UA-147560259-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Idées, débats... - Page 452

  • Jean Sévillia : « La colonisation et le non-sens historique d'Emmanuel Macron »

     

    Par Alexis Feertchak

    Alors qu'Emmanuel Macron a qualifié la colonisation de crime contre l'humanité, Jean Sévillia explique [Figarovox, 16.02] pourquoi une telle déclaration est un non-sens historique. En tant qu'historien, il estime que l'on ne peut pas jeter ainsi « l'opprobre sur les Européens d'Algérie, les harkis, et leurs descendants ». Nous n'ajouterons rien à cette pertinente analyse, si ce n'est que les déclarations d'Emmanuel Macron le disqualifient pour parler au nom de la France et diriger le pays.  LFAR

     

    XVM374ace7c-f3ac-11e6-a80c-3dc5aaa52285-120x168.jpgLors de son déplacement en Algérie, Emmanuel Macron a accordé un entretien à la chaîne Echorouk News où il qualifie la colonisation d'« acte de barbarie » et de « crime contre l'humanité ». Ces qualifications morale et juridique ont-elles un sens historiquement ?

    Sur le plan juridique, la première définition du crime contre l'humanité a été donnée en 1945 par l'article 6 de la Charte de Londres qui instituait le Tribunal militaire international, instance qui allait juger les chefs nazis à Nuremberg. Étaient visés « l'assassinat, l'extermination, la réduction en esclavage, la déportation, et tout autre acte inhumain inspirés par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux et organisés en exécution d'un plan concerté à l'encontre d'un groupe de population civile ». D'autres textes affineront la définition, comme le statut de Rome créant la Cour pénale internationale, en 1998, sans en changer l'esprit. Or la colonisation est le fait de peupler un pays de colons, de le transformer en colonie, voire, nous dit le dictionnaire le Robert, de procéder à son « exploitation» afin de le «mettre en valeur ».

    Historiquement parlant, à l'évidence, la colonisation suppose un rapport de domination du colonisateur envers le colonisé, variable en intensité et en durée selon les lieux où elle s'est déroulée, mais elle n'a pas pour but d'exterminer les colonisés, ce qui, sans parler de l'aspect moral, n'aurait même pas été de l'intérêt matériel du colonisateur. Parfois, dans les périodes d'installation du colonisateur, et cela a été le cas, en Algérie, la colonisation est passée par une guerre de conquête, avec son lot de violences inhérentes à toute guerre. Les travaux d'historiens comme Jacques Frémeaux ou le regretté Daniel Lefeuvre nous ont cependant appris à contextualiser les méthodes d'alors de l'armée française, une armée qui sortait des guerres révolutionnaires et napoléoniennes, et ont montré qu'Abd el-Kader n'était pas non plus un enfant de chœur quand il combattait les Français. Mais cent trente années de présence française en Algérie ne se résument ni à la guerre de conquête des années 1840 ni à la guerre d'indépendance des années 1950. Il y a un immense entre-deux qui a duré un siècle, avec ses échecs, ses pages grises, mais aussi ses réussites, ses motifs de fierté.

    Qualifier la colonisation d'acte de barbarie ou de crime contre l'humanité est un non-sens historique, un jugement sommaire, manichéen, qui passe sous silence la part positive de l'Algérie française, celle qui a conduit des Algériens musulmans à croire à la France et à s'engager pour elle. L'histoire a pour but de faire la vérité et non de jeter de l'huile sur le feu, mais, s'agissant de « barbarie », on pourrait rappeler que, dans les événements tragiques de la fin de l'Algérie française, des Européens d'Algérie ou des musulmans fidèles à la France ont été victimes d'actes aujourd'hui constitutifs du crime contre l'humanité. Si on veut vraiment faire de l'histoire, il faut tout mettre à plat.

    Dans cet entretien, Emmanuel Macron est revenu sur ses propos parus dans Le Point en novembre 2016 qui ont été « sortis de leur contexte », notamment quand il évoquait les « éléments de civilisation » apportés par la colonisation française. Comment comprenez-vous cette expression d'« éléments de civilisation » ?

    Je suppose qu'Emmanuel Macron faisait alors allusion, par exemple, à l'œuvre d'enseignement menée par la France en Algérie, certes avec retard, un retard dû à l'impéritie de la IIIe puis de la IVe République. En 1960, 38% des garçons musulmans et 23% des filles fréquentaient l'école, pourcentage qui était supérieur à Alger où 75% des garçons musulmans et 50% des filles étaient scolarisés, Européens et Arabes étant mêlés sur les bancs des écoles au moment où, dans maints États américains, la ségrégation sévissait encore entre Blancs et Noirs. Peut-être l'ancien ministre faisait-il encore allusion à la médecine coloniale. L'École de médecine d'Alger a été fondée moins de trente ans après la conquête. En 1860, le taux de mortalité infantile pouvait atteindre les 30 % dans la population algérienne. En 1954, il sera descendu à 13 %, pourcentage certes trop élevé, mais qui témoignait quand même d'un progrès. C'est à Constantine, en 1860, qu'Alphonse Laveran a identifié l'agent du paludisme, ce qui lui vaudra le prix Nobel de médecine en 1907. À l'école ou à l'hôpital, où était le crime contre l'humanité dans l'Algérie française ?

    Ajoutant que l'on ne construit rien sur « la culture de la culpabilisation », l'ancien ministre de l'Économie précise aujourd'hui: « La France a installé les droits de l'Homme en Algérie, mais elle a oublié de les lire ». Ne peut-il pas ainsi réconcilier l'opposition entre les partisans de l'excuse et les critiques de la repentance ?

    Il est certain que défendre un minimum l'œuvre française en Algérie tout en flattant un maximum les contempteurs de la colonisation française est un exercice qui demande de la souplesse. Mais je laisse les commentateurs de l'actualité analyser les balancements contraires d'Emmanuel Macron, spécialiste du rien-disant destiné à contenter tout le monde afin d'attirer un maximum de voix. Je rappellerai seulement que l'histoire électorale française, depuis un siècle et demi, a vu régulièrement surgir du paysage politique des personnages de ce type et jouer les hommes providentiels dont de braves citoyens attendaient tout. La société du spectacle y ajoute une dimension où il faut avoir la gueule de l'emploi : être jeune et beau. Ce sont des phénomènes sans enracinement dans la société, et par-là éphémères.

    Comment expliquez-vous que la « colonisation » suscite encore aujourd'hui un tel débat dans l'opinion publique ? Est-ce le signe de la crise identitaire que traverse le pays ?

    L'opinion me paraît plutôt indifférente à la question : déjà, dans les années 1950-1960, elle était de plus en plus hostile à l'Algérie française qui exigeait des sacrifices que plus personne n'avait envie de supporter. Mais en France, l'esprit de repentance permet à certains réseaux d'attiser la détestation de notre passé, phénomène de haine de soi qui conduit à dissocier la nation. Et en Algérie, la dénonciation de la colonisation française cela fait partie des fondamentaux du pouvoir actuel qui s'est construit sur toute une mythologie autour de la guerre d'indépendance. Le drame nous revient en ricochet par les jeunes Français d'origine maghrébine qui ont été élevés avec l'idée que la France aurait commis des crimes à l'égard de leurs aïeux. Comment pourraient-ils aimer la France dans ces conditions, comment pourraient-ils se reconnaître dans notre passé ? C'est un chemin difficile mais il n'y en a pas d'autre: il faut faire toute la vérité sur la relation franco-algérienne à travers la durée et à travers la multiplicité de ses facettes. On pourra regarder en face l'histoire de la présence française en Algérie dans sa totalité le jour où l'opprobre ne sera plus jeté par principe sur les Européens d'Algérie et les harkis, et leurs descendants. 

    « On pourra regarder en face l'histoire de la présence française en Algérie le jour où l'opprobre ne sera plus jeté sur les Européens d'Algérie et les harkis, et leurs descendants. » 

     

    Journaliste, écrivain et historien, Jean Sévillia est rédacteur en chef adjoint du Figaro Magazine. Il vient de publier Écrits historiques de combat, un recueil de trois essais (Historiquement correct ; Moralement correct ; Le terrorisme intellectuel) qui vient de paraître aux éditions Perrin.

    Alexis Feertchak

     

  • Retour à la culture française

     

    par Gérard Leclerc

     

    XVM495e5cb0-8a51-11e6-8bce-57b23a9183a7-100x108.jpgFaut-il revenir à la question de la culture française, dont un des candidats à la présidence de la République a prétendu qu’elle n’existait pas ? Pourquoi pas ? Le sujet n’est pas médiocre, et même s’il y a lieu de s’intéresser aussi à des dossiers qui semblent peser plus lourd, celui-là est quand même essentiel, car il concerne la vie de l’esprit et ce qui nous permet de nous mieux reconnaître ensemble. J’ai déjà abordé le sujet, mais j’y reviens suite à une mise au point d’un de nos anciens ministre de la Culture, Jean-Jacques Aillagon sur le site Figarovox. Tout part, il est vrai, d’une distinction plutôt subtile. Peut-on opposer la notion de culture française à celle de culture en France ? C’est cette opposition qu’avait faite à Lyon Emmanuel Macron, que Jean-Jacques Aillagon reprend à son compte en y apportant son explication.

    « Ce qu’on appelle, par justification commode, la culture française est en fait constituée depuis plusieurs siècles par la convergence, la rencontre, le métissage d’influences culturelles venues de partout. » Cette argumentation ne me convainc pas du tout, même si on peut accorder que la vie de l’esprit suppose l’incessant échange des influences. À vouloir disséminer à l’excès la culture, celle-ci devient proprement inintelligible, elle est ramenée au local infime et à l’inverse, au multiple insaisissable. Alors, il faut nier l’existence d’unités repérables, ne serait-ce que celles que caractérisent les langues nationales. Plus de culture française, allemande, anglaise, espagnole, russe… ? C’est quand même un sacré paradoxe.

    On comprend le souci de Macron ou d’Aillagon d’éviter une sorte de fixation étroite ou rigide, mais il ne s’agit pas de cela. Il s’agit de reconnaître la visibilité des traditions qui sont d’évidence des traditions vivantes, ouvertes à l’échange. Des traditions reconnaissables aussi par des traits qui les définissent, car la multiplicité des influences n’empêche pas la prédominance de caractères forts qui se reconnaissent aussi par leur rayonnement et leur fécondité. Le dialogue des cultures ne gagnera sûrement pas à leur indistinction et à leur effacement dans le brouillard d’une multiplicité sans fin. 

    Gérard Leclerc

    France catholique

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 16 février 2017.

  • La macro énormité d’Emmanuel Macron : « Il n'y a pas une culture française » ...

    Meeting à Lyon, le 4 février 2017

     

    1903076588.10.jpgOui, vous avez bien lu, il a osé le dire : « Il n'y a pas une culture française ; il y a une culture en France : elle est diverse, elle est multiple ». Signé : Macron (lors de son meeting à Lyon, le 4 février 2017).

    Sans crainte du ridicule, Macron a donc mis ses pas dans ceux du grotesque Eric Besson, qui avait osé déclarer en son temps* : « la France n’est ni un peuple, ni une langue, ni un territoire, ni une religion, c’est un conglomérat de peuples qui veulent vivre ensemble. Il n’y a pas de Français de souche, il n’y a qu’une France de métissage. »

    Que répondre à de tels Niagara de stupidité ? De tels Everest de bêtise pure ? Et encore, on reste gentils, et polis...

    Alors, comme ça, il n'y a donc pas de culture française ? Mais, qu'est-ce qu'elle t'a appris, Manu, Brigitte ? Elle n'est pas professeur de français ? Bon, on conçoit sans peine que tu n'as pas dû faire « que » de la littérature quand tu étais avec elle. Il a fallu, sans doute, faire les courses, s'occuper des tâches ménagères, arranger un peu la maison, et puis tout un tas de choses - on n'a pas trop d'idées, là, comme ça - mais vous avez sûrement dû faire tout un tas de trucs, tous les deux, et avoir un temps bien employé. Du moins, on vous le souhaite.

    Mais, vraiment, elle ne t'a jamais parlé de Molière ? Ni de Racine ? Exit donc, Racine, et Molière avec...

    Et Verlaine ? Non plus ? Et Montaigne, Pascal, Voltaire, Chateaubriand ? Non, vraiment, rien ? Cela ne te dit rien ?

    En somme, depuis que tu es avec elle, Balzac est au niveau de Black M (ou, pourquoi pas, au-dessous) ?

    Eh ! bien, vive les profs !

    On se demande bien à quoi elle t'a servi, Brigitte ! Enfin, on veut dire, « au niveau du culturel », comme on dit dans le jargon. Dans un de leurs meilleurs sketches, Les Inconnus disaient que « dans culture, il y a ture ». On espère que, candidat à la fonction suprême, tu as pris le mot « culture » dans sa globalité, et pas dans une seule de ses « parties » !

    Bon, maintenant, soyons sérieux. Le père Besson avait déjà insulté le peuple français ; voici le tour du père Macron, en mode « macro ». Pas de culture française ! Le moindre rappeur sub-saharien, eructeur de sons bizarroïdes sur des textes (?) qui ne le sont pas moins, promu l'égal de François Villon ou de ce pauvre Ruteboeuf qui, pour le coup, aura bien raison de se plaindre et de se lamenter ! Le moindre pourrisseur des murs de nos villes (baptisé « grapheur » par la sous-culture du politiquement correct) promu l'égal de Philippe de Champaigne ou de Cézanne ! On en passe, et des pires !

    Osons une question simple ; la seule qui vaille d'être posée, mais c'est une question qui fâche : et si on arrêtait de délirer ?

    Et si vous commenciez, un tout petit peu, à ouvrir les yeux, un tout petit peu. A sortir de votre bulle dorée : d'élu, haut fonctionnaire et ministre pour l'un (Besson) ; de banquier, haut fonctionnaire et ministre pour l'autre (Macron).

    C'est vrai qu'on vous demande, là, l'impossible : car, si vous faites cela, vous sortez du Système que vous représentez si bien, que vous incarnez, que vous êtes. Et, justement, vous n'êtes plus rien ; du moins, plus rien d'autre que de simples citoyens, comme nous. Vous perdez ce qui vous rend différents. Mais, différents, pas pour le meilleur : pour le pire... 

    * Nous avions relevé cette grotesque déclaration d’Éric Besson dès qu'elle fut prononcée, le 16 février 2010. A retrouver, le cas échant, au moyen du lien suivant :

    Rions un peu, d'eux : la grandiloquence révolutionnaire, mais aussi les décisions de Justice, revues et corrigées, à la sauce Besson !

  • Quand la France s’éveillera

     

    Par Frédéric Marc 

    « 1789, Mai 68, ne sont que les manifestations d’une apostasie lente et progressive qui atteint son apogée dans ce que nous vivons aujourd’hui. » Une réflexion intéressante, au tour parfois personnel, mais où la référence à Bernanos est ici bienvenue, parce qu'elle ramène aux sources de nos maux et à leur actualité [Boulevard Voltaire, 12.02]. Selon Henri Massis, « Bernanos, c'était un camelot du roi ». On en a ici une évidente illustration.  LFAR

     

    En 1974, Alain Peyrefitte prophétisait : Quand la Chine s’éveillera… 40 ans après, la Chine s’est réveillée et que voyons-nous ? Des robots.

    À l’aéroport d’Amsterdam, les avions-cargos de la China Cargo Airlines, dans une noria infernale, déversent en Europe des produits manufacturés au rythme d’un avion par demi-heure (j’étais en transit dans cet aéroport, je les ai comptés).

    L’autre jour, en attendant le départ de ma fille pour sa première colonie de vacances, j’ai sympathisé avec une maman chinoise. Nous avons échangé sur les différences entre les enfants français et chinois.  

    « Les enfants chinois n’ont pas de doudou et ne sucent pas leur pouce, disait-elle l’air désolé. Nous, Chinois, avons été éduqués comme des robots, on apprend tout, on est capables dès la petite enfance d’enregistrer des tonnes d’informations mais on est incapables d’inventer, d’imaginer. J’ai fait des études en France et j’étais terrorisée à l’idée de devoir composer une rédaction, d’imaginer quoi que ce soit. »

    ​‌C’est ce que me disait un étudiant chinois rencontré sur les bancs de l’université : « Ce qu’on aime chez vous, Français, c’est l’esprit critique et novateur. »

    Il m’est ainsi apparu une évidence : la France a une vocation, mais cette vocation est endormie par des siècles de conformisme bourgeois et d’emprise matérialiste. Oui, des siècles, car n’imaginez pas que tous nos maux remontent à Mai 68. Croyez-vous que la PMA et la GPA soient nées spontanément de cerveaux dérangés ? Le mal français est profond. Il faut remonter à Descartes : le dualisme cartésien, ce grand péché français… faisait de l’homme « un ange conduisant une machine », disait Maritain.

    1789, Mai 68 ne sont que les manifestations d’une apostasie lente et progressive qui atteint son apogée dans ce que nous vivons aujourd’hui, et ses limites, à cause de ou grâce à l’islamisme conquérant.

    Macron, marionnette inconsistante fabriquée par les banquiers et les multinationales, essaie de nous vendre la France des robots.

    Nous lui opposerons La France contre les robots

    Dans ce livre écrit au sortir de la guerre, Bernanos prophétisait ce qui nous arrive : 

    « Un jour, on plongera dans la ruine du jour au lendemain des familles entières parce qu’à des milliers de kilomètres pourra être produite la même chose pour deux centimes de moins à la tonne. […]

    Le danger n’est pas dans les machines, sinon nous devrions faire ce rêve absurde de les détruire par la force, à la manière des iconoclastes qui, en brisant les images, se flattaient d’anéantir aussi les croyances. Le danger n’est pas dans la multiplication des machines, mais dans le nombre sans cesse croissant d’hommes habitués, dès leur enfance, à ne désirer que ce que les machines peuvent donner. »

    ​‌Dans un passage intitulé « La révolution de la liberté », Bernanos ajoute : « Je suis un homme de l’ancienne France, [cet homme dont] le caractère, le “tonus” vital venait du climat moral et mental dans lequel il avait été formé […] L’homme de l’ancienne France, cher lecteur, vous paraîtrait aisément aujourd’hui un anarchiste. » »

    Quand, donc, l’ancienne France s’éveillera-t-elle ? Ouvrez donc les yeux.

    La Manif pour tous a été le signal de ce réveil. Mai 2017 pourrait être cette révolution de la liberté.

    Et ne nous leurrons pas : la France ne sera pleinement réveillée que quand elle aura retrouvé son honneur et ses racines chrétiennes, ce que Bernanos appelle « sa magistrature spirituelle », n’en déplaise aux laïcards hargneux.

    Alors la France pourra redevenir ce qu’elle a toujours été : la figure de proue de l’Europe. Cette terre où on peut être heureux comme Dieu en France.

    Mais pour que Dieu revienne en France, il faut l’avoir dans son cœur. 

    Cadre culturel
     
  • Patrimoine • À Martigues, par Charles Maurras

     

    Il faut être reconnaissants au site Maurras.net d'avoir remis à jour cet écrit de Charles Maurras, un petit article touristico-sociologique intitulé À Martigues et publié en 1926 par le magazine L’Illustration (numéro 4361 du 12 octobre.). Version agrémentée de six aquarelles de l’artiste avignonnais Louis Montagné.

    S’il refuse le pessimisme automatique des anciens, Maurras ne peut cacher ici une certaine inquiétude : l’âme de Martigues est liée depuis des siècles à l’activité des pêcheries, et, si celles-ci en viennent à péricliter, que restera-t-il de cette âme ?

    Amis lecteurs, imprimez-donc ce texte et prenez-le avec vous pour aller visiter Martigues ! Vos avis seront sans doute divers, mais vous ne pourrez contester que les vues dépeintes par les six aquarelles se retrouvent peu ou prou dans la réalité d’aujourd’hui, et sans doute penserez-vous comme nous que, moyennant l’achèvement de la restauration de la maison du Chemin de Paradis qui fut la propriété de Charles Maurras, et l’éradication de quelques horreurs datant des décennies de l’après-guerre, la « Venise provençale » possède tous les atouts pour charmer le visiteur et poursuivre sa longue histoire, quel que soit le nombre de ses pêcheurs, de grand comme de petit Art.

     

    2736404638.jpgLe clair pinceau et les couleurs brillantes de M. Louis Montagné 1 se rient de l'encre grise et du langage abstrait dont il faut bien qu'un simple écrivain se contente. N'essayant pas de rivaliser avec l'aquarelle, je lui laisse le soin de louer les beautés visibles de ma petite ville natale. L'invisible me reste. Je tenterai de l'indiquer.

    Cette église, cathédrale ou plutôt primatiale, vous plaît ? Vous êtes sensible aux lueurs changeantes de ce petit port ? Vous riez de plaisir devant ce quai oblique où les barques légères attendent tristement ? Le rythme de la lumière et de la vie vous a obscurément intéressé et même conquis ? Les plus minutieuses descriptions littéraires ne pourraient rien ajouter à ce sentiment. Mais peut-être la curiosité qui est née vous fait-elle songer à vous demander quel est le peuple qui travaille dans cet air doré et sous ce ciel en fleur, ce qu'il a dans le cœur, ce qu'il a dans la tête, d'où il vient, ce qu'il fait, en un mot comment ce petit monde a vécu depuis qu'il est là.

    Il est là depuis très longtemps. C'est un peuple pauvre de gloire, mais non d'ancienneté. Son origine a donné lieu à quelques disputes entre amateurs de chartes et producteurs de diplômes. Il paraît que les plus anciens certificats de vie de la ville de Martigues ne remontent guère au-delà du treizième siècle et d'un certain papier qui a été signé et scellé par un archevêque d'Arles entre 1200 et 1300. C'est possible. Ce n'est pas sûr. Et qu'est ce que cela prouve ? Tout ce qui est écrit a été, du moins grosso modo. Mais tout ce qui a été n'a pas été écrit.

    Par exemple, l'Ordre religieux et militaire des Chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem fait remonter son origine à Gérard de Martigues 2, qui a été béatifié, s'il vous plaît. Ce bienheureux Gérard Tenque, né vers 1040 et que la première croisade a trouvé établi à Jérusalem, a-t-il eu l'originale fantaisie de placer son berceau dans une localité qui lui serait postérieure de deux bons siècles ? Naturellement la critique peut dire que Gérard, simple mythe solaire, n'a jamais existé ou qu'il ne s'appelait point Tenque, un chroniqueur disant Gerardus tunc, « Gérard alors » qui aura été traduit Gérard Tunc, ou Thunc, ou Tonc, ou Tenque, ce qui est bien dans l'ordre des choses mortelles 3.

    MARTIGUES02-953x1280-72ppp.jpg

    Mais, si le nom de son Gérard fut sujet de telles transformations, le nom de Martigues et de son étang, Marticum stagnum, reste tout de même l'un des plus vieux de notre Provence. Il se réfère au cycle de Marius. Quand ce général démagogue passa en Gaule pour y barrer la route à la première grande invasion germanique, cent quatre ans avant Jésus-Christ, il menait dans ses camps, au dire de Plutarque, une prophétesse syrienne du nom de Marthe, revêtue d'un manteau de pourpre et mitrée à l'orientale, qui inspira une confiance invincible à ses soldats et à leur chef. Le nom de Marius remplit la contrée. La montagne de sa Victoire, que les pêcheurs appellent Dalubre (delubrum, le Temple), est la reine de l'étang de Marthe (ou de Berre). Les collines qui bordent l'étang de Caronte (stagnum currens, l'étang qui court) abritent des vallons où les débris gréco-romains affleurent sans cesse. 4

    MARTIGUES03-1280x870-72ppp.jpg

    En août 1925, un jeune artiste voyageur, errant par l'île de Martigues, qui est notre quartier central, aperçut, au fond d'une remise où jouait le soleil, un chapiteau de marbre d'une rare beauté. Il supposa d'abord que cela provenait de quelque chapelle bâtie au dix-septième ou au dix-huitième siècle. En regardant mieux, il dut se rendre à l'évidence. Le chapiteau corinthien était un pur antique. On a eu la bonté de m'en faire présent. Peut-être, en le voyant de près, les critiques aboutiront-ils avec moi à cette conclusion, provisoirement énorme, qu'après tout c'est peut-être dans ces parages qu'abordèrent les premiers fugitifs phocéens.

    Évidemment, la première Marseille que nous imaginons riveraine du Coenus 5 et de l'étang de Marthe aura vite et souvent changé de place. Mais tout a changé de place ici, et il faut comprendre pourquoi.

    Le rivage méditerranéen est un territoire essentiellement envahi. Les premiers colonisateurs s'en doutèrent. Furent-ils Ligures ou Ibères, avant d'être Grecs ? En ce cas, ils craignaient les Phéniciens, qui craignirent les Grecs, qui craignirent les Carthaginois, qui craignirent les Romains, qui finirent par craindre les Goths, qui craignirent eux-mêmes les Normands, qui craignirent les Maures, que l'on n'a pas cessé de craindre jusque vers notre année 1830, date de la prise d'Alger par la flotte de Charles X. Mais l'Islam se réveille, et il n'est pas dit que ces craintes millénaires ne recommencent pas d'ici peu, sans avoir à changer d'objet. Dès lors, tout aussitôt, ce qui a été recommence. L'éternel exode reprend dans toutes les agglomérations où l'on ne se sent pas en nombre suffisant pour résister et pour tenir. Les habitants des petits bourgs quittent leurs maisons, ils se réfugient sur les collines où ils se fortifient et s'arrangent pour vivre tant que subsiste le péril. Dès qu'il s'éloigne, le pêcheur accourt repeupler les cabanes ou les bâtiments du rivage jugés les plus propices aux travaux de son industrie. Bref, les chartes du treizième ou quatorzième siècle, dont nos archivistes font si grand état, ne les induisent pas absolument en erreur, mais leur font appeler naissance une renaissance. Ils prennent pour la ville fondée ce qui n'est que la ville rebâtie et restituée.

    MARTIGUES04-928x1280-72ppp.jpg

    Où ? Au même endroit ? Peut-être bien, à cinq ou six cents mètres près. Il n'y avait d'ailleurs pas une ville, mais trois. Elles fusionnèrent par un acte d'union que dicta le roi Charles IX et que symbolisa une bannière tricolore, où le blanc de l'Île, le rouge de Jonquières et le bleu de Ferrières se retrouvaient par parties égales. Les quartiers réunis eurent du mal à vivre en paix, l'antagonisme antique ne s'est pas éteint : « Monsieur, disait au dix-neuvième siècle un marguillier 6 de l'Île, comme un étranger le félicitait de l'érection du clocher de Jonquières, j'aimerais mieux voir mon clocher de l'Île par terre que le clocher de Jonquières debout. »

    Telle est la stabilité de ces fureurs locales, dans le plus instable pays du monde et dont les aspects familiers n'ont cessé de changer à vue d'œil, bien avant que les « travaux » dont on se plaint tant aujourd'hui puissent être accusés de le déshonorer.

    Chacune de nos générations aime à dire que Martigues n'est plus Martigues, pour l'avoir ouï dire à ses anciens qui l'ont toujours dit, et leurs pères, et les pères de leurs pères, dans tous les siècles. La cité provençale, que l'on baptisait un peu ridiculeusement de Petite Venise, n'aura bientôt plus que deux îlots et trois ponts. J'ai connu trois îlots, quatre ponts. Ceux qui m'ont précédé parlaient de quatre ou cinq îlots et de je ne sais plus combien de ponts fixes et de ponts-levis. Ce qu'on appelle le pittoresque a donc perdu, mais l'essentiel a-t-il bougé ? Un certain jeu de l'eau et de la lumière, une certaine dégradation du soleil dans une atmosphère de subtiles vapeurs, la courbe des rivages, le profil des hauteurs, les mouvements du sol, son harmonieuse composition ne dépendent en rien de ce que le pic et la pelle de l'homme, sa drague même si l'on veut, peuvent déplacer de sable ou de boue, et les rapports qui règlent la beauté de la terre ne sont guère liés à ce que change la vertu de notre effort.

    Rassuré quant au paysage, faut-il l'être un peu moins sur la population ? Elle est sans doute composée d'alluvions très variés. Le territoire de Provence est ouvert du côté des montagnes, béant vers l'Italie et l'Espagne, l'Afrique et l'Orient. Il me souvient bien que, dans mon enfance, vers 1875, certaine famille dite des Mansourah, venue d'Égypte, paraît-il avec Bonaparte, n'était pas tout à fait assimilée. On n'en parle plus aujourd'hui. L'œuvre est faite ; les sangs sont réunis.

    Voici plus singulier : vers la même époque, dans une maison qui n'avait pas changé de propriétaire depuis 1550, mon quai natal portait certains débris très nets des bandes scandinaves de Robert Guiscard, que l'on eût beaucoup étonné en leur disant leurs origines, car ils parlaient provençal, sentaient français, jugeaient à la romaine ; néanmoins, les fortes carrures, le teint blond transparent, les yeux vert glauque en disaient long sur l'antécédent séculaire. Sur le quai voisin, l'apport punique et Tyrien se manifestait par d'autres silhouettes géantes de brachycéphales très bruns. À la génération suivante, ces derniers ont perdu de leur taille et leur teint s'est éclairci, tandis que les premiers ont bruni à fond. Dans tous ces cas et beaucoup d'autres, on voit les survivances d'invasions lointaines résorbées, pour un temps, par les forces unies d'un noyau plus ancien encore, dont les caractères changent très peu. Il semblait fait pour résister en proportion du nombre des assauts endurés. 7

    MARTIGUES05-1280x880-72ppp.jpg

    L'élément principal de ce fonds primitif, celui qui tient solidement au pays, est formé des pêcheurs. Ils sont là deux mille environ, actifs et paresseux, rieurs et graves, anarchistes et traditionnels, dépensiers et âpres gagneurs. Autrefois, leur corporation comprenait un grand Art et un petit Art. Le premier montait des tartanes pontées et allait travailler en Méditerranée. On raconte qu'il y a un quart de siècle environ, les pêcheurs du grand Art gagnèrent beaucoup d'argent. La mer avait été propice, le thon, le mulet et le loup avaient bien donné. Ils crurent que cela continuerait toujours. La confiance orgueilleuse les égara. Se pliant à la vieille passion séculaire qui leur fit inventer la martingale, les patrons de tartanes se mirent à jouer comme on n'avait jamais joué jusque là. En un hiver, ils eurent tout perdu et, comme on dit là-bas, ils furent « rôtis » (les Italiens, en pareil cas, ne sont que « frits »). Bateaux, agrès, tout fut perdu, vendu, bientôt dilapidé. Cet hiver vit la fin du grand Art de la pêche, qui n'est plus représenté à Martigues que par quelques couples de chalutiers appartenant à des Compagnies.

    Le petit Art subsiste. Ceux qui l'exercent sur des barques non pontées, appelées en général des bettes, ne laissent pas de constituer encore la plus importante de nos pêcheries sur ce front maritime, soit que l'on considère le produit du travail, le nombre des marins que la flotte enrôle annuellement, la connaissance du métier, les coutumes anciennes. Il serait difficile de sous-estimer ce trésor.

    Quelles belles prières étaient récitées avant de jeter les filets : Notre Père, donnez-nous du poisson, assez pour en donner, en manger, en vendre et nous en laisser dérober ! Le matin, lorsque le soleil se levait, le mousse enlevait son bonnet et disait gravement sur un rythme de psaume : Saint Soleil, bon lever ! Et nous autres bon jour, santé, liberté, longue vie ! Lorsque le soleil se couchait, le même mousse officiait : Bonsoir, patron et mariniers, toute la compagnie ! Que le bon Dieu conserve la barque et les gens ! Et celui qui ne dit pas « Ainsi soit-il », le cul de la bouteille lui échappe ! Dure malédiction ! Chacun, se hâtant de la détourner, criait : Amen ! Cette vieille population était donc religieuse, tous les témoignages concordent, et c'est ce qui explique son reliquat d'extrême bonhomie et tout ce qu'il comporte de loyauté, de générosité, d'amitié sociale profonde.

    L'ancien régime du mariage peut le faire comprendre. S'il a un peu évolué, il n'a pas disparu. Les fiançailles se célèbrent habituellement à l'époque dite de la seconde communion. Le fiancé a treize ans et la fiancée douze ; les accords ont lieu dans les familles avec une solennité qui rappelle un peu le distique d'Aubanel 8 :

    Alor, fier e sage, li paire,
    An pacheja coume de rei.

    Alors, fiers et sages, les pères
    Ont pactisé comme des rois.

    Le pacte dûment conclu, les enfants peuvent se parler. Ils se parlent longtemps. Cela tenait bien une douzaine d'années, car, vers dix-huit ans, le garçon partait pour le service, qui durait quelque quarante-quatre mois ; il avait donc vingt-deux ou vingt-trois ans à l'heure des justes noces !

    MARTIGUES06-880x1280-72ppp.jpg

    La ville pose sur les eaux, elle est née du produit des eaux, mais l'ancienne marine de commerce, disparue, ne renaîtra pas. Le canal de Marseille au Rhône ne peut pas la faire renaître. Ce point du trajet est trop proche de Marseille et de Saint-Louis du Rhône pour qu'un arrêt utile y soit indiqué. Les gens sensés dans le pays s'en sont bien aperçus ! Ils disent : Nous verrons passer des bateaux. Oui, tant qu'il y aura des yeux ouverts pour ce spectacle. Bientôt ces yeux se fermeront. Des cités ouvrières fondées de-ci, de-là, abriteront les fourmilières appelées par les nouvelles industries du rivage, mais auront leurs comptoirs, leurs économats, leurs coopératives, tout ce que l'industrie moderne veut et doit créer à son ombre. L'organisme original qui fit le centre de l'ancienne principauté de Martigues, sans lien vivant avec les nouvelles bourgades voisines, se desséchera et mourra.

    Il n'y aura plus de Martigues parce qu'on aura négligé d'y sauver, comme cela serait encore possible, une belle et antique corporation de travailleurs de la mer qui ne demandent qu'à perpétuer la force et la vie. 

    Source : Maurras.net

  • Théâtre & Politique • La résistible ascension de… Marine Le Pen ? Les « fils » de Brecht se trompent de cible

     

    Par Jean-Paul Brighelli

    Une critique théâtrale selon Brighelli [Bonnet d'âne, 8.02], ce n'est jamais tout à fait innocent de différentes remarques idéologiques, sociétales ou politiques. Avec son style, sa langue, sa lucidité, son esprit. Tout ce que l'on aime chez lui et qui a toujours grand sens. Même dans les cas où comme dirait Causeur, on n'est pas d'accord.  LFAR  

     

    2304514035.jpgJ’y suis allé pour Philippe Torreton, piètre analyste politique mais très grand comédien, et à la fin, j’ai applaudi tous les acteurs, tous remarquables, quelles que soient parfois les pitreries lourdingues que leur impose le metteur en scène, Dominique Pitoiset. La nécessité par exemple de faire jouer l’Acteur (Gilles Fisseau) à poil pendant 15 minutes ne m’est pas apparue clairement — sinon parce que depuis quatre ou cinq ans, depuis qu’Olivier Py a joué à ça avec un Roi Lear lamentable, tout scénographe qui se respecte doit dénuder au moins un personnage. Le dernier épisode, c’était un Mariage de Figaro pathétique, mis en scène par Rémi Barché à la Criée, le mois dernier, où le Comte exhibait sa chipolatas étique et Chérubin ses œufs sur le plat.

    Les spectateurs en tout cas ont beaucoup applaudi. Reste à savoir quoi. J’ai peur qu’ils aient surtout apprécié le miroir de connivence que leur tendait la mise en scène — des bobos marseillais pratiquant abondamment l’entre-soi, fiers de ne pas appartenir à la majorité qui dans cette ville votera MLP, et d’autant plus confortés dans leurs convictions électorales (Hamon ? Mélenchon ? Le NPA peut-être…) qu’ils sont sûrs que leur candidat ne sera pas qualifié pour le second tour. C’est un vote snob sans conséquence. Il ferait beau voir qu’ils élussent quelqu’un qui menât une vraie politique de gauche… Derrière les Communards de luxe se cachent toujours des Versaillais repus.

    La pièce de Brecht est à l’origine (1941) une allégorie transposant dans le monde d’Al Capone l’ascension d’Hitler au pouvoir. Hervé Briaux, le Président, c’est Hindenburg ; Daniel Martin (Goebbel), c’est Goebbels, dont il affecte la claudication ; P.A. Chapuis (Rom), c’est Ernst Röhm, le chef des S.A. éliminé par les S.S. durant la Nuit les Longs Couteaux, qui conclut presque l’histoire. Dans la pièce originelle, un bateleur passe régulièrement le long du quatrième mur avec un panneau explicitant la correspondance entre la fable et l’Histoire. 

    Dominique Pitoiset s’est voulu plus malin que l’auteur et a déshistoricisé la pièce au maximum, « afin de mettre ses pas dans ceux de Brecht, dit le programme, et de s’attacher à distinguer non seulement Hitler derrière Ui, mais surtout, derrière Hitler, les mécanismes qui rendent possibles — y compris aujourd’hui — une telle prise de pouvoir ». Hello Trump, bonjour Marine. Ou quelque chose comme ça.

    Une Ascension pavée de bonnes intentions, donc, mais à laquelle manquent une giclée de bon sens historique et un doigt d’analyse pour que le cocktail soit digeste.

    En décontextualisant la pièce, on fait d’Hitler une figure ordinaire du tyran : c’est gommer un peu vite la spécificité de l’hitlérisme. Et le recours, au tout début, au « Va pensiero » de Nabucco (le chœur des Juifs en exil à Babylone) est bien tout ce qu’il reste du projet monstrueux du Führer. Le principe de la double historicité, explicité par Brecht dans la conclusion fameuse de la pièce (« Il est encore fécond, le ventre dont est sortie la bête immonde ») d’ailleurs supprimée pour une raison obscure, aurait suffi à un spectateur moyennement intelligent pour tisser des liens avec le présent, si nécessaire. À trop enfoncer le clou…

    Quant à affirmer (c’est le final bleu-blanc-rouge de la mise en scène) que MLP est une dérivation d’Arturo Ui (et Rom, c’est Philippot ?), c’est rater ce qui, en 2017, en plein néo-libéralisme mondialisé, est la vraie tentation fasciste. Non pas tel ou telle candidat(e) de l‘ordre et de la nation (deux gros mots, comme chacun sait), mais justement les représentants si lisses de la barbarie douce (version Le Goff) et de la dérégulation mondialisée. Et croire qu’il vaut mieux une pseudo-démocratie aux ordres du « Consortium » (ainsi a été traduit par Dominique Pitoiset le « trust du chou-fleur » originel de Brecht) plutôt qu’un(e) patriote est une conviction d’une naïveté renversante.

    La bande sonore, très étudiée dans son éclectisme, fournit une illustration éclatante de ce confusionnisme historique. La séquence Nabucco, projetée sur un écran, a été enregistrée le 12 mars 2011 à l’opéra de Rome, avec Riccardo Muti au pupitre profitant de l’occasion, en présence de Silvio Berlusconi, pour demander au public de résister — avec une pluie de tracts tombant du poulailler comme dans Senso. Puis alternent la Toccata et Fugue de Bach (c’est le côté allemand) ou les Carmina Burana de Orff (pour le côté teuton), et en fil conducteur le rock « métal industriel » du groupe Rammstein, vaguement suspect — à son corps défendant, autant que je sache — de sympathies néo-nazies. Avec une jolie séquence sur Bésame Mucho — que Consuelo Velazquez a composé en 1941, l’année même d’Arturo Ui. Clin d’œil qui ajoute à la confusion : la tyrannie n’est pas de toujours, elle n’est pas une tentation inhérente à l’homme, elle est le produit d’un contexte historique et économique. Hitler est sorti du traité de Versailles, Pol Pot de la guerre du Viet-nam, et Goldmann Sachs de la financiarisation mondialisée. Le fascisme actuel n’a pas le visage d’une blonde, mais celui d’un système. C’est d’ailleurs ce qui fait sa force, parce qu’il est plus simple de finir une pièce sur un Torreton éructant en silence que sur l’assimilation de la « bête immonde » à la mondialisation décomplexée qu’incarnent aujourd’hui certains.   

    Jean-Paul Brighelli
    Enseignant et essayiste, anime le blog Bonnet d'âne hébergé par Causeur

  • Livres & Société • Adieu l’Argent-roi ! Place aux héros européens ! Critique de la civilisation de l’Argent - Apologie de l’héroïsme

     

    Par Michel Klen                                            

    Une recension qui parlera aux contre-révolutionnaires, traditionalistes, antimodernes que nous sommes - ou, comme on voudra, révolutionnaires de l'anarchie politique et sociale d'aujourd'hui. L'héroïsme consiste-t-il plutôt à vivre ou plutôt à mourir pour sa patrie, sa civilisation, ses idéaux, sa communauté ? On sait que Maurras privilégiait le premier des deux termes de l'alternative. Et qu'à son engagement personnel n'a pas manqué la part de l'héroïsme. Plus français qu'européen, il n'ignorait pas, cependant, cette dernière dimension de notre identité. Nous non plus, d'ailleurs [Revue Défense Nationale - 02.2017]. Lafautearousseau

     

    sans-titre.pngLe message de Marc Rousset est fort : nous vivons l’époque de la civilisation individualiste de l’argent, de la civilisation hédoniste matérialiste sans idéal, sans âme, sans courage, sans héroïsme. Le constat est sans appel : le règne de l’argent « transforme toute chose en son équivalent monétaire avec un prix ! ». « De nos jours, les gens connaissent le prix de tout, mais la valeur de rien », remarquait déjà Oscar Wilde. Nous vivons « le monothéisme de l’argent » sous le signe du dollar, « vrai Saint-Esprit plus précieux que du sang », a renchéri Céline.

    Le carriérisme et la consommation effrénée en guise de bonheur ont remplacé dans l’esprit de nos contemporains l’idéal, la vocation, le sens de la transcendance, du sacré, du courage, le goût de l’effort, du dépassement, du don de soi, de donner un sens plus élevé à son existence. Et c’est bien là que le bât blesse. Le cri de colère de l’auteur porte précisément sur la perte de ces valeurs qui constituent le socle de l’héroïsme. Sur cette thématique, Marc Rousset est formel : une société se juge sur ses héros. Or, l’idéologie dominante tend à rejeter toute notion d’héroïsme. Ce « signe d’immortalité pour les Grecs et les Romains » a été rayé de notre imaginaire collectif. Les jeunes Français connaissent mieux les vedettes de la téléréalité que les hommes illustres de l’histoire de France ! L’auteur s’en inquiète : mais où sont passés les grandes célébrités, les mythes et les légendes européennes qui ont peuplé l’imaginaire de nos pères sans interruption depuis l’Antiquité ? « Pris dans une formidable bourrasque qui déracine, nivelle et normalise, les Européens encore lucides assistent hébétés, à la mise à mort de leur culture et voient se creuser derrière eux un fossé qui cherche à les couper de leur passé, de leurs racines et de leur identité ».

    Le fil directeur de cet ouvrage très documenté repose sur une apologie de l’héroïsme. Les références historiques abondent. Il y a les héros du Moyen Âge et notamment la chanson de Roland, ce poème épique célébrant les vertus de la chevalerie, de l’honneur féodal et de la foi, une chanson de geste qui a transformé en légende un fait historique. Les exemples sur lesquels s’appuie Marc Rousset sont diversifiés. Il cite le grand compositeur Richard Wagner qui a montré dans ses œuvres « le pouvoir maléfique de l’argent tout en mettant en avant le mythe salvateur du héros ». Il mentionne aussi Saint- Exupéry qui a loué dans son roman Vol de nuit la bravoure des pilotes de l’aviation commerciale pour qui la mission d’acheminement du courrier avait un caractère sacré : « Ils doivent agir comme si quelque chose dépassait, en valeur, la vie humaine ». L’auteur accorde une place poignante dans ce chapitre sur les héros à l’historien et essayiste Dominique Venner, qui s’est suicidé dans la cathédrale Notre-Dame de Paris le 21 mai 2013. Pour Marc Rousset, Venner s’est donné la mort dans ce lieu hautement symbolique, non par désespoir, mais par espérance. Par ce geste, il a voulu faire comprendre que « la victoire ne peut s’obtenir, dans toute l’histoire des peuples, que si les combattants sont prêts à mourir pour leur cause ». Le code d’honneur japonais (Bushido) rentre également dans cette thématique. Cette règle de vie a emprunté au bouddhisme l’endurance stoïque, le respect du danger et de la mort, au shintoïsme le culte religieux de la patrie, au confucianisme une culture morale et artistique ainsi que la morale des relations au sein de la famille et dans la société. Or aujourd’hui, la gloire, l’héroïsme et les vertus militaires ne parlent plus aux générations actuelles. Le général Bigeard en était d’ailleurs parfaitement conscient : « Le regard que je porte sur notre pays et sur la plupart des gouvernants me montre bien que se battre pour les autres, pour la patrie et pour la gloire, de manière totalement désintéressée, est une notion qui semble dépassée, d’un autre siècle, d’une bonne partie de ce XXe siècle que j’ai vécu tambour battant ». 

    Au vu d’un tel recul des valeurs, Marc Rousset pose la question : est-ce la fin de l’honneur ? L’histoire est riche d’exemples de grands soldats qui n’ont pas failli à cette dignité morale. Le commandant Hélie de Saint-Marc, chef de corps du 1er REP (régiment étranger parachutiste), fer de lance de la révolte militaire au putsch d’Alger (22 avril 1961), a justifié, à l’occasion de son procès, son engagement par la notion sacrée qu’il avait de l’honneur : « On peut demander beaucoup à un soldat, en particulier de mourir, c’est son métier. On ne peut lui demander de tricher, de se dédire, de se contredire, de mentir, de se renier, de se parjurer ». C’est aussi au nom de l’honneur que le général François Meyer, à la fin de la guerre d’Algérie, a outrepassé les ordres pour sauver trois cent cinquante harkis. Alors que les directives officielles de Paris intimaient l’ordre aux officiers de laisser leurs soldats musulmans en Algérie, le jeune lieutenant de l’époque installa ses harkis en France, faisant le tour des chantiers et des usines pour placer ses compagnons d’armes délaissés. « L’honneur ce n’est pas une idée, c’est une pratique », souligne le général. Une pratique qui remonte au XVe siècle : « Il était de tradition, chez les amiraux de Castille, de choisir la mort plutôt que d’abandonner un seul de ses hommes » conclut cet officier courageux.

    Les carences de la société occidentale à donner un sens à la vie dans un monde livré au matérialisme ont fait le lit des islamistes qui ont exploité ce vide pour diffuser leur idéologie morbide. Certains s’étonnent que, dans un continent où on apprend depuis plusieurs décennies aux jeunes Européens de souche à détester leur propre histoire, de jeunes musulmans aillent chercher ailleurs « l’accomplissement d’une virilité et d’un héroïsme qu’on tourne désormais en ridicule sur la terre d’Europe ! ». Sur ce registre d’une actualité brûlante, Marc Rousset nous prévient dans une diatribe virulente : « Les fous de Dieu musulmans, incultes, déséquilibrés, drogués, manipulés, intéressés par le martyre de la Félicité divine et qui s’en prennent à des civils ne sont pas des héros ».

    « L’idéologie islamiste s’empare de paumés déculturés et en quête de réification* identitaire, des irrécupérables dès lors que la mort n’est rien pour eux ». Mourir en martyr « comme un petit crétin fanatisé ou diminué intellectuellement » pour accéder au paradis n’est pas une action héroïque. Les leçons des attentats du 13 novembre 2015 à Paris renforcent ce jugement : les terroristes ne sont ni des héros idéalistes, ni des musulmans pratiquants mais « des jeunes socialement ou ethniquement frustrés, sanguinaires, haineux, jaloux et inassimilables ».

    Marc Rousset parle avec ses tripes. Ce diplômé de HEC et de plusieurs universités américaines, docteur ès sciences économiques, n’utilise pas la langue de bois. Son livre, très érudit, est intéressant par la diversité des thèmes abordés, ses anecdotes et ses innombrables citations empruntées aux plus grands auteurs. Avec ses multiples références, ce document a demandé onze années de travail à son auteur. 

    rec3022017.jpg

    * Transformation d’un rapport social, d’une relation humaine en « chose. » Le concept est dû à Marx.

    Michel Klen                                            

  • Musique • Un duo antidépresseur

     

    par Raphaël de Gislain
     

    La chanson est un art difficile et rares sont les artistes qui ne s’y ridiculisent pas. De Biolay à Vianney, on ne compte plus les sous-Gainsbourg et autres Adamo 2.0 qui recyclent des formules usées jusqu’à la corde. Loin des productions formatées, Lili Cros et Thierry Chazelle, unis à la ville comme à la scène, nous offrent avec Peau neuve un spectacle dont les chansons éblouissent comme un feu d’artifice.

    Entre la chanteuse au look d’Amélie Poulain vintage et son atypique guitariste, l’alchimie est totale et la magie contagieuse. La voix chaude et expressive de Lili Cros, aux accents tantôt lyriques, tantôt réalistes, se pose sans effort sur les dentelles de cordes de Thierry Chazelle, formé au conservatoire de Caen, qui passe avec une égale facilité de la guitare électrique à la mandoline, apprise pour l’occasion.

    Les styles se télescopent, offrant un dépaysant voyage au spectateur, de la chanson populaire à la Brassens à des boucles plus tribales, où Lili, qui s’accompagne à la basse, retrouve les rythmes de sa Côte d’Ivoire natale dans des moments de lâcher-prise et de chant pur.

    Les mélodies restent en tête et les textes sont d’une qualité rare, baignés de réalisme poétique, de fantaisie et d’émotion. On rit sur L’Homme de sa vie – l’histoire d’une fille qui fuit le grand amour à rebours des autres, comme l’on est touché par les lettres restées sans réponses, les soldats partis sans retour, les cieux brouillés du Havre ou le bonheur de vivre de Tout va bien.

    La mise en scène, avec ces jeux de lumières remarquablement inventifs, transporte le spectateur au cœur de l’univers de ce duo unique, donnant une identité artistique forte à la vingtaine de titres qu’ils interprètent, issus de leur trois albums déjà parus.

    En cette période de sinistrose, il serait dommage de se priver d’un tel spectacle, à la joie authentique et communicative. D’autant qu’après Paris, une grande tournée est prévue en province jusqu’à la fin de l’année ! 

    Peau neuve,
    de Lili Cros et Thierry Charelle, mise en scène de Fred Radix et François Pilon.

    Jusqu’au 28 février à Paris au Ciné 13 Théâtre, 1 avenue Junot, 75008.
    Dates et réservations à Paris et en province : http://liliplusthierry.com/

     

     

     
     
  • Les trente ans d'Erasmus : l'Europe comme on peut l'aimer... Mais, cardiaques cultivés s'abstenir !

     

    1903076588.10.jpgRécemment, nous avons salué le lancement - enfin ! -  du projet Galileo, représentant « l’Europe comme on l’aime ». On célèbre, en ce moment, les trente ans d'Erasmus, une autre réussite européenne à porter au crédit de cette « bonne » Europe, une Europe utile, qui sert aux échanges et au(x) progrès de l'ensemble de la population estudiantine du continent.

    A l'exact opposé de cette Europe bureau-technocratique, obèse et malfaisante du Parlement Européen et surtout de la Commission européenne, qui, elle, sans aucune légitimité, n'est rien d'autre qu'une entrave permanente et insupportable pour les nations historiques de la chère vieille Europe. 

    On sait peu que, justement, le projet Erasmus - qui, maintenant, n'est plus un projet, mais une belle réalité, en expansion constante - s'enracinait, en 1987, lorsqu'il fut lancé, dans l'histoire du continent, et dans ses racines intellectuelles et spirituelles. Et c'est pour cela que « ça a marché ».

    Il faut en effet remonter à 1303 et à la fondation de l'Université d'Avignon par le pape Boniface VIII pour trouver l'intuition première de ce qui ne devait se concrétiser que... sept siècles plus tard. Très peu de temps avant de mourir (des suites de son conflit avec Philippe le Bel et de « l’affaire d’Agnani ») le pape fonda l'Université d'Avignon, six ans à peine avant que son successeur, Clément V ne réinstalle la papauté à Rome.

    Boniface VIII voulait concurrencer la Sorbonne, jugée trop proche du pouvoir de son ennemi juré, le roi de France, Philippe le Bel. Les écoles qui existaient déjà (médecine, théologie, arts grammaticaux…) furent fédérées autour de quatre facultés et connurent très vite un grand développement, avec la présence des papes en Avignon : rivalisant avec les universités de Montpellier et Toulouse, l'Université toute récente accueillit 17.000 étudiants ! 

    En 1608, une jeune fille, venue de Barcelone, Juliana Morell y fut reçue Docteur en Lois, devenant ainsi la première femme docteur d'Europe.

    L'idée novatrice du Pape était que, pour obtenir ses diplômes, un étudiant devait avoir fréquenté sinon toutes, du moins les principales Universités européennes d'alors (Bologne, La Sorbonne, Oxford, Salamanque...).

    C'est cette intuition qui sera, en quelque sorte, à la base du projet d'échanges intereuropéen d'étudiants qui verra le jour, à la fin du XXe siècle, sous le nom de Projet Erasmus...

    Un projet, et une réussite, qui, soit dit en passant, confirment la fameuse phrase apocryphe prêtée à Jean Monnet, au sujet de l'Europe : » Si c’était à refaire, je commencerais par la culture «. 

    Pour terminer ce rapide coup de chapeau à l'une des belles réussites de l'Europe des peuples, des nations, des patries, un petit sourire - en ces temps si moroses, cela ne se refuse pas ! : Gilles Bouleau, dans son JT du 9 janvier (TF1-20heures), n'a pas craint d'appeler Erasme « philosophe des Lumières ». Il vaut mieux entendre cela que d'être sourd, non ? 

    Peu de temps auparavant, un journaliste de France info avait déclaré, non moins imperturbable, que « les Antilles faisaient partie de la République française depuis le XVIe siècle » : la Faculté de Médecine devra peut-être songer à interdire radio et télévision aux cardiaques cultivés !  

  • La Droite française ... qui n'a su lire ni Gramsci ni Michéa

     

    3578948983.jpgLa Droite ou ce qui en tient lieu ne s'est jamais réellement souciée de libérer l'Ecole, partant la jeunesse de France, de la tutelle jalouse, autoritaire, monopolistique, de la Gauche, voire de l'extrême-gauche, de l'idéologie qu'elle y impose et des désastreux pédagogistes.

    Ces puissances tutélaires extrêmement autoritaires, à la bolchevique, gouvernent l'Education nationale en quelque sorte de droit sous toutes nos républiques, y compris la Ve ; De Gaulle ne s'est pas intéressé à cette question, pas plus que ses successeurs se réclamant de son héritage.  L'on eut mai 68 et le long et inexorable déclin de l'Ecole française, jusqu'au désastre actuel.

    N'accusons pas la gauche d'y avoir jeté toutes ses forces : elle est là pour ça ;  elle met en pratique son idéologie qui n'est pas secrète. La Droite, à l'inverse, porte une terrible responsabilité dans cette affaire : elle a laissé faire ; elle a souvent poursuivi, repris à son compte la politique de la gauche la plus idéologique, elle y a prêté, de fait, son concours. Mauriac, en son temps, ce qui veut dire il y a bien longtemps, avait fait à De Gaulle, le reproche d'abandonner la jeunesse française à son triste sort, de la laisser en des mains destructrices.

    La Droite française - économiste plus que tout - s'est moquée des domaines de la culture : de l'Ecole, de l'Université, des artistes, des journalistes et des écrivains,  de l'idéologie. Elle n'a su lire ni Gramsci ni Michéa. Elle a tout abandonné à ses adversaires qui sont aussi, souvent ceux de la France.  Elle en récolte aujourd'hui les fruits amers, autant que ceux produits par sa propre inconduite.

    L'importance de ce sujet nous a amenés à en faire l'axe de nos publications d'aujourd'hui. Lafautearousseau   

  • Consternant, le slogan de "Paris J.O. 2024" en anglais : le Système, à la dérive, jette le français à la poubelle !

     

    Mur-bleu gds.jpg« La langue de la République est le français ». Cela, c'est ce que dit la Constitution de la Ve République, dans son Article 2. Mais les organisateurs de la candidature de Paris aux J.O. de 2024 ont, librement, choisi de rédiger leur slogan... en anglais !

    On pourrait se contenter d'un haussement d’épaules ; ou dire que cela n'a aucune importance ; ou s'étonner que ces organisateurs aient une si piètre opinion de la culture des anglo-saxons, qu'ils trouvent leurs capacités intellectuelles si limitées, pour penser que, s'ils veulent les atteindre, il faut leur traduire deux petits mots (« Venez partager ») ; on pourrait même dire que tout cela est offensant pour les anglo-saxons, au fond...

    Mais le message envoyé au monde par ce surprenant slogan nous renvoie aussi, et surtout, à une réalité et à une évolution assez attristante, et bien pire que tout cela... 

    A l'époque des rois, qui firent de la France la première puissance de la Terre, toutes les élites du monde parlaient naturellement français. Il n'était nul besoin d'inscrire dans quelque texte que ce fut que les gens cultivés devaient parler français. Les gens cultivés parlaient français parce que la France était, démographiquement, « la Chine de l’Europe », c'est-à-dire le pays le plus peuplé, et de très loin ; et aussi parce que le rayonnement intellectuel du pays, joint à sa richesse économique et à sa force militaire, « étonnait le monde », selon le joli mot de Jean Dutourd.

    228 ans après la catastrophique Révolution, et 141 ans après l'instauration - encore plus catastrophique - de la République idéologique, celle-ci a déclassé la France à un point tel ; elle a mis la France dans un tel état de ruine, en tous domaines, que celle-ci ne brille plus, n'attire plus, ne séduit plus. Si le soleil fut l'emblème de Louis XIV, l'éteignoir pourrait être celui de la république idéologique ! 

    « Eteignoir : Instrument en forme de cône creux, destiné à éteindre la flamme de la chandelle », nous disent les dictionnaires. C'est exactement cela, la France, après 142 ans de calamiteuse république idéologique : une bougie, une flamme, éteinte par le « cône creux » d'un Système creux, d'ailleurs lui-même à bout de souffle, épuisé, au bout du rouleau. Au bout du creux...

    L'abandon par le Système et par les pouvoirs publics eux-mêmes de la langue française, leur manque d'amour, de passion envers ce trésor que le monde entier continue d'admirer en fournit l'une des preuves les plus accablantes : le Système n'aura réussi, au bout d'un siècle et demi d'existence, qu'à voiler qu'a effacer le rayonnement de la France, et à faire même partager à des Français l'indifférence vis-à-vis de leur héritage, voire son rejet pur et simple.

    Ce qui est d'ailleurs logique, puisque le programme de la révolution idéologique est « du passé faisons table rase ! »

    C'est ce Système-là qu'il faut dénoncer sans discontinuer comme la cause de notre décadence stupéfiante ; et avec lui ce pays légal, corrompu jusqu'au trognon, qui épuise le Pays réel, entraînant notre Terre, sa Culture, sa Civilisation dans la spirale sans fin d'une décadence et d'un déclassement qui n'en finissent plus. 

     

  • « Je pense à vous ce soir, Ô morts de février »

     

    AUX MORTS DE FÉVRIER 

     

    Les derniers coups de feu continuent de briller

    Dans le jour indistinct où sont tombés les nôtres

    Sur onze ans de retard serai-je donc des vôtres

    Je pense à vous ce soir, Ô morts de février.  

    456540205_L.jpg

    Robert Brasillach, 5 février 1945

    (Poèmes de Fresnes, Minuit et demi, 1945)

     

    Sur le 6 février 34, lire aussi dans Lafautearousseau ...

    Pourquoi le 6 février 1934 a été stérile : l'analyse de Maurice PUJO

    Maurras a-t-il vraiment « voulu » le roi ? La réponse de Pierre Boutang

     

  • Culture & Société • Luchini : « Péguy, Zola, Marx et moi... Des cimes de la littérature aux mornes plaines de la politique »

     

    Par Vincent Trémolet de Villers    

    ENTRETIEN - Fabrice Luchini pose sur notre époque [Figaro - 31.01] le regard ébahi d'un exilé dans son propre monde. Tout l'accable, tout l'amuse et, quand il joint aux bonheurs de l'esprit l'acuité du moraliste, notre langue retrouve, comme par miracle, sa pureté cristalline et son propos nous captive. Luchini est un membre éminent de la cohorte grandissante des antimodernes. Et cela n'est pas indifférent pour l'évolution des idées, des esprits de la France contemporaine en crise aigüe. Quant au sujet de son prochain spectacle qui tourne autour de l'argent, est-il utile d'en souligner l'actualité ?  LFAR  

    Est-ce du théâtre, un spectacle, une conversation ? C'est une forme unique : la sienne. Depuis vingt-cinq ans, Fabrice Luchini monte en scène avec pour seule troupe les ombres de nos grands écrivains. Elles lui tiennent compagnie pour une profonde et jubilatoire polyphonie. Poésie ? *, son spectacle construit autour du Bateau ivre, triomphe depuis deux ans et vient d'être récompensé par un Globe de cristal. Au Théâtre du Montparnasse, ils sont près de huit cents, chaque soir, à venir l'écouter dire Rimbaud, Labiche et Céline.

    À la fin du mois de mars, en parallèle de ce spectacle, il débute une lecture autour de l'argent. Péguy, Zola, Marx, Bruckner tracent le profil de l'âme humaine sur le revers d'une pièce de monnaie. Ce sera au Théâtre des Déchargeurs**. Nommé aux César (catégorie meilleur acteur) pour son rôle de bourgeois burlesque dans Ma loute, le film de Bruno Dumont, le comédien poursuit inlassablement son travail sur la puissance du verbe.

     

    Vous entamez à la fin du mois de mars une lecture de textes autour de l'argent. Pourquoi l’argent ?

    La crise des subprimes est à la base de cette lecture. C'était en 2008. J'étais totalement traumatisé par cette crise financière. Je regardais C dans l'air quatre fois par semaine : on nous disait que c'était la guerre, qu'on était en 1929. Dans ce désastre, on voyait apparaître les économistes. On ne les avait jamais vus avant. Depuis, ils sont devenus des stars sublimes : Élie Cohen, Philippe Dessertine, Christian Saint-Étienne, Michel Didier, Bernard Maris. Ils disaient des mots incompréhensibles : « Fonds toxiques », « effet dominos » … Je voulais comprendre.

    Êtes-vous parvenu à comprendre ?

    Pas vraiment. J'appelle Philippe Dessertine, je l'invite à déjeuner. C'était rue de l'Abbaye. Dessertine me dit : « Tout se joue ce week-end » puis, il ajoute : « Heureusement, on a Musca. » Musca ? Je lui demande qui est Musca. C'est un génie, me dit-il, le secrétaire général de l'Élysée, il vole entre Berlin, Londres, Hongkong. Hongkong ! Je le relance sur les fonds toxiques. Il me dit : « Prenons un exemple, la Société générale. » Je blêmis. Je lui demande pourquoi il choisit cette banque. Il me répond que c'est un exemple. Je m'inquiète. Je sors de table pour appeler ma banque, la Société générale. Mon envie de compréhension de la macroéconomie disparaît : je ne pense plus qu'à mon assurance-vie. Je veux vider mon compte tout de suite, maintenant ! Si tous les Français avaient réagi comme moi, nous aurions eu une émeute. « L’argent rend fous les gens », c'est par ces mots de Jules Romains que je commence ma lecture. C'est une vérité indiscutable.

    Comment avez-vous construit cette lecture ?

    Pendant ces année-là, j'ai passé du temps avec Dominique Reynié et d'autres économistes à parler de ces sujets. Je voulais résolument faire un spectacle sur l'argent mais je ne savais pas par quel bout l'aborder.

    Pourquoi ?

    Un spectacle sur l'argent, c'est la fausse bonne idée. On ne peut pas circonscrire le problème. J'ai abandonné le projet. Je l'ai repris il y a quelques mois, en sélectionnant des écrivains qui abordent la question : Péguy, Guitry, Pagnol, Bruckner, Jean Cau… Il y a aussi un texte de Marx qui explique que l'argent vient compenser les impuissances. « Je suis laid », dit Marx, mais je peux avoir la plus belle dans mon lit, donc je ne suis pas laid. Ce qui est terrifiant pour Marx dans l'argent, c'est qu'il réconcilie tous les contraires et donc il déréalise toutes les vraies substances de la personnalité, de l'identité.

    Quel est votre rapport à l’argent ?

    Je n'arrête pas d'essayer d'objectiver ce que gagnent les gens que je vois. Ce qu'ils ont en TVA, en masse salariale. « Masse salariale » : c'est un mot que j'adore. « T’en es où au niveau de la masse salariale ?» Ça crée un contact, ça enclenche une conversation. On manque souvent de sujet de conversation. Si je déjeune avec Finkielkraut et qu'il me renseigne sur Heidegger, je ne lui parle pas « masse salariale ».

    Vous gagnez beaucoup d'argent…

    Je gagne très bien ma vie. J'ai certainement dû être très inquiet jusqu'à 35 ans. Pas tellement généreux. Je viens d'un milieu où le soir mon père terminait ses quinze heures de travail en comptant la caisse. C'était un acte ritualisé. Tout était éteint, il était 9 heures du soir et mon père comptait les pièces que lui avaient rapportées les salades, les pommes de terre, les carottes et les fruits. La caisse était au centre de notre vie. Je ne suis pas du tout né dans une famille de professeurs qui voteraient à gauche et qui trouveraient que l'argent est sale. Pour mon père, l'argent n'était pas sale. Nous habitions rue Bachelet et le soir il lisait en se collant à la fenêtre pour avoir la lumière du lampadaire de la rue, ce qui lui évitait d'allumer nos lampes. Ça faisait des économies.

    Et vous ?

    Je n'ai aucun mythe de l'abondance, du généreux qui invite. En revanche, je ne suis absolument pas avare. J'aimais énormément mon père, il avait tous les droits, mais aujourd'hui je suis allergique à l'avarice. C'est trop violent. Mon père avait une vraie cohérence dans l'avarice. Il ne voyait personne. Il n'avait aucun ami. Une fois, je lui montre deux personnes dans la rue et je lui dis : « Évidemment, vous ne vous invitez pas, mais tu leur parles au square, quand même ?» Il me répond : « Oh oui, c'est les seuls », et arrive cette phrase : « Ils sont aussi cons que nous. » Un silence. Il poursuit : « Ou disons qu'on est aussi cons qu'eux. » C'est du Schopenhauer !

    Au cœur de cette lecture, il y a un long extrait de L'Argent, de Charles Péguy…

    Péguy est la matrice de cette lecture. Pourtant, il était très loin de moi, Péguy. À tort. Je le plaçais à côté de Léon Bloy : le chrétien exalté complètement dément. J'avais une vague référence qui me revenait et qui disait que sa maman empaillait des chaises. Mon professeur Jean-Laurent Cochet répétait : « La paille en dessous était faite comme les cathédrales. » À part cela, je n'avais pas de rapport à Péguy.

    Alors pourquoi Péguy ?

    Pourquoi Péguy ? Parce que dans l'écriture de Péguy, il y a des ressemblances avec Bach. Pourquoi Péguy ? Parce qu'il y a chez lui une haine de la modernité et j'y suis toujours assez sensible. Il y a une langue, de la répétition : il faut aller dans le secret. Dans la tête de quelques-uns, Péguy, c'est poussiéreux, c'est la France moisie. Pour d'autres, c'est le socialiste, le catholique, l'héroïque défenseur de Dreyfus. Mais moi, je me fous des commentaires. L'écume, c'est le travail des intellectuels. Le mien consiste à rejoindre les courants profonds. J'essaye de remonter à l'origine. Comment on arrive à cette écume ? L'acteur doit être dans une innocence qui frise la bêtise. Avant de chercher à commenter Péguy, je cherche à retrouver ses rythmes, son humeur.

    Mais il y a une vision du monde chez Péguy…

    Disons qu'il n'est pas très « revenu universel », le Péguy. C'est même l'anti-Benoît Hamon puisqu'il ne cesse de dire que « travailler, c'est prier ». Alors que je n'ai ni la grâce ni la joie d'avoir la foi, je continue, par Nietzsche, de tourner autour du christianisme ; mais avec Péguy je reconnais qu'on entre dans quelque chose qui est de l'ordre du mystère. Écoutons cette voix qui remonte du fond des âges : « Nos vieux maîtres, nos bons maîtres n'étaient pas seulement des hommes de l'ancienne France. Ils nous enseignaient au fond la morale, je dirai même l'être de l'ancienne France. » Il continue : « Ils nous enseignaient la même chose que les curés et les curés nous enseignaient la même chose qu'eux. » Quand il décrit Paris, on dirait de la sociologie contemporaine : « La population est coupée en deux classes si parfaitement séparées que jamais on n'avait vu tant d'argent rouler pour le plaisir, et l'argent se refuser à ce point au travail. Et tant d'argent rouler pour le luxe et l'argent se refuser à ce point à la pauvreté. » En 1910, Péguy voit l'horreur de la financiarisation du réel !

    Qu'est-ce qui distingue une lecture d'un spectacle ?

    Une lecture n'impose aucune obligation de représentation théâtrale. L'exercice que je vais commencer sera un exercice austère, dans une salle minuscule, à peine 70 personnes. C'est une lecture écologique. Je minimise les émissions de CO2, je réduis mon bilan carbone.

    Vous en êtes à près de 300 représentations pour Poésie ? Comptez-vous arrêter le spectacle ?

    Je ne vais pas arrêter Poésie ? pour une raison simple : depuis une vingtaine de jours, je crois être un peu moins incorrect sur Le Bateau ivre. Tant qu'il y a de la demande, je n'arrête pas, et la demande continue. Manifestement, un certain public a encore le goût des textes de Molière, Rimbaud ou Céline. Et j'éprouve une grande joie à aller au Théâtre du Montparnasse.

    Comment expliquez-vous ce succès phénoménal ?

    Qui sait ce qui motive celui qui réserve son billet pour Poésie ? Si je suis optimiste, je songe à la belle formule de Yasmina Reza, qui me confiait à la fin du spectacle : « J’ai compris pourquoi je suis française. » Si je suis pessimiste, j'imagine que les spectateurs se disent : « Bon, il y a de la culture mais on ne s'ennuie pas. » Pourquoi les gens adhèrent-ils ? C'est un mystère. Dans le spectacle, j'essaye simplement de mêler ma petite vie à la grandeur de nos textes. Le miracle, c'est de faire un spectacle qui a de la drôlerie sans céder au fascisme de l'obligation du divertissement.

    Les spectateurs sortent enthousiasmés !

    Peut-être avaient-ils besoin de se retrouver dans notre langue…

    N'êtes-vous pas lassé ?

    Pas du tout. J'ai la chance de servir Rimbaud, Nietzsche, Molière. Est-ce qu'un interprète se lasse de jouer les Partitas de Bach ?

    Les politiques viennent vous voir. Comment jugez-vous la parole politique ?

    Délicat, comme question. Devenir orateur ou maîtriser l'art du récit demande des décennies. Cela fait trente-cinq ans que j'y travaille. La restitution d'un texte englobe une obsession quasiment mystique. Ce n'est pas avec quatre séances qu'un homme politique peut trouver son médium (qu'il m'arrive moi-même de perdre). Les rythmes, les sons, l’amplitude : là sont les vrais problèmes. Comment être ample sans être grandiloquent ? Comment être entendu pour produire l'écoute et comment ne pas crier pour ne pas produire l’inconfortable ?

    Vous lirez aussi du Jean Cau…

    Les portraits écrits par Jean Cau, ça frôle le Saint-Simon.

    Toujours antimoderne ?

    Toujours aussi insensible au concept de progrès. Quand il y a des discours merveilleusement emphatiques sur l'horreur de cette cochonnerie de société, j'y souscris. Notre société est absurde. L'Amérique a fait gagner un président simplement parce qu'il a fait le buzz sur une coupe de cheveux. Moi, en tant que coiffeur, la présence de Trump, avec sa mèche, ses cheveux qu'il a piqués à des singes en voie d'extinction, cela me pétrifie. Comment voulez-vous croire à la société ?

    Êtes-vous inquiet ?

    Entre le Chinois qu'a pas l'air marrant, Trump et ses cheveux délirants, Poutine et ses airs impénétrables, disons que je ne suis pas optimiste. Mais je ne l'ai jamais été. La seule question, dit Cioran, est la suivante : « Est-ce que l'homme était utile ?» Il raconte que dans les dîners mondains il partait toujours le dernier « parce que celui qui partait en premier, tout le monde le massacrait ». Ce n'était pas des gens méchants, c'était des gens gentils. Mais c'est comme ça, dès que quelqu'un part, « on se le fait ».

    C'est sombre…

    Il faut se méfier du pessimisme aussi. Il peut devenir une convention et un autre conformisme comme l'enthousiasme mécanique. Le pessimisme des écrivains que j'aime tourne parfois à la posture. C'est une autre doxa, un politiquement correct inversé.

    Il vaut donc mieux être Philinte qu'Alceste…

    Mon éthique de 2017 ? C'est pas la faute des autres et je ne juge personne. Je veux décider de ne pas avoir d'opinion.

    Par exemple ?

    Si j'ouvre W9 et que je vois Les Ch'tis dans la jet set. Ce sont des gens avec des casquettes en arrière, des filles avec des shorts très appétissants, des maillots de bain, une maison, une piscine et des dialogues insensés. Je regarde ça, ahuri, mais je n'ai pas d'opinion. Sur l'écran, il y a une histoire d'amour, puis il y a une fille qui n'est pas intégrée, puis ils vont se balader en voiture et puis ils se refoutent à poil. Ils sont bronzés avec plein de tatouages. J'objective. Je m'informe pour savoir combien de gens regardent cette série, combien de gens regardent Plus belle la vie. 3,4 millions pour Plus belle la vie, et Bruno Dumont ne fera jamais plus de 1,5 million. Mais ce serait trop simple si le camp du bien, c'était Bruno Dumont, et le camp du mal, Les Ch'tis dans la jet set. Tout cela est une énigme et tout cela me dépasse. Je me contente d'aller dans un minuscule théâtre de 70 places pour dire du Charles Péguy, au magnifique Théâtre du Montparnasse pour dire Le Bateau ivre.   

    « Pourquoi Péguy ? Parce qu'il y a chez lui une haine de la modernité et j'y suis toujours assez sensible » 

     

    * Poésie ? Du 7 au 20 mars. Tél. : 01 43 22 77 74 - www.theatremontparnasse.com

    ** Des écrivains parlent d’argent, Du 28 mars au 27 avril. Les mardi, mercredi et jeudi. Tél. : 01 42 36 00 50 - www.lesdechargeurs.fr

    902697296.jpg

    Vincent Trémolet de Villers 

    Lire aussi ...

    Fabrice Luchini : « Un peu de poésie, à l'heure de l'écrasante puissance de la bêtise » 

    Fabrice Luchini : les écrivains, la langue française, la psychanalyse et moi 

    Ma Loute : Bruno Dumont vu par Fabrice Luchini

  • BD • « Robert Sax », un tome 2 réussi

     

    par Anne Bernet

     

    938307326.pngGaragiste à Bruxelles dans les années 50, Robert Sax, garçon brillant au physique de jeune premier, s’ennuie. Mêlé sans le vouloir à une affaire d’espionnage, il a trouvé du charme au danger avant de retourner à la grisaille du quotidien.

    Mais voici qu’un article relatant l’assassinat de la chanteuse Suzy Belair, abattue en pleine rue alors qu’elle rentrait chez elle après son spectacle, réveille chez Sax de douloureux souvenirs : c’est exactement dans les mêmes circonstances qu’Alice, sa jeune épouse, fut assassinée sept ans plus tôt en rentrant du cinéma … Le coupable n’a jamais été identifié.

    Persuadé de pouvoir enfin faire arrêter l’assassin de sa femme, et malgré les avertissements de son beau-frère commissaire à la PJ, Sax est prêt à prendre tous les risques …
    L’hommage à Jacobs, le créateur de Blake et Mortimer, est évident, jusque dans le style du dessin, qui s’en inspire fortement.

    C’est d’ailleurs ce qui confère l’essentiel de son charme à un album délicieusement « rétro ». Tout est dans l’ambiance et c’est, il faut l’admettre, réussi. 

    Rodolphe, Alloing et Drac, Robert Sax, Paradis perdu, tome 2, Delcourt, 48p., 14,50 €.

    Politique magazine - Consulter ... S'abonner ...

  • Sagesse éternelle d'Homère : « Le gouvernement de plusieurs n'est pas bon, n'ayons qu'un seul chef, un roi »

     

    homere2.jpg

    « C'est l'idée qui fait le bon bûcheron, ce n'est pas la force. C'est l'idée qui permet au pilote sur la mer lie de vin de diriger la nef rapide toute secouée des vents. C'est l'idée qui fait qu'un cocher l'emporte sur d'autres cochers. Tel se fie à son char et à son attelage, et sottement prend le tournant très large, en allant de-ci de-là, en laissant les chevaux vaguer par la piste, au lieu d'en rester maître. Tel autre, qui conduit des chevaux médiocres, en revanche sait plus d'un tour ; il ne quitte pas la borne des yeux, il prend le tournant très court, il n'oublie pas de tenir d'abord fermement ses bêtes au moyen des rênes de cuir, et il mène sans défaillance l'oeil rivé sur qui le précède. » 

    HOMERE - L'ILIADE - Chant XXIII

    Discours de Nestor, Trad. Paul Mazon

     

    Grand merci aux amis [P.P., M.P., Ph.P.] qui nous ont transmis, en manière de vœux, ce superbe discours d'Homère - qui rejoint ici la citation de lui, bien connue, que Maurras avait placée en tête de son Enquête sur la Monarchie, parue en l'année 1900, à l'orée du siècle dernier. Le lecteur qui le souhaitera s'y reportera. LFAR