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Révolution - Terrorisme - Totalitarisme - Page 210

  • Salle comble hier soir à Marseille pour « La Rébellion cachée »

     

    rebellion_cachee.jpgPrésenté par Jean Gugliotta, le président de l'Union Royaliste Provençale, et Daniel Rabourdin, son réalisateur (photo ci-dessus), le documentaire « La Rébellion cachée » a passionné une assistance attentive qui s'est prêtée activement au débat et aux échanges.

    Ce qui a été montré et dit c'est la vérité sur le génocide vendéen, matrice de tous les génocides modernes et du totalitarisme révolutionnaire.

    Une soirée réussie ! 

  • D'accord avec Mathieu Bock-Côté : Soljenitsyne n'était pas un libéral !

     

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    Également dans le Figaro, Soljenitsyne a été défini comme « conservateur libéral » (Chantal Delsol). Cette tribune de Mathieu Bock-Côté n'est certes pas une réponse à cette affirmation à tous les sens du mot hasardeuse. Mais sa réflexion au fil des lignes et des idées conduit à une tout autre compréhension de la pensée du grand Russe. Beaucoup plus profonde et plus juste selon nous. [Le Figaro, 23.11]. Nous faisons suivre cette tribune du discours intégral d'Alexandre Soljenitsyne aux Lucs-sur-Boulogne - en 1993, il y a 25 ans - où il dit le fond de sa pensée sur toute forme de révolution. LFAR

     

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    La commémoration des 100 ans de la naissance de Soljenitsyne permet de revenir sur une existence qui a incarné de la manière la plus exigeante qui soit la figure de la dissidence au XXe siècle.

    Elle permet aussi de revisiter l'œuvre d'un homme qui a théorisé la résistance au totalitarisme, en décryptant de quelle manière il pervertit l'âme humaine et déstructure les repères fondamentaux de la conscience. Soljenitsyne ne s'imaginait pas en lutte contre une forme radicalisée de la dictature mais contre un régime politique inédit, broyant la part la plus intime de l'être humain.

    On le sait, pour Soljenitsyne, l'institutionnalisation du mensonge est la marque distinctive du totalitarisme. Orwell l'avait noté, il veut forcer l'homme à dire que 2 + 2 = 5. À la manière d'un régime idéocratique, il pose une vérité officielle, à laquelle tous doivent souscrire, surtout lorsqu'elle est contraire à la vérité effective des choses. Le totalitarisme oblige l'homme à dire le contraire de ce qu'il pense, et même le contraire de ce qu'il voit. Plus encore, il doit le dire avec enthousiasme. Devant les savants officiels du régime,il doit répéter les «vérités» décrétées, même si, au fond de lui-même, il lui arrive encore de les savoir fausses. Milosz avait noté que ce dédoublement de l'être provoque une forme de schizophrénie.

    « La piété, qu'elle soit patriotique ou religieuse, n'est pas l'ennemie de la liberté : elle peut même l'alimenter »

    La première forme de résistance au totalitarisme consiste alors à oser dire la vérité, en appelant un chat un chat. Mais où trouver la force pour résister au totalitarisme? Comment tenir devant un dispositif qui prétend confisquer le sens de l'histoire et qui ne veut voir dans ses opposants que le bois mort de l'humanité ou des résidus historiques insignifiants? Pourquoi lutter quand on en vient à se croire vaincu d'avance? La dissidence n'est-elle qu'un témoignage moral sacrificiel à classer sous le signe du martyre? C'est ici que Soljenitsyne se distingue: l'écrivain n'a jamais douté de sa victoire. Même en exil, il était persuadé de pouvoir un jour revoir son pays libéré et ayant renoué avec ce qu'on appellerait aujourd'hui son identité.

    Plusieurs l'ont noté, la philosophie de Soljenitsyne était ancrée dans un patriotisme russe et une foi orthodoxe profondément enracinés - elle ne se réduisait pas à un libéralisme fade, étranger à la transcendance, enfermant l'homme dans une conception aussi matérialiste qu'horizontale de l'existence. Si on préfère,elle s'enracinait à la fois dans un ensemble de traditions nationales et religieuses, comme ce fut souvent le cas dans la dissidence des nations d'Europe de l'Est, qui conjugua le plus naturellement du monde identité et liberté. La piété, qu'elle soit patriotique ou religieuse, n'est pas l'ennemie de la liberté: elle peut même l'alimenter.

    Le totalitarisme entend soumettre l'homme intégralement, pour fabriquer ensuite l'homme nouveau à travers le contrôle complet de tous les mécanismes de socialisation. Mais l'homme n'est pas intégralement manipulable. Sa naissance dans une nation historique particulière qui demeure pour lui une source précieuse d'identité et sa quête spirituelle qui le pousse vers les fins dernières révèlent une nature humaine que le pire ordre social ne peut jamais complètement écraser et à partir de laquelle l'aspiration à la liberté peut rejaillir. La conscience de sa filiation comme celle de sa finitude fondent paradoxalement pour l'homme la possibilité de sa liberté. C'est parce qu'il était rattaché au monde par les racines les plus profondes et par ses aspirations les plus élevées que Soljenitsyne a su résister au communisme.

    « Soljenitsyne l'avait vu avant tout le monde : l'Occident n'est pas lui-même immunisé contre le totalitarisme »

    Soljenitsyne l'avait vu avant tout le monde: l'Occident n'est pas lui-même immunisé contre le totalitarisme. La démocratie contemporaine en reconduit certains schèmes à travers le fantasme d'une pleine maîtrise du vivant ou de l'existence sociale, où se laisse deviner encore une fois la figure de l'homme nouveau, qu'on voudrait aujourd'hui sans sexe, sans parents, sans patrie, sans religion et sans civilisation. Il est bien possible que nos traditions les plus profondes soient encore une fois celles qui nous permettront de résister à l'hubris d'une modernité qui assujettit l'homme en prétendant l'émanciper.

    Et comme on lisait hier la Pravda en apprenant à la décoder, on lit aujourd'hui entre les lignes de certains journaux pour décrypter la part du réel que le régime diversitaire ne peut dévoiler sans se fragiliser. Qu'il s'agisse de l'idéologie du genre, du multiculturalisme qui déracine les peuples et les expulse mentalement de chez eux en diabolisant le désir d'avoir un chez-soi ou de la névrose du politiquement correct qui enferme le monde de la pensée dans un monde parallèle, fondé sur la falsification du réel, il faudra aussi retrouver le courage de dire la vérité.  

    Mathieu Bock-Côté 

    À lire aussi dans Lafautearousseau ...    

    D'accord avec Arnaud Guyot-Jeannin : Soljenitsyne n’était pas un conservateur libéral, mais un antimoderne radical !   
    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017). 
  • Le temps du blasphème

     

    Par Philippe Mesnard
     

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    Quand Marlène Schiappa apostrophe par SMS Cyril Hanouna – car toujours les Puissants ont eu à cœur de dialoguer avec l’Art – pour lui rappeler qu’il existe un délit d’entrave à l’IVG, simplement parce qu’un citoyen exprime son opinion dans une émission de divertissement, elle montre qu’elle ignore la loi – ou plutôt qu’elle se moque des textes exacts et ne veut en retenir que l’esprit : on ne touche pas à l’IVG, devenue idole du Progrès. C’est tabou !

    Et ceux qui critiquent doivent être condamnés. Émile Duport, des Survivants, avait blasphémé et Hanouna, qui lui offrait une tribune, était bien près d’être inculpé d’assistance à blasphémateur. L’ironie étant qu’au moment même où Schiappa menaçait de fulminer l’anathème, l’Irlande abrogeait le délit de blasphème, qui n’existe donc plus que dans les pays musulmans. Muriel Robin, dans l’émission de Ruquier – continuons de fréquenter des sommets –, intimait l’ordre de se taire à un chroniqueur qui ne brûlait pas assez d’encens devant Fogiel et ses GPA illégales.

    Schiappa n’est qu’un exemple, certes significatif puisque c’est un membre du gouvernement, de ce nouveau goût pour ce genre d’accusation : avoir outragé ce qui est sacré ! Un homme n’a plus médiatiquement le droit de se défendre quand une femme l’accuse, car nier la vérité de la parole de la victime féminine, c’est commettre un crime encore plus affreux que celui dont on est accusé – même quand on est innocent.

    Anne-Marie Le Pourhiet remarquait que le néo-féminisme est au-dessus des lois, ou plutôt qu’il produit sa propre loi : qu’il soit anathème celui qui n’avoue pas !

    D’autres blasphèmes sont peu à peu institués : on comprend bien que qui se réclame du nationalisme n’est qu’un galeux, un chien, un lépreux qui mérite d’être jeté hors de la société pour avoir outragé le « vivre-ensemble » ; qu’un « blanc » ose célébrer une vie « noire », et le voilà accusé du blasphème d’appropriation culturelle ; qu’un juge ose enquêter sur Mélenchon, et voilà ce dernier qui éructe qu’il est sacré et intouchable – ce qui est grotesque même si les conditions de cette enquête sont en elles-mêmes un scandale ; cela dit, la France insoumise n’hésite pas à expliquer que cette perquisition est « digne de la nuit des longs couteaux », ce qui est un tantinet exagéré, et qu’on a blasphémé contre le texte sacré qu’est l’article 12 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 ; la Cour européenne des droits de l’homme, de son côté, n’hésite pas à déclarer sacré le mariage entre homosexuels au point qu’elle trouve blasphématoire le refus de certains maires de le célébrer, se contentant de déclarer irrecevable, en octobre 2018, la requête qu’ils avaient introduite dans ce sens en 2015 : comme dirait Kouachi, on ne discute pas avec les blasphémateurs, on les fait taire. La même CEDH vient de confirmer la condamnation d’une Autrichienne, qui avait affirmé que Mahomet était pédophile puisqu’il avait épousé une fillette de six ans et consommé son mariage avec elle, ses propos « menaçant la paix religieuse ». Gérard Davet et Fabrice Lhomme, journalistes au Monde, qui viennent de publier une enquête sur la France islamiste en Seine-Saint-Denis, se rendent compte, stupéfaits, qu’ils sont accusés d’avoir blasphémé en n’entonnant pas l’antienne obligatoire d’un islam irréprochable.

    Et Macron ne veut pas commettre le blasphème de froisser l’Allemagne en donnant une « expression trop militaire » à la célébration d’une victoire remportée militairement sur l’Allemagne…

    Une nouvelle religion se met en place depuis quelques décennies, et se sent aujourd’hui ou assez assurée ou assez menacée pour ne plus supporter aucune contradiction : oser contredire n’insulterait pas seulement l’intelligence mais serait une violence sociale dangereuse et insupportable. Cette nouvelle religion se fonde sur un oubli complet du passé. Pierre Nora déclarait dans Le Figaro : « Le passé s’est éloigné. Les plus jeunes n’éprouvent plus le sentiment d’une continuité historique de Jules César à Napoléon, auparavant si vif. La coupure est nette. La dictature du présent et l’oubli de la longue durée entraînent la fin de ce qui a été le ressort de la transmission : le sentiment de la dette. La conviction, qui a pesé sur les hommes pendant des siècles, que nous devons à nos parents et à nos ancêtres d’être ce que nous sommes. Les Français de 2018 ne se perçoivent plus comme les débiteurs de leurs devanciers. »

    Cette religion assure la promotion d’un terrifiant avenir univoque aux couleurs des droits de l’homme qui, pourtant, ensanglantent le monde depuis plus de deux siècles.

    Ce nouveau siècle sera bien religieux. Sale temps pour les blasphémateurs qui n’entendent pas se convertir.  

    Philippe Mesnard
  • D'accord avec Mathieu Bock-Côté : « Le nationalisme n'est pas un péché »

     

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    Une réflexion qui n'a rien à voir avec le libéralisme mondialisé que prêche partout Emmanuel Macron en parfait décalage avec les réalités et les évolutions du monde actuel. Comme nous, Mathieu Bock-Côté prône limites, frontières et enracinement qui n'entraînent nullement un esprit de fermeture aux autres et au monde. mais qui, simplement, répondent au besoin de l'homme « d'habiter un pays qui ne soit pas qu'une page blanche ». [Le Figaro, 16.11].  LFAR

     

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    Il n'y avait rien de surprenant à entendre Emmanuel Macron, dans le cadre de la commémoration du centenaire de l'Armistice, dénoncer le « nationalisme ».

    Tous y ont vu, sans se tromper, une réponse à Donald Trump, qui s'en est récemment réclamé. Mais Emmanuel Macron faisait aussi tout simplement écho à la définition courante du nationalisme en France, qui l'assimile à l'extrême droite. On se souvient de la formule de François Mitterrand, qui se voulait définitive : « Le nationalisme, c'est la guerre ! »

    Mais il suffit de se dégager du contexte français pour constater que le terme « nationalisme » n'a pas partout la même connotation, ce qu'a noté Gil Delannoi dans La Nation contre le nationalisme. Même dans l'espace francophone, sa signification varie, comme on le voit au Québec, où il désigne essentiellement le combat mené au fil des siècles par les Québécois francophones pour conserver leur identité collective dans une Amérique où le fait français est minoritaire. Le nationalisme y est non seulement normalisé, mais valorisé, au-delà de la seule option indépendantiste. On pourrait dire la même chose du nationalisme irlandais, polonais ou de celui des pays Baltes - ces peuples ont dû conquérir leur indépendance. Les petites nations savent très bien qu'elles ne peuvent compter que sur elles-mêmes pour défendre leur droit d'exister.

    Il se pourrait toutefois que la condamnation du nationalisme, chez Emmanuel Macron, aille bien plus loin que sa dénonciation habituelle. Car ce n'est pas la première fois que celui-ci, croyant s'en prendre au nationalisme et ses excès, prend en fait pour cible la nation en elle-même. On se souvient de sa déclaration quelque peu contre-intuitive au moment de la présidentielle, lorsqu'il avait affirmé que la culture française n'existait pas ou plus récemment, de sa caricature de la psychologie française qui serait celle de « Gaulois réfractaires ». Même les pages glorieuses de l'histoire nationale sont gommées, avec l'effacement symbolique de la victoire française lors de la Grande Guerre au profit d'un mythique siècle d'amitié franco-allemande.

    Ce zèle antinationiste, pour emprunter le néologisme de Pierre-André Taguieff, se confirme, par effet de contraste, dans l'enthousiasme européen du président. L'appel lancé à la constitution d'une souveraineté européenne, parachevant la désincarnation politique des nations, se complète maintenant avec celui pour une armée européenne. On pourrait voir là un appel à l'Europe puissance, mais l'Europe macronienne semble terriblement décharnée. Elle a moins l'allure d'une civilisation se constituant politiquement que du stade intermédiaire dans la construction d'une cité universelle, où pourrait s'épanouir une « overclass » enfin délivrée de ses obligations envers une communauté politique particulière et se percevant elle-même comme une aristocratie planétaire.

    « Si le nationalisme lui-même ne cesse de se recomposer (...), c'est qu'il permet à l'homme d'habiter un pays qui ne soit pas qu'une page blanche »

    C'est probablement là que se confirme le caractère radical d'un certain progressisme. On y retrouve une conception de la modernité qui présente la diversité humaine, celle des peuples, des religions et des civilisations, comme un moment transitoire dans une longue histoire censée aboutir à une humanité réconciliée sous le signe de la cité universelle. L'homme n'aurait cessé d'élargir au fil des siècles et des époques ses cercles d'appartenances. Viendra un jour où il saura se passer de frontières et de demeure - tel est le pari du progressisme. L'homme trouverait sa rédemption dans une adhésion militante au parti du mouvement, qui le purgerait d'un enracinement qu'on fait rimer avec encrassement.

    Mais cette histoire a surtout les traits d'un fantasme destructeur. Gabriel Marcel l'a déjà dit de manière lumineuse : « À la base de l'activité des révolutionnaires […] gît cette conviction monstrueuse : ce que nous détruisons peut se remplacer, nous avons quelque chose à mettre à la place. » Si le conservatisme renaît en notre temps, c'est d'abord à la manière d'une prise de conscience de l'intime fragilité du monde. On ne saurait présenter nos patries comme des constructions sociales purement artificielles, bêtement transitoires, toujours déjà périmées, qu'on pourrait démonter à loisir. L'homme a besoin de croire au monde qu'il habite.

    Et si le nationalisme lui-même ne cesse de se recomposer, au-delà des définitions polémiques qu'en donnent ceux qui veulent en finir avec lui, c'est qu'il permet à l'homme d'habiter un pays qui ne soit pas qu'une page blanche - un pays s'inscrivant sous le signe de la continuité historique. Et sachant que l'histoire n'accouchera ni demain ni après-demain d'un monde homogène, les peuples sont en droit de demander à leurs dirigeants de défendre leurs intérêts sans basculer dans une forme de messianisme sacrificiel les poussant à s'abolir pour une idole idéologique déracinée qui n'est qu'une contrefaçon de l'humanité.  

    Mathieu Bock-Côté        

    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017). 
  • Livres • Savoir pour prévoir afin de pourvoir

     

    Par Hilaire de Crémiers 

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    Christian Vanneste n’est pas un homme politique ordinaire.

    Ce qui caractérise le milieu, c’est son inculture. Ces gens-là ne savent rien ni du passé ni du présent ni des vraies questions qui se posent aujourd’hui à la société française. Quand ils prétendent savoir et détenir les diplômes qui le prouveraient, ils récitent les poncifs qui sont d’obligation, scolaire, universitaire, politicienne. Leurs discours convergent tous dans le même sens de la parfaite nullité.

    Christian Vanneste a réfléchi par lui-même ; il a lu, appris, philosophé ; il a mis en perspective l’histoire et resitué la France dans son drame politique, philosophique et même littéraire. Rien ne lui échappe de Descartes à Rousseau, de Pascal à Bergson, de Kant qui reste encore le philosophe de la modernité et de la république, à tous les faux esprits qui après 68 ont régenté l’intelligence française et contre qui se rebellent heureusement aujourd’hui tout ce qui a encore l’audace de tout simplement penser.

    Il en est de même de la politique : il sait que la France n’est pas née en 1789. L’individualisme qui a régi les rapports sociaux, a sa source dans une fausse conception du contrat social.

    La France dans la mesure où elle s’est conçue comme nation, a su dépasser cet individualisme. L’esprit social, le désir se servir retissaient le lien qui unissait les Français à chaque génération. De Péguy à Barrès, la France était chantée : le « moi » barrésien s’inscrivait dans l’énergie nationale.

    Le drame vient de ce qu’il n’y a plus de résistance, ni même d’esprit de résistance, sauf chez quelques-uns qui n’ont pas accès au pouvoir sous quelques mode que ce soit. Vanneste en sait quelque chose. Reste un rayonnement culturel qui flamboie encore. Tel un Philippe de Villiers au Puy-du-Fou, tel lui-même, Christian Vanneste, qui est l’un des rares à pouvoir dire, écrire, décrire un tableau synthétique de notre décadence actuelle, en dénoncer les causes, en annoncer les conséquences. C‘est devant nous, inéluctable. Car plus la société française s’effrite, se dilue, s’autodétruit, plus les communautarismes apparaissent, se développent et font la loi. Les groupes singuliers qui se présentent comme minoritaires et persécutés, revendiquent et, peu à peu, s’arrogeant la loi, la pratique de la loi et de la justice, imposent leurs usages et leurs visées dominatrices ; c’est le processus de victimisation en vue de la prise de pouvoir. Seulement, dans ce communautarisme triomphant, règne l’islam et, derrière l’islam, avance l’islamisme. La France s’est désarmée ; elle est en danger de mort. Toute personne intelligente le comprend parfaitement. Reste à savoir s’il est encore une volonté pour la sauver : SOS France ! L’identité, c’est perdurer dans l’être. Sinon, c’est la mort.

    C’est possible, encore, mais il faut une lucidité politique qui n’est pas encore de règle ni de mise aujourd’hui. Philippe de Villiers dans sa préface adoube le chevalier Vanneste : il est toujours utile de se battre et de savoir se battre.  

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    L’identité ou la mort, Christian Vanneste, préface de Philippe de Villiers, Editions Apopsix, 236 p, 20 € 

    Hilaire de Crémiers

  • Zemmour dit comme Boutang : il y a place en France pour différentes communautés, pas pour deux civilisations !

     

    2 minutes suffisent tout est dit. 

    Il suffit d'écouter.

      

     

  • Société • J. C. Buisson dénonce le déshonneur de la gauche à propos de d'Estienne d'Orves et il a rudement raison ! [2]

    Sépulture d'Honoré d'Estienne d'Orves, au cimetière de Verrières-le-Buisson (91)

    Par Jean-Christophe Buisson

    Un journaliste qui a du style, une logique, une cohérence, de la culture et des idées. Comme disait Thibon : ça manque ! 

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    CULTURELLEMENT CORRECT : HONORÉ OU LE DÉSHONNEUR DE LA GAUCHE (suite)

    0-20111-181009165158054-0-552849.jpgNous nous sommes émus la semaine dernière de l'attitude du conseil d'administration du lycée de Carquefou, hostile à l'idée que son établissement porte le nom du résistant Honoré d'Estienne-d'Orves au motif qu'il était, avant-guerre, monarchiste. Et si c'était autre chose qu'on lui reprochait, au fond ?

    En l'occurrence : sa précocité dans le combat antinazi.

    IMG.jpgRappel : cet officier de marine a été exécuté par les Allemands en août 1941. Il s'agissait d'un acte de représailles après l'assassinat d'un officier de la Kriegsmarine par le communiste Pierre Georges, alias « Frédo », alias « Colonel Fabien ». Lequel est honoré à Paris d'une station de métro à son nom. Sur le mur de son quai - direction Porte Dauphine - a été fixée une belle plaque bien officielle tout à sa gloire (photo). Or, qu'est-il écrit dessus ? « Son action entraîne une répression très dure [...]. La guerre pour une France libre commençait. »

    Vous avez bien lu i Comme s'il n'y avait pas eu de Résistance avant son geste (sous-entendu : avant que les communistes ne se lancent dans la lutte antinazie... en juin 1941). Comme . si la « France libre » du général de Gaulle, l'appel du 18 Juin, les premières victoires en Afrique de Leclerc et, a fortiori, l'action de l'héroïque d'Estienne d'Orves en 1940 n'avaient pas existé.

    En juillet 2010, l'historien Rémi Kauffer avait déjà relevé ce scandale dans la revue Historia. Il perdure. Que fait la RATP ?  

    Source : Figaro magazine, dernière livraison. 

    Jean Christophe Buisson est écrivain et directeur adjoint du Figaro Magazine. Il présente l'émission hebdomadaire Historiquement show4 et l'émission bimestrielle L'Histoire immédiate où il reçoit pendant plus d'une heure une grande figure intellectuelle française (Régis Debray, Pierre Manent, Jean-Pierre Le Goff, Marcel Gauchet, etc.). Il est également chroniqueur dans l'émission AcTualiTy sur France 2. Son dernier livre, 1917, l'année qui a changé le monde, vient de paraître aux éditions Perrin.

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    1917, l'année qui a changé le monde de Jean-Christophe Buisson, Perrin, 320 p. et une centaine d'illustrations, 24,90 €.
  • Quand la mémoire flanche

    Alger, 1957 ... 
    par Louis-Joseph Delanglade
     

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    Pendant la campagne présidentielle, de passage à Alger, M. Macron avait cru bon de condamner moralement la présence « coloniale » française en Algérie - condamnation évidemment inadmissible notamment au vu du contexte.

    Un peu plus tard, dans une interview au Figaro, il avait rééquilibré son propos : « Nous devons réconcilier des mémoires fracturées : celle des harkis, celle des pieds-noirs, celle des Français d'origine algérienne, celle des binationaux . » Cette fois, il s’agissait de traiter sur un pied d’égalité, en leur accordant à toutes la même légitimité aux yeux de l’Etat, des « mémoires » dont le rapport à la France n’est pas le même : harkis et pieds-noirs ne sont ni des immigrés ni des binationaux ; la mémoire des premiers fait partie de la mémoire française, celle des seconds est une mémoire étrangère et la conception mémorielle égalitariste de M. Macron n’est pas satisfaisante. 

    Or, voici que ce dernier vient de commettre une double faute en reconnaissant la responsabilité de l’Etat français dans la disparition à Alger en I957 de Maurice Audin. La première faute est de faire passer pour une innocente victime celui qui, au nom de son engagement communiste, n’aura été qu’un porteur de valises pour le compte du F.L.N., organisation terroriste avant l’heure en guerre contre la France. La dixième division parachutiste commandée par le général Massu n’a fait que son devoir en gagnant la bataille d’Alger, mission dûment confiée par le pouvoir politique. Quand on sait les atrocités commises par les combattants du F.L.N., quand on veut bien comprendre que ces atrocités constituaient un mode de combat, on voit mal comment nos soldats auraient pu répondre efficacement, sauf à utiliser tous les moyens. Celui qu’il faut bien appeler un traître a sans doute été arrêté et interrogé pour obtenir des renseignements visant à éviter des dizaines d’attentats perpétrés contre des civils. M. Macron n’avait donc pas à demander pardon à Mme veuve Audin. 

    La seconde faute aura été le moment choisi, quelques jours seulement avant le 25 septembre, « journée nationale d’hommage au harkis ». Il se trouve que, outre quelques décorations et quelques millions d’euros de mesures en leur faveur (le tout bien mérité, convenons-en), Mme Darrieusecq, secrétaire d'Etat auprès du ministre des Armées, a annoncé pour décembre « une initiative mémorielle d’envergure […] une reconnaissance pleine et entière » de l’engagement puis du calvaire de ces soldats français en Algérie et en France même. Très bien. Mais comment ne pas penser que M. Macron, encore et  toujours soucieux de « travailler sur l'apaisement des mémoires » semble vouloir ainsi faire l’équilibre entre un Audin complice des terroristes et tortionnaires du F.L.N. et ces soldats français trahis et abandonnés par certains de leurs chefs ?  S’il y a eu faute de l’Etat voire de l’Armée, ce n’est pas pendant la bataille d’Alger, c’est plutôt lors du dénouement tragique de 1962.

    M. Macron se souvient mal et mal à propos. A force de vouloir faire du « en même temps » une sorte de méthode opératoire, il participe à un nivellement mémoriel inacceptable.   

  • Zemmour réagit à la polémique Nick Conrad : « Les Blancs ne sont qu’une expression pour dire les Français »

     

    Le clip « Pendez les Blancs » du rappeur Nick Conrad a suscité un tollé et a engendré de nombreuses réactions. Sur LCI, Eric Zemmour a dénoncé la « culture du rap francophobe (...) qui appelle au meurtre des Français » et qui se répand dans les banlieues. Ecoutez ! 

     

     

    La vidéo du rappeur Nick Conrad n'en finit plus de faire réagir. Invité de la matinale de LCI vendredi 28 septembre au matin, Eric Zemmour s'est lui aussi exprimé sur la chanson et le clip tournés à Noisy-le-Grand, accusés de racisme anti-blanc. « Ce n’est pas un acte isolé, c’est une culture. Ça fait longtemps : 10 ans, 15 ans que les rappeurs appellent à tuer les flics, appellent à tuer les Français, appellent à détruire la France. Je peux vous sortir des listes de chansons longues comme le bras. Ce n’est que le dernier » , a-t-il expliqué. 

    « Il y a une culture du rap francophobe qui déteste la France, qui déteste les Français, qui appelle au meurtre des Français. Les blancs ne sont qu’une expression pour dire les Français (...). Il y a une culture de la haine de la France qui s’est répandue dans d’innombrables banlieues. Alors heureusement, tous les banlieusards, même ceux qui sont de culture musulmane ne sont pas touchés, grâce à Dieu »  a ajouté celui qui a été sous le feux des critiques pour avoir critiqué le prénom d'Hapsatou Sy, la chroniqueuse de Thierry Ardison.

    Toujours sur les banlieues, assurant que la France se dirigeait vers une nouvelle guerre civile, Eric Zemmour a conclu ainsi ses propos : « Il y a aujourd’hui dans toutes nos banlieues une contre-société qui a créé un contre-peuple, avec une contre-civilisation qui repose sur l’islam. C’est ça la vérité de nos banlieues que l’on ne veut pas dire et que l’on ne veut pas croire. »  

     

  • Histoire • Saint-Roch : Les canons contre la démocratie

     

    Par Patrick Barrau

     

    LA VEDETTE SOURIANTE.JPGÀ la fin du Directoire, Sieyès, « homme sentencieux » selon Jacques Bainville, murmurait : « Il me faut une épée ! »

    Il constatait par là le rôle essentiel que l’armée, qui constituait avec les révolutionnaires un véritable « parti de la guerre », jouait désormais dans la vie politique de « l’après Convention », d’abord comme bras armé de l’exécutif, puis comme acteur politique direct. Cela allait conduire, après le coup de force du 18 fructidor (4 septembre 1797) au coup d’Etat du 18 brumaire. La première étape Royaliste numero 1150.jpgde cette intervention se trouve dans la sanglante répression de la manifestation des sections royalistes parisiennes du 5 octobre 1795, qui n’est pas, comme on la présente généralement, un coup d’arrêt à une tentative de prise de pouvoir, mais bien la suppression à coup de canon d’une revendication démocratique et une véritable « école du coup d’Etat ».

    Dans la « mélancolie des derniers jours de la Convention » qu’évoque Mathiez et dans le souci affirmé de « terminer la Révolution », la Constitution de l’an III fit l’objet de discussions vives entre le 23 juin et le 22 août 1795. Élaborée par une commission de onze membres, majoritairement modérés, elle confiait le pouvoir à un directoire de cinq membres et l’élaboration des lois à deux assemblées, le Conseil des Cinq-Cents et le Conseil des Anciens.

    La rédaction du texte se fit dans un contexte économique difficile, marqué par la perte de valeur de l’assignat et la hausse du coût de la vie qui frappèrent les masses populaires et les petits propriétaires.

    Lors des débats s’opposèrent le « parti de la guerre » représenté par les militaires affirmant la consubstantialité de l’armée avec la Révolution et le parti de la paix, royalistes et modérés, brocardés par les militaires comme étant « la Faction des anciennes limites », s’exprimant par la voix des sections parisiennes devenues royalistes. Beaucoup de Français aspiraient à l’ordre et à la paix et les concevaient sous la forme d’un retour à la royauté.

    Craignant que les élections aux nouvelles assemblées n’amènent une majorité d’élus royalistes ou modérés, le député Baudin préconisa dans un premier projet de décret** que les deux tiers des membres des deux Conseils, soit 500 sur 750, soient réservés aux membres de l’ancienne Convention. Puis, face aux protestations des sections, il prescrivit dans un autre projet que les assemblées électorales commenceraient leurs opérations par l’élection des deux tiers au début du processus électoral qui devait se dérouler du 20 au 29 Vendémiaire (12 au 21 octobre 1795). Il justifiait cette mesure comme le moyen de garantir un ordre stable et de poser « une barrière contre l’esprit d’innovation ».

    On peut pourtant s’étonner de voir des hommes habitués à gouverner de manière révolutionnaire vouloir gouverner constitutionnellement et constater qu’un régime qui se méfiait du peuple qu’il venait de proclamer « souverain » allait lui imposer ses propres choix.

    On peut aussi, avec Mona Ozouf, être surpris de voir « des constituants être constitués et des mandataires être mandatés ». Il y a une différence profonde entre permettre la rééligibilité et l’imposer sans donner au peuple la possibilité de se prononcer. C’est au nom du « salut public » qu’est justifiée cette atteinte au libre choix des citoyens. Mais peut-être s’agissait-il surtout pour eux, selon la formule de Taine, de « rester en place pour rester en vie ».

    Le premier décret fut adopté avec la Constitution du 5 Fructidor (22 août). Le second fut adopté le 13 Fructidor (30 août). Ces textes témoignent de la désinvolture avec laquelle on traitait le droit d’élire et la souveraineté nationale, portant ainsi la responsabilité du développement d’un courant antiparlementaire. Le 28 Fructidor (6 septembre) les assemblées primaires se déterminèrent au suffrage universel, sans condition de cens, sur la Constitution et les deux décrets. La ratification des deux textes fut plus difficile que celle de la Constitution. Avec un taux d’abstention de 95%, les textes furent rejetés par 19 départements et par 47 sections parisiennes sur 48. Les royalistes, qui espéraient rétablir la monarchie par des voies légales, s’insurgèrent contre ce déni de démocratie et appelèrent à l’insurrection pour forcer la Convention à révoquer ces décrets avant les élections.

    Le soir du 11 vendémiaire (3 octobre) sept sections se déclarèrent en insurrection. Le 13, la Convention, inquiète du mouvement populaire, chargea Barras du commandement des troupes de Paris. Celui-ci proposa à Bonaparte, qu’il avait connu lors du siège de Toulon, d’être son adjoint. Après réflexion Bonaparte accepta en déclarant à Barras : « Si je tire l’épée, elle ne rentrera dans le fourreau que quand l’ordre sera rétabli ». Celui-ci ordonna à Murat de récupérer 40 canons au camp des Sablons qui furent placés au petit jour aux extrémités des rues menant aux Tuileries où siégeait la Convention, en particulier à l’angle de la rue Saint Roch et de la rue Saint Honoré ainsi qu’au couvent des Feuillants pour couvrir la rue Saint Honoré. Les sectionnaires, auxquels s’étaient joints des gardes nationaux, soit 25 000 hommes s’organisèrent en deux colonnes, l’une partant de l’église Saint Roch, l’autre partant du Pont Neuf. À 15 heures les sectionnaires encerclèrent la Convention. À 16 heures 30 Bonaparte commanda aux canonniers de tirer des plombs de mitraille. La canonnade dura trois quarts d’heure et l’on releva près de 300 morts sur les marches de l’église Saint Roch. Ce massacre, qui valut à Bonaparte le surnom de « Général Vendémiaire », constitue la première illustration de la survie problématique d’un régime suspendu à l’intervention militaire.

    L’armée intervint une nouvelle fois le 18 Fructidor an V (4 septembre 1797) lors des élections suivantes qui amenèrent à nouveau une majorité d’élus royalistes à l’initiative de trois directeurs dont Barras. Les militaires dirigés par Augereau, fidèle lieutenant de Bonaparte, occupèrent Paris. Il y eut de nombreuses arrestations, y compris celle des deux directeurs hostiles à l’intervention militaire et les élections furent annulées dans quarante-neuf départements. À nouveau la République était sauvée au détriment de la légalité. Le rôle de l’armée allait s’affirmer après ces deux interventions jusqu’au 18 Brumaire et à la prise du pouvoir par Bonaparte – qui allait poursuivre la guerre révolutionnaire pour les « frontières naturelles ».

    Le 1er juillet 1791, s’adressant aux « Républicains » devant le club des Jacobins, Choderlos de Laclos eut cette phrase prémonitoire : « Je leur demanderai si nous n’aurons pas des empereurs nommés par des soldats. »

    Les 300 martyrs royalistes de Saint Roch témoignent donc du combat pour la défense de la démocratie et de la souveraineté nationale face à un pouvoir méprisant la légalité et les droits d’un peuple en s’appuyant sur la force. 

    * Historien du Droit, ancien directeur de l’institut régional du travail.

    ** Selon Mona Ozouf, l’appellation « décret » serait inadéquate : « Les deux lois […] improprement baptisées décrets des deux-tiers […].» Mona Ozouf, 1996, « Les décrets des deux-tiers ou les leçons de l’histoire » in 1795 pour une République sans Révolution, Rennes, PUR.

    Cet article est paru dans Royaliste, bimensuel de la Nouvelle Action Royaliste, numéro 1150 (10 septembre - 23 septembre 2018). La Nouvelle Action Royaliste rappelle en préambule que les royalistes d'alors préparaient le retour légal à la monarchie royale et que c’est la décision de réserver les deux-tiers des sièges aux anciens conventionnels dans les Conseils des Anciens et des Cinq-Cents pour éviter l’élection d’une majorité de royalistes qui poussa les sections parisiennes à l’insurrection. Il est indiqué que c'est ce mouvement populaire et démocratique que la Nouvelle Action royaliste va commémorer, le 6 octobre, devant l’église Saint-Roch.

  • Guerre d'Algérie : « On n'a rien fait de mal » estime Éric Zemmour

    « Nous avions gagné la bataille d'Alger ... »

     

    DÉBAT - Emmanuel Macron a reconnu jeudi 13 septembre que la France était responsable dans la disparition de Maurice Audin. « Il n'a pas reconnu un fait historique, il reconnaît la responsabilité de la France, ce n'est pas la même chose, il n'y avait aucune responsabilité de la France » selon Éric Zemmour.  Nos lecteurs seront juges de la position d'Alain Duhamel. (RTL, 14.09) 

     

     

    Résumé RTL par Éric Zemmour, Alain Duhamel et Marie Sasin  

    Emmanuel Macron a reconnu jeudi 13 septembre que la France était responsable dans la disparition de Maurice Audin, ce qui a suscité une forme de choc, voire brisé un tabou. Le Président « reconnaît, au nom de la République française, que Maurice Audin a été torturé puis exécuté ou torturé à mort par des militaires qui l'avaient arrêté à son domicile » , le 11 juin 1957. 

    « C'était une décision qui était difficile et ça n'est pas une décision qui est agréable puisque c'est reconnaître une responsabilité d'État, une responsabilité d'une fraction de l'armée à un moment donné » , selon Alain Duhamel. 

    « Je crois quand même que quand on est un pays comme la France qui a une histoire immense et glorieuse, globalement glorieuse, quand on est comme la France un pays qui a toujours cherché à se donner, quelque fois de façon abusive, en modèle au reste de l'humanité, à mettre ses valeurs en avant. »

    «  Je pense qu'il faut avoir le courage pour certaines périodes qui sont beaucoup plus noires de reconnaître les choses, surtout en ce qui concerne la réalité des faits, il n'y a pas beaucoup de doutes  » , ajoute-t-il.

    « On a le choix entre le roman national avec son imaginaire et ses lacunes soit le récit national qui à mes yeux demande plus de courage et correspond plus à une culture démocratique » , d'après Alain Duhamel.

    « Je pense que c'est la longue litanie de nos chefs d'État qui depuis Chirac battent leur coulpe sur le dos du passé, des hommes du passé en faisant repentance du passé de façon assez scandaleuse et je dirai ignominieuse » , selon Éric Zemmour.

    « Il faut voir le contexte en décembre 1956 il y avait 122 attentats il fallait imaginer tous les jours un Bataclan, des cinémas sautaient (...) l'armée a les pouvoirs de police, ils lui ont été donnés légalement par un vote d'une majorité de gauche, voté par des socialistes et des communistes (...) un an après en décembre 1957 il n'y a plus un seul attentat, alors je veux bien il y a eu de la torture, il y a eu tout ce que vous voulez, je ne le nie pas et je dis le jeu en valait la chandelle» .

    À propos d'Emmanuel Macron, « il n'a pas reconnu un fait historique, il reconnaît la responsabilité de la France, ce n'est pas la même chose, il n'y avait aucune responsabilité de la France. On n'a rien fait de mal, c'était légal, il fallait arrêter ce terrorisme inouï » , commente Éric Zemmour.  ■ 

    Éric Zemmour

  • Livres & Histoire • Jean Sévillia : « La famille royale en prison »


    Par Jean Sévillia

    Une recension à lire parue dans la dernière livraison du Figaro magazine [31.08]. Une remarquable leçon d'histoire

     

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    Trois jours après que les Tuileries eurent été prises d'assaut, en août 1792, la famille royale, déchue, était conduite au Temple.

    Elle devait y loger dans le donjon médiéval qui était inutilisé depuis des lustres.

    Dans ce lieu sinistre sont donc enfermés Louis XVI et Marie-Antoinette, Madame Elisabeth, la soeur du roi, ainsi que les deux enfants royaux, Louis et sa soeur Marie-Thérèse.

    Le roi, la reine et Madame Elisabeth finiront sur l'échafaud, tandis que le petit Louis XVII, n'ayant pas résisté aux mauvais traitements, mourra de maladie et d'épuisement. Seule la fille de Louis XVI et de Marie-Antoinette, remise aux Autrichiens au début du Directoire, survivra à la Révolution.

    Entre le 13 août 1792, date de l'incarcération des Bourbons au Temple, et le 19 décembre 1795, jour du départ de Marie-Thérèse, plus de trois années se sont écoulées. Un laps de temps plus long que la Convention, plus long que la dictature de Robespierre ou que la Terreur elle-même. La captivité de la famille royale forme par conséquent une séquence historique en soi, dotée d'une logique propre qui interagit avec le développement de la Révolution.

    C'est à analyser cette relation que s'est attaché Charles-Eloi Vial, un jeune historien dont les premiers travaux - une étude de la Cour à la fin de la monarchie et une biographie de Marie-Louise - étaient extrêmement prometteurs.

    534911836d0abb463780f58d8c9c9b04.jpgSur un sujet en apparence rebattu - qui ne connaît les adieux de Louis XVI à sa famille, le départ de Marie-Antoinette pour la Conciergerie ou le martyre de Louis XVII, scènes déchirantes qui ont eu le Temple pour cadre - l'auteur, recourant à des archives inexploitées, parvient encore une fois à offrir des perspectives nouvelles en reconstituant la vie des prisonniers royaux, mais également l'enjeu politique qu'ils ont représenté jusqu'au bout.

    Au-delà de leurs fautes personnelles, Louis XVI et les siens ont en effet été condamnés non pour ce qu'ils avaient fait, mais pour ce qu'ils étaient. Leur captivité a donc été le révélateur d'un système prêt à broyer tous les Français aspirant à la liberté. « Ce rapport entre l'intérieur et l'extérieur de la prison, souligne Charles-Eloi Vial, est essentiel à comprendre : la détention au Temple est l'envers de la Révolution. » Une remarquable leçon d'histoire.   

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    La Famille royale au Temple. Le remords de la Révolution, 1792-1795, de Charles-Eloi Vial, Perrin, 432 p., 25 €.  

  • Littérature - Idées • Tiouttchev poète et contre-révolutionnaire

     

    Par Marc Froidefont 

    Un article qui nous fait découvrir un grand auteur russe pratiquement inconnu en France. Poète et contre-révolutionnaire. Et qui nous renseigne aussi sur la Russie. Sur son âme, sa profondeur.  LFAR

     

    I-Miniature-17255-marc-froidefont.net.htm.jpgLes éditions Interférences viennent de publier un livre, intitulé sobrement Poèmes, et qui est un recueil de quelques poésies de Fiodor Tiouttchev, élégamment traduites par Sophie Benech. Cet ouvrage est remarquable. 

    En tant que livre, on ne peut que féliciter les éditions Interférences pour le soin apporté à la présentation, à la mise en page, à la beauté même du papier utilisé. Remarquable aussi en tant que texte, chacun sait, ou du moins devine, les difficultés qu’il y a à traduire la poésie russe ; les précédents traducteurs de Tiouttchev, tant Paul Garde que François Cornillot avaient déjà averti leurs lecteurs des difficultés d’une telle entreprise. Remarquable, enfin et surtout, est l’idée même d’éditer un livre de Tiouttchev, car, comme l’écrit Sophie Benech dans son avant-propos : « Le nom de Fiodor Tiouttchev est peu connu des lecteurs français, pour ne pas dire totalement inconnu ».

    Le poète

    Cette ignorance du public français est regrettable, car de l’avis même des écrivains et des poètes russes, Tiouttchev (1803-1873) est l’un des plus importants d’entre eux. Tolstoï a été jusqu’à affirmer que « sans lui, on ne peut pas vivre … ». Une telle appréciation est largement partagée, Paul Garde rappelle que Dostoïevski  l’appelait « notre grand poète » et que Tourguéniev disait : « On ne discute pas Tiouttchev, celui qui ne le sent pas ne fait que montrer qu’il ne sent pas la poésie elle-même ». Il est vrai que Tiouttchev n’a jamais cherché la célébrité. Né dans une famille noble, Tiouttchev entre à 19 ans dans la carrière diplomatique, il est en poste pendant de très longues années à Munich, retourne enfin en Russie où il est nommé responsable de la censure au ministère des affaires étrangères. Il a écrit de nombreux poèmes, souvent courts, mais n’a pas cherché ni à les faire connaître ni à les publier. Ce sont d’autres poètes qui ont édité quelques-unes de ses poésies, l’auteur lui-même ne parlant que peu de son œuvre. La renommée de Tiouttchev a donc été relativement tardive et d’abord limitée à un public restreint. Aujourd’hui il est, en Russie, assez connu, certaines de ses poésies ont été accompagnées de musique, et d’autres sont particulièrement célèbres parce qu’elles expriment certains aspects de la nature humaine, mais aussi de la Russie.

    Remercions donc les éditions Interférences de contribuer à faire connaître la poésie de Tiouttchev et félicitons-la du choix qu’elle a fait parmi les poèmes. On peut ainsi lire une nouvelle traduction de Larmes humaines :

    « Larmes humaines, ô larmes des hommes, / Vous coulez au matin et au soir de la vie … / Vous coulez inconnues, vous coulez innombrables, / Vous coulez invisibles et intarissables, / Vous coulez comme coulent les ruisseaux de pluie, / Dans la profonde nuit, à la fin de l’automne. »

    Certes, ce livre contient moins de poèmes que les traductions précédentes de Paul Garde et de François Cornillot, mais si le but est de faire connaître Tiouttchev, l’ensemble est appréciable, et l’on peut même découvrir dans ce recueil une poésie qui n’était pas encore traduite, à savoir celle consacrée à Cicéron.

    Si Tiouttchev a été un grand poète, il a été surtout apprécié en son temps pour ses engagements en faveur de la politique russe, en tant que cette dernière défendait la chrétienté, contre tout ce qui venait de l’influence révolutionnaire. Sophie Benech reconnaît que Tiouttchev était même plus connu en tant qu’écrivain politique qu’en tant que poète : « De fait, ses interlocuteurs, qui font tous partie du grand monde, le connaissent plus pour ses prises de position et ses écrits slavophiles et absolutistes que pour ses vers lyriques ». Le livre édité par les éditions Interférences n’aborde pas cet aspect de l’oeuvre de Tiouttchev, les traducteurs antérieurs non plus, François Cornillot ayant privilégié les poésies se rapportant à la nature, ou plutôt aux éléments de la nature, comme l’eau, l’arbre etc. voyant dans l’évocation de la nature, la présence d’une transcendance, et quant à Paul Garde, tout ce qui est politique a été mis par lui de côté, au prétexte, à notre avis discutable, que les poésies politiques ou de circonstance sont « bien inférieures aux autres ».

    Le penseur contre-révolutionnaire

    Si donc le livre Poèmes de Tiouttchev publié par les éditions Interférences a le mérite d’attirer l’attention du public français sur une partie de l’oeuvre du poète russe, il ne sera peut-être pas inutile, dans les quelques lignes qui suivent, de présenter, brièvement, l’autre aspect de l’oeuvre de Tiouttchev, à savoir ses idées politiques et philosophiques. Tiouttchev a écrit la plupart de ses poésies en langue russe, il a cependant rédigé ses textes politiques dans une langue française pure et élégante, telle qu’on la pratiquait dans les milieux russes cultivés du XIX° siècle. On peut les lire aujourd’hui dans le tome 3 des Oeuvres Complètes de Tiouttchev, éditées à Moscou.

    Par sa position de diplomate russe à Munich, ville dans laquelle il a été en poste pendant vingt-deux ans, Tiouttchev était bien placé pour connaître les événements européens tant politiques que philosophiques. Il a connu personnellement Schelling et d’autres écrivains allemands, notamment Heine avec lequel il fut assez proche, mais c’est surtout à la culture française que Tiouttchev était sensible. François Cornillot, que nous avons cité plus haut comme traducteur, a aussi écrit une thèse volumineuse sur notre poète russe, dans laquelle il note qu’à Munich « On se tenait au courant de tout ce qui se publiait à Paris, on lisait surtout les journaux de Paris […] ». Ce n’est pourtant qu’à son retour définitif en Russie, que Tiouttchev développe ses analyses politiques.

    Il existait alors, si nous nous permettons de schématiser, deux grands courants chez les penseurs russes, ceux qui souhaitaient que la Russie s’inspirât de l’Occident, et ceux qui, à l’inverse, voulaient que la Russie restât elle-même, et fût fière de sa propre culture et de sa religion orthodoxe. Ce deuxième courant regroupait ceux que l’on nommait les slavophiles, dont la figure la plus célèbre a été Khomiakov. Il est à noter que, d’une certaine manière, cette division se retrouvait dans la politique du gouvernement russe, hésitant entre la défense des intérêts de la Russie et une influence non négligeable de l’Occident.

    Tiouttchev se range résolument dans le camp des slavophiles et exalte les valeurs de la Russie en tant qu’empire chrétien :

    « La Russie est avant tout l’empire chrétien : le peuple russe est chrétien non seulement par l’orthodoxie de ses croyances, mais encore par quelque chose de plus intime encore que la croyance. Il l’est par cette faculté de renoncement et de sacrifice qui fait comme le fond de sa nature morale. »

    Le poison de la Révolution

    Contemporain de la Révolution française de 1848, Tiouttchev en dénonce les effets, lesquels ne concernent pas seulement la France, mais l’Europe entière. C’est tout l’Occident qui est contaminé par le poison révolutionnaire : « la Révolution est la maladie qui dévore l’Occident ». Cette révolution cependant n’est que la suite de celle de 1789, c’est donc de cette dernière qu’il importe de montrer le principe, si l’on veut comprendre ses suites au siècle suivant. La Révolution française de 1789 n’est pas seulement un événement politique au sens où il ne s’agirait que d’un changement de régime, elle est bien plus que cela : elle est une insurrection contre la religion.

    « La Révolution est avant tout anti-chrétienne. L’esprit anti-chrétien est l’âme de la Révolution ; c’est là son caractère essentiel. Les formes qu’elle a successivement revêtues, les mots d’ordre qu’elle a tour à tour adoptés, tout, jusqu’à ses violences et ses crimes, n’a été qu’accessoire ou accidentel ; mais ce qui ne l’est pas, c’est le principe anti-chrétien qui l’anime […] ». La Révolution est donc un événement capital dans l’histoire de l’humanité : « Ce qui fait de la première révolution française une date à jamais mémorable dans l’histoire du monde, c’est qu’elle a inauguré pour ainsi dire l’avènement de l’idée anti-chrétienne aux gouvernements de la société politique

    Comment se caractérise cet anti-christianisme ? C’est bien sûr le refus de toute transcendance divine, mais Tiouttchev décrit cela d’une manière saisissante, en empruntant un mot fort employé dans la philosophie de son époque, d’abord par Fichte, puis par Stirner, un mot dont l’usage et les ravages n’ont fait que grandir jusqu’à nos jours, un mot pourtant tout simple : le moi.

    « Le moi humain, ne voulant relever que de lui-même, ne reconnaissant, n’acceptant d’autre loi que celle de son bon plaisir, le moi humain, en un mot, se substituant à Dieu, ce n’est certainement pas là une chose nouvelle parmi les hommes, mais ce qui l’était, c’est cet absolutisme du moi humain érigé en droit politique et social et aspirant à ce titre à prendre possession de la société. C’est cette nouveauté-là qui est appelée la Révolution française. »

    Tiouttchev ne manque pas de fustiger certaines caractéristiques de la mentalité révolutionnaire. L’idée de souveraineté du peuple tout d’abord, laquelle n’est que le corollaire du triomphe du moi, car qu’est-ce que le moi, sinon « cette molécule constitutive de la démocratie moderne » ? La souveraineté du peuple n’est rien d’autre que « celle du moi multiplié par le nombre ». Autre caractéristique de la mentalité révolutionnaire : la prétendue neutralité religieuse de l’État républicain, neutralité qui n’est qu’un mensonge : « Rétablissons donc la vérité des faits. L’État moderne ne proscrit les religions d’État que parce qu’il a la sienne, et cette religion, c’est la Révolution ».

    Selon Tiouttchev, tout l’Occident est corrompu ou va être corrompu par l’idéologie révolutionnaire ; si la France a une grande part de responsabilité, l’Allemagne n’est pas en reste, une philosophie destructive y a « complètement dissous toutes les croyances chrétiennes et développé, dans ce néant de toute foi, le sentiment révolutionnaire par excellence : l’orgueil de l’esprit, si bien qu’à l’heure qu’il est, nulle part peut-être cette plaie du siècle n’est si profonde et plus envenimée qu’en Allemagne ».

    La Russie chrétienne

    Face à cette débâcle, à cet Occident où l’on voit « la civilisation se suicidant de ses propres mains », que faire ? Avoir confiance en la Russie, ou plus exactement dans la mission qu’a la Russie, et cette mission est de sauvegarder la chrétienté. Il s’ensuit qu’entre les idées révolutionnaires venant de l’Occident et la chrétienté russe, il ne peut qu’y avoir conflit. Tiouttchev le dit sans aucun détour :

    « Depuis longtemps il n’y a plus en Europe que deux puissances réelles : la Révolution et la Russie. Ces deux puissances sont maintenant en présence, et demain peut-être, elles seront aux prises. Entre l’une et l’autre il n’y a ni traité, ni transaction possibles. La vie de l’une est la mort de l’autre. De l’issue de la lutte engagée entre elles, la plus grande des luttes dont le monde ait été témoin, dépend pour des siècles tout l’avenir politique et religieux de l’humanité. »

    Que la Russie ait confiance en sa mission, cela implique qu ‘elle soit forte politiquement et militairement, et l’expression de cette puissance doit d’abord être la reconquête par les chrétiens de Constantinople, vœu qui était aussi celui de Joseph de Maistre.

    Tiouttchev espère l’union des deux Églises, la latine et l’orientale, et il va de soi qu’en tant que russe et orthodoxe, cette union est comprise comme le retour de l’Église de Rome vers l’orthodoxie.

    Les événements ont durement éprouvé les idées de Tiouttchev. De son vivant, comme beaucoup d’autres Russes, il a été fort dépité quand, lors de la guerre entre les Russes et les Turcs, le gouvernement russe a finalement laissé Constantinople aux Turcs. Plus tard, l’issue de la guerre entre Napoléon III et la Russie a été aussi amèrement vécue. Qu’eût pensé Tiouttchev s’il avait pu voir les événements de 1917 et l’emprise du communisme en Russie? Sans doute eût-il vu là une épreuve, une douloureuse épreuve. Il est aisé de voir cependant que si Tiouttchev s’est trompé pour ce qui est de l’histoire immédiate, ce qu’il a écrit de son temps n’est pourtant pas sans intérêt pour le nôtre. Le triomphe de l’individualisme, ce que Tiouttchev appelait le moi, est patent en Occident, tout autant que sa décadence spirituelle, bien que les prémices d’un renouveau puissent çà et là apparaître. En Russie, ce renouveau est d’une certaine manière déjà là, ou du moins en marche, puisque le pouvoir politique semble s’appuyer de plus en plus sur la chrétienté. Tiouttchev avait donc raison de croire en la Russie. Une de ses poésies les plus célèbres l’exprime, voici la traduction littérale qu’en donne Sophie Benech :

    « La Russie ne se comprend pas par l’intelligence / Ni ne se comprend à l’aune commune / Elle possède un statut propre / La Russie, on ne peut que croire en elle. »   

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    Domaine natal du poète à Ovstoug

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    Théologie de Joseph de Maistre  de Marc Froidefont  42€

    Marc Froidefont

    Politique magazine

  • Espagne : Franco est de retour

     

    Par Javier Portella

    Au plus chaud de la crise catalane - l'été et l'automne derniers - Javier Portella a souvent éclairé nos propres articles sur les événements d'Espagne, de sa compétence, de sa connaissance des dossiers et du terrain, de ses analyses données dans Boulevard Voltaire. Voici qu'il apporte ici un éclairage neuf à ce qu'il appelle avec simplicité « l’affaire de la dépouille du Caudillo ». L'indignation, les rappels de ce qu'il y eut de positif dans l'action passée de Franco sont insuffisants, rabâchage. Javier Portella - notre confrère espagnol - parle du présent, du régime en place, des perspectives d'avenir. [Boulevard Voltaire, 27.08]. N'oublions pas que la France est intéressée à la stabilité et à l'avenir de l'Espagne.    LFAR

     

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    La figure de Franco est, finalement, ce qui importe le moins dans l’affaire de la dépouille du Caudillo qu’un certain Sánchez (socialiste ayant le pouvoir grâce aux voix des communistes et des séparatistes) veut exhumer de son tombeau au Valle de los Caídos. Ce qui importe par-dessus tout, ce n’est même pas la mise en accusation du régime franquiste. Ou si celle-ci importe, c’est pour une autre raison : pour laver le péché originel du régime actuel et pour consacrer l’une des plus grandes falsifications historiques.

    Le péché originel du régime consiste en ceci : le Caudillo est mort dans son lit, personne ne l’a renversé et c’est bien le franquisme qui a lui-même enfanté, tout compte fait, le nouveau régime libéral, aucun des opposants à Franco – réduits à une insignifiante minorité sociale – n’y ayant joué le moindre rôle. Les gens de gauche ne s’en sont pas encore remis. L’amertume et le ressentiment, voire la haine, envers « l’autre Espagne » ont rempli leurs cœurs (tandis que la droite libérale, craignant d’être accusée de franquiste, se faisait toute petite) et ils ont fini par rompre le pacte tacite signé en 1977 entre les deux Espagne : on tourne la page, on enterre la guerre civile, on oublie les massacres commis de part et autre, les uns pardonnent l’assassinat de Lorca ; les autres, celui de Ramiro de Maeztu et de Pedro Muñoz Seca.

    Ah, ne savez-vous pas qui sont ces deux derniers (et grands) auteurs ? Peut-être ne saviez-vous pas, non plus, que des massacres épouvantables ont été commis par les blanches ouailles d’une République dite démocratique et prise d’assaut par les méchants « fascistes » ? C’est normal : depuis quatre-vingts ans, c’est la seule voix des vaincus de la guerre qui a été répandue partout en Europe. Seule leur version des faits a été offerte.

    C’est cette version – cette falsification historique – que la profanation de la tombe de Franco prétend ratifier. En faisant fi du pacte de réconciliation entre les deux Espagne, cette falsification est aujourd’hui, depuis les médias jusqu’à l’enseignement, constamment répandue partout. En Espagne, mais à l’étranger également. C’est ainsi que, le 24 août dernier, l’essayiste Thierry Wolton écrivait, par exemple, dans les colonnes du Figaro : « Que Franco soit responsable de la guerre civile de 1936-1939 pour s’être levé contre un gouvernement républicain démocratiquement élu est une vérité. »

    Non, ce n’est aucune vérité. D’abord, parce que le gouvernement « démocratiquement élu » lors des élections de février 1936 avait vaincu grâce à un truquage électoral suffisamment prouvé par les historiens. Ensuite, et plus essentiellement, parce que l’enjeu, lors du soulèvement de Franco et des autres militaires, ce n’était pas du tout de contrer la démocratie. C’était de barrer la route à la révolution communiste que les socialistes et leurs alliés au pouvoir – leurs proclamations sont explicites – allaient entreprendre après leur premier coup d’essai échoué deux ans auparavant.

    201511201425-full.jpgQuoi qu’il en soit, comment justifier, dira-t-on, la présence de la tombe du chef d’un État nullement démocratique dans un haut lieu comme le monastère du Valle de los Caídos (l’un des rares chefs-d’œuvre, d’ailleurs, d’une modernité dont l’architecture n’en connaît presque pas) ? À ce compte-là, si les monuments ne pouvaient accueillir que les tombes de dirigeants démocratiques, ce sont d’innombrables exhumations qu’il faudrait entreprendre d’urgence. À commencer par la tombe, aux Invalides, d’un certain empereur et en poursuivant, à l’Escurial, par celles des rois d’Espagne, les révolutionnaires français ayant depuis longtemps devancé monsieur Sánchez et s’étant chargés de la besogne pour ce qui est des tombes des rois de France à Saint-Denis.  ■  

    Écrivain et journaliste espagnol

  • Livres & Histoire • Pour en finir avec Lénine

     

    Par Anne Bernet

     

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    Dès les années 30, il n’ était question que du marxisme-léninisme. Lénine a été statufié, y compris par nos intellectuels français. On sait, aujourd’hui, tout sur l’idole. La Russie officielle ne célèbre plus la révolution d’Octobre, on comprend pourquoi. 

    Journaliste au style imprécatoire, agitateur qui préférait préparer « le grand soir » loin d’un pays où il risquait la prison, mais surtout idéologue prisonnier de sa vision fantasmatique du monde, Vladimir Ilich Oulianov, dit Lénine, n’aurait jamais dû parvenir au pouvoir. Un concours de circonstances néfastes devait pourtant l’y conduire en octobre 1917, pour le plus grand malheur de son pays, et du monde.

    Stéphane Courtois fut communiste ; il rêva de dictature du prolétariat ; il admira Lénine. Il en est bien revenu et a eu le courage, non seulement de le dire mais de partir en guerre contre une conception de l’homme porteuse des crimes les plus sanglants de l’histoire de l’humanité. Continuant son implacable étude du communisme, il publie un Lénine, inventeur du totalitarisme (Perrin), qui met à mal, une fois pour toutes, la vulgate selon laquelle Oulianov aurait été dépassé sur sa gauche par Staline, véritable créateur d’un modèle politique de type dictatorial. Courtois l’affirme, et le prouve, loin d’avoir servi de prête-nom à Staline, Lénine fut le seul responsable de la mise en place du régime de terreur qui s’abattit bientôt sur le pays. 

    Bourgeois anobli et rebelle

    Rien ne prédisposait pourtant Vladimir Ilich, fils d’enseignant anobli, propriétaire foncier, à devenir maître d’œuvre d’une révolution.

    Né en 1870 à Simbirsk, sur la Volga, Vladimir a une enfance heureuse dans un milieu préservé. Ses parents, qui lui transmettent du sang russe, allemand et juif, soutiens fidèles de la monarchie et de l’église orthodoxe, sont ouverts aux idées nouvelles et aux réformes mais rejettent avec indignation les méthodes des groupuscules d’extrême gauche qui veulent obtenir la chute du régime à grand renfort de crimes politiques et de terrorisme.

    Tout bascule lorsqu’en 1886, M. Oulianov est foudroyé par une hémorragie cérébrale. La mort du père arrache aux adolescents leurs repères traditionnels. Quelques mois plus tard, les aînés, Alexandre et Anna, étudiants à Saint-Pétersbourg, sont arrêtés pour avoir participé à une tentative de régicide. Considéré comme l’artificier du groupe, – il étudie la chimie –, Alexandre revendique sa responsabilité dans l’attentat manqué. La vague terroriste qui secoue alors la Russie, causant des milliers de mort n’incite pas la justice à l’indulgence ; condamné à mort, le garçon est pendu en mai 1887, à 21 ans.

    Ce drame décide de l’avenir de Vladimir. L’on peut se demander ce qu’il serait advenu si Alexandre avait été gracié, imaginer son frère se consacrant à ses brillantes études, vivant l’existence protégée d’un « fils de noble héréditaire », ainsi qu’il aime à se décrire. Mais Alexandre est exécuté et le cadet, qui s’identifie désormais à lui, part dans une dérive vengeresse, se vouant à la cause pour laquelle il est mort. Son renvoi de l’université pour activisme n’arrange rien ; il occupe ses loisirs à dévorer la littérature révolutionnaire dont, bientôt, il se fera le théoricien. Stéphane Courtois, qui a choisi d’écrire, non une biographie classique, mais une histoire de l’idéologue, analyse par le menu ces lectures, leur influence. Très vite, le jeune homme théorise sa propre vision de la révolution, qui ne saurait admettre aucun compromis, aucune solution pacifique, aucune évolution lente, aucune entente avec les mouvements socialistes réfutant l’action violente.

    Comme l’explique Dominique Colas dans une étude serrée des années qui suivent la Révolution d’Octobre, Lénine (Fayard), Vladimir Ilich, qui ne sera jamais un homme d’action, – Courtois souligne combien le courage physique lui fait défaut … – est un maître du discours et de l’écriture, un imprécateur, et il s’en servira afin d’éliminer tous ceux qui se mettront en travers de ses projets et de ses ambitions.

    Pourtant, en dépit de ses incontestables qualités, son intelligence, son charisme, ses dons oratoires, Oulianov semble voué à la descente aux enfers des déclassés et des ratés. S’il a pu reprendre ses études universitaires et devenir avocat, il est arrêté en 1895 pour son action subversive et déporté en Sibérie, près de la Lena, fleuve qui lui inspirera son nom de guerre. Détention plutôt douce, qui lui permet de vivre aux frais de l’État, de continuer à lire, écrire, préparer la révolution, et d’épouser une camarade de lutte, Nadedja Krouspkaia, vertueux laideron marxiste qui lui servira de femme à tout faire avec un dévouement aveugle. Elle l’accompagne dans un exil qui, d’Autriche en Pologne, de Finlande en France, de Suisse en Allemagne, même adouci par les subventions du Parti révolutionnaire dont il a réussi à prendre la direction, semble ne devoir jamais finir. En 1916, alors que la guerre, en empêchant que lui soient versés ses subsides, met Lénine dans une position financière intenable, il désespère complètement de la révolution.

    La révolution sert Lénine

    Comme déjà en 1905, les événements de 1917 prennent de court cet homme détaché de la réalité. Mais, cette fois, Lénine est en Russie, où il s’est fait rapatrier d’urgence par les Allemands, contre promesse, s’il prend le pouvoir, de faire sortir son pays du conflit. Les tombeurs de la monarchie, pétris de principes bourgeois, ne tarderont pas à comprendre qu’ils ne sont pas de taille à lutter contre un adversaire pour qui arriver au pouvoir et le conserver excuse et justifie tout.

    Courtois a des pages flamboyantes et terrifiantes sur la pensée de Lénine, son opportunisme glacial, son caractère, son incapacité voulue et assumée à éprouver des sentiments normaux, à commencer par la compassion, qu’il abhorre. Cela explique la suite.

    Lénine, il le reconnaît lui-même, ne connaît rien ni de la vie réelle, à laquelle il ne s’est jamais frottée, ni de la Russie, imaginée à travers ses fantasmes. Fils de bonne famille, il déteste la paysannerie. En 1891, il a froidement laissé mourir de faim ses moujiks sans fournir le moindre secours. Désormais, il doit confronter son idéologie à la réalité. Bien entendu, elle s’y brisera mais, en révolutionnaire conséquent, il fera en sorte, non de réformer sa pensée fautive, mais d’épurer la société russe qui ne sait pas s’adapter aux grandioses visions de son génie.

    Pour cela, il a besoin d’armes ; ce seront la Tcheka et l’Armée rouge, dont il couvrira sans états d’âme les pires exactions. À l’instar de Robespierre, son idole, il sera toujours informé des crimes commis par ses agents sur le terrain, prévenu qu’il a donné les pleins pouvoirs à des bandits de grand chemin défoncés à la cocaïne et la vodka. Il laissera faire. Pareillement, et Courtois est sur ce point formel, il prendra seul, en juillet 1918, la décision de liquider la famille impériale sans procès, faisant poursuivre et exécuter tous les Romanov encore présents sur le territoire soviétique. Toujours inspiré par Robespierre, il entreprend d’anéantir les « Vendée russes », qu’il s’agisse des armées blanches ou des cosaques du Don. Ainsi forge-t-il en peu de temps tous les instruments de coercition qui permettront, entre les mains de Staline et de ses successeurs, de durer par la terreur.

    Photo-histoire-3.jpgMais les faits sont tenaces. La construction du paradis rouge se révèle plus difficile que prévu, impossibles peut-être. Effet de la désillusion, et du surmenage, Lénine meurt, victime d’accidents cérébraux répétés qui l’ont laissé intellectuellement amoindri, le 21 janvier 1924.

    Restait à rendre à sa dépouille momifiée un culte idolâtrique, satanique eût dit le cher Volkoff, qui compte encore des adeptes.

    Quant au bilan de sa tyrannie, Witte, le ministre de Nicolas II, l’avait prophétisé dès 1905 : « Ces tentatives (pour mettre en œuvre le « socialisme ») échoueront, mais elles détruiront la famille, l’expression de la foi religieuse et tous les fondements du droit. » Il avait raison. Cent ans après, nous le constatons tous les jours. 

     

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    Parade sur la place rouge, lors du 15e anniversaire de la révolution d’octobre : 1932

     

    Lénine inventeur du totalitarisme
    Stéphane Courtois – Perrin, 500 p, 25 €.

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    Lénine
    Dominique Colas – Fayard, 525 p, 25 €.

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