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Actualité Europe - Page 58

  • Goldnadel : L’Occident se suicide !

     

    Gilles-William Goldnadel, pour les lecteurs de Valeurs actuelles tire la sonnette d'alarme : « Qui saura montrer la folie européenne en matière de crise migratoire ? ». 

    Encore faudra-t-il se demander ce qu'est devenu cet Occident dont nous parlons. Quelle est, aujourd'hui, sa réalité ? Faut-il défendre l'Occident en l'état ? Ce que nous appelons l'Occident - en partie par habitude - n'est-il pas à défendre d'abord contre lui-même ? Questions posées.  LFAR   

    Quel médecin de l’âme, quelle plume acérée, quel tribun inspiré saura enfin, en termes mesurés, montrer la folie européenne, en matière migratoire ? Une folie, au sens clinique du terme, et non  au figuré. Voilà la maire de Paris qui entend désormais, sans le moindre mandat,  accueillir tous les migrants-et pas seulement les réfugiés de guerre-au nom d'une illégale, immorale et insensée  « liberté mondiale de circulation ». Voilà des autorités sans autorité qui louent des jets privés pour éloigner pour quelques jours des clandestins de Calais, à 15 000 € par passager. Voilà une chancelière allemande désormais affolée, qui va à Canossa rencontrer le sultan ottoman pour lui verser une  rançon de protection, dans l'incapacité européenne de défendre les frontières.

    Et voilà le mégalomane islamiste , affaibli dans sa maison, qui fait le Rodomont, suffisamment requinqué par tant  de faiblesse, pour exiger de voir son peuple musulman entrer de plein droit dans l'Europe déliquescente et déjà submergée. Et  que croyez-vous qu'on entendit ? Quelques voix de raison pour crier au dément ?  Le néant sidérant. Au lieu de cela, toujours les mêmes bouffées délirantes, les mêmes diversions, les mêmes leurres, au sens militaire du terme. Elle a dit « race blanche » ! Le danger « populiste » ! Vous dites « invasion » ! Toujours les mêmes leurres, et l'Europe leurrée, qui de folie se meurt. A petits feux follets.   

    Gilles-William Goldnadel

  • L'Europe à l'heure des murs !

     

    En envisageant un mur avec la Slovénie dépassée par les migrants, l'Autriche met en cause la libre circulation intra-européenne. C'est une première ...  

  • Ivan Rioufol : Le réveil des peuples bouscule la politique

     

    L'analyse d'Ivan Rioufol - Éditorialiste au Figaro 

    L'union gauche-droite qui se dessine en France contre le FN oblige les ligueurs à diaboliser un sentiment national qui partout se réveille. En France et en Europe. On vient de le voir en Suisse, puis en Pologne, au sein même de l'Union. Union devant laquelle s'accumulent les difficultés et les facteurs de dislocation. Il lui sera désormais bien difficile d'imposer à tous ses membres l'accueil invasif et en nombre indéterminé des migrants; et il lui deviendra presque impossible de maintenir sa cohésion s'il s'agit de construire une Europe postnationale et multiculturaliste. LFAR   

    rioufol (1).jpgQue cherchent-ils, ceux qui se mobilisent contre la montée du « populisme » en Europe ? Oh ! Très simple : ils veulent faire taire les peuples en colère. Or ces derniers semblent décidés à résister aux grands prêtres de la mondialisation qui, à commencer par les technocrates de Bruxelles, les ont conduits de force là où ils refusaient d'aller : vers des sociétés postnationales, déracinées, amnésiques, sans frontières, aux identités floues. Nombreux sont les citoyens européens qui craignent une subversion islamiste, si rien ne vient stopper la braderie de leur civilisation au profit d'une autre, dépourvue d'états d'âme. C'est ce que les Suisses, porte-parole du regain souverainiste, ont confirmé dimanche en votant majoritairement pour l'UDC, parti anti-immigration. L'union gauche-droite qui se dessine en France contre le FN oblige les ligueurs à diaboliser un sentiment national qui partout se réveille. L'angélisme merkelien, qui a enclenché en septembre l'énorme mouvement migratoire en ouvrant étourdiment les portes de l'Allemagne à l'exode du monde musulman, a semé partout les germes de conflits et d'affrontements. Le pays se fracture déjà : ceux qui veulent aller au bout de leur expiation du racisme hitlérien en imposant son exact contraire s'opposent à des compatriotes qui alertent devant la survenue d'une culture islamique, historiquement perméable au totalitarisme et à l'antisémitisme. Lundi, à Dresde, les 20.000 manifestants de Pegida (Patriotes européens contre l'islamisation de l'Occident) ont été contestés par une contre-manifestation presque aussi massive. Un sympathisant Pegida y a été grièvement blessé. Deux jours auparavant, Henriette Reker, candidate pro-Merkel à la mairie de Cologne, avait été agressée au couteau par un illuminé d'extrême droite. Merci, « Mère Angela ».
     
    La chancelière paniquée se dit prête aujourd'hui à appuyer l'entrée de la Turquie en Europe, en échange de son aide pour maîtriser les flux moyen-orientaux ; ce qui revient à vouloir éteindre un feu avec de l'essence. C'est cette politique absurde qu'est venue confirmer Merkel à Recep Tayyip Erdogan, dimanche à Istanbul, en dépit des soupçons de complicité qui pèsent sur l'« islamiste modéré » après l'attentat antikurdes à Diyarbakir, dans le sud-est du pays. Non contente de déstabiliser le Vieux Continent et d'accuser ses opposants d'avoir « de la haine dans le cœur », Merkel, autoproclamée porte-voix de l'Union européenne (UE), s'est à nouveau inclinée devant le calife, qui réclame des visas pour ses 78 millions de sujets, et l'entrée de son pays dans une UE dont il méprise la culture. Ces courbettes ne peuvent que raidir davantage l'opinion. Les électrochocs à répétitions, que représentent les violences conquérantes du totalitarisme islamiste et les invasions soutenues de « réfugiés » revendicatifs, dévoilent la folle légèreté de ceux qui ont laissé venir ces désastres annoncés, au nom du respect de l'Autre et des droits de l'homme. Or l'agressivité que déploient ces belles âmes contre leurs contradicteurs les oblige à cautionner un type de société - celle du vivre ensemble obligatoire - qui porte en elle de multiples fractures et autant de ressentiments. Il est trop tôt pour mesurer l'ampleur de la vague « populiste » qui prend forme. Mais le sens de l'histoire a déjà tourné: il a quitté ceux qui croyaient pouvoir enterrer les nations et les peuples européens afin de permettre à l'islam d'y prendre plus facilement ses aises. L'UE, qui a voulu cette politique cautionnée par l'Allemagne et la France, va devoir rendre des comptes.

    Adversaires de la démocratie

    Tout devient absurde dans les comportements de ceux qui s'affolent des rébellions du peuple. Tandis qu'Angela Merkel s'ouvre aux Turcs pour avoir moins de Syriens, François Hollande sème ses discours d'appels à « l'apaisement », tout en désignant le FN comme l'ennemi à abattre, dans une rhétorique de guerre civile. Il fustige le « bloc réactionnaire », censé englober toutes les droites, mais suggère parallèlement un front commun rassemblant implicitement le PS et les Républicains pour faire échec au parti de Marine Le Pen aux régionales. Va comprendre ! Le plus désolant est de voir l'opposition, décidément la plus bête du monde, tomber à pieds joints dans le piège socialiste qui l'oblige à harceler le FN en lui offrant, avec le parti de Nicolas Dupont-Aignan, le monopole d'une défense souverainiste attendue de ceux qui réclament un retour aux frontières et aux socles des identités. Les adversaires du « populisme » se révèlent être des opposants à l'expression du peuple, c'est-à-dire à la démocratie. Ils n'ont plus de cartes en main, hormis le gourdin des sermons. Le gouvernement a promis, lundi, de préserver le « modèle social », ce panier percé, tout en se disant défavorable aux référendums d'entreprise qui pourraient pourtant débloquer les immobilismes syndicaux. Mais l'urgence est de reconstruire un modèle sociétal avant que le pays n'explose. Seules des consultations populaires pourront trancher des questions taboues liées à l'islam ou l'immigration. En visite à La Courneuve (Seine-Saint-Denis), mardi, le chef de l'État a assuré : « Il n'y a pas de quartiers perdus de la République », et aussi: « Il n'y a pas de France périphérique » ; deux récusations non argumentées de livres importants (Les territoires perdus de la République, La France périphérique) fruits d'enquêtes de terrain. Ce déni officiel occulte la montée de l'islam radical dans les cités et la fuite des « petits Blancs » devant le multiculturalisme qui s'installe. C'est ce modèle multiculturel, jamais débattu, qui devrait être soumis au vote des citoyens. Son probable rejet lancerait la mobilisation contre le totalitarisme islamiste qui se profile.

    France ubuesque

    En attendant, c'est une France ubuesque que la gauche « humaniste » met en scène. Mardi, la Cour des comptes a confirmé que 96 % des déboutés du droit d'asile restaient en France. Mercredi, le chef de l'État lui-même a promis des « sanctions » - qui ne semblent donc plus aller de soi - contre des gens du voyage ayant mis à sac la gare de Moirans (Isère) pour protester contre une décision de justice. On apprenait également qu'un jet privé a été affrété par la république pour évacuer, cinq par cinq, quelques-uns des 6000 migrants de Calais vers la province (15.000 euros par individu), d'où ils sont relâchés pour revenir généralement à leur point de départ ! À Lille, mardi, la police a violemment chargé, mais contre des avocats en grève.  

    Le bloc-note d'van Rioufol            

  • Thomas de Maizière, ministre de l'Intérieur allemand, ne fait pas dans l'angélisme ou le compassionnel

     

    « Jusqu'à l'été, les réfugiés étaient reconnaissants d'être chez nous. Ils demandaient où était la police, où était le centre d'enregistrement, où ils devaient aller.

    Aujourd'hui, ils quittent les .centres d'accueil, ils commandent un taxi et disposent étonnamment de l'argent nécessaire pour parcourir des centaines de kilomètres à travers l'Allemagne. Ils font la grève parce que leur logement ne leur convient pas, ils font des histoires car ils n'aiment pas la nourriture. » •

     

    Thomas de Maizière

    Ministre fédéral allemand de l'Intérieur

     

  • Irreal politik

     

    D'utiles réflexions de Bertrand Renouvin

     

    Renouvin.jpgReal politik : être contre. Tel est l’un des principaux critères du bien-penser. Il s’accompagne d’ordinaire de la condamnation de la politique gaullienne. Par une fine dialectique, le refus hautain de la real politik se fit au nom de la réalité qui convenait à la classe dirigeante : celle d’une France toute petite, qui avait vécu « au-dessus de ses moyens ».

    Valéry Giscard d’Estaing lança cette thématique ; elle fut reprise par une gauche qui voulait recycler son internationalisme et son pacifisme dans l’Europe des traités. La gent socialiste  broda sur « l’Etat modeste », les droits de l’homme, le droit d’ingérence humanitaire contre « l’égoïsme national » – sans oublier « l’Europe qui doit parler d’une seule voix ». C’est cet assemblage de sous-produits idéologiques qui tient lieu de doctrine dans les relations avec l’étranger. L’oligarchie française s’est imprégnée de la religiosité étatsunienne, de la « guerre morale » du Bien contre le Mal, en vue de la démocratie par l’économie de marché. L’échec est total : les conséquences de l’irreal politik ont été cent fois pires que les froids compromis de la real politik.

    Après l’opposition à la croisade américaine en Irak clairement exprimée par Jacques Chirac et Dominique de Villepin en 2003, les gouvernements français n’ont plus rien empêché et ont fini par tout admettre. Le dénigrement de la Russie est une activité officielle.  Après avoir stupidement participé à la « guerre morale » pour le Kosovo, la France n’a plus eu de politique dans les Balkans livrés aux potentats locaux, aux proconsuls occidentaux et à la corruption endémique. Nous venons d’abandonner l’Afghanistan à son épouvantable sort.  Avec l’Arabie saoudite et le Qatar, les principes moraux et démocratiques ont été sacrifiés sans l’ombre d’un scrupule à des accords commerciaux rentables et à des pactes infâmes dont les historiens nous livreront le détail. En Syrie, François Hollande et Laurent Fabius ont levé l’étendard de la lutte contre le despotisme et fourni des armes au Front al-Nosra, succursale d’Al-Qaida, contre le dictateur de Damas. Lorsque le projet de frappes sur Damas a été bloqué par le vote du Congrès des Etats-Unis, des interrogations majeures auraient dû surgir. Tel n’a pas été le cas. L’aviation française bombarde Daech en Irak de manière supplétive et sans effets marquants. Nous décidons de bombardements en Syrie, au mépris du droit international, tout en continuant de militer pour le départ de Bachar el-Assad ; François Hollande ne voit pas que les Etats-Unis vont s’entendre avec la Russie et s’accommoder du régime syrien faute de solution alternative.

    Si la France veut retrouver son rang dans le monde, les gouvernements à venir devront abandonner le mélange de discours moralisateurs, d’affairisme cynique, de corruption manifeste et pour finir de reddition humiliante aux diktats étatsuniens ou allemands. Il faut en revenir aux principes qui orientaient, en ses meilleurs moments, la diplomatie française.

    Les Etats donnent la priorité à leurs intérêts nationaux sur les affinités idéologiques et les solidarités religieuses. Les rois de France et de Castille eurent un projet d’alliance contre les Ottomans avec Tamerlan ; les rois de France se sont alliés avec la Sublime Porte contre Vienne ; les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France combattante se sont alliés avec l’Union soviétique contre l’Allemagne.

    Les Etats nouent des relations avec les Etats, non avec des régimes politiques. Ce sont les constantes et les évolutions géopolitiques qui priment sur les sympathies et les antipathies, dans la recherche de compromis assurant le retour ou le maintien de la paix.

    La France n’a pas d’amis. Elle choisit des alliances qui peuvent changer. L’Allemagne de l’Ouest servit de glacis à la France pendant la Guerre froide. Il s’agit aujourd’hui d’en finir avec la domination allemande. En Europe continentale, l’alliance avec la Russie s’impose et le recul de l’influence étatsunienne est hautement souhaitable. Au Proche-Orient, une solution politique de très long terme doit être trouvée en concertation avec les Russes, les Iraniens et les Etats qui subsistent dans la région – en évitant que les Etats-Unis soient maîtres du jeu.

    La France ne retrouvera sa puissance que si elle développe ses capacités militaires, ses échanges économiques et ses échanges culturels. Pas de puissance retrouvée sans souveraineté réaffirmée. 

    Bertrand RENOUVIN

  • ZEMMOUR : MERKEL CONFRONTÉE À L'ÉPREUVE DE LA RÉALITÉ

     

    Angela Merkel est le sujet de ces derniers temps. Et elle est devenue sujet d'interrogation pour ceux que séduisaient sa rigueur, son style de gouvernance. Ou de réprobation pour qui s'inquiétait de son impérialisme européen. Ou encore, à l'inverse, sujet de reproches lorsqu'on la trouve totalement inféodée à la politique américaine. Comme si ce n'était pas une constante de la politique extérieure allemande, y compris au temps de De Gaulle, Adenauer et du traité de l'Elysée, y compris encore vingt-cinq ans après l'extinction de la menace soviétique qui pouvait alors justifier l'Alliance Atlantique mais ne la justifie plus ...  Il y a encore ceux - ils pourraient bien avoir raison - qui sont d'avis qu'Angela Merkel n'est pas vraiment le grand dirigeant que l'on a cru, qui pensent qu'on l'a créditée de trop de qualités, qu'elle est trop soumise à l'émotion, qu'elle varie au rythme des fluctuations de l'opinion, qu'elle est pétrie d'idéologie. Que grosso modo, elle se situe dans la même médiocrité moyenne que ses homologues dits occidentaux. Son comportement assez irresponsable à l'origine de l'invasion migratoire en cours tend à accréditer ces derniers points de vue. D'où l'intérêt de la brillante analyse que fait ici Eric Zemmour. Qu'il a publiée dans la dernière livraison du Figaro magazine.  LFAR 

     

    ZemmourOK - Copie.jpg« Jusqu'à l'été, les réfugiés étaient reconnaissants d'être chez nous. Ils demandaient où était la police, où était le centre d'enregistrement, où ils devaient aller. Aujourd'hui, ils quittent les .centres d'accueil, ils commandent un taxi et disposent étonnamment de l'argent nécessaire pour parcourir des centaines de kilomètres à travers l'Allemagne. Ils font la grève parce que leur logement ne leur convient pas, ils font des histoires car ils n'aiment pas la nourriture. » 

    Thomas de Maizière est le ministre de l'Intérieur allemand. Il a d'abord approuvé la politique des bras ouverts décidée par Angela Merkel. Depuis, la chancelière lui a ôté la gestion de ce dossier. Dans les camps, des réfugiés musulmans agressent les chrétiens. Les services secrets allemands, affolés, alertent leurs autorités au sujet de la présence de nombreux agents dormants de l'Etat islamique parmi les « réfugiés » accueillis avec des fleurs par la population. Le ministre-président de la Bavière, pourtant allié CSU de la chrétienne-démocrate Merkel, a reçu triomphalement Viktor Orbàn à Munich, alors même que le Premier ministre hongrois est le premier opposant à la politique allemande de répartition des « migrants » dans l'Union européenne. Les militants du mouvement anti-islam Pegida retrouvent de la voix à Dresde. Affichent le portrait d'Angela Merkel en Mère Teresa qui a fait la une du Spiegel avec cette légende : « Mutter (mère) Terrorresia », tandis que certains manifestants rappellent avec une rare cruauté qu'« Angela Merkel n'a pas d'enfants ». Après elle, le déluge. La chancelière allemande n'en a cure. Elle continue de répéter en boucle : « Nous y arriverons. » Il y a cinq ans, elle affirmait, tout aussi péremptoire : « Le multi-culturalisme, ça ne marche pas. »

    Une majorité d'Allemands est désormais inquiète ; la cote de popularité de la chancelière s'affaisse. La population allemande se réveille de son rêve pour reprendre pied avec la réalité. Comme si, par un étonnant retournement historique, la rationalité était devenue l'apanage du peuple, tandis que les élites restaient confinées dans l'univers de l'émotion, alliant, en Allemagne, le calcul économique du patronat, avide de main-d'œuvre pas chère, et le tourment de la culpabilité du nazisme.

    Les immigrants venus de Syrie, d'Irak, mais aussi d'Afghanistan ou d'Erythrée, et tous ceux, du Maghreb ou du Kosovo, qui profitent de l'aubaine pour se fondre dans leur flot, ne tarit pas : 800 000, I million, 1,5 million sont successivement annoncés. Deux millions attendent dans les camps turcs. Merkel se précipite à Ankara chez Erdogan pour qu'il n'ouvre pas les vannes en grand. Angela Merkel a paru enivrée des acclamations universelles qu'a suscitées son choix généreux ; le temps est venu de la gueule de bois. 

  • Migrants : L'Allemagne fait ses comptes ! Et ce n'est pas sans importance ...

     

    L'Allemagne a beau avoir opté pour une politique « généreuse » en matière d'accueil des migrants, l'avoir proclamée aux quatre-vents, et l'avoir analysée, simultanément, comme conforme à son besoin impérieux de main d'œuvre importée, la voici qui fait ses comptes, modère ses enthousiasmes, et ne dissimule plus ses inquiétudes. Toucher à son équilibre budgétaire, créer de la dette, mettre la main à la poche, et sans-doute beaucoup plus que la main puisque le coût de l'arrivée de plus ou moins un million de réfugiés sur le sol allemand en 2015 est estimé au bas mot à 10 milliards d'euros non budgétisés, l'ensemble suscite problèmes, inquiétudes et divisions. Sans compter la fronde de la CSU, le mécontentement grandissant de plusieurs länder dont le land de Bavière, le plus important de tous, et au delà ce qu'on a appelé outre-Rhin la révolte des sudistes, submergés de migrants; la popularité d'Angela Merkel en baisse, etc. L'Allemagne n'aime ni le déficit, ni la dette, encore moins l'imprévu en matière financière. Il ne faut pas croire que cette situation sera sans suite ni conséquences. A suivre, donc.  LFAR        

    Le média financier suisse Romandie.com a publié les informations et commentaires qui suivent. 

    Berlin - Schäuble admet que les migrants font peser un sérieux risque sur son budget. 

    Le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble a reconnu mardi qu'il ne savait pas si le budget fédéral allemand pourrait ressortir à l'équilibre l'an prochain, ce qui reste son objectif en dépit de milliards de dépenses pour les migrants.

    « J'ai dit que nous voulions y arriver sans contracter de nouvelles dettes, si possible », a déclaré le ministre conservateur devant un congrès de fabricants de machines-outils à Berlin. « Dans ma famille politique ils m'ont demandé : « pourquoi dis-tu si possible ? Eh bien parce que la vérité est que je n'en sais rien », a poursuivi M. Schäuble. 

    L'Allemagne a amené l'an dernier, pour la première fois depuis 1969 et un an avant l'horizon prévu, son budget fédéral à l'équilibre, c'est-à-dire que l'Etat n'a pas contracté de nouvelles dettes. L'objectif du gouvernement d'Angela Merkel est que cet équilibre - le zéro pile que les conservateurs avaient promis à leurs électeurs - devienne la règle. 

    Mais l'Etat fédéral, critiqué par certains économistes et ses partenaires dont Paris pour une politique qui selon eux néglige l'investissement, fait face à des milliards d'euros de dépenses qu'il n'avait pas anticipées, alors que l'Allemagne attend cette année autour d'un million de demandeurs d'asile. 

    « Ces arrivées massives représentent un plus grand défi que la plupart des choses que nous avons eues à faire ces 65 dernières années, a déclaré M. Schäuble, et recèlent un potentiel de risque incroyable pour les finances publiques.» 

    « Pour autant nous pouvons et allons surmonter ce défi », a-t-il affirmé, dans la lignée des assurances données régulièrement par Mme Merkel. 

    Le gouvernement a promis des milliards d'euros d'aides aux communes et aux Etats régionaux allemands, chargés de l'accueil et de l'hébergement des migrants. L'Etat va notamment verser une somme forfaitaire par demandeur d'asile « pour que cessent les jérémiades des collectivités », a expliqué M. Schäuble. 

    Les communes peuvent également depuis peu s'endetter à taux zéro auprès de la banque publique KfW pour investir dans la construction ou la rénovation d'hébergements pour demandeurs d'asile. La banque a annoncé mardi que l'enveloppe de 300 millions d'euros qu'elle avait mise à disposition à cet effet début septembre avait été utilisée au bout de quelques jours, et qu'une rallonge de 200 millions était elle aussi épuisée. 

    Le volume du programme a été porté à un milliard d'euros, a indiqué la KfW mardi, faisant état d'une demande toujours aussi forte. Selon les calculs de la KfW, ce milliard de crédits devrait pouvoir servir à donner un toit à 100.000 migrants. 

    Romandie.com

     

  • Colosimo : comment Poutine est devenu roi du grand échiquier international

     

    14210_colosimojean_francois11o_dion.jpgJean-François Colosimo a accordé à FigaroVox un grand entretien fort intéressant au sujet de l'influence grandissante du président russe, Vladimir Poutine, sur la scène internationale. Celle-ci s'inscrit selon lui dans l'histoire multiséculaire de la Russie. Nous ajouterons que ses analyses sont en très grande concordance avec ce que nous écrivons ici depuis plusieurs années. LFAR

    LE FIGARO. - Sur le dossier syrien, de fortes tensions entre les États-Unis et Russie se font sentir. Vladimir Poutine semble avoir pris la main. Est-ce un des signes du grand retour de la Russie sur la scène internationale ?

    Jean-François COLOSIMO. - L'action que mène Vladimir Poutine en Syrie récapitule à la fois sa politique et sa personne. Elle correspond tout d'abord à sa représentation géopolitique du monde. Poutine est résolument « westphalien »: il défend le système traditionnel, constitué de nations souveraines où ce sont les États qui valent et non pas les régimes politiques, les organisations non-gouvernementales ou les institutions supranationales. En soutenant le pouvoir de Bachar Al-Assad qu'il juge être le seul « légitime », il défend cette conception de l'ordre international qu'il considère, de surcroît, protectrice de ses propres intérêts.

    Mais il est aussi l'héritier d'une doctrine diplomatique. Précisément, celle qui a été promue par les tsars puis par les Soviets depuis l'entrée de plain-pied de Moscou sur la scène méditerranéenne et orientale. Dès le XVIIIe siècle, à coups de guerres et de traités avec l'Empire ottoman, Catherine II « la Grande » s'est ouvert un accès vers les mers chaudes, via la Crimée et le Caucase, afin de désenclaver la Russie et de lui faire retrouver son berceau byzantin. Cet élément essentiel de politique extérieure s'est naturellement justifié de la protection des chrétiens d'Orient considérés comme un levier d'influence. L'URSS a d'autant plus facilement pris le relais que les orthodoxes du Levant ont été parmi les fondateurs et les animateurs du panarabisme, avec ce que cela a pu impliquer chez eux d'idéologie progressiste les rapprochant du socialisme. La proximité et la solidarité sont donc anciennes avec le baasisme syrien qui est issu de ce mouvement.

    Cependant, cette vision de Poutine est renforcée par la logique bipolaire qui a structuré l'affrontement entre l'Est et l'Ouest. À ses yeux, les États-Unis n'ont cessé, depuis 1989 et la chute du Mur, de vouloir neutraliser la Russie soit en l'isolant économiquement par le biais du capitalisme financier, soit en la cernant militairement au moyen de l'Otan. Au Proche-Orient, ce face-à-face se double d'un jeu d'alliances de nature historique: celle des États-Unis avec le bloc sunnite qu'il s'agisse de l'Arabie saoudite, des Émirats ou de la Turquie ; celle de la Russie avec l'arc chiite qui va de l'Iran au Hezbollah libanais et qui a le pouvoir alaouite en Syrie pour pivot.

    Enfin, l'intervention en Syrie relève d'objectifs aussi bien stratégiques que tactiques. D'autre part, Poutine considère que, de l'Irak à l'Ukraine en passant par le Kosovo, les États-Unis ont fait de la déstabilisation une méthode de conquête hégémonique et qu'aller les concurrencer au Levant doit, à l'inverse, lui permettre d'asseoir sa mainmise sur la Crimée. D'autre part, contrebalancer l'action de Washington au Proche-Orient revient pour lui à conjurer, si ce n'est à endiguer la menace djihadiste qui pèse sur la Russie, ses millions de citoyens musulmans et ses républiques caucasiennes en voie de réislamisation, voire de radicalisation.

    Le coup vient donc de loin. Une fois de plus, ce qui frappe est la détermination et la brutalité avec lesquelles Vladimir Poutine l'administre.

    Pourquoi, malgré l'insistance des Occidentaux, Poutine refuse-t-il d'évincer Bachar al-Assad ?

    Il est plusieurs raisons anciennes, on vient de le dire, à cette alliance avec le pouvoir alaouite, parmi lesquelles son caractère minoritaire, son idéologie baasiste, son inclination envers les chrétiens et sa dépendance à l'égard de l'Iran. Mais il est aussi des avantages plus immédiats, dont en premier lieu ceux de la forte présence militaire russe qui est devenue de tradition en Syrie et dont le maintien sur place dépend, au moins momentanément, du maintien de Bachar Al-Assad au pouvoir.

    Autrement dit, cette intervention découle pour partie d'un effet de clientèle et, pour partie, d'un effet de paroxysme. Selon Sergueï Lavrov, le ministère des Affaires étrangères de Vladimir Poutine, « à l'exception de Bachar, il n'y a que des terroristes. » Ce qui revient à se confronter directement à l'option occidentale, donc américaine, et à mener immédiatement cette confrontation à son maximum de tension.

    D'une part, les forces dites « démocratiques » de l'Armée syrienne libre, sur lesquelles la France a compté, sont aujourd'hui militairement en déroute ou ont rallié les djihadistes. D'autre part, l'Armée de la conquête, formée du groupe djihadiste al-Nosra, la branche locale d'Al-Qaïda, et du groupe salafiste Ahrar al-Sham à l'initiative du consortium sunnite qui court de la Mecque à Istanbul, est la seule faction capable de s'emparer de Damas et bénéficie désormais du soutien de Washington qui voit en elle un moindre mal.

    Là où Poutine profite de la faiblesse de la position occidentale et renverse habilement l'échiquier, c'est lorsqu'il demande si al-Qaïda est préférable à Daech.

    Les États-Unis et l'Otan - qui a évoqué une «escalade inquiétante» - s'inquiètent de l'avancée russe en Syrie. Les cibles visées ne seraient pas les bonnes ; des avions russes auraient survolé l'espace aérien turc sans autorisation. De nombreuses critiques chargent la Russie dans cette intervention…

    Là encore, il faut en revenir au temps long. Depuis la chute du mur de Berlin, les États-Unis n'ont pas varié de doctrine. La Russie, héritière de l'URSS, reste pour eux l'ennemi numéro un, du moins potentiel, dont il faut empêcher la résurgence en tant qu'acteur majeur sur la scène internationale.

    Le pacte entre Gorbatchev et les Européens sur la réunion des deux Allemagne comportait l'obligation pour l'Otan de ne pas avancer plus à l'Est. En vingt ans, une dizaine de pays ont rejoint l'Alliance atlantique qui s'est élargie au fur et à mesure de la construction européenne et ce, vers l'Est, vers la frontière occidentale de la Russie.

    Peu importe d'ailleurs, la couleur de l'administration. Lorsque George W. Bush arrive au pouvoir, il prend comme secrétaire d'État aux affaires étrangères non pas une spécialiste de l'islam ou du Moyen-Orient mais une spécialiste de l'URSS, Condoleezza Rice, qui a travaillé au Conseil de sécurité nationale en tant qu'expert sur le bloc communiste. Et sous Obama, le Pentagone reste inflexible : Moscou est classée comme l'une des toutes premières menaces.

    La raison de cette focalisation américaine est simple : l'arsenal nucléaire de la Russie lui permet de jouer un rôle géopolitique hors de proportion avec sa puissance économique. Elle est un contradicteur permanent aux yeux des Américains qui nient d'autant plus fortement sa légitimité à jouer un rôle important dans l'un ou l'autre des espaces géopolitiques sur lesquels ils ont besoin d'exercer leur domination ou leur influence.

    D'où la diabolisation récurrente de Moscou par Washington. La force paradoxale de Poutine est d'endosser cette diabolisation, voire de la revendiquer puisque son but est de démontrer que l'on n'est pas obligé de souscrire à la règle du jeu édictée par l'Amérique et qu'on peut même la dénoncer et la contrecarrer. Pour ce faire, il démontre une capacité d'analyse et de réflexion froide, suivie d'une action stratégique menée avec une détermination systématique qui tranche avec les atermoiements des Européens et des Américains.

    Obama et Hollande ont fini par reconnaître que l'on ne pouvait pas prendre à la fois Bachar et Daech pour cibles et qu'abattre Daech est prioritaire ? Poutine en retire le plein droit de soutenir Bachar sans restriction aucune et d'en faire la publicité afin de se rendre incontournable dans la nouvelle donne mondiale.

    Relations pacifiées avec Cuba, accord iranien… Barack Obama se démarque de la ligne néo-conservatrice américaine - incarnée actuellement par Hillary Clinton. La troisième guerre mondiale diagnostiquée par certains semble lointaine…

    Barack Obama a été élu sur un programme de désengagement militaire au Proche- Orient en nette rupture avec la ligne néo-conservatrice. Ce processus a vite montré ses limites. Les Américains ont quitté l'Irak avant d'être dans l'obligation pressante d'y revenir et quitte à devoir admettre leur absence de plan. Ce désengagement relatif provoque inévitablement l'insatisfaction à la fois d'Israël et des pays arabes. C'est là tout le problème d'Obama, dont la politique étrangère s'est révélée au pire illisible au mieux inefficace, que de réunir tous les mécontentements sur son nom. La réconciliation avec Cuba et l'accord avec l'Iran témoignent de l'urgence dans laquelle il s'est trouvé de marquer son deuxième mandat de quelque réussite diplomatique sans quoi il aurait été l'un de ces présidents américains n'ayant laissé aucune trace sur le plan des relations internationales ou, pire, une trace diffuse et brouillée.

    Mais Cuba, c'est d'abord le fait du pape François et de la diplomatie vaticane. Mais l'Iran, c'est faire avant tout preuve de bon sens, admettre la réalité et s'y conformer. Dans les deux cas, il n'y va pas d'une politique d'initiative mais d'une politique de confirmation. Cette faiblesse dans la prise de décision américaine est sans conteste un facteur d'instabilité à l'échelle planétaire.

    Va-t-on pour autant vers une troisième guerre mondiale ? Non, bien sûr. C'est au mieux une formule qui dit le contraire de ce qu'elle entend. La guerre globale est déjà là. Elle ne fait que perpétuellement commencer et recommencer avec des conflits de basse ou moyenne intensité répandus et récurrents sur l'ensemble des continents et impliquant des coalitions internationales variables, qu'elles soient militaires ou économiques. Nous sommes davantage confrontés à un état endémique de guerre à l'échelle internationale que menacés par une guerre mondiale au sens d'un affrontement de blocs.

    Il s'agit toutefois de savoir déterminer qui est l'ennemi prioritaire. Cet ennemi est Daech. Ce que considère Poutine tout en faisant croire qu'il veut sauver Assad alors que, une fois les intérêts russes en méditerranée assurés, il pourra très bien l'abandonner, étant suffisamment cynique pour cela. La France, elle, a longtemps professé que l'on pouvait avoir deux ennemis prioritaires en même temps, à savoir Daech et Assad. Ivres d'irréalisme, François Hollande et Laurent Fabius se sont entêtés à courir deux lièvres à la fois. Jusqu'à ce que les Américains, ayant eux- même fini par changer d'avis, aient stoppé sans plus d'égard la course échevelée de la diplomatie française. Ce suivisme erratique du gouvernement est plus que préoccupant car tout ce qui se passe au Proche-Orient a des répercussions sur le territoire national. De ce point de vue, la politique du gouvernement français apparaît largement comme irresponsable.

    Donald Trump loue le « leadership de Poutine », estime que s'il est élu président, il entretiendra d' « excellentes relations » avec celui-ci. Et il est le grand favori à la primaire des républicains. Est-ce le signe qu'une partie de la population américaine a rompu avec le néo-conservatisme ?

    Tout d'abord, au regard de ses scores abyssaux de défiance dans les divers baromètres américains, rien n'est moins assuré que Donald Trump accède un jour à la Maison blanche. Au cas où il serait élu candidat, puis président, il est probable que, comme Ronald Reagan, il se verrait encadré par la puissante machine républicaine. Ce qui est certain, c'est que, à Washington et à Moscou, on observe un croisement des opinions vers de fortes tendances isolationnistes.

    Comment réagissent les opinions russe et américaine à l'intervention en Syrie ?

    La guerre au Proche-Orient inquiète l'opinion américaine et n'emporte pas l'adhésion des Russes. Autant ces derniers soutiennent majoritairement l'action de Poutine en Crimée ou en Ukraine, autant la crainte est profonde sur l'engagement en Syrie qui réveille le souvenir de l'Afghanistan.

    De manière générale, les opinions au sein de l'hémisphère nord demeurent assez frileuses quant au danger que représente l'effondrement des frontières au Proche-Orient dont Daech est présentement le symptôme le plus virulent. Il revient aux gouvernants de savoir mobiliser car la question du djihadisme ne relève pas que de la politique internationale: dans nombre de ces pays, c'est aussi une question de politique intérieure.

    Or, si Poutine réussit à s'imposer au Proche- Orient, à prendre l'ascendant sur Obama et Hollande, à forcer les autres à suivre son rythme, c'est parce que, de quelque manière qu'on les juge, sa politique intérieure et sa politique extérieure sont en cohérence. Et ce, à la différence criante de celles des gouvernements occidentaux, en particulier de l'actuel gouvernement français.  •

    Jean-François Colosimo est écrivain et essayiste. Président du Centre national du livre de 2010 à 2013, il dirige désormais les éditions du Cerf. Son dernier livre, Les Hommes en trop, la malédiction des chrétiens d'Orient, est paru en septembre 2014 aux éditions Fayard. Il a également publié chez Fayard Dieu est américain en 2006 et L'Apocalypse russe en 2008.

    Entretien par Eléonore de Vulpillières            

     

  • Notes d’actualité : de Morano à Villiers

     

    par Hilaire de Crémiers

     

    hilaire-de-cremiers-510x327.jpgIl n’y a plus de politique française. Le spectacle qu’elle offre n’est plus que bouffonneries. En politique intérieure, l’incident Morano révèle l’état de déliquescence mentale de la classe politique. Ce que l’on savait déjà depuis des décennies, est confirmé : le réflexe pavlovien y tient lieu de pensée. Dans un cadre pareil tous les objectifs de redressement intérieur sont rendus impossibles. Une superstructure partisane, médiatique, syndicale, quelque 50 000 personnes, avec tous leurs réseaux d’obligés et leurs clientèles, fait la loi en France et impose ses vues. Cette superstructure ne représente nullement la France, ni ses territoires ni ses intérêts ni ses populations, et elle prétend la gouverner ! En revanche, elle se nourrit et vit de la réalité française comme un énorme parasite qui en dévore la substance : les familles, les entreprises, les régions, les territoires, tout est mis en coupe réglée et quand elle prétend déréguler et même décentraliser ( !), elle ne le fait que pour mieux asseoir son pouvoir tyrannique et en fait centralisateur. Les partis avec leurs idéologies s’installent partout et dominent tout, de la ville à la campagne, de l’administration aux professions ! Les syndicats pareillement. Ce qui se passe à Air-France est typique du mal-être français. Ainsi dans toutes les réformes ou prétendues telles, territoriales, économiques, sociales et « sociétales », la superstructure ne fait plus que détruire ; elle détruira jusqu’au dernier village, jusqu’à la dernière entreprise, jusqu’à la dernière famille. Sa raison d’être, ce sont les appareils, eux seuls existent ; le parti, l’appareil d’abord : voilà le mot d’ordre. Les financiers qui tiennent médias et partis dictent leurs choix. Des idéologues de pacotilles enfument les esprits. L’astuce est de faire croire à de grands combats : socialisme, libéralisme, droits de l’homme et tout ce qu’on voudra. Il ne s’agit en réalité que de conquérir le pouvoir, à tous les niveaux, afin de se l’approprier. Ce n’est plus une république, c’est une « chose privée » avec ses gardes-chasse, ses vigiles, ses sonneurs, ses laquais. Ils sont tous si heureux de se croire indispensables et importants ! Mais, répétons-le, leurs appareils dont ils vivent, qui les promeuvent et qui les tiennent – car ils ne sont plus libres –, ne sont que superstructures dont la vacuité mentale et morale est inversement proportionnelle à la lourdeur physique et au poids financier et qui se révèlent de plus en plus inutiles, inefficaces, obsolètes et terriblement contraignantes. Les superstructures, en bonne théorie et en exacte pratique, sont faites pour disparaître ; que ces messieurs qui furent plus ou moins marxistes ou saint-simoniens dans leur jeunesse, veuillent bien se souvenir des leçons qu’ils ont répétées comme des perroquets ! Une superstructure est faite pour tomber.

    Ajoutez à cette superstructure dite nationale, la superstructure européenne dotée des mêmes caractéristiques, il devient évident que la France a perdu toute liberté. Son droit a été évincé, ses intérêts bafoués, sa souveraineté avilie. L’Allemagne commande, au moins pour le moment. La politique extérieure française n’est plus dictée par les intérêts propres de la France ; les visions de sa diplomatie traditionnelle n’ont plus cours. Au Moyen-Orient comme en Afrique, la France n’agit plus selon ses données historiques. Nous sommes vassalisés et François Hollande dans sa ridicule posture n’a que trop mérité l’interpellation de Marine Le Pen au Parlement européen. Cet homme qui est légalement le chef de l’État français, n’a aucun sens de la France ; son moralisme de façade ne fait que couvrir l’imposture de son personnage qui s’essaye à jouer du Mitterrand alors qu’il n’arrive pas à la cheville du Florentin. Mitterrand connaissait son Machiavel. Le cynisme hollandais est du niveau de la petite « frappe » bourgeoise qui a réussi à devenir chef de gang.

    Lire le livre de Philippe de Villiers, Le Moment est venu de dire ce que j’ai vu (Albin Michel), est un régal pour tout ce qui reste d’esprits libres en France – et ils sont plus nombreux que nos apparatchiks ne le croient ! Il nous montre ces superstructures dans leur malfaisance essentielle, c’est-à-dire institutionnelle. Il les a expérimentées ; il en connaît la perversité. Et, surtout, il décrit – et dans quel style ! – tous les personnages de cet univers politico-médiatique que le peuple français dans sa crédulité imagine grands et qui sont, vus de près, d’une bassesse à vomir et d’un ridicule à hoqueter.

    Merci à Philippe de Villiers qui libère nos esprits et, dans sa haute idée de la France, ramène à leur juste et misérable mesure les esprits faux et médiocres qui, en se servant des appareils et des superstructures, ont régenté et régentent encore notre pauvre pays. À quand sa libération ?  

  • Svetlana Alexievitch, Nobel de littérature : la position d'Hélène Richard-Favre

     

    A la suite de l'attribution du Nobel de littérature 2015 à Svetlana Alexievitch, Hélène Richard-Favre, auteur spécialiste du monde russe, a tenu à nous faire part de sa position - que nous relayons bien volontiers. Ajoutant à son message le commentaire suivant : « Dans mon sujet, je n’ai évoqué que le HuffingtonPost mais c’est la quasi totalité des médias qui ont repris les propos que je cite et qu’elle a tenus en conférence de presse. Ma prise de position a été saluée et appréciée de nombre de personnes, russes ou non, toutes conscientes de la gravité de tels dires, surtout venant de la part d’un écrivain qui déclare faire du mensonge le fer de lance de son combat. »  

     

    479082707.jpgLe Nobel de littérature a été attribué.

    Il couronne Svetlana Alexievitch, écrivain et journaliste biélorusse.

    A lire l'article que lui consacre le Huffingtonpost, on comprend tout à fait que les idées politiques de cette écrivain rejoignent la plupart des standards occidentaux et bien leur en prenne, des goûts et des couleurs, on ne discutera pas ici.

    Mais quand on lit de cette Nobel de littérature que, je la cite, cette Russie en arrive à 86% à se réjouir quand des gens meurent dans le Donbass, non, là, c'est plus que de l'indécence ou de l'insulte. C'est un outrage lancé à la Russie et surtout à la mémoire de milliers de victimes qui n'ont jamais demandé à l'être.

    En arriver à exprimer de tels propos alors qu'on vient de se voir récompensé du prix le plus prestigieux qui soit, est inqualifiable. 

    http://www.huffingtonpost.fr/2015/10/08/svetlana-alexievi...

    Voix - le blog d'Hélène Richard-Favre

  • Où Hubert Védrine distingue entre les régimes résignés au multiculturalisme et ceux qui n'en veulent pas ...

     

    « Les sociétés d’Europe de l’Ouest sont favorables aux sociétés multiculturelles, ou s’y sont adaptées, ou s’y sont résignées, appelons-ça comme on veut. En Europe de l’Est, pas du tout. Ils pensent que les sociétés multiculturelles sont un échec flagrant, spectaculaire, ils n’en veulent pas. Donc ils ne veulent pas, sous couvert de la nécessité de donner l’asile à des gens vraiment persécutés entrer dans cet engrenage. Ce n’est pas de la xénophobie dans le sens où ils sont contre un groupe ethnique en particulier, ils ne veulent pas de l’évolution multiculturelle. Il ne faut pas s’en prendre qu’à la Hongrie. Il y a six, sept ou huit pays qui pensent comme ça. Il ne faut pas avoir peur d’en parler. »

     

    Hubert Védrine

    France Inter, La Matinale, le 28 septembre 2015

     

  • « Angela Merkel aura le prix Nobel de la paix ! »

    par Aristide Leucate 

    Le prix Nobel de la paix pourrait être attribué vendredi prochain à Angela Merkel « pour son attitude responsable dans les crises migratoire et ukrainienne ». La suite de l'histoire dira si l'accueil de centaines de milliers de migrants en Europe, suivis, sans-doute par beaucoup d'autres, peut-être des millions, favorisera ou au contraire détruira la paix sur notre continent. Aristide Leucate commente ici avec pertinence ces perspectives contradictoires. « Attitude responsable » ? Il y a de bonnes raisons d'en douter. LFAR 

    aristide-leucate.jpgLe prix Nobel, c’est un peu comme le cirque Zavatta : un grand barnum où, annuellement, l’on applaudit les prouesses quasi miraculeuses des impétrants, les uns pour avoir trouvé l’anti-accord absolu en littérature, les autres pour avoir mis au jour le énième secret du nombre d’or, et certains pour leur redécouverte, jamais tarie, de la pierre philosophale en économie politique.

    Et puis il y a le clou du spectacle mondialisé : le prix Nobel de la paix par lequel le récipiendaire est distingué pour son action en faveur du bien toujours évaluée à l’aune des inaltérables droits de l’homme.

    Martin Luther King, Obama, Mandela, Mère Teresa ou encore le GIEC (groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat) comptent parmi les nombreux lauréats.

    Cette prestigieuse cohorte sera-t-elle bientôt rejointe par la chancelière Angela Merkel ? Outre-Rhin, les pronostics vont bon train et agitent frénétiquement le petit landerneau médiatique qui se pâme à cette perspective de canonisation universelle. L’institut Nobel vaut bien, à cet égard, tous les papes du Vatican !

    « Angela Merkel aura le prix Nobel de la paix », lance, péremptoire, Kristian Berg Harpviken, directeur de l’Institut de recherche sur la paix d’Oslo. La raison ? De même que le Christ appelait à laisser venir à lui les petits enfants, Sœur Angela (au prénom si, décidément, prédestiné) a magnifiquement et généreusement ouvert grand les portes de Brandebourg et de la Prusse tout entière aux « migrants », ces saints innocents de l’humanité martyrisée.

    La propagande humanitariste joue à plein. Après la photo tronquée du petit Aylan, voici le prix truqué décerné à l’un des plus grands fossoyeurs de la civilisation européenne. L’institut Nobel ne déroge pas à la vocation qui est la sienne de promouvoir les pires agents dissolvants de l’identité des peuples et des nations, de Wilson à Ferdinand Buisson ou René Cassin à… l’Union européenne (2012).

    Défendre la paix, oui, mais laquelle ? Car, à l’instar de la liberté ou des « valeurs de la République », autres incantations vides, combien de crimes, de génocides et de guerres commis au nom de ses glorieux étendards ? La Vendée, Dresde, Hiroshima, Sarajevo, l’Irak, la Libye… et aussi Lampedusa, Lesbos, Schengen, autant de fourriers infernaux de ces folles utopies dont la Révolution française est la sinistre matrice.

    Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois et Angela Merkel peut bien, alors, s’enorgueillir de réaliser le vœu du philosophe de Königsberg qui, dans son Essai philosophique sur la paix perpétuelle (1795), exhortait le « genre humain [à] se rapprocher indéfiniment d’une constitution cosmopolistique ». Ce faisant, Kant reconnaissait le droit apatride qu’« ont tous les hommes de demander aux étrangers d’entrer en société avec eux ; droit fondé sur la possession commune de la surface de la terre, dont la forme sphérique oblige les hommes à se supporter les uns à côté des autres, parce qu’ils ne sauraient s’y disperser à l’infini, et qu’originairement, l’un n’a pas plus de droit que l’autre à une contrée déterminée ». Le nomadisme préhistorique renaissait de ses cendres.  

    Docteur en droit, journaliste et essayiste (Boulevard Voltaire)
  • Incroyable madame Merkel

     

    par Jean-Baptiste d'Albaret*

     

    626951329.jpg« L’incroyable madame Merkel », titraient récemment nos estimables confrères du Point. Oui, incroyable madame Merkel qui, après avoir invité les demandeurs d’asile à profiter massivement de la générosité allemande, a été contrainte de refermer ses frontières, suspendant ainsi les accords de Schengen.

    Incroyable Madame Merkel qui, tel un phare dans la nuit des égoïsmes nationaux, a indiqué « le cap des droits de l’homme » à l’Europe éblouie mais, ce faisant, a créé un immense et incontrôlable appel d’air dont ses voisins auront à supporter les conséquences : depuis la Syrie ou la Libye, ce sont des centaines de milliers, peut-être des millions de migrants qui vont tenter d’entrer sur le sol européen dans les mois et les années qui viennent.

    Situation intenable, tant pour des pays dont les capacités d’intégration économiques, culturelles et religieuses sont déjà mises à rude épreuve, que pour des migrants attirés par le prétendu El Dorado européen et, finalement, victimes de trafiquants d’êtres humains sans scrupule.

    Mais c’est ainsi. Dans l’Europe d’aujourd’hui, l’Allemagne, puissance dominante, croit pouvoir ne rien demander à personne. Décidant d’abord d’un accueil massif de réfugiés sans consulter aucun de ses « partenaires » ; menaçant ensuite de rétorsions financières les récalcitrants à sa « politique des quotas » ; accusant enfin ceux qui refusent d’obtempérer à ses diktats de couvrir l’Europe de « honte ».

    Mais qui, hormis quelques bonnes âmes françaises, peut encore être aveuglé par ce vocabulaire moralisateur utilisé dans le seul but de justifier une politique que l’Allemagne, marchant comme toujours main dans la main avec la Commission européenne, pense conforme à ses intérêts ?

    Ses dirigeants considèrent en effet que cet afflux de migrants lui est bénéfique en raison de son problème démographique. Soit. Mais, voulant imposer ses vues de gré ou de force, Berlin a sous-estimé la capacité de réaction de peuples – particulièrement à l’est de l’Europe – non encore anesthésiés par le droit-de-l’hommisme de la technocratie bruxelloise.

    La réunion des ministres européens de l’Intérieur, le 22 septembre, a débouché sur un accord en catimini : la prise en charge de 120 000 migrants (mais ils seraient en réalité 800 000…) répartis entre les différents pays. Solution ponctuelle qui ne fait que repousser le problème d’une crise humanitaire qui s’annonce longue et durable. Dans leur grande majorité, les 28 pays de l’Union refusent en effet d’ouvrir grand leurs portes.

    Du Danemark à la Lettonie, de la Roumanie au groupe de Visegrad – Pologne, Hongrie, République Tchèque, Slovaquie –, des gouvernements ne cèdent rien aux injonctions berlinoises. On ne saurait le leur reprocher. C’est même tout à leur honneur de défendre en premier lieu le bien de leur peuple.
    Mais que reste-t-il, alors, de l’Union européenne ? Rien ou pas grand-chose… Elle qui devait répartir ses efforts au nom d’intérêts partagés, se montre incapable d’échafauder une politique commune. Elle qui avait érigé en sacro-saint principe la « libre-circulation des personnes » voit des frontières nationales rétablies un peu partout.

    Quant à la France, sa faiblesse politique la condamne une fois de plus à un rôle de supplétif – rôle que François Hollande remplit avec un zèle sans pareil. Pourtant, face à cette crise qui « met en cause les fondements même de l’Europe », comme l’a dit Laurent Fabius, son premier devoir serait de se comporter en chef d’une nation souveraine, capable d’insuffler au Vieux Continent une politique raisonnable, en dehors de tout esprit impérial.

    La vocation de notre pays, sa situation géographique, son histoire, tout concourt à lui faire jouer ce rôle. Hélas, il y a longtemps que ses dirigeants y ont renoncé, laissant l’Europe se constituer progressivement en super-état fédéral assujetti à l’Allemagne.

    Que la révolte des souverainetés bafouées viennent des pays anciennement sous domination germanique et soviétique, quelle leçon pour nos élites politico-médiatiques béatement soumises à « l’incroyable madame Merkel »… 

     - Politique magazine

     

  • Catalogne indépendante... jusqu'à Perpignan ?

    Ce sont toujours de très fines analyses que donne Jean-Michel Quatrepoint. Il réfléchit ici, pour Le Figaro, aux conséquences du résultat des élections régionales en Catalogne. A terme, outre la période d'incertitudes, palabres et désordres qui s'ouvre pour Barcelone et Madrid, il redoute une explosion des Etats-nations. Menace tout à fait réelle bien qu'elle ne se soit encore jamais traduite dans les faits en d'autres lieux dans des cas comparables (Belgique, Grande-Bretagne). Mais le risque d'explosion des Etats est aussi source d'infinies difficultés pour l'Union Européenne. Basée sur l'idéologie de l'effacement des nations, elle est pourtant, dans la pratique, paradoxalement fondée sur elles. Et le dogme de l'intangibilité des frontières est curieusement resté une règle dite incontestable alors même qu'on voulait les abaisser ! Ainsi, la sécession de la Catalogne poserait aussi à l'Europe de Bruxelles une série de problèmes assez inextricables qui menaceraient ce qui lui reste de cohésion. Dédié à ceux qui croient que l'Europe et le monde s'unifient, alors qu'ils se morcellent. LFAR   

     

    PHO1159e20e-cc52-11e3-a4f2-b373f3cdeec9-150x100.jpgLE FIGARO - Les deux listes indépendantistes catalanes ont obtenu le score historique de 48% des voix aux élections régionales ce dimanche. Cette démonstration de force vis-à-vis de Madrid laisse-t-elle présager une indépendance prochaine de la Catalogne ?

    Jean-Michel QUATREPOINT - Cette élection n'est pas une victoire des indépendantistes. Ils ont obtenu la majorité des sièges avec la CUP. Ce parti (extrême gauche) n'a pas grand-chose à voir avec M. Artur Mas et l'ancienne CiU (Convergence et Union, fédération catalaniste centriste). L'alliance des indépendantistes est hétéroclite: le parti d'Artur Mas a 30 sièges, ERC et Izquierda Unida, républicains de gauche ont obtenu 21 sièges, 11 sièges ont été obtenus par les indépendants. Les rapports de force sont les mêmes depuis quelques années. Les indépendantistes ont gagné en sièges mais pas en votes. Ils restent minoritaires. Les indépendantistes ont fait 48%, les anti-indépendantistes, 52%. La situation est bloquée.

    La politique européenne des euro-régions a-t-elle un rôle dans cette montée en puissance de l'indépendantisme catalan ?

    Oui. Pendant longtemps la Commission européenne et Bruxelles ont joué les régions contre les Etats-nations. A un point tel que s'est accrue l'utilisation des langues régionales ; le catalan est une langue officielle de l'UE, comme le basque. A multiplier les langues régionales, on a pu donner l'impression à ces régions qu'elles seraient plus efficaces en négociant directement avec Bruxelles, en sautant l'étape de l'Etat-nation.

    Comment expliquer, à l'heure de la mondialisation et de la théorie des grands espaces, cette montée en puissance de ces revendications indépendantistes ?

    On peut comprendre les problèmes propres des Catalans, comme ceux des Basques ; sous Franco, ils avaient été les principales victimes de la répression, car Basques et Catalans étaient les principaux opposants de Franco. Entre 1939 et 1973-74, ils ne pouvaient parler leur langue, on continuait à exécuter les militants. Mais par le Pacte de la Moncloa - accord signé en 1977, après la mort de Franco - les Espagnols ont décidé de ne pas se référer au passé, et de bâtir un Etat-nation dotant les régions d'une très grande autonomie. Depuis quelques années, le Parti populaire a une responsabilité car il n'a pas pris au sérieux les revendications des Catalans. Il était focalisé sur les Basques et l'ETA - les Catalans n'ayant, à la différence des Basques, jamais commis d'acte terroriste - sans s'apercevoir qu'en Catalogne, la montée irrédentiste était forte. Les antagonismes ancestraux ont resurgi à travers la langue qui a servi de vecteur aux idées indépendantistes en Catalogne, comme au Pays basque. Mais au Pays basque, où l'autonomie est plus importante que dans d'autres régions, les milieux économiques ont parfaitement compris qu'ils avaient intérêt à rester dans l'Espagne. Les Catalans se montrent un peu plus égoïstes. Ils ne veulent pas payer pour les Andalous et les régions moins riches. Cet égoïsme régional laisse place à une situation bloquée. Les positions se tendent.

    Quels problèmes pose ce rassemblement hétéroclite des indépendantistes ?

    Au sein des indépendantistes se posent plusieurs problèmes. Dans l'ancienne CiU, le parti d'Artur Mas, beaucoup étaient corrompus, à commencer par Jordi Pujol, qui l'a présidée de 1979 à 2004. Pour garder le pouvoir, ils ont fait alliance avec l'extrême-gauche. Cette dernière n'est pas du tout sur la même position en matière sociale et fiscale par exemple. Leurs revendications sont incompatibles avec les positions de centre droit de la CiU. Aujourd'hui, les antagonismes sont forts. Ciudadanos, un parti neuf, fondé en 2006 l'autre vainqueur des élections, a grimpé sur les décombres du parti populaire ; il est devenu la deuxième force politique de Catalogne.

    En Catalogne, il n'y a pas que des Catalans. De nombreux Espagnols y vivent et y travaillent. Les Catalans avaient fait venir des travailleurs d'Andalousie, qui n'ont nulle envie de voir la Catalogne devenir indépendante. Les règles avaient déjà été durcies pour s'intégrer et travailler là-bas : pour tout emploi public, il faut parler catalan. Les professeurs de langues étrangères par exemple doivent enseigner en catalan. La barrière de la langue crée de la ségrégation à l'intérieur de la Catalogne.

    L'indépendance est également prônée pour des raisons électoralistes et clientélistes. Elle provoquerait la création de milliers de postes à distribuer aux copains, dans les ambassades et autres représentations nationales.

    Comment la position de Madrid peut-elle évoluer ?

    Les Catalans ne deviendront indépendants que si Madrid donne son aval. La Catalogne ne peut décréter son indépendance unilatéralement. Un référendum est nécessaire, et il devrait se tenir dans toute l'Espagne. Un problème majeur se pose, celui de la répartition de la dette, surtout que la Catalogne est la région la plus endettée d'Espagne. Les milieux économiques s'inquiètent de la possibilité d'une indépendance. Les investisseurs ne prendront pas le risque d'investir en cette période d'incertitude totale. Prenons un exemple concret, celui de Vueling, la filiale low-cost d'Iberia. Le hub d'Iberia est à Madrid. Celui de Vueling est à Barcelone. Si jamais il y a un conflit, Vueling pourrait rapatrier son hub à Madrid, ou dans une autre ville d'Espagne. Sans parler du Barça. Il ne pourrait plus participer au championnat d'Espagne. Fini les “ classicos” contre le Real Madrid.

    Quelle sera la réaction probable des autres partis, non indépendantistes ?

    Le PP devra donner un peu plus d'indépendance budgétaire à la Catalogne. Les anti-indépendantistes qui ont longtemps laissé faire, commencent à redresser la tête. Tenez, aux Baléares, les gens parlent catalan… et ne réclament pas l'indépendance pour autant.

    Le parti Podemos s'est révélé en échec complet dans ces élections pour lesquelles ils n'ont pas fait de choix clair. Une partie de leurs troupes a basculé du côté des indépendantistes. Ciudadanos est en train de monter car ce parti représente une alternative face au PP vieillissant et considéré comme « pourri ».

    L'indépendance de la Catalogne aura-t-elle des répercussions sur la France ? On sait que certains, tels le parti EELV, lorgnent sur le département des Pyrénées-Orientales (rebaptisé Catalogne par ce parti)…

    Evidemment. Les plus indépendantistes se trouvent à Gérone. Or, parmi eux, un certain nombre estime que la Catalogne va jusqu'à Narbonne. Si la Catalogne espagnole devient indépendante, elle créera des émules dans le pays catalan français. Elle donnera envie au Pays basque espagnol de réclamer son indépendance, et partant, le Pays basque français fera de même. Nous aurons un éclatement de l'Etat espagnol et des revendications nationalistes se renforçant en France.  

    Jean-Michel Quatrepoint est journaliste économiste. Il a travaillé entre autres au Monde, à La Tribune et au Nouvel Economiste. Il a écrit de nombreux ouvrages, dont La crise globale en 2008 qui annonçait la crise financière à venir.

    Son dernier livre, Alstom, scandale d'Etat - dernière liquidation de l'industrie française, est paru le 9 septembre 2015 aux éditions Fayard.

    Il est vice-président du comité Orwell.

    Entretien réalisé par Eléonore de Vulpillières

  • Pendant que Poutine joue aux échecs, Hollande joue à la belote

    L'opinion d'André Bercoff    

    Pour André Bercoff, François Hollande a commis une erreur stratégique en refusant trop longtemps de dialoguer avec le président syrien Bachar el-Assad. Comme avec Vladimir Poutine, d'ailleurs, qui est désormais au centre du jeu diplomatique. Etat de fait qui est, après tout, compte tenu de la qualité de nos dirigeants, ce qui peut aujourd'hui arriver de mieux au groupe de nations qui partagent notre civilisation, ou ce qu'il en reste. Et dont la Russie fait partie. Sur le fond, l'analyse d'André Bercoff nous paraît fort juste. Et puis, il y a la forme, dont nous avons déjà parlé : Quand le bon sens, le style, la verve et la truculence, le franc parler se combinent cela donne un billet d'André Bercoff et quand il décide de peindre et moquer les hommes du Système, cela fait mouche.  LFAR 

     

    photo.jpgDe Gaulle en ses Mémoires : « Vers l'Orient compliqué, je m'envolai avec des idées simples.» Mieux valent des idées simples que pas d'idées du tout. C'est ce vide quasiment abyssal qui semble régner sur la politique étrangère de la France, et ce, depuis quelques années. Sarkozy voulut se débarrasser de Kadhafi au nom de la liberté et des droits de l'homme, ce qui était tout à fait légitime, mais ce faisant, il a complètement ignoré le fait qu'une dictature peut en cacher une autre, pire encore. Kadhafi était une brute sanguinaire que gouvernements de gauche et de droite reçurent en grande pompe, puisque le pétrole reste l'horizon indépassable de notre temps européen. L'on se rappelle les vivats médiatiques, les poèmes lyriques et les autocongratulations euphoriques qui accueillirent la chute du tyran. Résultat des courses : la voie des grandes migrations fut ouverte avec fracas et, dans leur candeur naïve, nos protagonistes ne songeaient même pas, les choses méditerranéennes étant ce qu'elles sont, qu'aux serments de Tobrouk allaient succéder les décapitations de Syrte.

    Plus spectaculaire encore, dans le déni de réalité, fut la position française vis-à-vis de la Syrie. Que Bachar El Assad fût prêt, comme son père le fit à Hama il y a plus de trente ans, à sacrifier des dizaines de milliers de personnes, nul n'en doutait. Donc, en 2012, pour Obama comme pour Hollande, il s'agissait de se débarrasser au plus vite du massacreur syrien : l'on se rappelle la série prolongée des mâles résolutions de Laurent Fabius. Malheureusement, on avait encore une fois oublié cette triste réalité d'évidence: à savoir que, depuis des années et pour quelque temps encore, le choix n'est pas entre [le mal absolu ] et un Printemps Arabe qui a duré ce que durent les roses, et qui aurait débouché sur la victoire d'une démocratie qui allie enfin la liberté d'expression, le droit des femmes, la laïcité et évidemment le droit de vote. Le choix, dramatique mais incontournable, oppose les dictatures militaires à l'enrégimentation de l'islamisme radical, dont l'ambition est précisément et irréversiblement la mainmise implacable, policière et punitive sur la totalité de la vie quotidienne. Les bonnes âmes nous parlent sans cesse du manque de différence entre peste et choléra. Ne pas oublier, cependant, que les dictatures peuvent disparaître alors que la soumission institutionnalisée, actée de la naissance à la mort, appliquée d'une main de fer du lever au coucher, est beaucoup plus difficile à combattre par nos « valeurs de la République » de plus en plus soumises, elles, au souci primordial de ne vivre sa vie que sous principe de précaution.

    Voilà pourquoi Poutine est aujourd'hui au centre du jeu : il joue aux échecs en calculant à six coups d'avance, alors que nous jouons à la belote en brandissant bruyamment nos sains principes. Un examen à peu près lucide du paysage moyen-oriental, entre chiites et sunnites, Califat irako-syrien et Egypte de Sissi, Israël et Palestine, aurait montré à nos gouvernants que le rapport de force modèle plus que jamais les situations et qu'entre deux maux, il faut continuer de choisir le moindre. Sinon, on se retrouve en coulisses, en salle d'attente, à regarder les vrais joueurs s'affronter. Hollande et Fabius découvrent soudain l'intervention en Syrie et les bombardements ciblés : il n'est jamais trop tard pour bien faire. Mais le temps perdu signe la condition sympathique et pérenne des seconds rôles.  •  

    André Bercoff             

    André Bercoff est journaliste et écrivain. Son dernier livre Bernard Tapie, Marine Le Pen, la France et Moi est paru le 9 octobre 2014 chez First.