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Actualité Monde - Page 112

  • Terrorisme : Présomption républicaine

     

    par Olivier Pichon

    La république est présomptueuse. Elle pense déradicaliser les terroristes potentiels. Cela a été annoncé à grand renfort de trompes médiatiques.

    Radical, déradicalisation : c’est, au sens étymologique, arracher les racines. La question se pose donc de savoir si les intéressés ont des racines, ce dont on peut douter. Nés en France pour la plupart, ils s’inventent  en réalité des racines qu’ils supposent être celles de leur origine ethnoculturelle. En revanche leur structure psychologique est simpliste : une dose de fascination pour la violence, beaucoup de frustration, une eschatologie vague sur le retour du califat et l’illusion qu’ils se déterminent seuls alors qu’ils sont le jouet des puissances du théâtre de la guerre en Syrie : Turquie, Qatar et Arabie saoudite. Mais ils sont aussi le jouet des puissances occidentales qui sont allées chercher au Proche-Orient des succès militaires aventureux pour détourner l’attention sur leurs problèmes internes. Il suffit de considérer la gourmandise avec laquelle notre président de la République s’est emparé des attentats de 2015. Enfin, le terroriste potentiel se sent «  autre », étranger au pays où il est né : le rejet de l’altérité non islamique va chez lui jusqu’à la névrose.

    Echec prévisible

    Le résultat est prévisible : la « déradicalisation » sera un échec. On peut cesser d’être djihadiste, on peut difficilement modifier sa façon de l’être. La taqyia aidant, les  « travailleurs sociaux » créés à cette fin seront dupes de la dissimulation. D’ailleurs, nos radicaux  «  indigènes » ne le sont-ils pas toujours ? Voyez Jean-Marc Rouillan. L’assassin d’Action directe a déclaré que les petits gars du Bataclan avaient bien travaillé mais qu’ils auraient pu faire mieux… Nous ne savons pas si ce sinistre personnage, qui était en liberté surveillée, est retourné en prison. Dans son cas, on aurait tendance à soupçonner les juges de quelque indulgence. Car la vraie question est là. La déradicalisation étant vouée à l’échec, il faut incarcérer ou expulser. Seulement, les juges si prompts à traquer des arrière-pensées racistes chez le péquin lambda, ne peuvent agir contre les terroristes islamistes qu’en cas de passage à l’acte. Et pourtant, imaginons, ce qu’à Dieu ne plaise, qu’un militant d’extrême droite soit soupçonné de radicalisation… Pas besoin d’être Jérémie comme disait ce cher Brassens pour deviner le sort qui lui serait réservé !

    Impuissance du catéchisme républicain

    Nous baignons ainsi dans la plus totale hypocrisie. La marâtre républicaine a ses chouchous. Elle va servir à ces graines de radicaux un prêchi prêcha sur les fameuses mais introuvables valeurs de la république ! Catéchisme bien pauvre qui, précisément, sera de nature à renforcer leur radicalité puisque c’est justement ce moralisme à deux sous qui les révulse.

    En plus, le terrorisme étant totalement décentralisé, ses acteurs agissent de façon indépendante, aléatoire voire improvisée. Ils ne sont pas des soldats ou des militants d’un parti, construits sur la rationalité de la guerre idéologique ou militaire.  Inutile de vouloir les «  retourner » ou les «  convertir ». Les chances de conversion sont d’autant plus minces que la République n’a, en ce domaine, absolument pas les moyens de ses ambitions. Son corpus idéologique, proposé comme prix de la conversion, est trop faible, trop léger.

     Il reste une solution, mais celle-là n’appartient pas à la République. C’est la conversion de Dismas, le bon larron, au Golgotha : «  Ce soir tu seras avec moi en paradis ! ». Ce paradis n’est certes pas celui du Coran. Quant au paradis terrestre socialiste et républicain, nous avons déjà donné pour les lendemains qui chantent…   

    Enseignant, journaliste et homme politique français

  • Le prince Jean explique le sens de son récent voyage en Syrie : « Témoigner de l'amitié de la France »

    Le prince Jean de France au Krak des Chevaliers 

     

    ENTRETIEN. L'héritier des rois de France, le prince Jean, accompagnait Mgr Rey en Syrie, du 28 mars au 2 avril dernier, semaine pascale. Il a donné à Politique magazine l'entretien qui suit [Numéro de mai – Chrétiens d’Orient, encore un souffle]

     

    P Jean Syrie.jpgMONSEIGNEUR, POUVEZ-VOUS EXPLIQUER VOTRE PRÉSENCE EN SYRIE AVEC LA DELEGATION FRANCAISE

    Mgr Rey est un ami. Il sait que j'ai tissé des liens forts avec le Proche-Orient. En octobre dernier, il m'a donc demandé de prononcer quelques mots après un concert caritatif organisé à Toulon au profit de SOS Chrétiens d'Orient. La recette a permis de financer une maison pour handicapés à Yabroud, ce qui me tenait à coeur. Quand il m'a proposé de l'accompagner en Syrie pour ce voyage, je n'ai pas hésité une seconde.

    PARLEZ-NOUS DE CES LIENS...

    Je ne connaissais pas la Syrie, mais je me suis rendu à quatre reprises au Liban. A chaque fois dans des perspectives différentes : politiques, sportives, amicales... J'y ai même présidé le bal des débutantes en 2010 ! Au Liban ou en Syrie, il me semble qu'en tant qu'héritier des rois de France, descendant de saint Louis et de François Ier, mon rôle est de donner un témoignage vivant de l'amitié historique qui unit notre pays et les chrétiens d'Orient. Et tant pis pour les vicissitudes politiques du moment. D'ailleurs, pour ma part, je ne vois pas comment on pourrait ne pas intégrer Assad dans la résolution du conflit sans risquer un chaos complet.

    CE N'EST PAS LA POSITION ACTUELLE DE NOTRE GOUVERNEMENT.. QUE PENSEZ-VOUS DE LA SITUATION EN SYRIE ?

    L'erreur est de plaquer nos habitudes de pensées et nos notions propres sur les réalités complexes de l'Orient. Hélas, c'est ce que font la plupart des médias occidentaux ! Ici, c'est l'équilibre confessionnel qui détermine le « vivre ensemble ». C'est pourquoi je suis persuadé que la voix de l'Église est très importante, car elle est à la fois réaliste et modérée. Minoritaires, les chrétiens sont aujourd'hui un symbole d'espérance pour ce pays. Ils reconstruisent écoles, logements, églises... Aidons-les à se réinstaller ! Cela facilitera le rétablissement des relations entre communautés. De mon côté, j'y trouve un encouragement à continuer mon travail sur l'enracinement, action que je mène avec mon association Gens de France auprès des jeunes générations et en particulier celles d'origine immigrée...

     

  • Jacques Myard à propos du TAFTA : « L'Europe ne doit plus être à la botte des Etats-Unis »

     

    François Hollande a rencontré Barack Obama, Angela Merkel, Matteo Renzi et David Cameron lundi 25 avril, à Hanovre, sur fond de tensions en Europe au sujet du traité transatlantique. Pour Jacques Myard, l'opacité des négociations est anti-démocratique [Figarovox 25.04]. Il est surtout d'avis - et nous le sommes aussi - que les conditions dans lesquelles ce traité se négocie sont contraires à notre souveraineté et qu'à son stade actuel l'appliquer serait contraire à nos intérêts. Jacques Myard a raison  LFAR

     

    904710507.jpgLe président des Etats-Unis a exprimé le souhait que les négociations concernant le TAFTA soient terminées d'ici la fin de l'année 2016. Que cela vous inspire-t-il ?

    A ce jour, nous n'avons aucune idée précise et tangible de ce que contient ce traité de partenariat transatlantique. Ces négociations s'orchestrent en l'absence totale de transparence.

    En commission des affaires européennes j'avais vivement protesté contre les conditions scandaleuses dans lesquelles les parlementaires français ont la possibilité de consulter l'état des négociations entre les Etats-Unis et la Commission européenne :

    Cette consultation se passe dans une salle sécurisée au secrétariat des Affaires européennes du gouvernement français. Les députés ont l'interdiction de prendre des documents avec clé USB, et demeurent sous la surveillance permanente d'un fonctionnaire, dans un temps limité, et au passage, exclusivement en anglais. Ce ne sont donc plus les États qui mandatent la Commission mais la Commission qui soumet les États à sa botte… elle-même aux ordres de Washington.

    Il n'y a donc aucune nécessité à précipiter les choses, quoiqu'en dise Barack Obama. La France n'a pas à redorer le blason pâlissant d'un président américain en fin de mandat.

    D'autre part nous savons pertinemment que le commerce mondial se développe très bien indépendamment de ce type d'accords ; hors crise, il croit de 7 % par an sans traité de ce type… C'est pourquoi je suis très réticent à accélérer le processus et fort sceptique quant à la nécessité finale d'un tel accord.

    En quoi les élus français pourraient-ils avoir une influence sur les négociations ?

    Je demande à ce que ce traité soit soumis au parlement français, et pas seulement au niveau européen. Il est largement question de la souveraineté de la nation. La Commission est en train de prendre des positions qui outrepassent son mandat.

    Sur la question des clauses d'arbitrage, de la création d'une cour indépendante d'arbitrage public, il est fondamental que l'Etat français se positionne. Pour être au minimum démocratique, cet accord devra impérativement être soumis à ratification ou approbation des parlements nationaux.

    Barack Obama affirme que cet accord permettra un relèvement des normes, et non son abaissement. Cette promesse vous paraît-elle crédible ?

    Les normes sanitaires américaines mettront en péril la qualité des nourritures venant des Etats-Unis en Europe. Notre pays met l'accent sur la qualité de la nourriture, à l'opposé de leurs méthodes de lavage des poulets au chlore ou de bœuf aux hormones…

    D'autre part, si l'accord n'est pas approuvé par une majorité qualifiée du congrès, les États fédérés des Etats-Unis ne l'appliqueront pas. Tant que nous n'aurons pas la garantie que l'accord sera appliqué côté américain, inutile de le signer. La réciprocité est le gage essentiel de la loyauté d'un accord.

    Ce sujet, comme l'extraterritorialité du droit américain doit être abordé franchement avec les Etats-Unis. Ce pays a trop tendance à outrepasser ses compétences juridictionnelles pour imposer des sanctions aux sociétés étrangères, dont françaises, au seul motif qu'elles ont utilisé le dollar…

    François Hollande rencontre Angela Merkel, Barack Obama, David Cameron et Matteo Renzi à Hanovre, pour évoquer les «grands sujets internationaux». Le président a précisé qu'il n'évoquerait pas le sujet du TAFTA car il est «trop impopulaire»…

    Ce sujet est une preuve supplémentaire du fait que M. Hollande refuse d'agir en chef d'Etat. Il ne veut pas se résoudre à parler franchement, droit dans les yeux aux Américains. Il est pourtant devenu plus que nécessaire de poser des limites à leur hubris et à leur volonté de puissance démesurée… 

    Jacques Myard est député-maire de Maisons-Laffitte (Yvelines). Il est également président du Cercle Nation et République.

    Entretien réalisé par Eléonore de Vulpillières

  • « Encore et toujours l'axe germano-américain » vu par Éric Zemmour

     

    L'Allemagne est devenue l'interlocuteur incontournable des États-Unis en Europe, brisant les dernières illusions françaises d'un couple franco-allemand au premier plan. Grand lecteur de Jacques Bainville, Eric Zemmour [Figaro magazine du 29.04] analyse la situation présente à la lumière d'un siècle d'histoire. Dont Bainville a démonté les mécanismes en son époque, qui, à bien des égards, préfigure le nôtre. Zemmour prolonge l'analyse jusqu'à nous avec pertinence. Et, comme au siècle dernier, la faiblesse de la France tient de même en tout premier lieu à son système politique. LFAR            

     

    XVM46b79742-8908-11e5-8758-aadd64fa74f8.jpgIl ne fait même plus semblant. Quand Obama vient en Europe, il ne s'arrête qu'à Berlin. Ne discute qu'avec Angela Merkel. Ne fait l'éloge que de la chancelière. La petite classe française, italienne, et même anglaise, est priée de se déplacer. Comme si les Américains avaient fini par trouver le fameux numéro de téléphone que Kissinger cherchait en vain pour l'Europe ; un numéro à l'indicatif berlinois. Comme s'il y avait la première et la deuxième division. Une hiérarchie qui ruine les illusions françaises sur le couple franco-allemand. Quand on se souvient que le général de Gaulle comptait sur l'Europe des six - dirigée par la France - pour «retrouver la place qu'elle avait perdue depuis Waterloo, la première du monde» - on évalue à sa juste mesure la décadence française. Et l'éclat de la revanche allemande. Obama n'est pas le seul à agir ainsi. Le sultan turc Erdogan a, lui aussi, négocié en tête-à-tête avec Merkel l'affaire des réfugiés syriens.

    Les Turcs ont renoué avec le tropisme berlinois des Ottomans. L'Amérique aussi. Les deux guerres mondiales ne doivent pas nous aveugler. A chaque fois, le ralliement américain aux armées franco-anglaises fut tardif et décisif. Mais il effaçait surtout dans les mémoires le soutien constant que l'Amérique avait apporté à son adversaire allemand. Soutien financier, diplomatique, et idéologique qui renforçait une proximité née de l'immigration allemande en Amérique, et d'une même obsession de la puissance industrielle, qui fonde l'impérialisme des armes. En 1870, les Américains se réjouissaient déjà de la défaite de Napoléon III dont ils venaient de se débarrasser dans leur arrière-cour mexicaine. A la fin de la Première Guerre mondiale, ils empêchaient Foch et Pétain de rentrer victorieux à Berlin. Les Allemands resteront persuadés de ne pas avoir perdu la guerre. Pendant les années 20, les Américains soutiennent financièrement, médiatiquement et diplomatiquement la «pauvre» République de Weimar assaillie et occupée par les «méchants» bellicistes français. Ce soutien, financier en tout cas, se poursuivra encore sous Hitler. Après 1945, les Français et les Anglais ont convaincu les Américains de transformer l'Allemagne en pays agricole. Mais ceux-ci font marche arrière. La menace soviétique fait taire les récalcitrants. En 1963, Kennedy prononce le fameux discours « Ich bin ein Berliner », non pour défendre Berlin contre les chars russes, mais pour couler l'alliance privilégiée des «deux vieillards», Adenauer et de Gaulle, scellée quelques mois plus tôt. Et en 1990, alors que Margaret Thatcher menace Kohl d'une guerre, c'est l'Américain Bush qui donne sa bénédiction à la réunification allemande. La messe est dite. La France a renoncé à se battre. La France de Sarkozy essayait d'être reconnue par le maître américain comme le meilleur élève de la classe otanienne. Ambition dérisoire que Hollande n'a même plus. 

    Eric Zemmour           

  • Et si on laissait un peu le Maroc tranquille ?

    Marche homo à Paris en 2015 © Copyright : DR

     

    Par Peroncel-Hugoz

    Cette fois-ci notre confrère a essayé de se mettre à la place du Marocain moyen face au déferlement grandissant de pressions extérieures pour remodeler le Royaume selon des normes « mondialistes » …

     

    peroncel-hugoz 2.jpgUn jour ce sont les « avocats socialistes de Wallonie », un autre les « féministes radicales » de Barcelone ou Nantes , et ensuite, au choix, des partisans français radicaux de « l’abolition de la peine capitale au Maroc », des militantes genevoises « contre le travail des enfants », ou bien des tenants de la « théorie du genre » (gender studies), se disant mandatés par l’Union européenne ou par dieu sait quelle université germanique ou hexagonale, etc … Arrêtez, n’en jetez plus, bientôt à ce rythme, plus un jour ne se lèvera sur le Maghreb sans que ne débarquent, le verbe haut, à Tanger, Rabat, ou Laâyoun des délégations plus ou moins officielles, d’ « assoces » ou d’ONG, qui, avant un long week-end branché de « Kech » ou sur une plage sans mikas d’Agadir ou Larache, chercheront à ameuter des Marocains pour qu’ils se « mobilisent » contre la loi locale sur l’avortement, l’inversion sexuelle, l’héritage inégal ou tout autre sujet choquant l’ultra-sensibilité occidentale. Sans parler des spectaculaires exhibitions de Femens à Rabat, face au Mausolée royal, ou à Béni-Mellal, symbole du Maroc profond, exhibitions organisées pour forcer les autorités marocaines à adopter en matière de mœurs des mesures libertaires semblables à celles qui se sont mises en place en Occident ces derniers lustres … 

    La palme récente des intempestives tentatives d’ingérence dans les affaires intérieures du Maroc revient sans doute à cette chanteuse corso-séfarade au prénom de série nord-américaine, Jenifer, artiste en perte de vitesse en Europe, et qui pour faire parler d’elle, a profité d’une prestation lors d’un défilé de mode en musique au Maroc, pour mettre en demeure les autorités du pays d’abroger l’article du code pénal en vigueur (d’ailleurs très rarement appliqué) prévoyant jusqu’à 3 ans de prison pour des cas avérés d’homosexualité. De quoi je me mêle, Madame Jenifer ?! Imagine-t-on le tintamarre médiatique qui se déclencherait illico outre-Méditerranée si tel artiste maghrébin profitait d’une performance en Catalogne, sur la Côte-d’Azur ou les bords de Seine, pour prêcher en faveur de la polygamie, de la circoncision ou des aliments halal ? 

    Pays généralement poli et mesuré, attentif aussi à ses intérêts touristiques (rien n’est plus volatil que le touriste …), mais jaloux quand même de sa souveraineté, le Maroc s’efforce le plus souvent de ne pas perdre patience devant ce harcèlement moral de plus en plus insistant, y mettant quand même le holà lorsque les bornes de l’outrecuidance sont plus que dépassées, par exemple quand le bateau-clinique d’avorteuses bataves fut interdit à proximité des ports de Chérifie. Les groupes de pression étrangers, culottés mais quand même pas téméraires (et puis Tizi-Ouzou ou même Tipaza n’ont pas les « charmes » de « Kech » ou  Essaouira …) usent et abusent de la bienveillance marocaine, mais ils ne se risqueraient évidemment pas à essayer d’aller porter leurs « bonnes paroles » en Algérie, Turquie ou Egypte sans songer un instant même à l’Arabie… 

    Justement, venons-en maintenant aux sonores manifs désormais programmées à l’avance pour contraindre Rabat à abolir la peine capitale ; Rabat qui bien sagement, n’a pourtant pas exécuté un seul condamné, si grave soit son crime,  depuis 1993. Indulgent (et habile), le Maroc vient même d’autoriser sur son sol la tenue, en 2016, d’un « Festival du film contre la peine de mort » (sic) Néanmoins, les vitres trembleront sans doute encore sous les cris des abolitionnistes à Rabat ou Casa, voire Khénifra ou Tétouan, mais aucun danger que ce soit le cas en Chine (record mondial des exécutions capitales dont le chiffre exact est secret d’Etat), en Iran (plus de 1000 exécutions en 2015), en Arabie (151 en 2015), ou aux Etats-Unis d’Amérique ( 28 en 2015) … •

    Lire : François Bonjean, « L’âme marocaine vue à travers les croyances et la Politique » , 1948, réédité en 2016 par Afrique-Orient, Casablanca ; Elie Faure « L’âme islamique ou de l’érotisme à l’abstraction », in « D’autres terres en vue », Livre de poche, Paris, 1980

    Péroncel-Hugoz

    Repris du journal en ligne marocain le 360 du 29.04.2016

  • D'ACCORD AVEC GUILLAUME ROQUETTE : LA VOCATION DU PAPE N'EST PAS DE SE SUBSTITUER AUX CHEFS D'ÉTAT

     Rome, le 16 avril. Le Pape François souhaite la bienvenue au groupe de réfugiés qui sont repartis avec lui de l'île grecque de Lesbos. AFP/FILIPPO MONTEFORTE/Pool

     

    LA PARABOLE DES 12 MIGRANTS

    C'est sous ce titre empruntant à la terminologie des Ecritures que Guillaume Roquette a traité, dans la dernière livraison du Figaro magazine*, de la délicate question de la politique vaticane dans l'affaire des migrants. Il l'a fait avec finesse et avec tact. Mais aussi avec une justesse de ton et d'analyse que l'on apprécie et que l'on approuve spontanément. Les prises de position du Pape en matière migratoire, les gestes publics qu'il accomplit et sont repris par tous les médias pour être exploités dans le sens qu'on devine, n'engagent pas la politique de la France. Du moins celle qu'elle devrait avoir. Et que, malheureusement, elle n'a pas. LFAR

     

    guillaume_roquette-edito__00000002__d_147_221.jpgEn ramenant avec lui de Grèce douze migrants syriens, le pape François est-il sorti de son rôle ? Difficile de ne pas voir dans son coup d'éclat un acte politique, et c'est d'ailleurs comme tel qu'il a été exploité par les dirigeants européens de tous bords, applaudissant ou critiquant - c'est selon - l'engagement pontifical en faveur d'un accueil plus généreux des réfugiés. En France, on a même vu Jean-Luc Mélenchon crier « Vive le pape ! » (l'Esprit souffle décidément où il veut).

    Au risque de passer pour un jésuite, on voudrait risquer l'hypothèse que le souverain pontife a pu se permettre un geste politique samedi dernier dans la mesure où la politique n'est pas son métier. Quand il embarque des migrants dans son avion, François met strictement en pratique l'amour du prochain auquel est appelé tout catholique, amour d'autant plus gratuit qu'il s'applique en l'occurrence à des musulmans (il paraît que des chrétiens devaient être aussi du voyage, mais qu'ils n'ont pas eu leurs papiers à temps. Si cela est vrai, on imagine que le pape annoncera bientôt leur arrivée au Vatican).

    François s'est donc conduit en autorité spirituelle, traduisant par des actes l'idéal de sa foi. Mais, malgré tout son ascendant moral, il n'a pas vocation à servir de modèle aux gouvernants européens. Le christianisme n'est pas l'islam : la distinction entre le politique et le religieux, entre Dieu et César, est un principe constant en Occident. Et c'est tant mieux. Quand les Etats se mettent à conduire leur politique étrangère en privilégiant les grands principes sur leurs intérêts vitaux, le résultat est généralement désastreux : la diplomatie des droits de l'homme menée par la France en Libye ou en Syrie n'est pas pour rien dans le chaos que connaissent ces pays, et la suppression irréfléchie des frontières dans l'espace Schengen met aujourd'hui en danger l'existence même de l'Union.

    Nous n'avons pas à avoir honte de notre politique vis-à-vis des migrants. L'Europe en a déjà accueilli un million l'année dernière, quand la plupart des pays musulmans, parfois richissimes, leur fermaient obstinément leurs portes. Nous ne pouvons pas, au risque de déstabiliser durablement nos sociétés, accueillir tous les réfugiés - de culture et de religion différentes des nôtres - qui rêvent encore d'entrer en Europe. Avec la fermeture de la route des Balkans, des centaines de milliers de nouveaux migrants vont tenter d'arriver par la Libye. Et cinquante mille attendent encore de quitter la Grèce. Malgré toute sa générosité, le pape n'a pu en emmener que douze.   

    CROOUETTE@LEFICARO.FR
    22 AVRIL 2016 - LE FIGARO MAGAZINE

  • Hubert Védrine [5] : « Le défi de l'islamisme »

     

    Dans son dernier essai, Le monde au défi, Hubert Védrine fait le constat de l'impuissance voire de l'inexistence de la communauté internationale. Il dresse un vaste et éclairant panorama de l'état du monde et des illusions perdues du marché, de la mondialisation heureuse et de l'Union européenne. Secrétaire général de l'Élysée sous François Mitterrand et ministre des Affaires étrangères de 1997 à 2002, Hubert Védrine se distingue par sa finesse d'analyse et sa connaissance précise des dossiers. Loin des incantations et de la dialectique binaire qui tend à remplacer la géopolitique, il défend, à la manière d'un Bainville, une vision réaliste et pragmatique de la politique étrangère. Il plaide pour « un  retour au monde réel, et inévitablement à la realpolitik, moins néfaste que l'irreal politikLafautearousseau en publie au fil des jours des extraits choisis par Vincent Trémolet de Villers pour Le Figaro [8.04].  LFAR 

     

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    Le défi de l'islamisme

     

    Mais venons-en au principal défi actuel en Eurasie et en Afrique : l'affrontement mondial au sein de l'Islam entre le 1 % terroriste, au maximum (impossible à calculer, mais c'est pour souligner que c'est un pourcentage infime), et les autres. Plusieurs scénarios sont possibles. À cheval sur la Syrie et l'Irak, l'État islamique peut s'enkyster, malgré la coalition occidentalo-sunnite et la coalition russo-iranienne, toutes deux plus ou moins convergentes et qui lui ont fait perdre du terrain depuis 2015. L'organisation terroriste peut toujours essayer de déstabiliser une partie du Liban, de la Jordanie, et le nord-ouest de la péninsule arabique. Des entités associées se sont implantées et tentent de s'enraciner au Yémen - d'où la guerre qui fait rage - au Sinaï, en Libye, au Sahel, autour du lac Tchad. Comme elles l'auraient fait au Mali, jusqu'à Bamako, si la France ne s'était pas mise en travers, à la demande et au soulagement des Africains et avec l'accord du Conseil de sécurité. Dans l'hypothèse, la pire, celle où Daesh durerait et s'enracinerait, on ne peut exclure que des États sunnites, faibles ou inquiets, voire d'autres États, finissent par se résigner à traiter avec lui, d'autant que la Turquie restera toujours moins mobilisée contre lui que contre les Kurdes, à l'instar de l'Arabie contre l'Iran, etc.

    Même renforcé internationalement par l'accord de juillet 2015, l'Iran ne peut empêcher à lui seul cet enracinement de Daesh en Irak (sauf à Bagdad et dans le Sud irakien chiite qu'il protège). Il continue probablement à défendre et à utiliser à ses propres fins les chiites (Alaouites) de Syrie, du Liban (Hezbollah), du Yémen (houthistes) et de Bahreïn. L'influence du «califat», s'il dure, se fait sentir aussi en Turquie et chez les 20 millions de musulmans d'Europe. Le statu quo qui s'enkyste pose alors aux voisins de Daesh, mais aussi à l'Occident, à la Russie, à la Chine, etc. un épouvantable dilemme, comparable à ceux qui le paralysèrent durant les premières années du régime bolchevique et du communisme chinois: que faire avec cette entité, si elle n'a pas été éradiquée? Faut-il traiter avec elle? Ce cauchemar est très peu probable, mais il n'est pas totalement impensable.

    À l'inverse, il est possible que Daesh soit non seulement stoppé et affaibli, mais éradiqué, région après région - Syrie, Irak, nord-est du Nigeria, Sinaï, Libye, etc. -, et définitivement vaincu. Cela supposerait que les djihadistes aient été contenus, assiégés, neutralisés, asphyxiés, puis détruits par des coalitions arabo-occidentale-irano-russo-africaines à géométrie variable, mais déterminées et coordonnées, avec des objectifs politiques clairs et conçus au cas par cas (Syrie, Irak, Yémen, Libye, etc.). Ce scénario est apparu envisageable à la fin de 2015, quand a été évoquée une possible «grande coalition». Elle ne s'est pas concrétisée depuis, et l'affrontement Arabie-Iran a repris des formes aiguës.

    Néanmoins, chacun conserve ses propres raisons de réduire à néant Daesh. Cela ne sera possible que si, dans chaque cas, des solutions politiques de remplacement sont trouvées. Et, au-delà du Moyen-Orient, où une place devra être redonnée aux sunnites là où ils ont été marginalisés, cela suppose qu'une vaste, courageuse et efficace contre-offensive théologique et politique sunnite ait réussi à supplanter, partout dans le monde musulman, dans les mosquées, les écoles et sur Internet, dans le monde arabe, mais aussi en Asie, en Afrique, en Europe, l'endoctrinement wahhabite et salafiste qui circule sans entraves depuis des décennies et qui a alimenté et légitimé sans contre-feux un islamisme primaire, inculte et, à l'occasion, meurtrier. Dans ce schéma, l'Arabie serait contrainte, pour sortir du guêpier, car menacée par Frankenstein-Daesh, de clarifier son attitude envers l'islamisme, à l'instar de la Turquie, ce qui redonnerait a l'Égypte du maréchal Sissi un rôle de premier plan.  [Fin]

    Hubert Védrine      

    A lire aussi dans Lafautearousseau :

    Hubert Védrine [1] : « La communauté internationale n'existe pas »

    Hubert Védrine [2] : « L'hubris américaine »     

    Hubert Védrine [3] : « Le marché impuissant »

    Hubert Védrine [4] : « L'Occident désemparé »

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    Le monde au défi, Fayard, 180 p.

  • Hubert Védrine [4] : « L'Occident désemparé »

     

    Dans son dernier essai, Le monde au défi, Hubert Védrine fait le constat de l'impuissance voire de l'inexistence de la communauté internationale. Il dresse un vaste et éclairant panorama de l'état du monde et des illusions perdues du marché, de la mondialisation heureuse et de l'Union européenne. Secrétaire général de l'Élysée sous François Mitterrand et ministre des Affaires étrangères de 1997 à 2002, Hubert Védrine se distingue par sa finesse d'analyse et sa connaissance précise des dossiers. Loin des incantations et de la dialectique binaire qui tend à remplacer la géopolitique, il défend, à la manière d'un Bainville, une vision réaliste et pragmatique de la politique étrangère. Il plaide pour « un  retour au monde réel, et inévitablement à la realpolitik, moins néfaste que l'irreal politikLafautearousseau en publie au fil des jours des extraits choisis par Vincent Trémolet de Villers pour Le Figaro [8.04].  LFAR 

     

    1162846081.jpgL'Occident désemparé  

    La construction européenne, nouvel objet politique aux justifications successives, s'était d'ailleurs voulue depuis l'origine sans racines, sans origines, post-historique et post-tragique, fondée, par génération spontanée, sur le dépassement, voire la négation des nations et des identités des peuples comme sur celui de la puissance. Plus tard, réunis en 2003-2004 au sein de la Convention sur l'avenir de l'Europe, la majorité des représentants des États membres refuserait d'assumer une évidence: les racines chrétiennes de l'Europe. Il s'agissait pourtant de racines, pas de programme! Autre exemple, ses pères fondateurs européens la proclamaient «mère de la paix» («l'Europe, c'est la paix!»), alors qu'elle était plutôt la fille inventive de la paix imposée sur le continent par l'URSS et les États-Unis, les premiers pères fondateurs ayant été Staline par la menace, Truman par la réponse. L'Europe avait été conçue depuis l'origine, selon Monnet et Schuman, sous parapluie américain, sans aucun projet de puissance. Ce manque de racines et de sens assumé (imagerie européenne vide et symboles creux que ne compense pas un drapeau marial détourné) la rattrape aujourd'hui, au point de saper ses fondements.

    À l'opposé, Samuel Huntington avait, dès 1993, alerté sur un risque de «choc des civilisations», notamment entre l'Occident et l'Islam. Que n'avait-il dit! Cela le fit vivement condamner par les chiens de garde de la bien-pensance universaliste, alors dominante en Occident, comme s'il avait préconisé le clash et non pas alerté sur le risque. Quand le président Jacques Chirac me dit un jour de l'année 2002: «Je condamne cette théorie», je lui répondis: «Je combats ce risque, car il y a, de part et d'autre, des minorités qui jouent le clash.» Il reprit: «Mais ce n'est pas un choc de civilisations, ni même de cultures, mais d'incultures!» Et moi: «Vous avez raison, et c'est pourquoi c'est si dangereux.» Les incultures occidentale et musulmane portent en elles le risque d'un affrontement sans fin… Durant la décennie 1990, et encore après, en Europe, le parti du «Bien», qu'aucun doute n'effleure jamais, a continué de postuler comme une évidence que notre universalisme… est universel, même si c'est un universalisme qui s'est sapé lui-même, de l'intérieur, en acceptant les communautarismes et, a l'extérieur, en intervenant militairement plusieurs fois à tort.

    En réalité, personne en Occident n'accepte de se remettre sérieusement en cause en raison de ce que pensent, ressentent et revendiquent les peuples anciennement colonisés ou le monde russe. Non qu'il faille nécessairement leur donner raison, mais au moins les écouter et réfléchir. Pour beaucoup, c'est tout simplement impensable. Américaine ou européenne, la vision occidentale prédominante dans ces années n'a tenu aucun compte de ce que ressentait the rest, c'est-à-dire tous les autres. Ou alors s'est imposé dans certains milieux, et tout spécialement en France, l'excès inverse: culpabilité, repentance et, sous prétexte du rejet de la haine de l'autre, haine de soi.  

    Hubert Védrine      

    A lire aussi dans Lafautearousseau :

    Hubert Védrine [1] : « La communauté internationale n'existe pas »

    Hubert Védrine [2] : « L'hubris américaine »     

    Hubert Védrine [3] : « Le marché impuissant »

    9782213700892-001-X.jpg

    Le monde au défi, Fayard, 180 p.

  • Hubert Védrine [3] : « Le marché impuissant »

     

    Dans son dernier essai, Le monde au défi, Hubert Védrine fait le constat de l'impuissance voire de l'inexistence de la communauté internationale. Il dresse un vaste et éclairant panorama de l'état du monde et des illusions perdues du marché, de la mondialisation heureuse et de l'Union européenne. Secrétaire général de l'Élysée sous François Mitterrand et ministre des Affaires étrangères de 1997 à 2002, Hubert Védrine se distingue par sa finesse d'analyse et sa connaissance précise des dossiers. Loin des incantations et de la dialectique binaire qui tend à remplacer la géopolitique, il défend, à la manière d'un Bainville, une vision réaliste et pragmatique de la politique étrangère. Il plaide pour « un  retour au monde réel, et inévitablement à la realpolitik, moins néfaste que l'irreal politikLafautearousseau en publie au fil des jours des extraits choisis par Vincent Trémolet de Villers pour Le Figaro [8.04].  LFAR

     

    3791358239.jpgLe marché impuissant 

    Avatar économique de la communauté de valeurs : la conviction que le marché - l'économie globale de marché (en l'espèce dérégulée et financiarisée), la « démocratie de marché » - avait vocation à unifier le monde et à dissoudre les identités récalcitrantes comme de vulgaires calculs rénaux. Si la liberté du commerce est un dogme (celui-là même au nom duquel, au milieu du XIXe siècle, l'Empire britannique avait fait la guerre à la Chine pour l'obliger à acheter son opium qu'elle produisait en Inde), le protectionnisme n'est pas une erreur, mais une hérésie. Et tous les particularismes antagonistes de l'Histoire ont vocation à se fondre dans le marché mondial. À l'évidence, ce n'est pas ce qui s'est produit, d'où, entre autres, le piétinement des négociations générales dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce pour ouvrir les marchés et harmoniser les normes. La mondialisation récente a créé des milliardaires à foison et sorti des centaines de millions de paysans (en général asiatiques) de l'extrême pauvreté, mais au prix d'un accroissement faramineux des inégalités de plus en plus insupportable.

    Partie pour être un triomphe de l'Occident, à la fois géopolitique, économique, idéologique, culturel et conceptuel, l'histoire du dernier quart du XXe siècle démontre en fait que les perceptions des peuples ne sont pas devenues homogènes par le miracle de la mondialisation, de la généralisation des portables et d'Internet, de l'action de l'ONU, de la multiplication des sommets, que nos valeurs occidentales universelles ne sont pas partout considérées comme universelles, que les mémoires des peuples ne coïncident toujours pas entre elles, pas plus que leurs espoirs ou leurs craintes. L'histoire reste dans beaucoup de pays un réservoir ou l'on cherche des munitions pour les controverses du moment et les batailles de demain. En France, la névrose est plus forte qu'ailleurs et un roman masochiste antinational prétend y supplanter le simpliste roman national façon IIIe République. On y est passé de l'autoglorification sans nuances à l'autoaccusation expiatoire sans s'être stabilisé de façon consensuelle à l'étape intermédiaire de la lucidité historique. 

    Hubert Védrine      

    A lire aussi dans Lafautearousseau :

    Hubert Védrine [1] : « La communauté internationale n'existe pas »

    Hubert Védrine [2] : « L'hubris américaine »     

    9782213700892-001-X.jpg

    Le monde au défi, Fayard, 180 p.

  • Enfin un socialiste français marocophile et clairvoyant

    © Copyright : DR

     

    Par Péroncel-Hugoz

    Lassé d’avoir toujours à distribuer ses « coups de dent » sur la Toile à la filière algéro-socialiste antimarocaine de Paris, notre confrère a enfin trouvé un socialiste français positif, ce qui lui permet de reposer un peu sa mâchoire…

     

    peroncel-hugoz 2.jpgJ’ai eu tant de fois, sur ce blog, la triste occasion de dénoncer, de « mordre » les intrigues marocophobes de la filière algérienne au sein du Parti socialiste français, actuellement au pouvoir à Paris, que je suis bien aise d’avoir à donner aujourd’hui un coup de chapeau à une figure socialiste française ouvertement marocophile. J’ai nommé Hubert Védrine, qui passa une partie de son enfance au Maroc et fut plus tard le conseiller diplomatique très « gaullien » du président Mitterand, lequel n’était socialiste que de nom, ayant même été en sa jeunesse un fidèle de la dynastie royale française alors exilée au Royaume de Belgique. Ensuite, Hubert Védrine fut, de 1997 à 2002, le ministre des Affaires étrangères, toujours très « gaullien » du gouvernement Jospin, vraiment socialiste lui ( et même jusqu’au trotskysme …), mais heureusement ne manifestant guère d’intérêt que pour la politique intérieure de la France. 

    Hubert Védrine, fils lui-même d’un Français marocophile ayant jadis travaillé dans le secteur privé en Chérifie, n’a jamais caché son empathie pour la politique marocaine tant au Sahara qu’en Afrique noire ou bien en matière intérieure : il s’est élevé contre la détérioration des relations Rabat-Paris en 2014-2015, suite aux manigances de la mafia socialo-algérienne nichée rue de Solférino, siège parisien du Parti socialiste; il a loué la percée économique marocaine au sud du Sahara, jugeant que Rabat et Paris n’étaient pas rivaux mais « complémentaires » en cette partie du monde; il a vanté le « chemin original » que Rabat trace au milieu de la « turbulence arabe » depuis le soi-disant « printemps » de 2011. Enfin, Védrine n’a jamais caché sa réprobation devant le caractère « abusif », un peu partout à travers la planète, de l’ « hyperpuissance » états-unienne. Tout cela plus ou moins au moment où des politiciens de droite (Chirac, Sarkozy, Juppé, etc) ou de gauche (Hollande, Ayrault, etc) mettaient fin sans vergogne aux derniers pans gaulliens de la diplomatie française. On comprend que ni Sarkozy ni Hollande n’aient voulu remettre le talentueux Védrine au Quai d’Orsay où il aurait sans doute essayé de stopper le retour de Paris dans le giron hégémonique nord-américain. 

    En dernier ressort, Hubert Védrine vient de publier à Paris «  La France au défi » (Fayard, 180 pages) d’où nous extrayons pour nos suiveurs quelques formules bien frappées de celui qui reste l’un des rares esprits européens indépendants et décomplexés quand il s’agit des affaires du monde :

     

    MONDIALISATION 

    « La mondialisation récente a créé des milliardaires à foison et sorti des centaines de millions de paysans (en général asiatiques) de l’extrême pauvreté, mais au prix d’un accroissement faramineux des inégalités de plus en plus insupportable »


    FRANCE 

    « En France, la névrose est plus forte qu’ailleurs et un roman national nouveau prétend y supplanter le roman national façon IIIe République. On est passé de l’autoglorification sans nuances à l’autoaccusation expiatoire sans s’être stabilisé à l’étape intermédiaire de la lucidité historique »


    EUROPE  

    « En 2003-2004, au sein de la Convention sur l’avenir de l’Europe, la majorité des représentants des Etats-membres refusa d’assumer une évidence : les racines chrétiennes de l’Europe. Il s’agissait pourtant de racines pas de programme ! »


    «FIN DE L'HISTOIRE » 

    « Le géopolitologue Samuel Huntington avait, dès 1993, alerté sur un risque de « choc des civilisations », notamment entre l’Occident et l’Islam. Que n’avait-il dit ! Cela le fit vivement condamner par les chiens de garde de la bienpensance universaliste, alors dominante en Occident, comme s’il avait préconisé l’affrontement et non pas alerté sur le risque ».


    DAECH 

    « Dans l’hypothèse, la pire, celle où Daech durerait et s’enracinerait, on ne peut exclure que des Etats sunnites, faibles ou inquiets, voire d’autres Etats, finissent par se résigner à traiter avec lui, d’autant que la Turquie restera toujours moins mobilisée contre lui que contre les Kurdes ». 

    « L’influence du « Califat », s’il dure, se fera sentir aussi en Turquie et chez les 20 millions de musulmans d’Europe ».   

    Péroncel-Hugoz

    Repris du journal en ligne marocain le 360 du 15.04.2016

  • Alliances tacites

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

    Petit coup d’accélérateur diplomatique au Proche-Orient. Tous bien conscients de leurs intérêts respectifs, Turquie et Israël semblent décidés à renouer après quelques années de brouille tandis qu’Egypte et Arabie Séoudite jettent un pont sur la Mer Rouge. On sait par ailleurs que le monarque séoudien vient d’être reçu à Ankara comme il se doit par M. Erdogan, que l’Egypte reste le pays arabe pionnier de la paix avec Israël (traité de 1979), que ce même Israël n’a pas protesté contre la cession par l’Egypte à l’Arabie Séoudite des îles Tiran et Sanafir pourtant assez proches de son territoire : plus de doute donc, on assiste bien à la mise en place d’un axe israëlo-sunnite qui ne dit pas son nom ; M. Lavergne, directeur de recherche au C.N.R.S. estime même qu’il s’agit « presque [d’]un renversement d’alliance ». L’explication qui revient le plus souvent est l’attitude des Etats-Unis, jugés trop « naïfs » dans leurs nouveaux rapports avec l’Iran. 

    L’ennemi commun, c’est en effet l’Iran : l’Iran parce qu’il est chiite et au coeur du « croissant chiite », parce qu’il entend jouer son rôle de grande puissance régionale, parce qu’enfin il est susceptible de se doter de l’arme nucléaire. Les choses paraissent donc simples mais se compliquent du fait que Russes et Américains ne peuvent rester insensibles à ce qui se passe en raison de la géographie et de leur propre antagonisme - dont la dernière illustration est, mardi 12 avril, le survol répété par des appareils russes d’un navire de guerre américain dans les eaux internationales de la mer Baltique, survol qualifié d’« agressif », voire d’ « attaque simulée » par l’US Navy ; survol que l’on doit interpréter comme une manifestation de l’exaspération de Moscou face à l’attitude hostile des Etats-Unis sur sa frontière terrestre occidentale. On sait aussi que, si Turcs et Américains sont membres de l’OTAN, Turcs et Russes s’opposent indirectement, par clients interposés, dans le différend Arménie-Azerbaïdjan et plus directement par leurs options en Syrie, comme l’a montré l’incident du 24 novembre - deux F-16 turcs abattant un SU-24 russe qui rentrait d’une mission de combat en Syrie. 

    On ne peut certes pas (pas encore ?) faire de comparaison avec la situation qui prévalait en Europe à la veille de la Première Guerre mondiale, quand deux grandes alliances militaires (Triple-Alliance et Triple-Entente) étaient en place ; on doit quand même admettre que, une fois éradiquée - ou à tout le moins fortement réduite - l’implantation géographique de l’Etat islamique (contre lequel l’engagement français, si minime soit-il, reste justifié au regard des répercussions en France même de l’existence de Daesh), il faudra bien prendre en compte la nouvelle donne géopolitique. C’est toute une politique étrangère, toute une diplomatie qu’il faudra repenser. Que veut la France ? Que peut-elle ? Où sont ses intérêts ? Comment manoeuvrer ? Faudra-t-il choisir un camp ? 

    Voilà qui demande une vision politique d’Etat que n’ont certes pas partagée la plupart des ministres qui se sont succédé au Quai d’Orsay depuis quelques années. Le droit-de-l’hommisme (« une politique de remplacement », selon M. Védrine) aura finalement prévalu pendant les quinquennats de MM. Sarkozy et Hollande. Concernant le Proche-Orient, l’intérêt politique de ce genre de discours est à peu près nul. 

  • Algérie : l’heure de vérité approche pour le clan Bouteflika

     

    En date du 13 avril, Bernard Lugan a publié le communiqué qu'on va lire. Nous-mêmes avons à plusieurs reprises analysé la situation inquiétante de l'Algérie. Inquiétante pour ce pays voisin, mais surtout pour la France. Une explosion politique, économique et sociale de l'Algérie entraînerait en effet une série de graves conséquence pour notre pays. Fort de son expertise des affaires africaines Bernard Lugan confirme le risque - peut-être même à court terme - d'un chaos algérien.  LFAR 

     

    46878456-jpeg_preview_large.jpgLa visite que le Premier ministre français, M. Manuel Valls, vient d’effectuer à Alger, fut l’occasion de constater ce que les lecteurs de l’Afrique Réelle n’ignoraient pas, à savoir que l’Algérie est « dirigée » par un président moribond.

    Depuis son accident vasculaire cérébral survenu le 27 avril 2013, Abdelaziz Bouteflika, paralysé, sourd et quasiment muet, n’apparaît plus en public que très rarement, et sur un fauteuil roulant. Ses trois frères, sa sœur - tous quatre conseillers à la présidence -, et leurs affidés, savent qu’ils vont vivre des moments difficiles dans les heures qui suivront son trépas. Il ne doit donc pas mourir tant que les clans qui, dans l’ombre, dirigent l’Algérie, ne seront pas parvenus à un accord permettant une succession contrôlée.

    Acculée, l’équipe au pouvoir a épuré l’armée au profit du général Ahmed Gaïd Salah, chef d'Etat-major et vice-ministre de la Défense. Est-ce pour autant un gage de survie ?

    Il est permis d'en douter car, lesquels parmi les généraux, notamment chez les nouvellement promus, voudront en effet apparaître liés aux profiteurs du régime quand la rue grondera dans un dramatique contexte économique et social aggravé par l'effondrement du prix des hydrocarbures [1] ? L'Odjak des janissaires [2] pourrait alors être tenté de se refaire une « vertu » à bon compte en donnant au peuple la tête de Saïd Bouteflika et celles de ses proches, avant de placer l'un des siens aux commandes.

    En Algérie, l’agonie présidentielle avec les mensonges et les tractations qui l’entourent, est ressentie comme une humiliation nationale. De plus en plus nombreux sont donc ceux qui demandent l’application de l’article 88 de la Constitution qui permet de constater la vacance du pouvoir. Pour l’entourage du président Bouteflika, la situation est donc devenue intenable.

    Quant à la France, sorte de vaisseau ivre tanguant entre repentance et ethno-masochisme, son président a soutenu l’aberrant quatrième mandat d’un Bouteflika grabataire, espérant ainsi acheter la paix sociale dans les banlieues. Cette mise en dhimmitude mentale ne l’empêchera cependant pas de subir  directement les conséquences des évènements majeurs qui risquent de se produire bientôt en Algérie. Peut-être même à court terme. 

    Bernard Lugan, 13.04.2016

    [1] Voir à ce sujet les dossiers consacrés à cette question dans les numéros de mai, de juillet, d'août et d’octobre 2015 ainsi que les numéros de l’année 2016  de l'Afrique Réelle.  

    [2] Commandement des Janissaires. Lire ici l'Etat-major de l'armée.

    le blog officiel de Bernard Lugan

  • Hubert Védrine [2] : « L'hubris américaine »

      

    Dans son dernier essai, Le monde au défi, Hubert Védrine fait le constat de l'impuissance voire de l'inexistence de la communauté internationale. Il dresse un vaste et éclairant panorama de l'état du monde et des illusions perdues du marché, de la mondialisation heureuse et de l'Union européenne. Secrétaire général de l'Élysée sous François Mitterrand et ministre des Affaires étrangères de 1997 à 2002, Hubert Védrine se distingue par sa finesse d'analyse et sa connaissance précise des dossiers. Loin des incantations et de la dialectique binaire qui tend à remplacer la géopolitique, il défend, à la manière d'un Bainville, une vision réaliste et pragmatique de la politique étrangère. Il plaide pour « un  retour au monde réel, et inévitablement à la realpolitik, moins néfaste que l'irreal politikLafautearousseau en publie au fil des jours des extraits choisis par Vincent Trémolet de Villers pour Le Figaro [8.04].  LFAR

     

    hubert_vedrine_sipa.jpgL'hubris américaine

    Ainsi, au cours des vingt-cinq dernières années, les États-Unis ont souvent abusé, jusqu'à l'hubris, de ce qu'ils ont cru être leur toute-puissance - et c'est d'ailleurs dans la décennie 1990 que j'ai utilisé à leur égard le terme d'« hyperpuissance ». Lors de la décennie suivante, les États-Unis réagirent de façon contrastée et contradictoire à la prise de conscience, partielle et douloureuse, de la perte de leur monopole de puissance, tandis que les Européens se berçaient d'illusions, que les Russes ressassaient leur amertume, que le monde arabo-islamique oscillait entre verrouillage, dénonciations et convulsions, qu'enflait la vague du terrorisme islamique et que l'économie globale de marché, financiarisée et dérégulée, finissait par exploser en 2008. 

    Hubert Védrine           

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    Le monde au défi, Fayard, 180 p.

  • Hubert Védrine [1] : « La communauté internationale n'existe pas »

      

    Dans son dernier essai, Le monde au défi, Hubert Védrine fait le constat de l'impuissance voire de l'inexistence de la communauté internationale. Il dresse un vaste et éclairant panorama de l'état du monde et des illusions perdues du marché, de la mondialisation heureuse et de l'Union européenne. Secrétaire général de l'Élysée sous François Mitterrand et ministre des Affaires étrangères de 1997 à 2002, Hubert Védrine se distingue par sa finesse d'analyse et sa connaissance précise des dossiers. Loin des incantations et de la dialectique binaire qui tend à remplacer la géopolitique, il défend, à la manière d'un Bainville, une vision réaliste et pragmatique de la politique étrangère. Il plaide pour « un  retour au monde réel, et inévitablement à la realpolitik, moins néfaste que l'irreal politikLafautearousseau en publie au fil des jours des extraits choisis par Vincent Trémolet de Villers pour Le Figaro [8.04].  LFAR

     

    hubert_vedrine_sipa.jpgLe Monde de Babel

    Mais que fait la « communauté internationale » ? Confrontés que nous sommes au spectacle chaotique du monde qui aggrave la confusion des idées, cette question lancinante vient naturellement à l'esprit. Réponse: rien ou si peu. Comment pourrait agir une communauté internationale qui n'existe pas encore en 2016, ou à peine ? C'est un noble objectif mais toujours pas une réalité. Comment est-ce possible soixante-dix ans après la fondation des Nations unies dont on a célébré l'anniversaire en automne 2015 ? L'expression « communauté internationale » est tellement courante qu'elle en est presque devenue un tic de langage dans les médias, la classe politique, les ONG et les communiqués des sommets multilatéraux… Pourtant, elle correspond bien peu à la réalité, chaque jour observable, d'une Babel après la chute des illusions. 

    Hubert Védrine           

    9782213700892-001-X.jpg

    Le monde au défi, Fayard, 180 p.

  • Syrie : une lettre-témoignage du prince Jean de France

    Messe d'accueil au patriarcat grec-melkite catholique de Damas

     

    Le Prince Jean fait part dans la lettre ci-après de son récent voyage en Syrie où il vient de passer la semaine de Pâques. Le Duc de Vendôme, déjà engagé pour les chrétiens d’Orient, a accepté l’invitation de Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon, initiateur de ce voyage.

     

    david-niviere5.jpgLe chemin de Damas


    « Aidez nous à rester chez nous ». C'est par ces mots que les chrétiens de Syrie accueillent la délégation d'une quarantaine de personnes menée par monseigneur Rey en Syrie et dont je fais partie. Cinq jours de rencontres qui resteront profondément gravés dans mon âme.

    Cette semaine pascale nous mène de Damas à Homs en passant par un certain nombre de villages chrétiens le long de la frontière libanaise. C'est une zone stratégique plutôt stable que l'armée et ses affiliés, dont le Hezbollah, ont reprise au printemps 2014, après trois ans de combats qui ont laissé des traces, même si ici ou là subsistent quelques poches islamistes.

    Commencer par Damas où Saint Paul a été baptisé n'est pas anodin, la Syrie est le berceau des communautés chrétiennes. C'est le patriarche grec-melkite catholique Grégoire III Laham, un homme de 84 ans, mais portant la joie et la determination sur son visage, dans ses gestes et ses paroles, que nous rencontrons le premier jour. Tous les évêques et les prètres avec lesquels nous parlons ensuite sont taillés dans le même roc joyeux, pasteurs de leurs brebis dans les difficultés et les moments d'espérance.

    Yabrud, Qusayr, Rableh, Maaloula, Sednaya, des villages chrétiens - araméens, grecs, arméniens, syriaques, ... - catholiques ou orthodoxes, tous détruits, où les familles ont onnu le martyre. C'est le cas d'Antoine, à Maaloula, exécuté pour sa foi sur le perron de sa maison, devant sa femme Antoinette. Je lui ai promis que notre petite Antoinette prierait pour elle et sa famille. Elle a commencé hier.

    « Aidez nous à rester chez nous, pour repartir à nouveau, reconstruire nos lieux de vie. dans un pays stabilisé ». Après trois ans de guerre, depuis le printemps 2014, les familles se réinstallent. C'est d'abord le prêtre ou l'évêque qui revient et ensuite autour de lui les familles chrétiennes et les quelques familles musulmanes qui ont vécu en paix avec les chrétiens. Les églises sont reconstruites, les maisons et les écoles aussi. Que des beaux visages joyeux, pleins de vie et d'espérance, celle du Christ ressuscité.

    Si je peux terminer ainsi ce court témoignage, je souhaite remercier monseigneur Rey pour son invitation, SOS Chrétiens d'Orient pour l'organisation de ces rencontres et les personnes de la délégation pour les échanges que nous avons eus, en particulier toute cette jeunesse engagée, qui m'ont permis de vivre intensément cette semaine pascale auprès de nos frères syriens. 

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    Domaine Royal de Dreux, le 4 avril 2016

     

    Photos reprises du site Prince Jean de France

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    Le patriarche Grégoire III Laham et Monseigneur Rey

     

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    Village détruit de Qusayr

     

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    Maaloula, village où Antoine est mort pour sa foi chrétienne

     

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    Chantier de reconstruction de la cathédrale Notre Dame de la Paix à Homs

     

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    Une famille chrétienne qui s'est réinstallée à Qusayr

     

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    Le Duc de Vendôme dans une rue désertée de Homs

     

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    Vue de la Vallée des Chrétiens au pieds du Krak des Chevaliers

     

    PRINCE JEAN DE FRANCE