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Idées, débats... - Page 436

  • Livres • Un prophète d’un nouvel âge ?

     

    par Gérard Leclerc

     

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    Faut-il ériger l’historien Yuval Noah Harari en prophète de notre temps ? On pourrait sérieusement l’envisager, rien qu’à constater le nombre de lecteurs enthousiastes que suscite son best-seller intitulé Homo Sapiens, traduit en une quarantaine de langues et diffusé à plus de huit millions d’exemplaires. Le président Barack Obama s’est passionné pour cet essai qui prétend nous raconter l’histoire de l’humanité en une synthèse complète. Et il est rejoint par un nombre impressionnant de personnalités, acteurs majeurs du monde actuel, tels Bill Gates ou Mark Zuckerberg. Et il semble que le second essai d’Harari, intitulé Homo Deus. Une brève histoire de l’avenir, rencontre un succès identique. Le savoir-faire de l’auteur y est pour beaucoup, car il faut du talent pour rendre crédible un tel tour de force. Mais il faut ajouter que sa prétention à nous offrir une explication globale de l’aventure humaine et à nous révéler vers quel accomplissement nous nous dirigeons a de quoi intriguer et même fasciner.

    Les deux livres d’Harari font penser à une œuvre de jeunesse d’Ernest Renan L’avenir de la science, car nous y trouvons le même projet qui consiste à imaginer le devenir de notre espèce grâce à la trajectoire du développement scientifique. Dans un cas comme dans l’autre, nous avons affaire à une sorte de gnose scientiste, un substitut de religion, puisqu’il s’agit de donner du sens à l’existence, tout en s’émancipant des âges révolus de l’humanité.

    Renan se demandait si la science n’obtiendrait pas l’ultime secret du monde, celui qui donnerait à l’homme le pouvoir de créer, qui jusqu’ici n’appartenait qu’à Dieu. Harari, lui, est aussi fasciné par les progrès de l’esprit de l’homme, mais il se montre angoissé par le développement d’une intelligence artificielle, que ce même homme a fabriquée et qui risque demain de le mieux connaître que lui-même ne se connaît. Ce n’est plus exactement la gnose scientiste de Renan, mais elle est encore plus inquiétante avec sa projection transhumaniste. Et c’est dans ce climat culturel-là, que les chrétiens ont à faire connaître la Bonne Nouvelle, dont saint Irénée montrait, qu’avec le Christ, elle était la nouveauté absolue. C’est un sacré défi !  

    Gérard Leclerc

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 16 novembre 2017

  • Société • Quand Robert Merle prédisait une dictature féministe dans « Les Hommes protégés »

     

    Par   

    LECTURE - Emilie de Lépinau a lu le roman de Robert Merle « Les hommes protégés », une dystopie où les femmes prennent le pouvoir et se vengent de siècles de domination masculine. Toute ressemblance avec des situations existantes ne saurait être que fortuite.  Il en résulte une recension savoureuse et subtile [Figarovox - 31.10] sur un sujet de société en pleine actualité.  LFAR

     

    « Ce qui me plonge dans un profond malaise, c'est le genre de grief retenu ici contre moi, un sourire, un regard, le contact d'une main, autant de crimes. Je ne m'habituerai jamais à cette contre-sexualité fanatique. » 

    L'aveu n'est pas celui d'un porc balancé par un hashtag mais la confession de Ralph Martinelli, héros des Hommes Protégés de Robert Merle. Dans ce roman paru en 1974, une encéphalite décime aux États-Unis les hommes en âge de procréer. Quelques chercheurs, nécessaires à l'avancée de la science, bénéficient d'une protection rapprochée, et sont chargés sous la bonne garde de miliciennes, de trouver un remède.

    Pris dans cette quarantaine, le docteur Martinelli, charmant chercheur, veuf et père de famille, incarne le bouc émissaire de ses laborantines, de ses supérieures et des femmes alentour qui telles des mégères de Brassens ont accumulé leur rancune patiemment et se vengent de siècles de domination masculine. Devant remplacer les hommes dans la force de l'âge disparus, dans tous les domaines et à tous les niveaux, les femmes s'organisent jusqu'à faire du gouvernement une dictature féministe.

    De la plus juste à la plus outrée, de la jouissance sans homme à l'interdiction du « Mademoiselle », leurs réactions et décisions constituent un catalogue de la lutte pour les droits des femmes les plus contemporains, à croire que l'on se passe du Robert Merle sous le manteau dans les AG des mouvements féministes.

    Le docteur Martinelli se désespère : « C'est à ne pas y croire ! Il n'a pas fallu plus de six mois pour imposer à ces femmes intelligentes la phraséologie du moment et les idées qu'elle véhicule.»

    L'homme reproducteur est le malade, il est celui à abattre. À la limite à guérir de sa virilité qui le tue, car s'il accepte la castration, il sera épargné par l'encéphalite et pourra arborer à sa boutonnière le A en lettres dorées des Ablationnistes, non pas comme marque d'infamie mais comme un blason d'honneur.

    Dans cette nouvelle société misandre, les hommes « entiers » n'ont d'autres choix que d'être protégés, alors à la merci de gardiennes vengeresses ou alors clandestins, errants, traqués par la furie légalisée.

    Libérées du joug phallocrate, les femmes n'en sont pas toutefois quittes de leur incorrigible désir de maternité, et en ces temps de grande pénurie de mâles, l'État se doit d'organiser la procréation sans père.

    Le docteur Martinelli doute : « Pense-t-on modifier une méthode qui depuis deux millions d'années a fait ses preuves ? Je me le demande car j'ai lu hier un article dans lequel je lis ces lignes stupéfiantes : l'acte sexuel devrait cesser d'être le moyen employé par la société pour renouveler la population.» Mais dans la dystopie de Robert Merle, l'État Providence est prodigue et reconvertit les prostituées touchées par un chômage massif en fonctionnaires assermentées, chargées du prélèvement obligatoire de la précieuse denrée.

    Cruelle et burlesque conséquence de l'éradication de la jeunesse masculine, les vieillards épargnés par l'épidémie sont la proie d'adolescentes harceleuses et violeuses, rendues folles de leurs désirs insatiables.

    Face aux ministres sadiques, garces moralistes, miliciennes amoureuses et autres espionnes rigides, la résistance masculine s'organise et tente de sauver le pays du totalitarisme féministe. Même outre-Atlantique, le Président français use de son influence pour ramener l'Amérique à la raison. Il s'appelle Emmanuel. Son nom finit en « on ». Il a 88 ans et a été élu par « la tradition politique la plus constante de la France, la gérontophilie ». Dommage, à quelques lettres et à une surprise politique près, la fable fût encore plus drôle.

    Dans un sursaut ontologique coupable, le docteur Martinelli ose une œillade à une collègue :

    « J'ai retrouvé le temps d'un regard la vieille complicité entre les deux sexes qui était pour moi un des bonheurs quotidiens de la vie.»  

    #NebalancezpasRobertMerle 

    Emilie de Lépinau est journaliste. Elle écrit pour Le Figaro Histoire

    Emilie Lépinau

  • Cinéma • L’École buissonnière

     

    Par Guilhem de Tarlé 

    L’École buissonnière, une comédie dramatique de Nicolas Vanier,  avec François Cluzet, Valérie Karsenty, François Berléand, Jean Scandel, Éric Elmosino, Frédéric Saurel 

    « Heureux qui comme Ulysse à fait un beau voyage »

    Et c'est effectivement à un très beau voyage en Sologne que nous convie ce film.

    J’ai craint quelques instants une mièvrerie qui n’aurait rien à raconter, pour la seule mise en scène de Cluzet.

    Mais non…

    L’École buissonnière, c’est un joli conte de fées, la merveilleuse aventure d’un petit orphelin à la recherche de sa mère (biologie quand tu nous tiens!), une belle histoire de tendresse, d'amitié et d’amour où, malgré Valérie Karsenty et le canif de Totoche, il n'y a pas de « scène de ménage ».

    Un film campagnard, enraciné, pour les goûts simples de Pêche, Chasse, Nature et Traditions, et de Cuisine frugale où le bio véritable a l’humilité de ne pas s’afficher.

    Un film pour tout public… sauf les bobos, d’ailleurs Médiapart appelle à son boycott !

    Raison de plus pour nous y précipiter avec nos enfants ou petits-enfants, en leur chantant comme autrefois : 

    « Ah mon beau château
    Ma tantire lire lo ».  

  • Bernanos contre l'indifférence ...

     

     

    « Le démon de notre coeur s'appelle " à quoi bon ? " »

     

    Georges Bernanos

     

    Conférence aux étudiants brésiliens, Rio de Janeiro, 22 décembre 1944. Bibliothèque de la Pléiade, Essais et écrits de combat, t. 2, p. 962. -

  • L’avènement d’un totalitarisme

     

    par Gérard Leclerc

     

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    Le centième anniversaire de la révolution russe contraste étrangement avec ce que fut la célébration de son cinquantième anniversaire. Il ne faut pas oublier que les événements de 1968 ont suivi immédiatement cette célébration de 1967. Et à ce moment, le coup de force de Lénine était encore magnifié dans tout un secteur d’opinion militante en phase avec un milieu intellectuel encore acquis au marxisme-léninisme. Dans la tête de beaucoup de jeunes émeutiers de Mai 68, il y avait l’idée de recommencer ce qui s’était produit un demi siècle auparavant à Saint Pétersbourg avec Lénine. On peut même dire qu’il y eut durant toute cette période une sorte de réenchantement du marxisme et de l’idéal communiste. Réenchantement qui commença à se dissiper tout de suite avec la répression brutale du Printemps de Prague par les chars soviétiques. On connaît la suite, avec Soljenitsyne et la révélation de L’archipel du goulag, et puis en 1978 l’élection du cardinal Karol Wojtyla au siège de Rome.

    En 2017, la révolution de 1917 n’est donc plus reçue de la même façon. Avec l’effondrement du système soviétique en 1989, est venue l’heure d’un jugement impitoyable à l’égard d’un système totalitaire qui fit d’innombrables victimes. À l’opposé de l’image romantique du soulèvement du peuple des travailleurs, s’est imposée la réalité d’une dictature absolue, fondée sur un parti unique et sur une police politique, la Tcheka, « un organe, explique l’historien Stéphane Courtois, chargé de défendre le régime par tous les moyens de violence, depuis le fichage des populations et la délation généralisée jusqu’à la terreur de masse utilisée comme moyen de gouvernement ».

    Le pape Pie XI avait condamné ce système en 1937, dans son encyclique Divini redemptoris. Cela n’empêcha pas toute une frange de catholiques de se laisser prendre au mirage du modèle soviétique, en allant parfois très loin dans la collaboration avec le parti communiste. Pourtant en France, le père Gaston Fessard avait lancé un avertissement solennel en 1945 dans un manifeste intitulé France prends garde de perdre ta liberté. C’était Gaston Fessard aussi, qui avait rédigé auparavant un manifeste contre le nazisme France prends garde de perdre ton âme. Avec les deux totalitarismes du XXe siècle, c’était bien l’âme et la liberté qui étaient en péril. 

    Gérard Leclerc

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 9 novembre 2017

  • Le stupide mépris des ancêtres

    L'Apothéose d'Homère, Ingres, 1827, Musée du Louvre
     

    Par  Mathieu Bock-Côté

    Cette tribune [11.11] est de celles que Mathieu Bock-Côté donne sur son blogue du Journal de Montréal. Il est vrai que nous reprenons volontiers et souvent ses écrits tant ils sont pertinents, proches de nos propres idées, et collent, de façon vivante, intelligente et claire, à l'actualité la plus intéressante. Il s'agit ici de l'arrogance des modernes ...  LFAR  

     

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    Permettez-moi de méditer un peu sur notre époque et ses travers. Une des choses qui frappe le plus, lorsqu’on pense à nos contemporains, c’est leur immodestie.

    Je m’explique. Ils se regardent, ils se contemplent, et ne cessent de s’émerveiller d’être nés à notre époque.

    Immodestie

    Surtout, ils regardent leurs ancêtres avec mépris et les accablent de tous les maux. L’accusation est connue : ils étaient racistes, sexistes, homophobes et compagnie. Ils étaient fermés sur le monde. Ils étaient ignorants et arriérés. Et on pourrait continuer longtemps cette énumération de reproches. 

    Évidemment, si nos contemporains sont capables de faire ainsi le procès de leurs ancêtres, c’est qu’ils se croient moralement supérieurs à eux. Ils se sentent délivrés des anciens préjugés. Ils se voient comme des humains purifiés. 

    Cette arrogance des modernes a des conséquences bien réelles sur notre vie collective.

    Comment pouvons-nous, par exemple, avoir un minimum de fierté nationale si, au fil des siècles, nous ne parvenons pas à nous voir autrement que comme des salauds ?

    Comment admirer les héros de notre histoire si nous ne voyons en eux que des hommes machistes, écrasants, intolérants, ou des femmes dominées, soumises, martyrisées ?

    Comment admirer les fondateurs et les explorateurs de la Nouvelle-France si nous les voyons comme des conquérants pillards et racistes venus s’emparer d’un monde où ils n’auraient jamais dû mettre les pieds ?

    Fierté

    De même, comment pouvons-nous transmettre la culture à l’école si nous croyons qu’elle est contaminée par des préjugés et des stéréotypes dont il faudrait surtout la nettoyer ?

    Comment admirer de grandes œuvres littéraires si nous n’y voyons que le reflet d’époques détestables qui se seraient exprimées à travers elles ?

    Nous vivons dans un monde qui cultive le stupide mépris des ancêtres. Il éduque ses enfants dans une posture qui les amène à rejeter la civilisation dont ils héritent. Notre monde est suicidaire.  

    Mathieu Bock-Côté

    Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (VLB éditeur, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012) de La dénationalisation tranquille (Boréal, 2007), de Le multiculturalisme comme religion politique (éd. du Cerf, 2016) et de Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).

  • Al-Qaryatayn, ville martyre

    L'armée syrienne reprend Qaryatayn

     

    Par Antoine de Lacoste

     

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    L'armée syrienne vient de reprendre la petite ville d'Al-Qaryatayn à Daesh, ville que les islamistes avaient reconquise le 1er octobre dernier.

    Ce n'est pas la première fois que cette localité change de mains, mais s'il est nécessaire de parler d'elle, c'est qu'elle est un symbole de ce que vivent les chrétiens soumis à la barbarie islamiste.

    Qaryatayn est située à un endroit stratégique entre Damas et Palmyre. C'est pourquoi c'est une ville très ancienne, dont les thermes étaient réputés à l'époque romaine. Elle est mentionnée au XIIè siècle comme étant une ville entièrement chrétienne.

    Son déclin économique commence au XIXè siècle, avec le développement des transports qui réduit son rôle d'étape nécessaire entre le désert et les grandes villes de l'ouest syrien.

    Lorsque la guerre éclate en 2011, Qaryatayn compte 15 000 habitants dont 2000 chrétiens (1500 syriaques orthodoxes et 500 syriaques catholiques). Le monastère de Mar Elian (qui signifie Saint Julien l'Ancien) est le centre de la vie chrétienne de la ville. Dirigé par un prêtre exceptionnel, Jacques Mourad, il va servir de refuge à de nombreux chrétiens qui fuient les combats et les exactions islamistes.

    Mais au printemps 2015, après la prise de Palmyre par Daesh, un commando islamiste pénètre dans le monastère et enlève le Père Mourad ainsi que son diacre, Boutros. Ils sont emprisonnés près de Palmyre, enchaînés à un mur et attendent la mort en priant.

    Le 4 août 2015, Daesh prend Qaryatayn et déportent les chrétiens, près de Palmyre également.

    Un événement étrange va alors se produire : un chef islamiste entre dans la sordide cellule de Mourad et Boutros et les conduit auprès de leurs ouailles enfermées non loin de là. Il aura ce commentaire laconique : « ils nous cassent les oreilles à vous réclamer toute la journée ». Mystérieuse mansuétude...

    Mais elle se paiera chère ensuite. Le 21 août, les bulldozers de Daesh rasent le monastère. Fondé au VIè siècle, il abritait le corps de Saint Julien. Pour faire bonne mesure, le cimetière chrétien est également rasé. Les paroissiens prisonniers sont ensuite déportés, vers Raqqa pour la plupart ; on ne sait pas ce qu'ils sont devenus.

    Quant à Jacques Mourad et Boutros, ils sont frappés tous les jours, subissent des simulacres d'égorgement et des pressions incessantes pour se convertir à l'islam. Finalement, ils vont subir une terrible flagellation. S'encourageant mutuellement et se réjouissant de souffrir comme le Christ, ils tiendront et ne céderont rien.

    En octobre, à la suite de mystérieuses tractations dont l'orient a le secret, ils sont, à leur grande surprise, libérés.

    Puis, en avril 2016, l'armée syrienne reprend Qaryatayn. Trop tard hélas pour la communauté chrétienne qui a totalement disparu.

    Le 1er octobre, alors que l'armée a lancé sa grande offensive vers l'est (l'Euphrate, Deir-ez-Zor et la frontière iraquienne), Daesh multiplie les coups de main dans son dos et reprend plusieurs localités près de Homs, dont la pauvre Qaryatayn. Cela ne durera guère cette fois,  car si les islamistes peuvent encore réaliser des conquêtes ponctuelles, ils ne sont plus assez forts pour tenir des villes.

    Aujourd'hui, Qaryatayn est de nouveau  libre, mais quinze siècles d'histoire chrétienne ont été anéantis.

    Tout cela s'est fait dans une indifférence à peu près générale, mais aussi avec la complicité active des dirigeants occidentaux, France et Etats-Unis en tête, pour qui Bachar était l'ennemi à abattre : « l'homme qui tue son propre peuple » pour reprendre le slogan stupide des médias.

    Les chrétiens de Qaryatayn ont sans doute une vision des choses légèrement différente, s'ils sont encore vivants...  

    Retrouvez l'ensemble des chroniques syriennes d'Antoine de Lacoste dans notre catégorie Actualité Monde

  • Littérature • Bloy et Bernanos

     

    par Gérard Leclerc

     

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    Hier, Leonardo Castellani, un étonnant génie du pays de notre pape François, nous offrait, en quelque sorte, une clé pour entrer dans l’intimité de cet autre génie qu’est Léon Bloy.

    Une clé qui risquait d’en rebuter plus d’un. Reconnaissons-le : l’annonce du Royaume avec Bloy, ça n’est pas une partie de plaisir. Ça risque même d’en faire fuir beaucoup. Mais la Bonne Nouvelle ne se traduit pas non plus facilement en termes publicitaires. L’Évangile, qui nous amène au Vendredi saint, suffirait à nous en avertir. Et de ce point de vue là, Bloy est dans la ligne, il ne nous raconte pas d’histoire. Bernanos confirme le diagnostic de Castellani. Il a écrit en 1947 un texte intitulé Dans l’amitié de Léon Bloy, où il note que si l’écrivain a dans le monde, et singulièrement en Amérique latine, des milliers d’amis, « nul, en apparence, n’a moins que lui recherché l’amitié ; il l’eut plutôt déconcertée, découragée, il l’a souvent défiée, provoquée avec une espèce de colère sacrée… ».

    De cette attitude, Bernanos tire une leçon pour son temps qui peut être prolongée encore aujourd’hui. Et là encore, il nous faut encaisser. Nous sommes, en effet, très loin d’une thématique qui a cours chez nous autour de « l’ouverture au monde ». Nous serions trop loin des attentes du monde, et c’est pourquoi l’Évangile n’y serait pas entendu. Bien sûr, il y a quelque chose de vrai là-dedans, si l’on entend par ouverture proximité avec le prochain, écoute du cœur. Mais c’est tout autre chose qu’un alignement sur l’esprit du temps et les idéologies en cour.

    C’est là que l’inflexibilité de Bloy et de Bernanos fait réfléchir. La question n’est pas, je traduis, de se trouver du côté du monde, mais de s’y trouver avec Jésus Christ. Et pour cela, il y a des ruptures nécessaires, des conversions, et même des polémiques, comme il y a des polémiques dans l’Évangile. Polémiques qui ne servent pas à rabaisser l’autre, mais à le faire émerger, ne serait-ce que pour découvrir la charte du Royaume, où se trouve exalté l’esprit de pauvreté. Cet esprit que Léon Bloy a poursuivi toute sa vie.   

    Gérard Leclerc

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 7 novembre 2017

  • Littérature • Léon Bloy vu par Leonardo Castellani

     

    par Gérard Leclerc

     

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    Le 3 novembre 1917, il y a donc cent ans, mourait Léon Bloy, cet immense écrivain, que l’on ne pouvait mieux définir que comme « pèlerin de l’absolu ».

    Parmi ses lecteurs d’aujourd’hui, le pape François lui-même, qui le cita dans sa première homélie. Pourtant est-il personnage plus décalé pour l’époque que celui-là, qui l’était déjà totalement pour la sienne ? Si Léon Bloy écrivait aujourd’hui, il y a toute chance pour que sa prose soit considérée avec effroi, tant il serait capable de violence. Une violence qui lui vaudrait probablement d’être convoqué à la dix-septième chambre, où sont jugés les délits de presse. Mais celle violence bloyenne n’était pas inspirée par la méchanceté, en dépit d’un ton polémique qui paraîtrait inouï à nos contemporains. Elle était destinée à réveiller le lecteur, l’interlocuteur pour qu’il fasse retour sur lui-même et se pose sérieusement la question du sens de sa vie.

    C’est vrai qu’il peut faire peur celui que son collègue Huysmans appelait aussi « le mendiant ingrat ». Ses imprécations continuelles, ses insultes aussi, même à l’égard de sa patrie : « La France, naguère fille aînée de l’Église, est aujourd’hui l’immondice du monde. » Et il avait autant d’amabilités à l’égard du monde littéraire. Personne n’en a fait un tableau d’une telle cruauté. Mais tout cela serait vain, insupportable, s’il n’y avait en son cœur une foi immense, inextinguible.

    Le dernier texte sur Bloy que j’ai lu émane d’un personnage aussi étonnant que lui, un prêtre argentin, Léonardo Castellani*. S’il m’arrivait de rencontrer le pape François, je lui demanderais illico s’il connaît ce compatriote. En tout cas, Castellani a bien lu Bloy, et il ne peut s’empêcher de le rapprocher de tous ceux qui ont connu « la nuit obscure du sens » celle qui est propre aux mystiques : « Certains passent toute leur vie dans une nuit obscure. Pourquoi ? … Dieu seul le sait… », dit Jean de la Croix. Et Castellani d’interroger l’énigme : « Et si c’était parce que le monde actuel se précipite vers la nuit et que Dieu entend l’anticiper de cette manière » avec des prophètes comme le mendiant ingrat ? On trouvera que c’est difficile à avaler… Lisons Léon Bloy pour percer cette nuit.  (A suivre demain : Bloy et Bernanos)

    * Leonardo Castellani, Le verbe dans le sang (présenté et annoté par Erick Audouard), Éditions Pierre-Guillaume de Roux.

    Gérard Leclerc

    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 6 novembre 2017

  • Cinéma • Au revoir là-haut

     

    Par Guilhem de Tarlé 

    Au revoir là-haut, une comédie dramatique d’Albert Dupontel, avec Albert Dupontel, Laurent Lafitte, Niels Arestrup, Émilie Dequenne 

    Commençons par dire que je n’ai pas lu ce Goncourt de Pierre Lemaître en 2013, et que je ne connaissais donc rien de cette histoire.

    J’avais vu la bande-annonce annonciatrice d’un film déjanté… On n’est donc pas trompé sur la marchandise, mais le casting, notamment Niels Arestrup, m’attirait, et j’avais donc programmé de le voir bien avant d’en avoir lu une critique, que je qualifie de dithyrambique – et j’en demande pardon à son auteur – dans Présent.

    Regrettons enfin qu’Albert Maillard raconte son histoire à mi-voix avec une bande-son par ailleurs bruyante, ce qui ne permet pas de tout entendre. 

    Quelle image de 14-18 ce film donne-t-il, en cette troisième année du centenaire, avec un lieutenant assassin – il tire lui-même dans le dos de ses soldats - qui organise à la veille de l’armistice, contre les instructions reçues de sa hiérarchie, une dernière bataille qui décimera les poilus sous ses ordres : « Mourir le premier jour de la guerre, c’est con, mais mourir le dernier jour, c’est encore plus con » dira à juste titre Albert Maillard.

    Oui, c’est un bon film en ce sens que le début et la fin prennent aux tripes (la partie centrale est un peu longue) ; mais un scénario qui ne reflète – chère Caroline Parmentier – aucun hommage aux « gueules cassées » et je crains, bien au contraire,  un certain antimilitarisme ainsi peut-être qu’une volonté de salir la France et les Français avec des escroqueries d’après-guerre… 

    Il est vrai que dénoncer des « produits dérivés » de la Grande Guerre permet de taire ceux de la dernière. 

    Au revoir… 

    PS : en toute amitié, Caroline. 

  • Histoire • La Canebière, une superbe plaquette ... Les royalistes, l'Action Française y sont présents

     

    Affiche tract expo CANEBIERE v4.jpgLe Comité du Vieux Marseille, association de défense du patrimoine, vient de sortir une superbe plaquette de 194 pages sur l’histoire de la Canebière. Parmi celles-ci, quatre pages évoquent l’Action Française à propos de Jeanne d’Arc, surtout dans les années 30. Ces éléments de l’histoire de l’Action Française marseillaise intéressent les lecteurs de Lafautearousseau.

    Nous en avons publié des bonnes feuilles que vous pourrez retrouver en cliquant sur les liens ci-dessous.

    Si vous voulez acheter la plaquette, elle est en vente (18 €) à partir du 6 novembre dans le hall du Centre Bourse à Marseille puis à partir du 20 novembre en librairie.  •  Lafautearousseau.

    Histoire • Action Française : Les royalistes sur la Canebière

    Histoire • Action Française : Les affrontements des années 30 à Marseille

  • Société • Pires que les pires curés

     

    Par  Mathieu Bock-Côté

    Cette tribune [4.11] est de celles que Mathieu Bock-Côté donne sur son blogue du Journal de Montréal et auxquelles nous faisons très souvent écho .    LFAR  

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    Il y a quelques jours, c’était l’Halloween. Normalement, pour l’occasion, on se déguise, et généralement, en autre que soi.

    C’est ce que s’était dit le directeur d’un collège montréalais. Apparemment, il aimait Bob Marley. Il s’est donc déguisé en Bob Marley et s’est noirci le visage.

    Erreur ! Dans le climat hystérique qui domine aujourd’hui, son déguisement a fait scandale sur les médias sociaux.

    Fanatisme

    Des agités lui ont non seulement reproché sa possible maladresse, mais l’ont accusé de racisme parce qu’il se serait livré à la pratique du blackface. Ils font comme si nous étions ici dans le sud des États-Unis ! À quand une leçon d’histoire et de géographie ?

    Ils hystérisent la société en lançant sans cesse des accusations de racisme et de sexisme. Il s’agit d’une minorité criarde qui impose ses lubies à la société entière en créant des controverses grotesques et des scandales artificiels.

    On a appris que ce pauvre directeur d’école a même dû faire la tournée des classes ensuite pour s’excuser à ceux qu’il aurait blessés. C’est ainsi qu’on met les adultes en pénitence : on les condamne à l’humiliation publique.

    La société est désormais patrouillée par des idéologues excités qui font penser aux pires curés d’hier.

    Ils vérifient les costumes d’Halloween et écrivent des codes pour nous expliquer comment nous déguiser de manière politiquement correcte. Ils surveillent les blagues. Ils inspectent les publicités. Ce sont des préposés aux tabous et des policiers des bonnes mœurs multiculturalistes.

    Censure

    Ils réclament un droit de veto sur tout ce qui se dit en société et se croient tout permis parce qu’ils s’imaginent les défenseurs des « minorités opprimées ».

    Ils ont le fanatisme de ceux qui croient avoir le monopole de la vertu. Ils rêvent de censure.

    Pour un costume d’Halloween qu’ils désapprouvent, ils peuvent vous gâcher la vie. Et ils n’hésiteront pas à le faire. 

    Mathieu Bock-Côté

    Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (VLB éditeur, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012) de La dénationalisation tranquille (Boréal, 2007), de Le multiculturalisme comme religion politique (éd. du Cerf, 2016) et de Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).

  • Histoire • Action Française : Les affrontements des années 30 à Marseille

     

    Le Comité du Vieux Marseille, association de défense du patrimoine, vient de sortir une superbe plaquette de 194 pages sur l’histoire de la Canebière. Parmi celles-ci, quatre pages évoquent l’Action Française à propos de Jeanne d’Arc, surtout dans les années 30. Ces éléments de l’histoire de l’Action Française marseillaise intéressent les lecteurs de Lafautearousseau.

     

    Affiche tract expo CANEBIERE v4.jpgLes affrontements des années 30

    Comme l’ont écrit Roger Duchêne et Jean Contrucci dans leur livre Marseille, la Canebière « est, dans les années 1920-1930, le point focal de Marseille », surtout après sa prolongation en 1927. Dans une ville où l’opposition entre droite et gauche se durcissait, chaque occupation de la célèbre artère était une victoire.

    L’émeute parisienne du 6 février 1934 où, à la suite du scandale politico-financier Stavisky, les ligues d’extrême-droite affrontèrent la police, n’eut pas son équivalent à Marseille. Quatre cents membres de l’Action Française défilèrent ; il y eut quelques affrontements avec des communistes, à la hauteur du cours Saint-Louis, mais le calme se rétablit vite.

    En revanche, la gauche s’organisa pour s’opposer à ce qu’elle considérait comme une tentative de coup d’État fasciste. Pour la première fois, socialistes, communistes et syndicalistes CGT et CGTU, défilèrent ensemble, le matin du 12 février, sur la Canebière, les boulevards de La Madeleine et de Longchamp. L’atmosphère se gâta l’après-midi où des frictions entre policiers et manifestants transformèrent le centre-ville en champ de bataille, peut-être avec l’aide de provocateurs. Une fusillade devant La Bourse fit un mort et plusieurs blessés.

    L’atmosphère s’alourdit de plus en plus, surtout après les élections municipales de 1935, à l’issue desquelles les socialistes d’Henri Tasso battirent les listes de Simon Sabiani.

    Poussés par cette dynamique, les 100 000 partisans de la Gauche unie remontèrent toute la Canebière, le 14 juillet 1936 ; la droite, quant à elle, avait réuni dix fois moins de Marseillais.

    Le 1er mai 1936 enregistra un record de participation pour descendre la célèbre voie. Le cortège traditionnel pour Jeanne d’Arc rassembla cette année-là 8 000 personnes dont 800 royalistes sous la bannière de divers groupements qui remplaçaient la Ligue d’Action Française dissoute le 13 février. Ainsi, le commandant Dromard se retrouva-t-il en tête de l’association Marius Plateau des Anciens combattants royalistes.

    Le Front Populaire remporta les élections des 26 avril et 3 mai 1936 qui furent suivies par un grand mouvement de grève. Le parti de Sabiani s’opposa violemment à lui, le 17 juin. « La Canebière est devenue un champ clos où, par petits groupes, on règle des comptes. Des autodafés de drapeaux rouges sont ponctuées par le feu nourri des armes. Des voitures sont renversées. Les dégâts matériels sont impressionnants » (in Simon Sabiani, par J.-B. Nicolaï).

    Ces incidents n’empêchèrent pas le succès du 14 juillet : 200 000 personnes allèrent du Prado aux Mobiles, d’après Fernand Pauriol (Rouge-Midi – 17 juillet), contre 20 000 dans le défilé des nationaux.

    La fête de Jeanne d’Arc du 8 mai 1937 montra que la droite marseillaise s’était unie contre le « péril rouge ». D’après l’Action Française, sur les « 20 000 patriotes qui défilèrent derrière Eugène Pierre, nouveau président du Comité, Simon Sabiani avec le P.P.F. et Jacques Arnoult avec le P.S.F. (ex-Croix de Feu), étaient présents pour la première fois ».

    Les Marseillais eurent de nombreuses occasions d’arpenter le pavé mais combien étaient-ils réellement ? Les chiffres publiés dans les journaux sont tous sujets à caution. Robert Mencherini, dans Midi rouge, ombres et lumières (éditions Syllepse, 2004), le souligne en citant l’exemple du 1er mai 1938 : dans Rouge-Midi, le journal communiste, la Canebière est noire de monde ; dans Marseille-Matin, le quotidien de Jean Fraissinet, elle est vide.

    Le 14 juillet 1939, on aurait dû fêter le cent-cinquantième anniversaire de la Révolution. La journée fut marquée au contraire par deux défilés marquant la division des Français à la veille de la guerre.  • (Fin)

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    1er mai 1936, manifestation de force des syndicats

  • Histoire • Action Française : Les royalistes sur la Canebière

     

    Le Comité du Vieux Marseille, association de défense du patrimoine, vient de sortir une superbe plaquette de 194 pages sur l’histoire de la Canebière. Parmi celles-ci, quatre pages évoquent l’Action Française à propos de Jeanne d’Arc, surtout dans les années 30. Ces éléments de l’histoire de l’Action Française marseillaise intéressent les lecteurs de Lafautearousseau.

     

    Affiche tract expo CANEBIERE v4.jpgL’importance de Jeanne d’Arc

    Après la Grande Guerre, la droite prit l’habitude de se montrer dans la rue à l’occasion de la fête de Jeanne d’Arc.

    Des hommages avaient commencé, avant 1914, souvent à l’initiative de l’Action Française. Après avoir été béatifiée en 1909, la libératrice d’Orléans fut canonisée le 16 mai 1920. Deux mois plus tard, le 10 juillet, une loi votée par les députés et sénateurs (et toujours en vigueur) instaurait « la fête nationale de Jeanne d’Arc et du patriotisme », le deuxième dimanche du mois de mai.

    Chaque année, pour une journée, le centre-ville et surtout la Canebière furent ainsi occupés par le cortège d’un grand nombre d’associations religieuses et politiques de droite.

    L’exemple du cortège du dimanche 10 mai 1935, tel qu’il est décrit par Le Petit Marseillais, Le Soleil et L’Action Française, montre comment on l’avait organisé et qui furent les participants. En tête, après la fanfare, venaient les porteurs des fleurs offertes par le Comité des Fêtes de Jeanne d’Arc, présidé par Dominique Piazza, le créateur de la carte postale illustrée. Puis, ce fut le tour des jeunes sportifs des patronages et des scouts. La partie catholique se terminait avec les groupes de travailleurs chrétiens, après qu’eurent défilé des délégations d’anciens combattants et d’officiers de réserve. La seconde partie comprenait les « groupements nationaux », c’est-à-dire les partis politiques nationalistes. On aperçut Solidarité française et les Jeunesses Patriotes de Francis d’Azambuja, mais on remarqua surtout le gros des troupes, constitué par les royalistes de l’Action Française. Ils suivaient le commandant Louis Dromard, président de la fédération provençale, et l’amiral Antoine Schwerer, président national de la Ligue d’Action Française, de 1930 à 1936, venu à Marseille assister au Cinquième congrès de la fédération, prévu ce même jour. Parmi les adhérents, se distinguaient les Dames et Jeunes Filles Royalistes, l’Association Marius Plateau (anciens combattants), les étudiants d’AF et les Camelots du Roi (service d’ordre du mouvement). Il faut noter que les Croix de Feu défilèrent de façon indépendante, un peu avant les autres.

    Le cortège démarra à 9 h 30, cours Pierre Puget, passa place de la Préfecture et rue Saint-Ferréol pour déboucher sur la Canebière qu’il remonta jusqu’à l’église des Réformés. Sur le trajet, les façades des immeubles étaient souvent décorées à la gloire de l’héroïne. On déposa des fleurs au pied du monument aux Mobiles, puis, en l’absence des autorités civiles, militaires et religieuses déjà entrées dans l’église Saint-Vincent-de-Paul, il y eut une minute de silence qui s’acheva par le cri de « Vive la France », poussé trois fois par Dominique Piazza ; la foule entonna enfin La Marseillaise et la messe solennelle put commencer. À 11 heures, la Société des Touristes du Midi donna un concert, au kiosque. Les festivités se poursuivirent l’après-midi au jardin zoologique avec un festival de chanteurs. Enfin, à 21 heures, les Marseillais purent profiter d’un feu d’artifice tiré sur la colline Notre-Dame de La Garde. En 1934, des navires de guerre japonais en escale à Marseille donnèrent le ton en braquant leurs puissants projecteurs sur la basilique pour l’illuminer.

    Si un tel déploiement de population donnait une grande impression de puissance il n’empêchait pas les incidents. Ainsi, le 10 mai 1935, à la sortie de la messe, des bagarres se produisirent entre vendeurs de journaux. D’autres, plus importantes, opposèrent, à l’angle du cours Belsunce, communistes et royalistes à la sortie de leur banquet. Dix Camelots du roi furent blessés. Dix ans auparavant, le 9 février 1925, une réunion catholique salle Prat, rue Paradis, avait été attaquée par l’extrême-gauche. La bagarre avait fait deux morts. La mairie de Siméon Flaissières prit prétexte de ce drame pour interdire plusieurs manifestations. Ce fut le cas de l’hommage à Jeanne d’Arc du 9 mai 1926. Les ligues politiques bravèrent l’interdiction sans incident.  (A suivre)

    AF Canebière réformés.jpg

    En 1943, le cortège de Jeanne d'Arc se termina par l’inauguration de la statue de la sainte placée sur le parvis des Réformés. L’oeuvre de Louis Bottinelly avait été financée au moyen d’une souscription lancée par le Comité Jeanne d’Arc en 1941. Le 9 mai 1943, le commandant Dromard, devenu président du comité, remit officiellement, en présence de Mgr Delay, la statue à la ville de Marseille, représentée par Henri Ripert.

  • Cinéma • Le tombeur de ces dames, une comédie de Jerry Lewis avec Jerry Lewis

     

    Par Guilhem de Tarlé 

    Le tombeur de ces dames, une comédie de Jerry Lewis avec Jerry Lewis 

    J’ai eu honte d’être allé voir ce film, honte d’y avoir entraîné mon épouse et honte en me disant qu’il me faudrait confesser ma faute, la « reconnaître devant mes frères » comme on dit maintenant,  dans un petit commentaire !

    Ma seule « bouée » était de me dire que je voyais cette comédie dans « le plus vieux cinéma du monde », l’Eden-Théâtre de La Ciotat, dans lequel  les frères Lumière réalisèrent en 1895 une expérience du cinématographe. J’ai pu donc, comme à l’origine, me décharger de mon péché. C’est L’Eden qui se déconsidérait en mettant cette « pochade » à l’affiche, et non pas moi qui la regardais !

    Nous étions 7 dans la salle en début de séance et 5 seulement à lire « The End »… et je remercie Anne, ma femme, d’être restée stoïque à côté de moi !

    Je me réjouissais pourtant de ce spectacle, en en ayant un autre en mémoire (lequel ?) qui m’avait beaucoup amusé quand j’étais enfant avec le duo Jerry Lewis et Dean Martin !

    Je mentirais si je disais que, cette fois-ci, je n’ai pas parfois éclaté de rire, d’autant plus que j’avais en perspective et je redoutais la réaction post-visionnage d’Anne, mais c’est quand même trop grand-guignolesque, trop clownesque, trop de grimaces pour être vraiment drôle. C’est réellement du cinéma nul pour les nuls… ça a d’ailleurs cet intérêt historique d’une réalisation américaine de 1961 !

    Ce n’est ni vulgaire ni scabreux… Peut-être cela amuserait mes petits-enfants autour de dix ans, et en tout cas c’est moins malsain que bien d’autres choses qu’ils pourraient être conduits à voir !