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LAFAUTEAROUSSEAU - Page 1189

  • « Djihadistes français : de la trahison »

    Par Mathieu Bock-Côté 

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    CHRONIQUE - La France doit-elle accepter le retour de combattants qui ont renié la nation et ses valeurs ? Les grilles d'analyse traditionnelles ne permettent pas d'apporter une réponse efficace et satisfaisante. Car les djihadistes français ne sont pas simplement des criminels, mais des traîtres. [Le Figaro, 8.02]. On verra que Mathieu Bock-Côté repousse très loin ou très profond les limites de son analyse. De sorte qu'elle sous-tend une seconde question : n'y a-t-il pas aussi trahison de la part de ceux - gouvernants, élites, médias - qui leur ouvrent les portes de leur retour ? C'est très clair pour nous : la réponse est oui.   LFAR 

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    L'impuissance politique et intellectuelle des nations occidentales

    Il y a peu de questions aussi délicates que celle du retour des djihadistes occidentaux dans leurs pays respectifs, et elle fait débat en France en particulier. Faut-il accepter qu'ils reviennent, et si oui, à quelles conditions ? Que faire de ceux qui se sont engagés dans une « guerre sainte » contre leur civilisation et leur pays, et qui aujourd'hui, espèrent souvent y revenir en étant traités comme des citoyens de plein droit.

    Dans-son-coeur-sommeille-la-vengeance.jpgMême la question des enfants, aussi déchirante soit-elle, ne se laisse pas traiter en des termes simplement humanitaires, comme l'a finement posé Sonia Mabrouk dans son roman Dans leur cœur sommeille la vengeance, consacré aux lionceaux de Daech. Mais ce qui frappe, surtout, au-delà des questions prosaïques posées par le retour des djihadistes, c'est la confusion intellectuelle qui l'entoure. Comment les considérer du point de vue de la communauté nationale ? C'est là que surgit un terme que la philosophie politique contemporaine semble proscrire : la trahison. Nous avons une étrange difficulté à dire : ce sont des traîtres. Comme si ce terme heurtait la conscience contemporaine, qu'il était trop dur. Raymond Aron était le premier à convenir du flou qui entoure la notion de trahison, mais il ne la congédiait pas pour autant. Une philosophie politique incapable de la prendre au sérieux est une philosophie politique de temps de paix. 

    On a tendance à dissoudre la question de la trahison dans une forme de relativisme reconnaissant à chacun de bonnes raisons à son engagement. Le djihadiste français ne trahirait que de notre point de vue. Du sien, il servirait une cause légitime justifiant le plus grand sacrifice, ce qui devrait presque nous pousser à le comprendre, voire à le respecter. C'est oublier que la nation n'est pas qu'une fiction historique mais qu'elle nous engage dans le monde et qu'on ne saurait se retourner contre elle en lui déclarant la guerre sans rompre radicalement avec elle, de manière irréversible.

    Certes, après une guerre civile, il peut être nécessaire de rassembler des fils divisés, qui se sont accusés mutuellement de trahison pendant un temps. C'est le rôle d'un grand réconciliateur, capable de réparer la pire des fractures, celle du corps politique. Mais ce n'est pas de cela dont il s'agit ici. Nous sommes devant de vrais renégats, qui se sont rendus coupables de félonie. Cette déloyauté absolue n'entre pas dans les catégories ordinaires du droit. Quel que soit le traitement qu'on leur réserve, on ne saurait les considérer comme des citoyens parmi d'autres. Il y a des limites à l'humanitarisme sénile. Un juridisme extrême condamne à l'impolitique. Leur geste implique un traitement d'exception qui ne relève pas de l'évidence. Quand elle est possible, la déchéance de nationalité devrait au moins aller de soi.

    On ne saurait se laisser bluffer non plus par cette mauvaise blague en forme de théorie de psychologie populaire qu'est la déradicalisation. La déradicalisation postule que l'homme parti faire le djihad est un dérangé, troublé psychiquement, et non pas, tout simplement, un ennemi qui a consciemment décidé de s'enrôler dans une « guerre sainte ». On s'imagine qu'il suffirait de trouver les bons arguments, et les bons mots, pour qu'au terme d'une thérapie modératrice, il réintègre la communauté nationale. Ici, le djihadiste est victimisé. Justin Trudeau, au Canada, a même laissé entendre que les ex-djihadistes repentis pouvaient servir d'exemple à leurs concitoyens, pour les dissuader de basculer dans le terrorisme. Au mieux, cela relève du comique involontaire. 

    Ce qui surgit en fin d'analyse, c'est la question de la nation, qu'on ne saurait plus enfermer dans une définition strictement juridique, seule censée correspondre aux « valeurs républicaines ». Quoi qu'on en dise, la nation n'est pas qu'une construction formelle. Elle a une part charnelle, affective, qui engage le cœur et l'âme. Mais rappeler cela fait désormais scandale.

    18076816lpw-18077004-article-arrestation-jihadiste-syrie-jpg_5940006_660x281.jpgOn est en droit de se demander si les djihadistes n'étaient pas que des Français entre guillemets, jouissant de droits qu'ils n'ont jamais équilibrés avec quelques devoirs, qu'ils n'ont jamais aimés non plus. Leur cas n'est-il pas symptomatique d'une décomposition identitaire grave  ? Ces hommes auraient-ils senti monter en eux la vocation au djihad s'ils avaient vécu dans un environnement culturel cultivant une représentation du monde qui lui est favorable ?

    Dès lors, la question des djihadistes français qui après leur aventure syrienne, espèrent revenir chez eux, et trouvent des alliés pour les soutenir, révèle surtout l'impuissance politique et intellectuelle des nations occidentales, et leur difficulté à comprendre leur basculement dans des temps tragiques.    

    Mathieu Bock-Côté 
    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).  

     

    À lire dans Lafautearousseau ...
    La justice ou la guerre
  • Nietzsche par temps bleu [1]

    Par Rémi Hugues

    images.jpgÀ l'occasion de la publication du dernier ouvrage du docteur ès Lettres et agrégé de philosophie Philippe Granarolo, intitulé En chemin avec Nietzsche, Rémi Hugues nous propose une suite de huit articles « Nietzsche par temps bleu » dont voici le premier. Il s'agira de tenter de nous faire découvrir ou redécouvrir l'essence de la pensée de l'auteur de Naissance de la tragédie.  Nous suivrons ce chemin au fil des prochains jours. Bonne lecture !  LFAR    

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    Tout philosophe nʼest pas poète, mais tout poète expose sa philosophie à travers ses œuvres.

    À peu près au même moment que lʼépigone de Charles Baudelaire et amant de Paul Verlaine, Arthur Rimbaud, composait les Illuminations ou Une Saison en Enfer, de lʼautre côté du Rhin Friedrich Nietzsche lutinait Sophia en remplissant des cahiers entiers de prose irrévérencieuse et dʼaphorismes percutants, elle qui nʼaime que les guerriers insoucieux, moqueurs et violents.      

    9782343155708r.jpgLe premier mérite du dernier opus du docteur ès Lettres et agrégé de philosophie Philippe Granarolo, intitulé En chemin avec Nietzsche et que la maison dʼédition LʼHarmattan vient de publier, est de nous plonger dʼemblée dans ce qui fonde la puissance de la pensée de Nietzsche, à savoir, pour employer un vocable à la mode, son côté disruptif. La méthode de ce dernier est restée au fil de ses œuvres la même : chercher à nier lʼévidence, à tordre la doxa, à remettre en question les postulats qui semblent indiscutables. 

    Apollon et Dionysos 

    Le livre commence par la contestation de lʼopposition qui est généralement faite entre la vie à lʼétat éveillé et la vie onirique. Lʼauteur souligne que chez Nietzsche le rêve est comme lʼéveil un état « apollinien » c’est-à-dire un état de sobriété. 

    220px-StatueApollon2.jpgLes mots Apollon et apparence commencent tout deux par le préfixe « ap- » : veille et rêve participent du même ordre. Ils forment un tout, un réel perceptible par le truchement de notre raison, qui coordonne lʼactivité sensorielle. Il nʼy a ainsi selon Nietzsche non point une différence de nature mais seulement de degré entre ces deux états de lʼapparence ; le rêve étant ainsi lʼapparence de lʼapparence. Or lʼusage raisonné de nos sens peut déraisonner, être affecté par des passions, telles la force, lʼinstinct ou la nature. 

    Amoureux de lʼhéritage grec, Nietzsche se sert de la syzygie, (paire dʼopposés) Apollon – Dionysos comme pilier de son raisonnement[1]. On accède au monde dionysiaque par lʼivresse, la musique et la tragédie. 

    La tragédie est le thème du premier succès littéraire de Nietzsche. Dans Naissance de la tragédie, sʼappuyant sur les écrits de Lucrèce, il soutient la thèse dʼaprès laquelle les divinités grecques sont apparues dans lʼesprit des hommes lors des rêves. 

    La tragédie, voie dʼaccès vers le « dionysiaque » prend donc sa source dans lʼ « apollinien ». Il nʼy a donc pas étanchéité stricte entre ce couple de contraires imaginé par le philologue de profession Nietzsche. Et cette syzygie est déterminante pour comprendre lʼensemble de sa pensée, dont le fil conducteur consiste à batailler contre la philosophie depuis Platon, taxé de « mauvaise métaphysique, parce quʼelle nie ou du moins sʼefforce de nier le fonds dionysiaque de lʼunivers. » (p. 19) 

    Lʼessence du nietzschéisme 

    Au cœur de la pensée de Nietzsche il y a lʼidée que lʼémergence du christianisme nʼa pas marqué de rupture philosophique. La théologie a repris la conception socratique et platonicienne dʼun homme défini comme un animal rationnel. En attestent les mots dʼAugustin dʼHippone, pour qui lʼhomme est un « être raisonnable et mortel »[2]. 

    Nietzsche entendait rappeler à lʼhomme sa dimension irrationnelle (dionysiaque), ce qui lʼamena à développer une nouvelle anthropologie. Celle-ci pose que lʼessence de lʼhomme nʼest pas sa rationalité mais sa « libido dominandi », sa volonté de puissance. 

    Martin Heidegger examina cette leçon centrale de Nietzsche et lui objecta quʼune telle conception ne clôt pas le cycle inauguré par le platonisme, car elle conserve lʼidée dʼanimalité de lʼhomme. 

    À rebours, Heidegger considère que lʼhomme est lʼ « un-tout », du fait de sa spécificité qui est de disposer dʼun logos[3], singularité que le philosophe désigne par le concept de Zusammengehörinkgkeit (appartenance mutuelle de lʼêtre et de lʼhomme). On retrouve cette  anthropologie qui pose lʼhomme comme point de rencontre du microcosme et du macrocosme dans dʼautres cultures, notamment dans la tradition asiatique (Tao-te-king, XXV) à travers la notion de Wang (« Roi »), la sagesse arabo-musulmane à travers le vocable El-Insânul-kâmil (« Homme universel ») ou la kabbale, à travers le concept dʼAdam Qadmôn. 

    94395237_o.jpgQuand, à ce sujet, Emmanuel Lévinas (Photo) écrit les lignes qui suivent – « « lʼhomme serait le lieu où passe la transcendance […]. Peut-être tout le statut de la subjectivité ou de la raison doit-il être révisé à partir de cette situation »[4] – est-ce dans le but dʼopérer la synthèse entre la critique heideggerienne du nietzschéisme et lʼésotérisme juif ? En tout cas toutes ces références ébranlent la vision selon laquelle lʼhomme serait une « créature orgueilleuse qui se croit beaucoup plus distincte des autres espèces quʼelle ne lʼest en réalité. » (p. 127) 

    Nietzsche ne pouvait en revanche en aucun cas concevoir la part acosmique – transcendante – de lʼhomme, puisquʼil envisageait lʼenfer et le paradis comme des arrière-mondes, autrement dit pures fictions, pures inventions, pures illusions. (A suivre)   

    [1] Dichotomie féconde, puisque le syndicaliste révolutionnaire Édouard Berth lʼutilise dans Les méfaits des intellectuels (1914) pour établir un parallèle entre Charles Maurras et son maître Georges Sorel : « LʼAction française, qui, avec Maurras, est une incarnation nouvelle de lʼesprit apollinien, par sa collusion avec le syndicalisme qui, avec Sorel, représente lʼesprit dionysien, va pouvoir enfanter un nouveau grand siècle, une de ces réussites historiques qui, après elles, laissent le monde longtemps ébloui et comme fasciné. », cité par Georges Navet, « Le cercle Proudhon (1911-1914). Entre le syndicalisme révolutionnaire et lʼAction française » in Mil neuf cent, n°10, 1992, 62. Ce numéro de la revue est dʼailleurs résolument nietzschéen, car son titre est « Proudhon, lʼéternel retour ». 
    [2]  La Cité de Dieu,  II, Paris, Gallimard, 2000, p. 661.
    [3]  Dans La dévastation et lʼattente, il soutient que lʼhomme recueille « lʼun-tout unitivement ajointé en son jaillissement originel. » Dans Être et Temps il qualifie lʼhomme de Dasein, dʼ « étant exemplaire », sa spécificité impliquant quʼune partie de lui-même ne lui appartient pas.
    [4] LʼAu-delà du verset, Paris, Minuit, 1982, p. 175.
    A lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même ...
    (Cliquer sur l'image)

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  • Grenoble ce lundi 11 février au Centre Lesdiguières, une conférence de Samuel Renaud à ne pas manquer !

    Le CENTRE LESDIGUIERES

    vous convie le lundi 11 février à 20h à une conférence 

    de Samuel Renaud

    « Nationalisme et monarchie » 

    A l'heure où les institutions de la énième république défaillent, où le terme de république a remplacé celui de France, il s'avère intéressant de redéfinir ce que sont vraiment les systèmes politiques : royauté ou république, il faut choisir.

    Le conférencier développera les concepts définis par Charles Maurras à savoir une monarchie traditionnelle, décentralisée, antiparlementaire et héréditaire, s'inscrivant dans la continuité de la politique des quarante rois qui ont fait la France durant treize siècles. 

    10 place Lavalette, 38000 Grenoble - salle du 1er étage (Tram: arrêt « Notre-Dame ») (Participation aux frais) Courriel: centrelesdiguieres@gmail.com Merci de nous informer de votre participation par retour de courriel

  • Culture • Loisirs • Traditions

    Ce visuel a pour seul objet de marquer l'unité des articles du samedi et du dimanche, publiés à la suite ; articles surtout culturels, historiques, littéraires ou de société. On dirait, aujourd'hui, métapolitiques. Ce qui ne signifie pas qu’ils aient une moindre importance.  LFAR

  • Société & Islam • « L’Islam à la conquête de l’Occident. La stratégie dévoilée »

    Par Annie LAURENT  

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    Jean-Frédéric Poisson, président du Parti chrétien-démocrate (PCD), publie un livre « explosif » révélant un document stratégique adopté en 2000 par les États musulmans pour installer en Occident une « civilisation de substitution ». Explications.

    poisson-islam-conquete-occident-757x1024.jpgVotre livre examine un document intitulé « Stratégie de l’action culturelle islamique à l’extérieur du monde islamique », qui a été élaboré par l’ISESCO, département culturel de l’Organisation de la Coopération islamique (OCI), regroupant 57 Etats musulmans. Dans quelles circonstances avez-vous découvert ce texte dont personne ne parle et pour quels motifs avez-vous décidé d’en faire connaître le contenu au plus grand nombre ? 

    C’est en lisant un livre de l’universitaire libanaise Lina Murr Nehme (Tariq Ramadan, Tareq Obrou, Dalil Boubakeur – Ce qu’ils nous cachent, ed. Salvator) que j’ai découvert le titre de ce document auquel elle faisait référence. Ma curiosité a fait le reste : je suis allé le consulter sur internet (il est disponible sur le site isesco.org) et sa lecture m’a édifié. Il n’est pas fréquent que la deuxième plus importante organisation d’Etats au monde, en l’occurrence l’OCI, élabore un document stratégique visant purement et simplement à assurer la domination de sa civilisation sur le reste du monde, et le disant ouvertement. L’origine de ce texte, son caractère officiel et son objectif universaliste me sont apparus comme autant de raisons de le faire connaître au grand public… et aussi aux responsables politiques français ! On ne sait jamais… 

    Pouvez-vous esquisser rapidement les principes énoncés dans cette Stratégie ? 

    Chaque musulman a le devoir de protéger et de fortifier partout sa communauté (l’Oumma) et d’assurer la propagation de tous ce qui la constitue. Il y a une vingtaine d’années, les Etats islamiques constataient que les communautés musulmanes occidentales n’étaient plus en situation de transmettre l’Islam dans de bonnes conditions aux nouvelles générations, et donc de répondre à cette double obligation. La Stratégie culturelle islamique vise donc d’abord à ré-enraciner les musulmans occidentaux dans leur culture et leur foi, pour qu’ils soient acteurs de l’islamisation universelle. La déréliction actuelle de l’Occident, le vide que représente la société de consommation, ont évidemment, aux yeux des responsables musulmans, vocation à ouvrir la voie au seul projet de civilisation qui soit à la fois exigeant et profitable à l’homme : l’Islam. Le document que je commente dans mon livre planifie ce remplacement. Il évoque lui-même la volonté « d’installer une société islamique pure et saine » en Occident. Difficile d’être plus clair ! 

    Selon vous, pourquoi ce document, malgré son caractère officiel, n’a jamais été pris en considération par les dirigeants politiques occidentaux, français en particulier, et par les élites en général, depuis sa publication en 2000 ? 

    D’abord la majorité des responsables politiques français considèrent l’islam comme une sorte de christianisme des Arabes. Et qu’il évoluera donc comme le christianisme – à leurs yeux tout au moins – a évolué, c’est-à-dire dans le sens d’un adoucissement, pour ne pas dire d’un affadissement progressif de ses principes. En un mot, ils ne connaissent ni ne comprennent la nature profonde de l’islam. Ensuite, beaucoup d’entre eux sont tout de même biberonnés aux bienfaits du multiculturalisme, consciemment ou non. Et cette doctrine, qui est le premier moment de la conquête de l’Europe par l’Islam, entre facilement en résonance avec ce que souhaite ce dernier. Enfin, il y a le pire : la couardise, face à un phénomène – la progression de l’islam en France – qu’ils renoncent à traiter dans le débat public, à cause de la pression médiatique qui existe sur ce sujet. Tout cela est en train de changer un peu, mais très lentement. 

    Vous affirmez sans ambages, preuves à l’appui, que l’islam est porteur d’un projet conquérant. Votre position est rarissime chez les responsables politiques occidentaux. Comment expliquez-vous leur passivité face à cette menace, que je qualifierais volontiers d’« existentielle », alors que tant d’études sérieuses sur ce sujet ont été publiées par des experts ? 

    Aux raisons que je viens d’évoquer s’ajoute une stratégie de la réduction au silence menée par les Frères musulmans, en particulier contre leurs opposants. J’ai rencontré récemment un historien spécialiste de l’antisémitisme islamique qui subit procès sur procès dans le but de le faire taire : les musulmans français l’empêchent de dénoncer ce qui est une évidence pour tous. À l’intérieur même de la communauté musulmane, les promoteurs de l’islamisation de la France et de l’Europe exercent une forme de terreur, parfois physique, sur ceux qui voudraient les critiquer ou les empêcher de remplacer la loi française par la charia. Quant aux intellectuels musulmans, en France comme ailleurs, qui sont conscients des impasses de la doctrine islamique et du danger de son application politique, ils sont eux aussi réduits au silence, en particulier parce qu’en France, l’État ne les aide pas à prendre la parole et à promouvoir leurs travaux. 

    Vous estimez que le dialogue des responsables musulmans avec les non-musulmans s’inscrit dans le cadre d’un rapport de forces destiné à lever la méfiance des Occidentaux. Sur quoi repose cette conviction ? 

    Il n’y a pas à proprement parler de dialogue dans la conception islamique. Plutôt, l’islam ne reconnaît la légitimité du dialogue avec les non-musulmans que pour s’assurer leur conversion ou leur soumission. De sorte que, du point de vue de la doctrine islamique, il n’y a que deux issues au dialogue : l’islam (qu’on s’y convertisse ou qu’on s’y soumette) ou la mort (qu’elle soit purement et simplement physique ou qu’elle prenne la forme du bannissement). Tout cela s’explique d’ailleurs parfaitement : dans la mesure où l’Islam se perçoit comme la religion naturelle des hommes, la seule voulue par Dieu, on ne voit pas pourquoi ses fidèles perdraient leur temps à discuter avec des personnes qui croient dans des ersatz de religion, dépourvus de valeur. Le Coran est très clair sur le sujet : il appelle à combattre les adeptes d’autres religions ou les incroyants, pas seulement en situation de légitime défense mais du simple fait qu’ils ne sont pas musulmans.

    Le projet conquérant de l’islam est simple : dominer culturellement et juridiquement l’Europe et convaincre les Européens non musulmans d’agir en sa faveur. Il s’agit de rééditer la stratégie et l’œuvre de Mahomet, en sa double qualité de chef politique et militaire, qui sut utiliser les ressources des peuples conquis ou asservis. L’islam veut soumettre l’Occident à la dhimmitude, statut juridique qui autorise les juifs et les chrétiens à conserver leurs croyances moyennant le versement un impôt per capita. Tel est le sort des « mécréants » en pays musulman. En attendant que cette soumission s’instaure en Occident, nos pays sont très vivement priés de laisser s’installer sur leur sol les communautés musulmanes régies par leur droit propre et disposant de leurs écoles. Cette logique séparatiste n’est pas seulement destinée à conforter l’identité des musulmans occidentaux, elle vise aussi à fracturer nos sociétés pour permettre à l’islam de s’y installer plus facilement. Telle est l’essence même du projet politique de la Stratégie. 

    On est donc en train de passer du multiculturel au multi-juridisme ? 

    Oui, et c’est d’ailleurs ce passage qui fait la différence entre le communautarisme et le séparatisme. Indéniablement, il existe dans le projet de l’OCI la volonté d’installer une justice interne à la communauté musulmane, et par conséquent complètement séparée des institutions judiciaires françaises. Cette séparation existe d’ailleurs d’ores et déjà au Royaume-Uni. Avec elle, on transforme une communauté en un quasi proto-Etat, dont la vocation consiste à se débarrasser de la tutelle du pays-hôte. Cette transformation, à la fois juridique et politique, prouve que les motivations des musulmans – du moins leurs représentants et leurs militants - ne sont pas que religieuses mais qu’ils sont bel et bien dans une démarche de conquête du pouvoir. 

    Depuis quelques années, les souffrances endurées par les chrétiens ressortissants de pays musulmans, au Proche-Orient mais aussi en Afrique et en Asie (cf. le cas d’Asia Bibi au Pakistan), semblent avoir réveillé la conscience des Français sur des réalités de l’islam qu’ils ne voyaient plus. Ce réveil serait-il dû, selon vous, à la présence croissante de musulmans dans nos pays, ou bien lui attribuez-vous d’autres causes plus désintéressées ? 

    La générosité habituelle des Français lorsqu’il s’agit de soutenir des opprimés partout dans le monde se vérifie envers les chrétiens d’Orient. Mais si l’expansion de l’islam dans notre pays a pu favoriser la solidarité envers les chrétiens orientaux, je ne reconnais pas dans cet intérêt pour eux la cause que j’aimerais y voir : la conscience de partager un héritage civilisationnel commun et par conséquent le devoir strict de tout faire pour que ne disparaissent pas du Levant les traces de cette civilisation. Il reste, malgré tout, que les injustices et les cruautés que les chrétiens d’Orient ont subies dans l’histoire, et qu’ils endurent encore, sont très certainement une marque de ce dont l’islam est capable envers les non-musulmans. Cette dimension interroge sans doute nos compatriotes et accroît leur mobilisation. 

    En réfléchissant aux probables adaptations de la loi de 1905 envisagées par le président Emmanuel Macron, vous suggérez des révisions compatibles avec l’esprit de cette loi. Le contrôle des associations cultuelles que vous préconisez ne risque-t-il pas de conduire à un contrôle identique de l’Etat sur l’enseignement dispensé dans les institutions chrétiennes, si celui-ci contredit les évolutions législatives, notamment en matière de droit de la famille ou de bioéthique ? 

    Ce n’est jamais sans risque qu’on encadre une liberté. Toutefois, il existe une différence importante entre les associations cultuelles islamiques relevant par nature de la loi de 1905, et les écoles relevant par nature de la loi de 1901.
    Et par ailleurs, il est tout de même difficile, même avec la plus parfaite mauvaise foi, de considérer qu’une opinion différente de la pensée unique sur les questions de bioéthique, par exemple, a le même statut politique et représente pour la cohésion sociale le même risque qu’un discours ouvertement anti-occidental, fondé sur la violence et le mensonge comme des outils légitimes ! Le problème, pour la puissance publique française, n’est pas d’apprendre à traiter avec la plus grande fermeté les doctrines considérées comme adversaires. Elle le fait déjà. Le problème est de considérer que l’Islam comme doctrine fait partie de ces adversaires. Or, nous en sommes très loin. C’est pourquoi toutes les démarches pédagogiques portant sur le contenu et les stratégies de l’islam sont bienvenues : il s’agit d’éclairer autant que possible le peuple français comme ses responsables.
     

    Vous-même, en tant qu’homme politique, que préconisez-vous comme mesures politiques concrètes face à l’extension de l’islam en France ? 

    Poisson©F.Ayroulet-620x330.jpgLe document de l’ISESCO montre que l’islamisation de la France relève d’une volonté stratégique portée par des Etats, agissant sur le champ culturel, et soutenue par des moyens financiers importants. Par conséquent, si la France veut y répondre, elle doit le faire sur ces trois plans.

    D’abord, faire de l’islamisation un enjeu de politique publique, porté par le gouvernement, et ne pas laisser les maires se débrouiller seuls. Il est aussi impératif de réinvestir le champ culturel par la promotion de notre civilisation, notamment à travers les réformes des programmes de l’Education nationale, en histoire comme en français. Il faut réapprendre à nos jeunes la fierté d’un héritage si beau malgré ses imperfections et ses dérives. Enfin, des moyens conséquents doivent servir cet objectif afin de répondre d’égal à égal aux pays musulmans qui, au moins sur ce plan, sont nos adversaires. Nous ne pouvons pas accepter que les Etats du Golfe continuent d’acquérir les plus beaux fleurons de notre hôtellerie et de nos châteaux, ou nos clubs de football – pour ne citer que ces exemples.

    Ensuite, l’islamisation relève d’un « gagne-terrain » favorisé par le renoncement de la puissance publique à appliquer la loi française, dans sa lettre et son esprit. Ainsi, même s’il n’est pas illégal de réserver des horaires de piscine aux musulmanes, une telle pratique est violemment contraire à l’esprit d’égalité et de confiance dans la personne humaine qui est la marque de notre civilisation. Il convient donc, là aussi, de réaffirmer la force de l’Etat.

    Enfin, tout doit être fait pour soutenir notre démographie. Il y a longtemps que, pour le bien commun de notre pays, nous réclamons un contrôle strict des flux migratoires, la suspension du droit du sol pour l’acquisition de la nationalité française et le renforcement de la politique familiale. Ces dispositions ne portent pas directement sur la contention de l’islam, mais leurs effets permettraient de lutter contre le déséquilibre démographique alimenté par sa progression. Evidemment, la dénonciation sans réserve du Pacte de Marrakech sur les migrations que la France a récemment signé, s’inscrit dans cette perspective.  

    Article paru dans La Nef, n° 310 – Janvier 2019. 

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    L'ISLAM, Annie Laurent,
    Editions Artège, 285 p., 19,90 €

    Annie Laurent
    Spécialiste du Proche-Orient, des chrétiens d’Orient et de l’islam, Annie Laurent est à l’origine de l’association Clarifier et est l’auteur notamment de L’Islam, pour tous ceux qui veulent en parler (mais ne le connaissent pas encore) (Artège, 2017), L’islam peut-il rendre l’homme heureux (Artège, 2012), Les chrétiens d’Orient vont-ils disparaître ? (Salvator, 2017). 
  • Médias & Actualité • Éloge du mur

    Mur d'Hadrien

    De Guillaume Roquette

    Nous ne sommes pas toujours d'accord. Son libéralisme droitier n'est pas le nôtre. Pas plus que son conservatisme selon nous trop complaisant envers la modernité. Mais quand nous sommes d'accord, nous sommes d'accord. Pourquoi ne le dirions-nous pas ? Ici, il ne s'agit pas d'accord sur des broutilles. Comme Régis Debray a fait l'éloge des frontières, Guillaume Roquette fait dans cet article du dernier Figaro magazine l'éloge du mur. N'en déplaise au pape à qui il n'hésite pas à dire son fait. L'éloge du mur, ce n'est pas rien. C'est peut-être même l'essentiel. Et nous sommes d'accord.   LFAR

    XVM0e3451c0-d466-11e7-8428-569ae9712d9b.jpgLes applaudissements ont été immédiats.

    Emmanuel Macron s'est taillé un beau succès cette semaine en expliquant, lors d'un déplacement en banlieue, qu'il ne croyait pas aux gens qui font des murs. « Ça marche pas » (sic), a-t-il expliqué à un public conquis. Quelques jours plus tôt, le pape François affirmait pour sa part que « ceux qui construisent des murs sont dans la peur et dans la crainte ». L'un et l'autre pensaient évidemment à Donald Trump, ce grand méchant loup que toutes les belles âmes de la planète se plaisent à sermonner ad nauseam.

    Chacun pensera ce qu'il voudra des analyses psychologiques de François, mais on peut en tout cas soutenir qu'Emmanuel Macron se trompe. En Hongrie, Viktor Orbàn a réduit drastiquement l'immigration clandestine en rendant étanches ses frontières. En Italie, les demandes d'asile ont baissé de 58 % depuis l'arrivée au pouvoir de Matteo Salvini. Et aux Etats-Unis, il est pour le moins prématuré de nier l'efficacité du mur voulu par Donald Trump puisque celui-ci n'existe pas encore. Les démocrates, majoritaires à la Chambre des représentants, font d'ailleurs tout ce qui est en leur pouvoir pour en retarder la construction. Par peur de devoir en reconnaître l'efficacité ?

    Il n'en reste pas moins, n'en déplaise à l'estimable corporation des maçons, que les murs ont mauvaise presse ces temps-ci. Chez les élites, le grand déménagement du monde est considéré comme le progrès ultime. L'enracinement est devenu haïssable, comme si l'un des premiers droits de l'homme n'était pas de pouvoir vivre chez lui. Comme si nous n'avions pas le devoir de dissuader, y compris par des barrières physiques, les immigrants non éligibles au droit d'asile qui rêvent de venir dans nos pays. Culpabilisés par le souvenir du mur de Berlin, biberonnés à l'universalisme, nous feignons de croire que les migrations sont devenues inéluctables, alors qu'il nous appartient de les réguler.

    L'hospitalité est une magnifique vertu, mais il faut être chez soi pour héberger l'autre. L'accueil ne se conçoit que de manière volontaire : s'il est subi, c'est une intrusion, voire un envahissement. C'est bien pour cela que les accords de Schengen, en abolissant les frontières intérieures sans sécuriser les entrées dans l'Union, ont provoqué un rejet inédit du projet européen chez tous les peuples du continent. Les électeurs « populistes » ne sont pas devenus racistes, ils veulent simplement contrôler qui entre chez eux.

    Une question pour finir : avez-vous déjà visité la maison Sainte-Marthe, résidence du pape au Vatican ? Non, et pour cause : elle est jalousement protégée par des gardes suisses empêchant d'approcher quiconque n'a pas montré patte blanche. Et c'est la même chose à l'Elysée : en plus de ses hauts murs, le palais présidentiel est même cerné désormais par une clôture de barrières grises solidement fichées dans le sol. Personne ne reproche au pape ou à notre président de vouloir se protéger. Mais pourquoi auraient-ils droit à des murs et pas nous ?  

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  • Patrimoine cinématographique • Soy Cuba

    Par Pierre Builly

    Soy Cuba de Mikhaïl Kalatozov (1964)

    20525593_1529036520490493_4184281983923317414_n.jpgEt à la fin, c'est l'Oncle Sam qui gagne 

    Personne ne met en doute que le régime de Fidel Castro, épine plantée dans l'appendice nasal floridien des États-Unis, n’ait tenu bon, malgré l'hostilité vertueuse du monde occidental, que grâce aux perfusions financières et technologiques soviétiques.

    À tout le moins jusqu'à ce que l'empire russe éclate et cesse d'acheter le sucre très au delà des cours mondiaux. Personne ne met en doute, au moins depuis quelque temps, que le castrisme soit un régime autoritaire, assez brutal et dur à l'opposant, mais personne n'a jamais prétendu qu'il avait atteint les sommets d'horreur de la Chine maoïste, de la Corée du Nord autocratique ou - le pire - du Cambodge des Khmers rouges. 

    cada89684992cf8c_large1.jpgMais aujourd'hui personne ne paraît avoir en tête l'état épouvantable où se trouvait Cuba avant la chute de Batista (Photo), le 1er janvier 1959, ce statut, à la fois presque officiel et totalement hypocrite de bordel des États-Unis, où l'omniprésence du jeu, de la prostitution et de la drogue permettait à de vertueux baptistes ou presbytériens de s'envoyer en l'air sans courir le moindre risque. Personne ne paraît avoir en tête, non plus, que malgré son isolement mondial, malgré l'évidence que, dès que les Castro auront disparu, l'île reviendra à son statut de capharnaüm exotique et qu'elle a descendu, déjà, une bonne partie de la pente, personne, donc, ne rappelle que son système éducatif demeure extrêmement performant et que sa première ressource, avec le tourisme, est l'exportation de médecins compétents vers des pays riches en pétrole (Venezuela) qui lui assurent ainsi son approvisionnement. 

    Fidel Castro, lorsqu’il a pris le pouvoir, apparaissait moins comme un leader marxiste que comme un chef nationaliste qui s’opposait à la dictature ploutocratique de Batista ; mais les premières mesures économiques prises, la neutralité plutôt bienveillante des États-Unis s’est vite transformée en opposition de plus en plus virulente, poussant, dans l’autre sens, le castrisme à un durcissement dont l’Union soviétique a vite profité. On connaît la suite, la radicalisation du régime, devenu une sorte de modèle pour l’intelligentzia progressiste des années 60 (Salut les Cubains ! d’Agnès Varda me reste en tête) puis sa graduelle ossification. 

    e9b2835d1620ee96e7d58f0dc0f070db4698a859.jpgCe long commentaire dévidé, venons au film magnifique de Mikhail Kalatozov qui est, assez certainement, une commande passée par l'Union soviétique pour l'édification des masses cubaines (et sans doute au delà, pour celle du Tiers-Monde), une œuvre de propagande délicieusement manichéenne, caricaturale et naïve. C'est là tout le charme de ces pamphlets filmés et je renvoie ceux qui ne la connaissent pas à la rigolote et sympathique Vie est à nous, confectionnée par Jean Renoir pour le compte du Parti Communiste. 

    Mais, au delà du discours convenu, volontiers exalté et même emphatique, Soy Cuba est une symphonie esthétique, un exercice de style superbe de fluidité, de qualité, de beauté.

    p3.jpg-r_640_600-b_1_d6d6d6-f_jpg-q_x-20030715_051537_1.jpgLa caméra survole, ondoie, navigue avec une aisance magistrale et, grâce à une photographie magique qui fait par exemple apparaître blanches les feuilles des palmiers sans qu'il y ait pour autant surexposition de la pellicule. On peut quelquefois estimer que Kalatozov abuse un peu des images décentrées, des prises de vue obliques, des angles volontairement excessifs. Mais c'est si beau, si bien filmé, si intelligent dans la mise en œuvre qu'on en est sidéré. 

    Je n'ai vu de Kalatozov, que Soy Cuba et son chef-d’œuvre, Quand passent les cigognes. Deux films, deux merveilles. S'il n'avait pas été soviétique, à quelle place fastueuse serait-il dans le panthéon du cinéma ?  

    Soy-Cuba-Edition-Collector.jpg

    DVD disponible pour environ 20 € .

    Retrouvez l'ensemble des chroniques hebdomadaires de Pierre Builly sur notre patrimoine cinématographique, publiées en principe le dimanche, dans notre catégorie Culture et Civilisation.
  • Culture • Loisirs • Traditions

    Ce visuel a pour seul objet de marquer l'unité des articles du samedi et du dimanche, publiés à la suite ; articles surtout culturels, historiques, littéraires ou de société. On dirait, aujourd'hui, métapolitiques. Ce qui ne signifie pas qu’ils aient une moindre importance.  LFAR

  • Société & Modernité • On se croirait en 1789 ... Cahier de doléances d’une famille provençale en 2019

    Artigues (Var)

    Ce sont des doléances de type concret qui s'expriment ici.  Foin d'idéologie ! La mise en cause pragmatique de ce que nous appelons Le Système n'en a que plus de poids, nous semble-t-il.  LFAR

    Cahier-Doleances.jpgDOLÉANCES

    Mi-janvier 2019

    Contribution de la famille PERONCEL-HUGO2 et CHATELAIN (7 personnes dont 4 électeurs, Hameau des Bellons, 83560 ARTIGUES) aux cahiers de doléances ouverts à la demande du Gouvernement, suite à la crise des Gilets-Jaunes (décembre 2018 - janvier 2019).

    Le 25 juin 2014, les habitants d'Artigues et environs furent invités à une « réunion d'information sur Internet à haut débit ». Devant la foule assemblée à la mairie, plusieurs de nos élus, dont la plupart sont toujours là, annoncèrent officiellement, et sans ambiguïté, que désormais, grâce à leurs efforts et à ceux des techniciens de la Société Xi'an (basée à Lille et dont nous n'avons plus entendu parler par la suite, malgré les sommes importantes qui lui auraient été versées par nos communes...), notre zone était désormais irriguée en haut débit. Notre joie fut grande car nous utilisons surtout notre ordinateur à titre professionnel.

    La déception fut rapide et profonde devant nos ordinateurs (alors branchés à nos frais sur nos téléphones fixes) restés en fait en très bas débit... Mi-janvier 2019 la situation ne s'est pas améliorée même si nous sommes maintenant branchés, toujours à nos frais, sur un boitier Nomad qui nous permet seulement un accès au très bas débit, à certaines heures de la journée qu'on ne peut prévoir à l'avance.

    Le 30 mai 2018, nous avons écrit au président de notre Communauté de communes, pour lui rappeler l'annonce du 25 juin 2014, non suivie d'effet depuis lors. A ce jour, nous n'avons même pas reçu d'accusé de réception de la part de la Communauté de communes...

    mail-1050x600-1024x585.jpgNéanmoins, il nous faut continuer à subir dans les médias, les vaines incantations de nos politiciens locaux ou nationaux sur I'  « égalité des territoires » etc, etc. Des mots, des mots vides pendant que, pour taxes et impôts, là nous sommes bien à « égalité des territoires »...

    Plusieurs d'entre nous travaillent en Europe ou en Afrique, dans des États moins développés que la France mais où l'accès au haut débit est généralisé depuis 10 ans et plus déjà... Nous, il nous faut souvent batailler plusieurs heures sur nos ordinateurs pour ouvrir nos messages puis y répondre. Un vrai calvaire. Nous estimons avoir été désinformés, trompés même par les annonces non fondées de nos élus.

    Var-Matin, journal en général peu critique à l'endroit de nos élus, a titré, le 12 janvier 2019 : « Tout le Var en haut débit d'ici à 2023, d'ici à cinq ans ». Qui peut y croire quand on pense à l'annonce, non suivie d'effet pour notre secteur, du 25 juin 2014 ?

    Si vous réagissez à nos doléances, prière de le faire sur le courriel collectif suivant :

    hugoz@orange.fr

    Merci et salut  

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  • IDÉES • GUERRE CULTURELLE, FAUT-IL DIABOLISER LA NOUVELLE DROITE ?

    Alain de Benoist

    Entretien avec Édouard Chanot journaliste chez Sputnik

    Publié dans Le bien commun* - N° 4 - février 2019

    Les lecteurs de Lafautearousseau liront, commenteront.

    téléchargement.pngÉdouard Chanot est journaliste chez Sputnik. Il a mené l’enquête sur les idées de la Nouvelle Droite dans un reportage remarquable. Jeune journaliste, passionné de philosophie politique, il a accepté de répondre au Bien Commun pour expliquer sa démarche. Un reportage intitulé : Guerre culturelle, Faut-il diaboliser la nouvelle droite ? Fidèle à la tradition d'Action française, Le Bien Commun discute avec toutes les intelligences.

    unnamed.jpgAlors que la nouvelle droite a ébranlé le débat intellectuel français, il y a maintenant quelques décennies, pourquoi leur avoir consacré un reportage ?

    La renaissance d'un mouvement, où tout du moins son retour, est en soi un phénomène assez rare et remarquable. La Nouvelle Droite ébranle de nouveau le débat, ne serait-ce que par les inimitiés qu’elle s’attire. Tout cela peut sembler marginal bien sûr – les intellectuels accompagnent ou expriment les bouleversements davantage qu’ils ne les provoquent… Mais quand même, quelquefois tiennent-ils des propos prémonitoires. Alors dans notre pays qui affectionne les polémiques et traverse une crise du sens, les intellos ont leur mot à dire et l’on ne perd jamais son temps à lire ceux de la nouvelle droite.

    Raphael-Glucksmann-a-gauche-et-tres-adroit.jpgEn fait, trop de contre-vérités, mêlant diabolisations calomnieuses et ignorances délibérées, circulent sur celle-ci. La palme revenant à Raphaël Glucksmann (Photo) , qui fit d’Alain de Benoist le père du poutinisme… Il est évidemment possible de critiquer la ND, mais dans ce cas faisons-le sans moralisme. Le philosophe Léo Strauss pensait en premier lieu nécessaire, pour saisir un penseur, de le comprendre tel qu'il se comprenait lui-même. Je suis journaliste, et non inquisiteur, j'ai tâché de faire de même. Il fallait traiter les Neo-droitiers honnêtement. J’espère y être parvenu.

    La pensée de la nouvelle droite put paraître hégémonique dans son camp lors de son apparition. En un temps d’hégémonie politique de la gauche ces questions étaient elles intéressantes d’un point de vue journalistique ?

    La ND était, me semble-t-il, plus avant-gardiste qu’elle n’était hégémonique à ses débuts. Elle a cherché à ouvrir des pistes à une droite dominante au début du siècle dernier, mais a été peu à peu brisée par ses défaites successives. Ses inspirations très nietzschéennes, son européisme, son néopaganisme, qui peuvent paraître étranges, exprimaient aussi l'air du temps New Age et la révolution
    sexuelle. Bien qu’elle prît le contre-pied du libéralisme conquérant à droite, elle a épousé son époque plus aisément que d'autres, qui rechignaient à abandonner des combats perdus.

    Aujourd’hui, l’hégémonie de la gauche est déjà fissurée – d’ailleurs, il me semble plus juste de qualifier de libérale libertaire la doxa hégémonique, ce qui revient à relativiser qu’elle soit purement de gauche. Dès lors, l’intérêt actuel de la ND devient plus évident : ses idées centrales remettent justement en cause cette doxa.

    buisson-zemmour.jpgIl me semble aussi que la droite, au sens le plus large, a remporté trois grandes victoires conceptuelles et sémantiques depuis une décennie : d’abord, le concept d’identité, ensuite celui de grand remplacement et, plus récemment, celui de désignation de l’ennemi, à la suite des attaques dhihadistes. Deux des trois sont le fait de la ND et l’autre, vous le savez bien sûr, provient de Renaud Camus. Car c'est le GRECE qui a lancé le concept d’identité dans les années 70, et c’est Julien Freund et Alain de Benoist qui ont rendu Carl Schmitt et sa désignation de l’ennemi accessibles en France. On la retrouve désormais dans les essais de Zemmour ou de Buisson (Photo)pourtant étrangers au courant révolutionnaire conservateur germanique dont la ND est l’héritière.

    Vous faites intervenir Charles Gave en réponse aux arguments d’Alain de Benoist. La réponse libérale à ces arguments est de plus en plus minoritaire L’école libérale française est-elle encore partie prenante du débat intellectuel ?

    Grand paradoxe en effet : Charles Gave est une figure d’un libéralisme théoriquement pur et dur, classique et orthodoxe, mais libéralisme néanmoins minoritaire parmi les libéraux de nos jours. L’école libérale française est numériquement faible, sur le déclin, même si des personnalités comme Agnès Verdier-Molinié ou cet enfant gâté de Gaspard Koenig ont leurs ronds de serviette aux bonnes enseignes médiatiques. Mais au fond peu importe : le libéralisme ne s’impose pas en France par les intellectuels et le débat public hexagonal, il l’a perdu depuis belle lurette. A quoi bon débattre là, quand la classe dirigeante se forme dans les business schools et lit The Economist, avant de rejoindre les firmes américaines ou les institutions supranationales ? Tout cela est bien plus efficace pour modifier ouvertement les moeurs et les esprits des Français.

    On a souvent reproché à la nouvelle droite de cacher une critique racialiste derrière la dénonciation de l’idéologie du même. Cette critique vous semble-t-elle fondée ?

    Vous me contraignez là à un procès d’intention ! Cela étant dit, le discours caché de la ND est inconcevable : par définition, comme tous les -ismes, le racialisme circonscrit une cause première et unique de l'histoire humaine, en l’occurrence la race. Or, il suffit de lire les revues de la ND pour se rendre compte de son sens extrême des pluralités. Ses intérêts et ses perspectives sont innombrables. 

    Bien sûr, Alain de Benoist évoque le métissage dans cette idéologie du même. Mais cela fait quand même trois décennies qu’il se préoccupe bien peu des questions ethniques, même si l'on trouve une petite page sur les avancées génétiques dans Eléments. Je crois Alain de Benoist très honnête quand il critique l’ethnocentrisme,
    et il a eu une influence considérable à cet égard, en éloignant les efforts des intellos de la droite radicale vers d’autres problématiques, 
    plus économiques ou philosophiques. 

    4609OB0.jpgIndéniablement, un basculement s’est opéré dans les années 80 au sein de la mouvance, entre le racialisme (porté vers la hiérarchisation) et l'ethno-différentialisme, conséquence d’une lecture de Claude Levi-Strauss (Photo). Il n’y a donc rien de caché, et Jean-Yves Camus l’explique très bien dans le reportage [références ci-dessous ndlr], je vous laisserai donc l’écouter !

    Cela dit, je parierais que les questions ethniques reviendront peu à peu, sous la contrainte des circonstances. Certains le font déjà sur internet, en général avec maladresse, mais il est à la fois possible et souhaitable de traiter la question sérieusement. Peut-être les revues de la ND seront-elles en mesure de le faire et de montrer l’exemple… sans oublier ce qu’écrivait Spengler : « qui parle trop de race n’en a plus »

    Propos recueillis par Charles du Geai.
    Reportage à retrouver sur
    https://fr.sputniknews.com

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  • Livre • Les prophètes de l’homme-dieu

    par Claude Wallaert 

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    Que se passe-t-il en ce début du XXIe siècle ?  

    Prosternation générale devant le dieu Progrès, avortement en passe de devenir un droit universel et imprescriptible, mariage dénaturé, eugénisme de plus en plus intrusif, invasion imminente du transhumanisme… Que se passe-t-il donc en ce début du XXIe siècle ? 

    Par cet ouvrage de très haut intérêt, rayonnant de limpidité, et d’une lucidité tout éclairée par un esprit profondément chrétien, Grégor Puppinck nous propose ses réponses et il nous fait découvrir de l’intérieur une religion radicalement étrangère à celle de l’Église catholique.

    Il s’agit de la religion des droits de l’homme, avec son clergé, ses catéchistes et ses prosélytes. « Il y a d’abord, en bas de l’échelle, les cavaliers légers […] Commissaires aux droits de l’homme, […] Ambassadeurs spéciaux, ou encore personnalités éminentes, chargés à titre personnel de se faire l’apôtre des libertés, ou de l’une d’entre elles. […] Viennent ensuite les multiples comités d’experts et groupes de travail chargés d’émettre des avis et des recommandations…Viennent enfin les quasi-juridictions et les juridictions, tels les Comités des Nations unies et la CEDH, chargées d’évaluer et de juger l’action des gouvernements. » (p. 254).

    Quelle est donc cette religion ? Héritière à la fois des Lumières, de l’évolutionnisme darwinien et de l’antique gnosticisme, elle traduit dogmatiquement une vision de l’homme réduit à sa stricte individualité, qu’il s’agit de sculpter avec le ciseau du droit, de manière à le libérer du carcan de la matière et de sa part d’animalité ; l’esprit, siège unique de la dignité humaine, triomphera de ces pesanteurs et conduira l’homme à devenir son propre créateur ; le droit redéfinira sans cesse la nature humaine, dans un cadre politique providentiel et mondialisé.

    Telle est la dynamique actuelle des juridictions évoquées plus haut, qui démolit peu à peu, malgré, il est vrai, de notables résistances, les données de la Déclaration Universelle des droits de l’homme de 1948. Cette Déclaration a été rédigée dans un contexte encore marqué par l’horreur des massacres de la seconde guerre mondiale imputée principalement à l’époque au totalitarisme nazi ; en partie inspirée par des chrétiens comme Jacques Maritain, elle visait à protéger l’homme de l’emprise du matérialisme et d’un retour des idéologies ; elle procédait d’une vision de ses droits ajustée sur sa nature, en laquelle réside sa dignité. Cependant, cette Déclaration restait déconnectée du fait religieux, et par là même demeurait très peu précise quant à la définition de la notion de nature humaine. Jacques Maritain notait lui-même, concernant les droits de l’homme, l’opposition entre deux groupes, « ceux qui acceptent plus ou moins explicitement, ceux qui refusent plus ou moins explicitement la loi naturelle comme fondement de ces droits. »

    Notre auteur nous fait voir, par une analyse précise et documentée, comment le groupe du refus semble aujourd’hui en passe de l’emporter au fil de la jurisprudence grossissante de la CEDH, du Comité des droits de l’homme de l’ONU, et autres cours de justice qui fonctionnent en réseau malfaisant.

    Ce constat peu réjouissant ne laisse pas d’inquiéter, bien sûr. Mais en vrai chrétien, notre auteur ne désespère pas ; il nous rappelle de belles victoires comme l’affaire Lautsi contre Italie, dite des crucifix, en 2010, relève pour nous la fronde de pays comme la Russie ; enfin, il conclut en nommant le seul vrai remède à la démesure orgueilleuse de la puissance désincarnée : la charité incarnée.   

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    Les droits de l’homme dénaturé de Grégor Puppinck, Éditions du Cerf, 2018, 286 pages, 22 €
  • Cinéma • L’intervention

    Par Guilhem de Tarlé 

    A l’affiche : L’intervention, un film de Fred Grivois, avec Alban Lenoir (le capitaine), Olga Kurylenko (la maîtresse d’école), Michaël Abiteboul (un gendarme, tireur d’élite), Josiane Balasko (qui transmet les ordres de l’Élysée).

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    À la frontière entre Djibouti et la Somalie...

    L’intervention, c’est une reconstitution libre de la prise d'otages de Loyada à la frontière entre Djibouti et la Somalie, le 3 février 1976.

    Le protectorat français de Djibouti date de la fin du Second Empire, sous le nom de Côte française des Somalis, et obtint le statut de Territoire d’Outre-Mer en 1946 ; il décida de rester français lors du référendum de 1958  et encore en 1967, pour devenir le fameux Territoire français des Afars et des Issas dont les députés, la même année, sauvèrent la majorité parlementaire de Gaulle-Pompidou à L'assemblée nationale. 

    maxresdefault.jpgEn fait, contrairement à l’ethnie des Afars, celle des Issas voulait se « libérer » de la tutelle française et cette prise en otage d’un bus scolaire entre dans le cadre de leur lutte pour l’indépendance, qui fut proclamée moins d’un an et demi plus tard, le 28 juin 1977… Comme quoi la violence paye ! 

    L’intervention est  donc un film de guerre, qui met en présence d’un côté des militants indépendantistes du Front de Libération de la Côte des Somalis (FLCS), de l’autre trois entités distinctes, d’abord un groupe de tireurs d’élite de la gendarmerie nationale, qui deviendra peu de temps après le GIGN, ensuite des paras de la Légion étrangère, et enfin… (j’allais écrire malheureusement)… l’Élysée du Président Giscard d’Estaing.

    3332222.jpgCe docu-fiction oppose ainsi la pusillanimité politique et diplomatique du pouvoir central, qui croit tout savoir mieux que les autres et veut tout diriger… de loin…, à la réalité que vivent les soldats sur le terrain, lesquels auraient d’abord besoin qu’on leur fasse confiance et qu’on leur laisse une véritable liberté de décision et d’action. 

    L’arrogance du pouvoir central, en effet, ne date pas de Macron !   

    PS : vous pouvez retrouver ce « commentaire » et plusieurs dizaines d’autres sur mon blog Je ciné mate.

  • Paris Match de cette semaine informe ses lecteurs en 2 pleines pages sur le prince Jean d’Orléans, Comte de Paris

     

    Après avoir publié ce lundi sur son site internet, un article intitulé « Le prince Jean d’Orléans est officiellement le nouveau comte de Paris », le magazine populaire Paris Match continue de présenter le nouveau Chef de la Maison de France aux Français dans son édition papier sortie hier dans les kiosques.

    Dans cet article, en mode Paris-Match, Henry-Jean Servat présente aux lecteurs le nouveau comte de Paris, Jean d’Orléans, et son épouse Philoména, comtesse de Paris. Il revient sur les funérailles royales de son père qui ont eu lieu ce samedi à la Chapelle royale de Dreux.

    Un article sincère, qui vient donc se rajouter aux très nombreux articles consacrés à la famille royale de France, publiés ces trois dernières semaines dans la presse, tant nationale et locale que dans la presse internationale.

    Voici l'article en question paru hier. (Photo en en-tête). 

    DEPUIS LE DÉCÈS DE SON PÈRE, LE COMTE DE PARIS, IL EST LE NOUVEAU PRÉTENDANT AU TRÔNE DE DANCE

    JEAN D'ORLEANS
    LE ROI EST MORT VIVE LE ROI !

    Par Henry-Jean Servat - Photos Baptiste Giroudon

    « Nos relations ne furent pas toujours bonnes et, comme dans beaucoup de familles, nos rapports père et fils connurent frictions et tensions. Mais, ces derniers temps, depuis le décès de mon frère François, elles s'étaient améliorées et, aujourd'hui, le comte de Paris oublie et pardonne les avanies subies par le duc de Vendôme », déclare Son Altesse Royale, souriant à demi, avec des éclats de sincérité teintés de mélancolie.

    Au lendemain des obsèques d'Henri d'Orléans, le prince Jean, rencontré ce lundi à Dreux, annonce la couleur. L'héritier des rois qui régnèrent sur la France, descendant en ligne directe d'Henri IV, Louis XIII et Louis-Philippe 1er, souhaite faire vivre aux siens une époque apaisée. Celui qui est maintenant le chef de la famille de France, c'est-à-dire celui sans l'autorisation duquel les membres de cette famille ne peuvent se marier, précise que son père s'était levé de bonne heure, ce 21 janvier dernier. Il avait prévenu qu'il ne se rendrait pas à la cérémonie religieuse célébrée à la mémoire de son cousin Louis XVI, guillotiné deux cent vingt-six ans plus tôt. Une mauvaise bronchite l'épuisait. Il avait choisi, une fois habillé, de se recoucher et, s'étant rendormi sur son lit, ne s'était plus réveillé. La femme de ménage l'avait trouvé allongé au côté de sa femme, la duchesse de France. Les pompiers n'avaient pu le ranimer.

    Et Jean de France, duc de Vendôme, deuxième fils du prince défunt et dauphin, succédait à son père en devenant désormais Jean IV, nouveau comte de Paris. Déléguant à son frère Eudes et à son cousin Charles-Philippe d'Orléans l'organisation des funérailles en la chapelle royale de Dreux, nécropole des princes d'Orléans, il y accueillait, le week-end dernier, toute la parentèle et ses proches. A commencer par sa mère, la grande-duchesse Marie-Thérèse de Wurtemberg, née altesse royale, et sa soeur la princesse Blanche, handicapée de naissance. Son père, cela fit scandale, avait divorcé pour épouser l'Espagnole Micaela Cousino y Quinones de Leon, qui ne vint pas assister à l'enterrement, clouée au lit par une bronchite et les suites d'une opération de la hanche.

    Toutes ses tantes, son père étant issu d'une fratrie de onze enfants, trônaient en toques de fourrure au coude à coude sur des chaises de velours rouge dans le choeur de l'église baigné d'une humidité qui glaçait les sangs. Au premier rang, se trouvaient l'impératrice Farah, la reine Sofia d'Espagne, qui est une cousine, le prince Albert II de Monaco, les souverains du Liechtenstein, le prince héritier du Maroc, le prince Emmanuel-Philibert de Savoie, les Bourbon-Siciles, les Bourbon-Parme. Le nouveau comte de Paris tint à réunir ensuite, pour une citronnade royale, parents et amis dans la demeure qui jouxte la maison de maître où il a élu domicile. La reine Sofia tomba en admiration devant le lieu, au beau milieu du parc surplombant la ville.

    IMG.jpgLe prince vit là depuis quelques années, en compagnie de la princesse Philo-mena, épousée il y a bientôt dix ans. Il a renoncé à travailler dans la finance (il était consultant à la banque Lazard) pour s'occuper des biens, avoirs, forêts et investissements de l'héritage qui est sien. Au milieu de souvenirs royaux, le prince et la princesse élèvent leurs cinq enfants, Gaston, Antoinette, Louise-Marguerite, Joseph et Jacinthe, plus préoccupés de jouer avec Léonore, l'imposante chienne terre-neuve noire, que de suivre les cours de flûte traversière voulus par leur mère et dispensés par Emmanuelle, l'organiste de la chapelle. Contrairement à son père et au prétendant dit légitimiste, Jean est fier d'être né en France et d'y avoir toujours vécu. Titulaire d'une maîtrise de philosophie sur le bien commun et d'autres maîtrises de droit et de gestion, colonel de réserve et parrain du 4e régiment de chasseurs de Gap, créé par son arrière-grand-oncle, le prince a rencontré des gilets jaunes et garde au coeur et à la raison l'idée de servir son pays. Il trouve le temps de conseiller à ses enfants de soigner les hérissons qu'ils découvrent blessés, tout en leur apprenant leur arbre généalogique qui remonte jusqu'à Saint Louis. 

    Le prince Jean d’Orléans est officiellement le nouveau comte de Paris

  • Royalistes et Gilets jaunes, aujourd'hui

    Louis XIV gilet jaune

    Par Jean-Philippe Chauvin 

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    En ce début février, les manifestations des Gilets jaunes n’ont pas cessé, et si le nombre des manifestants semble décroître, il n’est pas certain que les raisons de manifester, elles, sont moins nombreuses ou moins importantes.

    En ce sens, le grand débat national, pour motivant qu’il soit pour la réflexion et la proposition, n’est ni suffisant ni satisfaisant pour apaiser les colères multiples qui ont envahi le champ social et les lices politiques, ce qui ne signifie pas qu’il faille le déserter mais simplement qu’il ne faut pas en attendre grand-chose de concret, référendum ou non. 

    Désormais, le samedi est devenu, au fil des semaines, le marqueur des manifestations, et le calendrier passé en compte déjà douze depuis le 17 novembre, date inaugurale des promenades en jaune.

    Gilets_Jaunes_8_decembre®Benjamin_de_Diesbach-47.jpgLes royalistes y ont sorti régulièrement leurs drapeaux, comme nombre d’autres mouvances, et la photo d’un sacré-cœur chouan côtoyant le portrait de Che Guevara en est la plus récente illustration, inattendue autant que surprenante pour qui oublie les conjonctions paradoxales des temps d’épreuves et de tempêtes : en 1940, les royalistes d’honneur que furent Honoré d’Estienne d’Orves, le colonel Rémy ou le camelot du roi Luc Robet, et tant d’autres, ne se posaient pas la question des opinions de ceux qui partageaient leur aversion pour cette Occupation malvenue et choquante que tous subissaient. Bien sûr, et fort heureusement, nous ne sommes pas en 1940, mais, pour nombre de royalistes sans œillères et lecteurs de Bernanos, l’alliance des « Blancs » et des « Rouges » contre le Pouvoir en place et pour la revendication, fort légitime, de justice sociale (formule chère aux monarchistes qui n’oublient pas que c’est le roi Louis XVI qui l’a « inventée » !), peut justifier ces compagnonnages étranges et limités dans le temps. D’ailleurs, en réaction à cet état de fait, certains provocateurs se réclamant d’un nihilisme brutal ou d’un trotskisme suranné n’ont pas hésité à jouer les « épurateurs » contre les volontaires du Roi, au risque de faire le jeu d’un Pouvoir qu’ils disent combattre quand, concrètement, ils le protègent par leurs exclusives politiciennes. 

    Les royalistes, dont la fibre sociale s’est révélée plus sensible que chez nombre de « conservateurs » partisans d’un « ordre républicain » qui n’est rien d’autre, en définitive, qu’un « désordre établi », continuent à jouer une partition particulière dans cette contestation inédite : enracinés dans leurs terroirs et dans l’histoire longue de la nation France, cette nation qui n’est pas née en 1789 ni par la mort du « roi Capet », les royalistes évoquent la nécessaire justice sociale, préférant souvent le mot d’équité à celui, plus ambigu, d’égalité même si, en privant cette dernière d’une majuscule qui la pétrifie sans profit pour les citoyens et en la qualifiant selon les lieux et les corps publics, elle devient plurielle et légitime. Oui, l’équité territoriale, c’est-à-dire la reconnaissance d’une inégalité protectrice car prenant en compte les situations et les conditions particulières des provinces, des communes et des corps intermédiaires ; oui, la justice sociale, c’est-à-dire le refus des inégalités démesurées et injustifiées qui ne sont rien d’autre, alors, que des injustices, parfois légales mais toujours illégitimes ; oui, l’égale dignité des travailleurs et de ceux qui n’en sont plus, par la retraite ou par la rente, dans la société et dans la contemporanéité ; oui, l’ordre public, qui n’est pas forcément « républicain », pour que chacun soit préservé des effets dévastateurs des désordres et des incivilités qui sapent la bonne entente sociale au profit des plus méprisants ou des plus violents (qui sont parfois les mêmes)… 

    2194624422.jpgLe message royaliste n’est pas, pour autant, un message utopique ou seulement catégoriel : il est le rappel de ces quelques principes simples qui peuvent ordonner la vie sociale comme le débat politique et institutionnel. S’il peut offrir aussi un débouché à la contestation et à la discussion, c’est que, bien que partisan, il prône une magistrature suprême de l’Etat dont la légitimité ne repose pas sur des urnes présidentielles qui sont trop souvent de véritables boîtes de Pandore, mais s’appuie sur la longue suite des temps et l’indépendance statutaire ouverte par le mode même de transmission du sceptre de père en fils, sans que ni l’un ni l’autre ne puissent s’en échapper… Ce non-choix est la condition première de sa position d’arbitre institutionnel au-dessus des partis et des factions, au-delà des péripéties parlementaires et des pressions des nouvelles féodalités financières et économiques. Elle est, à l’heure des campagnes millionnaires et communicantes, la liberté possible et nécessaire de l’autorité suprême qui rend possible les nécessaires libertés publiques. 

    Puisque les questions institutionnelles s’invitent dans le débat après être descendues dans la rue, il n’est pas incongru que les royalistes conséquents et constructifs prônent l’instauration d’une Monarchie royale qui pourrait, de par sa nature et son statut, ouvrir la voie à la refondation des « républiques françaises », provinciales, locales, professionnelles, susceptibles de se gouverner par elles-mêmes dans le cadre protecteur de l’Unité française et sans le corset de « l’indivisibilité » qui, trop souvent, n’est que le synonyme de l’uniformité et de la contrainte venue d’un Etat parisien trop jacobin pour être honnête…  ■ 

     Le blog de Jean-Philippe Chauvin