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LAFAUTEAROUSSEAU - Page 1299

  • Pour conclure sur Johnny ... Le show-biz, premier corps de l’État ?

     

    par Gérard Leclerc

     

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    Je n’en attendais pas moins de Régis Debray, au lendemain de la journée des obsèques de Johnny Hallyday. Refusant de rentrer dans l’unanimisme émotionnel, il tance sérieusement les principaux dirigeants du pays, le Président en premier lieu : « Combattre étant devenu honteux, le héros n’est plus celui qui se sacrifie pour sa patrie ou pour une cause, mais celui qui se fait voir et entendre de tous, devenant milliardaire du même coup. » Nous avons assisté, samedi, à « l’institutionnalisation du show-biz, nouveau corps de l’État, sinon le premier d’entre eux ». Comment refuser à Régis Debray son diagnostic ? Il est trop évident que par rapport au général de Gaulle, nous avons changé d’époque, de mœurs et de mentalité. Quand Édith Piaf s’en est allée, le général ne l’a pas accompagnée au Père Lachaise, pas plus d’ailleurs qu’il n’a suivi le convoi de Jean Cocteau, le poète mort en même temps que la chanteuse. « En 1963, le politique ayant assez d’autorité et de prestige par lui-même, il se souciait peu d’aller voler un peu de popularité, par la magie du côte à côte, auprès des stars du moment. »

    On se reportera au Monde daté d’aujourd’hui pour lire en son entier ce superbe article vengeur, dont je n’ai pas cité les formules les plus cruelles pour nos politiques. Son principal mérite dépasse la polémique, en replaçant l’événement dans sa logique sociologique. C’est celle qui, personnellement m’a retenu, ne pouvant communier à un culte qui n’était pas le mien. De ce point de vue, l’analyse que Jean-Pierre Le Goff développait, il y a quelques jours, pour Le Figaro, rejoint celle de Régis Debray : « Dans les sociétés démocratiques modernes, l’adolescence n’est plus seulement considérée comme une classe d’âge transitoire – qui au demeurant ne cesse de s’allonger avec le développement du chômage des jeunes et la difficulté de se loger. Elle a été valorisée comme telle et a été progressivement érigée en nouveau modèle social de comportement des temps modernes. » Les baby boomers qui ont accompagné Johnny font encore partie de ce peuple adolescent dont parlait Paul Yonnet en 1985.

    Mais, me dira-t-on, en ouvrant la Madeleine à ce grand show funéraire, l’Église ne s’est-elle pas compromise avec un fâcheux glissement sociétal ? Ce n’est pas du tout mon avis. L’Église a introduit une toute autre dimension dans l’événement, en rappelant sa foi à travers ses textes de référence. Ainsi perçait une lumière qui donnait un tout autre sens au deuil du rocker.  

    Gérard Leclerc

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 12 décembre 2017

  • Ça continue à grimper pas mal sur Lafautearousseau !

     

    Courbe des visites - Période du 5 au 11 décembre 2017 

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  • Jérusalem, la folle décision de Trump

     

    Par Antoine de Lacoste

     

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    Trump n'en rate pas une pour embraser l'Orient.

    Il a d'abord remis en cause l'accord nucléaire avec l'Iran, accusant, contre tout bon sens, celle-ci de terrorisme. Il a ensuite donné blanc-seing à l'Arabie Saoudite pour ses initiatives calamiteuses au Yémen avec, à la clé, une guerre sans issue. Puis il laisse ses troupes occuper la Syrie en toute illégalité et sans savoir quoi en faire.

    Il s'attaque maintenant au symbole des symboles : Jérusalem.

    En annonçant que les Etats-Unis transféreront leur ambassade de Tel-Aviv à Jérusalem, Trump fait ce qu'aucun de ses prédécesseurs n'avait osé, même George Bush junior, pourtant peu avare d'initiatives calamiteuses.

    Il conforte ainsi Israël dans sa politique qui viole constamment le droit international, en particulier par sa colonisation brutale de terres palestiniennes. Elle se traduit par des expropriations répétées, des vols en fait (lisez à ce sujet l'émouvant petit livre de Vera Baboun, maire chrétienne de Bethléem : Ma ville emmurée).

    Mais Trump n'en a cure car il fait cela pour de strictes raisons de politique intérieure.

    Il faut savoir que le Congrès américain a voté en 1995 le Jérusalem Embassy Act, qui prévoyait ce transfert. Mais une clause prévoyait que le Président des Etats-Unis pouvait repousser de six mois en six mois l'application de cette loi en fonction de la situation géopolitique locale.

    Pendant sa campagne électorale, Trump, pour conforter son électorat de la droite évangélique protestante, s'était engagé à ne plus repousser l'application de l'accord. Pour les évangélistes, en effet, le retour du Messie sur terre passe par la reconnaissance d'Israël comme Etat juif avec Jérusalem comme capitale...

    De plus, de très importants bailleurs de fonds de la campagne présidentielle de Donald Trump venaient du lobby sioniste (comme d'ailleurs chez Hillary Clinton) et les pressions, une fois l'élection acquise, étaient de plus en plus fortes.

    Certes, aucune mesure concrète n'a encore été prise pour le déménagement de l'ambassade. Mais la décision étant maintenant annoncée, le principal verrou a sauté et ce n'est plus qu'une question de temps.

    Il est évident que les Palestiniens n'ont guère les moyens de s'opposer à une telle mesure et si une nouvelle révolte éclate elle sera, comme les autres, sanglante mais stérile. Tout au plus, cela peut permettre aux deux factions rivales, l'Autorité palestinienne et le Hamas de se rapprocher. Mais là encore, cela ne saurait peser sur le cours des événements.

    Les réactions dans le monde arabe ont été à l'aune des divisions actuelles : Ryad s'est à peine exprimé, la Jordanie, gardienne des lieux saints musulmans, a émis une protestation de principe et Téhéran a accusé l'Amérique de provocation.

    Poutine a condamné bien sûr, tout comme les dirigeants occidentaux mais que peuvent-ils faire d'autre ?

    Alors c'était au monde chrétien de réagir, en particulier le Vatican. Car au fond cette nationalisation de Jérusalem au profit d'un Etat confessionnel, lieu où le Christ est mort sur la Croix et où des millions de pèlerins viennent chaque année se recueillir sur son tombeau, est un acte qui attaque le cœur du christianisme.

    Mais il ne s'est rien passé, ou presque.

    Alors, devant cette passivité générale, il faut au moins que les catholiques prennent conscience de l'offense qui leur est faite.  

    Retrouvez l'ensemble des chroniques syriennes d'Antoine de Lacoste dans notre catégorie Actualité Monde.

  • L'écriture inclusive, un projet mort-né

    « Ahora, me dirijo a todos los Españoles » Felipe VI d'Espagne

     

    En deux mots.jpgL'hubris féministe a sans-doute passé les bornes et cela ne lui a pas réussi.

    Le lobby des enragées du féminisme le plus discutable a franchi les limites non seulement de la sottise et de la loufoquerie mais encore tout bêtement du praticable, en tentant de faire passer en force l'écriture dite inclusive.  

    Ce fut organisé comme on tente un coup. En l'occurrence un coup de main linguistique, un coup sur l'écriture d'un peuple, sur une langue écrite, à défaut de pouvoir l'accomplir sur la parole ... Car l'écriture inclusive n'a pas d'effet sur la langue parlée. Elle ne se dit pas autrement que ne se dit l'écriture ordinaire. 

    Louis-Joseph Delanglade a écrit ici-même que le sort de l'écriture inclusive est scellé. Et cela nous semble l'évidence simplement à cause, si l'on peut s'exprimer ainsi, de son impraticabilité. Le Monde - qui a pris fait et cause pour elle - est-il prêt à paraître en écriture inclusive ? Ce serait une excellente chose, s'est amusé à dire Alain Finkielkraut en posant la question, car il y perdrait tous ses lecteurs. 

    Alors, le président de la République, le Premier ministre, le ministre de l'Education Nationale, l'Académie française et une kyrielle d'autorités diverses, ont condamné le projet. Peut-être, d'ailleurs, était-il condamné en quelque sorte de par sa propre nature. Il est mort-né proprio motu. 

    Mais les manies prétendument féminisantes du discours public continuent de faire rage. Par exemple les ridicules « celles et ceux », « toutes celles et tous ceux », « chacune et chacun » mille fois répétés, mécaniques et stupides. A commencer par le pauvre Macron dont le verbe en est dramatiquement surchargé, encombré, plombé. Et à sa suite, tous les autres.  

    Nous nous rappelons avoir envié les Espagnols lorsque nous avons écouté le discours du roi Felipe VI, en pleine crise catalane, le 3 octobre dernier. Nous nous sommes dit qu'ils étaient peut-être devenus moins stupides que nous ne le sommes désormais. Au début de sa conclusion, le roi déclare : « Ahora, me dirijo a todos los Españoles », « maintenant, je m'adresse à tous les Espagnols ». Il y avait sans-doute peu de risque qu'il se trouve plus d'une poignée de sottes gens dans son pays pour s'aviser que le roi ne s'adressait pas aux Espagnoles ...   

    A lire dans Lafautearousseau ...

    « Ça ne marchera pas »

  • Tandis que Macron rêve, l’industrie française continue de « crever » !

     

    Par Marc Rousset 

     

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    Macron, ce technocrate rêveur de l’ENA, nous parle de l’Europe qui protège d’une façon abstraite avec des mots enchanteurs, mais la triste réalité, c’est que l’industrie européenne continue de « crever » sous les coups du libre-échange mondialiste.

    ArcelorMittal et les sidérurgistes européens sont montés tout dernièrement au créneau pour lutter contre le dumping chinois et ont obtenu, dans le cadre de l’Union européenne, des protections tarifaires ainsi qu’une réduction des surcapacités chinoises de production. Mais le festival continue dans d’autres secteurs industriels.

    Dans l’aluminium, la Chine connaît des surcapacités de production qu’elle subventionne, grâce à son emprise étatique, en vendant l’énergie chinoise à des prix ridicules, ce secteur étant un très gros consommateur d’électricité, ce qui est déterminant pour le prix de revient. Alors que les droits de douane américains sont très élevés et susceptibles encore d’augmenter, les droits de douane européens ne sont que de 7,5 %.

    50 % des bobines et profilés en aluminium sont aujourd’hui importés et le nombre de sociétés productrices en Europe est passé de 40, en 1990, à 15, en 2017. Ce secteur industriel va donc avoir à se battre tout comme celui de l’acier européen.

    Le secteur européen du silicium, qui sert à fabriquer les batteries de voiture électrique, doit faire face lui aussi à la surcapacité chinoise et au dumping chinois. Alors que la Chine produit 4,6 millions de tonnes par an, la consommation mondiale n’est que de 2,7 millions. Tandis que les États-Unis ont un droit de douane de 139 % et que le Canada l’a même porté à 235 %, les braves Européens en sont toujours à 16,8 % !

    Les règles de l’OMC et de Bruxelles pour contrôler et calculer le dumping chinois sont mises à mal en Chine, tant les intérêts de l’État, du parti et des entreprises privées chinoises sont étroits et interpénétrés. Là encore, tout comme pour le droit-de-l’hommisme en matière d’immigration, la naïveté technocratique européenne n’a pas de bornes. 

    Et le bouquet, c’est que l’Union européenne vient de changer ses méthodes d’analyse du dumping, ce qui aura pour effet de diminuer encore davantage la protection douanière de « l’Europe qui protège » de monsieur Macron. Il suffirait donc que les prix baissent encore très légèrement pour que tous les emplois industriels dans le secteur du silicium en Allemagne, France (1.000 emplois) et Espagne soient perdus définitivement, avec en plus la perte définitive de technologie.

    Et, en même temps, l’Union européenne, dont c’est la seule raison d’exister semble-t-il, continue à passer des accords libre-échangistes avec le Canada et la Corée du Sud pour achever le patient industriel européen. La seule lueur d’espoir vient, paradoxalement, de Trump qui fait tout pour mettre à mort la machine infernale libre-échangiste de l’OMC à Genève. Trump, par exemple, se refuse à nommer des juges pour les organes d’appel des différends entre pays, afin de paralyser l’OMC.

    Pour nous sortir d’affaire avec un taux de chômage minimum réel en France de 20 %, Macron ne pense qu’en termes de jeunes pousses, alors qu’il faut penser bien évidemment aux emplois à venir des jeunes pousses, mais d’abord et aussi à préserver les emplois industriels ainsi que les technologies existantes.

    Il est peu probable que les emplois futuristes à venir des sciences de la vie et des technologies nouvelles comblent les trous béants de nos emplois industriels, de la disparition complète d’industries telles que l’industrie du textile. Le marché de dupes de la pensée unique, c’est que pour calmer les craintes des peuples, on nous avait assuré depuis le Kennedy Round en 1967, avec des menteurs bien rémunérés du style Pascal Lamy, que l’Europe aurait les emplois rémunérateurs d’avenir et que les pays émergents auraient seulement les emplois industriels mal payés, polluants du passé.

    La vérité, c’est que la Chine va mettre toute l’Europe au chômage en ayant même plus d’emplois d’avenir que l’Amérique des GAFA si les Européens ne réagissent pas avec des murs douaniers – ce qu’a très bien compris Trump -, d’autant plus qu’on ne compte plus la disparition des sièges sociaux et des groupes industriels en France (Alcatel, Pechiney, Lafarge, Sacilor, Alstom, Technip…).   

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    Économiste

    Ancien haut dirigeant d'entreprise

  • On n'est pas forcément en désaccord avec Bernard Guetta ...

     

     flags-of-170-countries-represented-at-oyw-2011-photo-by-one-young-world1.jpg« Le nationalisme est l'état de nature des relations internationales ».

     

    Bernard Guetta

    France Inter, lundi 11 décembre 2017

     

  • Bordeaux ce mercredi 13 décembre une conférence de Laurent Dandrieu à ne pas rater : Eglise et immigration

     

    Laurent Dandrieu ose poser les questions

    « Le catholicisme est-il condamné à devenir un « autrisme » qui sacrifie le plus proche au plus lointain, un universalisme béat, destructeur des nations et des identités particulières ? Est-il enchaîné par la logique évangélique à une sorte d’angélisme de la charité, ne se souciant plus des conséquences de ce qu’il préconise, au risque de l’autodestruction de ceux qu’il encourage à l’accueil ? Ou bien existe-t-il la possibilité d’un autre discours qui, sans renier ses impératifs de la charité, sauvegarderait aussi les droits des peuples et les identités européennes ? »

    Nous vous invitons à venir écouter son analyse et à échanger sur ce sujet qui relève du Bien commun, le mercredi 13 Décembre à l’Athénée de Bordeaux.

    Bernard Pascaud

    A diffuser sans modération

     

  • De la Catalogne à la Corse : vers l’éclatement des nations ?

    Ajaccio 

     

    Par François Marcilhac

     

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    L’heure serait-elle à l’éclatement des États-nations  ? Voire de toute structure politique un peu importante  ?

    Le moins qu’on puisse dire est que nos médias ne font pas dans le détail, en amalgamant des situations qui, pourtant, n’ont pas grand-chose à voir entre elles. Comparaison n’est pas raison, et faire des parallèles entre la Catalogne, l’Écosse, la Corse, la Nouvelle-Calédonie voire le Brexit peut se révéler extrêmement risqué, même si cela excite la curiosité de l’auditeur. Non, la Catalogne n’est pas à l’Espagne ce que la Corse est à la France ou l’Écosse au Royaume-Uni.

    Comparaison n’est pas raison

    Le Brexit, lui, ne traduit pas une volonté de rompre avec une unité politique fondée sur l’histoire, l’Europe ne s’étant jamais réalisée, ni même sérieusement pensée comme telle depuis 1957. Quant à la Nouvelle-Calédonie, l’irrédentisme d’une partie des Canaques a été, sur fond de sous-développement économique surtout de la province Nord que dirigent les séparatistes du FLNKS, savamment entretenu, dans un premier temps du moins, par ses puissants voisins anglo-saxons, désireux de voir la France chassée d’une partie du monde considérée comme leur zone exclusive d’influence, et encouragés en cela par… le pouvoir politique français lui-même (Mitterrand, au premier chef) au nom de l’idéologie anticolonialiste et d’une France faisant profil bas sur le plan géopolitique. Nous aurons l’occasion d’y revenir. Dans le précédent numéro, Roch Cauvigny a montré comment la situation commençait d’évoluer. Fort heureusement, aujourd’hui, Valls, président de la mission parlementaire d’information sur l’avenir institutionnel de l’archipel, se voit plus en Clemenceau qu’en Mitterrand. Mais le Premier ministre, qui est venu, le week-end dernier, lancer l’année référendaire, sera-t-il à la hauteur  ? Faire profil bas serait la pire façon de chercher le consensus.

    Et que peut signifier ce lointain territoire pour Macron, qui veut enfermer la France dans les limites étroites d’une Europe sous hégémonie allemande à laquelle il veut abandonner notre politique extérieure, comme en Afrique – une Allemagne qui, soit dit en passant, ne cesse de l’humilier, comme l’a montré l’affaire du glyphosate, prorogé par l’Europe sur ordre de Merkel contre l’avis de Paris  ? Espérons seulement – mais ne rêvons pas trop – que nos compatriotes de l’océan Pacifique sentent le désir du pays légal de voir l’archipel rester français, ce qu’il est pleinement de par l’histoire, seul guide en la matière  : les séparatistes rêvent d’un État ethnique, voire racial, alors que, comme le rappelait Bainville, «  la France, c’est mieux qu’une race, c’est une nation  ». En ce sens, la Nouvelle-Calédonie est une France en miniature, puisqu’elle s’est prêtée, depuis notre arrivée, comme la métropole, «  à tous les échanges de courants, ceux du sang, ceux des idées  ». D’autant que l’archipel n’est pas viable économiquement et que les investisseurs trouvent désormais urgent d’attendre… le résultat du référendum qui aura lieu à la fin de 2018.

    Quoi de commun, donc, entre la Catalogne, la Corse, l’Écosse, sinon que, face à l’instabilité toujours plus grande d’espaces géopolitiques et économiques mondialisés, qui se cherchent un nouvel équilibre – Carl Schmitt parlait de nomos –, les forces centrifuges demeurent minoritaires  ? Ce qui se vérifiera peut-être aussi, espérons-le du moins, pour la Nouvelle-Calédonie. Certes, les Corses ont voté «  nationaliste  », ce dimanche 3 décembre, au premier tour des élections territoriales visant à nommer leurs représentants à la toute nouvelle collectivité unique qui, regroupant les compétences de la région et des deux départements actuels, entrera en fonction le 1er janvier 2018  : la liste «  nationaliste  » Pé a Corsica (Pour la Corse), que l’indépendantiste Jean-Guy Talamoni a conduite avec l’autonomiste Gilles Simeoni (un contrat de mandature les lie), est arrivée largement en tête avec plus de 45  % des voix. Les «  nationalistes  » avaient déjà remporté Bastia en 2014 et la région en 2015 et envoyé trois députés à l’Assemblée nationale aux législatives de juin dernier. Le second tour n’aura pas encore eu lieu à l’heure où paraîtront ces lignes, mais, même si les «  nationalistes  » ont profité de la large abstention du premier tour (quelque 52  %), décevante compte tenu de l’enjeu, les résultats définitifs, même avec un léger sursaut des électeurs – ou grâce à celui-ci –, devraient confirmer leur victoire  : les «  nationalistes  » dirigeront la nouvelle collectivité unique.

    L’indépendance dans dix ans  ?

    C’est pourquoi Talamoni a eu soin de rappeler au soir du premier tour qu’il ne souhaitait aucun processus d’indépendance avant dix ans, conformément au contrat de mandature  : il sait, et reconnaît d’ailleurs, que le courant indépendantiste est très minoritaire (les autonomistes, au premier tour des régionales de 2015, pour lequel ils n’avaient pas fait alliance avec les indépendantistes, avaient obtenu 2,5 fois plus de voix qu’eux). Aussi ne doit-il pas effrayer les électeurs pour le second tour, les Corses n’ayant voté aussi massivement pour les listes «  nationalistes  » que parce que les autonomistes y paraissent neutraliser les revendications indépendantistes, qui supposent du reste, pour être crédibles, que la Corse puisse acquérir une certaine autonomie économique et financière. Or le développement économique de l’île de Beauté, dont les anciens possesseurs génois ne s’étaient guère souciés, doit tout à ses relations avec le “continent”, un continent que les élites corses ont toujours considéré comme le complément naturel de l’île. Ce n’est pas demain que la Corse représentera 20  % du PIB de la France (comme la Catalogne pour l’Espagne). L’importance de l’emploi public le montre  : l’île, qui est pauvre, pour vivre et se développer, a besoin de la solidarité nationale.

    Il n’en reste pas moins que Talamoni a raison lorsqu’il prévient, à propos du résultat  : «  Il faudra que Paris le prenne en compte  !  » Et de rappeler déjà à Macron ses exigences  : la reconnaissance officielle de la langue corse, un statut de résident pour réserver l’immobilier aux Corses, l’amnistie des prisonniers «  politiques  », dont l’assassin Yvan Colonna. Les indépendantistes comptent, à terme, sur d’éventuelles fautes politiques de Paris pour décrédibiliser la voie autonomiste et radicaliser – le modèle catalan servant alors à leurs yeux – leurs objectifs. Pourtant, comme le remarque Gilles Simeoni  : «  le modèle catalan n’est pas applicable  ». Ni l’autonomie actuelle de la Catalogne, ni la puissance économique de cette généralité, ni le jusqu’au-boutisme d’un pays légal catalan qui se savait minoritaire et qui a voulu forcer le destin ne sont applicables à la Corse. D’ailleurs, il n’y a pas de modèle catalan… pour la Catalogne elle-même. Comment serait-il valable pour la Corse  ?

    Quand la République n’a plus les moyens d’imposer un jacobinisme asséchant, mâtiné d’intérêts bassement partisans, qui provoque un légitime rejet, elle brade… De la cause à l’effet. Toute son histoire tient dans ce mouvement de balancier, qui jure avec la patience de nos rois et leur respect de la diversité des peuples composant la France. Les «  nationalistes  » corses jouent sur l’incapacité de la République à avoir une juste conception de l’unité nationale pour promouvoir leur vision fantasmée de l’histoire,. Ils savent qu’elle est incapable de donner à la Corse un statut qui ne mette pas en cause son appartenance à la collectivité nationale tout en préservant l’identité de l’île. Une identité où joue à plein, également, la question de l’immigration, la conception du vivre-ensemble n’étant pas la même à Bastia et à Paris.    

  • La fin du califat de Daesh

    La proclamation du califat par l'Etat islamique le 29 juin 2014

     

    Par Antoine de Lacoste

     

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    La dernière ville tenue par Daesh en Syrie a été reprise par l'armée syrienne il y a quelques jours : elle s'appelle Abou Kamal et se situe le long de l'Euphrate, près de la frontière irakienne. Cet évènement n'a été, à de rares exceptions près, que peu souligné par les médias. Il est vrai que ces derniers ont traité la guerre en Syrie de façon assez particulière depuis son déclenchement...

    Pourtant, l'événement est d'importance.

    La proclamation du califat par l'Etat islamique le 29 juin 2014 a été un événement considérable car dans le monde musulman, le califat a une portée symbolique très forte. Il rappelle les grandes puissances que furent les califats de Damas, de Bagdad, du Caire et bien sûr le califat ottoman tout au long des siècles. Age d'or de l'islam, parfois très amplifié, mais qui continue à séduire et à susciter des engagements fanatiques comme l'a prouvé la guerre en Syrie.

    Ce vieux rêve d'une unification musulmane qui abolit les frontières, héritage pour beaucoup de la colonisation occidentale, a repris corps lorsque Abou Bakr al-Baghdadi a proclamé le califat et exigé un serment d'allégeance des musulmans du monde entier.

    Cet acte symbolique a eu un retentissement tel que des dizaines de milliers de volontaires sont venus en Syrie accomplir un devoir considéré comme sacré, car prélude à la conquête mondiale du monde par l'islam.

    Les islamistes syriens se sont pourtant divisés sur cette question. Une partie des militants d'Al Nosra, affiliés alors à Al Quaida, étaient hostiles à cette proclamation car ils pensaient qu'une concrétisation territoriale avant la victoire en Syrie ne pourrait qu'aider le régime. En effet, un acte aussi symbolique risquait de faire basculer beaucoup d'indécis sunnites dans le camp de Bachar.

    C'est en effet ce qui s'est passé tant la perspective de vivre sous la loi de l'Etat islamique était peu attrayante pour l'élite sunnite syrienne qui s'était toujours accommodée du régime alaouite.

    Elle a également renforcé la volonté des alliés de la Syrie, Iran et Hezbollah libanais en tête, de ne pas laisser les islamistes sunnites gagner la guerre. La perspective de se retrouver avec un califat islamiste à leurs portes ne les enchantait pas vraiment...

    En suscitant des milliers de volontaires caucasiens, elle a également aidé à l'intervention russe, guidée par bien d'autres raisons il est vrai. Mais la perspective de pouvoir éliminer l'élite islamiste tchétchène, ouzbeke ou turkmène a intéressé Poutine comme il l'a lui même déclaré.

    Et pourtant l'Etat islamique a failli gagner : si la France et les Etats-Unis avaient effectivement bombardé la Syrie comme François Hollande et ses conseillers en rêvaient en août 2013, nul doute que cela aurait accéléré la déliquescence d'une armée syrienne assez démoralisée.

    Al Nosra, d'où sont issues les forces vives de Daesh, était alors le mouvement islamiste le plus puissant et la proclamation de l'Etat islamique aurait pu se faire non à Raqqa mais à Damas...

    Mais aujourd'hui Daesh est vaincu et il faut saluer cette bonne nouvelle.

    Il faut la saluer mais il ne faut pas se faire d'illusion : de nombreux militants de l'Etat islamique sont dans la nature et, pour certains, déjà en Europe.

    De plus, Al Nosra a profité des derniers mois exclusivement consacrés à la lutte contre Daesh pour se renforcer. Ce mouvement a beau s'appeler maintenant Fatah al Cham et ne plus être affilié à Al Quaida, il est exactement le même et ses militants sont aussi sanguinaires que ceux de Daesh. Seule la question tactique divisait ces deux organisations.

    Les Syriens sont encore loin d'en avoir fini avec les islamistes.   

    Retrouvez l'ensemble des chroniques syriennes d'Antoine de Lacoste dans notre catégorie Actualité Monde.

  • Johnny à la Madeleine

     

    par Gérard Leclerc

    A ceux qui croient au Ciel comme à ceux qui n'y croient pas, les obsèques catholiques de Johnny Halliday sont apparues conformes à la tradition religieuse majoritaire des Français.  LFAR

     

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    Luc Le Vaillant a écrit dans Libération un étonnant billet sur la cérémonie de l’église de la Madeleine, soulignant que « l’enterrement de Johnny Hallyday raconte les retrouvailles impromptues de l’État français et de l’Église catholique ».

    Au milieu d’un certain nombre de rosseries à l’adresse de l’Église comme à celle du défunt, le journaliste fait cette concession, qui, sans doute, lui a un peu coûté mais dont l’évidence n’est pas douteuse : « Le plus intéressant dans cette cérémonie est qu’elle témoigne de la difficulté de la République à imaginer des codes et des rituels en matière funéraire. La mort reste la chasse gardée de la religion, même si on applaudit désormais la sortie du cercueil et si chacun joue sa partition éplorée au-delà des cantiques référencés. Face au jansénisme protestant, au silence judaïque et à la prudence d’un islam controversé, le catholicisme sait faire valoir ses atouts historiques pour emporter la mise au sein de la société du spectacle. Il peut compter sur son patrimoine chamarré, sur ses tenues d’une excentricité gender comme sur ses objets du culte dorés sur tranche. »

    Cette citation réclamerait un long commentaire. On pourrait notamment s’interroger sur cette étrange attente d’un rituel de la mort de la part de la République. Comme si ladite République avait la capacité de se substituer à tout ce que sous-entend le concept de religion. La confusion est constante en France lorsqu’on parle de laïcité : s’agit-il de la séparation du spirituel et du temporel, ou s’agit-il de la création d’un substitut de religion ? Auguste Comte avait inventé sa religion de l’humanité, et lorsqu’on parle de baptême laïc, on se situe dans le même registre mimétique, mais on bafoue ipso facto la séparation des ordres, en conférant à l’État laïque ce qu’il ne saurait revendiquer, sauf à n’être plus laïque.

    Mais ce n’est pas l’essentiel. La véritable objection que l’on pourrait faire au papier de Luc Le Vaillant c’est d’éviter l’essentiel de la cérémonie religieuse de la Madeleine, en passant complètement sous silence l’extraordinaire homélie de Mgr de Sinéty, prononcée dans la suite des textes de l’Écriture sainte. On comprend qu’il n’ait pas osé, parce que ses sarcasmes auraient paru dérisoires face à la force éclatante du message évangélique qui, dans ces circonstances, atteignait l’immense foule dans l’intimité d’un chacun, au-delà de tout le décorum : « Comme Jean-Philippe devenu Johnny Hallyday, nous sommes tous appelés à laisser percer en nous cette lumière divine qui fait de nous des icônes de l’Amour de Dieu plutôt que des idoles dont la vie s’épuise. »  

    Gérard Leclerc

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 11 décembre 2017

  • Paris ce mardi 12 décembre, Charles de Meyer aux Mardis de Politique magazine, une conférence à ne pas rater ..

     

    Rendez-vous à partir de 19 h 00 - Conférence à 19 h 30 précises
    Participation aux frais : 10 euros -  Etudiants et chômeurs : 5 euros

    Salle Messiaen, 3 rue de la Trinité  Paris 9° - Métro La Trinité, Saint-Lazare

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    Renseignements : Politique magazine, 1 rue de Courcelles Paris 8° - T. 01 42 57 43 22

  • Sachons raison garder

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

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    Peu importent au fond les motivations qu’une presse forcément hostile et des politiques forcément impuissants prêtent à la reconnaissance de Jérusalem comme capitale de l’Etat hébreu : peut-être M. Trump a-t-il cédé aux instances d’un entourage familial ultra-sioniste, peut-être a-t-il voulu complaire aux fondamentalistes protestants qui l’ont élu, peut-être tout simplement est-il ce président grotesque et imprévisible que tous ou presque se plaisent à dénoncer.

    Certains pensent pourtant, à rebours, que sa décision s’inscrit dans une politique proche-orientale des Etats-Unis qui, tirant volontairement à hue et à dia, contribue à plonger et maintenir toute la région dans un chaos indescriptible depuis quelques dizaines d’années, tactique leur permettant de ménager au mieux leurs intérêts. D’autres enfin font valoir que les instances de l’Etat d’Israël siègent de facto à Jérusalem (ouest) et qu’y installer une ambassade relève du réalisme le plus élémentaire. 

    Mais qu’importent donc toutes ces hypothèses et approches plus ou moins savantes avancées par nos géopoliticiens patentés. Les plus procéduriers des ennemis de M. Trump pourront bien lui opposer un prétendu « droit international » en se basant sur plusieurs déclarations de l’ONU (résolution 181 de 1947 stipulant que Jérusalem devrait bénéficier d’un statut sous tutelle internationale ; résolutions 252 de 1968 puis 476 et 478 de 1980 rappelant que Jérusalem devait bénéficier d’un statut spécifique interdisant toute présence d’ambassades) et sur les accords d’Oslo de 1993 stipulant que Jérusalem serait à terme la capitale de chacun des deux Etats, hébreu et palestinien : c’est oublier que tous ces bouts de papier ne valent rien sans la première puissance mondiale, principale contributrice au budget des Nations Unies et seule garante des accords d’Oslo. De même est-il vain de rappeler que les pères fondateurs d’Israël, M. Ben Gourion en tête, n’auraient sans doute pas souhaité que Jérusalem fût un jour leur capitale, refus réitéré par M. Rabin en 1995. Vain aussi de prédire qu’on risque d’assister à des mouvements d’humeur de foules islamiques fanatisées ou de subir quelques attentats supplémentaires perpétrés au nom d’Allah : tout cela est devenu banal. 

    A défaut de pouvoir régler un problème sans doute insoluble car lié à la création même de l’Etat d’Israël, tenons-nous en aux faits et manœuvrons en conséquence. Pour une période indéterminée, la décision de M. Trump pourrait bien ouvrir un boulevard à la diplomatie française. En effet, alors que Russes et Américains ont à l’évidence choisi leur camp, ce qui est tout à fait en accord avec leur stature militaire et internationale, la France doit adopter d’autres façons de faire. Puissance « moyenne » mais puissance tout de même, son atout spécifique dans la région lui vient d’un rôle historique - rappelons qu’elle continue de posséder ou de « protéger » officiellement, c’est-à-dire avec l’accord des autorités légales israélienne et/ou palestinienne, des dizaines d’établissements culturels et religieux ; rappelons aussi qu’un traité multiséculaire la lie aux populations du Liban - qui lui confère une sorte d’autorité morale que personne ne lui conteste, bien au contraire. Dans cette optique, même si M. Macron a « regretté » la décision de M. Trump (pouvait-il, fallait-il d’ailleurs, faire autrement ?), il a montré par des paroles et des actes qu’il entendait maintenir, voire renforcer, le rôle et l’influence de la France dans l’ensemble de la région : on savait déjà que, concernant la Syrie, et contrairement à ses prédécesseurs, il avait décidé de privilégier le réalisme et non l’idéologie ; on l’a vu récemment inaugurer le « Louvre Abou Dhabi », puis aller vendre armes et avions à Ryad et à Doha, qui sont en froid ; il doit se rendre bientôt à Téhéran, l’épouvantail régional ; il ne se désintéresse pas du Liban, épicentre de la présence française, dans la politique intérieure duquel il vient d’intervenir en « libérant » M. Hariri et en organisant vendredi dernier à Paris une réunion du « groupe international de soutien au Liban ». 

    Dans ces conditions, Israël, dont il vient de recevoir ce dimanche le Premier ministre pour lui renouveler notamment sa désapprobation concernant Jérusalem, peut bien rester la chasse gardée des Américains : la déclaration de principe du chef de l’Etat suffit.   

  • Les maux des universités et les mots pour les dire

    Edgar Faure, le ministre de la loi de 1968, le type même de la fausse décentralisation qui n'aboutit qu'au chaos

     

    PAR JEAN-BAPTISTE DONNIER

    TÉMOIGNAGE. Il est des choses que même les esprits les plus libres n'osent plus exprimer. C'est pourtant là que gît le mal.

     

    173284753.jpgSi l'on peut encore rencontrer des universitaires qui publient, qui enseignent et continuent même, à leurs risques et périls, à user de leur liberté pour tenter de dire quelque chose de la vérité du monde, il n'est pas sûr que les universités françaises aient survécu aux incessantes réformes qui leur ont été infligées depuis que l'État en a pris le contrôle. De « l'Université de France » recréée par Bonaparte sur les ruines des anciennes universités détruites par la Révolution aux « pôles de recherche et d'enseignement supérieur » commués en « ComUE » (sic) et autres « unités de formation et de recherche » imaginés par nos énarques, les maux des universités se sont accumulés au point d'étouffer sous une gangue administrative digne du Gosplan soviétique les quelques restes de vie qui pouvaient y subsister.

    UNE DÉCENTRALISATION DE CARNAVAL

    Ces maux affectent aussi bien les institutions que les hommes qui en constituaient l'âme. Sur le plan institutionnel, les universités sont devenues des administrations centralisées à outrance, « pilotées » (pour utiliser un jargon administratif très significatif) par un Ministère tout puissant selon un modèle unique et des indicateurs purement quantitatifs appliqués indifféremment à toutes les disciplines de l'esprit rassemblées comme à la parade dans les 87 sections du Conseil national des universités. Les libertés que prétend leur avoir octroyé la loi du 10 août 2007 ne sont qu'un leurre destiné à occulter une partie du déficit public. Plaisantes libertés que celles d'universités dont les membres sont des fonctionnaires d'État, qui délivrent des diplômes habilités par l'État à des étudiants qu'elles sont tenues d'accueillir sans pouvoir les choisir, si ce n'est par tirage au sort ! Cela fait rire, en dehors de nos frontières. Non seulement les universités françaises ne disposent d'aucune autonomie réelle mais, pis encore, la centralisation qui les asservit se répand en elles comme un cancer. Soumises à une administration centrale qui les considère comme de simples rouages d'exécution de sa propre politique, elles imposent à des facultés réduites au rang de « composantes » la même sujétion que celle qui leur est imposée, de manière à former, au rebours de toutes les traditions universitaires, une véritable chaîne de commandement qui aboutit à subordonner la modification de l'intitulé d'un cours à l'avis d'une demi-douzaine d'instances aussi incompétentes les unes que les autres et, au final, à une décision ministérielle ! Quant à la recherche, séparée de l'enseignement, elle relève d'une administration peut-être encore plus caricaturale regroupant des « enseignants-chercheurs mono-appartenant » dans des « laboratoires » constitués sur un modèle scientifique unique, totalement inadapté à des disciplines telles que le droit ou les lettres. Dans ces disciplines, qualifiées de « sciences humaines et sociales » pour les faire entrer dans les carcans de la « recherche » administrée, ces « laboratoires » formés selon des critères qui n'ont évidemment rien de scientifiques sont de véritables gouffres financiers dont l'utilité est absolument nulle et la « production » inexistante.

    C'est dans ce « mammouth » institutionnel que sont déversés des masses d'étudiants, décérébrés par un catéchisme républicain dont la débilité intellectuelle n'a d'égal que l'inculture générale qui en découle, et qui sont, pour la plupart, totalement inaptes à suivre un enseignement universitaire digne de ce nom. Dans ces conditions, réclamer une sélection à l'entrée de l'université, comme s'obstinent à le faire certains, est malheureusement sans doute déjà dépassé. Sélectionner supposerait qu'il y ait de bons élèves, dotés d'une solide culture et de facultés de raisonnement appropriées, souhaitant intégrer l'université. Or, en réalité, les élèves issus des quelques établissements scolaires qui remplissent encore à peu près leur rôle, fuient massivement les études universitaires pour se précipiter vers les filières vraiment sélectives, celles qui n'examinent que les dossiers des candidats ayant obtenu une moyenne supérieure à 20 au baccalauréat ! Les modes de sélection pratiqués dans ces filières sélectives, habilement occultés par de savants algorithmes qui leur donnent une apparence de neutralité scientifique, prennent en considération, notamment, l'établissement d'origine des candidats ; un bachelier d'Henri IV ne « vaut » pas un bachelier du lycée Elsa Triolet de Marcq-en-Baroeul... Ces derniers, ainsi que tous ceux qui, pour M. Macron, « ne sont rien », échoueront (dans tous les sens du termes) à l'université. C'est ce qu'on appelle l'égalité républicaine.

    LA SEULE ET VRAIE LIBERTÉ DE PENSÉE

    Mais le plus grave n'est peut-être pas encore cet état de délitement général résultant d'une politique menée conjointement par tous les gouvernements successifs et leurs alter ego des organisations étudiantes et autres syndicats. Le plus grave est que cela s'accomplit de plus en plus avec la complicité active de beaucoup d'universitaires qui semblent se complaire dans une forme de servitude volontaire jusqu'alors inédite. Pendant plus de deux siècles, les universités furent le refuge de fortes personnalités qui surent maintenir, parfois à leur corps défendant, les traditions de liberté et l'esprit de corps des anciennes universités médiévales. Ces caractères ont quasiment disparu, comme si leurs modernes successeurs avaient intégré le modèle administratif que Bonaparte avait rêvé de leur imposer. Platon montre dans La République comment chaque régime produit un type d'homme qui en reproduit les traits caractéristiques ; le monde universitaire actuel en offre le triste exemple. La servilité, avec ses corolaires de vulgarité et de médiocrité, se répand partout grâce à des recrutements concoctés par quelque camarilla d'arrière-loge, de couloir ou d'alcôve, qui sait très bien écarter les candidats susceptibles de faire de l'ombre à ceux qui se sont incrustés dans l'université à la manière du bernard-l'hermite. Dans ces conditions, ceux qui, par leurs paroles et par leurs actes, voire par leurs moeurs ou leur pensée, ne se conforment pas au modèle dominant sont implacablement marginalisés, découragés, déconsidérés, afin que sans bruit et sans heurt s'efface de notre horizon cette Alma Mater décidément trop grande pour la plupart de ceux qui l'ont investie.

    Est-ce à dire qu'il est trop tard et que tout espoir de redressement serait par avance voué à l'échec ? Ce serait là sans doute une sottise absolue... Multa renascuntur ! Les maux des universités, aussi profonds soient-ils, ne sont pas irrémédiables ; mais il faut pour y remédier avoir d'abord le courage de les nommer.

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  • Grenoble : ce lundi 11 Décembre, conférence de Dolorine de Boschère au Centre Lesdiguières. A ne pas rater

     

    Tout le monde connait ce vieil adage qui sous-entend que l’histoire est pensée d’un seul point de vue et utilisée à des fins politiques voire idéologiques. A la suite de la longue tradition des chroniques hagiographiques du Moyen-âge, le XIXe siècle crée le Roman National, récit idéologisé de l'Histoire de France.

    En sommes-nous sortis? Un coup d’oeil sur les programmes d’Histoire de l’Education Nationale nous prouve une fois encore que l’enseignement de l’Histoire sert un but politique. Est-il possible d'envisager un enseignement de l'Histoire neutre? L'Histoire, clé de voûte de notre identité, doit elle forcément être instrumentalisée pour créer ou détruire le sentiment national ? Quelle est la frontière entre mythe et réalité en Histoire ? C'est à ces questions que nous tenterons de répondre.  

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