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LAFAUTEAROUSSEAU - Page 1297

  • Histoire & Actualité • Etonnant ! « La rébellion cachée », un film sur le génocide vendéen diffusé à l’Assemblée nationale

     

    Qui aurait pu imaginer un seul instant ce qui s’est passé, jeudi 14 décembre 2017 dans un bâtiment de l’Assemblée nationale ?  On le verra en regardant, en diffusant même, cette vidéo.

    Incroyable ! « La rébellion cachée », un film sur le génocide vendéen diffusé à l’Assemblée nationale from Reinformation.tv on Vimeo. 

     

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpgReconnaissance des crimes de la Révolution, du génocide commis en Vendée par la Convention, des horreurs vécues par nos ancêtres sous la Terreur, récompense du travail des historiens, réparation d'une ou plusieurs injustices, tout cela est bien. Tout cela est surtout significatif de cet effort de reconquête intellectuelle et culturelle accompli par nombre d'auteurs et de penseurs ces dernières années au sein de notre famille d'esprit. Que la République se soit fondée en inventant, comme le montre Patrick Buisson, un terrorisme d'Etat nous renseigne surtout sur notre aujourd'hui, où s'exerce dans la même ligne, sous des formes certes moins violentes mais tout aussi destructrices, tout aussi efficaces et, en un sens, tout aussi totalitaires, est ce qui nous importe le plus de savoir. Prendre conscience de cette filiation entre hier et aujourd'hui, la révéler à nos concitoyens c'est cela qui est fécond et qui est important. La Révolution matrice des totalitarismes modernes, c'est ce dont nous aurons à nous souvenir le 21 janvier en commémorant l'exécution du roi Louis XVI.   Lafautearousseau

     

    Reportage à l’Assemblée nationale d’Armel Joubert des Ouches

    Qui aurait pu imaginer un seul instant ce qui s’est passé, jeudi 14 décembre 2017 dans un bâtiment de l’Assemblée nationale ? Certainement pas les écrivains, les historiens, les amoureux de la vérité qui, depuis des décennies, cherchent à faire reconnaître publiquement les crimes commis par l’Etat lors de la révolution dite « française » de 1789, Reynald Secher en tête. Jeudi dernier, c’est donc « La rébellion cachée », le film-documentaire du réalisateur franco-américain Daniel Rabourdin qui a été diffusé à l’Assemblée. Une projection devant une petite quarantaine de personnes. Dans l’assistance, Guillaume de Thieulloy, le directeur du Salon beige, les assistants parlementaires des députés Marie-France Lorho et Emmanuelle Ménard, Philippine Rambaud et Charles de Meyer, des amis. Et c’est sous l’impulsion de ses deux députés que la chose a été rendue possible.

    L’Etat va-t-il enfin reconnaître ses crimes ?

    « La rébellion cachée », le film courageux et très touchant de Daniel Rabourdin, révèle, en une heure et quart, l’histoire d’un massacre de grande dimension. Le massacre de plus de 150.000 Français, en 1794, de paysans, d’ouvriers, de prêtres, de religieuses, des amoureux de la monarchie. Ils étaient Vendéens mais aussi Bretons. Mais les massacres ne se sont pas cantonnés à la seule région ouest de la France. Les républicains commirent des atrocités dans les régions de Lyon, Marseille et Paris. C’est donc ce film, ignoré des grands médias et de la classe politique dans sa presque totalité, qui fut diffusé dans une des salles de l’Assemblée nationale. Incroyable quand on sait que c’est la Convention, l’ancêtre de l’Assemblée nationale, qui décida de l’extermination des Vendéens parce qu’ils se battaient pour défendre leur Roi mais aussi leur foi ! Les preuves matérielles existent. Il suffit juste de les reconnaître…

    Une injustice considérable

    Si ce serait un miracle que l’actuelle législature reconnaisse enfin les crimes commis par ceux-là mêmes qui ont voté l’extermination sur cette terre chrétienne qu’était la Vendée, la diffusion d’un film sur le génocide pourrait être un premier pas. Car depuis plus de 220 ans, l’injustice envers les victimes défuntes et ceux qui ont contribué à l’exhumation de cette page de l’histoire de France est considérable. Reynald Secher est l’une d’elles. L’historien et écrivain breton – il est docteur d'État ès lettres et sciences humaines – est le spécialiste français des guerres de Vendée. Auteur de nombreux ouvrages sur le sujet, il fut aussi victime d’un complot manifeste visant à le discréditer et surtout à le priver de sa chaire à l’université. Son combat très courageux qui a démarré il y a plus de 25 ans contre un déni d’Etat, sera peut-être un jour enfin récompensé.   

  • Spectacle • Gaspard Proust, un moderne antimoderne

     

    Par Jean-Christophe Buisson

     

    3658649930.jpgQuel artiste, en 20I7 peut se targuer de remplir tous les soirs une salle de 800 places en se contentant, pour toute promotion, de quelques affiches aussi sobres que rares ?

    Un seul : Gaspard Proust. Sur son seul nom (et prénom), cet homme au mauvais esprit revendiqué affiche quasi complet au Théâtre Antoine jusqu'à la fin de l'année.

    On se presse pour venir entendre, supporter et applaudir ses saillies contre les bien-pensants, les commentateurs politiques gonflés d'orgueil, les féministes hystériques, les savants fous et leurs thuriféraires, les progressistes sourds et aveugles, les complices objectifs de Daech, les obsédés de la modernité, Anne Hidalgo... Dans son Nouveau Spectacle, il a ôté beaucoup de politique (merci la vague dégagiste du printemps dernier) au profit heureux d'une véritable réflexion philosophique et anthropologique sur notre société.

    Entre deux rafales de formules drôles, cruelles, hilarantes, embarrassantes, il développe une vision du monde aussi noire que son humour. Héritier incontestable de Desproges et de Muray, il se montre de plus en plus houellebecquien (de belles dents et une énergie comique en plus). Est-il un faux pessimiste ? Un décadentiste joyeux ? Un nihiliste conservateur ? Bref, un oxymore sur jambes ? Seule certitude : il est le plus cultivé, le plus littéraire et sans doute le plus intelligent de ceux qui font office de divertir. La preuve : il ne parle pas aux journalistes.  

    Jean Christophe Buisson est écrivain et directeur adjoint du Figaro Magazine. Il présente l'émission hebdomadaire Historiquement show4 et l'émission bimestrielle L'Histoire immédiate où il reçoit pendant plus d'une heure une grande figure intellectuelle française (Régis Debray, Pierre Manent, Jean-Pierre Le Goff, Marcel Gauchet, etc.). Il est également chroniqueur dans l'émission AcTualiTy sur France 2. Son dernier livre, 1917, l'année qui a changé le monde, vient de paraître aux éditions Perrin.

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    1917, l'année qui a changé le monde de Jean-Christophe Buisson, Perrin, 320 p. et une centaine d'illustrations, 24,90 €.

  • Cinéma • Le Musée des Merveilles

     

    Par Guilhem de Tarlé 

    Le Musée des Merveilles, un drame américain de Todd Haynes, avec Oakes Fegley et Millicent Simmonds 

    « Vous devriez savoir qu’il est extrêmement dangereux de téléphoner pendant un orage… »

    Malheureusement pour lui, Ben ne connaît sans doute pas le Capitaine Haddock et ne l’a pas vu suspendu dans son lustre en cristal au début de L’Affaire Tournesol !

    C’est en effet le monde du silence, du cinéma muet dans lequel s’agitent les populations (oh combien changées !) de New-York en 1927 et 1977, sans que parviennent à nos oreilles les rumeurs et le bruit de la ville. Mais ce film n’est pas pour autant merveilleux, et je déplore de devoir « bémoliser » ainsi les critiques louangeuses lues et entendues, même s’il vaut mieux les entendre que d’être sourd.

    A mon grand regret, l’Alice que j’étais en entrant dans la salle n’a pas été émerveillée et est ressortie déçue, considérant le titre presque mensonger. L’histoire est relativement absurde - on peut même dire précisément qu’elle dépasse l’entendement -  et surtout elle est compliquée à telle enseigne que le réalisateur est  tenu de l’expliquer dans une scène finale en faisant lire un papier par l’une des protagonistes. Quant au musée, il est sans doute très beau mais sa visite est rapide.

    j’ai lu que ce film  est « à voir en famille dès 7, 8 ans ». Révérence gardée, je pense que ce film de 2 heures est trop long pour des enfants, et incompréhensible à  « 7, 8 ans » ; en outre il ne faudrait pas donner l’impression de cautionner les fugues. J’engagerais, pour ma part, les parents à commencer par voir ce film eux-mêmes avant d’y envoyer leurs enfants. A bon entendeur, salut.  

  • Prince Jean : « En cette veille de Noël ne pas oublier les plus pauvres, comme chrétien cela fait partie de notre vocation et comme prince de notre devoir »

     

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpg« Il est urgent de refonder le contrat social »

    Je viens de terminer de lire le rapport statistique 2017 du Secours Catholique à propos de la pauvreté en France.

    Le titre parle de lui même : « Pauvreté, la fragilité se renforce ». Quatre grandes tendances y sont soulignées : les femmes sont de plus en plus fragiles (en 2016 elles étaient plus nombreuses que les hommes à être accueillies au Secours Catholique), de plus en plus de personnes sont sans ressources (de 16,6% en 2006 à 19% en 2016), de moins en moins de ménages sont couverts par les prestations sociales (de 71,6% en 2010 à 64,4% en 2016), de plus en plus de ménages sont des couples avec enfants (en 2016 ils atteignaient 24,2% après les familles monoparentales 29,6%).

    Tel est le rude constat que dresse le Secours Catholique. Comme le dit sa présidente, Véronique Payet, « il est urgent de refonder le contrat social ». Malheureusement les élections successives à la tête de l’État depuis plusieurs décennies apparaissent comme celles d’une France libérale moins soucieuse des plus démunis, en tout cas dans les actes. Même les défenseurs du social d’il y a trente ans sont depuis longtemps passés du coté de l’argent et du pouvoir, que ce soit dans la presse, la finance ou la politique.

    Nous avions accueilli le Secours Catholique de Dreux en début d’année pour une visite de la Chapelle Royale et nous avions ensuite reçu des bénéficiaires chez nous. Il est important en cette veille de Noël de ne pas oublier les plus pauvres, que ce soit en parole comme en acte. Comme chrétien cela fait partie de notre vocation et comme prince de notre devoir.    

     

    Jean de France, duc de Vendôme
    Domaine Royal de Dreux le 19 décembre 2017

    Le site officiel du Prince Jean de France

  • Mathieu Bock-Côté: « Finkielkraut, voilà l'ennemi !»

     

    Par  Mathieu Bock-Côté

    TRIBUNE - Ayant déclaré dimanche [10.12] que « les non-souchiens brillaient par leur absence » lors de l'hommage rendu à Johnny, Alain Finkielkraut a déclenché la polémique. Pour Mathieu Bock-Côté [Figarovox, 14.12], l'indignation médiatique est avant tout un prétexte pour faire du philosophe un paria. Ce qu'il nous paraît dénoncer ici avec force, c'est en quelque sorte le totalitarisme qui s'est emparé de nos sociétés modernes ou postmodernes et qui prétend imposer silence à l'intelligence et au courage. A noter que Maurras avait imaginé l'avènement d'un tel « âge de fer » tyrannique, ou âge barbare, dans son Avenir de l'intelligenceLFAR 

     

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    La simple présence d'Alain Finkielkraut dans l'espace public semble aujourd'hui faire scandale. À gauche de la gauche, on a cessé d'écouter ses arguments mais on scrute sans cesse ses propos à la recherche de ce que le système médiatique nomme un dérapage, ou du moins, pour trouver quelques propos controversés qui justifieront sa mise au pilori pour quelques jours. L'objectif, c'est de faire du philosophe un paria, de le discréditer moralement, de le transformer en infréquentable, qui ne sera plus convoqué dans le débat public qu'à la manière d'un repoussoir, sans cesse obligé de se justifier d'exister.

    Celui qui s'est imposé au fil des décennies à travers une critique subtile et mélancolique de la modernité et de sa tentation démiurgique est transformé en commentateur ronchon contre lequel on justifiera toutes les moqueries. On ne prend pas la peine de le lire et on attend simplement le moment où on pourra le lyncher pour de bon. Pour les patrouilleurs zélés du politiquement correct, qui distribuent sans cesse les contraventions idéologiques, Alain Finkielkraut n'est plus le bienvenu dans le débat public.

    C'est à la lumière de cette aversion de plus en plus revendiquée pour Alain Finkielkraut qu'on peut comprendre la tempête médiatique qui le frappe ces jours-ci. On le sait, dans le cadre de son émission hebdomadaire sur RCJ, où il répond aux questions d'Elisabeth Lévy, le philosophe est revenu sur l'hommage national rendu à Johnny Hallyday en cherchant à décrypter une passion qui lui était étrangère. Finkielkraut a aussi noté, comme d'autres, que la communion populaire autour de Johnny Hallyday révélait aussi les failles de la communauté nationale. En gros, Johnny Hallyday était plébiscité par la France périphérique, qu'il aura longtemps fait rêver d'Amérique et d'aventure, mais ignoré par la France issue de la diversité, ou si on préfère le dire moins pudiquement, par celle issue de l'immigration. Il a pour ce faire employé ironiquement le terme « sous-chien » inventé par Houria Bouteldja pour qualifier « les Français de souche » et donc celui de « non souchien » pour ceux qui ne le sont pas. Cette ironie n'a pas été comprise, elle était peut-être malheureuse, plus largement on peut partager ou non son analyse, la trouver pertinente ou insuffisante: telle n'est pas la question.

    Nous ne sommes pas dans une controverse honnête et loyale, dans une correction bienveillante mais dans une volonté délibérée de nuire. Les ennemis de Finkielkraut n'allaient pas se priver de fabriquer un scandale artificiel de part en part pour lui faire un mauvais procès en racisme. On l'a d'un coup décrété double maléfique des Indigènes de la République. Les enquêteurs de la police de la pensée et les milliers de délateurs qui les alimentent et les applaudissent sur les réseaux sociaux étaient extatiques: enfin, ils tenaient leur homme. Enfin, ils avaient devant eux le dérapage de trop. Enfin, Finkielkraut venait de tomber dans un piège dont il ne sortirait pas.

    Il ne vaut même pas la peine de revenir sur le fond du propos tellement il suffit d'un minimum de jugement et de bonne foi pour savoir qu'il n'a jamais tenu le moindre propos raciste dans son commentaire de l'hommage à Johnny Hallyday et qu'il s'est contenté de reprendre de manière moqueuse et au deuxième degré le vocabulaire de ceux qui le conspuent. Que ce qu'il a dit ne diffère en rien du jugement, sur le sujet, d'un Laurent Joffrin ou de Dominique Bussereau.

    Cela dit, la tempête Finkielkraut du moment est intéressante pour ce qu'elle révèle du dérèglement de la vie publique, et cela, pas seulement en France mais à la grandeur du monde occidental. D'abord, on y voit l'importance du buzz comme phénomène médiatique. Une petite phrase arrachée à son contexte et mise en circulation sur internet peut déclencher une marée d'indignation, chacun s'ajoutant alors à la meute en expansion des indignés, qui veulent à tout prix envoyer un signal ostentatoire de conformité idéologique au politiquement correct.

    Une société allergique au pluralisme politique et idéologique

    On s'indigne, on hurle, on exige une punition exemplaire contre celui qui vient de transgresser le dogme diversitaire et la vision irénique du vivre-ensemble. On assiste même au retour de la gauche pétitionnaire à grande échelle. C'est ainsi qu'on a vu une pétition circuler sur internet pour que Finkielkraut soit viré de l'Académique française. Ceux qui la signent ont alors le sentiment gratifiant d'avoir eux-aussi pu cracher sur le philosophe jugé galeux. Les médias sociaux ont redonné vie à la foule lyncheuse. Disons-le autrement : elles transforment en action vertueuse la lapidation virtuelle. Il s'agit d'écraser symboliquement le dissident, de provoquer sa mort sociale.

    On y revient, la tentation lyncheuse qui s'exprime sur les médias sociaux correspond à une réhabilitation de l'ostracisme dans une société de plus en plus allergique au pluralisme politique et idéologique. Il faut être progressiste ou se taire. Il faut chanter les louanges du multiculturalisme et ne jamais noter les lézardes sociales qu'il engendre ou se fermer la gueule. Il faut tweeter dans le sens de l'histoire ou se tenir éloigné de son clavier. Et si on pense autrement, si on critique, si on se moque, si on ironise, même, on sera accusé d'être un provocateur, un polémiste, même, et d'avoir bien cherché sa mauvaise réputation. On se fera coller une sale étiquette qu'il faudra porter à la manière d'un symbole d'infamie.

    Il y a là une forme d'intolérance primitive qui se maquille en tolérance supérieure. On ne se surprendra pas, alors, que les réflexes d'autocensure se développent autant chez tant d'intellectuels qui redoutent d'avoir à subir à leur tour une pluie de crachats, pour peu que quelques esprits mal tournés ne comprennent pas ce qu'ils ont voulu dire et lancent contre eux une campagne de diffamation.

    L'ensauvagement de la vie publique qui se révèle à travers l'effrayante muflerie des réseaux sociaux témoigne purement et simplement d'une régression de la vie démocratique. Et c'est en bonne partie parce qu'il ose braver cet environnement toxique qu'Alain Finkielkraut est admirable. Nous sommes devant un philosophe de grande valeur, nous le savons. Mais il arrive souvent que les meilleurs philosophes n'aient pas un caractère à la hauteur de leur intelligence. Ce n'est pas le cas d'Alain Finkielkraut, qui fait preuve d'un courage civique exemplaire et qui ose aller dans l'espace public pour penser notre temps tout en sachant qu'il n'en sortira pas indemne. Il croit à la discussion, à l'affrontement des idées, et il a toujours le souci, comme on le constate chaque samedi à Répliques, de donner la parole au camp adverse. Ceux qui lui répondent par des injures et qui en appellent à son exécution publique ne nous disent finalement qu'une chose : ils ne sont pas à la hauteur du défi qu'il leur lance.  

    Mathieu Bock-Côté

    Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (VLB éditeur, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012) de La dénationalisation tranquille (Boréal, 2007), de Le multiculturalisme comme religion politique (éd. du Cerf, 2016) et de Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).

     
  • La Catalogne, depuis les Rois Catholiques, soit depuis le XVe siècle, n'a jamais cessé d'être espagnole

     Le palais de la Généralité, place Sant Jaume à Barcelone

     

    En deux mots.jpgQue se passera-t-il aujourd'hui en Catalogne ? Que va-t-il sortir des élections décidées par Madrid pour mettre un terme au psychodrame indépendantiste ? 

    On dit le scrutin incertain ; on prédit, entre candidats unionistes et indépendantistes un résultat « serré » qui peut-être ne décidera de rien, ne résoudra rien. Les sièges une fois attribués, quelles alliances vont-elles devoir se nouer, quelle coalition nécessairement hétéroclite ou même contre-nature va-t-elle se constituer pour former un gouvernement, élire un président ? Alchimie démocratique assez obscure, indigne et délétère ! Peut-on jouer aux dés l'avenir d'un peuple ? Quel que soit, ce soir, le résultat, il y a gros à parier que la partie perdante le contestera aussitôt. La démocratie ne transcende pas l'Histoire et les réalités. Il lui arrive de les mettre en péril ... 

    Il faut respecter le peuple catalan, attaché jusqu'à la déraison à ses traditions, sa langue, son identité. On se prend même à regretter que les Français n'aient pas fait preuve d'un semblable attachement, d'une même fidélité à eux-mêmes, à leurs pays et à la France. 

    L'une des spécialités des indépendantistes catalans est le travestissement de l'Histoire. Quoiqu'ils en disent, la Catalogne n'a jamais été indépendante. Avant le mariage d'Isabelle de Castille et de Ferdinand d'Aragon qui scella, il y a près de six siècles, l'unité de l'Espagne, la Catalogne appartenait, comme Valence et les Baléares, à la couronne d'Aragon. Jamais ensuite elle ne fut un Etat, jamais elle ne fut une nation indépendante. Elle aurait pu l'être et ne le fut pas. L'Histoire a tranché : l'Espagne a été un acteur majeur de l’histoire de l’Europe et au-delà ; la Catalogne, depuis les Rois Catholiques, soit depuis le XVe siècle, n'a jamais cessé d'être espagnole.  

    Comme le parlement britannique peut tout sauf changer un homme en femme, la démocratie quelle que soit son arithmétique, quels que soient ses résultats et ses combinaisons postélectorales, ne pourra empêcher que de toute façon la Catalogne, suivant une modalité qui lui est propre, soit et reste espagnole.  •

    Retrouvez l'ensemble de ces chroniques en cliquant sur le lien ci-dessous

    En deux mots, réflexion sur l'actualité 

    A lire dans Lafautearousseau  ... 

    On a tout à perdre à mépriser les États et les nations, à les tenir pour dépassés ...

    Comédie ou tragédie ?

    L'Histoire est-elle vouée à se répéter ?

    L’Espagne à la croisée des chemins. Espagne, où vas-tu ?

    Catalogne ou quand le pire n’est jamais sûr

    Au bord du précipice

    Barcelone : « No tinc por »

  • L’année 2018 sent plus l’apocalypse à venir qu’un simple krach

     

    Par Marc Rousset 

     

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    Le centriste Macron ne fait rien en matière régalienne (immigration, sécurité) et rêve en matière économique, ne pensant qu’Europe et jeunes pousses. Alors que certains s’effraient d’un cataclysme économique à venir, Macron, comme sœur Anne, ne voit absolument rien venir.

    Et pourtant, les faits sont là. Nous aurons au minimum un krach style 1929. Les Bourses et le bitcoin montent dans le monde entier mais vont bientôt s’effondrer. L’indice de Shiller, qui indique la surchauffe des marchés, est actuellement à plus de 31, alors qu’il était pourtant inférieur à 30 en 1929 et qu’il ne doit jamais dépasser ce chiffre. Cet indice, mis en place par le professeur à Yale et prix Nobel d’économie Robert Shiller, consiste tout simplement à diviser le cours de Bourse par le bénéfice par action, mais en ajustant techniquement les données.

    Cette fois-ci, ce sera plus grave qu’en 1929 et qu’en 2008, où l’on a soigné un patient drogué perclus de dettes en augmentant sa dose. Parler de la Grèce, de la dette publique américaine de 20.000 milliards de dollars, de la dette française de 2.000 milliards d’euros est d’un classicisme ringard dépassé. Il faut, en réalité, parler de la dette mondiale totale publique et privée, qui a doublé depuis 2006 pour atteindre 230.000 milliards de dollars. Mais à ce chiffre, il convient d’ajouter les engagements hors bilan des gouvernements et des agents économiques, soit 250.000 milliards de dollars. Et il faut enfin ajouter le volume des produits bancaires et boursiers dérivés, soit 1.500.000 milliards de dollars. La somme totale astronomique de la dette mondiale est donc de deux millions de milliards de dollars, soit ce que les Anglo-Saxons appellent deux quadrillions de dollars !

    Les banquiers prétendent benoîtement qu’il ne faut pas raisonner en valeur absolue du montant des contrats passés pour les produits dérivés et qu’il faut seulement s’intéresser au montant net des transactions, mais encore faut-il que les contreparties puissent répondre à leurs obligations contractuelles. Kerviel, à lui tout seul, a bien failli faire sauter la Société générale !

    Avec Trump, la dette publique américaine va continuer à croître sur la lancée d’Obama. Le Bureau central du budget américain estime la dette publique américaine à environ 40.000 milliards de dollars en 2024, soit le double de la dette actuelle. Il n’est pas possible que les choses restent en l’état et que les taux actuels d’environ 1,25 %, compte tenu des risques démentiels encourus, ne retrouvent pas bientôt les sommets de 19 % des années 1981. 

    Lorsqu’on prend conscience, enfin, à quelle vitesse et d’une façon subite s’est détériorée la situation en Allemagne à partir de janvier 1922, il faut se méfier de l’eau qui dort ! Une once d’or coûtait 3.976 marks en janvier 1922 et 87.000 milliards de marks le 30 novembre 1923.

    Un autre facteur géopolitique, bien plus préoccupant que la Corée du Nord, est le coup d’État réalisé par le prince héritier Mohammed ben Salmane en Arabie saoudite. Les États-Unis, suite à leur défaite en Syrie, sont en train de perdre la main au Moyen-Orient et lorsqu’on a beaucoup d’ennemis des princes du sang, un assassinat est toujours possible dans ces pays. Il suffirait également que l’Arabie saoudite passe au « pétro-yuan » pour que le dollar, dont la domination repose sur le pétrodollar, s’écroule !

    De plus, toutes ces émissions de crypto-monnaies (bitcoin, ethereum), avec l’augmentation vertigineuse des cours, sentent le soufre et l’écroulement d’un système à la Ponzi qui pourrait déclencher le début de l’apocalypse ! Joseph Kennedy, le père du président John Fitgerald Kennedy, fit sa fortune en vendant en 1929 avant tout le monde car, disait-il, « quand votre cireur de chaussures vous parle d’actions, il est temps de vendre ».  • 

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    Économiste

    Ancien haut dirigeant d'entreprise

  • Jean Sévillia sur le nouveau gouvernement autrichien : « Au centre de l'Europe, c'est une inflexion majeure. »

     

    En Autriche, le FPÖ, classé à l'extrême droite par les observateurs français, gouvernera avec les conservateurs de Sebastian Kurz. Pour Jean Sévillia, ce type de coalition est banal en Autriche. Jean Sévillia précise toutefois : « Critique sur la politique migratoire de l'Union européenne, et de l'Allemagne d'Angela Merkel en particulier, le nouveau chancelier d'Autriche partage la volonté des pays du groupe de Visegrád (Hongrie, Pologne, République tchèque, Slovaquie) de contrôler strictement leurs frontières au nom de leur souveraineté nationale. Au centre de l'Europe, c'est une inflexion majeure. » L'affaire est importante. [Figarovox, 19.12].  LFAR

     

    XVM374ace7c-f3ac-11e6-a80c-3dc5aaa52285-120x168.jpgSebastian Kurz, 31 ans, a prêté serment lundi à Vienne, signant l'arrivée au pouvoir d'une coalition formée par la droite et le FPÖ, le Parti de la liberté d'Autriche, classé par beaucoup à l'extrême droite. Ce cas de figure n'est pas inédit. Au début des années 2000, les conservateurs et le FPÖ avaient déjà été partenaires. Que faut-il retenir de cette première expérience ?

    Aux élections législatives d'octobre 1999, en effet, le FPÖ avait obtenu 27 % des suffrages, arrivant juste derrière les sociaux-démocrates et devançant de 400 voix seulement les conservateurs de l'ÖVP que menait alors le ministre des Affaires étrangères, Wolfgang Schüssel. Ce dernier, écartant l'idée de reconduire la grande coalition de son parti avec les sociaux-démocrates, coalition qui gouvernait l'Autriche depuis 1987, avait fait le choix, au terme de longues tractations, d'une coalition avec le FPÖ, ce parti qu'on qualifie de populiste, faute de terme plus approprié, mais que les Autrichiens ne classent pas à l'extrême droite. En février 2000, la formation du gouvernement de coalition entre les conservateurs de l'ÖVP et les populistes du FPÖ, sous la direction de Wolfgang Schüssel, devenu chancelier, allait décider les quatorze autres États membres de l'Union européenne à cesser toute rencontre bilatérale avec le gouvernement autrichien, à imposer des limitations à ses ambassadeurs et à retirer tout soutien européen aux candidats autrichiens à des postes au sein des organisations internationales. Cette politique de sanctions européennes, fortement encouragée par Jacques Chirac à l'Elysée, avait débouché sur un échec piteux. Elle avait dû être levée au bout de sept mois quand il avait bien fallu s'apercevoir que rien n'avait changé en Autriche, qui était restée un libre Etat démocratique, respectueux des droits de l'homme.

    A l'intérieur du pays, le résultat sera l'inverse de ce qui était escompté par l'Union européenne car même les Autrichiens de gauche, électeurs sociaux-démocrates, seront blessés dans leur fierté patriotique de voir traiter leur pays comme un paria. Pour le FPÖ, cette participation au pouvoir sera l'épreuve de vérité puisque des dissensions internes quant aux choix gouvernementaux provoqueront un effondrement du parti aux législatives anticipées de 2002, le FPÖ descendant à 10 % des voix, puis une scission, Jörg Haider, leader du FPÖ et partisan du maintien de la coalition avec l'ÖVP, formant au printemps 2005 un nouveau parti qui emmènera les ministres du FPÖ, mais pour quelques mois seulement puisque la coalition conservateurs-populistes éclatera tout début 2007.

    Pour répondre à votre question initiale, ce qu'il faut retenir de la première expérience de coalition entre les conservateurs et les populistes, qui a duré six années pleines, est que la mécanique institutionnelle autrichienne laisse le premier rôle au chancelier, qui a l'initiative et la vraie responsabilité du pouvoir. Ce fut le cas, de 2000 à 2006, avec le conservateur Wolfgang Schüssel qui imposait sa stratégie et son tempo à ses partenaires du FPÖ. Il n'en sera pas autrement avec Sebastian Kurz. L'autre réalité est que, dans l'exercice du pouvoir, les ministres populistes ont acquis une culture de gouvernement, ce qui les a parfois mis en contradiction avec leurs idées antérieures ou leur propre base électorale ou militante. Avant de poursuivre l'analogie pour aujourd'hui, observons ce qui va se passer maintenant.

    Non loin du palais présidentiel où se déroulait l'investiture du nouvel exécutif, plusieurs milliers de personnes manifestaient contre la participation du FPÖ au gouvernement, rassemblées derrière des banderoles proclamant « Les nazis dehors » ou « Mort au fascisme ». Ce type d'analogie historique a-t-elle un sens ?

    Rassembler 5500 personnes au centre de Vienne, capitale d'1,8 million d'habitants, derrière des drapeaux rouges et des banderoles d'antifas proclamant « No pasaran » ne signifie pas, en dépit de la complaisance des caméras de télévision, que les Autrichiens s'insurgent contre leur nouveau gouvernement. En démocratie, la légitimité provient des élections et du jeu constitutionnel. Je rappelle simplement que les conservateurs de l'ÖVP ont obtenu 31 % des voix aux élections législatives du 15 octobre dernier, et le FPÖ presque 26 % des voix. Après que Sebastian Kurz a été chargé de former le gouvernement par le président de la République, Alexander van der Bellen, un homme issu des Verts, les négociations en vue de la formation d'un cabinet se sont déroulées sur des enjeux publiquement affichés, de manière paritaire, selon les formes habituelles en Autriche. C'est donc dans le parfait respect des lois et de la Constitution autrichiennes que le gouvernement de Sebastian Kurz a été investi. Je rappelle encore que les sociaux-démocrates du SPÖ ont gouverné avec le FPÖ de 1983 à 1986, et gouvernent encore aujourd'hui avec lui dans deux diètes régionales, en Haute-Autriche et dans le Burgenland. En Autriche, encore une fois, le FPÖ n'est nullement classé à l'extrême droite, quoi qu'en pensent les médias français. La réalité politique est là, et non dans l'antifascisme d'opérette de quelques centaines d'étudiants et de bobos viennois.

    Heinz-Christian Strache, le leader du FPÖ et désormais vice-chancelier, aurait tout de même été proche des néonazis dans sa jeunesse ?

    Le néonazisme est interdit en Autriche, pays qui possède une des législations les plus sévères d'Europe en matière de répression du néonazisme et du négationnisme. Donc Strache n'a pas été proche des néonazis. Adolescent, il a peut-être été d'extrême droite, mais juge-t-on un homme de 48 ans sur les positions qu'il défendait à 18 ans ? En France, nous avons eu au cours des dernières décennies un certain nombre de hauts responsables politiques et de ministres qui, dans leur jeunesse, ont été membres d'Occident ou à l'inverse de mouvements trotskistes : fallait-il les enfermer dans cette étiquette ? Depuis qu'il a pris la tête du FPÖ, en 2005, et réunifié les deux partis populistes après la mort de Haider, en 2008, Heinz-Christian Strache a plutôt fait un sans-faute, rejetant les ambiguïtés dont aimait jouer Haider quant au national-socialisme, condamnant l'antisémitisme, se rapprochant d'Israël. En Autriche, même ses adversaires peinent à pointer ses « dérapages », sauf à considérer que la critique du fondamentalisme islamique soit un dérapage. Cela dit, Strache est à son tour au pied du mur. A part son mandat de député et la direction de son parti, il n'a jamais exercé de responsabilité politique effective autre que le ministère de la parole. Lui aussi va devoir prouver qu'il est capable de passer du discours à l'acte.

    Deux ministres du FPÖ ont été nommés à des postes régaliens à l'Intérieur et la Défense. Sebastian Kurz ne semblait pas y être contraint ?

    Un troisième ministère régalien très important, celui des Affaires étrangères, a été attribué à Karin Kneissl, qui n'est pas membre du FPÖ, mais a été choisie par lui. Cette femme de 52 ans, diplômée de l'université américaine de Georgetown et de l'ENA à Paris, spécialiste du Proche-Orient, parle l'arabe et l'hébreu. Il sera difficile de la faire passer pour une nationaliste au front bas… Pourquoi Kurz a-t-il consenti à donner des ministères régaliens au FPÖ ? Mais Schüssel en avait fait autant. Les Autrichiens ont une vision pragmatique de la politique, c'est tout. Dès lors qu'il y a coalition, il y a partage des fonctions et des compétences. Mais encore une fois, le maître du jeu, au sein du gouvernement, restera le chancelier.

    Le rapprochement entre les conservateurs et le FPÖ en Autriche est-il symptomatique d'une droitisation en Europe ?

    Je ne sais pas si le terme de « droitisation » est le bon, mais il est certain que, face à un certain nombre de défis qui sont posés à l'Europe, à toute l'Europe, la nouvelle coalition gouvernementale autrichienne veut répondre à des attentes de l'opinion en matière de sécurité nationale et de contrôle des flux migratoires.

    Kurz fait profession de foi européenne, et prendra personnellement en charge les questions européennes, enlevées au ministère des Affaires étrangères. Critique sur la politique migratoire de l'Union européenne, et de l'Allemagne d'Angela Merkel en particulier, le nouveau chancelier d'Autriche partage la volonté des pays du groupe de Visegrád (Hongrie, Pologne, République tchèque, Slovaquie) de contrôler strictement leurs frontières au nom de leur souveraineté nationale. Au centre de l'Europe, c'est une inflexion majeure.

    L'Autriche peut-elle être un laboratoire politique pour d'autres pays, notamment la France ?

    Il y faudrait une révolution culturelle et un long chemin… Les Autrichiens, encore une fois, ont une conception beaucoup plus pragmatique de la politique, et sont habitués aux coalitions de gouvernement nationales ou régionales - conservateurs avec sociaux-démocrates, sociaux-démocrates avec populistes, conservateurs avec populistes - qui ne sont pas dans la pratique constitutionnelle de la Ve République. En France, malheureusement, il y a toujours un arrière-plan idéologique en politique, même quand on s'en défend. Notre histoire politique reste marquée en profondeur par l'expérience de la Révolution de 1789.   

    Journaliste, essayiste et historien, chroniqueur au Figaro Magazine et membre du conseil scientifique du Figaro Histoire, Jean Sévillia est un spécialiste de l'Autriche.

    Entretien par  Alexandre Devecchio 

    Auteur - Sa biographie

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  • Ce qu'a dit dit Zemmour de Macron sur France 2 : « Un numéro auquel Giscard aurait pu sacrifier » 

     

    BILLET - L'intervention télévisée d'Emmanuel Macron, dimanche 17 décembre sur France 2, a suscité beaucoup de critiques et de sarcasmes. La forme y était originale pourtant. L'exercice de com' n'aurait pas déplu à VGE. ...   [RTL 19.12]  

     


    Résumé RTL par Éric Zemmour et Loïc Farge 

    Les communicants de l'Élysée peuvent être fiers d'eux.

    Ils ont réussi leur coup. Ils ont fait parler, réagir, brocarder, hurler, vociférer, s'indigner. Tout y est passé. C'était le but recherché. Le président de la République qui marche dans les salons du Palais comme un guide de la Journée du patrimoine, et qui s'arrête de temps en temps pour répondre à une question qui n'en est pas une : le spectacle valait le déplacement.

    Depuis Chirac, les présidents français sont debout, à la manière américaine. Ils ne sont plus des monarques. Sarkozy et Hollande ne seront jamais des rois. Le peuple ne leur a jamais pardonné cette auto-désacralisation. Macron l'avait compris. Il en a rajouté dans la raideur hiératique dès son avènement. 

    Éric Zemmour

  • Fondamentaux d'Action Française • L’économisme

     

    par Stéphane BLANCHONNET

    Un article de Stéphane BLANCHONNET paru dans à-rebours.fr et dans L'AF2000. Et un article parmi plusieurs autres qui rappellent utilement les fondamentaux de la politique d'Action française.  LFAR

     

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    Dans la pensée antique, la distinction entre l'ordre de la politique (de polis, la cité) et l'ordre de l'économie (de oikos, la maison) est très nette, ainsi que la subordination de celui-ci à celui-là.

    C'est que, selon la formule d'Aristote, la politique est non seulement architectonique par rapport à l'éthique (sans la cité pour protéger les personnes, pas de vie morale) mais également par rapport à l'économie (pas de production et d'échanges sans ordre, sans paix et sans loi).

    À l'époque moderne, les valeurs semblent s'être inversées : les premiers économistes libéraux comme leurs premiers contradicteurs socialistes (Marx notamment) ont accordé la première place à l'économie ; la politique n'étant à leurs yeux qu'une superstructure exprimant sous une forme différente des rapports foncièrement économiques. Les crises régulières du capitalisme (crises financières, crises de surproduction, guerres, accroissement inédit des inégalités, même dans l'abondance) et l'échec patent du communisme du côté du socialisme, n'ont hélas pas mis un terme à cette croyance dans notre post-modernité. La "gouvernance" des taux (de croissance, de chômage etc) dont le modèle est la gestion d'entreprise a en effet pris le pas sur le gouvernement des hommes.

    On reproche parfois aux royalistes de ne pas avoir de programme économique. C'est un mauvais procès. Ils n'ont tout simplement pas de dogmes en la matière ! À l'égard des thèses libérales ou socialistes ils sont agnostiques et font leur miel de tout. S'il leur fallait choisir un maître en la matière, ce ne serait pas un théoricien de l'économie mais un praticien. Plutôt que d'adhérer au credo de Smith, de Ricardo ou de Marx, ils regardent du côté de Colbert, dont l'action a consisté à soutenir, protéger, faciliter, le travail des acteurs économiques sans se substituer à eux systématiquement et dans un but très simple et pas du tout idéologique : enrichir l'État par la prospérité économique et lui permettre de mener à bien ses fins propres, qui sont extra ou meta économiques.  

    Repris de A Rebours et de lAF2000

    Voir aussi ...

    La monarchie  -  Le nationalisme intégral  -  Le Quadrilatère maurrassien  -  La Monarchie que nous voulons  -  Le « coup de force »  -  La civilisation  -  L'AF et l'Eglise  -  Politique d'abord !

    A lire dans Lafautearousseau ...

    Pas de dogmatisme en matière économique ! Plus de relâchement en matière de Défense et de souveraineté !

  • Café Histoire de Toulon, ce mercredi 20 décembre avec Alain Vignal

     

    En clôture de sa seconde année d'activités culturelles, le Café Histoire de Toulon rappelle la causerie du 20 décembre 2017 par Alain Vignal, sur le thème : Comprendre les fête calendales et illustrée par Dominique Struyve à partir d'un texte de Frédéric Mistral.

    Noel arrive ! Connaissez-vous les fêtes calendales ? Savez vous que les provençaux appellent Royaume (Lou Reiaume) la galette des rois ? Dans notre société en perte d'identité, vous êtes curieux de mieux comprendre les racines de la Provence. Alors venez écouter Alain Vignal, membre de l'Académie de Toulon, qui vous expliquera les racines chrétiennes des fêtes calendales tandis que notre fidèle amie Dominique Struyve vous fera découvrir un extrait des très belles mémoires de Mistral. Alors vous pourrez reprendre notre vieux chant de Joie :

    De buon matin, ai rescountra lou trin,
    De très grand rèi qu'anavoun en vouiage...
     

    Le Grall, Pub associatif des missionnaires de la Miséricorde (adhésion 1 €)
    377 avenue de la République , 83000 Toulon
    La soirée pourra se poursuivre autour d’une pizza (Participation aux frais)
    Contact : cafehistoiredetoulon@gmail.com

  • Famille de France • Prince Jean : Recommandation de lecture à l'approche de Noël ... et un beau symbole !

    Chênes de la forêt du Nouvion  

     

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpg« L’homme qui plantait des arbres »

    Il y a quelques semaines, le magazine « Le Point » sortait un dossier « Les surprenants bienfaits des arbres : vertus médicales de la sylvothérapie, intelligence des forêts, action décisive sur l’environnement ; les scientifiques font chaque jour de formidables découvertes sur ces amis qui nous veulent du bien ».
     
    Dans le même registre, Peter Wohllenben publiait récemment un livre « La vie secrète des arbres : ce qu’ils ressentent, comment ils communiquent, un monde inconnu s’ouvre à nous ». 
     
    À Boulogne Billancourt, était organisé le 12 décembre dernier « Le Sommet Une Planète » (en français dans le texte). Il réunissait pays, organisations, industries, financiers. Le président de la République, à l’initiative de ce sommet, s’exprimait à propos du réchauffement et du changement climatique : « on est en train de perdre une bataille, on ne va pas assez vite et c’est ça le drame ». Outre que ce sommet avait lieu autour de Paris, une ville avec une pollution au plus haut depuis 10 ans (un taux causé par une mauvaise météo et une utilisation trop importante des voitures) et qu’il a causé des embouteillages records (en plus de la grève du RER) avec près de 550 kilomètres de bouchons, la déclaration du président de la République m’a semblé décalée, car par principe le climat est changeant et notre planète à déjà connu des réchauffements.
     
    Cela dit, il est important de nous discipliner autant que possible dans nos actes pour respecter la création (pour moi qui suis chrétien) tout en mettant en place des règles de vie communes. Cela commence par un certain bon sens, censé être « la chose du monde la mieux partagée » (Descartes). On est loin de l’idéologie qui anime souvent ces sommets planétaires. La forêt fait justement partie de ce bon sens, restant une des sources principales d’enrichissement de l’atmosphère en oxygène, condition indispensable à toute vie sur la terre, et d’absorption de gaz carbonique.
     
    Je ne peux donc que vous recommander de lire ce petit livre de Jean Giono L’homme qui plantait des arbres. Ce peut être un joli cadeau de Noël ; il existe une belle édition chez Gallimard et il n’est pas très épais. En plus d’être un grand auteur de la nature humaine, Jean Giono vous fera aimer les arbres.    

     

    Jean de France, duc de Vendôme
    Domaine Royal de Dreux le 15 décembre 2017

    Le site officiel du Prince Jean de France

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    Un Guisard, chêne 5 fois centenaire de la forêt du Nouvion

  • Europe : La France n'a-t-elle le choix qu'entre le statu quo et le Frexit ?

     

    En deux mots.jpgDans une Europe où les peuples sentent de plus en plus le sol se dérober sous leur pied, où monte partout une vague « populiste » surtout inquiète de perdre son identité, une autre politique européenne de la France pourrait bien s'imposer à court ou moyen terme comme une option nouvelle et salvifique. Il n'est pas sûr en effet que la France n'ait d'autre choix qu'entre le statu quo (berlino-bruxellois) et le Frexit ... 

    Sans-doute ne serait-il ni utile ni opportun de rompre à grand fracas le « couple franco-allemand » qui est depuis le traité de l'Elysée la base de notre politique européenne. Mais peut-être serait-il temps de prendre la mesure de son délabrement et de se préparer à y parer. Sur le plan des échanges économiques, chacun sait que le solde du commerce extérieur franco-allemand s'est excessivement déséquilibré en notre défaveur. Que ce soit en grande partie de notre faute ne change rien à l'affaire. Ces déficits pluriannuels récurrents ne pourront pas durer éternellement. Si la France avait une volonté industrielle et commerciale, elle s'attacherait sans tarder à redresser cette situation pour les résorber et revenir à moyen terme à l'équilibre. Ce serait au détriment du bénéfice que tire aujourd'hui l'économie allemande de nos échanges... 

    Quant à la politique migratoire de l'Allemagne structurellement liée à son effondrement démographique, elle lui a aliéné les pays de l'ancienne Mitteleuropa, le cœur battant du continent, et une partie de son propre peuple, inquiet lui aussi de perdre son identité germanique, comme nous, au profit de l'Islam. Angela Merkel vient d'en faire l'expérience, sinon mortelle pour l'instant, du moins amère.  

    L'Allemagne, notamment après que le monde communiste s'est décomposé, a toujours considéré ses voisins de l'Est comme ses prolongements, ses marches, pour ne pas employer de termes plus péjoratifs. Pays utiles à son industrie, surtout comme sous-traitants, à son commerce, à sa puissance et d'une certaine façon liés à elle par leur commun atlantisme et leur appartenance conjointe à l'Union Européenne. Union où, par ailleurs, s'exerce de facto l'évidente suprématie allemande.  

    Ce système clos est peut-être en train de s'éteindre pour différentes raisons convergentes. La principale est la renaissance d'un puissant sentiment national et identitaire de ces pays d'Europe centrale ou danubienne, ayant tous plus ou moins appartenu à l'empire austro-hongrois, puis, sauf l'Autriche qui en fut sauvée de justesse, au glacis soviétique : Autriche, Pologne, Hongrie, République Tchèque et Slovaquie, sans aller plus à l'Est ou plus au Sud ... Ces nations qui ont sauvé leur âme du communisme dont elles ont subi le joug le long de près d'un demi-siècle tragique, n'entendent pas risquer à nouveau de la perdre du fait de la politique des institutions de Bruxelles et des exigences allemandes : accueil massif de migrants majoritairement africains et musulmans, imposition de quotas, politique et idéologie libérale-libertaire, multiculturaliste et diversitaire. Ces peuples refusent aujourd'hui de se voir imposer un modèle politique et sociétal à l'opposé de leur identité, de leurs aspirations et de leurs votes. Certes, leur refus de s'y plier est suivi de rappels à l'ordre, menaces de sanctions, leçons moralisantes, etc. mais pour l'instant sans effets sur eux. 

    Pourquoi la France au lieu de s'associer au concert des donneurs de leçons et des preneurs de sanctions, ne se rapprocherait-elle pas de ces Etats estimables entre tous ? Ce sont de longue date des pays amis qui forment au centre de l'Europe un bloc de cinq Etats et de soixante-dix millions d'habitants, avec une suite de capitales prestigieuses (Varsovie et Cracovie, Vienne, Bratislava, Budapest et Prague), d'indiscutables racines européennes, un immense capital de civilisation, celui que, précisément, ces Etats veulent préserver ? Oui, pourquoi la France en quelque manière ne se joindrait-elle pas à eux ? De par la nature des choses et de l'Histoire, elle y exercerait évidemment une sorte de prééminence. Du même coup, elle équilibrerait sans le rompre son partenariat trop inégal et trop exclusif avec l'Allemagne ...  

    XVM74092d9a-e190-11e7-9511-98d62490889b.jpgPourquoi pas, en effet, une initiative de la France envers les pays de Višegrad, plus l'Autriche qui vient de se doter d'un gouvernement de coalition des droites ? Une tournée du Chef de l'Etat dans les capitales de cette Europe-là, y compris Varsovie cette fois-ci, la réaffirmation des liens d'amitié séculaires qui les lient à la France, de notre soutien à leurs efforts de développement, de notre compréhension envers leur volonté de défense de leurs identités et de leurs patries respectives, constituerait sans nul doute de la part de la France non pas ce « repli sur soi » que dénonce Macron mais tout au contraire notre retour à une politique d'influence et d'ouverture pour une Europe des nations. 

    Faudrait-il redouter des sanctions ? Mais lesquelles donc ? L'Europe n'existe pas sans la France. Sans elle ce qui subsiste de l'U.E. après le départ britannique s'effondrerait. Son rapprochement avec Vienne, Bratislava, Budapest, Prague et Varsovie rendrait la chose plus improbable encore, d'autant qu'une telle politique ne serait sans-doute pas sans écho et sans adhésion à Sofia et à Bucarest où l'on n'entend pas non plus succomber aux flux migratoires... 

    En inaugurant cette politique, la France insufflerait à l'Europe une dimension nouvelle, celle qui lui fait défaut, celle des peuples, des nations, celle des retrouvailles avec sa civilisation profonde. Cette politique rendrait progressivement caduques des institutions artificielles, inutiles et faillies. Elle contribuerait à restaurer le politique et rendrait aux Etats leur rôle majeur.  

    Ci-dessus : vendredi 15 décembre à Bruxelles, MM. Macron et Morawiecki nouveau premier ministre polonais.

    Retrouvez l'ensemble de ces chroniques en cliquant sur le lien ci-dessous

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  • La France a-t-elle définitivement perdu le contrôle de son industrie ?

    Alstom, un cas exemplaire de la guerre industrielle. AFP 

     

    par Ludovic Greiling 

    ANALYSE - Le gouvernement a annoncé vouloir céder pour dix milliards d'euros de participations de l'Etat, y compris dans des entreprises stratégiques. Ludovic Greiling analyse les facteurs de la désindustrialisation de la France [Figarovox, 14.12]. Les lecteurs de Lafautearousseau connaissent bien Ludovic Greiling dont nous avons publié différents articles en tant que collaborateur de Politique Magazine ainsi qu'un entretien donné sur TV Libertés.  [Voir liens ci-dessous].  LFAR  

     

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    « Mauvaise gestion », « charges trop élevées », « concurrence internationale »… Il est commun d'invoquer ces facteurs pour expliquer la désindustrialisation brutale que le pays a connue ces quarante dernières années. En revanche, la guerre industrielle féroce à laquelle se livrent les puissances pour contrôler le capital des entreprises concurrentes n'est jamais évoquée. Cette guerre explique pourtant les difficultés de nos compagnies de pointe et la perte progressive de savoirs-faire pratiqués sur le territoire français. 

    Le gouvernement l'a annoncé : il veut céder pour dix milliards d'euros de participations de l'Etat, y compris dans des entreprises stratégiques. Par exemple, des discussions sont en cours pour fusionner certaines activités entre l'italien Fincantieri - en voie de privatisation - et le bijou qu'est la Direction des constructions navales (renommé Naval group) - qui vient de remporter un contrat géant en Australie pour la construction de sous-marins. La conséquence à long terme de ce genre d'opérations ? Rien de moins qu'une perte de contrôle de l'entité, suivi du transfert de brevets, de bureaux d'étude et de chaînes de montage.

    Alstom est un cas exemplaire de la guerre industrielle. Le site historique de fabrication des trains et des équipements énergétiques du groupe, à Belfort, pourrait fermer dans les prochaines années. Ces chaines de production employaient 8500 salariés au pic des années 70, contre 500 personnes aujourd'hui. « On perd tout ici, petit à petit, la recherche d'Alstom s'est envolée depuis longtemps, la technique s'en va par petits bouts…» expliquait un habitant dans la presse nationale lors de manifestations tenues l'an dernier.

    Un événement anodin dans un « monde globalisé » ? Non. Car Alstom n'est pas n'importe qui. Ses turbines thermiques équipent la moitié des centrales nucléaires de la planète et un quart des barrages hydroélectriques. La compagnie est également capable de fournir l'ensemble des équipements électriques d'une usine à charbon, ou de fabriquer les trains les plus rapides au monde. Un avantage stratégique majeur qui a aiguisé des appétits.

    Attaques au capital, changement des conseils d'administration

    Fusions, scissions, ventes d'actifs : à partir de la privatisation progressive entreprise il y a vingt-cinq ans, Alstom a souffert des mouvements incessants des fonds étrangers à son capital. Par la suite, le groupe a été visé par la Commission européenne : en contrepartie d'une aide de l'Etat français en 2003, Bruxelles imposait la cession de deux de ses fleurons au bénéfice de la concurrence, les activités de turbines industrielles (à l'allemand Siemens) et la filiale spécialisée dans la conversion d'électricité (à la banque britannique Barclays, qui la vendra ensuite à l'américain General Electric). Entre 2002 et 2005, le chiffre d'affaires d'Alstom a été divisé par deux.

    Dix ans plus tard, c'est un conseil d'administration remanié par le PDG Patrick Kron et désormais dominé par des intérêts anglo-saxons qui achevait l'ancien joyau de la période gaulliste. En 2014, il annonçait contre toute attente la vente des actifs et des brevets de la très stratégique division énergie d'Alstom. Le bénéficiaire ? Le concurrent américain General Electric, encore une fois. Deux mois après la reprise des activités françaises, le nouveau propriétaire annonçait la suppression de 800 emplois sur le territoire national et des rumeurs faisaient état du possible rapatriement des bureaux d'étude aux Etats-Unis.

    En ce mois d'octobre 2017, c'est la vente de la branche transports à Siemens qui est annoncée. Le démantèlement par les concurrents est presque achevé. Il aura pris vingt ans.

    Des technologies maitrisées par peu d'acteurs dans le monde

    On l'oublie trop souvent : les technologies qui permettent aujourd'hui de produire de l'électricité, d'utiliser des transports modernes ou encore de fabriquer des avions, sont maitrisées par un nombre très faible d'acteurs. La Chine et la Russie ont dû attendre la fin d'année 2016 pour annoncer le lancement prochain d'un avion civil longue ligne performant. D'ici à sa mise en exploitation, ces deux puissances seront dépendantes du bon vouloir d'Airbus et de Boeing pour réaliser l'espace eurasiatique de leurs rêves…

    La France a jadis su développer d'extraordinaires capacités techniques. Elles ont en partie donné au pays son indépendance diplomatique, économique et militaire. Elles lui ont ouvert la possibilité de discuter et d'échanger avec les pays de son choix, malgré le poids des empires soviétique et américain.

    Mais ces capacités ont aussi aiguisé les appétits des concurrents. Ces derniers ont profité d'un long passage à vide politique, et du dogme assez récent de la liberté totale de circulation des capitaux.

    Les fonds étrangers contrôlent aujourd'hui 50% du capital du CAC 40, selon la Banque de France, contre 25% il y a vingt ans. Ces derniers, le plus souvent américains (et non chinois), placent leurs hommes dans les conseils d'administration et les directions. Dans un contexte de vide politique, comment résister face à un fonds comme Blackrock, dont les encours sous gestion sont deux fois supérieurs à la capitalisation totale des quarante plus grandes valeurs françaises ?

    Alstom n'est pas un cas isolé. C'est par une attaque soudaine au capital, alliée à une intense opération de propagande et au soutien du premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker (futur président de la Commission européenne), que le sidérurgiste haut de gamme Arcelor a été avalé par un acteur indien inconnu en 2006. Le nouveau groupe, lourdement endetté auprès des banques américaines suite à l'OPA, a, depuis, fermé ou cédé une partie des ses meilleures usines européennes.

    C'est grâce à leur participation dans Airbus (ex EADS) que les Allemands ont rapatrié sur leur territoire la filiale militaire de la compagnie européenne. Pourtant, ces activités sont issues en majorité de l'entreprise française Matra-Aérospatiale et du savoir-faire de la Direction générale pour l'armement.

    Transfert des brevets et des usines

    C'est en entrant au capital de Safran que les fonds germano-américains y ont placé à sa tête leur propre représentant, tandis que la direction générale est désormais pénétrée par des représentants de l'Otan. Là encore, les principales mouvances au pouvoir en France ont favorisé la braderie du spécialiste de la défense et des moteurs d'avion : Safran est issu d'une fusion forcée par Nicolas Sarkozy entre la compagnie publique Snecma et la Sagem, et l'Etat a ensuite cédé, sous François Hollande, une grande partie du capital qu'il détenait encore. L'entreprise devrait faire partie des ventes de participations voulues par Emmanuel Macron.

    La liste est longue. Péchiney, Peugeot, Schneider Electric, Véolia ou Alcatel ont subi à des degrés divers la guerre industrielle par des prises d'intérêts dans leur capital. Et le phénomène touche aujourd'hui le secteur énergétique.

    A quelques millions d'euros près, l'ex ministre Michel Sapin avait discrètement fait passer l'Etat français sous le seuil qui lui assurait une minorité de blocage dans GDF Suez, le plus gros distributeur de gaz en Europe de l'Ouest. Et le gouvernement Philippe vient d'annoncer la cession supplémentaire de 4% du capital dans une procédure accélérée. EDF risque quant à lui une « faillite », selon les syndicats du groupe, qui dénoncent « les mauvais choix industriels et économiques mis en œuvre de façon zélée par le gouvernement sous le regard de l'Europe ». Spécialiste mondial incontesté de l'électricité nucléaire, un secteur maitrisé par de très rares acteurs dans le monde, EDF devrait prochainement ouvrir son capital aux fonds étrangers. Sous la pression de l'ancien banquier d'affaires Emmanuel Macron, l'ancien gouvernement avait en effet obligé la compagnie publique à accomplir un projet d'investissement de plus de 20 milliards de livres en Angleterre, un montant supérieur aux fonds propres du groupe… Pour préparer le terrain, il avait brutalement changé les statuts légaux d'EDF il y a deux ans et remanié le conseil d'administration. Cherche-t-il à lever des fonds facilement en vendant le capital d'EDF ? Pas sûr, car la compagnie publique rapporte à l'Etat deux milliards d'euros par an en dividendes. Dès lors, pourquoi céder EDF  ?

    Difficile, quand l'on parle de guerre industrielle, de ne pas évoquer le cas révélateur de Gemalto. Véritable « protecteur numérique des identités » (passeports biométriques, transactions bancaires, télécommunications 4G et 5G), l'entreprise cotée au CAC 40 capterait entre 60% et 80% du marché mondial de la carte à puces.

    Problème : le groupe issu du français Gemplus n'a plus grand-chose de tricolore. En 1999, le fonds américain Texas Pacific Group (TPG) - d'apparence anodine - tentait une première approche. Refoulé deux fois par le directeur général de Gemplus, il décidait alors de mener des négociations discrètes avec l'actionnaire minoritaire Marc Lassus, lequel accepta qu'il prenne 26% du capital. En contrepartie de l'investissement, TPG obtenait de déplacer le siège social au Luxembourg et de nommer la moitié du conseil d'administration. Dès 2001, les fondateurs de Gemplus comprenaient que la volonté des Américains était de transférer aux Etats-Unis les précieux brevets déposés dans la sécurité numérique. Une guerre d'actionnaires s'ensuivit, qui se termina par l'éviction des dirigeants historiques de Gemplus du conseil d'administration! En 2002, TPG plaçait à la tête du groupe français Alex Mandl, un haut responsable du géant américain des télécommunications AT&T. L'homme était également administrateur de In-Q-Tel, le fond de capital-risque crée par la CIA dix ans plus tôt pour capter les technologies les plus avancées… Il est encore aujourd'hui à la tête de l'entreprise.

    La guerre industrielle est-elle perdue ? Non. Toutes les chaînes de production contenant du savoir-faire à haute valeur ajoutée n'ont pas été fermées, et le pays possède des écoles industrielles de pointe. « Les ingénieurs américains ne nous impressionnent pas du tout. Car nous avons en France les meilleurs ingénieurs du monde. Cela fait partie de notre culture », confiait récemment un cadre d'un important industriel de l'armement. Tout peut être construit en temps et en heure pour qui souhaite ne pas se placer dans la dépendance de l'ailleurs.   

    Ludovic Greiling est journaliste. Ancien collaborateur du Revenu français, spécialisé dans l'économie et les grandes entreprises, il travaille aujourd'hui pour différents journaux français et internationaux. Il est l'auteur de Monnaie et pouvoir (éd. Apopsix, 2015).

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