Frédéric Rouvillois: Je suis effaré par cette réforme. D'abord, par sa faible utilité: soit on y va vraiment, soit on ne fait rien. Mais ce que je trouve particulièrement révoltant, c'est le degré d'abstraction de ce redécoupage. La lecture de la presse était à ce titre édifiante. Le Monde a titré «Le jour où François Hollande a redessiné la France», comme si ce que l'histoire a fait en des siècles et des siècles, M. François Hollande pouvait le défaire en un jour! Dans Le Monde aussi, on apprend qu'à 16h, la région Centre ne savait pas encore quelle allait être sa taille. Ce n'est pas un redécoupage tracé au fil des siècles, ni même pensé dans une stratégie idéologique, économique ou culturelle, mais une totale improvisation, un charcutage administratif tempéré de magouille électoraliste. On a le sentiment d'un puzzle fait à l'arraché, sans imagination, sans ambition: se contenter de coller des régions existantes, on peut faire ça en 5 minutes! Sans doute est-ce le fruit de cette nouvelle volonté «d'aller vite» pour simuler une capacité à prendre des décisions, comme si l'activisme était un gage d'efficacité!
Cette réforme traduit aussi une volonté frappante d'enfumage: en lançant dans le débat public un sujet brûlant, on fait oublier la défaite cuisante des européennes. A ce titre, la réforme territoriale consiste un sujet idéal de diversion, car tout le monde a un avis sur la question, de la taille des régions à leur nom. C'est la perspective du pain et des jeux: pour distraire la «populace» des vrais problèmes économiques et sociaux on lance un redécoupage ubuesque. Cela me parait caractéristique d'un système tyrannique.
"C'est la perspective du pain et des jeux : pour distraire la « populace » des vrais problèmes économiques et sociaux on lance un redécoupage ubuesque. Cela me parait caractéristique d'un système tyrannique."
Surtout c'est quelque chose qui va toucher quotidiennement l'existence des gens, leur façon de vivre, sur un plan culturel, économique, industriel. On veut prendre pour modèle, de manière totalement artificielle, ce qui a été fait en Allemagne, en Italie et en Espagne, où les grandes régions correspondent à des réalités historiques très anciennes et très profondes. La Bavière n'a pas été dessinée sur un coin de table par Angela Merkel ! La Catalogne existe depuis 1000 ans! Tant qu'à faire, pourquoi ne pas couper la France en quatre Nord-Sud-Est-Ouest!
Avec cette réforme territoriale, Hollande qui a toujours ressemblé à Ubu, vient d'être sacré roi.
La France s'illustre par une forte centralisation. Quelles sont les racines historiques de ce rapport centre/périphérie?
Le rapport centre/périphérie s'inscrit dans une temporalité longue. Un certain type de centralisation, modérée et pratique, remonte à la reconstruction de l'état central à partir du XIIème et XIIème siècle et va se poursuivre sous les différents rois qui vont chercher à recentraliser le pouvoir et à le soustraire aux féodalités. Je suis en désaccord total avec la thèse de Tocqueville dans l'Ancien régime et la Révolution où il explique que la Révolution française ne fait qu'accompagner un processus de centralisation déjà entamé sous l'ancien Régime, et qu'au fond Robespierre serait l'héritier direct de Louis XIV, de même que les préfets seront considérés plus tard comme les héritiers des intendants de la monarchie.
En réalité la centralisation d'Ancien Régime reste limitée et relative, elle a un objectif essentiellement pratique: permettre à l'Etat souverain de fonctionner, éliminer des concurrences féodales trop dangereuses. A la fin de l'Ancien Régime il y a encore des dizaines de coutumes différentes qui s'appliquent aux quatre coins du pays, et on laisse beaucoup de pouvoir à la périphérie. A cette centralisation monarchique pratique s'oppose la centralisation jacobine, idéologique et révolutionnaire. Elle est axée sur une construction idéologique, celle de l'Etat nation, fondé sur la théorie du contrat social selon laquelle les individus interchangeables, sortis de l'Etat de nature confèrent l'ensemble de leurs droits à l'Etat central, et à lui seul. Dans cette vision révolutionnaire, il n'y a que deux réalités: l'individu et l'Etat central à qui les individus ont confié leur pouvoir. Tous les autres pouvoirs sont frappés d'illégitimité. Tout le reste n'existe pas, les corps intermédiaires n'ont aucune légitimité, ils ne peuvent être à la limite que les relais de l'Etat dans un système déconcentré. On est dans une perspective inverse à la théorie de la subsidiarité, défendue notamment par l'Eglise catholique et Saint Thomas d'Aquin.
"A la centralisation monarchique pratique s'oppose la centralisation jacobine, idéologique et révolutionnairen pour laquelle il n'y a que deux réalités : l'individu et l'Etat central à qui les individus ont confié leur pouvoir."
Concrètement, comment se met en place l'uniformisation caractéristique de cette centralisation idéologique et révolutionnaire?
L'unité par l'uniformisation est le grand rêve de la Révolution française. D'abord, les révolutionnaires créent de toutes pièces l'idée d'un peuple, unique et abstrait, résultat du contrat social, là où, sous l'Ancien Régime le roi de France disait «mes peuples»: le peuple provençal, le peuple picard, le peuple normand, en faisant allusion à des réalités sociologiques, historiques et culturelles concrètes. Lorsque les révolutionnaires disent le peuple, ils construisent une réalité abstraite composée des citoyens qui ont le droit de vote (les femmes en sont donc exclues). Ensuite la langue: il faut qu'il y ait une coïncidence entre l'outil de communication et le peuple souverain. Il faut donc exterminer les patois, résidus du passé comme le propose l'Abbé Grégoire dans son Rapport sur la nécessité et les moyens d'anéantir les patois et d'universaliser l'usage de la langue française présenté à la Convention en 1794. Cela passe enfin par une structure administrative uniforme: les communes
"L'unité par l'uniformisation est le grand rêve de la Révolution française"
qui remplacent les anciennes paroisses et les départements créés ex nihilo sans aucune réalité historique qui suppriment les anciennes provinces d'Ancien Régime. On remplace des réalités anciennes par des abstractions nouvelles, pour faire oublier le passé. Cette uniformisation administrative s'accompagne d'une unification du droit: la Loi est sacralisée et vient supprimer les anciennes coutumes.
Alors que la centralisation d'Ancien Régime était modérée et relative et laissait place à une démocratie locale importante, la centralisation révolutionnaire et napoléonienne est absolutiste. Elle atteint son apogée avec Bonaparte qui conjugue la centralisation pratique à la centralisation idéologique pour aboutir à une centralisation totale, aboutie, extrêmement dure, celle des lois de l'an VIII, avec un système administratif pyramidal dominé par les préfets qui rendent compte directement au pouvoir central.
Faut-il vraiment considérer cette centralisation excessive comme un «mal français»? Ne faut-il pas plutôt y voir une chance qui a permis l'unité de notre pays et fait sa force?
La France de Louis XIV était-elle un petit pays sans perspectives et sans puissance? C'était pourtant un Etat beaucoup plus décentralisé que celui de Napoléon…
Certes. Mais à l'heure où la nation française est remise en cause par le haut par la construction européenne et la mondialisation, et par le bas par les revendications communautaristes et localistes, la décentralisation n'est-elle pas un moyen de plus de la fragiliser?
La décentralisation peut être éventuellement dangereuse dans un certain contexte politique qui est le nôtre. Peut-être faut-il réfléchir à l'inverse: si la France est tellement faible et inconsistante qu'il suffit d'une modification administrative pour la faire éclater, c'est que le problème est ailleurs. D'ailleurs, si la centralisation est très ancienne, la volonté de décentraliser l'est aussi. On n'a pas attendu les années 1980 pour mettre en place la décentralisation: sous la Restauration, tout un programme de décentralisation est pensé, notamment à droite chez les ultra-royalistes mais aussi chez les libéraux (Tocqueville, Constant, Guizot).
C'est étonnant d'ailleurs, car si la tradition décentralisatrice s'inscrit plutôt dans le cadre de la pensée de droite, elle
"Pour moi, l'histoire de France commence avec Clovis, choisi comme roi de France par la tribu des Francs, qui donnèrent leur nom à la France.
Avant Clovis, nous avons la préhistoire gallo-romaine et gauloise.
L'élément décisif pour moi, c'est que Clovis fut le premier roi à être baptisé chrétien.
Mon pays est un pays chrétien et je commence à compter l'histoire de France à partir de l'accession d'un roi chrétien qui porte le nom des Francs".
Charles de Gaulle
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De Michel Mourre, Dictionnaire encyclopédique d'Histoire, Tome C, article Clovis, page 999 :
"Successeur de son père Childéric 1er à l'âge de quinze ans, il reçut en héritage un petit royaume resséré entre la mer au Nord, l'Escaut à l'Est, les diocèses de Thérouane et de Boulogne à l'Ouest et le diocèse de Cambrai au Sud, mais il ne tarda pas à l'étendre en imposant son pouvoir, par la diplomatie ou par la force, aux chefs salyens et ripuaires.
En 486, il défit Syagrius, dernier représentant de l'autorité romaine en Gaule, établit sa capitale à Soissons et occupa toute la Gaule jusqu'à la Loire.
Il repoussa les Alamans à la bataille de Tolbiac (496 ?).
Marié dès 493 à une princesse burgonde catholique, Clotilde, Clovis eut l'avantage de bénéficier de l'appui des évêques. Alors que les rois burgondes et wisigoths, plus romanisés que lui, étaient acquis à l'hérésie arienne, Clovis était encore païen, et, en adhérant à l'orthodoxie, il pouvait rallier à lui la masse des fidèles gallo-romains.
Sous l'influence des évêques Avit et Rémi, ainsi que de son épouse chrétienne Clotilde, Clovis se fit baptiser à Reims, avec plusieurs milliers de ses guerriers (Noël 496 ?), devenant ainsi, aux yeux des catholiques, le seul légitime des rois barbares. "Votre foi est notre victoire", put lui écrire saint Avit, qui était pourtant évêque de Vienne (Dauphiné), au pays des Burgondes.
Inquiets de ses ambitions, les souverains ariens, avec l'appui de Théodoric, formèrent une sorte de ligue contre Clovis, mais celui-ci imposa un tribut aux Burgondes (500), puis vainquit et tua le roi wisigoth Alaric à Vouillé (507) et conquit toute l'Aquitaine. Théodoric l'empêcha de s'avancer jusqu'à la Méditerranée (508), mais son pouvoir fut en quelque sorte consacré par l'empereur Anastase, qui lui décerna les titres de consul et de patrice.
Clovis, le plus grand des Mérovingiens, avait fondé le royaume franc qui s'étendait désormais du Rhin aux Pyrénées; mais à sa mort, selon la coutume germanique des partages successoraux, ses Etats furent démembrés entre ses quatre fils, Thierry, Childebert, Clodomir et Clotaire."
Pour retrouver l'intégralité du feuilleton, cliquez sur le lien suivant : L'aventure France racontée par les Cartes...
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Guy Bertran de Balanda vient de nous faire part du décès de sa mère. Il y a peu, c'était Bénédicte - l'une de ses sœurs - qui perdait son mari, notre ami lui aussi, Hubert de Lapeyrouse. La famille Bertran de Balanda est donc encore dans l'épreuve, si peu de temps après : Guy, Pierre, Bénédicte, Florence et Hugues.
Nous sommes tout naturellement à leurs côtés dans ce deuil, comme nous l'avons été si souvent, et depuis si longtemps, dans les moments heureux et, surtout, les moments militants.
Nous serons autour d’eux vendredi en la basilique du Sacré-Cœur du Prado (Messe à 11h), pour leur témoigner notre amitié et leur manifester notre soutien.
La famille Bertran de Balanda est une famille de fidélité : il n'est que de lire ce passage où Léon Daudet évoque les "fidélités royalistes" qu'il a rencontrées dans toute la France, lors de ses déplacements, montrant combien, chez les Catalans, il se sentait chez lui, au milieu des vieilles familles des d'Espéramoins ou des Bertran de Balanda.
Pour notre part, ce n'est pas sans émotion que nous faisons mémoire, en cette occasion, du père de Guy, lorsqu'il nous recevait, chez lui, à Marseille, dans ce salon d'angle donnant sur le Boulevard Baille et le Cours Lieutaud; puis, lorsqu'il nous eut quittés, de la présence régulière de sa mère aux Rassemblements royalistes de Montmajour et des Baux ainsi qu'à d'autres manifestations. Toute la famille était là, aussi, par exemple, avec les Jonquères d'Oriola et tant d'autres vieilles familles catalanes, lorsque le prince Jean se rendit en Catalogne, à l'invitation d'Henri de Lumley.
La fidélité est plus qu'une qualité : c'est une vertu. Voilà quelque chose que l'on sait, chez nos amis les Bertran de Balanda. Guy, comme nous tous, est Camelot du roi, depuis bien longtemps déjà : qui pourrait compter le nombre de tracts que nous avons distribués ensemble (avec, parfois, bagarres à la clé !) ? Le nombre d'affiches collées pendant nos nuits d'interminables affichages, où nous couvrions les murs, comme le disait - furieux - un policier qui nous avait arrêtés et qui nous "engueulait" dans le fourgon : "on ne voit plus que du rouge et du jaune dans tout Marseille !." (Il parlait des affiches du Rassemblement royaliste, collées par milliers chaque année) ? Le nombre de journaux vendus, de réunions tenues, de tâches obscures et ingrates réalisées ensemble, fastidieuses parfois, mais toujours accomplies dans la bonne humeur et, en fin de compte, malgré la fatigue, avec le sentiment du bon travail accompli pour "la Cause" ?
Voilà pourquoi nous avons choisi de faire figurer ici "notre" commun insigne de Camelots, que nous sommes nombreux à avoir reçu de Pierre Chauvet et Jean Lavoëgie, à l’Union Royaliste Provençale. Et voilà ce qu'exprimera - même, peut-être, de façon muette - notre présence, vendredi, aux côtés de nos amis, les Bertran de Balanda.
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11 novembre. Macron - Clemenceau : de l'art de s'approprier l'Histoire
PAR HILAIRE DE CRÉMIERS
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Sauf imprévu, il est à craindre que Macron ne s'isole dans un rêve prétendument politique qui n'a plus rien à voir avec la politique.
Emmanuel Macron caresse son imagination. Il y met sa volupté. Sua cuique voluptas. Son rêve était de faire de la politique et la politique n'est pour lui rien d'autre que la réalisation de son rêve. C'est ainsi qu'il la conçoit. Rien pour l'instant n'arrête le rêve macronien. Autour de lui, pas d'obstacle, des serviteurs zélés ou insignifiants.
Les adversaires se disputent, s'entretuent, se perdent dans les luttes picrocholines si chères à l'esprit partisan. Pour l'heure aucune réaction nationale n'est pour lui à redouter ; non pas qu'elle n'existe pas dans une partie de l'opinion française, mais tout est fait - et depuis longtemps - pour réduire à néant ses velléités d'expression politique. La machine à broyer ne cesse pas de remplir son office. Ainsi Macron était-il sûr de gagner l'élection présidentielle. Comme il se croit aujourd'hui sûr de l’avenir..., ce qui, en revanche, est moins assuré. Les réalités du monde viennent à sa rencontre ou plutôt il va les heurter ; la confrontation comporte des risques pour lui. Il ne peut sortir du rêve qu'à son détriment. Pour paraphraser Mitterrand et, au-delà, le Cardinal de Retz, c'est son ambiguïté à lui. Il croit posséder son rêve, mais c'est son rêve qui le possède. Il doit le poursuivre dans la recherche continuelle de sa consistance en espérant trouver la même facilité et le même bonheur qu'à ses débuts. Ne faut-il pas que le peuple français marche sur ses pas ? N'est-il pas forcé de s'assurer la maîtrise du calendrier politique et électoral sur lequel il travaille et fait travailler ?
Il sait ramasser les mises. Mais ramasser les mises ne suffit pas. Que faire ? Où aller ? Mieux gérer les fonds publics ? Est-ce si certain ? Les derniers budgets de la nation et de la Sécurité sociale montrent les limites de l'exercice : c'est toujours et encore chercher des recettes dans les poches des honnêtes gens pour combler les facilités du laxisme. Les déficits ne diminuent pas - ou si peu - et la dette continue à s'alourdir inexorablement et maintenant dangereusement : les chiffres, eux, ne mentent pas.
Macron, dit-on, redonne du lustre à la fonction présidentielle, ce qui n'est pas très difficile après ses prédécesseurs ; mais il y a beaucoup d'esbroufe et d'inconscience dans son comportement. Visiblement il ne sait pas commander ; il n'a jamais obéi. Il fâchera les gens. Il a le prestige de la mise en scène ; il n'a pas l'autorité de la vraie compétence. Sa parole ne crée rien ; elle se fait plaisir a elle-même ; elle n’a pas d'efficacité dans l'ordre des choses malgré toutes ses prétentions à l'efficience. Beaucoup de mots, de semblants d'idées ne font pas un redressement politique et économique, sinon en imagination. « Son progressisme » affiché n'est que flatus vocis.
Macron pense pareillement se pousser sur la scène internationale en jouant des coudes. Il y a une ridicule enflure qui se dégage de ses attitudes et qui gêne. Il est faiseur de leçons, encore pire que son prédécesseur ; il distribue des points ; ses appréciations sont toutes marquées par la même idéologie républicaine d'une grotesque simplicité qui sépare le monde en bons et en méchants. Ses propositions stratosphériques de recomposition de l'Europe et du monde ne tiennent aucun compte de la vérité des choses de la terre. Il ne voit pas que l'Europe et le monde changent. De sorte qu'il ne cesse d'être surpris par l'actualité à laquelle il répond par à-coups saccadés, comme dernièrement au Moyen-Orient. Dans ses visions, rien n'est jamais prévu de ce qui se passe vraiment.
Il se plaint, dit-on, de ses collaborateurs qui l'assaillent de fiches insanes, inutiles, verbeuses ; mais c'est à son image et à l'image de notre République qui ne fonctionne que dans la vanité des carrières et la frivolité des opinions.
La question est donc de savoir où « le marcheur Macron » emmène la France. Personne ne le sait et lui vraisemblablement moins que personne : de vastes considérations qui affectent des allures philosophiques ne font pas un but. Ni des jugements péremptoires n'indiquent une direction.
DE FAUSSES IDÉES
Ce garçon, pour qui l'écoute et l'étudie attentivement est sans profondeur d'esprit, sans grandeur d'âme, sans épaisseur de caractère. Intelligent, doué incontestablement, il lui a manqué une formation ; il est privé d’une doctrine juste et vraie. Il n'a pas de repère pour s'orienter dans les difficultés du monde ; il n'a à son usage que le baratin de la post-modernité qui ne lui donne aucune maîtrise ni des événements ni des évolutions du monde.
Tout son art consiste à masquer par l'apparence de la fermeté sa fragilité existentielle, par la brillance de sa parole sa vacuité essentielle. Rien que la manière de reprendre à son compte tous les « tics » des vulgaires usages qui nous viennent du monde anglo-saxon et qui encombrent notre vieil univers civilisé, ces « celles et ceux », ces « toutes et tous » qui se veulent de la galanterie et qui ne sont que de la goujaterie, manifestent une méconnaissance grave de notre génie national ; toutes ces manies sont d'un ridicule achevé. Il est constamment dans la faute de goût. S'imaginer que la France devient « moderne » en se complaisant dans les théories absurdes « du genre », en avalisant toutes les sottises pseudo-scientifiques qui envahissent les boniments des journalistes et des faiseurs d'opinion, révèle une médiocrité d'esprit inquiétante. Il ne saura résister à rien, ni à la PMA, ni à la GPA, ni à tout ce qui s'en suivra. Le ralliement de Juppé est un signe qui ne trompe pas.
Il n'a, pour ainsi dire, rien retenu des leçons de Paul Ricoeur qu'il a, pourtant, fréquenté. Il ne s'est approprié que l'importance de la symbolique pour la tourner à son avantage, sans même en percevoir le sens essentiellement religieux et la portée eschatologique. Sa philosophie est de quatre sous, sa phénoménologie narcissique.
En fait il a ramassé ses idées en se frottant de culture au gré de sa scolarité et de ses accointances ; il a assimilé la vulgate et la dogmatique de Science-Po et de l'ENA. Rien au-delà. D'où cette impression qu'il récite toujours des cours. Comme Hollande ! Il est entré avec aisance dans les milieux financiers - et pas n'importe lesquels - dont il a épousé les intérêts, les manières, les conceptions. Il est leur homme. D'où ce regard froid qui juge de haut, sans complaisance, qui acquiesce ou qui rejette, qui ne connaît que le rapport à l'argent, à la réussite, à l'utile, à ces fameuses « masses critiques » selon le jargon, celles qui justifient la décision économique et la détermination financière. Il ignore - et cette ignorance est un mépris - le petit, le faible, l'insignifiant dans le domaine de la quantité, de la valeur marchande, l'histoire, la géographie, le milieu humain, la force de la tradition, le respect du passé, l'engagement moral, le souci de la vérité. D'où ses tromperies et ses astuces sur le patrimoine, sur l'écologie, sur les territoires. Pour lui, ce qui compte, c'est d'être gagnant. Notre président est un Rastignac qui ne se contentera pas de la France : il vise l'Europe ; il l'a suffisamment fait entendre. Il est prêt à sacrifier les intérêts français à sa divinité. Ainsi, a-t-il déjà annoncé qu'il renoncerait unilatéralement et spontanément au Commissaire français pour mieux avancer dans l'intégration fédérale.
Le 11 novembre n'a mérité d'être célébré par lui que comme une leçon de philosophie et d'éthique républicaines. Ce n'est plus la célébration de la lutte et de la victoire d'un peuple français qui voulait rester français sur une terre française et à jamais française ; c'est la victoire dont ne sait quel Droit désincarné, quelle Démocratie universelle dont la France - ou plutôt la république française - aurait été l'héroïne. D'où l'idée de ne plus jeter de lumière jusqu'au 11 novembre 2018 que sur le seul Clemenceau, ce qui évite de parler des militaires et ce qui permet d'insister sur la manière dont les gouvernements républicains ont récupéré à leur profit cette si coûteuse et noble victoire. Tout Français quelque peu cultivé sait en quelle paix stupide ces gouvernements incapables ont transformé cette victoire pour aboutir vingt après au plus grand désastre de notre histoire. Macron qui se croit novateur, n'est que notre Briand d'aujourd'hui. Il est encore des Français pour savoir ce que ce nom signifie.
Les mêmes néfastes idées produiront les mêmes effets. Les discours pacifistes et européistes de Macron prêt à abandonner tous les intérêts français ne satisfont qu'aux exigences d'un rêve égotique. Ni l'Europe ni le monde n'obéiront à Macron. Il ne fera qu'affaiblir, désarmer et détruire un peu plus la France. ■
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Alexandre Del Valle sur LCI
Par Péroncel Hugoz
Ancien correspondant du Monde en Algérie puis en Egypte, grand-reporter, auteur d’une dizaine de volumes sur les pays du Sud (notamment Le Radeau de Mahomet, 1983, et 2000 ans d’histoires marocaines, 2014) éditeur en France ou au Maroc de 60 ouvrages orientalistes, chroniqueur sur lafautearousseau depuis 2016, Péroncel-Hugoz, ce qui est moins connu, a joué un rôle au début de la carrière du géopolitiste et essayiste Alexandre Del Valle, pied-noir franco-italien, né en 1968 à Marseille, dont la dizaine de consistants essais tend à dévoiler la vraie nature de l’offensive panislamiste sur les cinq continents, le dernier de ces ouvrages étant, en mars 2018, La stratégie de l’intimidation, véritable bréviaire de ce mal qui ronge nos sociétés: l’islamiquement correct. Un mal, sorti certes de l’Islam mais où les Etats-Unis d’Amérique ont joué, et continuent de jouer un rôle trouble, équivoque et plus que jamais inquiétant à l’heure du trumpisme.
Nous laissons donc la parole à Péroncel-Hugoz, sur la genèse de ses relations avec Alexandre Del Valle avant de publier deux des textes qu’il a écrits pour soutenir le géopolitiste : ISLAMERIQUE, préface en 1997 d’Islamisme et Etats-Unis. Une alliance contre l’Europe (l’Age d’homme, 330 p.) puis Travailler pour le roi de Turquie…, préface en 2004 de La Turquie dans l’Europe. Un cheval de Troie islamiste ? (Edition des Syrtes, 2004, 460 p.) Lafautearousseau
UN ETUDIANT PERSECUTE
C’est en 1990, dans mon bureau du Monde, à Paris, que je reçus, sur sa demande, pour la première fois, un étudiant aquisextain en sciences politiques, Marc d’Anna, futur Alexandre Del Valle, comme je recevais et continue à recevoir tous les lecteurs en faisant la demande, y compris quelquefois de menaçants islamistes, sionistes ou américanomanes… Notre étudiant de 22 ans me décrivit les bâtons dans les roues que lui mettaient le professeur Bruno Etienne et son entourage pour freiner ou empêcher ses recherches sur l’Islam politique qui n’en était pas encore,
du moins en France, a égorger ou fusiller les gens dans rues, gares, cafés, théâtres, etc. Les « étiennistes » privilégiaient alors l’« Islam à l’eau de rose »; et cela selon la bonne formule de l’islamologue algérien Ali Mérad, obligé dès l’indépendance de son pays de se réfugier à Lyon, sous les menaces des islamistes algériens gouvernementaux qui étaient souvent ceux que nous avons bêtement appelés « fellagas » alors que eux se proclamaient franchement « moudjahids », c’est-à-dire, « djihadistes » - mais déjà nous ne voulions pas voir la réalité…
Etant moi-même, depuis la parution, en 1983 du Radeau de Mahomet, essai sur le pré-islamisme moderne, sous la pression, au sein de mon propre journal (et ce malgré le soutien de membres de la hiérarchie du Monde, tels André Fontaine, Michel Tatu ou André Laurens), je ne pus guère offrir à Marc D’Anna, futur Del Valle, que de chaleureux encouragements à poursuivre ses travaux sur la vraie nature conquérante, anti-française et anti-chrétienne de l’Islam politique. Tout au moins en deux occasions, je fournis au jeune homme sur sa requête, des textes mettant en valeur ses découvertes factuelles car ma ligne de conduite professionnelle a toujours été : des faits, des faits, rien que des faits. • (A suivre ...)
Illustration ci-dessus : Bruno Etienne