compatriotes, en s’opposant au choix du ministre de l’Economie, et en poussant, de la sorte, Giuseppe Conte à renoncer à former le gouvernement. Si l’acte de Sergio Mattarella ne viole pas la lettre de la constitution italienne, il en viole l’esprit, il viole même l’esprit de toute démocratie. En démocratie, c’est le suffrage populaire qui prévaut. Le peuple ne gouverne pas, ne décide pas, mais il choisit ceux qui vont gouverner et décider. Et, lors des élections générales du 4 mars 2018, il a récusé le Parti Démocrate (de gauche), la Démocratie Chrétienne (de centre droit), et même, Forza Italia de Berlusconi, mettant en tête le Mouvement Cinq Etoiles (populiste de gauche, tenant à la fois de notre FN et de notre France insoumise), avec 33% des voix, et la Ligue (Lega), de Matteo Salvini (à la fois anti-européenne, populiste et régionaliste), avec 18%.

    L’alliance logique du Mouvement cinq étoiles et de la Ligue

    Aucune formation ne disposant de la majorité absolue, et une alliance entre le Parti Démocrate et le Mouvement Cinq Étoiles étant impensable, tout comme une alliance entre la Ligue, Forza Italia et la Démocratie Chrétienne, c’est une alliance entre le Mouvement Cinq Étoiles et la Ligue qui devait prévaloir, fondée sur la défense des laissés pour compte du système, l’euroscepticisme et la protection des Italiens contre les excès de l’immigration et les empiétements des instances européennes et des lobbies économiques sur la souveraineté italienne. MM. Luigi Di Maio et Matteo Salvini s’accordèrent donc sur un programme de gouvernement à la fois social, national et relativement indépendant à l’égard de l’Europe, qui devait être mis en œuvre par un ministère que dirigerait M. Conte. On pouvait discuter de la composition de ce cabinet, de son programme, et présager, présumer ou préjuger de son action à venir, mais ce gouvernement était le plus légitimement démocratique qui fût.

    Le complot des Eurocrates

    Las ! C’était sans compter avec la classe politique, prête à tous les coups de force au nom de son credo européen, au nom d’une Europe technobureaucratique ennemie des nations et des peuples ; c’était sans compter, également, sur la Bourse, les marchés financiers, les lobbies industriels, qui, eux, se jouent, depuis toujours, des souverainetés populaires. L’installation d’un gouvernement national, qui aurait sans doute pris ses distances avec les règles budgétaires de la Communauté européenne, était inadmissible à leurs yeux. S’ils avaient eu raison du ministère Berlusconi en 2011, ce n’était pas pour admettre, sept ans plus tard, un gouvernement indépendant à l’égard de Bruxelles. Et, en effet, certaines des mesures les plus importantes envisagées par la coalition Ligue/Cinq Étoiles étaient incompatibles avec les règles de l’orthodoxie budgétaire européenne : institution d’un revenu minimal universel, abaissement (dans certains cas, et sous condition, il est vrai) de l’âge de la retraite, augmentation des pensions, tout cela était inacceptable pour la Commission européenne. La baisse des impôts paraissait plutôt nocive, dans le cas de l’Italie. Quant à l’expulsion massive des clandestins, cela était diamétralement opposé tant au dogme libéral qu’à l’orthodoxie « humaniste » et « droit-de-l’hommiste » européenne.

    Les manœuvres de Sergio Mattarela, l’homme lige des eurocrates

    Voilà pourquoi Sergio Mattarella, président de la République depuis trois ans, a tout fait pour empêcher la formation du gouvernement issu de cette coalition, et pour obliger ses compatriotes à retourner aux urnes.

    Ce Sicilien, avocat et spécialiste de droit constitutionnel, est un enfant de la balle, en politique ; son père, Bernardo, fut plusieurs fois ministre. Toutefois, lui-même n’entra vraiment dans la lice qu’en 1983, à l’âge de 42 ans, lorsqu’il fut élu député. Pendant longtemps, il resta peu connu, mais joua un rôle important. Ainsi, il fut le principal artisan de la loi électorale de 1993, qui introduisit une forte dose de scrutin majoritaire pour les élections des parlementaires (pour les trois quarts des sièges), et qui fut en vigueur jusqu’en 2005. Et il exerça, par la suite, diverses fonctions ministérielles importantes : Instruction publique, vice-présidence du Conseil des Ministres, Défense nationale, avant d’être élu président de la République le 31 janvier 2015. Comme tous les démocrates-chrétiens, il est un Européen convaincu. A son esprit, l’Europe passe avant tout. Il doit d’ailleurs son élection à la magistrature suprême à une coalition d’eurocrates et d’euromanes de tous bords : la Démocratie chrétienne, certes, mais également le Parti Démocrate (équivalent approximatif de notre PS), le parti Gauche, Écologie et Liberté (SEL), l’Union du Centre, Choix civique pour l’Italie (autres formations centristes), et le Nouveau Centre Droit. Il fut l’élu des européens contre les anti-européens qu’étaient (et que restent) la Ligue et le Mouvement Cinq Étoiles, et contre Forza Italia, européen et libéral, mais trop indépendant à l’égard de Bruxelles. Autant dire qu’il n’allait pas s’accommoder de voir ses adversaires, en tous points opposés à lui, s’installer au Palais Chigi. Et qu’il allait pouvoir compter sur le soutien actif de ceux qui l’avaient élu, de Bruxelles et de tous les pays ouest-européens, sans parler des milieux financiers. Il s’affaira donc à faire échouer les discussions entre les partis, en s’efforçant d’intégrer des membres du Parti Démocrate, de la Démocratie chrétienne, du Nonveau Centre Droit ou de Forza Italia au nouveau gouvernement, et en chargeant le nouveau président de la Chambre, Roberto Fico, et la nouvelle présidente du Sénat, Maria Elisabetta Alberti Casellati, de négociations impossibles en vue d’aboutir à une improbable coalition majoritaire associant la Ligue, Forza Italia et les partis de droite, ou le Mouvement Cinq Étoiles et le Parti Démocrate. Puis, lorsqu’il eut désigné, à regret, Giuseppe Conte, soutenu par le Mouvement Cinq Étoiles et la Ligue, il mit son veto à la nomination de l’eurosceptique Paolo Savona au ministère de l’Economie, poussant ainsi Conte à renoncer à ses fonctions.

    Résultat : à ce jour, trois mois après avoir élu leurs parlementaires, les Italiens n’avaient toujours pas de gouvernement, et étaient invités à retourner dans l’isoloir en septembre prochain. Finalement, M. Mattarella a accepté la formation d’un nouveau gouvernement Conte. Mais le ministre de l’Économie et des Finances, Giovanni Tria, quoique proche de la Ligue est un fervent partisan du maintien de son pays dans l’euro ; et le ministre des Affaires étrangères, Enzo Moavero Milanesi, a un passé européen propre à rassurer M. Mattarella et Bruxelles, puisqu’il fut sous-secrétaire d’État aux Affaires européennes (1994), commissaire européen (1995-2000), et vice-secrétaire général de la Commission européenne (2202-2005). À Bruxelles, et dans toutes les capitales ouest-européennes, on a dû souffler un grand coup.

    Les marchés et l’Europe, tyrans des peuples européens

    Une fois de plus, l’Europe, cette Europe matérialiste du marché planétaire sans contrôle ni tutelle, donne la preuve de son absolu mépris des peuples, dont elle n’hésite pas à bafouer le suffrage, alors même qu’elle fait de la démocratie une religion et une éthique. On l’avait déjà constaté en d’autres circonstances. Ainsi, en juin 1992, les Danois votèrent « non », par referendum, à l’adhésion de leur pays au Traité de Maastricht. Que firent les Européens ? Ils dirent, en substance : « Pardon ? Nous avons mal entendu ». Et, après trois mois de menaces voilées, d’imprécations, d’objurgations, de harcèlement et de tractations, les Danois, fermement invités à revoter, se prononcèrent pour le « oui », lors d’un second referendum. Au printemps 2005, ce furent la France, puis les Pays-Bas, qui rejetèrent, par referendum, toujours, le Traité Constitutionnel Européen. Qu’à cela ne tînt : les dirigeants européens mirent aussitôt en chantier le Traité de Lisbonne, qui, signé en décembre 2007, reprenait l’essentiel du texte récusé. Aujourd’hui, les Italiens, qui avaient accordé leur préférence aux partis eurosceptiques sont floués de leur vote, puisqu’il est clair que le gouvernement Conte restera sous la coupe de Bruxelles. Les peuples ne sont admis à voter que pour plébisciter les décisions de leurs élites, qui savent, mieux qu’eux, ce qui est bon pour eux. On appelle cela, paraît-il, « la démocratie représentative ». En son temps, Léonid Brejnev appelait « souveraineté limitée » la faible autonomie qu’il laissait aux républiques socialistes d’Europe de l’Est, et qui excluait la possibilité, pour elles, d’abolir le régime communiste et de prendre leurs distances avec l’URSS. Présentement, en Italie, c’est vis-à-vis de l’Europe que les Italiens n’ont pas le droit de prendre leurs distances. M. Mattarella l’a bien dit : s’il a récusé la nomination de M .Savona au ministère de l’Economie, c’est parce que la politique de ce dernier allait « amener la sortie de l’Italie de l’euro », et que lui, en tant que président de la République, est « le garant du respect des traités européens ». Autrement dit, l’Europe passe avant la souveraineté de l’Italie, et a le droit de fouler au pied celle-ci et la liberté des Italiens. Les marchés et l’Europe sont les maîtres du jeu politique et les modernes tyrans des peuples européens.   

     Yves Morel

    Docteur ès-lettres, écrivain, spécialiste de l'histoire de l'enseignement en France, collaborateur de la Nouvelle Revue universelle 
  • Espagne : trop peu de monarchie et excès de parlementarisme ...

    Pedro Sanchez et Mariano Rajoy aux Cortes

     

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    L'Espagne souffre des pires inconvénients de la démocratie dans un contexte qui leur confère une puissance destructrice extraordinaire. Voilà ce qui caractérise le plus clairement la situation espagnole et ses  tout derniers rebondissements dont les échos inquiétants nous parviennent de Madrid et de Barcelone.

    Ce n'est pas que Mariano Rajoy qui vient d'être renversé, aura été un grand chef de gouvernement. Il quitte le pouvoir accusé de participer des pratiques de corruption qui touchent et discréditent la totalité de la classe politique espagnole, indépendantistes catalans compris. Et même orfèvres en la matière.

    Rajoy a affronté la crise catalane avec une apparente rigueur, parfois avec fermeté, mais une fermeté toujours tardive et singulièrement insuffisante. Sa politique s'est limitée à la mise en œuvre des dispositifs légaux et constitutionnels à sa disposition pour faire face aux crises qui se sont succédé à Barcelone, sans jamais en traiter les causes - qui rongent la Catalogne et l'Espagne de longue date et qui les amènent au bord d'une crise majeure. 

    Est-il permis ou non d'enseigner la haine de l'Espagne à la jeunesse catalane, dès l'école primaire et jusqu'à l'université ? Les maîtres d'école, les professeurs des facultés y sont-ils autorisés ? C'est ce qu’ils font depuis deux ou trois décennies. Les grands moyens de communication ont-ils le droit de marteler la même haine à longueur de temps auprès de la population catalane ? Fallait-il laisser les séparatistes catalans déclarés s'emparer sans contrôle de tous les postes clé de la société catalane, alors qu'ils n'y sont pas majoritaires ? Et même l’eussent-ils été ? Enseignement, administrations, municipalités, moyens de communication : était-il raisonnable qu'ils soient autorisés à les « noyauter » et à les diriger sans partage ? En bref, fallait-il leur reconnaître la liberté de mettre la main sur tous les leviers de commande, à la manière des coups de force des minorités agissantes ? Il ne semble pas que Madrid s'en soit jamais souciée, qu’elle ait jamais prononcé la moindre interdiction, pris la moindre mesure. Elle en a les conséquences.

    Et ces conséquences sont celles du jeu démocratique lui-même, règle suprême du système espagnol. Les jeux parlementaires en particulier, car Mariano Rajoy a été renversé par une majorité de députés qui ne se sont trouvés d'accord que pour son éviction. Le jeune Pedro Sanchez qui lui succède à la Moncloa est le chef du parti socialiste, sorti très affaibli des dernières législatives nationales et bien incapable de former à soi seul une majorité. Il lui faudra nouer des alliances. Ce sera sans-doute avec les cryptocommunistes de Podemos, et, comme ça ne suffira pas, ce sera aussi avec les indépendantistes basques et catalans. Et ce sera donc au prix de concessions à eux consenties, dont on ne sait ce qu'elles seront... Ainsi, comme dans les années 30 du siècle dernier, les effets pervers du parlementarisme jouent-ils de façon déterminante contre l'unité de l'Espagne.

    65547f00b476e17b221c3050b0e33243-espagne-le-gouvernement-catalan-investi-fin-de-la-tutelle-de-madrid.jpgPedro Sanchez succède à Mariano Rajoy le jour même où Quim Torra est investi à Barcelone, place Sant Jaume, en tant que président de la Généralité. Son programme n’est pas de faire reconnaître les droits légitimes du peuple catalan à préserver et développer les riches facettes de son identité historique. Ces droits lui sont déjà largement reconnus et sont amplement exercés. Au delà du raisonnable, sans-doute. Son programme est de conduire la Catalogne vers une impossible indépendance.

    L'on sait en Espagne et ailleurs que la Catalogne ne sera très probablement jamais indépendante. Elle ne l'a jamais été dans l'Histoire et Madrid ne l'admettra pas. L’appartenance de la Catalogne à l'Espagne ne dépend pas d'un vote de circonstance qui pourrait être bientôt contredit par un autre. Elle est d'un ordre supérieur. Intangible autant que les choses humaines peuvent l'être.

    Voilà ce que pense l'Espagne et que personne n'a eu le courage de dire avec franchise et clarté aux Catalans.

    Pas même le roi. L'Espagne souffre en effet de trop peu de monarchie et d'un excès, sinon de démocratie, car le roi est la personnalité politique la plus populaire du royaume, du moins de parlementarisme.

    Sachons que ni la France ni l’Europe n’auraient intérêt à ce que l’Espagne, une fois de plus, s’offre le luxe délétère d’entrer dans de nouvelles convulsions.  ■ 

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  • La Une du Figaro de ce jour : un euphémisme révélateur en titre ... La crise migratoire est bien la grande affaire explosive !

  • Où le site Atlantico soulève une vraie question .. A méditer ...

     

    « L'Allemagne est critiquée de toute part en Europe pour sa politique économique. A tel point que derrière la question de la sortie de l'Italie de la zone euro pourrait pointer celle de la possibilité d'une sortie de l'Allemagne.»

     

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    Dimanche 3 juin 2018
  • Rome, où l’on n’est pas au bout de ses peines

    Carlo Cottarelli

     

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    On se rappelle comment le processus électoral qui aurait dû amener le FIS au pouvoir en Algérie [les islamistes]  fut brutalement interrompu entre les deux tours des élections législatives algériennes de novembre 1991. Les démocraties européennes, France en tête,  préférèrent alors de beaucoup une dictature - qui allait être sanglante - plutôt qu'une république islamique à Alger et ne furent pas trop critiques envers la conjuration des militaires, des oligarques et des caciques du FLN qui conduisirent dans le secret de leurs délibérations ce coup de force tout sauf démocratique. Une horrible guerre civile s'ensuivit. A l’algérienne.

    Ce n'est pas exactement ce qui vient de se passer en Italie, où le processus électoral s'est déroulé jusqu'à son terme, a dégagé une nette majorité « antisystème », a conduit à la formation d'une coalition de gouvernement, a abouti à la désignation d'un président du conseil et à la formation d'un ministère issu du camp vainqueur du vote des Italiens.

    C'est à ce stade que le président de la république italienne a décidé d'interrompre le processus démocratique en refusant la nomination du ministre des finances que l'équipe formée dans la foulée des législatives avait désigné à ce poste. S'en est suivi le renoncement du président du Conseil pressenti – Giuseppe Conte - et l'appel du président Sergio Mattarella à un technocrate européo-mondialiste, ex-fonctionnaire du FMI - Carlo Cottarelli - dont le programme politique - s'il peut s'appliquer - est exactement à l'inverse du tout récent vote des Italiens. On ne pouvait mieux le défier et le braver.  Il est de notoriété publique que Jean-Claude Junker, Emmanuel Macron et Angela Merkel ne sont pas du tout étrangers à la décision du président Mattarella. Elle constitue bel et bien une interruption du processus démocratique en cours ou pour être plus clairs une violation de la volonté populaire.  

    C’est confirmer qu’il existe dans les instances où s’exerce – ou tente encore de s’exercer – le pouvoir en Europe une idéologie et une volonté politique supérieures à toute démocratie. 

    Sauver les institutions de Bruxelles, sauver l’euro dont l’avenir apparaît de plus en plus incertain, poursuivre l’entreprise mondialiste, multiculturaliste, immigrationniste et postnationale, que conduit l’oligarchie prétendant incarner aujourd’hui l’idéal européen – fort peu européen selon nous – telle est la réalité des événements en apparence singuliers, en réalité aisément explicables, qui sont en train de se dérouler à Rome. Rome, capitale d'une Italie vassalisée. Rome, où l’on n’est pas au bout de ses peines.    

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  • L’Union européenne inquiète [Communiqué de l'Action française]

    Giuseppe Conte 

    En date du 25 mai 2018,

    l'Action française a publié le communiqué suivant :

     

    Communiqué.jpgLes urnes ayant parlé, les prétendues élites donnent de la voix : le peuple, une fois de plus, s’est trompé. Il ne croit pas aux bénéfices de la mondialisation, il méprise les vertus de l’immigration, il est insensible aux charmes des diktats technocratiques de Bruxelles.

    Bref, les Italiens sont des sots, des gueux et des méchants, comme les Hongrois qui ont réélu Orban, les Allemands qui ont voté AfD, etc. Le suffrage universel, nous fait-on savoir, est devenu un instrument imprévisible et dangereux qui laisse le peuple décider, alors que le peuple doit obéir à ses doux maîtres européens. Ces mêmes maîtres qui manifestent leur compétence, leur ténacité et leur volonté face aux attaques de Trump, à la concurrence chinoise, aux menaces d’Erdogan et ne conçoivent l’exercice du pouvoir que comme le déni constant de la volonté des peuples. La chose est d’une ironie constante, et ce déni permanent de la légitimité de votes régulièrement exprimés en faveur de partis autorisés, dit assez la valeur véritablement accordée au Peuple, à la Démocratie et à la Liberté par tous ceux qui ont pourtant en permanence ces grands mots à la bouche !

    Il est bien trop tôt pour évaluer la pertinence du choix des Italiens, et nous ne pouvons en juger qu’en fonction de notre intérêt national français. Il est aussi trop tôt pour prédire l’échec ou le succès des politiques italiennes à venir, qui auront contre elles toute la puissance sans frein des technocrates de l’UE et des sectateurs européistes, qui ont montré avec la Grèce l’étendue de leur possible malfaisance. Le premier effet certain, pour la France, est qu’Emmanuel Macron, qui se rêve en refondateur d’une Europe encore plus méprisante des nations, est privé d’un allié. Le président français, à défaut de destin européen, va devoir se recentrer sur son pays et, au lieu de légiférer sur la vitesse des routes départementales, s’attaquer à ce qui constitue véritablement sa mission : le redressement national. Il est clair qu’il ne passe ni par la mondialisation, qu’il a constamment favorisée, ni par l’immigration, qu’il n’entend pas juguler, ni par la dissolution dans l’UE, qui est de plus en plus contestée par les Européens.  

  • Vive l'Italie ?

    Giuseppe Conte, le nouveau chef du gouvernement italien antisystème

     

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    Les fonctionnaires de Bruxelles, la structure de l'U.E., ses commissaires et ses parlementaires, ses conseils des ministres, ses sommets des Chefs d’Etats, ses techniciens, ses idéologues et ses négociateurs, ont cru que l'on pouvait infliger aux vieux peuples historiques, aux nations constituées de longue main, aux Etats membres, les pires avanies sans que rien ne se passe. 

    Ils ont cru que ces entités dites du passé, de l'Histoire, de l'ancien monde, resteraient sans voix, ne regimberaient pas. Ils ont pensé que les peuples molestés accepteraient sans mot dire d'être envahis de migrants et de produits chinois ou autres. 

    Exposée de plein fouet à ces fléaux, dans l'inconscience et le laxisme le plus général, ils ont eu l'Italie de la Ligue et de Cinq Etoiles. Elle fait trembler tout l'édifice, fragile comme ce qui est artificiel. 

    Que la Grande Bretagne ait quitté l'U.E. était un coup dur. On a poussé les hauts cris, lancé des anathèmes, brandi des menaces. Mais l'on savait bien que l'Angleterre, arrivée tardivement, n'avait jamais été vraiment tout à fait à l'intérieur de l'Union. Un pied dedans, un pied dehors, telle était sa réalité. La Livre sterling, la reine, le Commonwealth, le grand large, un lot de substantielles dérogations aux règles communes, la tenaient dans cette position de pays membre très spécial de l'Union. Son départ fut douloureux, mais pas vraiment surprenant. 

    Que les pays d'Europe Centrale, derniers venus de l'Union, aient assez vite fait entendre leur différence et bientôt leur opposition, devenue ultimement une fronde identitaire, on pouvait encore se rassurer. Ils sortaient du communisme et confinaient à l'arriération. On pouvait encore, façon d'en sortir indemnes, mettre leurs réactions sur le compte de ces deux malheurs, effets d’un temps révolu … 

    fig.jpgMais l’Italie ! L’Italie du traité de Rome, de De Gasperi, l’un des plus éminents pères fondateurs de l’Europe ! L’Italie de la toute puissante démocratie chrétienne d’après-guerre, d’Aldo Moro, Fanfani, Andreotti ! L’Italie de Montini, l’Italie des papes ! Tous grands européens, mondialistes, immigrationnistes convaincus, comme l’est le pape François, lui-même italo-argentin ! L’Italie, qui plus est troisième puissance économique de l’U.E., balayant tout cela, se dotant d’un gouvernement antisystème ! L’affaire, cette fois-ci est, comme le dit le langage diplomatique, de la plus haute importance. 

    Avec ses qualités et ses défauts, l’Italie est éminemment européenne et le restera. Mais elle vient de rejeter à grand bruit l’Europe de Bruxelles.   

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  • « Il n'y a jamais eu autant d'antifascistes depuis que le fascisme a disparu » ... Analyses de L'historien Frédéric Le Moal

     

    2293089609.14.jpgAu fil de cet entretien avec Eugénie Bastié [Figarovox, 4.05], l'historien Frédéric Le Moal, qui publie une importante Histoire du fascisme (Perrin) revient sur la définition d'un mouvement politique dont le retour fantasmé est invoqué à tort et à travers. Il établit la généalogie intellectuelle d'une doctrine qui puise ses sources dans l'imaginaire révolutionnaire. Telle est, en effet, la thèse de Frédéric Le Moal et, en tant que telle, peut-être la systématise-t-il à l'excès, encore qu'il la nuance par endroits à juste raison. Maurras a-t-il sous-estimé le caractère révolutionnaire du fascisme italien comme le pense Frédéric Le Moal ? Encore faudrait-il commencer par se demander si lui-même, comme déjà indiqué, ne le surestime pas. D'autre part, Maurras avait tout de même formulé à l'encontre des doctrines fascistes une objection de fond : « Comment ne voient-ils pas que la famille est antérieure à l'Etat ? ».  Enfin, Frédéric Le Moal signale à juste titre les sérieuses raisons de politique extérieure qui ont joué dans l'esprit de Maurras. Tenir l'Italie éloignée de l'alliance allemande était sa politique. Une politique que la France n'a pas suivie, malgré les avances répétées de Mussolini. Erreur - ou trahison - qui a coûté fort cher à la France et à la paix. Pierre Debray nous avait beaucoup intéressés naguère en publiant un article dont le titre était : « Le fascisme est passé » . Qu'il soit une forme politique du passé est le point où nous rejoignons les analyses de Frédéric Le Moal.   LFAR

     

    frédéric-le-moal-1-1024x680-740x480.jpgLe climat est à la dénonciation d'un «retour du fascisme», notamment par des groupuscules d'extrême-gauche qui s'autoproclament « antifas ». Que vous inspire cette crainte ? Le fascisme en tant que mouvement politique est-il mort ou peut-il renaître de ses cendres ?

    Si je voulais répondre par une boutade, je dirais qu'il n'y a jamais eu autant d'antifascistes depuis que le fascisme a disparu. Plus sérieusement, je considère que le fascisme est mort en tant qu'idéologie de masse, et ce pour plusieurs raisons. La première vient bien sûr des horreurs de la Seconde Guerre mondiale et du cortège de tueries auxquelles le nazisme et son comparse italien ont associé leur nom, ce qui provoque un rejet total. Ensuite le fascisme a constitué une réponse à plusieurs problématiques qui ont complètement disparu de nos jours : la crise de la modernité libérale de la fin du XIXe siècle, le problème de l'intégration des masses dans des systèmes politiques encore peu démocratiques, le cataclysme qu'a constitué la Grande Guerre (les fascistes, c'est la génération du front qui prend le pouvoir), la peur du bolchevisme et la crise de l'après-guerre. Tout cela a disparu dès 1945. Certes il existe encore des groupuscules se réclamant haut et fort du fascisme mais ce sont justement… des groupuscules ! Nous faisons face à de nouvelles problématiques, à de nouvelles contestations qui n'ont rien à voir avec celles du fascisme. Il faudrait juste faire un effort sémantique.

    Pourquoi selon vous la peur du retour du fascisme fait-elle tant recette (plus que le retour du nazisme ou du communisme) ?

    Personne aujourd'hui ne peut croire à une résurgence du nazisme et le communisme bénéficie d'une telle indulgence mémorielle qu'il n'effraye pas ou guère. Reste le fascisme et surtout l'antifascisme dont la gauche s'est emparée dès les années 1920. En outre, comment l'antifascisme pourrait-il vivre sans le fascisme ? Ce combat est un puissant instrument d'instrumentalisation politique et un formidable levier de mobilisation, encore de nos jours. Enfin, une fois l'étiquette fort pratique et facile de fasciste accolée à l'adversaire politique, plus besoin de polémiquer avec lui. Il est enfin plus facile d'insulter de fasciste un adversaire que de réfléchir à son idéologie.

    Dans votre livre « Histoire du fascisme » (Perrin) vous vous intéressez à la nature du fascisme italien. Est-il possible de donner une définition précise de ce mouvement ?

    C'est en vérité très difficile. Depuis son émergence en 1919, bien des historiens, des politologues, des philosophes ont tenté d'y voir clair dans ce véritable kaléidoscope qu'a été le fascisme, vaste mouvement recrutant à l'extrême-gauche et à l'extrême-droite. On peut pourtant tenter d'avancer quelques éléments : un mouvement révolutionnaire et donc totalitaire, qui unit socialisme et nationalisme, anticommunisme et antilibéralisme, visant à créer un homme nouveau sous la férule d'un État tout puissant pour engendrer une communauté nationale unie, purgée de ses ennemis intérieurs et militarisée, avec un programme d'expansion guerrière.

    Contrairement aux idées reçues, vous expliquez dans votre livre que loin d'être un mouvement conservateur, le fascisme porte un idéal révolutionnaire … En quoi ?

    Jamais aucun fasciste, et surtout pas le premier d'entre eux, ne s'est considéré comme un conservateur et encore moins un réactionnaire. La plupart des chefs avaient commencé leur engagement politique dans les mouvements de l'extrême-gauche socialiste, marxiste, anarchistes, etc. Et ils ne renièrent jamais ce passé. À leurs yeux, le marxisme en étant matérialiste ne correspondait pas à la soif d'idéal que porte chaque homme en lui. Le leur a été celui d'une révolution avant tout anthropologique visant à créer un homme nouveau, un guerrier patriote par élimination de l'esprit bourgeois fait de lâcheté, d'égoïsme, de goût de l'argent et de trahison. Il s'agissait, sans remettre en cause la propriété privée, de mettre fin au capitalisme libéral par un système corporatiste où l'État prendrait le contrôle de l'économie. L'exaltation de la romanité et de ses vertus guerrières, la mise en place d'un ordre moral pour différencier l'homme fasciste du bourgeois décadent, l'hygiénisme, le corporatisme, l'anticléricalisme et l'antichristianisme : autant de symptômes d'un projet de rupture avec l'ordre ancien que le grand capital, l'Église et la monarchie incarnaient. Un projet en fait issu de la modernité.

    Vous allez même jusqu'à faire du fascisme un mouvement héritier des Lumières…N'est-ce pas exagéré ?

    Vous évoquez ici un point capital qui renvoie le fascisme à sa nature révolutionnaire et à son lien avec la Révolution française. Le grand historien italien Renzo de Felice a été le premier à mettre en avant ses racines jacobines et rousseauistes. Réalité encore difficile à admettre en France et pourtant…

    Les Lumières constituent la première révolution anthropologique moderne car elle a coupé l'homme de son lien avec Dieu. Devenu de la simple matière, on peut agir sur lui, le remodeler, le rééduquer pour en faire un homme parfait. Le fascisme n'est pas un mouvement anti-Lumières pour la bonne et simple raison qu'il refuse de croire à la nature inaliénable de l'être humain qui est réduit à de la cire qu'on peut malaxer. Mussolini utilisait d'ailleurs très souvent la métaphore de l'artiste pour parler de son œuvre politique. Cette tentation démiurgique fait donc clairement du fascisme un mouvement appartenant à l'univers de la gauche révolutionnaire.

    L'héritage de la pensée de Rousseau est très clair dans le fascisme: la volonté générale et nationale qui annihile les libertés individuelles, le rôle du législateur et de l'État dans la naissance du citoyen modèle, la puissance du sentiment national transformé en amour pour la patrie qui exige le sacrifice ultime, l'union du pouvoir politique et du pouvoir religieux au bénéfice du premier - d'où l'installation d'une religion civile - la haine pour le cosmopolitisme supposé des riches.

    Le fascisme a bien des points communs avec la Révolution française dans sa phase jacobine (j'insiste sur cette nuance car les fascistes rejetaient bien sûr l'héritage libéral de 1789) jusque dans ses accents xénophobes de 1793, le soutien de la petite bourgeoisie, l'association de la nation et de la révolution introduit en Italie par Bonaparte et exaltée par le Risorgimento. S'il existe une cohérence dans le fascisme, c'est bien cet héritage. Juste un exemple éclairant : deux régimes ont introduit un changement de calendrier: la Convention et l'Italie fasciste !

    On sous-estime souvent le fascisme italien, en faisant un totalitarisme d'opérette, moins sanglant que le nazisme. Doit-on le considérer comme un véritable totalitarisme ?

    Sa nature totalitaire a été longtemps niée, notamment par Hannah Arendt alors que le mot est né en Italie dans les années 1920 ! Les travaux de Renzo de Felice et surtout d'Emilio Gentile l'ont mise en pleine lumière. Totalitaire parce que révolutionnaire, le lien de cause à effet est fondamental. Le régime mit en place des structures d'encadrement politique, notamment de la jeunesse car, selon Mussolini, c'était à l'État et non à la famille d'éduquer les enfants. Il le dit en 1929: « Dire que l'instruction revient à la famille, c'est dire une chose qui est hors de la réalité contemporaine. La famille moderne, assaillie par les nécessités d'ordre économique, accrochée chaque jour à la lutte pour la vie, ne peut instruire personne. Seul l'État, avec ses moyens en tout genre, peut assumer cette tâche.» Difficile ne pas y voir une continuité depuis les Lumières et les Jacobins dans la volonté de modeler les esprits par l'éducation étatique.

    Pour autant, je le qualifie de totalitarisme de basse intensité car le niveau de terreur est très faible, l'emprise sur le société relative et les contre-pouvoirs nombreux : le roi, les évêques et le pape, les industriels du nord. Or, il existe aujourd'hui une tendance à aggraver les aspects violents du fascisme. Au rythme où vont les choses ils dépasseront bientôt ceux du Troisième Reich… Incontestablement ils ont existé et ce dès la sanglante épopée squadriste. Et je ne parle pas de l'effroyable époque de la République Sociale de Salò où le fascisme républicain, libéré de ses entraves, s'est déchaîné y compris contre son propre peuple. Mais on ne trouvera ni d'Auschwitz ni de Goulag en Italie.

    On parle beaucoup en ce moment du retour de Maurras, dont on commémore le 150e anniversaire. En quoi le fascisme italien se distingue-t-il de la tradition de l'Action française ?

    Maurras ne cachait pas son admiration pour le régime fasciste, autoritaire, nationaliste, évoluant dans un cadre monarchique, bien qu'il fût l'expression d'un nationalisme d'expansion, agressif, conquérant, ce que n'était pas l'Action française. De surcroît, la latinité pouvait être un élément de cohésion entre les deux pays contre l'Allemagne. Maurras a donc été un partisan convaincu de l'alliance franco-italienne contre le Reich hitlérien. J'ajouterai qu'il avait compris le danger totalitaire à l'œuvre derrière la restauration de l'État ce qui ne manquait pas de l'inquiéter. Mais, à mon avis, il en sous-estimait le caractère révolutionnaire.   

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    Frédéric Le Moal, docteur en histoire (Paris IV-Sorbonne), professeur au lycée militaire de Saint-Cyr et à l'institut Albert-le-Grand. Il publie « Histoire du fascisme » (Perrin, 421 p, 23 €)

    Propos recueillis par Eugénie Bastié

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    Eugénie Bastié

    Auteur, - Journaliste Débats et opinions

  • Le président de la République au pied du mur s'obstinera-t-il ?

     

    En deux mots.jpgQue fera le président de la République lorsque ses grandes conceptions – l’européenne et la mondialiste - finiront par buter sans retour contre le mur des réalités ? S'obstinera-t-il à courir après des solutions impossibles et caduques ou sera-t-il capable de tirer les conséquences de la situation telle qu'elle est vraiment ? Sera-t-il suffisamment souple d'esprit, aura-t-il assez de lucidité et de volonté réunies, pour redéployer sa politique - celle de la France -  la redéfinir de sorte qu'elle soit applicable, selon le vieux précepte qui veut que la politique ne soit rien d'autre que l'art du possible ? C'est en soi une question intéressante pour l'observateur de l'histoire politique en train de s'écrire. Elle est cruciale pour qui n'est pas indifférent au sort de la France, de l'Europe et du monde. 

    Cet homme jeune, cultivé, volontaire et avide de réaliser se condamnera-t-il longtemps - toujours ? - à une fidélité inféconde aux idées chimériques que de fumeux aînés lui ont inculquées ? Ou opèrera-t-il ce retournement réaliste qui lui sauverait la mise et pourrait donner â la France, à l'Europe, une politique salvatrice ? Comment le savoir ?

    Il semble bien en effet que nous nous trouvons à l'un de ces tournants de l'histoire où les cartes se rebattent et où le jeu reprend sur des bases renouvelées.

    Voyons ! Du Brexit aux élections italiennes qui viennent d'aboutir à la formation d'un gouvernement antisystème à Rome, en passant par la constitution du groupe des pays de Visegrad, par l'essor de l'AfD en Allemagne, par la présence de Marine Le Pen au second tour de la présidentielle française, et par le vote autrichien, il est clair que le rejet des institutions de Bruxelles par les différents peuples d'Europe, va croissant, comme une déferlante qui finira par les recouvrir. Fonctionnaires bruxellois, tremblez pour vos sinécures ! Il n'y a plus grand monde pour les défendre. Leur discrédit est grand, quasi général. Leur Europe se défait, malgré qu'ils en aient. Une Contre Europe s'organise hors des institutions technocratiques de Bruxelles. Une Europe réelle face à une Europe légale. 

    Quant au couple franco-allemand qui est en tout cas le seul vrai moteur de toute construction européenne, il est clair – nous l’avons dit souvent - qu'il se disjoint. Ce n'est pas qu'on le veuille consciemment des deux côtés du Rhin. C'est seulement qu'il arrive un jour où quelques données objectives essentielles se chargent de défaire ce dont on avait longtemps rêvé et fait semblant de pratiquer. Alors, après les sourires de convenance et les accolades fraternelles, les mots fusent.  De sourds reproches et des impatiences jusque-là contenues finissent par s'exprimer. Ainsi d'Emmanuel Macron qui trouve qu'Angela Merkel est toujours trop lente à décider. Alors que tout simplement elle n'a ni l'envie ni le pouvoir de le suivre vers plus de fédéralisme européen. Plus amer encore, Emmanuel Macron fait remarquer que les bénéfices des uns font les déficits des autres. Cruel reproche qui touche au cœur d'une terrible disparité entre les deux nations, celle de leur commerce extérieur. A quoi s'ajoutent l'excédent budgétaire allemand et le déficit français.

    L'Allemagne quant à elle, a deux fermes résolutions : ne rien céder de sa souveraineté et ne pas payer pour les autres davantage qu'elle ne le fait déjà. Ou moins s'il se peut. Elle n'est tout de même pas assez puissante pour être l'hégémon dont l'Europe aurait besoin pour se constituer en État mais elle restera dominante et, en tout cas, souveraine, soyons en assurés. Macron n’y changera rien.

    Le délitement structurel du couple franco-allemand obère donc l'avenir de l’U.E. au moins autant que la montée des populismes dans presque tous les pays de l'Union.

    Du reste, si le fossé se creuse entre la France et l'Allemagne, il se creuse aussi entre cette dernière et ses voisins de la Mitteleuropa :  Autriche, Hongrie, Pologne, Tchéquie, Slovaquie, etc. En gros, d'ailleurs, l'ex-empire des Habsbourg en quelque sorte reformé. L'Europe bruxelloise craque aussi à l'Est ...

    Que l'on ne se méprenne pas : ce rejet ne vaut pas hostilité à l'Europe en tant que telle. Il y a, à vrai dire, au sein des peuples européens, fort peu d’opposants à l'idée d'Europe en soi. Au contraire. Le reproche des peuples est bien plutôt dirigé contre le cosmopolitisme, l'universalisme, le multiculturalisme, le libre-échangisme sans frein ni limites de Bruxelles. En matière de politique migratoire comme en matière d'ouverture de l'Europe aux quatre vents du mondialisme économique et financier. A bien y regarder, ce qui est reproché aux instituions de Bruxelles est bien plutôt de n'être pas vraiment, pas assez, et même fort peu européennes. Les nations d'Europe veulent simplement rester elles-mêmes, conserver leur souveraineté, leur identité, et ne pas être envahies de migrants. Mais, sur ces bases, elles restent ouvertes à une Europe des nations ou, plus précisément, des États. Ce chemin respectueux et réaliste reste ouvert. Ainsi pourrait se définir une nouvelle politique européenne de la France. Il est même possible qu’elle finisse par s'imposer d'elle-même - da se - comme la solution réaliste, le recours obligé. Nonobstant Macron, le fédéraliste.

    En même temps, l'irruption de Donald Trump sur la scène internationale semble sonner aussi le glas de la mondialisation programmée et paisible dont Jacques Attali avait transmis naguère le rêve à Emmanuel Macron. Trump est en train de briser la ligne imaginaire de cet horizon qu'Attali avait dit indépassable au jeune Macron. Sens de l’Histoire oblige. Attali a toujours attendu l'avènement d'une gouvernance mondiale. Trump renoue à l'inverse avec le protectionnisme et déchire les traités signés par son prédécesseur. Ses discours martiaux, ses drôles de gesticulations et de mimiques le font parfois ressembler à une sorte de Mussolini yankee, qui eût été le chef de la première démocratie du monde ... Mais laquelle ? 

    Hubert Védrine signale au contraire, il nous semble à juste titre, que cette évolution des États-Unis d'Amérique - America first ! - ne tient pas essentiellement à la personnalité de Donald Trump lui-même mais plutôt à une sorte d'État profond américain qui aspire à restaurer sa puissance. Fût-ce au détriment de ses amis et alliés européens. Les nations, on le sait bien, n'ont pas d’amis ; elles ont des intérêts.

    Trump met ainsi l'Europe au pied du mur - sous le joug américain dans l’affaire iranienne. Il la révèle à elle-même : malgré sa cohésion de façade, l'Europe n'est pas une puissance. Parce qu’elle n’est ni un seul peuple ni un Etat.  Seulement une communauté de civilisation.  Ce n'est pas la même chose. Emmanuel Macron s’obstine à le nier. En vain. 

    Ni Maurras ni De Gaulle ne s'y sont trompés : nous ne sommes pas encore sortis de l'ère des nations. Tant s'en faut.   

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Mariage du prince Harry ? Où est exposée sur Atlantico la spécificité du principe dynastique

     

    Atlantico : Entretien avec Jacques Charles-Gaffiot 

     

    2293089609.14.jpgPlus de trois milliards de personnes ont regardé à la télévision le mariage du prince Harry samedi dernier 19 mai à Windsor. Est-ce seulement pour ses aspects people ? L'auteur Jacques Charles-Gaffiot a décrypté pour Atlantico ce qui, derrière les ors et le cérémonial, fait en profondeur la spécificité de la monarchie, du principe dynastique, et qui n'a pas été dit. C'est en cela que cet entretien qui ne manque pas de profondeur, nous a intéressés.  LFAR     

     

    ob_8053b6_jacques-charles-gaffiot-les-rois-sou.jpgAtlantico - Le mariage du Prince Harry et de Meghan Markle aura lieu ce 19 mai dans la chapelle Saint Georges du château de Windsor. Derrière l'aspect frivole de l'événement, quelles sont les causes de l'engouement pour le mariage princier ? Faut-il y voir une référence dans les mots de Winston Churchill à la jeune Reine Elizabeth, reprenant ce que Walter Bagehot percevait comme crucial au sein de la Constitution, entre « the efficient » (l'efficient) et « the dignified » (solennel, honorable), séparant ainsi l’action du gouvernement du rôle de la Monarchie ?

    Jacques Charles-Gaffiot - Votre question résume assez bien toute la problématique dans laquelle se meuvent dans l’exercice de la souveraineté non seulement la monarchie anglaise mais également les différents Etats du monde, quel que soit finalement le régime auxquels ils appartiennent. Effectivement, derrière un aspect purement mondain qui demeure le prisme à travers lequel les médias scruteront dans ses moindres détails le mariage princier du 19 mai, se trouve exprimée une nouvelle fois la séduction exercée sur les gouvernés par le bon usage de l’autorité. Car il ne faut pas s’y tromper, si le côté « glamour » de cette union peut séduire le bon peuple par son aspect romantique et faire verser dans les chaumières des larmes d’ivresse, il faut donner une autre explication à cet engouement quasi universel suscité par ce mémorable événement.

    Nous ne parlons pas ici du « pouvoir » exercé par les gouvernants qui peut aller jusqu’à s’appliquer de manière coercitive sur leurs inférieurs, mais de « l’autorité », c’est à dire de ce penchant naturel qui pousse les gouvernés à reconnaître dans la personne investie de la souveraineté, une allégeance assumée, reconduite au fil des années et voire même au-delà.

    Comment donc se fait-il que des millions de téléspectateurs ou que des centaines de milliers de spectateurs acceptent de suivre bouche bée la retransmission d’une festivité familiale unissant deux personnes qu’ils ne rencontreront pour la plupart sans doute jamais ? 

    Certains parleront de la fascination exercée par un spectacle aussi chamarré que suranné :

    Le luxe, la grandeur ou « l’esprit de magnificence » pour reprendre l’expression chère à Madame de Genlis, gouvernante des princes de la Maison d’Orléans au milieu du XVIIIe siècle, peuvent à juste titre séduire une foule. Mais la pompe déployée au château de Windsor n’est en rien une pure ostentation. Cela serait du plus mauvais goût. Mais comme le note Félicité de Genlis, partie se réfugier en Angleterre durant la Terreur, « l’esprit de l’étiquette » … « paraît avoir toujours été de ménager avec un art infini et d’accorder les droits les plus étendus de la souveraineté avec la dignité de l’homme, accord délicat et difficile, mais qui peut seul donner au trône la majesté et tout l’éclat qu’il peut avoir ». C’est ainsi qu’il faut-il tout d’abord comprendre le minutieux bal paré organisé aujourd’hui tout au long de la journée. Chacun pourra percevoir, pour autant que les yeux sachent voir et les oreilles entendre, que la véritable grandeur sait naturellement élever tout ce qui l’approche et, qu’à l’inverse, chercher à rabaisser revient à détruire en manifestant un emploi des plus malheureux et des moins nobles de l’apanage de la puissance.

    Ainsi des millions de spectateurs sont-ils conviés à sentir en eux-mêmes cette sorte d’élévation, comme s’ils étaient invités à se rapprocher des acteurs de la scène. Mais au milieu de tant d’honneurs, de marques d’attention, ils observeront également l’énorme distance à laquelle se tient le souverain.

    Aussi captivante soit-elle, la fascination exercée par ces fastes royaux n’explique pas tout. Il faut oser le dire, la famille royale d’Angleterre et la Reine en particulier, sont aimées… dans les proportions dépassant largement civilités, déférences ou considération.

    Or, l’amour ne se force pas. Il convient donc de chercher à l’engouement de ce mariage princier une autre explication plus satisfaisante.

    On approchera plus facilement d’une réponse en considérant ce qui se passe chez nous, en France.

    Certes, Emmanuel Macron a donné à sa fonction une grandeur qui avait été bien mise à mal depuis longtemps, et que les médias, l’intelligentia post soixante-huitarde ont contribué à vilipender et à conspuer également durant des lustres.

    Même en faisant montre de réelles compétences, les chefs d’Etat français, à part peut-être le Général, n’ont jamais suscité pareille adulation. En France, tout au moins depuis la Ve République, les titulaires de la souveraineté se sont plu, en fait, à n’exprimer de leur personnage placé au sommet de la hiérarchie, que la moitié des qualités données à leur fonction, celle touchant à l’exercice du pouvoir en délaissant volontairement l’incarnation de l’autorité, assimilée à une forme déguisée de l’autoritarisme. Non par un choix délibéré, mais davantage parce que chefs de parti politique, aux regards de leurs administrés, il est devenu de plus en plus difficile de voir en nos Présidents de la République de véritables arbitres disposés à sacrifier l’ensemble de leurs intérêts personnels ou de leurs préjugés idéologiques dans le but de préserver les intérêts de la Nation et de garantir le règne de la Justice.

    On pourra en rire ou même s’en moquer. Mais que l’on s’attache un instant à observer l’attitude de la souveraine anglaise durant la cérémonie organisée ce matin. Comme elle en a fait la promesse en accédant au trône, toute sa personne et mise au service de la fonction qu’elle exerce. Toute sa personne… jusqu’au terme de son existence. Il ne s’agit pas là d’un don de soi fantaisiste pouvant être repris selon certaines convenances pour succomber au découragement ou se livrer à d’inavouables débordements.

    A une époque où le relativisme est de règle, l’exemple anglais force l’admiration et fait converger vers lui la masse des suffrages. Devant les caméras du monde entier, tout au long de cette nouvelle journée (comme hier et assurément comme demain) Elisabeth II accomplit son « métier » de Reine. Mieux, elle s’y consacre.

    Voilà le mot lâché…  Les nombreux commentateurs du mariage de Harry et de Meghan, trop aveuglés par les feux de la rampe, ne diront rien sur le sens le plus profond de ce spectacle offert au monde entier. Elisabeth II est un personnage sacré. Depuis son couronnement, autour d’elle, se déploie une véritable liturgie qui ne s’estompe qu’en privé. Ce cérémonial singulier s’exprime aujourd’hui et se déploie depuis les premiers préparatifs jusqu’au terme de l’événement : les ors, le faste, le rituel si achevé concourent à la beauté de la cérémonie. Mais comme l’enseigne Platon puis à sa suite Thomas d’Aquin, ce beau relatif conduit au Beau lequel conduit au Vrai. Pareille affirmation n’est plus dans l’air du temps. Et l’on entend déjà les rumeurs des contestataires, héritiers de 68, les indignations des sceptiques professionnels, les moqueries de la bien-pensance !

    Quant à la foule qui se bouscule à Windsor, comme tous ceux suspendus à leur poste de télévision ou devant leur tablette numérique, ils ont pressenti sans trop y réfléchir qu’il se passe, à l’occasion de ce mariage, quelque chose d’exceptionnel. D’instinct, ils ont mesuré qu’une dose de transcendance s’exhale dans l’exercice de la souveraineté. Et s’ils se comptent ce matin en millions d’individus n’est-ce pas parce que dans leur univers quotidien cette aspiration semble pouvoir renaître après son soigneux effacement et la tentative de son remplacement par l’instauration de pseudo principes qui au final demeurent vides de sens malgré tous les efforts déployés pour les faire apparaître comme des universaux.

    Une fois de plus, dans la chapelle de Windsor, l’authentique fidélité d’un souverain à son serment solennel conjugué à l’acte consécratoire reçu, contribue à faire avancer la construction de l’humanité d’une manière sûre et sereine.   

    Dans quelle mesure cette référence au « Dignified » peut-elle se conjuguer avec la personnalité de Meghan Markle, non pas en tant que roturière mais en tant que célébrité ? Quelles sont les conséquences d'un tel mariage entre famille royale et la célébrité ? 

    Jacques Charles-Gaffiot - Les ailes du papillon se consument toujours au contact du feu ! Il faut sans doute à Meghan Marke beaucoup d’efforts ou une prédisposition exceptionnelle pour évoluer dans la position qui est désormais sienne. On l’a vu avec Diana, l’échec est toujours possible. La fonction commande beaucoup de sacrifices. Cependant, arrivant à la sixième place dans la succession au Trône, le prince Harry peut « prendre le risque » de choisir une épouse selon son cœur. La « célébrité » toute factice de l’actrice de second plan peut disparaître rapidement pour donner naissance à une « célébrité » plus authentique, reposant sur des actes méritoires renouvelés.

    « Noblesse oblige » dit le dicton. L’obligation se mue en devoirs en face d’une noblesse aussi neuve. La nouvelle duchesse devra faire ses preuves. En s’aventurant sur des sentiers incertains, son époux, les membres de sa nouvelle famille et plus encore Elisabeth II sauront sans doute l’avertir à temps des dangers encourus. 

    Sur un temps plus long, qu'est-ce que la nouvelle génération a pu apporter à la famille royale ? Inversement, quelles sont les fragilités que cette nouvelle génération aurait pu provoquer ?

    Jacques Charles-Gaffiot - Ces fragilités sont bien sûr celles de la génération actuelle qui recherche la satisfaction immédiate de ses désirs en considérant de surcroît que tout étant relatif plus aucune valeur ne saurait s’imposer. 

    L’héritage de 68, la vacuité de certains systèmes de pensée très en vogue, le désir de tenter toutes les expériences, une conception fallacieuse de la notion de liberté, le consumérisme sous toutes ses formes compulsives, la jouissance sans entrave sont de véritables écueils.

    Mais la nouvelle génération peut apporter avec elle et insuffler au sein de la famille royale une série de forces nouvelles permettant une heureuse transmission de la charge détenue depuis trois siècles. Le long règne d’Elisabeth II a pu apporter avec le temps un certain conformisme dont les petits-enfants de la souveraine pourront s’affranchir tout en sachant garder à l’esprit la hauteur de la charge qu’ils doivent incarner. Le principe monarchique ne saurait s’affranchir de cette médiation qui lui est sans doute spécifique. La souveraineté s’incarne dans une personne. Il est heureux qu’elle puisse se manifester à travers un jeune couple entouré d’enfants. Mais en l’absence d’adéquation, le principe s’effondre rapidement et bientôt n’a plus de raison d’être. Dans ce cas, comme le mentionne Louis XVI dans son Testament, « n’inspirant plus le respect le monarque est plus nuisible qu’utile ».

    Enfin, la jeune génération a su acquérir une expérience sans doute plus diversifiée et plus riche qu’autrefois. Voilà un véritable atout pouvant permettre à ces jeunes princes et princesses de parvenir à rester fidèle à leur vocation dynastique tout en sachant mettre un pied dans l’avenir.   

    Jacques Charles-Gaffiot est l'auteur de Trônes en majesté, l’Autorité et son symbole (Édition du Cerf), et commissaire de l'exposition Trésors du Saint-Sépulcre. Présents des cours royales européennes qui fut présentée au château de Versailles jusqu’au 14 juillet 2013.

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  • L’Union européenne va-t-elle tenir le choc ?

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

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    Le sommet européen de Sofia (mercredi 16 et jeudi 17) aurait été, à en croire certains commentateurs, un succès. Dès jeudi matin, n’y tenant plus, M. Guetta claironnait sur France Inter : « De Sofia, les nouvelles sont bonnes. »

    Bonnes parce que les vingt-huit participants (Grande-Bretagne incluse) ont présenté une sorte de front commun contre M. Trump, faisant preuve d’une réelle fermeté au moins verbale à l’encontre de ce dernier, à qui ils ont fait savoir qu’ils entendent bien et répliquer à ses mesures commerciales hostiles par des contre-mesures, et rester dans l’accord passé avec l’Iran. On a même pu entendre M. Tusk, président du Conseil européen, déclarer que « grâce à lui [M. Trump], toutes nos illusions ont disparu ».  Ce n’est pas si sûr. La pire des illusions reste de se croire capable de résister, en l’état, c’est-à-dire sans une remise en cause radicale de la nature même de l’Union européenne, à l’hyper-puissance américaine. 

    Dans les deux dossiers qui fâchent, les taxes commerciales et l’accord iranien, on décèle déjà derrière l’unanimité de façade, les points faibles de l’Union. Ainsi, concernant la guerre commerciale qui semble se profiler (« L’Europe contre-attaque » titre Le Figaro de samedi 19), l’Allemagne, première puissance sofia.jpgéconomique de l’Union a aussitôt fait comprendre par la bouche même de Mme Merkel qu’il y a des limites et qu'elle préférera toujours un compromis avec celui qui est désormais son partenaire privilégié. Concernant l’Iran, c’est bien une illusion de penser que l’Union puisse avoir une véritable « capacité d’initiative diplomatique » (Le Monde, vendredi 18), le risque étant que son impuissance naturelle ne profite en fin de compte à d’autres, comme la Russie qui, elle, a forcément cette capacité-là : M. Riabkov, vice-ministre des Affaires étrangères russe a immédiatement approuvé le projet européen d’une très prochaine réunion à Vienne, confirmant ainsi les prétentions de Moscou. 

    Reste le pire pour l’Union européenne : la poursuite inexorable de son lent délitement qui donne aux propos tenus à Sofia un côté « surréaliste ». Il est illusoire de faire fond sur une construction idéologique à ce jour écartelée au sens propre : à l’ouest, les britanniques hissent les voiles pour en sortir ; à l’est, le groupe de Visegrad (Tchèquie, Slovaquie, Pologne, Hongrie) rejette catégoriquement l’immigrationnisme et le multiculturalisme de Bruxelles, rejoint en cela par l’Autriche ; au nord, les germano-scandinaves continuent de privilégier un « fétichisme » budgétaire (dixit M. Macron) qui leur profite aux dépens des autres ; au sud, la Grèce et l’Italie notamment sont dans une situation épouvantable, l’Italie venant d’opter pour une politique (économique, migratoire, étrangère, etc.) en contradiction totale avec les plans de Bruxelles, laquelle politique « fait trembler l’Europe » selon la presse française.

    Alors oui, si l’on en reste au plan de la communication, les nouvelles peuvent paraître bonnes pour l’UE. Au plan de la communication seulement. Faut-il s’en plaindre ?