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Actualité Europe - Page 36

  • Mathieu Bock-Côté : « Défense du Brexit »

     

    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpgLes appels à un second référendum reviennent à considérer que les Britanniques ne voulaient pas sincèrement quitter l'Europe. Parce que leur choix ne va pas dans le sens du progressisme diversitaire, il ne peut être sérieux et doit donc être effacé des tablettes. Mathieu Bock-Côté fait ici l'analyse inverse et nous n'avons aucun scrupule - au contraire - à la reprendre pour les lecteurs de Lafautearousseau : c'est aussi la nôtre. Mathieu Bock-Côté la mène avec rigueur et avec talent. [Le Figaro, 26.10].  LFAR

     

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    À mesure que mars 2019 s'approche, on comprend qu'une frange importante des élites européennes peine toujours à prendre au sérieux le vote des Britanniques en faveur du Brexit. L'appel récurrent à la tenue d'un nouveau référendum, censé corriger les résultats du premier, témoigne de cet état d'esprit : le 23 juin 2016, les Britanniques n'auraient pas eu toute leur tête. Ils auraient voté sous le coup de la passion en plus d'être manipulés par la propagande du camp eurosceptique, que ses adversaires accusent d'« europhobie ». Le vote en faveur du Leave était accidentel. On en comprend qu'il n'y avait qu'un seul choix possible et rationnel, et que celui-ci consistait à confirmer l'adhésion de la Grande-Bretagne à l'Union européenne.

    Ce refus d'envisager que les Britanniques aient voté en connaissance de cause est révélateur de la mentalité qui domine les élites mondialisées, décrétant le cadre national désuet et, surtout, dépourvu de légitimité. On l'avait déjà constaté en 2005, après le référendum français sur la Constitution européenne. Plusieurs accusèrent Jacques Chirac d'avoir fait une immense bourde en le tenant, dans la mesure où il reconduirait la légitimité d'un cadre national qu'il faudrait justement dépasser. Le philosophe Jürgen Habermas soutiendra ainsi que le seul référendum légitime serait à l'échelle de l'Union européenne (UE), pour constituer par cet acte fondateur un peuple européen. Le peuple devient ici une pure construction juridique sans épaisseur identitaire.

    La même chose a été reprochée au Brexit. Deux ans après le référendum, on constate à quel point il a révélé la nature ambivalente de la démocratie contemporaine. Quand la volonté populaire s'exprime en faveur du progressisme diversitaire, elle est louée. Mais quand elle embrasse une cause jugée en contradiction avec le « sens de l'histoire », on la désavoue et, surtout, on veut l'étouffer. La souveraineté populaire est vidée de sa substance. Il ne s'agit plus que d'un mécanisme vicié qui consacrerait la tyrannie de la majorité et l'hégémonie politique des catégories sociales retardataires. Elle ne devrait pas permettre les régressions historiques comme le Brexit. Cette interdiction s'applique aussi à toute volonté de renverser les innovations « sociétales » ou de redéfinir les « droits » qui ont été octroyés au fil des ans.

    La dénonciation du Brexit fait ainsi écho à celle des « populisme s», un terme servant essentiellement à pathologiser la souveraineté populaire lorsqu'elle entre en dissidence avec le régime diversitaire. Dès lors que la question du régime resurgit, l'espace démocratique se resserre. Les partis et mouvements qui adhèrent à l'idéologie diversitaire et postnationale sont accueillis favorablement dans la conversation démocratique. Les autres sont assimilés à la lèpre, pour emprunter la formule désormais célèbre d'Emmanuel Macron. Qui entend arrimer la démocratie au cadre national bascule dans le camp de la réaction et sera à bon droit traité comme l'ennemi public, et peut-être même comme ennemi de l'humanité.

    XVM927a970e-bd5f-11e8-b260-bfef21ea63e5.jpgDans ce contexte, on pouvait s'attendre à ce que les élites britanniques fassent tout pour neutraliser le résultat du Brexit. Et pourtant, Theresa May a décidé de respecter la volonté populaire, en la considérant non pas sur un mode anecdotique mais historique. Si elle peine à conserver l'unité d'un Parti conservateur travaillé par des courants contradictoires sur la question européenne, elle garde le cap. Les modalités de la rupture restent à préciser: on ne détricote pas facilement des accords tissés au fil des décennies. L'UE s'est construite de telle manière que plus on s'y engage et plus il devient difficile de s'en désengager. Sans le moindre doute, le Brexit entraînera quelques turbulences, mais l'histoire s'écrit rarement en ayant pour trame sonore une musique d'ascenseur. La restauration de la souveraineté nationale d'un pays n'est pas une décision administrative ordinaire.

    Qui dit Brexit ne dit pas nécessairement Frexit. La Grande-Bretagne, depuis toujours emportée par le grand large, n'a pas le même rapport avec le continent que la France. Les deux histoires ne sont pas interchangeables. Toutefois, le référendum britannique a confirmé l'importance vitale de la nation, qu'on ne saurait tenir pour une simple construction artificielle facile à démonter, comme veut le croire une certaine sociologie. Les nations sont des réalités historiques aux racines très profondes et qu'on ne saurait déposséder de leur souveraineté sans provoquer chez elles une réaction vitale, surtout quand l'histoire redevient tumultueuse. On ne saurait non plus les humilier sans les pousser à la révolte. Le Brexit, de ce point de vue, peut servir de rappel: ou bien l'Europe sera gaullienne, et saura respecter la diversité des peuples qui la constituent, ou bien elle ne sera pas. Ou alors, elle ne sera plus l'Europe. 

    Mathieu Bock-Côté        

    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017). 
  • "Cette" Europe ? Sûrement pas ! Mais, Vive l'Europe des Nations, des Patries !...

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  • Macron, le poids plume de l’Europe

     

    Par François Marcilhac
     

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    L’essentiel, aujourd’hui, ce sont, sur fond de Brexit, les élections européennes qui se profilent — seules élections prévues en 2019. On sait combien nos compatriotes, comme la plupart des autres peuples européens, les boudent d’ordinaire, tout simplement parce qu’ils ne perçoivent pas, à raison, la légitimité des députés européens, à tort, leur pouvoir de nuisance.

    Or, si ces élections revêtent pour Macron une telle importance, c’est pour plusieurs raisons, tant de politique intérieure que de politique internationale, ce qui est normal, puisque l’enjeu européen est transversal.

    Macron s’est tout d’abord aperçu, assez rapidement, être le seul Européen, non seulement en France, où le parti de l’étranger domine largement le pays légal et les médias, mais plus encore en Europe même, d’où son échec à persuader nos partenaires de l’intérêt de listes européennes et non plus nationales. Merkel est d’ailleurs généralement restée de marbre face à toutes ses avances vers plus un plus grand fédéralisme, qui impliquerait, pour l’Allemagne, plus de responsabilités et donc de sacrifices, notamment financiers.

    bbff2c26f8d366410a165eb54b119d5b-budget-europeen-l-association-regions-de-france-tire-la-sonnette-d-alarme.jpgElle n’a jusque-là accordé à Macron, notamment sur la question de doter la zone euro d’une capacité budgétaire et d’un ministre des finances, que des satisfactions purement verbales, particulièrement humiliantes. Manifestement, imposer en France des réformes réclamées par Bruxelles et Berlin n’a pas suffi à notre président pour imposer sa crédibilité, si bien qu’il ne pèse dans la négociation sur l’Union économique et monétaire que d’un simple poids plume… Et ce n’est pas aujourd’hui, où elle est dans son propre pays l’objet de vives critiques au sein de son propre camp – toujours l’effet du million de migrants qu’elle a imposés à son peuple –, que Merkel prendra un quelconque risque politique pour plaire à un jeune homme trop pressé qui prend ses désirs pour des réalités. Et dont l’aura internationale pâlit aussi vite qu’elle s’était mise à étinceler.

    Élections européennes : un enjeu crucial pour Macron

    images5MR7W2PR.jpgOn comprend que, dans ces conditions, Macron, dont la politique tarde également à séduire les Français, c’est le moins qu’on puisse dire au vu des sondages, ait décidé de faire de ces élections un enjeu crucial, espérant pouvoir ainsi redorer son blason auprès des Français comme auprès des Européens, en cas de large victoire des listes d’En Marche. D’autant – l’enjeu européen traverse nos politiques intérieure et extérieure – que différentes élections législatives, ces derniers mois, ont  montré ou confirmé un réveil des peuples européens, que les menaces du Parlement, comme de la Commission, contre notamment les peuples hongrois et polonais, n’ont pas su enrayer. C’est ainsi que le peuple italien a décidé lui aussi de reprendre son destin en main en portant au pouvoir une coalition qui refuse de se laisser intimider. Macron se considère dès lors en première ligne pour défendre « nos valeurs », ce qui, à coup sûr, n’est pas pour lui déplaire, même si notre Don Quichotte est condamné à des rodomontades qui ne préoccupent personne, mais dont les conséquences, du moins en Europe, est de faire apparaître la France dans toute son arrogance de donneuse de leçons universelles, notamment auprès des peuples italien et hongrois.

    Diviser les Français

    On comprend aussi pourquoi il est dans l’obligation de durcir le trait entre les progressistes, dont il se proclame le héraut, et les nationalistes, qu’il n’a eu de cesse, depuis son élection, dès son premier discours à Versailles, en juillet 2017, à celui qu’il a prononcé à l’Assemblée générale des Nations Unies en septembre dernier, de fustiger comme les ennemis même du genre humain.

    Certes, tous les nationalismes ne se valent pas et ne sont pas également enviables. En revanche, toutes les nations ont droit au respect de leur identité et de leur souveraineté. En dramatisant l’opposition du point de vue progressiste – c’est-à-dire du point de vue mondialiste –, Macron, en courtier de l’oligarchie internationale, cherche à faire peur aux Français, pour mieux les diviser.

    1480976824.jpgCar c’est bien sur les registres de la peur et de la division qu’il joue, quitte à exclure de la communauté nationale les Français qui voteraient pour des listes patriotes. On dira qu’il joue aussi explicitement la prudence, quitte à se faire taper sur les doigts par les associations immigrationnistes, en n’accueillant en France qu’à l’unité près, pour ne pas alimenter le populisme et le vote nationaliste, le nombre de migrants déversés par l’Aquarius en Europe ? Personne n’est dupe : nos frontières sont grandes ouvertes et le nombre des reconduites à la frontière des déboutés du droit d’asile toujours aussi insignifiant.

    Vers une majorité eurosceptique ?

    L’Europe légale, derrière Macron, aurait-elle vraiment peur d’une majorité eurosceptique au futur Parlement européen ? La chose ne serait évidemment pas pour nous déplaire même si une telle majorité risquerait bientôt de se fracasser sur le principe de réalité : les intérêts divergents des nations composant l’Union européenne, et dont la résolution ne demande pas d’être étouffés dans cette prison des peuples qu’est devenue l’Europe, mais réclame ces négociations et ces compromis bi- ou multilatéraux qui ont toujours fait les rapports entre États.

    Toutefois, une telle majorité permettrait peut-être de briser le carcan institutionnel. Car c’est évidemment de l’intérieur, surtout pour un pays de premier plan comme la France, qu’il convient de détruire l’Europe de Bruxelles. Quoi qu’il en soit, Macron fera tout pour éviter que la France ne participe de ce grand mouvement de libération des peuples qui se dessine peu à peu sur le continent. Sa dramatisation des enjeux favorise l’appel à une vaste coalition progressiste intégrant la droite d’En Marche – non seulement l’UDI, prête à manger à tous les râteliers, mais, chez Les Républicains, pour faire court, la sensibilité juppéiste – contre la résurgence de la peste brune. Il n’est pas certain toutefois que les cibles potentielles des sirènes macronniennes ne fassent pas la sourde oreille à un Macron continuant de dévisser dans les sondages, et préfèrent jouer leur carte.

    PE_680.jpgPeu importent du reste ces calculs politiciens. L’essentiel sera le nombre de députés patriotes que les Français enverront à Strasbourg, que ce soit, comme c’est peu probable, et  peu souhaitable, sur une liste unique, ou plutôt, sur plusieurs. Sachons en tout cas que la clique au pouvoir n’épargnera rien aux patriotes pour les empêcher de triompher :  puisqu’ils sont l’ennemi du genre humain, tout n’est-il pas permis à leur encontre, du harcèlement judiciaire à l’intimidation, de la lutte contre les prétendues fausses nouvelles à la persécution politique, voire l’élimination ou l’interdiction de listes déplaisant au pouvoir en place ?   

    François Marcilhac
    Directeur politique de l’Action française
  • Ce que nous apprennent les élections de dimanche en Bavière

    Le siège du parlement de Bavière, à Munich, au Maximilianeum

     

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    Que nous apprennent les élections de dimanche en Bavière que nous ne sachions déjà ?

    Elles confirment surtout une tendance qui semble faite pour durer et sans-doute aussi s'amplifier tant en Allemagne qu'en Europe en général et même aux États-Unis où, selon ce que nous apprennent les agences d'opinion, la popularité de Donald Trump est au plus haut à la veille des élections dites de midterm. Le cas du Brésil où l’l'idole Lula est en prison, le socialisme rejeté et un candidat ultra-conservateur en passe de remporter l'élection présidentielle, est, mutatis mutandis, de la même veine. Comme si une forme de contagion transatlantique dite « populiste » était en train de gagner l'ensemble de ce que fut l'Occident.  

    292px-Bayern_Wappen.jpgLes médias ont justement rappelé que la Bavière est le plus riche des länder allemands, le second pour la population (13 millions d'habitants) et le premier en superficie. Il est aussi le plus particulariste. Il célèbre ses anciens rois, notamment Louis II, le roi fou, francophile et sans-doute plus proche de l'Autriche des Habsbourg que du reste de l'Allemagne. De cette époque la Bavière conserve non pas la nostalgie de sa liberté passée mais la claire conscience d'être aujourd'hui comme hier cet « État libre de Bavière » qui fait certes partie de la République fédérale d'Allemagne mais sans rien céder de ses droits et de sa personnalité. Elle est dirigée par un « ministre-président » qui parle au chancelier allemand comme un principal à un autre principal.

    2089978290-franz-josef-strauss-RU7aglQkFNG.jpgOn se souvient de Franz-Josep Strauss qui fut le plus marquant de ces ministres-présidents d'après-guerre. Il fut aussi ministre de la défense de la République fédérale d'Allemagne au temps de la guerre froide, farouche patriote allemand qui exerça une forte influence sur la politique de son pays, mais aussi incarnation du conservatisme bavarois le plus pur et le plus déterminé.  Il fut surtout le patron de cette CSU qui vient de subir en Bavière le revers que l'on sait. Privée par le dernier scrutin de la majorité absolue qu'elle détenait depuis toujours - ou presque -  au landtag de Munich, elle devra composer. Avec qui ? Les socialistes ont péniblement recueilli 9% des voix, les verts autour de 18%, l'AfD 10,4% et les conservateurs bavarois eux aussi eurosceptiques et anti-immigrationnistes, 12%. Avec un peu plus de 37% des voix la vieille CSU - qui ne s'est maintenue à ce niveau que grâce à son opposition plus ou moins larvée à la politique d'Angela Merkel et au durcissement de son conservatisme - ne sera plus seule à gouverner la Bavière ; la CDU, dont la CSU est l’allié traditionnel, s'en trouve déstabilisée et plus encore la grande coalition d'Angela Merkel. Car la chute nationale du SPD se confirme en Bavière. Comme elle frappe d’obsolescence le socialisme européen à peu près partout. 

    John_of_Austria_portrait.jpgComme il tourne sur toute l'Europe, le vent tourne donc en Allemagne. Il ne comporte â cette heure aucune forme d'agressivité envers qui que ce soit en Europe. Mais un euroscepticisme grandissant, une conscience aigüe des intérêts économiques et financiers du peuple allemand, et un large rejet de l'immigration. Un vouloir-vivre proprement allemand qui rejoint le courant qui monte dans ses voisins européens. 

    Ce n'est pas la première fois dans son histoire que l'Europe trouve ou retrouve une forme d'unité face à la poussée de l'Islam. Après tout, l'homme qui commandait la flotte chrétienne qui vainquit les Turcs à Lépante était un jeune prince autrichien (photo), qui était infant d'Espagne.   

     

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Rien ne vient jamais à bout de la géographie et de l'Histoire, ces deux grandes forces génératrices

     

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    C'est la centième chronique « En deux mots ».

    Nous y prendrons quelque distance avec « l'actualité » immédiate, même si cette dernière est contrastée, foisonnante, souvent agressive et violente, dangereuse en bien des régions du globe ; et même en France où, sans menace extérieure comme par le passé - une exception dans notre histoire - se profile, pour demain ou après-demain, le choc intérieur des communautés qui y vivent, soit depuis fort longtemps, de sorte que le patrimoine qu'elles y ont constitué au fil de nombreux siècles leur appartient, soit que, venues d'autres continents, d'autres civilisations, elles s'y soient installées plus ou moins récemment et continuent d'y venir en masse, sans pouvoir ni vouloir pour un grand nombre,  s'y assimiler. Cette 51h9s2MHz7L._SX315_BO1,204,203,200_.jpgsituation française explosive, comme d’autres dans le monde, atteste que la théorie dite de la fin de l'Histoire, du moins telle qu'elle a été comprise et vulgarisée en « Occident », n'est pas pertinente. Elle est née de l'illusion de l'inéluctable généralisation à la planète entière du modèle marchand américain après l'effondrement du bloc soviétique. Un monde plat, métissé et post-national devait remplacer l'ancien ordre différencié des continents, des nations, des peuples et des cultures. On voit ce qu'il en est aujourd'hui, où l'Histoire ressurgit partout dans le monde avec son lot d'ambitions et de menaces croisées. 

    Emmanuel Macron a souvent répété, en contradiction avec la théorie de la fin de l'Histoire mais sans incidence sur sa politique, que l'Histoire est tragique.  Et cette tragédie, par-delà amitiés, alliances, et solidarités, qui sont toujours de circonstance, les nations la vivent finalement en solitaires, chacune selon sa destinée singulière.  

    Ni l'Histoire, ni les espaces géographiques où elle se déroule et qui la conditionnent, ni par conséquent, le politique, s'il s'affaiblit ici ou là, ne disparaissent vraiment ni tout à fait ni pour toujours.  

    вена.jpgCette considération simple est en définitive le fil conducteur de ces chroniques, qu'elles traitent de la France ou de l'Allemagne, toujours confrontées, de notre vieille ennemie héréditaire, l'Angleterre, de l'immense Chine ou de l'Inde immémoriale, de l'Espagne et de l'Italie voisines, nos turbulentes sœurs latines, de la Mitteleuropa (photo), si souvent martyre, de l'Amérique ou de l'Islam, de l'immigration et du terrorisme, ces fléaux qui sont ceux de notre temps, de Poutine, de Trump, de Merkel ou d'Emmanuel Macron ... 

    Même l'évolution extraordinaire des techniques à laquelle nous assistons, à laquelle que nous le voulions ou non nous participons tous, ne nous semble pas en réalité pouvoir venir à bout ni de la géographie ni de l'Histoire, ces deux grandes forces génératrices. La financiarisation du monde, l'asservissement du politique aux puissances cosmopolites de l'Argent, seraient en passe d'y réussir. Est-ce si sûr ? Regardons le monde, la résurgence de la Russie éternelle avec Poutine, les nationalismes asiatiques, chinois, indien, japonais et autres, le Brexit, l'Italie, l'Europe Centrale, le phénomène Trump et le formidable retour du national-conservatisme américain ... Et même allemand. Rien de tout cela ne sonne la fin de l'Histoire ou du Politique. 

    1084712-f-16-americain-decollant-base.jpgLes nouvelles technologies (les avions, internet, les téléphones portables chers à Michel Serres, les moyens de communication, etc.) rendraient l'anéantissement des frontières, des anciennes cultures, et des peuples, inévitable. Mais cela aussi est une vue partielle : les avions transportent les voyageurs et les masses de touristes ( « l'homme en bermuda »*) mais aussi les terroristes, les soldats et accessoirement les bombes, y compris celles d'Hiroshima et Nagasaki, ils servent à la paix ou à la guerre ; Internet est dans un cas analogue  : Il établit de multiples Cyberdjihad-hackeur-site-web-internet-informatique.jpgcontacts entre individus, peut concourir à leur ressemblance, à leur uniformité, mais aussi à la diffusion des idéologies, des propagandes, à l'exaltation des particularismes de tous ordres, à l'expression des nationalismes, les meilleurs et les pires, il en est de même de toutes les technologies modernes : elles sont ambivalentes. Elles n'annihilent ni le poids de l'Histoire ni celui de la géographie sur les réalités politiques contemporaines.  

    Leur vitalité et leur perpétuelle résurgence, c'est ce que ces chroniques tentent de mettre en lumière au cas par cas. Il ne nous semble pas que l'actualité les démente. Au contraire. 

    jeanfrancoimattei-brunovenzal.jpgAux désespérés de l'avenir - français et au-delà - nous rapporterons que Jean-François Mattéi à qui, considérant son profond pessimisme, nous avions demandé s'il ne voyait aucun motif d'espérer en l'avenir, après un temps de réflexion nous avait répondu - en philosophe : « Heidegger pensait qu'à la fin tout recommence » (photo). Bainville, autre grand pessimiste, en la matière, pensait comme Heidegger. 

    Nous poursuivrons nos modestes réflexions sur l'actualité dans ce même esprit.  

    * Expression de Philippe Muray  

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Mathieu Bock-Côté : « Racisme anti-Blancs, le déni »

     

    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpgLe rappeur Nick Conrad, et son clip PLB, pour « Pendez les blancs », s'inscrit dans la longue liste des provocations antifrançaises. Mais pour Mathieu Bock-Côté, cela ne suffit pas à ébranler la certitude de ceux qui ont décidé une fois pour toutes que le racisme était à sens unique.   [Le Figaro, 28.09].  LFAR

     

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    Le rappeur Nick Conrad était à peu près inconnu il y a quelques jours, jusqu'à ce qu'on découvre son clip PLB, où il en appelle à « pendre les Blanc s». La formule, d'une violence extrême, a provoqué sans surprise une vive polémique, qui s'inscrit dans la longue liste des provocations antifrançaises caractérisant l'histoire d'un certain rap. On se souvient de Monsieur R qui, en 2005, disait « baiser la France », voulait la traiter comme « une salope » en plus de « pisser sur Napoléon et le général de Gaulle », de Rohff dans Dirty Hous qui disait : « J'baise l'État depuis tout petit, j'ai pas encore craché » ou de Médine, plus récemment, qui s'enthousiasmait à l'idée de crucifier les « laïcards comme à Golgotha ». On pourrait en évoquer bien d'autres.

    Mais on passe ici du racisme pur et simple à l'appel au meurtre, ce qui pourrait suffire pour clore un procès qui n'est pas celui d'un genre musical mais d'une aversion pour la France qui vire à la haine raciale. L'abjection est totale lorsque est célébré l'assassinat des « bébés blancs ». Il y a là manifestement une quête de transgression qui doit aller jusqu'au bout d'elle-même et qui pourrait quitter un jour le simple domaine de la représentation « artistique ». On ne se vautre pas dans la tentation du mal radical sans réveiller la part la plus sombre du cœur humain. La civilisation construit des digues contre elle, mais certains font tout ce qu'ils peuvent pour les faire céder. Mais cela n'a pas suffi à ébranler la certitude de ceux qui ont décidé une fois pour toutes que le racisme était à sens unique et que les Blancs en étaient toujours coupables, et jamais victimes : c'est même un élément central du dogme multiculturaliste.

    À la télévision comme à la radio, les militants communautaristes, déguisés ou non en universitaires, expliquent inlassablement que le racisme est un système d'exploitation lié à l'expansion européenne et qu'on ne saurait l'en dissocier. En gros, le racisme anti-Blancs serait une impossibilité logique à démonter. On comprend le message : le mâle blanc disposerait ainsi du triste monopole du mal structurel dans l'histoire. Les médias accordent à cette thèse tordue un écho indéniable, comme s'ils souhaitaient la normaliser. Dans cet esprit, la haine raciale contre les Blancs, même si elle est condamnable, ne serait plus qu'un réflexe de survie, ou encore, pour ceux qui ont le plus de culot dans le déni, une manière d'appeler à l'aide contre une civilisation injuste envers ses minorités. C'est d'ailleurs la ligne de défense adoptée par Nick Conrad, qui a présenté sa chanson comme une entreprise pour réveiller les consciences devant le malheur historique du « peuple noir ». La racialisation des appartenances entretenue par une sociologie simpliste venue des États-Unis est désormais banalisée au nom de l'insurrection des banlieues. La France n'est plus une nation mais un territoire qu'on veut pousser vers la guerre des races.

    Nick_Conrad-PLB-400x330.jpgPuisqu'un tel clip est indéfendable et qu'il y a des limites à prendre n'importe quoi pour de l'art, le parti diversitaire et les spécialistes du déni à son service ont misé sur une autre ligne de défense: Nick Conrad serait un rappeur inconnu et il aurait eu vocation à le rester. Comme d'habitude, c'est la supposée « fachosphère » qui est accusée d'avoir sorti des marges une chanson qui aurait dû y demeurer pour monter de toutes pièces une controverse excitant ses obsessions idéologiques. Derrière la colère contre PLB, il n'y aurait rien d'autre qu'une xénophobie mal cachée, fouillant dans l'actualité pour trouver des faits divers l'alimentant. Nick Conrad ne serait qu'un pion dans la stratégie machiavélique de «l 'extrême droite ». C'est moins ce clip qui devrait inquiéter que la réaction qu'il suscite. C'est le même argument qui est utilisé après chaque attentat islamiste : une fois l'attentat condamné de manière plus ou moins rituelle, on s'inquiète surtout de la réaction qu'il pourrait susciter dans la population.

    Irebeus-renois.jpgl faudrait dire clairement ce qu'on se contente généralement de chuchoter : il y a dans une certaine jeunesse issue de l'immigration une haine de la France qui s'inscrit dans une mouvance plus générale de partition du territoire, où se multiplient les zones se dérobant à la fois à la souveraineté nationale et à l'identité française. Et ceux qui en appellent à la reconquête des territoires perdus de la France sont accusés de vouloir soumettre les banlieues au communautarisme majoritaire. Traditionnellement, le colonialisme consistait à vouloir imposer sa culture chez les autres. Dans la logique indigéniste et postcoloniale, cela consiste désormais à vouloir imposer sa propre culture chez soi. Le sens des mots est inversé. Dans cet esprit, la décolonisation n'arrivera à son terme que lorsque les Français seront considérés comme une communauté étrangère chez eux. 

    Mathieu Bock-Côté        

    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017)
  • Économie : 2019, l’année de tous les dangers en Europe

     

    Par Marc Rousset   

     

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    Le taux directeur américain vient d’être relevé par la Fed d’un quart de point supplémentaire, à 2,25 %, et devrait atteindre 3 % à fin 2019.

    Selon la BCE, une première hausse des taux pourrait intervenir à l’été 2019. Les taux ont donc commencé à monter et ce sont toujours eux qui ont été à l’origine des six dernières crises dans le monde, de 1980 à 2008. Depuis 2009, le S&P 500, l’indice américain le plus représentatif de la bulle des actions, a été multiplié par quatre, en progressant de 700 à 2700, tandis que l’indicateur préféré du célébrissime milliardaire américain Warren Buffet, le ratio capitalisation boursière/PIB, a atteint 1,4, dépassant sa valeur de seulement 1 pendant la crise des subprimes de 2008, et le niveau le plus élevé jamais atteint jusqu’à présent de 1,36 lors de la crise Internet de l’année 2000.

    Les élections européennes de mai 2019 vont faire l’objet de vives tensions car elles se présentent comme un référendum européen sur l’Union européenne, sur l’immigration, pro ou anti-Macron et Merkel. Il semble que les populistes s’acheminent vers une victoire écrasante qui va bouleverser l’Europe. Macron et Merkel, s’ils sont désavoués par les peuples, n’auront plus qu’à choisir entre le statut de zombie ou la démission. En Allemagne, la montée en puissance de l’AfD semble irrésistible puisque ce parti serait déjà le n° 2, avec plus de 18 % des votes, ayant dépassé le SPD avec, comme slogan leitmotiv, la démission de Merkel : « Merkel muss Weg ! »

    En France, Macron est en chute libre, avec un état de l’économie française de plus en plus préoccupant. Il n’y a pas que l’État souverain ; les ménages et les entreprises françaises affichent également des records d’endettement. Fin mars 2018, l’Hexagone affichait le ratio de dette privée le plus élevé de la zone euro, soit 131 % du PIB. L’endettement des particuliers atteint 93 % de leur revenu disponible, soit 58 % du PIB. Quant aux entreprises françaises, elles sont aussi les championnes de l’emprunt, avec un taux d’endettement qui représente 73 % du PIB, 56 % de la dette ayant été octroyés à taux variable, ce qui entraînera immanquablement des faillites en série si les taux augmentent. La charge de la dette française, malgré les taux d’intérêt ridicules actuels, soit 42 milliards d’euros, représente déjà le 2e poste du budget français derrière l’Éducation, et bien devant le malheureux budget croupion de l’armée française. La dette publique française de 2.300 milliards d’euros représente aujourd’hui une dette vertigineuse de 34.208 euros par Français, qui ne sera jamais remboursée.

    Il suffit de la faillite d’une seule banque telle que Deutsche Bank en Allemagne, UniCredit, Intesa Sanpaolo en Italie, avec trop d’obligations souveraines et de créances pourries à leur bilan, du défaut de l’Italie, de l’Espagne ou de quelques pays émergents pour qu’un krach boursier s’ensuive avec une augmentation des taux d’intérêt et une succession de faillites en série d’entreprises et de banques dans le monde entier.

    L’Italie est devenue la poudrière officielle de l’Europe, suite au budget trop dépensier de la coalition Ligue-5 étoiles. Les craintes d’une nouvelle crise du type grec en dix fois plus grand sont fondées. Le taux d’intérêt à dix ans de l’État italien vient de bondir jusqu’à 3,29 %, soit un écart de 2,80 % avec le taux d’intérêt des emprunts allemands.

    L’Allemagne est la grande gagnante de la zone euro, suite au laxisme socialiste décadent non compétitif de la France et des pays européens du Sud, avec ses excédents de biens exportés qui se traduisent par une créance à l’actif de la Bundesbank vis-à-vis des autres banques centrales européennes. Mais il s’agit d’une simple promesse comptable TARGET2 des autres pays de la zone euro de rembourser ultérieurement avec des surplus d’exportations de biens et services vers l’Allemagne. Encore faudrait-il s’assurer qu’il y aura effectivement, un jour, des excédents des autres pays de la zone euro vers l’Allemagne sinon, de gagnante, l’Allemagne pourrait alors devenir le « dindon de la farce ». En cas d’explosion de la zone euro, de banqueroute de la Grèce, de l’Espagne, de l’Italie et de la France, les créances TARGET2 de 1.000 milliards d’euros de la Bundesbank, soit environ la moitié du PIB annuel français, devraient normalement être payées en or ou en dollars par les banques centrales débitrices pour solde de tout compte, mais il est probable qu’elles ne seront jamais réglées par des pays tels que la Grèce ou l’Italie.    

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    Économiste
    Ancien haut dirigeant d'entreprise
  • Un météore dans le ciel politique français ?

     

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    Emmanuel Macron ne sera-t-il qu'un météore inattendu, très vite apparu et très vite disparu dans le ciel politique français ?

    La question est récurrente ces jours-ci à l'heure des mauvais sondages, des doutes et des départs plus ou moins fracassants, en tout cas indignes, parmi les plus proches du chef de l'État ; à l'heure des « affaires », qu'elles aient eu ou non l'importance que l'agitation des médias, des partis et des assemblées leur a conférée ; à l'heure des impasses - surtout l'obstination européiste qui ne conduit nulle part parce que personne ne veut vraiment du fédéralisme de Macron en 42854247_1714857268624358_8101024579067052032_n.jpgEurope ;  enfin, à l'heure de la rupture avec les Français sur quelques sujets qui touchent à leur être profond : l'immigration, le multiculturalisme, la repentance, le dénigrement de ce qui est français, les fréquentations douteuses, les photos inacceptables en fort mauvaise compagnie ; sans compter le chômage et la pauvreté ; en bref, à l'heure des déceptions qui font qu'entre Emmanuel Macron et les Français, en tout cas la plus grande partie d'entre eux, le courant ne passe pas ou plus.  

    On a fait quelque crédit au départ à cet homme jeune, brillant et audacieux, comme les Français les ont toujours aimés. Qui 54627661.jpgrecevait Poutine à Versailles et Trump sur les Champs-Elysées pour admirer et applaudir l'armée française. Qui fêtait ses quarante ans à Chambord... Dans l'ombre du roi-chevalier. Un vrai roi, celui-là, pas une apparence ... 

    Ce capital crédit - en attente de voir - consenti au jeune Macron d'il y a un an est donc largement entamé. Mais est-ce qu'il se trouve quelqu'un en position de le recueillir ? Les Français qui, sans savoir du tout qui il était, ont applaudi il y a un an au « dégagisme » opéré par Emmanuel Macron, comme un de ces coups d’Etat légaux dont notre République est coutumière, verraient-ils d'un bon œil le retour des politiques exécrés, évincés hier ? C'est plus que douteux. Les Français ne sont pas si sots. Une majorité considère que ces politiciens faillis ne feraient pas mieux qu'Emmanuel Macron. Ont-ils tort ? Reporteraient-ils alors leur attachement, leurs espoirs et même une certaine adhésion sur les partis dits populistes, en nombre suffisant pour les porter au pouvoir ? Cela aussi, pour l'heure, nous paraît douteux. 

    Alors quid ? Nous nous sommes de fait habitués à être gouvernés par des hommes qui sont en place par défaut. Sans réel consentement, sans adhésion, sans lien affectif quelconque. Nous sommes devenus une drôle de démocratie, si tant est que nous n’en ayons jamais été une. 

    En fait, avec Macron, les Français ont peu ou prou cru ou espéré en une sorte de changement de régime. En tout cas en un « autre chose », fût-il mal défini. Macron s’est gardé de les détromper. Au contraire. 

    Au bout d'un peu plus d'un an, ils constatent que presque rien n'a changé. Ils se disent comme jadis : « Non vraiment c'était pas la peine, non pas la peine assurément de changer de gouvernement ». Et ils retombent dans leur scepticisme, leur indifférence, leur morosité ou, s'ils sont lucides, leur inquiétude et leur colère. Les esprits simplistes se réjouiront ou se lamenteront, selon leur camp, qu'Emmanuel Macron « dévisse » comme il est dit dans les médias. C'est ne pas voir plus loin que le bout de son nez ... Le problème politique français passe largement le cas Macron, X ou Y. 

    laic.jpgLa question du régime n'a jamais cessé de se poser à la France depuis la Révolution, comme en témoignent les dix-huit régimes qu’elle a connus, dont cinq républiques. Cela, Emmanuel Macron lui-même l'a compris. Il l'a dit en termes explicites, inattendus et spectaculaires. Les premiers mois de son quinquennat ne sont, en creux, que l'illustration de ce manque de roi qu'il a en même temps diagnostiqué et tenté de combler dans la forme sinon dans le fond tant il est vain de chercher à concilier un principe et son contraire. Et, l'autre jour, Zemmour avouait considérer que le message républicain est désormais désuet. Macron est la preuve qu'un régime désuet peut s'inventer un renouvellement pour, quoique épuisé, durer encore un peu. Il semble bien que ce ne peut être pour très longtemps, ni pour de bien grandes choses ... Il finit d’ailleurs par arriver un jour ou même les petites deviennent difficiles.   

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  • Une Allemagne à l'avenir incertain ...

    Stuttgart, le château neuf 

     

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    Jacques Bainville avait visité l'Allemagne pour écrire à vingt ans son Louis II de Bavière (1900).

    Il en retira que tout en Allemagne - celle de Guillaume II - avait l'aspect d'une honnête maison de famille propre et bien ordonnée. L'Allemagne présente aujourd'hui encore cette allure générale qu'un siècle d’extraordinaires tribulations et de tragédies inouïes n'a pas vraiment modifiée. 

    Louis-II-de-Baviere.jpgAu temps de Louis II, l'industrialisation du pays était déjà largement en route et les technologies du XXe siècle s'installaient à grands pas.  Elles intéressaient Louis II comme tous les princes européens de son temps. Il les voulut à Neuschwanstein, son château des légendes germaniques. (que Maurras eût dites barbares) ...  Ces technologies, l'Allemagne allait savoir les exploiter à grande échelle au cours des décennies suivantes, et les développer jusqu'à l'excellence. Bainville a dit aussi, dans un contexte historique qui justifiait sa remarque, que l'Allemagne faisait l'industrie pour la guerre et la guerre pour l'industrie. N’agitons pas des peurs anachroniques : aujourd'hui, jusqu'à nouvel ordre, elle fait surtout l'industrie pour l'exportation. Elle y réussit jusqu'à l'exagération, sa marque de fabrique,  et en tout cas mieux que quiconque dans le monde. Chine exceptée. 

    Mercedes-Benz20S-Klasse20W26.jpgVisitez donc, si vous ne l'avez déjà fait, le musée Mercedes de Stuttgart. Tout un symbole. Vous y verrez d'abord un bâtiment ultra-moderne d'une esthétique acceptable, pure, dessiné par des architectes et des ingénieurs d'évidente compétence et de bon goût. Tout l'inverse du musée Guggenheim de Bilbao à qui l'on pourrait le comparer, laideur en moins, pour sa taille et ses volumes. L'intérieur retrace l'épopée de l'industrie automobile européenne à travers les réalisations Daimler-Benz et Mercedes, depuis les temps héroïques des premiers véhicules à moteur jusqu'aux IMG_0497.jpgplus récents modèles qui aujourd'hui inondent le monde, y compris les USA de Donald Trump lequel les menace des pires sanctions ... Le musée Mercedes de Stuttgart n'est pris ici que comme symbole de la puissance et de l'excellence de l'industrie allemande d'aujourd'hui. Esthétique comprise. 

    Côté ville, à Stuttgart, vous longerez les châteaux des ducs de Wurtemberg, l'un ancien, l'autre dit nouveau inspiré de Versailles, détruit pendant la dernière guerre, reconstruit après à l'identique, et vous croiserez une population nombreuse qui sait festoyer après l'effort, souvent vêtue de costumes ou même d'uniformes traditionnels, et qui vit selon ses racines, entre bière et vin, Danube et Neckar. Mais une population qui décroit en nombre et croît en âge ce qui est le véritable drame de l'Allemagne d'aujourd'hui et sans-doute bien plus encore de demain. 

    Cette évolution funeste s'apprécie si l'on peut dire d'un simple coup d'œil. Les beaux hôtels des bords du lac de Constance ou de La Forêt Noire ne sont plus habités de jeunes et fringants voyageurs mais principalement de vieillards plus ou moins valides qui viennent y user leurs forces déclinantes, y briller de leurs derniers feux ... Les plus « jeunes » y arrivent, à travers les routes boisées de Bavière ou du Bade, dans leurs voitures de collection de toute beauté qui ramènent aux temps anciens d'avant ou d'après-guerre. Celles-là même que l'on a admirées au musée Mercedes de Stuttgart... Nostalgie de la jeunesse, quand tu nous tiens ...! 

    Une partie non-négligeable de la réalité allemande d'aujourd'hui nous semble tenir dans cette dialectique : une puissance industrielle encore intacte face à un effondrement démographique sans analogue. Des entreprises encore dynamiques et insolemment prospères et une population vieillissante de retraités accrochés à leur épargne, veillant à sa préservation et à sa rentabilité. 

    picture.jpgL'Allemagne d'Angela Merkel, c'est à dire le grand patronat allemand, a longtemps cru pouvoir compenser ce déclin démographique par l'immigration. Derrière l'appel de la Chancelière à l'accueil d'un million et demi de migrants, il n'y avait pas que de bons sentiments. Il y avait aussi de gros intérêts. Réels ou supposés car les Allemands ont dû éprouver que tous les arrivants n'étaient pas des Turcs laborieux et qu'il ne serait pas si facile de les mettre au travail, à supposer qu'ils aient un métier. L'expérience - négative et amère à bien des égards - ne pourra pas, de toute évidence, être poursuivie ni renouvelée. Elle a déstabilisé la chancelière Merkel et fragilisé sa grande coalition ; elle a réveillé le sentiment national et identitaire allemand, à droite comme à gauche, car la gauche allemande a peu à voir avec la gauche française. Et pas seulement aux extrêmes : un homme comme Thilo Sarrazin, issu de l'établissement, n'en procède nullement. 

    L'Allemagne est donc - comme la France - à la croisée des chemins. Comme le nôtre, malgré de flatteuses apparences, son avenir est incertain. Elle entre dans une zone de risques et de turbulences encore difficilement identifiables mais réels. Et qui, bien-sûr, comme toujours, intéressent la France. C'est ce que nous avons essayé de montrer et de décrire simplement et bien partiellement à travers quelques choses vues Outre-Rhin.   

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  • Crises et populismes ?

     

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    Le Monde a titré il y a trois ou quatre jours : « la crise de 2008 a nourri le populisme » . Si c'est une découverte elle est tardive. Et l'on savait cela depuis bien longtemps. 

    Toutes les crises économiques, nourrissent les populismes. Les bons et les DnHtSPRXsAEk-yG.jpgmauvais. Elles les nourrissent à proportion de leur gravité. Le Monde a sûrement en tête ce que la crise de 1929 a produit ou du moins contribué à produire en Europe et ailleurs. La seconde guerre mondiale. C'est bien les souvenirs de cette dernière que le titre du Monde entend raviver. 

    La crise de 2008 a été surmontée par la création monétaire, rien d'autre. Et dans une quantité si considérable que la crise de 2008 - et le « remède » en question - pourraient bien en avoir préparé une autre d'une tout autre ampleur. On a simplement renvoyé les échéances à plus tard. Et l'on a continué de les gonfler démesurément. Ce qui n'a empêché ni le chômage de masse de perdurer, ni la croissance de rester faible, ni la pauvreté de s'étaler, ni nos infrastructures de vieillir considérablement, ni nos classes moyennes de s'appauvrir, ni les inégalités de se creuser éhontément,  dans des proportions inégalées dans l'Histoire. Etc. La crise a surtout nourri la crise ... 

    Mais il y a populisme et populisme. Entre lesquels les journalistes et les experts plus ou moins compétents ne distinguent pas. Populisme est un mot fourre-tout, sans définition précise, par lequel on désigne tout ce que l'on n'aime pas, que l'on réprouve, que l'on range dans le camp du Mal. Syndrome moralisateur oblige. On ne dialogue pas avec le Mal. Ces simplismes aussi commencent à vieillir, à lasser ... 

    Rapprocher allusivement les populismes d'aujourd'hui de ceux des années trente du siècle dernier, qui, en effet, conduisirent à la guerre, n'a d'autre but et d'autre effet que de discréditer, salir les populismes actuels. Les rendre « nauséabonds » selon la terminologie en vigueur. 

    Les populismes des années trente furent offensifs, guerriers, expansionnistes ou revanchards, ils tendaient à la guerre entre voisins, ou aux conquêtes coloniales.   Les populismes d'aujourd'hui, que la doxa condamne et que les politiques « progressistes » combattent, sont essentiellement défensifs. L'Italie, l'Autriche, les pays de Visegrad, et même les partis dits populistes, français, allemands, suédois ou autres, n'invitent aujourd'hui à aucune guerre européenne. Ils défendent leur identité, leurs traditions, leurs droits sur la terre où ils sont nés et avant eux leurs ancêtres depuis des lustres. Ils savent que cette terre leur appartient. Il y ont bâti une civilisation. Ce qui les motive et en un sens les unit, bien autrement que n'ont su le faire les fonctionnaires de Bruxelles, c'est leur refus d'une invasion étrangère massive venue d'Afrique ou d'Asie et qui implique leur mort. Ce qui les fonde et les unit c'est le rejet des masses de migrants déjà établis chez eux ou en route pour y venir. 

    Sans en avoir l'air, le Monde pratique là un très contestable amalgame. Pour effrayer, rappeler les mauvais souvenirs. Comme le fait aussi Emmanuel Macron qui se répand en déclarations alarmistes et accusatrices en ce sens biaisé - ce qui est nettement plus grave. Et ce sont des déclarations martiales pour le coup ! Feront-elles beaucoup de dupes ? Ce n'est même plus très sûr.  

     

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  • Dalaï Lama : « L'Europe appartient aux Européens »

     Conférence publique à Malmö le 12 septembre 2018
     
     

    Le Dalaï Lama a déclaré mercredi à Malmø en Suède que « l’Europe appartient aux Européens » et qu’à terme il était souhaitable que les réfugiés retournent chez eux « pour reconstruire leur propre pays ». 

    S’exprimant lors d'une conférence dans la troisième plus importante ville suédoise, qui abrite une importante population d’immigrés, le Dalaï-Lama, prix Nobel de la paix 1989, a souligné que l’Europe était « moralement responsable » lorsqu’il s’agit d’aider « un réfugié dont la vie est réellement en danger ». 

    lhassa.jpg« Recevez-les, aidez-les, éduquez-les... Mais à terme, ils doivent développer leur propre pays », a déclaré le chef spirituel du bouddhisme tibétain qui a fui en 1959 le Tibet pour s’exiler en Inde, à la suite de la répression par les autorités communistes chinoises d’un soulèvement tibétain. 

    Ces déclarations ne sont pas accidentelles. Elles reflètent une constante dans la pensée du Dalaï Lama. 

    Ce n'est pas la première fois, en effet, que le Dalaï Lama dit de telles choses sur le sol européen. En 2016, déjà, il avait évoqué l'arrivée massive d'immigrants en Allemagne et déclaré que « l'Allemagne ne peut pas être un pays arabe. L'Allemagne est l'Allemagne. »

    Alors, le Dalaï Lama mieux que le pape François ?  

  • Le Système a rattrapé Emmanuel Macron. Les velléités de verticalité et de grandeur ont fait long feu

     

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    Emmanuel Macron revient du Danemark (28.08). Il s'était peu avant rendu en Espagne (26.07) ; Il doit aller prochainement au Maroc (vraisemblablement en novembre). Ces trois pays sont des royaumes. L’Espagne et le Danemark sont deux des sept ou huit monarchies européennes. Le Royaume du Maroc est le seul État d'Afrique du Nord qui tienne debout.  

    4273019-le-president-de-la-republique-francaise-950x0-1.jpgAu Danemark, le plus sudiste des États scandinaves, le Chef de l'État est allé chercher, dit-on, un soutien à sa rêverie européiste qui n'en a quasiment plus.  Mais le Danemark, le plus paisible des royaumes, entend conserver son identité, sa souveraineté, et, dans un message de Noël qui avait surpris (2016) mais fut suivi d'effets, la reine Margrethe II avait mis en garde ses compatriotes contre les dangers d'un accueil massif de migrants*. Le Danemark durcit aujourd'hui sa politique migratoire jusque-là dangereusement laxiste. Nonobstant les consignes de Bruxelles. Les mises en garde royales, pour les Danois, ont prévalu.  

    1507107624.jpgLe cas de l'Espagne est différent, plus complexe. Elle est royaume depuis la nuit des temps. Si l'on additionne les années qu'ont duré ses deux républiques, fût-ce en comptant les périodes de guerre civile qu’elles ont connues et perdues, on ne dépasse pas la dizaine. Mais l'Espagne n'a jamais atteint le niveau français d'unité politique. Elle est aujourd'hui affaiblie par le séparatisme catalan et, le cas échéant, basque. La société civile espagnole est presque aussi dissoute que la nôtre et que celles de l'Occident en général.  Il n'empêche : l'Espagne a vécu quarante-trois ans de paix civile depuis que la monarchie y a été rétablie (1975), quatre-vingts si l'on compte la période franquiste. Les connaisseurs de l'histoire d'Espagne sauront que depuis plusieurs siècles une aussi longue période de paix civile ne lui avait pas été donnée. Sans son roi qui l'unit tant bien que mal, il est assez probable qu'il y aurait aujourd'hui une république à Barcelone, une autre à Bilbao et peut-être à Séville, sans compter celle qui ne manquerait pas de s'instaurer à Madrid. Cela ne s'accomplirait pas dans l'ordre et la concorde. L'Espagne renouerait avec ses vieilles luttes fratricides. L'Europe que nous aimons, la vraie, s'en trouverait encore diminuée. 

    o-DISCOURS-ROYAL-facebook.jpgQuant au Maroc, il suffit de songer à ce qu'il en serait advenu si l'attentat de Skhirat fomenté par la Libye de Kadhafi contre le roi Hassan II et la famille royale (1971) avait réussi, ou celui ourdi par le général Oufkir l'année suivante (attaque du Boeing du roi au-dessus du détroit de Gibraltar) ou encore si l'actuel souverain y était renversé ou tué par un quelconque complot islamiste, ce qui n’est pas une hypothèse fantaisiste... Le bienfait qu'apporte à son pays le régime monarchique marocain malgré ses défauts, saute aux yeux. 

    Reconnaissons-le simplement : l'Europe dont nous avons hérité a été construite, façonnée, conduite au plus haut de la civilisation et de la puissance par des dynasties. C'est à dire par des familles.  En symbiose avec des multitudes d'autres f9edd1378.jpgamilles aristocratiques et populaires. L'Europe est l'œuvre des Habsbourg, des Hohenzollern,  des Capétiens, des Savoie, des Saxe-Cobourg, des Romanov,  de la Couronne britannique, etc. Et c'est dans ce qui subsiste de leur héritage que nous survivons aujourd'hui. Héritage qui fut et reste en partie superbe, même s'il ne faut pas l'idéaliser. Les démocraties ou dites telles qui, dans le sillage des Lumières, gèrent cet héritage depuis un peu plus de deux siècles, n'y ont ajouté, en tout cas de leur fait, à peu près rien de substantiel ni qui mérite l'admiration.  Elles y ont retranché beaucoup. Elles ont ouvert l'ère des guerres de masse qui ont laissé le continent exsangue :  de millions d'hommes sacrifiés et de richesses englouties. Elles ont coupé les peuples de leurs racines profondes, détruit, surtout en France,  les communautés intermédiaires qui faisaient leur organicité ; elles veulent aujourd'hui les fondre - c'est à dire les tuer - dans la mondialisation, l'immigration massive, etc. De démocratie elles n'ont d'ailleurs que le nom : ce sont en vérité des ploutocraties. Elles nous ont fait passer, comme Maurras l'avait vu, « de l'autorité des princes de notre sang sous la verge des marchands d'or ». ** L'avilissement de la civilisation européenne et le déclin de sa puissance s'en sont inexorablement suivis. 

    Il est donc clair que les siècles où les régimes dynastiques dominaient ont uni, construit, amassé, édifié, bâti une civilisation couronnée d'esthétique et de culture, tandis que les siècles dits démocratiques ont consommé, dilapidé, dégradé, enlaidi. 

    Ces systèmes de démocratie formelle telles qu'elle a été imaginée et installée en France, seront-ils à la hauteur, seront-ils capables de faire face aux redoutables défis qui semblent attendre l'Europe des prochaines décennies, au premier rang desquels les grandes invasions africaines prévisibles, dont nous ne vivons sans-doute que les prémices ? L'Europe, si elle veut survivre, rester elle-même, ne pas se transmuer en une annexe islamisée du continent africain, devra sans-doute lutter durement sur son propre sol pour sa survie.  

    De cette épreuve, les peuples du continent européen peuvent sortir vaincus. Notre civilisation, submergée et soumise, aura alors vécu. On se souvient peut-être des termes dans lesquels Malraux avait envisagé cette lugubre éventualité : « L’Europe défend encore les valeurs intellectuelles les plus hautes du monde. Et pour le savoir, il suffit de la supposer morte. Si, sur le lieu qui fut Florence, sur le lieu que fut Paris, on en était au jour où « s’inclinent les joncs murmurants et penchés », croyez-vous véritablement qu’il faudrait un temps très long pour que ce qu’ont été ces lieux illustres se retrouve dans la mémoire des hommes comme des figures sacrées ? » *** 

    Mais les Français et les autres Européens, unis comme ils le furent pour la Croisade, comme ils le furent à Lépante face aux Turcs, peuvent aussi trouver en eux-mêmes l'envie, le goût, l'ardente obligation et, comme aux âges de foi, la passion d'une authentique renaissance, qui se forgerait dans la lutte pour la survie. 

    7794739059_le-chef-de-l-etat-bat-son-record-d-impopularite-apres-sa-rentree-ratee.jpgDans cette dernière hypothèse, la plus favorable, celle où nous nous ressaisirions face au danger, l'on ne donnera pas cher des régimes politiques dérisoires et faillis du genre de celui aujourd’hui établi en France. Nonobstant les velléités de verticalité et de grandeur du président Macron. Après à peine un peu plus d'un an d'exercice du pouvoir l'on voit bien au terme d'un été chaotique qu'il en a rêvé en vain. Le Système dont il procédait, qu'il était sans-doute destiné à servir, l'a déjà rattrapé. Les velléités ont fait long feu.  

    *    Danemark : Dédié aux royalistes qui croient que les monarchies nordiques ne servent à rien
         Chronique d’une Saint Sylvestre au royaume du Danemark 
    **   Charles Maurras, L’Avenir de l’intelligence, 1905
    ***  André Malraux, Appel aux intellectuels, Discours de la salle Pleyel, 5 mars 1948 

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  • Société • Le 26 septembre, à Hambourg, un clocher deviendra officiellement minaret…

     

    Par Gabrielle Cluzel

    C'est plus qu'un fait de société que Gabrielle Cluzel commente ici avec talent, humour et lucidité. C'est un fait de civilisation. Une civilisation qui se désagrège. [Boulevard Voltaire, 11.09].  

    Rappelons pour ceux qui l'ignoreraient que Gabrielle Cluzel participe - d'ailleurs toujours brillamment - à certains de nos colloques et conférences, dont quelques unes sont les siennes propres.   LFAR

     

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    Le 26 septembre prochain, à Hambourg, une église deviendra officiellement mosquée : la mosquée Al-Nour.

    C’est ce que rapporte Die Welt, évoquant « cinq ans de travaux, et une entreprise qui a coûté plus de cinq millions d’euros, dont un million en provenance des États du Golfe ». Évidemment.

    Die Welt nous explique qu’extérieurement, le bâtiment, classé, n’a pas été modifié. À l’exception d’un « détail » : sur le clocher, devenu minaret, la croix a été remplacée par le mot « Allah », en lettres d’or. Naturellement.

    À l’intérieur, cela va sans dire, l’autel et l’orgue ont disparu. « Une niche de prière, le mihrab, a fait son apparition sur un mur latéral, orientée vers La Mecque », décrivait déjà Courrier international en 2015, dans un article intitulé : « Transformer une église en mosquée, l’exemple de Hambourg. »

    Le journaliste allemand évoque « une transformation étonnante ». Ou pas. Tout cela, au contraire, ne coule-t-il pas de source ?

    On sait ce qu’il en est de la pratique religieuse chrétienne en Allemagne, et de la transmission de la foi dans les pays d’Europe où le protestantisme – éthéré, désincarné, intellectualiste, relativiste, bref, tout le contraire de l’islam – a longtemps dominé : « Les catholiques y sont devenus protestants, et les protestants, athées », me disait un évêque allemand, en boutade, il y a quelques mois. Voire plus, si affinités ? C’est bien, en tout cas, une église luthérienne qui a cédé ses bâtiments. Faute d’effectifs, elle n’était plus utilisée.

    Mais, mes chéris, cela nous pend au nez, à nous autres pays latins qui nous croyons peut-être plus malins. Oui, même l’Italie, qui roule aujourd’hui virilement les biceps, mais n’a plus de bambini.

    Dans l’introduction de son dernier livre, Destin français, Éric Zemmour rapporte cette saillie d’un professeur d’histoire dans le film Le Déclin de l’empire américain, lors de son cours inaugural : « Il y a trois choses importantes, en Histoire. Premièrement, le nombre, deuxièmement, le nombre. Troisièmement, le nombre. »

    Nombre de catholiques pratiquants : en chute libre. Nombre de musulmans pratiquants : en hausse constante. Nombre d’églises de village : gigantesque. Mais elles sont, la plupart du temps, fermées ; un brave prêtre, dépassé, les dessert en même temps que cinquante autres clochers, y célébrant la messe quand il peut, c’est-à-dire, peu ou prou, toutes les années bissextiles. Nombre, enfin, d’indifférents : se voulant bienveillants, ils s’interrogent avec un pragmatisme ingénu et cynique. Pourquoi le malheur des uns ne ferait-il pas le bonheur des autres, et comment cette immense offre en déshérence ne finirait-elle pas par rencontrer cette forte demande en pleine croissance ? Ce n’est même pas idéologique, simplement arithmétique !

    degaulle-tt-width-653-height-368-fill-0-crop-0-bgcolor-eeeeee-e1511433171860.jpgDans son dernier livre, Éric Zemmour cite aussi André Malraux : « Une civilisation, c’est tout ce qui s’agrège autour d’une religion. ». C’est donc aussi tout ce qui se désagrège en même temps qu’elle. Cela mérite que nous y réfléchissions, non ? Je ne sais si, dans l’au-delà, on conserve les amitiés d’ici-bas. Mais si Malraux, justement, croise encore son illustre comparse, il pourra le lui dire : Colombey-les-Deux-Mosquées n’est plus seulement un bon mot qui fait rire parce qu’il est vraiment gros.  

    Ecrivain, journaliste
    Son blog
  • L’Europe en état de décomposition avancée

    Après le drame de Gênes ... 

     

    Par François Reloujac

    Europe. La politique française n’étant dans l’esprit du président Macron qu’une dérivée de la politique européenne, il est bon de faire un point sur l’Europe dans son état actuel, sachant que toutes les décisions du gouvernement français sont dépendantes des impératifs bruxellois. 

    Alors que les Britanniques quittent le navire, la Hongrie, la Pologne, la Lettonie affichent de plus en plus leur opposition aux décisions que cherche à imposer la Commission européenne, sous la férule de l’Allemagne à la remorque de laquelle s’accroche encore la France et sous la pression des grands médias et des financiers internationaux. Tandis que la fronde menace au nord, le sud s’effiloche.

    Au pays des « fake news » la Grèce est reine

    Au cours du mois d’août 2018, la Grèce, dit-on triomphalement, a retrouvé son indépendance politique et n’est plus en faillite. Bonne nouvelle ! Non, « fake news », ou comme on dit en français : mensonge. La situation du pays ne s’est pas améliorée depuis que la crise a éclaté. Le taux de chômage y est encore de 20 % et s’il a baissé depuis 2013 où il dépassait les 27 %, c’est essentiellement grâce au départ des jeunes générations qui sont allées chercher fortune sous d’autres cieux. La Grèce s’est ainsi affaiblie du fait du départ de ses futures élites. La récession dure depuis dix ans, les investissements sont taris, de nombreuses entreprises ont disparu et les banques sont plus fragiles que jamais, le niveau des créances douteuses ayant explosé.

    Alors, pourquoi ce communiqué triomphal ? Parce qu’officiellement, la Grèce n’est plus en faillite ! Elle n’est, pour l’instant, plus en faillite puisqu’elle est autorisée à ne commencer à rembourser ses emprunts qu’à partir de 2022. Quatre ans de délais, pendant lesquels elle ne règlera que les intérêts tout comme, en leur temps, les bénéficiaires des prêts subprime américains – la crise ayant éclaté à partir du moment où ils ont dû commencer à rembourser le capital ! Or, qu’en est-il de la dette actuelle de la Grèce ? Elle est évaluée à près de 300 milliards d’euros (environ 200 % du PIB) tandis que les recettes fiscales totales du pays s’élèvent à peine à 18 milliards d’euros. Autant dire que, sauf miracle, la Grèce sera dans l’incapacité de rembourser sa dette quand débutera sa période d’amortissement. C’est pourquoi le professeur Colletis redoute un « inévitable embrasement social ». Mais, d’ici là, combien des dirigeants politiques européens actuels seront encore en poste ? 

    Le contre-exemple du Portugal

    À côté, la situation de la péninsule ibérique est très contrastée entre une Espagne, relativement docile aux injonctions internationales, et un Portugal plus rétif. Si, malgré les apparences, l’Espagne continue à s’enfoncer, c’est qu’elle souffre en particulier d’un problème démographique grave. Avec une liberté d’avorter pendant les 14 premières semaines de grossesse (22 en cas de « malformation » du fœtus), le taux de fécondité est tombé à 1,33 enfant par femme en âge de procréer. Le chômage des jeunes atteint le taux record de 34 % (le double de la moyenne européenne). Du coup, le paiement des retraites n’est plus assuré. La présidente du FMI, Christine Lagarde, a trouvé la solution. Il faut que l’Espagne absorbe d’ici à 2050, 5,5 millions d’immigrés. On peut cependant douter de la pertinence de cette solution puisque l’Espagne compte déjà plus de 3,5 millions de chômeurs – qu’il faut faire vivre – et le taux de chômage des populations immigrées y est très largement supérieur à celui des autochtones.

    À l’inverse de l’Espagne et de la Grèce qui sont toujours terriblement endettées, le Portugal est dans une position dont le journal La Dépêche explique qu’il s’agit d’un « miracle embarrassant pour Bruxelles car il repose sur une politique anti-austérité ». Le pays a beaucoup souffert après la crise de 2008 et même vu son PIB baisser de près de 20 %. Mais le Gouvernement n’a pas cédé aux pressions bruxelloises puisque, pour en sortir, il a augmenté le salaire minimum, les retraites et les allocations familiales et diminué les impôts pesant sur les classes moyennes. Entre 2010 et aujourd’hui, il a diminué les dépenses publiques de 10 % et élevé l’âge de départ à la retraite, désormais à 66 ans. Le taux de chômage a chuté pour s’établir aux alentours de 7 % et la croissance est repartie à la hausse et ce depuis 2014.

    Le maillon faible pourrait-il être l’Italie ?

    Depuis le début de l’été, c’est la situation de l’Italie qui semble le plus préoccuper la Commission européenne. Avant d’examiner rapidement les deux événements clés qui ont occupé la une des journaux, il faut examiner la situation globale du pays.

    Dans le dernier numéro d’Alternatives économiques, Guillaume Duval constate, avec une certaine complaisance, que loin d’être « le mauvais élève » de l’Europe, l’Italie a mené depuis plus d’un quart de siècle, « de strictes politiques d’austérité budgétaire. (…) Celles-ci ont même été plus sévères sur la durée que celles menées par les gouvernements allemands ». En fait, la politique de l’euro fort qui est favorable à l’industrie allemande a tué le commerce international italien qui n’était pas tiré par les mêmes produits. C’est pourquoi, « si les Italiens ont aujourd’hui un niveau insupportable de dette publique – 132 % du PIB – ce n’est donc pas à cause de leur laxisme budgétaire, mais parce que cette austérité permanente a freiné l’activité. (…) Du coup, la faiblesse de la croissance combinée à une inflation trop basse en Italie comme dans l’ensemble de la zone euro n’ont pas permis de faire reculer l’endettement malgré les excédents budgétaires primaires ».

    Dans ce contexte, poussée par la Commission européenne, l’Italie a mis en œuvre une politique de privatisation des autoroutes. Le principal bénéficiaire des concessions a été le groupe Benetton, plus connu pour ses publicités scandaleuses que pour son souci du bien commun. Ce groupe, aux ambitions démesurées, est déjà propriétaire en France, par la société espagnole Abertis interposée, de la SANEF qui gère les autoroutes du Nord et de l’Est de la France. Après le drame de Gênes, le gouvernement italien a imaginé retirer la concession ou renationaliser « l’autoroute des fleurs », mais le coût d’une telle opération a été estimé à plus de 15 milliards d’euros, rien que pour compenser « le manque à gagner » du groupe Benetton. On comprend que celui-ci ait pu proposer d’indemniser les familles des victimes à hauteur de 500 millions d’euros !

    Reste le dernier problème sur lequel on attaque aujourd’hui les « populistes » qui sont actuellement au gouvernement : celui de l’immigration. Indépendamment du fait que les autres pays européens qui sont toujours prêts à prêcher une leçon d’humanité, sont beaucoup moins prompts à partager le fardeau, l’Italie a déjà une situation économique préoccupante qui rend difficile l’accueil de nouvelles populations. De plus, la Commission européenne oublie que, depuis de nombreuses années déjà, l’Italie est confrontée à un problème d’émigration, de nombreux jeunes Italiens étant partis chercher fortune ailleurs. Dès lors ceux qui restent ont peur d’être envahis par des populations qui n’ont pas toutes, loin s’en faut, l’intention de s’intégrer. D’un point de vue politique, la situation est d’autant plus difficile que les populations qui enrichissent ainsi les passeurs, ne sont pas acceptées par des pays plus riches et dont la civilisation est plus proche.

    Ces quelques exemples montrent que, par son dogmatisme intransigeant, la Commission européenne, coupée des populations, détruit l’Europe et conduit les gouvernements à l’impasse d’une dette explosive dont on ne pourra sortir qu’en rendant à chacun son autonomie budgétaire et monétaire et en redonnant à chaque banque centrale un rôle adapté aux conditions financières internationales. ■ 

      

    Les impérities de l’État grec sont cause en partie du drame de l’incendie de cet été près de Rafina, le 24 juillet.

     
  • Euro : Au bord du précipice

     

    Par Antoine DUPERTUIS

    Royaliste numero 1150_Page_01.jpgL’écrasante majorité des Français - responsables politiques et dirigeants économiques inclus - croient à tort que l’euro est une monnaie unique. Nous avons relevé cette courte mais intéressante chronique dans la dernière livraison de Royaliste*. Elle informe, explique, instruit. Évite que nos positions en matière européenne se réduisent à des caricatures et à des slogans, comme elles le font trop souvent dans le camp eurosceptique, dont nous sommes  LFAR  

    En réalité, les banques centrales nationales n’ont pas été supprimées. L’euro est un système de monnaies nationales (euro-franc, euro-mark, euro-peseta, etc.), toutes dénommées « euro » et liées entre elles par un taux de change fixe et perpétuel de 1 pour 1. De plus, l’euro n’est pas une créance sur la BCE mais sur l’Eurosystème, qui comprend la BCE et les 19 banques centrales nationales participantes. Cette architecture monétaire s’appuie sur le dispositif Target-2, un système de paiement interne à l’Eurosystème entre banques centrales de la zone euro qui permet aux banques commerciales de transférer des fonds en temps réel par-delà les frontières des Etats membres. Les soldes Target-2 permettent d’identifier les pays créanciers et débiteurs vis-à-vis de tous les autres.

    C’est un baromètre des flux de capitaux internes et de la fragmentation financière au sein de l’Union économique et monétaire. Par exemple, lorsqu’un agent économique italien achète un bien à une contrepartie allemande, la transaction apparait comme une créance de la Banque centrale allemande (Bundesbank) envers l’Eurosystème et comme une dette de la Banque centrale d’Italie. La Banque centrale allemande crée au taux de 1 pour 1, en contrepartie d’une créance en euro-lires détenue dans son bilan (monnaie douteuse), des euro-marks (bonne monnaie) qui seront crédités sur le compte bancaire de la contrepartie allemande.
    Or, les divergences de compétitivité entre les pays de la même zone monétaire provoquent avec Target-2 une dégradation continuelle de la solidité de la Bundesbank par le gonflement important des créances douteuses de cette dernière sur les Banques centrales nationales des pays déficitaires. Par ce mécanisme, la Bundesbank, dont le bilan total n’était que de 250 milliards au début de l’euro, va prochainement détenir une position créditrice vis-à-vis de l’Eurosystème de 1000 milliards d’euros, pendant que l’Italie en est déjà à une position débitrice de plus de 460 milliards d’euros !

    En cas de sortie de la zone euro d’un pays déficitaire, les créances de la Bundesbank sur celui-ci seront exigibles et non remboursables au vu des montants en jeu. Il s’agit d’un risque d’appauvrissement considérable pour l’Allemagne, qui l’emporte nettement sur ses excédents commerciaux. Rien d’étonnant alors à ce que pas moins de 154 économistes allemands de haut niveau, dans une tribune publiée par le Frankfurter Allgemeine Zeitung en mai dernier, aient recommandé une procédure de sortie de l’euro…L’Allemagne, première nation à sortir de cette monnaie funeste ?  ■ 

    * 10 - 23 septembre 2018