UA-147560259-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Actualité France - Page 302

  • Les deux parenthèses molles

    par Claude Wallaert 

    2939591524.jpg

    Jupiter ou voyou ? 

    C’était par un bel après-midi d’été, dans la mairie d’un bourg du centre de la France. Une petite assemblée se tenait dans la salle des mariages : onze adultes et quatorze enfants. Tous étaient joyeux, propres et pimpants : il s’agissait pour le maire, ceint de son écharpe tricolore, de remettre à une jeune femme la médaille de la famille française ; cette décoration a été créée en 1920 pour honorer les mères de quatre enfants et plus, de nationalité française. La maman du jour avait un mari, neuf enfants, et visiblement attendait le dixième … Le maire lut un hommage chaleureux qui montrait qu’il aimait bien ces administrés un peu atypiques. La maman remercia en quelques mots, avec un beau sourire, sans oublier personne, et en terminant par son mari, qui se tenait à ses côtés, aussi ému qu’il l’avait été quelque vingt ans auparavant, devant un autre maire, dans un autre village. Ensuite, on déboucha quelques bouteilles, on servit chouquettes et gougères, à la grande joie des enfants qui se mirent à courir partout…

    Dominant la scène, accroché au mur dans son cadre officiel, le président Macron, le sourcil conquérant, affichait son sourire de premier de la classe, les poings accrochés au bureau élyséen, campé entre les molles parenthèses de ses bras.

    C’était au moment où, dans cette paisible campagne, résonnaient encore, quoique un peu assourdis, les échos du tintamarre Benalla. Ce jeune homme de 26 ans a provoqué, en effet, un beau chahut à retardement, puisque les faits reprochés remontent au premier mai dernier, ce qui a mis au jour, comme l’on sait, des « curiosités » relatives à son salaire, à ses privilèges, ses ambitions présumées, et bien d’autres choses encore, attestées ou non, qui font les délices des journalistes qui ne savent pas comment vendre leur papier d’été. Il ne s’agit pas d’un criminel, non, mais à coup sûr de ce qu’on appelle un trublion, un intrigant, dont l’ambition un brin tapageuse et exhibitionniste a eu l’heur de plaire au personnage tout fier dans son cadre présidentiel ; notre jeune président serait-il tiraillé entre la majesté jupitérienne, et un certain tropisme décadent, voire quelque peu canaille ?

    1901356836.jpgOn peut le penser : qu’on se souvienne en effet de la fête de la musique, qui a vu Monsieur et Madame Macron recevant publiquement à l’Élysée, et avec la plus grande familiarité, un groupe de danseurs LGBT, dont l’un portait sur son ticheurte l’inscription « Fils de migrants, noir et pédé ». Quel contraste surprenant entre la véhémence grandiose des célébrations républicaines au Louvre et à Versailles, et les gesticulations adolescentes du jeune Emmanuel et, encore dernièrement, ses effusions dans les bras de la pulpeuse présidente de la Croatie, dont la valeureuse équipe venait pourtant de perdre la coupe du monde de football !

    photo_originale.jpgTout cela, en réalité, est à l’image de notre France : il y a encore des cloches qui sonnent dans le ciel de villages paisibles, des parents généreux, des enfants aimés et joyeux, des entrepreneurs intrépides, un superbe savoir-faire français, bref un patrimoine ancré et porteur d’avenir. Il y a aussi les caïds féodaux de la drogue, les zélateurs médiatiques d’un futur frelaté, la tourbe bourdonnante des partis politiques promoteurs d’ambitions dévoyées, et le pays en voie de désertification spirituelle, donc en danger de mort…

    Et dans son cadre officiel, sourcil conquérant, sourire ambigu, campé devant une fenêtre de l’ancien hôtel d’Évreux, Macron regarde ces deux France sur lesquelles il n’a aucune prise ; ses bras sont deux parenthèses molles… 

  • Sommes-nous dans les années trente ?

    Edouard Daladier et André François-Poncet, ambassadeur à Berlin (années trente)
     
    Par Jean-Philippe Chauvin
     

    1262631406.jpg

    Les vives polémiques sur les propos et les attitudes de l'actuel président, conjuguées avec les débats non moins vifs sur ce que l'on a le droit ou pas de dire, et qui a le droit, ou non, de s'exprimer, sont la manifestation de cette « dissociété » qui a pris l'avantage sur la communauté nationale (que certains voudraient résumer à un « vivre-ensemble » qui n'existe pas, ou plus) et sur l'agora intellectuelle que d'autres nommaient jadis « la république des lettres ».

    L'hystérisation contemporaine, qui se répand plus vite que du temps de l'imprimé grâce aux réseaux sociaux numériques, est parfois désespérante et elle nuit à la véritable discussion qui nécessite du temps et de la réflexion, ainsi qu'elle autorise la possibilité de se tromper ou d'être convaincu par d'autres arguments que les siens propres. Aujourd'hui, les délateurs, jadis félicités sur les assignats républicains des années 1790, sont les maîtres de jeux de plus en plus sombres et violents. 

    une-plaque-de-nom-de-rue-en-francais-pour-rue-de-la-republique-byb67h.jpgQuand, dans la lignée des inquiétudes « de gauche » médiatisées, quelques historiens et « Insoumis » évoquent les « funestes années trente », je pense pouvoir leur rétorquer quelques choses simples, et ouvrir, au sens noble du terme, la discussion sans préjugé : 

    1. Ces fameuses années furent d'abord, avant de sombrer dans la tragédie, des temps de recherche et de débats intellectuels dont les revues de l'époque, qu'elles se nomment RéactionEsprit,L'Ordre Nouveau ou La Revue du XXe siècle restent les preuves imprimées : les nouvelles pistes de la pensée antilibérale ; la critique de l'Argent et, pour certains, de la Technique ; la réflexion permanente sur les institutions et, au-delà, sur l'esprit du politique ; etc. Tout cela mérite le détour, et les partisans actuels de la décroissance y trouvent certaines de leurs références utiles à la compréhension du monde contemporain, de Georges Bernanos à Jacques Ellul, entre autres. 

    2. La liberté d'expression y était, en France, plus reconnue que dans nombre de pays limitrophes, même si cela s'accompagnait d'une violence de ton et, parfois, d'action, et que la République n'aimait pas toujours la contradiction, au point de faire assassiner, en son nom propre ou par d'autres qu'elle, quelques opposants trop virulents, comme au soir d'émeute du 6 février 1934... 

    3. Si les extrêmes ne sont guère recommandables, il n'y a néanmoins pas de « fascisme français » malgré les pâles copies de l'Italie mussolinienne chez les partisans du « Faisceau » (disparu dès 1927) de Georges Valois ou les « francistes » de Marcel Bucard, plus groupusculaires et mythomanes que vraiment actifs. Sans doute le traditionalisme moderne de Maurras, si critiqué et parfois fort critiquable par ailleurs, a-t-il empêché, et c'est tant mieux, l'éclosion d'un jacobinisme fasciste ou d'un totalitarisme hexagonal. 

    maulnier songeur.jpg4. Les problèmes contemporains, et le contexte général, sont-ils semblables à ceux d'hier ? C'est sans doute là qu'il y a, effectivement, le plus de similitudes avec les années trente : une ambiance délétère sur la scène internationale et une montée des exaspérations populaires dans nombre de pays, y compris en France, avec la rupture entre élites mondialisées et classes populaires et moyennes, entre les métropoles et les périphéries, en particulier rurales ; le retour de la question sociale, très souvent couplée à la nationale ; les « questions sociétales » qui ne sont que l'autre formulation de la crise de civilisation évoquée jadis par Thierry Maulnier (photo), Emmanuel Mounier et Jean de Fabrègues, entre autres. Mais les réponses d'aujourd'hui sont-elles forcément celles d'hier ? 

    Sans doute peut-on constater que les « non-conformistes » des années trente (dont Maulnier et Fabrègues furent « les lys sauvages ») ont échoué à imposer leurs idées à la tête de l’État avant 1958, même si de Gaulle, en bon lecteur des « néo-41U3SlEZAbL._SX235_BO1,204,203,200_.jpgmaurrassiens » (sans en être lui-même, malgré une légende tenace véhiculée par les hommes de Monnet, et reprise par Mauriac), en reprendra ensuite les grandes lignes dans sa Constitution de la Cinquième République et dans sa tentative (avortée) de résolution de la question sociale : l'inachèvement du règne gaullien et ses limites bien réelles, en renvoyant les principales idées des revues « hors-système » aux catacombes, ont enterré presque (ce « presque »qui laisse encore un espoir, n'est-ce pas ?) définitivement les espérances de ceux qui les animaient. Si les royalistes peuvent en concevoir quelque amertume, cela ne doit pas être une excuse pour déserter le combat intellectuel et politique et, au-delà, civilisationnel... « L'espérance, c'est le désespoir surmonté », clamait Bernanos. 

    Alors, que les royalistes de bonne volonté s'engagent, pour que ces nouvelles ou fantasmées « années trente » d'aujourd'hui ne débouchent pas sur le pire comme en 40, mais sur le Roi, « possibilité du Bien commun effectif », tout simplement ! Ce serait bien, tout compte fait, « la revanche de Maulnier », ou celle d'un autre « M » célèbre et controversé...   

    Le blog de Jean-Philippe Chauvin

  • Où Léon Bloy (avril 1914) donne une assez exacte description de notre chienlit

    Léon Bloy (1846-1917)

    Publié le 27 mars 2017 - Actualisé le 2 octobre 2018 

    « Atrophie universelle des intelligences, avachissement inouï des caractères, exécration endémique de la Beauté et de la Grandeur, obsèques nationales de toute autorité humaine ou divine, boulimie furieuse de jouissances, destruction de la famille et vivisection de la patrie, moeurs de cochons enragés, empoisonnement systématique de l'enfance, élection de chenapans ou de goîtreux dans les cavernes de la politique ou sur le trottoir des candidatures, etc., tels sont les fruits de l'arbre de la Liberté ».

            

    Léon Bloy, avril 1914

  • Quand la mémoire flanche

    Alger, 1957 ... 
    par Louis-Joseph Delanglade
     

    sinistra-italiana_una-nuova-proposta-il-documento_sfondo-rosso-170204 - Copie.jpg

    Pendant la campagne présidentielle, de passage à Alger, M. Macron avait cru bon de condamner moralement la présence « coloniale » française en Algérie - condamnation évidemment inadmissible notamment au vu du contexte.

    Un peu plus tard, dans une interview au Figaro, il avait rééquilibré son propos : « Nous devons réconcilier des mémoires fracturées : celle des harkis, celle des pieds-noirs, celle des Français d'origine algérienne, celle des binationaux . » Cette fois, il s’agissait de traiter sur un pied d’égalité, en leur accordant à toutes la même légitimité aux yeux de l’Etat, des « mémoires » dont le rapport à la France n’est pas le même : harkis et pieds-noirs ne sont ni des immigrés ni des binationaux ; la mémoire des premiers fait partie de la mémoire française, celle des seconds est une mémoire étrangère et la conception mémorielle égalitariste de M. Macron n’est pas satisfaisante. 

    Or, voici que ce dernier vient de commettre une double faute en reconnaissant la responsabilité de l’Etat français dans la disparition à Alger en I957 de Maurice Audin. La première faute est de faire passer pour une innocente victime celui qui, au nom de son engagement communiste, n’aura été qu’un porteur de valises pour le compte du F.L.N., organisation terroriste avant l’heure en guerre contre la France. La dixième division parachutiste commandée par le général Massu n’a fait que son devoir en gagnant la bataille d’Alger, mission dûment confiée par le pouvoir politique. Quand on sait les atrocités commises par les combattants du F.L.N., quand on veut bien comprendre que ces atrocités constituaient un mode de combat, on voit mal comment nos soldats auraient pu répondre efficacement, sauf à utiliser tous les moyens. Celui qu’il faut bien appeler un traître a sans doute été arrêté et interrogé pour obtenir des renseignements visant à éviter des dizaines d’attentats perpétrés contre des civils. M. Macron n’avait donc pas à demander pardon à Mme veuve Audin. 

    La seconde faute aura été le moment choisi, quelques jours seulement avant le 25 septembre, « journée nationale d’hommage au harkis ». Il se trouve que, outre quelques décorations et quelques millions d’euros de mesures en leur faveur (le tout bien mérité, convenons-en), Mme Darrieusecq, secrétaire d'Etat auprès du ministre des Armées, a annoncé pour décembre « une initiative mémorielle d’envergure […] une reconnaissance pleine et entière » de l’engagement puis du calvaire de ces soldats français en Algérie et en France même. Très bien. Mais comment ne pas penser que M. Macron, encore et  toujours soucieux de « travailler sur l'apaisement des mémoires » semble vouloir ainsi faire l’équilibre entre un Audin complice des terroristes et tortionnaires du F.L.N. et ces soldats français trahis et abandonnés par certains de leurs chefs ?  S’il y a eu faute de l’Etat voire de l’Armée, ce n’est pas pendant la bataille d’Alger, c’est plutôt lors du dénouement tragique de 1962.

    M. Macron se souvient mal et mal à propos. A force de vouloir faire du « en même temps » une sorte de méthode opératoire, il participe à un nivellement mémoriel inacceptable.   

  • Zemmour réagit à la polémique Nick Conrad : « Les Blancs ne sont qu’une expression pour dire les Français »

     

    Le clip « Pendez les Blancs » du rappeur Nick Conrad a suscité un tollé et a engendré de nombreuses réactions. Sur LCI, Eric Zemmour a dénoncé la « culture du rap francophobe (...) qui appelle au meurtre des Français » et qui se répand dans les banlieues. Ecoutez ! 

     

     

    La vidéo du rappeur Nick Conrad n'en finit plus de faire réagir. Invité de la matinale de LCI vendredi 28 septembre au matin, Eric Zemmour s'est lui aussi exprimé sur la chanson et le clip tournés à Noisy-le-Grand, accusés de racisme anti-blanc. « Ce n’est pas un acte isolé, c’est une culture. Ça fait longtemps : 10 ans, 15 ans que les rappeurs appellent à tuer les flics, appellent à tuer les Français, appellent à détruire la France. Je peux vous sortir des listes de chansons longues comme le bras. Ce n’est que le dernier » , a-t-il expliqué. 

    « Il y a une culture du rap francophobe qui déteste la France, qui déteste les Français, qui appelle au meurtre des Français. Les blancs ne sont qu’une expression pour dire les Français (...). Il y a une culture de la haine de la France qui s’est répandue dans d’innombrables banlieues. Alors heureusement, tous les banlieusards, même ceux qui sont de culture musulmane ne sont pas touchés, grâce à Dieu »  a ajouté celui qui a été sous le feux des critiques pour avoir critiqué le prénom d'Hapsatou Sy, la chroniqueuse de Thierry Ardison.

    Toujours sur les banlieues, assurant que la France se dirigeait vers une nouvelle guerre civile, Eric Zemmour a conclu ainsi ses propos : « Il y a aujourd’hui dans toutes nos banlieues une contre-société qui a créé un contre-peuple, avec une contre-civilisation qui repose sur l’islam. C’est ça la vérité de nos banlieues que l’on ne veut pas dire et que l’on ne veut pas croire. »  

     

  • Livres • Destin français, d’Éric Zemmour

     

    Par Gabrielle Cluzel  

    C'est une intéressante recension du dernier livre d'Eric Zemmour que Gabrielle Cluzel nous donne ici. [Boulevard Voltaire, 18.09].  

    Rappelons pour ceux qui l'ignoreraient que Gabrielle Cluzel participe - d'ailleurs toujours brillamment - à certains de nos colloques et conférences, dont quelques unes sont les siennes propres.   LFAR

     

    2654943674.jpg

    L’œuvre d’Éric Zemmour est un peu comme Star Wars : elle a commencé par la fin, et ce n’est qu’ensuite que l’on comprend, en revenant aux sources. Après Le Suicide français, voici Destin français, magnifique fresque historique qui tient de Bainville, de Castelot, de G. Lenotre, de Bordonove et n’est à la fois rien de tout cela. C’est l’Histoire de France incarnée, spirituelle, prophétie biblique : « Les pères ont mangé des raisins verts, et les dents des enfants en ont été agacées… » Le péché originel des parents sera expié par les fils. « L’Histoire ne repasse pas les plats », disait Céline, mais elle accommode les restes, pour les servir des siècles plus tard : « La France semble condamnée à revivre sans cesse la même histoire, à revivre sans cesse les mêmes passions délétères. »

    Zemmour compare la France à une mourante qui verrait défiler devant ses yeux toute sa vie : « Elle semble repasser par toutes les étapes de son existence millénaire. »

    Chaque chapitre est peu ou prou consacré à une figure emblématique – Clovis, Saint Louis, François Ier, Richelieu, La Pompadour, Robespierre, Napoléon, Clemenceau, Pétain, de Gaulle… – dont le destin s’est un moment confondu avec celui de la France, et dont le courage ou la pusillanimité, la clairvoyance ou l’aveuglement, la détermination ou la légèreté ont infléchi le cours de la vie de nos aïeux, et le cours de la nôtre qui lui est indissolublement lié.

    Il est des livres succincts dont on dit, riant, que s’ils tombent, ils ne risquent pas de vous casser le pied… Méfiez-vous de ne pas laisser choir celui-ci. Et pourtant, aucune longueur. Le livre est lourd mais la plume légère.

    Éric Zemmour l’a dédié à ses parents, et c’est à eux qu’il consacre les première pages, surprenant ses lecteurs qui le savent peu prompt à s’épancher – la proximité de Christine Angot, sur les plateaux, l’a sans doute vacciné. C’est qu’ils sont l’alpha et l’omega de ce bouquin-là : il leur doit son inextinguible fibre française. Pieds-noirs, descendants de Berbères soucieux de faire à Rome comme les Romains (donc, de donner des prénoms « du calendrier » à leurs enfants – confer une controverse récente), ils s’agacent de s’entendre qualifier de « juifs de France » quand ils se considèrent « Français juifs ».

    Éric Zemmour opte résolument pour le roman national, mais un roman qui ne s’inscrirait pas comme le Lavisse dans le courant romantique mais serait résolument réaliste : le féminisme beauvoirien tel que présenté par Éric Zemmour a quelque chose de bovarien, Simone aurait dû s’appeler Emma, James Rothschild a les traits de Nucingen et l’Italienne Catherine de Médicis les états d’âme d’une héroïne de Stendhal. Il les décrit comme ils sont, sans les noircir ni les idéaliser. Le manichéisme ne passera pas par lui et les titres des chapitres respectivement consacrés à Pétain et de Gaulle – « L’homme qu’il faut détester », « l’homme qu’il faut aimer » – parlent d’eux-mêmes. Il sort même du placard de grands oubliés, depuis longtemps remisés parce que trop étrangers à l’esprit du temps pour pouvoir être compris : qui connaît encore Bossuet, dont Zemmour écrit pourtant qu’il « réussit dans une langue d’une pureté inégalée la synthèse française du quadrilatère européen des racines juives, chrétiennes, grecques et romaines ». Qui sait encore que le comte de Chambord, par ce drapeau blanc dont il a fait « le test de sa liberté », a signé un « échec emblématique, matriciel même pour la droite française », « [annonçant] les défaites à venir pour pour ce courant conservateur ».

    On dit d’Éric Zemmour qu’il est misogyne ; il est surtout misanthrope. Atrabilaire amoureux d’une France volage, futile, mondaine, inconséquente et belle comme pas deux, dont il voit avec une acuité féroce tous les travers qui la font courir à sa perte mais dont il ne peut se déprendre. Et nous avec lui.   

    Ecrivain, journaliste
    Son blog
  • « Misère du sectarisme idéologique »

    Le Mont Saint-Michel rongé par les masses de touristes

     

    soleil.jpgMathieu Bock-Côté montre ici comment la gauche n'aime pas débattre avec la droite. Elle préfère la dénoncer, examinant à la loupe tout dépassement des lignes du politiquement correct pour mieux s'en offusquer et disqualifier le « fautif ». [Le Figaro, 14.09]..  LFAR

     

    tile00x02.jpg

    D'aucuns se sont montrés surpris devant le refus affiché de Pierre Rosanvallon d'éventuellement débattre avec Alain Finkielkraut. Dans l'esprit du commun des mortels, rien n'est plus naturel que la dispute entre intellectuels, et plus encore avec un philosophe comme Finkielkraut qui a consacré une partie importante de son existence à mettre en scène la vie des idées de la manière la plus féconde qui soit, avec son émission «Répliques».

    Et pourtant, quiconque lira Notre histoire intellectuelle et politique, le nouvel ouvrage de Rosanvallon, ne sera pas surpris. Avec une condescendance aussi mandarinale que caricaturale, il s'y pose en surplomb du débat à la manière d'un grand ordonnateur de la vie intellectuelle, et prétend surtout définir les paramètres et le périmètre du débat public, en décidant qui y sera admis comme un contradicteur légitime, et surtout qui ne le sera pas.

    Sans surprise, Rosanvallon s'inquiète à plusieurs reprises de la confusion des catégories intellectuelles dominantes, et, surtout, du brouillage supposé du clivage entre la droite et la gauche, la première empruntant sournoisement les habits de la seconde pour se légitimer. Son livre correspond à une volonté de remettre de l'ordre dans l'intelligentsia et chacun à sa place en resserrant les critères de la respectabilité, souvent au nom de la science dont on croit avoir le monopole.

    D'ailleurs, dans le livre de Rosanvallon, ils sont plusieurs à ne pas être considérés comme des intellectuels dignes de devenir des interlocuteurs. Rares sont les auteurs en désaccord avec lui dont il discute sérieusement la pensée. Il préfère les étiqueter. Un tel est un essayiste, l'autre n'est qu'un journaliste. Et ainsi de suite. Mais on ne personnalisera pas à outrance cette controverse, qui révèle surtout l'incroyable sectarisme d'une certaine gauche idéologique, pour qui le désaccord intellectuel fondamental a l'allure d'un scandale moral.

    On retrouve ici une constante historique: pour débattre avec la gauche, il faut être de gauche, et marquer son appartenance au camp du bien en affichant régulièrement des signes ostentatoires de vertu. Être de gauche, c'est d'abord vouloir être de gauche et faire ce qu'il faut pour le demeurer, en suivant la cadence donnée par l'avant-garde progressiste. Et il suffit de ne pas suivre le rythme pour devenir suspect. Le mot gauche conserve un pouvoir d'hypnose qui pourrait passionner un ethnologue se penchant sur l'intelligentsia. La gauche n'aime pas débattre avec la droite mais la dénoncer. Dans son univers mental, la droite n'est pas l'autre camp, mais un lieu de déchéance morale, reconnaissable à son odeur: y circulent des idées nauséabondes.

    Si on naît parfois conservateur, la plupart du temps on le devient, souvent lorsqu'on est heurté par le réel. Plusieurs des intellectuels qui, aujourd'hui, contribuent sans le dire ainsi à la pensée conservatrice en France viennent de «gauche». Mais du point de vue de ses anciens camarades, celui qui «passe à droite» ne change pas de camp parce qu'il a changé d'idées: il s'abîme. On ne passe pas à droite, on y dérive, comme si on rejoignait lentement le néant de la pensée.

    Dans le même esprit, lorsqu'on contredit trop ouvertement le politiquement correct, on dérape, manière comme une autre de reconnaître que la pensée officielle évolue dans un corridor très étroit surveillé par des contrôleurs médiatiques distribuant des contraventions idéologiques. D'ailleurs, les médias se questionnent de manière récurrente pour savoir s'il faut donner la parole à la droite. Est-ce qu'on ne contribuerait pas ainsi à sa normalisation médiatique? Il en est de même à l'université, où les cabales idéologiques sont régulières.

    Ce qui est en jeu, c'est le monopole de la parole publique légitime. Mais de Raymond Aron à Alain Finkielkraut, en passant par Jean-François Revel, Marcel Gauchet, Pierre Manent, Régis Debray et Pierre-André Taguieff, les grands intellectuels, d'où qu'ils viennent, sont non pas ceux qui tiennent d'abord à appartenir à un camp mais à penser l'histoire qui se fait en voyant ce qu'ils voient, pour reprendre la formule désormais consacrée.

    Une véritable éthique du débat public devrait nous amener non pas à débattre sous le signe du même, mais en mettant en scène les dimensions contradictoires mais également nécessaires de l'existence humaine qui doivent féconder la cité.

    L'homme a besoin tout à la fois de la liberté et de l'égalité, de l'enracinement et du cosmopolitisme, de l'ordre et de la dissidence: il s'agit d'articuler intelligemment ces pôles anthropologiques sans en abolir aucun, et en reconnaissant leur légitimité mutuelle. Dans cet esprit, le clivage gauche-droite, si on s'y enferme trop étroitement, étouffe la pensée. Qui s'y plie se condamne à une pensée rétrécie. Même les plus belles intelligences, lorsqu'elles s'y enferment, virent au sectarisme idéologique.  

    Mathieu Bock-Côté        

    XVM7713ddbc-9f4e-11e6-abb9-e8c5dc8d0059-120x186.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Son dernier livre, Le multiculturalisme comme religion politique, est paru aux éditions du Cerf [2016].

     

    Sur le même sujet lire aussi dans Lafautearousseau ... 

    Marin de Viry : « Comment le tourisme de masse a tué le voyage »

  • Zémmour : La candidature de Valls à Barcelone me confirme que le message républicain est désormais désuet

     

    « C’est le grand effacement de l’Histoire pour correspondre au grand remplacement des populations »

    Éric Zemmour sans cris d’orfraie ni indignation orchestrée, c’est possible… sur Boulevard Voltaire. Un entretien apaisé, sans tabou, passionnant et décapant. Écoutez-le !

    Merci donc à Boulevard Voltaire d'avoir réalisé ce remarquable entretien et - bien-sûr - merci à Eric Zémmour pour ces analyses si justes et tellement proches des nôtres* ! LFAR

    * Cf. notre titre

     Durée 11 mn.

     

  • David Brunat : La République en marchandises ...

     

    HUMEUR - David Brunat s'est rué sur la toute nouvelle boutique de produits dérivés élyséens. Petit récit d'une séance de shopping croquignolesque. Un récit désopilant, plein d'esprit et de lettres, en même temps qu'instructif publié sur Figarovox le 18 septembre. A lire absolument.  LFAR

     

    Ainsi, l'Élysée tient boutique. Pourquoi non ? La Couronne britannique vend bien depuis belle lurette des assiettes à l'effigie des «Royals» et des tasses à thé et des macarons à la rose et des savons parfumés et des verres à whisky armoriés et des t-shirts des Sex Pistols «Queen not dead», non, pas des t-shirts comme ça dommage, mais des biscuits au miel et des casquettes à visière monarchique presque sertis de diamants de la Couronne et des Barbour estampillés et ... et ... ; les palais de la République peuvent donc se mettre au diapason de Buckingham Palace sans encourir le reproche de marchander le temple.  

    L'affaire aurait de quoi faire pâlir de jalousie le boutiquier, le patron de tripot Thénardier (qui offrait paraît-il du travail, et du bon, à tous les horticulteurs en herbe qui frappaient à sa porte), tant les produits s'arrachent. Les acheteurs ont craché 350 000 euros les premiers jours de l'ouverture de la boutique élyséenne pour ces goodies, comme on dit dans la langue de la reine Elizabeth, tous labellisés «Élysée - Présidence de la République», soit en abrégé EPR, comme le nom d'un fleuron de réacteur nucléaire français qui coûte un pognon de dingue mais peu importe.

    Ce week-end de soleil généreux et de patrimoine en goguette était assurément propice aux emplettes du côté de la résidence présidentielle. Me mettant en marche avec de solides godillots pour botter les fesses si l'envie m'en prenait des derniers de cordée et autres fainéants et illettrés restés sur le carreau du temple, je décidai d'aller traîner mes guêtres du côté de la présidentielle boutique plutôt que de rejoindre les rangs de ceux qui foutent le bordel ou qui ont décidé qu'ils ne seraient rien.

    Comme je descendais des fleuves impassibles, je me sentis davantage guidé par les vendeurs et les hâbleurs que par les haleurs, et, entre deux dépôts de CV dans les cafés du quartier susceptibles de m'offrir un petit boulot, je poussai la porte de la nouvelle boutique où je n'osai pas demander un job même si j'en crevai d'envie.

    Je m'en pourléchai les babines comme Némo quand il reçoit sa pâtée des mains de Jupiter. J'eus même le privilège insigne, juste avant d'entrer dans la boutique, de serrer la pince de Jupiter et d'échanger quelques mots avec Lui. Comme je me présentai au dieu des dieux et découvris avec stupeur et tremblement que son intelligence d'aigle hégélien ne lui avait pas permis d'entrer à l'École normale supérieure, dont il fut refoulé comme un premier de classe et de cordée soudain devenu homme de sac et de corde par la faute d'une puissance néfaste, j'osai lui dire: «Je traverse la rue d'Ulm, Monsieur le Président, et je vous en trouve un, moi, de diplôme.» Cela parut le mettre d'humeur joyeuse. Nous fîmes quelques selfies et il tourna les talons pour insulter je ne sais plus qui.

    J'eus donc tout loisir de me jeter sur la boutique, bien décidé à faire main basse sur les goodies de cette appétissante crémerie. Mais patatras, cruelle déception. Gaulois peu réfractaire aux réformes commerciales, j'étais prêt à fondre devant le spectacle qui s'offrait à moi, du moins jusqu'au moment où j'ai vu les tarifs, ils se mouchent pas du coude, la vache, 55 balles pour un t-shirt, Manu dit bingo! Des mugs en porcelaine de Limoges, même bidon, ça en jette ; des crayons à papier impressionnants de puissance graphique ; des t-shirts marqués «poudre de perlimpinpin» tout pimpants ; des dessins géants à colorier avec le couple présidentiel et leur clebs Nemo, super idée de cadeau de Noël pour Tante Adèle. Saperlipopette, je m'apprêtais à faire une orgie d'achats.

    Alors pourquoi ai-je dit cruelle déception? Eh bien c'est très simple. Aucun t-shirt «Bretagne, Mafia, même combat» ou «Bank not dead». Aucune pendulette avec les mots «en même temps» gravés sur le cadran. Aucune figurine de Donald Trump faisant des hugs avec son amaaazing homologue. Nulle fiole de potion magique pour renverser les conservatismes ataviques du peuple gaulois et réveiller ces feignasses de Français qui ne bossent pas comme des Romains. Rien qui ressemble à des poings américains floqués du slogan: «Qu'ils viennent me chercher.» Pas trace de l'intégrale des oeuvres de Paul Ricoeur annotées par Alexandre Benalla. Aucun stock de boules puantes destinées à la commission d'enquête sénatoriale sur l'affaire relative au précité Benalla ; nulle perruque poudrée de petit marquis à jeter au visage du président de ladite commission, qui refuse de faire profil bas et qui, mine de rien, décroche de sacrés uppercuts avec ses philippiques imparables.

    Bref, de la camelote. Ce fut une grosse déconvenue. On me promettait une aube nouvelle et je n'ai vu que des gadgets banals et rappelant le monde ancien. Tout Kohler et le moral en Bern, j'ai fait demi-tour et me suis dit que le fruit de mes économies serait mieux employé ailleurs. J'en parlerai à Pierre Bellemare là où il est. Les gars du marketing à l'Élysée devraient repenser leur offre. Faute de quoi, à force de vouloir nous vendre par tous les moyens vessies, lanternes et autres breloques, ils devront fermer boutique. En attendant, je cherche en vain le numéro du service des réclamations. «Allo? Allo?». Nan mais allo, quoi.  

    XVM89c88eb0-bb46-11e8-9540-6fd43fb36eb1-140x200.jpg

    Ancien élève de l'École normale supérieure et de Sciences Po Paris, David Brunat a été membre du cabinet de plusieurs ministres. Par ailleurs écrivain et conseiller en communication, il a publié le mois dernier ENA Circus (Éditions du Cerf, 2018), un roman satirique qui imagine la nomination d'une promotion d'énarques par un groupe d'experts.

  • Une France orpheline

     
    par Louis-Joseph Delanglade
     

    sinistra-italiana_una-nuova-proposta-il-documento_sfondo-rosso-170204 - Copie.jpg

    La Revue stratégique de défense et de sécurité nationale 2017 (publication du ministère des Armées) voit dans « la menace djihadiste » la « menace la plus immédiate et la plus prégnante », la situant ainsi parmi les priorités de défense de la France. Le site France Diplomatie explique que la lutte contre le terrorisme est un des quatre objectifs fixés à l’intervention militaire française en Syrie. Objectif concret, quantifiable même, en rapport avec la sécurité directe de la population et du territoire français. On sait que des résultats ont été obtenus. On peut le penser d’autant plus que M. Hollande lui-même aurait autorisé en 2015 des exécutions ciblées de terroristes présumés en Syrie. Et, si l’on en croit les « indiscrétions » réitérées du partenaire américain, indiscrétions immédiatement reprises par la presse française (dernière en date : cette photo, exhibée par France 24 le 13 septembre, d’un véhicule militaire français dans l’est de la Syrie face à des okok_8.jpgcombattants islamiques, à Deir Ezzor), les forces spéciales françaises sont bien présentes sur les différents théâtres d’opérations. Libre aux naïfs de s’imaginer qu’il s’agit d’aider les amis kurdes de M. Lévy ; nous préférons penser avec M. Lacoste (LFAR, 19 septembre) que les propos de Mme Parly, ministre des Armées de M. Macron (Europe 1, 15 octobre 2017 : « S’il y a des djihadistes qui périssent dans ces combats [pour la libération de Raqqa, alors tenue par les forces de l’Etat islamique], je dirai que c’est tant mieux. ») ces propos sont « courageux » et, ajouterons-nous « prémonitoires ». 

    Objectif spécifique sans doute atteint donc et pourtant la France devrait en toute logique connaître un véritable revers politique et diplomatique. Si l’on considère en effet les trois autres objectifs assignés à l’intervention, on peut dire du quatrième (« poursuite d’une solution politique ») qu’il est d’une niaise évidence et des objectifs deux et trois (« protection des populations civiles » et « lutte contre l’impunité des crimes de guerre ») qu’ils relèvent d’un humanitarisme benoît qui explique le fiasco auquel il faut s’attendre désormais. Dès 2012, et plusieurs fois par la suite, M. Fabius alors ministre des Affaires étrangères avait cru bon d’affirmer que « Bachar ne peut pas être l’avenir de la Syrie ». M. Fabius s’est alors trompé deux fois : la première dans la forme, c’est certain, en traitant un chef d’Etat étranger avec une familiarité ironique totalement déplacée ; la seconde sur le fond, c’est désormais plus que probable, en s’imaginant que la solution serait celle qu’il souhaitait conjointement avec M. Hollande et la quasi-totalité du microcosme politico-médiatique. On sait ce qu’il en est aujourd’hui : la chute d’Idlib, dernière enclave d’importance où se regroupent les factions islamistes, et paraît-il démocratiques, hostiles à l’Etat syrien, est inévitable ; ailleurs, de-ci de-là, notamment dans l’est du pays, subsistent quelques poches tenues par des combattants de l’Etat islamique et promises à une disparition encore plus rapide. 

    BHL-Syrie.jpgBien entendu, ni M. Fabius, ni M. Hollande, aveuglés par leur approche idéologique de la situation, ne pouvaient imaginer que l’affaire pût se terminer par un succès de M. Assad, bien soutenu par ses alliés russe et iranien. Depuis l’arrivée au pouvoir de M. Macron, malgré une certaine dose de réalisme dans l’approche politique, on n’a pas vu grand-chose. Aujourd’hui, la France est bien le seul Etat participant à la guerre dont on ne voit pas très bien ce qu’il peut encore espérer retirer de celle-ci. On comprend ce que veulent Israël, l’Iran, la Turquie ou la Russie. Même les Etats-Unis, pourtant tiraillés entre le désir de M. Trump de se désengager et celui du Pentagone de rester jusqu’au bout, pourront du fait de leur stature internationale faire entendre leur voix. 

    Bien incapable d’avoir seule les moyens de sa politique étrangère démocratique et humanitariste, Paris va devoir payer le prix fort pour ses errements. On n’imagine pas en effet que la diplomatie française puisse se rétablir au point de peser sur l’après-guerre. Parce qu’elle n’aura ni su ni voulu mener une vraie politique régionale, la France est « orpheline d’une stratégie syrienne », selon l’expression de M. Haski, le successeur de M. Guetta sur les ondes de France Inter (chronique de géopolitique, lundi 17 septembre).   

  • Élisabeth Lévy huée : jusqu’à quand la parole féministe sera-t-elle confisquée ?

     

    Par Gabrielle Cluzel

    C'est à nouveau un fait de société que Gabrielle Cluzel commente ici avec talent, humour et lucidité. C'est plus encore un fait de civilisation. Une civilisation qui se désagrège. [Boulevard Voltaire, 17.09].  

    Rappelons pour ceux qui l'ignoreraient que Gabrielle Cluzel participe - d'ailleurs toujours brillamment - à certains de nos colloques et conférences, dont quelques unes sont les siennes propres.   LFAR

     

    2654943674.jpg

    Après la redevance sans télé, la démocratie sans peuple, voici le débat sans contradicteur. On n’arrête pas le progrès, et celles et ceux, comme dirait l’autre, qui le portent en étendard.

    À son université d’été du féminisme, Marlène Schiappa avait osé inviter… Élisabeth Lévy. Stupeur et tremblement. Horreur et malédiction. Marlène Schiappa ferait bien de se méfier, deuxième avertissement. Dans son récent bouquin avaient déjà été repérés quelques mauvais signaux maternalistes. Son ouverture d’esprit, aujourd’hui – à saluer -, va lui attirer des ennuis avec la brigade des meufs. Élisabeth Lévy, tel Danton haranguant Robespierre, pourrait bien lui crier sur l’échafaud médiatique : « La prochaine, ce sera toi ! » La terreur féministe est comme toutes les autres : implacable et, une fois lancée, difficile à enrayer.

    Le Huffington Post rapporte, vidéo à l’appui, qu’« Élisabeth Lévy a été huée ». Il est vrai que la salle avait été largement chauffée par une tribune indignée dans Libération, il y a quelques jours, signée Léa Domenach (« réalisatrice et scénariste, militante féministe »).

    Pour elle, « inviter Élisabeth Lévy ou Raphaël Enthoven (car lui aussi, un malheur n’arrivant jamais seul, était de la partie) aux premières Universités d’été du féminisme organisées par le gouvernement, [c’était] obliger encore les femmes à justifier leur combat ».

    Nous sommes d’accord, ma chère Léa, c’est le côté désagréable des débats, un peu comme les dissertations de français ou les démonstrations de maths au lycée : il faut justifier. Quand il serait si simple et si plaisant d’assener en tapant du pied. Si, à présent, même les féministes doivent avoir des arguments, alors là, tout fout le camp.

    Son rêve, pourtant, écrit Léa Domenach, était de voir « débattre des féministes entre elles sur la prostitution, le voile ou les violences sexuelles » afin de « crever certains abcès », avec des intervenants « dont les avis divergent ». Mais vraiment un tout petit peu, sans doute ? Sur la longueur du voile, par exemple : on fait un ourlet ou pas ? Parce que, côté crevaison d’abcès en tous genres et déstockage massif d’avis divergents, Élisabeth Lévy est championne, meilleure ouvrière de France. Sauf que les féministes sont des fillettes fragiles qui n’aiment point trop être bousculées. Leur estomac ne tolère qu’un léger nuage de contradiction dans leur tasse de thé, qu’elles tiennent le petit doigt en l’air.

    « Tu vis sur quelle planète ? », a-t-on entendu fuser dans la salle, rapporte Le Huffington Post. Pas la même que la leur, manifestement. S’il en est une qui a les deux pieds sur Terre, ancrés dans la vraie vie, c’est bien Élisabeth Lévy. Quand les autres ne connaissent que la galaxie des licornes et des petits poneys où rien ni personne ne vous contrarie. C’est tellement plus gentil ainsi.  

    Ecrivain, journaliste
    Son blog
  • Société • D'accord avec Gérard Leclerc : les réseaux sociaux ne sont que des machines à décerveler les esprits !

     

    par Gérard Leclerc
     

    arton22534-b73f0.jpg

    Décidément, les fameux réseaux sociaux se permettent tous les culots.

    Je trouve sur ma boîte mel une véritable injonction de la part d’un organisme spécialisé dans l’activisme pétitionnaire. Je ne sais qui s’est permis cette intrusion et comment elle s’est produite. Mais aujourd’hui, je la trouve inadmissible et insupportable. Je lis : « Gérard, une nouvelle pétition prend de l’ampleur sur change.org, nous pensons que vous pourrez peut-être la signer. Adressée à ordre des médecins. Que le docteur Bertrand de Rochambeau soit démis de ses fonctions. Signez cette pétition d’un seul clic. » L’olibrius qui a rédigé ce texte inconcevable devrait être lui-même banni de ses fonctions, parce qu’il ne comprend même pas le texte censé avoir provoqué son courroux. En l’espèce, le docteur Bertrand de Rochambeau n’a pas demandé la suppression du droit à l’avortement. Il a simplement eu le courage d’affirmer qu’en conscience, il ne lui était pas permis d’accomplir un acte abortif qui supprime une vie.

    arton22931-9c303.pngLe texte pétitionnaire vaut son pesant de mauvaise foi ou d’inintelligence caractérisée. Je lis encore : « Intolérable ! À l’heure où la France manque de gynécologues, à l’heure où les patientes dénoncent des sévices sexuelles de la part de leurs praticiens, à l’heure où nous faisons entrer Simone Veil au Panthéon, nous devons sauvegarder ce droit (qui n’en déplaise à ce cher monsieur) est toujours légal en France. » J’arrête la lecture de ce pataquès invraisemblable qui aurait déjà reçu plus de 17 000 approbations.

    Le véritable scandale, c’est que l’on puisse lancer dans l’opinion une opération qui brave les lois élémentaires de la raison, et même du bon sens. Et cela dans le but d’abolir tout simplement la liberté de conscience et la liberté d’expression de ses convictions. En ce qui me concerne, je ne veux plus entendre parler de change.org et je me désinscris sur le champ de cette machine à décerveler les esprits. ■ 

    Gérard Leclerc

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 18 septembre 2018.

     

    A lire aussi dans Lafautearousseau ...

    Le « scandale Facebook » - dit aussi « scandale des données »

  • Goldnadel : « Je suis culturellement réfractaire à l’humour multiculturel... » Nous aussi !

    Le président chauve-souris. Je suis oiseau, voyez mes ailes ! Je suis souris, vive les rats !

     

    Par  

    2293089609.14.jpgGilles-William Goldnadel écrit cela au sortir d'un été politique que l'on a presque unanimement qualifié de chaotique au point que quelques grosses pointures ont commencé à quitter le navire. Il le fait avec courage, lucidité, sans craindre de dire les choses. Il a raison. Malheureusement pour la France   LFAR

     

    XVMf7715e60-bd8b-11e7-b423-cdc4e7cfb664.jpg

    J’ai beau être un gaulois mature d’assez jeune souche, j'aime bien l'humour, qu'il soit gaulois (davantage encore depuis que la gauloiserie est regardée de travers), juif ou patagon.

    Mais j'avoue avoir du mal à suivre l'humour de Monsieur Macron.

    À dire le vrai, j'ai du mal à suivre ce président tout court, raison pourquoi je ne l'ai suivi lorsqu'il courait pour l’élection.

    Dès le premier abord, j'avais écrit que nous aurions un président hybride.

    Ni de droite, ni de gauche. Ni français, ni international. Un jour Jupiter et le lendemain, comique troupier. Pote avec Bellatar Yassine et ami avec Villiers Philippe de.

    Dans certains articles, je l'avais surnommé « le président chauve-souris ». Voulant contenter tout le monde et son père. Je suis oiseau, voyez mes ailes ! Je suis souris, vive les rats !

    Je suis un oiseau migratoire de gauche, ouvrez donc aux migrants ! je suis un rongeur économique de droite, fermez la porte aux indigents !

    Mais j'avais écrit aussi que les Français des deux camps à ciel ouvert ne seraient pas longtemps sous le charme de ce genre de petit mammifère qui ne vit bien que dans la pénombre.

    Nous y sommes. L'homme est brillant et sympathique, j’en atteste, mais, trop ambivalent, il ne fera bientôt que des mécontents.

    Dans le Figaro, lorsqu'il était candidat, et que je pouvais encore être irrespectueux, je lui avais donné du Macreux, tant je considérais qu’il lui manquait du fond.

    Je ne crois pas, hélas, m'être fourvoyé profondément.

    Il paraît que ce président de la république plaisantait, lorsqu'il a évoqué au royaume du Danemark « les gaulois réfractaires ». Je ne pense pas que les Français manquent d'humour gaulois, danois ou international, mais ils ne plaisantent plus, lorsqu'ils ont le sentiment qu'on ne les aime pas ou qu’on les prend de haut.

    Il faudra désormais que Monsieur Macron légende ses sorties, qu'il nous prévienne qu’il est sérieux ou qu’il s'agit d'une saillie.

    Mais après tout, peut-être, finalement, manquerais-je d’humour.

    A la réflexion, Monsieur Macron plaisantait sûrement avec Jean-Louis Borloo lorsqu'il disait qu'un mâle blanc n'était pas habilité à commander ou à rendre un rapport sur les banlieues françaises.

    Maintenant que j'y suis, il plaisantait encore et se gaussait des Algériens, lorsqu'il disait pour rire que la colonisation française était un crime contre l'humanité.

    Et ce blagueur impénitent n'était pas plus sérieux, lorsque pince-sans-rire, il prétendait que la culture française n'avait jamais existé ou que le patriotisme est une manière de lèpre.

    Et le plus farce, c'est que j'ai failli marcher.

    Quant aux Gaulois, de plus en plus réfractaires à l’humour à sens unique, ils ne marcheront plus quand on les fera marcher.  

    Valeurs actuelles - 3.09.2018
    Gilles-William Goldnadel est avocat et écrivain.  
  • Et maintenant, la psychiatrisation des adversaires politiques ! Mélenchon pas d'accord ...

     

    Nouveau Microsoft Publisher Document.jpgOn sait que la présidente du Rassemblement National a été convoquée à une expertise psychiatrique à la suite de la diffusion d’images d’exactions de Daech sur son compte Twitter.

    Cette convocation de Marine Le Pen intervient dans le cadre de sa mise en examen pour la diffusion des dites photos de propagande terroriste. 

    « C’est proprement HALLUCINANT. Ce régime commence VRAIMENT à faire peur », a-t-elle déploré Marine Le Pen, dans un tweet où elle publie l’ordonnance du Tribunal de grande instance de Nanterre. « Je n’irai pas, bien entendu, me soumettre à cette expertise psychiatrique », a-t-elle lancé devant des journalistes, à l’Assemblée nationale. « J’attends de voir comment les magistrats comptent m’y contraindre. »  A quoi David Rachline, le maire RN de Fréjus, a ajouté : « La psychiatrisation des adversaires était une spécialité soviétique des régimes totalitaires. Désormais, nous y avons droit en France sous Macron... »

    Plus intéressante, dans cette affaire, est la position de Jean-Luc Mélenchon qui a déclaré hier sur Twitter être en « désaccord total avec la psychiatrisation de la décision politique. Madame Le Pen est politiquement responsable de ses actes politiques ». 

    Hamon-Premier-ministre-lui-president-Melenchon-refait-le-match.jpg« Désaccord total avec la psychiatrisation de la décision politique. Madame Le Pen est politiquement responsable de ses actes politiques. Tous les moyens ne sont ni bons ni acceptables pour la combattre. Ce n'est pas avec des méthodes pareilles qu'on fera reculer l'extrême droite. » — Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) 20 septembre 2018    

  • Crises et populismes ?

     

    580234331.2.jpg

    Le Monde a titré il y a trois ou quatre jours : « la crise de 2008 a nourri le populisme » . Si c'est une découverte elle est tardive. Et l'on savait cela depuis bien longtemps. 

    Toutes les crises économiques, nourrissent les populismes. Les bons et les DnHtSPRXsAEk-yG.jpgmauvais. Elles les nourrissent à proportion de leur gravité. Le Monde a sûrement en tête ce que la crise de 1929 a produit ou du moins contribué à produire en Europe et ailleurs. La seconde guerre mondiale. C'est bien les souvenirs de cette dernière que le titre du Monde entend raviver. 

    La crise de 2008 a été surmontée par la création monétaire, rien d'autre. Et dans une quantité si considérable que la crise de 2008 - et le « remède » en question - pourraient bien en avoir préparé une autre d'une tout autre ampleur. On a simplement renvoyé les échéances à plus tard. Et l'on a continué de les gonfler démesurément. Ce qui n'a empêché ni le chômage de masse de perdurer, ni la croissance de rester faible, ni la pauvreté de s'étaler, ni nos infrastructures de vieillir considérablement, ni nos classes moyennes de s'appauvrir, ni les inégalités de se creuser éhontément,  dans des proportions inégalées dans l'Histoire. Etc. La crise a surtout nourri la crise ... 

    Mais il y a populisme et populisme. Entre lesquels les journalistes et les experts plus ou moins compétents ne distinguent pas. Populisme est un mot fourre-tout, sans définition précise, par lequel on désigne tout ce que l'on n'aime pas, que l'on réprouve, que l'on range dans le camp du Mal. Syndrome moralisateur oblige. On ne dialogue pas avec le Mal. Ces simplismes aussi commencent à vieillir, à lasser ... 

    Rapprocher allusivement les populismes d'aujourd'hui de ceux des années trente du siècle dernier, qui, en effet, conduisirent à la guerre, n'a d'autre but et d'autre effet que de discréditer, salir les populismes actuels. Les rendre « nauséabonds » selon la terminologie en vigueur. 

    Les populismes des années trente furent offensifs, guerriers, expansionnistes ou revanchards, ils tendaient à la guerre entre voisins, ou aux conquêtes coloniales.   Les populismes d'aujourd'hui, que la doxa condamne et que les politiques « progressistes » combattent, sont essentiellement défensifs. L'Italie, l'Autriche, les pays de Visegrad, et même les partis dits populistes, français, allemands, suédois ou autres, n'invitent aujourd'hui à aucune guerre européenne. Ils défendent leur identité, leurs traditions, leurs droits sur la terre où ils sont nés et avant eux leurs ancêtres depuis des lustres. Ils savent que cette terre leur appartient. Il y ont bâti une civilisation. Ce qui les motive et en un sens les unit, bien autrement que n'ont su le faire les fonctionnaires de Bruxelles, c'est leur refus d'une invasion étrangère massive venue d'Afrique ou d'Asie et qui implique leur mort. Ce qui les fonde et les unit c'est le rejet des masses de migrants déjà établis chez eux ou en route pour y venir. 

    Sans en avoir l'air, le Monde pratique là un très contestable amalgame. Pour effrayer, rappeler les mauvais souvenirs. Comme le fait aussi Emmanuel Macron qui se répand en déclarations alarmistes et accusatrices en ce sens biaisé - ce qui est nettement plus grave. Et ce sont des déclarations martiales pour le coup ! Feront-elles beaucoup de dupes ? Ce n'est même plus très sûr.  

     

    Retrouvez l'ensemble des chroniques En deux mots en cliquant sur le lien suivant ... 

    En deux mots, réflexion sur l'actualité