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  • Saint Augustin actuel [4]

    Augustin dans son bureau par Vittore Carpaccio, 1502 

    Par Rémi Hugues 

    saint_augustin visuel.jpgA l'approche des Fêtes, Rémi Hugues propose une série de sept articles consacrés à l'actualité de la pensée de Saint Augustin, père de l'Eglise. Ils sont publiés chaque jour. Bonne lecture !  LFAR

     

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    Augustin dʼHippone, premier grand philosophe de lʼÉglise  

    Comme tout bon moderne qui se respecte, Marx sʼattache à rompre avec la Tradition, ce qui le pousse à adopter le matérialisme, inspiré quʼil est tant par Héraclite que par lʼéconomisme des philosophes anglais. La pensée traditionnelle est en réalité plus spiritualiste quʼidéaliste. Elle est fondée sur le postulat suivant : un Esprit suprême, Dieu, a, à la suite d’un acte impératif, créé la matière ex nihilo. Le Verbe divin créateur façonne le monde physique, et non comme le croyaient gnostiques et cathares, le dieu mauvais, le démiurge. 

    Grégoire de Nysse, qui vécut comme Augustin au IVème siècle, en Cappadoce, une région de la Turquie actuelle, explique que la matière naquit de lʼinteraction, de lʼinterférence, entre des puissances spirituelles. Il dit en effet que « la nature spirituelle donne lʼexistence à des forces spirituelles et la rencontre de celles-ci donne naissance à la matière. »[1] Chez Marx le cœur du problème réside non pas dans la création de la matière, sa mise en effectivité, mais dans sa transformation. Qui contrôle le processus de transformation de la matière, la gestion de lʼutile et du nuisible, quels types de machines sont utilisées, quel est le statut juridique du lieu de cette transformation, ainsi que le statut juridique de ceux qui sont les exécutants, ceux qui plus prosaïquement reçoivent les ordres... 

    ainsi-parlait-zarathoustra-9782253006756_0.jpgMais le matérialisme de Marx est inséparable de son athéisme, forme radicale du rationalisme. Il participe pleinement à ce processus que Friedrich Nietzsche appellera dans Ainsi parlait Zarathoustra la « mort de Dieu », la sécularisation. Une autre expression de Nietzsche sʼapplique parfaitement à Marx : celle dʼinversion ou de renversement des valeurs. Lʼun des traits caractéristiques du système philosophique composé par ce dernier est lʼantinomisme, lʼhostilité à la Loi du Père. 

    Prince_of_darkness.jpgÀ la loi du Père suprême, que lʼon retrouve explicitement exposée chez son propre gendre Edward Aveling, dans la stance The Prince of Darkness :

    « Telle la tombe qui étend ses ailes

    Il passe, ô peuple, Satan le grand !

    Salut grand défenseur de la Raison !

    Vers toi monteront lʼencens sacré et les vœux

    Tu as détrôné le dieu du prêtre. »[2] 

    Un antinomisme visiblement typique des socialistes, comme en attestent ces lignes écrites de la main de Pierre-Joseph Proudhon dans De la justice dans la Révolution et dans lʼÉglise : « Viens, Satan, viens le calomnié des prêtres et des rois, que je tʼembrasse, que je te serre sur ma poitrine ! »[3] 

    Mais aussi cette hostilité vise le père symbolique de Marx, son maître à penser, à savoir Hegel. Le jeune Marx appartenait même à un groupe qui se faisait appeler les « hégéliens de gauche ». En 1844 Hegel est lʼobjet dʼune diatribe de la part de son ancien disciple, publiée dans les Annales franco-allemandes. Marx y écrit : « Hegel va presque jusquʼà la servilité. On le voit totalement contaminé par la misérable arrogance du fonctionnarisme prussien, qui, dans son étroit esprit bureaucratique, regarde la confiance en soi-même de lʼopinion (subjective) du peuple. »[4]      

    Conséquence de cette rébellion contre le père, Marx oppose, à lʼidéalisme de Hegel, le matérialisme. Il renverse également le rapport de détermination établi par Hegel entre lʼÉtat et la société civile. 

    711x400_gettyimages-159828268.jpgHegel défend lʼidée selon laquelle lʼÉtat, en tant que garant de lʼordre, assure aux individus la sécurité, qui est la première des libertés. Cʼest le sens de sa définition de lʼÉtat comme réalité effective de la liberté concrète. Lʼexistence de lʼÉtat est la condition de possibilité de la vie menée collectivement par les hommes au sein dʼassociations en tout genre (familles, tribus, églises, guildes, entreprises, clubs, etc.), hormis la vie de lʼÉtat lui-même, qui correspond à lʼadministration de la coercition (police, justice, et armée ; les fameuses fonctions régaliennes de lʼÉtat). 

    Cette vie hors de lʼÉtat, Hegel lʼappelle dans Principes de la philosophie du droit État « extérieur », État « de la nécessité et de lʼentendement », ou plus simplement société civile bourgeoise. Jean-François Kervégan met en évidence que Hegel est à lʼorigine de « la conceptualisation dʼune société civile bourgeoise qui, enracinée dans le mécanisme du monde moderne (capitaliste) dʼéchanger et de produire, est à la fois distincte de la sphère proprement politique et nécessairement coordonnée et subordonnée à celle-ci. »[5] 

    Il y a en somme pour Hegel un lien de dépendance de la société civile vis-à-vis de lʼÉtat. Lʼune est subordonnée à lʼautre. Selon lui le politique est principe : à la fois premier, originaire, et prescripteur, organisateur de la vie sociale en général. Rapport qui chez Marx est inversé : la société civile (bourgeoise) installe, fonde, lʼÉtat.  (A suivre)  

    [1]  Grégoire de Nysse, La création de lʼhomme, Paris, Cerf, 1943, p. 195. Ce traité date de 379 environ.
    [2]  Cité par Rolland Villeneux, Dictionnaire du diable, Paris, Omnibus, 1998, p. 72.
    [3]  Cité par ibid., p. 876.
    [4]  Karl Marx, Œuvres philosophiques, IV, Paris, Ivréa, 1981, p. 254.
    [5]  Jean-François Kervégan, Hegel Carl Schmitt. Le politique entre spéculation et positivité, Paris, P.U.F., 1992, p. 186-187.
    A lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même ...
    (Cliquer sur l'image)

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  • Cinéma • L'Empereur de Paris

     Par Guilhem de Tarlé 

    A l’affiche : L’Empereur de Paris, un film français de Jean-François Richet, avec Vincent Cassel (Vidocq),  Fabrice Luchini (Fouché), Freya Mavor (Annette).

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    L’Empereur de Paris, en tout cas, ce n’est pas le Roi des films.

    Dommage, on aurait pu avoir un joli spectacle, intéressant, « de cape et d’épée » dans l’Empire de Napoléon (« Pas Napoléon Barbichette, je veux dire le vrai Napoléon », comme le disait Panisse) alors que l’on assiste à un « western » parisien… en pire.

    Sous prétexte que la plus grande partie de l’action se passe dans les bas-fonds, éclairés par des chandelles, on ne voit rien… et, trop souvent, on n’entend pas !

    maxresdefault.jpgL’histoire de Vidocq est bâclée, et le scénario n’est même pas instructif !

    Certes on ne s’ennuie pas… - et j’avoue que mon épouse est moins sévère que moi – mais, ainsi que le disaient mes professeurs : « peut mieux faire ! ».   

    PS : vous pouvez retrouver ce « commentaire » et plusieurs dizaines d’autres sur mon blog Je ciné mate.

  • Apathie : Aujourd'hui, la police est le dernier rempart de la République ! l'État tient à un fil : ce fil, c'est la police !

     

    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpgEXCEPTIONNEL - La chose est fort rare mais, ici, Jean-Michel Aphatie parle d'or. Il faut regarder, écouter, cette vidéo alarmiste qui a sans-doute un grand fond de vérité. Vérité terrible, dit Apathie, pour une République dont l'État vacille comme dans les temps de grande crise. Sommes-nous assez conscients de la gravité de la situation ? A regarder absolument. LFAR

     

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  • Dandrieu a raison : « Certains utilisent des passages de la Parole de Dieu pour cautionner les migrations »

     

    par Laurent Dandrieu

    Laurent Dandrieu dénonce avec force le soutien du Vatican au Pacte mondial des migrations. Il invite les chrétiens à écouter la souffrance des peuples européens en situation d'insécurité culturelle et à réaffirmer avec conviction le droit de rester dans son pays. [Figarovox, 18.12]. Il déplore le désintérêt du souverain pontife pour les pays qui les accueillent. Lafautearousseau, de son côté (voir lien en fin d'article) a marqué son désaccord avec ces déclarations. Lorsque le Pape empiète sue le terrain politique et lorsque, ce faisant, il nuit gravement à la sécurité ou à la stabilité de notre société, nous n'avons aucunement l'obligation de le suivre et, au contraire, en de tels cas, nous avons le devoir de nous y opposer.  LFAR  

     

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    Depuis le début du pontificat, les prises de position répétées du pape François en faveur des migrants suscitent de nombreuses incompréhensions et critiques chez beaucoup de fidèles, qui les jugent irréalistes, contraires aux règles élémentaires du bien commun ou tout simplement incompatibles avec la survie des nations européennes et avec le droit des peuples européens à la continuité historique de leurs identités.

    Et depuis le début du pontificat, ceux qui soutiennent ces positions du pape rétorquent à ses détracteurs qu'il ne s'agirait, de la part de François, que d'une stricte mise en œuvre de la charité évangélique, d'un rappel vigoureux de la parabole du bon Samaritain et des appels de Jésus à accueillir l'étranger, que cela interdirait toute critique et fermerait la porte à tout débat. À mesure toutefois que le pontificat avance et que les textes et les déclarations s'accumulent, cette ligne de défense paraît de moins en moins tenable, les interventions du pape sur le sujet apparaissant de plus en plus clairement pour ce qu'elles sont : des positions qui ressortent de la politique - mais une politique malheureusement colonisée par la morale, et donc étrangère au souci du bien commun.

    Déjà, à l'été 2017, le message annuel du pape à l'occasion de la Journée mondiale du migrant et du réfugié énumérait pas moins de 21 mesures proposées aux gouvernements des pays d'accueil qui, si elles étaient appliquées, interdiraient à ceux-ci l'exercice de cette « prudence » dans l'accueil des migrants pourtant théoriquement prônée par le pape, et la possibilité même d'une politique migratoire maîtrisée. Aujourd'hui, le soutien enthousiaste du Vatican au « Pacte mondial des Nations unies pour des migrations sûres, ordonnées et régulières » ne fait que renforcer la conviction que le propos du pape n'est pas seulement de rappeler la dignité à laquelle a droit toute personne humaine, mais bien de promouvoir une vision du monde où la migration constitue l'horizon indépassable de l'humanité, et la voie de son salut.

    Preuve de cette adhésion enthousiaste, le pape avait dépêché à Marrakech, pour l'adoption du pacte, rien de moins que son Secrétaire d'État, Mgr Pietro Parolin. Rien d'étonnant à cela, puisque le journal la Croix souligne que « dès le début, le Saint-Siège avait (...) fortement promu le processus d'élaboration de ce pacte, en particulier à travers la section pour les migrants et les réfugiés du Dicastère pour le développement humain intégral, qui avait notamment publié vingt pistes d'action ». Et, sur la place Saint-Pierre, dimanche 16 décembre, le pape François a tenu à saluer l'adoption de ce pacte qui permettra à la communauté internationale « d'œuvrer avec responsabilité, solidarité et compassion envers ceux qui, pour des raisons diverses, ont quitté leur pays ».

    Mgr Parolin aura eu beau, à Marrakech, rappeler le droit fondamental « à ne pas émigrer », cela ne sera apparu, comme les appels à la prudence du pape François, que comme une précaution oratoire ou une concession rituelle aux opinions publiques, dans un contexte où il s'agissait d'apporter son soutien à un texte qui postule clairement que la migration est devenue la loi du genre humain, « partie intégrante de la mondialisation, reliant entre elles les sociétés d'une même région et d'une région à l'autre et faisant de nous tous des pays d'origine, de transit et de destination ». Migrations auxquelles il serait d'autant plus absurde de vouloir s'opposer « qu'à l'heure de la mondialisation, elles sont facteurs de prospérité, d'innovation et de développement durable ». Dès lors, même si la souveraineté nationale en matière de politique migratoire est posée en principe et même si les signataires s'engagent à « lutter contre les facteurs négatifs et les problèmes structurels qui poussent des personnes à quitter leur pays d'origine », l'objectif prioritaire du texte paraît nettement être moins d'endiguer le flot des migrations que de dégager « une meilleure gouvernance (qui) permette d'optimiser ces effets positifs » qu'elles sont censées engendrer. Il n'est d'ailleurs pas anodin de noter que ce sont les mêmes Nations unies, à l'origine de ce pacte, qui ont inventé dans un texte de 2001, le concept de « remplacement de population » censé pallier par des migrations massives le déficit démographique des nations occidentales.

    Au passage, notons que la dénonciation des fake news que constitueraient les craintes sur la nocivité du Pacte, alors que celui-ci, n'étant pas juridiquement contraignant, n'engagerait à rien de précis, est elle-même la plus formidable des fake news: car, que l'on sache, la Déclaration universelle des droits de l'homme n'est pas davantage un texte juridiquement contraignant : oserait-on dire qu'il n'engage à rien les États qui la reconnaissent ? Si demain, la CEDH ou toute autre juridiction intégrait le pacte pour les migrations à sa jurisprudence, ne constituerait-il pas un formidable moyen de pression sur les gouvernements qui l'auront adopté ? 

    C'est donc à un texte qui, demain, peut devenir directement opposable aux États que le pape François a donné son aval. Il ne s'agit pas de sa part d'une vague et énième pétition de principe, mais bel et bien d'un acte politique. Et d'un acte politique posé d'autant plus aisément que le texte de Nations unies rejoint au moins trois des constantes les plus marquantes du pape sur le sujet. D'abord, l'idée que les migrations seraient, malgré les tragédies personnelles qui peuvent en être l'origine, un bien fondamental pour la marche du monde. Opportunité d'exercer une « culture de la rencontre », « de créer de nouvelles synthèses culturelles », « occasion que la Providence nous offre pour contribuer à la construction d'une société plus juste » : le pape François n'est pas avare d'expressions pour exprimer cette vision, développée à des degrés divers par tous les papes depuis Jean XXIII : les migrations de masse seraient un moyen privilégié de progresser vers cette « unité de la famille humaine » qui est comme une « préfiguration anticipée de la Cité sans frontières de Dieu ». Les migrations, écrit ainsi le pape François, peuvent « ouvrir des espaces à la croissance d'une nouvelle humanité, annoncée par avance dans le mystère pascal : une humanité pour laquelle toute terre étrangère est une patrie et toute patrie est une terre étrangère ».

    La deuxième constante est que, dans ce processus censé conduire naturellement à un enrichissement humain et culturel des pays d'accueil, seul l'intérêt du migrant est considéré, puisque, « fuyant la guerre et la faim », comme ne cesse de le marteler le pape François, ce nouveau prolétaire des nations a pour ainsi dire un crédit illimité sur les anciens peuples colonisateurs, coupables de sa misère (le pape a explicitement limité la colonisation à une entreprise de pillage) et confits dans une opulence coupable, qu'ils ne répugneraient à partager que par des réflexes de peur ou de xénophobie. Quand il s'agit des Européens inquiets de l'immigration de masse et de la progression de l'islam, le Qui suis-je pour juger ? n'est plus de mise: la sentence est prononcée, sans même entendre la défense.

    Le problème est que cette vision caricaturale véhiculée par les déclarations du pape François ne correspond pas le moins du monde à la réalité. Des réfugiés « fuyant la guerre et la faim » ? Aussi opposés soient-ils sur la lecture politique du phénomène, les démographes s'accordent sur une chose, comme le notait Jean-Pierre Robin dans un récent article du Figaro : « Ce n'est pas “la misère du monde” qui franchit (…) la Méditerranée, mais les mieux formés et les plus argentés qui tentent l'aventure migratoire.» Loin de résoudre le problème de l'inégale distribution des richesses dans le monde, les migrations de masse l'aggravent en réalité, en privant les pays pauvres de leurs forces vives et en les plongeant dans une spirale de l'échec. Des pays opulents qui refuseraient, par pur égoïsme, d'ouvrir leurs frontières aux miséreux ? La récente révolte des Gilets jaunes et l'attention médiatique trop longtemps déniée qu'elle a enfin value à la France des oubliés a rappelé de manière tonitruante que la richesse apparente de nos sociétés masquait la paupérisation accélérée des classes populaires, qui admettent de moins en moins que leurs souffrances soient niées. Dans les innombrables déclarations du pape François sur l'accueil des migrants, on cherchera en vain une attention pour ces souffrances. Comme on cherchera en vain, sinon pour les condamner, une mention des inquiétudes que fait naître la présence de plus en plus massive d'un islam conquérant sur le territoire d'une Europe qui s'est construite comme une terre de chrétienté. « Le phénomène des migrations contribue à cultiver le “rêve” d'un avenir de paix pour l'humanité tout entière », écrivait Jean-Paul II en 2004 : aujourd'hui, communautarisme, dissociété, islamisme radical et appauvrissement généralisé aidant, le « rêve » a tourné au cauchemar pour toutes les parties concernées, mais le pape continue de rêver…

    Ce décalage entre ce que vivent les populations européennes et le discours pontifical amène à la troisième convergence entre le pape et les Nations unies : contaminé sans doute par le « en même temps » macronien, le texte du pacte mondial pour les migrations, tout en s'inscrivant « dans le plein respect de la liberté de la presse », n'en propose pas moins aux États signataires d'orienter le débat public en vue d'« amener le public à considérer les effets positifs qu'ont des migrations sûres, ordonnées et régulières » ; pour ce faire, il faudra « sensibiliser » les journalistes « aux questions de migration et à la terminologie afférente » et punir les récalcitrants qui persisteraient à ne pas présenter l'immigration sous un ses aspects les plus positifs, et donc « cesser d'allouer des fonds publics ou d'apporter un soutien matériel aux médias qui propagent systématiquement l'intolérance, la xénophobie, le racisme et les autres formes de discrimination envers les migrants ». Ce programme subjectif (on sait avec quelle facilité l'accusation d'intolérance est imputable à quiconque ne cède pas aux sirènes du sans-frontiérisme) et fort peu libéral rejoint les préoccupations de longue date du pape François qui, depuis le début de son pontificat, ne cesse d'admonester les journalistes coupables de propager une vision anxiogène de l'immigration, et à les appeler, au contraire, non pas à informer objectivement, mais à concourir à la « conversion des attitudes et à favoriser ce changement de comportement envers les migrants et les réfugiés ». Un appel à une « information » militante quelque peu consternante pour tout journaliste soucieux de décrire le réel tel qu'il est. C'est avec une consternation similaire que l'on entendait il y a quelques jours l'archevêque de Strasbourg, Mgr Ravel, lors de l'office en mémoire des victimes du récent attentat islamiste, déclarer qu'il ne fallait surtout pas en profiter pour réfléchir à la place de l'islam dans nos sociétés, ou à l'ampleur des migrations, « vieux démons » de division. Quand les disciples du Maître qui a enseigné que « la Vérité vous rendra libres » préfèrent cacher la poussière sous le tapis de peur de nuire au « vivre-ensemble », la belle liberté des enfants de Dieu a dangereusement du plomb dans l'aile.

    À l'heure où tous les peuples européens, les uns après les autres, entrent en rébellion contre des élites qui ont voulu les emmener de force là où ils ne voulaient pas aller, il est tragique de constater que le Vatican, comme le montre son soutien au pacte mondial pour les migrations, a choisi de se solidariser avec ces élites hors-sol plutôt que d'écouter les souffrances des peuples, au risque de creuser encore un peu plus le fossé béant qui la sépare désormais des Européens. À cette voie suicidaire, on nous permettra d'opposer les fortes paroles du cardinal Robert Sarah, prononcées lors d'une conférence donnée à Varsovie en octobre 2017:

    « Je le redis avec conviction : il s'agit de coopérer ardemment au développement intégral des peuples touchés par la guerre, la corruption et les injustices de la mondialisation. Et non pas d'encourager le déracinement des individus et l'appauvrissement des peuples.

    Certains se plaisent à utiliser des passages de la Parole de Dieu pour apporter une caution à la promotion de la mobilité universelle et du multiculturalisme. On utilise ainsi allègrement le devoir d'hospitalité envers l'étranger en déplacement pour légitimer l'accueil définitif de l'immigré. L'Église respecte les médiations naturelles voulues par le Créateur dans sa sagesse. Le génie du christianisme est l'Incarnation de Dieu dans le monde humain, non pas pour le détruire, mais pour l'assumer et l'élever à sa destination divine.»

    Rétablir l'équilibre miraculeux, bimillénaire, entre le respect de l'identité des nations et l'appel à la fraternité universelle, convaincre à nouveau les Européens que le catholicisme est l'avenir des peuples et non leur destruction, telle est la seule voie pour que l'Europe et l'Église aient encore un avenir commun.   

    Laurent Dandrieu est rédacteur en chef des pages Culture à Valeurs Actuelles. Il a publié Église et immigration, le grand malaise. Le pape et  suicide de la civilisation européenne, de Laurent Dandrieu. Presses de la Renaissance, 288 p., 17,90 €.  

    A lire aussi dans Lafautearousseau ...

    Désolés, Saint-Père, nous ne sommes pas d'accord

  • Du rond-point au vaste monde

    par Gérard Leclerc 

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    Il paraît, selon l’historien Pierre Vermeren, que la France compte plus de 30 000 ronds-points, soit la moitié des giratoires du monde.

    Il y a donc quelque logique dans le fait que l’attention se soit portée, plus d’un mois durant, sur ces lieux qui quadrillent notre territoire national et sont souvent d’une remarquable laideur. Que les gilets jaunes en aient fait des exemples de convivialité constitue un paradoxe bien intéressant. La France des territoires n’est pas seulement révoltée, elle a besoin de reconstituer un véritable tissu de solidarité pour contrer un processus de dissociation et de désintégration qui va de pair avec la disparition des activités locales et la grande misère de notre agriculture.

    Une question se pose à partir de ce constat. Ce qui relève du local, du territorial, est-il en relation avec le mondial et ce qu’on appelle la mondialisation ? C’est le constat de Christophe Guilluy, dont nous avons souvent cité les travaux. La France périphérique, comme d’ailleurs l’Angleterre périphérique et même les États-Unis périphériques, est la grande perdante de la mondialisation, dont certains chantaient pourtant inconditionnellement les louanges à la fin du XXe siècle. Une concentration des richesses s’est produite dans les métropoles, au détriment des régions de plus en plus déshéritées. Un seul chiffre significatif : une douzaine de métropoles françaises rassemblent près de 46 % des emplois, dont 22 % pour la seule aire urbaine de Paris.

    Est-ce une tendance inéluctable, juste propre à susciter des révoltes désespérées qui risquent de très mal tourner ? Ou est-il possible de remettre en question le fonctionnement de la mondialisation avec ses postulats incontournables : l’ouverture inconditionnelle des frontières, la circulation des capitaux et la spéculation qui s’en suit ? Interrogé par La Croix, Olivier Blanchard, ancien chef économiste du FMI, n’hésite pas à déclarer : « Nous avons à remettre en cause un certain nombre de dogmes du capitalisme mondial. » La liberté totale du commerce international serait à revoir, même si elle bénéficie à certains consommateurs, eu égard à son lourd coût social. Très bien ! Mais l’avis d’un expert sage et lucide peut-il quelque chose contre le train du monde de la mondialisation ?  ■ 

    Gérard Leclerc
    Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 20 décembre 2018
  • Saint Augustin actuel [3]

    Karl Marx et Friedrich Engels 

    Par Rémi Hugues 

    saint_augustin visuel.jpgA l'approche des Fêtes, Rémi Hugues propose une série de sept articles consacrés à l'actualité de la pensée de Saint Augustin, père de l'Eglise. Ils sont publiés chaque jour. Bonne lecture !  LFAR

     

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    Augustin dʼHippone, premier grand philosophe de lʼÉglise  

    La distinction augustinienne entre les deux Cités veut être abolie par le fanatique, qui entend faire réapparaître le Jardin édénique, revenir à lʼâge dʼor originel. Le fanatisme, écrit Colas, « taraude la modernité tout entière »[1] 

    Le projet moderne, qui a accouché du triptyque Renaissance – Lumières – Révolution française, est en réalité le fanatisme même, le fanatisme chimiquement pur : « La nouvelle cité idéale est purement humaine et lʼeschatologie est comme absorbée dans une idée du progrès. Lʼâge dʼor est à portée de main grâce à la science. »[2] La science remplace la religion comme clef permettant dʼouvrir les portes du paradis, un paradis qui nʼest plus céleste mais terrestre. 

    LES SOURCES AUGUSTINIENNES DU MATÉRIALISME DE MARX 

    Vilna_Gaon,_Winograd_picture (1).jpgLa science est la religion des modernes. Karl Marx disait de son socialisme quʼil était « scientifique », pour mieux se distinguer des socialistes français quʼil voyait comme des doux rêveurs. Marx, en composant sa doctrine du « socialisme scientifique » a accompli la synthèse de lʼéconomie politique britannique (Adam Smith), du socialisme français (Pierre-Joseph Proudhon), de la philosophie idéaliste allemande (Hegel) et du messianisme juif (Isaac de Louria[3] photo). 

    Une telle représentation de marxisme nʼa rien dʼoriginal. Jacques Attali la développe dans la biographie quʼil a consacré à Marx[4]. Cependant il semble que personne nʼa identifié les sources augustiniennes de la loi de lʼHistoire fondée par Marx, qui reprend la prophétie kantienne qui vise à trouver une solution à lʼépineux problème du millénarisme, de la paix cosmopolitique perpétuelle future, mais sʼen détache par son matérialisme, tandis que Kant voit dans le progrès de la raison le moteur du changement politique et social aboutissant à lʼavènement de lʼhomme moral de la fin des temps. 

    Voilà pourquoi le matérialisme de Marx est qualifié dʼhistorique. Son matérialisme sert à déterminer les ressorts de sa loi scientifique de lʼHistoire : lʼévolution des sociétés humaines, selon lui, est fonction des mutations des modes et des rapports de production. Elle est fonction, faut-il ajouter, des contradictions de la sphère économique. Car la pensée de Marx, outre quʼelle est scientifique et matérialiste, sʼavère dialectique. 

    Dʼaprès la méthodologie marxienne, le dynanisme du moteur de lʼHistoire résulte dʼune opposition entre les deux forces constitutives du processus de production, exploiteurs et exploités. Dans la Préface à la critique de lʼéconomie politique (1859), il montre que « dans la production sociale de leur existence les hommes entrent en des rapports déterminés, nécessaires, indépendants de leur volonté, rapports de production qui correspondent à un degré de développement déterminé de leurs forces productives matérielles. Lʼensemble de ces rapports de production constitue la structure économique de la société, la base concrète sur laquelle sʼélève une superstructure juridique et politique et à laquelle correspondent des formes de conscience sociale déterminées.[5] » Les champs autres que lʼéconomique – la superstructure : la politique, le droit, lʼart, la morale, la religion, les idées, etc. – se modéliseraient ainsi à partir de lʼinfrastructure économique, cʼest-à-dire quʼils auraient un rapport de dépendance vis-à-vis dʼelle. 

    « Le mode de production de la vie matérielle conditionne le processus de vie sociale, politique et intellectuelle en général. Ce nʼest pas la conscience des hommes qui détermine leur être ; cʼest inversement leur être social qui détermine leur conscience.[6] » Une vision du monde donnée voit sa substance, dans la logique de Marx, être définie par le contexte socio-économique au sein duquel est plongé lʼindividu ou le groupe qui fait exister cette vision du monde. Toutefois les marxistes ont rapidement fait en sorte de ne pas réduire cette explication de la dynamique sociale à une approche purement mécaniste. Cʼest pourquoi ils ont tenu à accoler lʼadjectif « dialectique » au matérialisme. Par conséquent lʼéconomique est devenu en dernière instance surdéterminant, pour reprendre lʼexpression consacrée, ce qui laisse aux autres sphères de la vie sociale une certaine autonomie, certes assez limitée. 

    51au0AyQlyL._SX331_BO1204203200_.jpgDans le marxisme le terme « dialectique » a deux aspects : confrontation des forces productives (dominants / dominés) dʼune part, et interaction entre deux éléments, lʼinfrastructure et la superstructure dʼautre part ; interaction asymétrique, comme au fond le choc perpétuel dʼun marteau et dʼune enclume où le marteau symbolise la superstructure, affectant lʼenclume de façon résiduelle, et où lʼinfrastructure est représentée par lʼenclume, qui use substantiellement le marteau. 

    Cʼest lʼacolyte et mécène de Marx, Friedrich Engels qui est à lʼorigine de cette précision théorique. Dʼabord dans une lettre de septembre 1890 adressée à Joseph Bloch, où il est écrit : « Dʼaprès la conception matérialiste de lʼhistoire, le facteur déterminant est en dernière instance la production et la reproduction de la vie réelle. Ni Marx ni moi nʼavons jamais affirmé davantage. Si quelquʼun dénature cette position en ce sens que le facteur économique est seul déterminant, il le transforme en une phrase vide, abstraite, absurde. »[7] Ensuite dans un courrier destiné à Conrad Schmidt, daté dʼun mois plus tard, dʼoctobre 1890 : « Il y a interaction entre deux forces inégales : action du mouvement économique, dʼune part ; de lʼautre, action du pouvoir politique, créé par lui, doué dʼune autonomie relative, qui se manifeste dʼune part dans la puissance de lʼÉtat, et de lʼautre dans lʼopposition, née de cette dernière. »[8] On peut noter quʼen sʼefforçant de ne pas réduire le politique à un simple reflet de lʼéconomique, Engels tend à réduire la superstructure au politique. Il déforme – les marxistes diraient révise – la pensée de son ami qui entend la superstructure comme lʼensemble de la sphère sociale auquel on retranche lʼéconomique. 

    Quelque part ailleurs Marx essaye de trancher cet impondérable de la philosophie quʼest le débat idéalisme / matérialisme en avançant que les idées sont in fine des choses, de la matière : les idées ne sont rien dʼautre que les choses matérielles transposées et traduites dans la tête des hommes.  (A suivre)  

    [1]  Ibid., p. 13.
    [2]  Patrick de Laubier, Lʼeschatologie, Paris, P.U.F., 1998, p. 79.
    [3]  Il « est né en 1534 à Jérusalem, dʼun père originaire dʼAllemagne et dʼune mère séfarade dʼÉgypte […]. Selon une source traditionnelle, il aurait étudié avec un maître de la kabbale polonais à Jérusalem. », Youssef Hindi, Occident & Islam, I, Alfortville, Sigest, 2015, p. 59-60. Marx reprend à Louria lʼidée dʼun Messie-collectif, qui nʼest plus le peuple juif mais le prolétariat. Tant Emmanuel Lévinas que Jacques Attali sont revenus à la conception lourianique du Messie-collectif.
    [4]  Jacques Attali, Karl Marx ou lʼesprit du monde, Paris, Fayard, 2005.
    [5]  Karl Marx, Friedrich Engels, Œuvres choisies, I, Moscou, Éditions du Progrès, 1978, p. 525. 
    [6]  Ibid., p. 525.
    [7]  Cité par Maurice Moissonnier, « Matérialisme historique », in Georges Labica, Gérard Bensussan, Dictionnaire critique du marxisme, Paris, P.U.F., 1985, p. 729.
    [8]  Karl Marx, Friedrich Engels, Œuvres choisies, III, Moscou, Éditions du Progrès, 1978, p. 514. 

    A lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même ...
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  • LOUIS XVI 2019 ! Un acte politique fort : marquer le début de notre décadence...

    TERREUR BASTILLE.jpgA partir de 1789, les principes du Totalitarisme furent énoncés, ses bases en furent jetées, et il fut appliqué méthodiquement avec - comme conséquence inévitable - le Génocide, qui en découlait fatalement.

    Au même moment, le principe opposé fut également proclamé : liberté intérieure face à l'oppression d'un pouvoir sans limite qui, ne se reconnaissant aucune autorité supérieure, se révélait vite mille fois plus tyrannique que les antiques oppressions qu'il prétendait abolir.

    Deux messages, antinomiques, contradictoires et irréconciliables, furent donc lancés au monde en France, et par la France, au moment de l'ouverture du grand cycle révolutionnaire...

    goulag-barbeles-sur-faucille_1217928821.jpgLe 21 janvier 1793 est l'acte fondateur de tous les Totalitarismes modernes et il est à l'origine de toutes les horreurs qui devaient suivre: Staline, Hitler, Mao, Pol Pot, Ho Chi Minh, Ceaucescu et la Stasi, Le Lao Gaï et le Goulag...

    Il est également - selon le mot fort juste de Prosper de Barante - "l'évènement le plus terriblement religieux de notre Révolution", car c'est bien une religion nouvelle qu'il veut instaurer, la Nouvelle Religion Républicaine, prétendant effacer toute trace de l'antique religion chrétienne...

    De ce fait, le 21 janvier dure encore aujourd'hui, par ses conséquences désastreuses, qui ont affecté non seulement la France mais toute l'Europe et, aussi, la terre entière..... Il ne s'agit pas d'un fait historique "terminé".

    Il est l'origine du premier crime de masse contre l'Humanité des Temps modernes -des crimes dont on sait qu'ils sont imprescriptibles...

    A l'inverse, le soulèvement vendéen est lui aussi l'acte fondateur de toutes les révoltes modernes contre l'oppression tyrannique d'un Etat sans limites.

    En tant que fait historique donné, avec ses formes extérieures qui appartiennent maintenant à l'Histoire, les Guerres de Vendée, "Guerre de Géants" comme les a qualifiées Napoléon, sont évidemment terminées, et depuis longtemps.

    Mais, en tant que première expression collective du refus de l'oppression, de la défense de la liberté intérieure de la personne, de la Résistance à l'Etat tout-puissant, tyrannique et oppresseur, elles sont un message universel, comme l'a très bien vu et très bien compris Soljenitsyne. Et ce message appartient à l'Histoire en même temps qu'à chaque être humain.

    De ce point de vue - évidemment fondamental - les Guerres de Vendée ne sont pas terminées elles non plus, pas plus que le 21 janvier, leur acte fondateur contraire.

    VENDEE DRAPEAU ARMEE CER.jpgLes Vendéens, les chouans, ne se soulevaient pas pour imposer l'Etat partout, le Totalitarisme, aux autres habitants de France. Ils n'étaient pas agresseurs, ils étaient agressés. Ils ne souhaitaient pas imposer, ils souhaitaient qu'on ne leur impose pas. Ils se soulevèrent contre l'Etat, pour refuser son intrusion dans la sphère privée, pour l'empêcher d'organiser tout, de réglementer tout, d'installer une loi unique régissant tout et tous, jusques et y compris - et surtout - dans les consciences. Les paysans vendéens, les chouans ne se sentaient pas porteurs d'un modèle parfait qu'ils prétendaient imposer aux autres. Ils demandaient juste que l'Etat ne sorte pas de sa sphère, et ne s'arroge pas le pouvoir sur les consciences. Ils voulaient qu'on les laisse en paix, et qu'on les laisse vivre comme ils l'entendaient.

    Les Vendéens - et Louis XVI en refusant la Constitution civile du Clergé et ce qui en découlait - sont bien les premiers résistants de France, et du monde, au Totalitarisme qui pointe à la fin du XVIIIème, et qui va ravager la terre, sous ses diverses formes - diverses mais semblables, au fond - au XXème.

    Les Vendéens ont lutté contre l'Etat totalitaire, en affrontant ceux qui ont lutté pour l'imposer...

    Ce combat de titans entre liberté intérieure et oppression étatique dure encore, le cycle révolutionnaire n'étant pas achevé. Et il durera jusqu'à la fin de ce cycle... Jusque là, pour reprendre le beau titre de la chaîne publique Arte pour l'une de ses émissions, on appellera les Vendéens "Dissidents: les artisans de la liberté..."

    Depuis plus de deux siècles maintenant, les victimes attendent non pas la vengeance, mais la Justice: qu'avec la reconnaissance officielle du Génocide vendéen, il soit mis fin au négationnisme, au révisionnisme, au mémoricide dont se rend coupable le Système actuel, héritier des criminels de guerre de 1793/1794 et du régime totalitaire qu'ils ont imposé à la France...

    LOUIS XVI MESSE.jpgC'est cela que nous marquons, chaque 21 janvier : et c'est un acte politique fort, tout au contraire d'une vaine nostalgie. Par le rappel de cette date fatidique et de son sens profond, nous redisons chaque année aux Français d'où vient leur décadence, quand et comment elle a commencé. Et nous leur disons que le seul combat qui vaille est celui de proposer "la subversion du Régime" (Léon Daudet), un régime totalement en crise aujourd'hui, mais qui reste fondé sur les mensonges, les erreurs et les horreurs du Terrorisme révolutionnaire...

    Voilà pourquoi nous vous invitons tous à nous rejoindre et à participer aux différentes cérémonies et manifestations qui auront lieu dans toute la France, et qui sont d'ailleurs chaque année plus nombreuses et plus suivies : vous trouverez ci-après le tableau récapitulatif de toutes celles qui nous ont été indiquées..

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  • Ce Système dont nous ne voulons plus...

    Par Jean-Philippe Chauvin 

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    En juin 1980, le journal Royaliste titrait, sur fond de Marianne vacillante : « Qui croit encore au système ? » : nous étions en pleine Giscardie, et les contestations restaient vives, dans le même temps que les Gauches s'apprêtaient à accéder au pouvoir, pour la première fois sous la Cinquième République, et soufflaient constamment sur les braises, s'enivrant de grands mots et de slogans qui se voulaient encore « révolutionnaires ».

    Les royalistes n'étaient pas les derniers à contester la présidence de « Foutriquet », selon le mot du philosophe Pierre Boutang, et à prôner un changement de tête, en attendant et en préparant un changement dans les institutions, certains en approfondissant celles de la Cinquième, « de la monarchie élective à la monarchie héréditaire et arbitrale » et d'autres, plus rudement, en renversant l'ordre centraliste, « de la République jacobine à la Royauté fédérale des peuples de France ». Mais tous pouvaient se reconnaître dans le titre de Royaliste, et, près de quarante ans après (ces fameux « quarante ans » que les Gilets jaunes évoquent comme un véritable mantra), après ces quatre décennies sans doute perdues pour la France (sauf peut-être sur la question de la décentralisation, avec les lois de 1982 et de 2004), ce titre paraît tout à fait adapté à la situation ! 

    Bien sûr, il paraît nécessaire de définir ce que l'on peut nommer « système » pour éviter tout malentendu et toute illusion, et ne pas se tromper ni de cible ni d'enjeu. Le « système », c'est d'abord un état d'esprit libéral (au sens le plus extrême du terme) mis en pratique par le jeu d'institutions de moins en moins politiques et de plus asservies par les féodalités financières et économiques, de la République à l'Union européenne, et c'est surtout l'imposition d'une « gouvernance mondialisée » symbolisée et représentée par le pouvoir de grandes villes-monde ou d'immenses zones métropolisées qui n'ont plus guère de rapports avec les pays et les populations historiques sur lesquelles elles vivent, souvent à leur dépens, comme du temps de la romanisation antique. Le système, c'est ce carcan de la démocratie dite représentative de plus en plus lointaine pour ceux qu'elle prétend représenter sans leur laisser le droit à la libre parole, et qui est aux mains de partis et de notables de moins en moins représentatifs des réalités sociales de notre pays ; c'est ce que l'on pourrait nommer « le pays légal », celui des élus, des parlementaires (qualifiés souvent de « parlementeurs », comme en février 1934 ou dans les années 1950, avant le retour du général de Gaulle) et des ministres, mais aussi des syndicats, des médias ou des artistes de la société du spectacle, vitrine de la société de consommation. 

    Au regard des derniers événements, l'on peut aisément constater que ce système, qui porte aujourd'hui le nom « synthétique » de « République » et qui a peu à voir avec le sens premier de ce mot, la « Res publica » (la chose publique, ou la communauté publique, de la Cité), se défend bien à défaut de bien gouverner : la célèbre formule d'Anatole France, l'auteur du conte si peu républicain « L'île des pingouins », reste actuelle, et les méthodes du Sinistre de l'Intérieur, M. Castaner, démontrent à l'envi ces procédés de « basse police » qui vont si bien à ce système qui, à défaut d'être bien aimé, entend forcer les citoyens à l'accepter sans contester.

    images.jpgLes diverses limitations de la liberté d'expression, les censures insidieuses ou les manipulations nombreuses, sans oublier les nouveaux moyens de la répression courante, des charges en moto (que j'avais, un des premiers, évoquées dans mon témoignage sur les événements parisiens du samedi 1er décembre) aux blocages de bus de manifestants bien en amont de Paris, de l'usage (inédit en ville depuis 2005) des blindés frappés de l'écusson de l'Union européenne (tout un symbole !) aux jets inconsidérés de gaz lacrymogène sur des manifestants un peu trop joyeux (comme place de l'Opéra samedi 15 décembre), sans oublier les projets ministériels et gouvernementaux de limitation légale du droit de manifester, tout cela marque une radicalisation d'un Système aux abois, furieux de s'être laissé bousculer par des « manants en gilets jaunes », sortis des profondeurs d'un « pays réel » négligé, voire oublié des « élites » (sic) tout d'un coup empêchées de « mondialiser en rond », selon l'heureuse expression d'un commentateur radiophonique... 

    les-manants-du-roi-979181-264-432.jpgEn d'autres temps, Jean de La Varende, écrivain enraciné de Normandie, avait réhabilité le sens du mot « manant », en rappelant sa véritable et historique signification : « des manants, le beau mot qui réunissait gentilshommes et terriens... de maneo : je reste, je persévère et j'attends. Les autres pouvaient fuir ; pouvaient courir où l'on se divertit : à eux, les manants, de continuer, d'assurer. » 

    35282784_524232294690752_2201719867948662784_o.jpgAlors, oui, en nous souvenant d'où nous venons et qui nous sommes, il nous est possible et fort légitime de revendiquer, face à un système féodal-libéral inquiet de ne plus être « la seule alternative » chère à Margaret Thatcher, d'être « les manants du roi », non pour détruire ce qui s'effondre, mais pour fonder un nouveau pacte social et politiquement royal, à l'écoute et au service de tous, cette alliance de l'Autorité nécessaire au sommet et des libertés garanties à la base, cette nouvelle arche française prête à affronter les tempêtes de ce « monde global » et de son « globalitarisme » néfaste pour les hommes comme pour la planète toute entière : pour ramener les Fouquet contemporains à la raison, il nous faut un « Louis XIV institutionnel », non un tyran mais un roi « protecteur des hommes et défenseur de la paix ». 

    La Monarchie n'a pas de sceptre magique, mais elle est la meilleure arme contre les spectres d'une mondialisation devenue folle d'avoir toujours eu tort... ■  

    Le blog de Jean-Philippe Chauvin

    A lire dans Lafautearousseau

    Au fait, qu'est-ce que le « Système » dont nous parlons ? Essai de définition ...

  • Le monde est toujours assis sur une bombe économique à retardement…

    Par Marc Rousset    

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    Les investisseurs broient à nouveau du noir et anticipent un scénario très négatif de ralentissement de la croissance mondiale.

    Le CAC 40 perd environ 10 % depuis le début de l’année, tandis que le DAX allemand affiche une chute de l’ordre de 20 %. Les valeurs plus petites et moyennes à la Bourse de Paris ont chuté, elles aussi, d’environ 20 %, avec des baisses spectaculaires de plus de 50 % pour Vallourec, Pierre et Vacances, Derichebourg, Marie-Brizard. Quant à l’indice PMI manufacturier de la zone euro, il est au plus bas depuis août 2016, Allemagne incluse.

    Un indicateur suggère que l’activité américaine et mondiale est davantage susceptible de ralentir que d’accélérer : l’inversion de la courbe des taux conduit généralement à la récession. Tout récemment, le taux d’intérêt à cinq ans sur la dette des États-Unis est passé en dessous de celui à trois ans. L’écart entre le taux d’intérêt de la dette à dix ans (2,952 %) et à deux ans évolue à son plus bas niveau depuis 2007. Les taux à trente ans ne s’élèvent qu’à 3,22 %. James Powell, le président de la Fed, a déclaré que les taux d’intérêt actuels se trouvaient juste en dessous de leur position neutre, ce qui laisse penser qu’il va encore augmenter les taux à court terme en décembre 2018, mais sans doute arrêter de les relever ou moins les relever en 2019, contrairement aux annonces précédentes.

    Donald Trump, malgré ses taxes punitives sur les marchandises importées, fait face à un déficit commercial record depuis dix ans, en octobre 2018, de 55,5 milliards de dollars, dont 38,18 avec la Chine et 15,05 avec l’Union européenne. Trump juge ridicules les nouvelles hausses de taux de la FED et s’inquiète des banques américaines en difficulté. L’action Goldman Sachs a baissé de 35 % depuis son plus haut historique de février 2018. Le cours de Bourse moyen des 24 plus grandes banques américaines a baissé de 22,5 % depuis le 26 janvier 2018, tandis que celui des petites banques régionales a plongé de 22,3 % depuis le 8 juin 2018.

    La Commission européenne a adopté une recommandation visant à promouvoir une utilisation plus large de l’euro dans les transactions internationales et les secteurs stratégiques clés tels que l’énergie, mais tout cela semble relever de vœux pieux, avec un manque de détermination géopolitique. Les ambitions de Macron semblent contrariées puisque le MES (mécanisme européen de stabilité) pourra porter secours à une banque européenne menacée de faillite ou à un État en crise en 2024 au plus tard, avec faculté d’agir en moins de 24 heures, sans attendre un feu vert du Bundestag ; mais les krachs bancaires, boursiers et immobiliers auront lieu bien avant…

    Quant à un autre outil européen « anti-crise », le système européen de garantie des dépôts bancaires, il a été reporté, faute d’unité des pays membres. Enfin, de nombreux États restent hostiles au projet de mini-budget de « stabilisation » sur la zone euro, cher à Macron. Trois schémas semblent prévaloir, après les élections européennes de mai 2019 : soit l’Italie met de l’eau dans son vin et se « grecquise », la France la suivant dans la roue, soit l’Italie sort de l’union monétaire, soit l’Allemagne sort de l’union monétaire.

    La zone euro est l’objet d’inquiétudes suite à la situation des banques et de l’Italie. Qui achète de la dette italienne depuis 2015 ? Essentiellement la BCE, qui détient aujourd’hui environ 280 milliards d’obligations, tandis que les investisseurs italiens désinvestissaient. 3.000 chefs d’entreprise de la Confindustria viennent de faire savoir à Turin qu’entre la réforme des retraites et le revenu de citoyenneté, le budget coûtait 18 milliards d’euros et « ne faisait rien pour la croissance ». « Ça suffit, la campagne électorale permanente et les politiques qui pénalisent notre capacité à investir ! Basta ! » Un défaut de l’Italie serait dix fois plus grave que la faillite de Lehman et de la Grèce.

    Autrefois la France et l’Italie, sans l’euro, auraient fait fonctionner encore davantage la planche à billets et tout serait déjà terminé depuis longtemps par une gigantesque dévaluation qui aurait ruiné tous les épargnants. Macron aurait mieux fait de dire qu’avec l’euro, à défaut de baisser la dépense publique et d’arrêter net l’immigration, l’enjeu de la fiscalité écologique était en fait un faux alibi pour éviter la faillite de la France.. ■  

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    Économiste
    Ancien haut dirigeant d'entreprise
  • Saint Augustin actuel [2]

    Par Rémi Hugues 

    saint_augustin visuel.jpgA l'approche des Fêtes, Rémi Hugues propose une série de sept articles consacrés à l'actualité de la pensée de Saint Augustin, père de l'Eglise. Ils seront publiés chaque jour. Bonne lecture !  LFAR

     

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    Augustin dʼHippone, premier grand philosophe de lʼÉglise  

    Comte, Spencer y Durkheim.jpgLes pionniers de la sociologie, Comte puis Durkheim (photo), nʼétaient, cʼest le moins que lʼon puisse dire, aucunement des fidèles du dogme catholique quʼAugustin contribua à forger. Néanmoins il devrait avoir sa place, avec Montaigne et Tocqueville, au sein de la catégorie des sociologues dʼavant la sociologie désignés par Raymond Aron dans Les étapes de le pensée sociologique[1]

    Il faut connaître, dans un premier temps, les ambitions politiques dʼun autre sociologue, lʼAllemand Werner Sombart, pour saisir lʼinfluence majeure quʼa eue la pensée augustinienne sur la naissance de la sociologie.

    Max_Weber_1917.jpgSombart, lʼautre grand fondateur de lʼécole allemande de la sociologie avec Max Weber (photo), était un socialiste de conviction, quand ce dernier était de tendance libérale. Sombart entendait restaurer la communauté (Gemeinschaft), que la modernité capitaliste avait dissoute et remplacé par la société (Gesellschaft). Pour lui lʼorganisation syndicale était lʼinstrument de cette restauration. 

    Or cette notion de « société », raccourci de « société civile », a précisément une origine augustinienne. Dominique Colas, qui enseigne lʼhistoire des idées politiques à Sciences Po, met en évidence dans son ouvrage intitulé Le glaive et le fléau que le concept de société est une sécularisation de celui, forgé par l’évêque dʼHippone, de Cité des hommes ou Cité terrestre. Augustin a déduit des propos tenus par Jésus-Christ selon lesquels il sʼagit de rendre à César ce qui appartient à César et à Dieu ce qui appartient à Dieu quʼil existe deux ordres coexistants, la Cité céleste et la Cité terrestre, et à partir de cela deux types de pouvoir, le pouvoir spirituel étant relatif à la première et le pouvoir temporel à la seconde. 

    William_Blake_whore_babylon.jpgComme « le royaume du Christ nʼest pas de ce monde, son nom ne peut être invoqué pour appeler à la destruction par le glaive des royaumes terrestres afin dʼédifier la Jérusalem céleste sur les ruines de Babylone, la putain. (Ci-contre, allégorie de William Blake) »[2] Ce dualisme politique théorisé par Augustin a pour conséquence de condamner toute révolte violente contre le souverain en vue dʼétablir un Éden, une utopie. Le seul sacrifice légitimé sʼapplique à une configuration bien précise : le fidèle doit être prêt à mourir si le souverain le persécute en tant que pratiquant de sa foi. Tel est le vrai sens du mot « martyre ». Accepter la violence faite contre soi, refuser dʼexercer la violence à lʼencontre des autres ; on appelle généralement cela lʼaugustinisme politique, tant décrié par les marxistes pour qui il est lʼun des piliers de lʼ « opium du peuple »[3], autrement de dit la manière dont ils conçoivent la religion chrétienne. 

    Opium au sens non de poison mais dʼanesthésiant, de produit soporifique, qui inhibe lʼinclination de chacun à mener des actions visant à renverser un ordre établi qui sème injustices, misère et chaos. Lutter, « au nom de la Cité céleste, pour lʼabolition de la société civile »[4] est, dans cette  perspective, abusif. 

    Chez Dominique Colas les termes « cité terrestre » et « société civile » sont utilisés comme sʼils étaient interchangeables. Pour lui, la société civile est « le lieu licite de la recherche par chacun de lʼutile qui est le sien »[5]. Cʼest effectivement lʼordre dont le processus de régulation sʼeffectue par le truchement de deux instances, le Marché et le Droit. « Car la promotion de la société civile comme valeur est aussi bien celle de la tolérance que celle du « bourgeois », la promotion de la liberté de pensée que celle du libre marché. »[6] 

    Augustin nʼest donc pas seulement lʼinventeur de lʼexpression « lien social », il est aussi indirectement à lʼorigine de la notion de « société civile », mutation moderne de celle de « Cité terrestre ». 

    Être sociologue, ce qui signifie examiner la société, lʼétudier, cʼest reprendre – sans souvent dʼailleurs même le savoir – des catégories qui ont été établies par Augustin avant dʼêtre laïcisées. Tout sociologue est de ce fait un peu augustinien. Car en vérité la sociologie se borne à analyser la cité des hommes, à observer les dynamiques qui la traversent.     

    800px-Portrait_of_Ruhollah_Khomeini_By_Mohammad_Sayyad.jpgPar ailleurs, dans le même texte, Colas place sur le même plan fanatiques musulmans, comme ceux qui agréent « lʼincitation de lʼayatollah Khomeini (photo) à exécuter Salman Rushdie »[7], et révolutionnaires laïcs, marxistes en tête, désignés comme les représentants des « opprimés qui font entendre la prophétie dʼune Cité juste »[8], « des exclus de ce monde animés dʼune espérance impatiente »[9], qui agissent au nom dʼune « loi inflexible »[10]. Lʼentreprise fanatique consiste ainsi à sʼengager en faveur de la destruction de la société civile, pour y substituer un paradis terrestre, une Cité de Dieu sur la terre. (A suivre)  ■

    [1]  Raymond Aron, Les étapes de la pensée sociologique, Paris, Gallimard, 1967.
    [2]  Dominique Colas, Le glaive et le fléau. Généalogie du fanatisme et de la société civile, Paris, Grasset & Fasquelle, 1992, p. 11.
    [3]  Dans Critique de la Philosophie hégélienne du Droit, Marx affirme : « La misère religieuse est à la fois lʼexpression de la misère réelle et la protestation contre celui-ci [lʼordre social, N.D.A.]. La religion est le soupir de la créature accablée, le cœur dʼun monde sans cœur, comme elle est lʼesprit dʼune existence sans esprit », cité par Lucien Goldmann, Recherches dialectiques, Paris, Gallimard, 1959, p. 299.
    [4]  Dominique Colas, ibid.
    [5]  Ibid., p. 12.
    [6]  Idem.
    [7]  Ibid., p. 13.
    [8]  Ibid., p. 12.
    [9]  Idem.
    [10]  Idem.

    A lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même ...
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  • Grenoble ce jeudi 20 décembre au Centre Lesdiguières, une conférence de Georges Belleserre à ne pas manquer !

    Le CENTRE LESDIGUIERES

    vous convie le jeudi 20 décembre à 20h à une conférence 

    de Georges Belleserre

    président du Centre Lesdiguières 

    « La révolution française et les sociétés de pensée » 

    Les média et les politiques encensent la Révolution. Il y a plusieurs histoires de la Révolution dépendantes de la pensée propre de chaque auteur. 

    Les questions étudiées par l'abbé Augustin Barruel et Augustin Cochin sont encore d'actualité aujourd'hui. 

    Le déclenchement de la Révolution est lié à une préparation maçonnique avec la complicité des philosophes pour renverser le trône et l'autel. 

    Nous verrons comment la société de pensée accompagne l'abstraction des rapports sociaux au nom d'une égalité en droits théoriquement inclusive mais aboutissant en fait à la dépossession des personnes réelles, et à la fabrique du consensus sans la  participation ni le consentement de ceux qui devront s'y soumettre. 

    Le terrorisme intellectuel et la pensée unique ont fait le reste et c'est ainsi que « l'on réduit les individus à l'état d'atomes interchangeables et anonymes ». 

    Le conférencier fera un parallèle entre la révolution française et le temps présent de fortes révoltes que vit la France en réaction à la trahison du peuple par les élites au pouvoir, lesquelles veulent sous prétexte de transformation achever sa disparition.  

    10 place Lavalette, 38000 Grenoble - salle du 1er étage (Tram: arrêt « Notre-Dame ») (Participation aux frais) Courriel: centrelesdiguieres@gmail.com Merci de nous informer de votre participation par retour de courriel

  • Où se cache le chef de Daech ?

    Par Antoine de Lacoste 

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    Où se cache Abou Bakr al-Baghdadi ?

    Donné mort à plusieurs reprises, le fondateur et « Emir de l’Etat islamique en Irak et au Levant » est bien vivant. Il l’a prouvé par plusieurs vidéos et, s’il avait été tué, l’Etat islamique l’aurait certainement annoncé et nommé un successeur. D’ailleurs, il y a quelques mois, les Russes ont annoncé avoir tué un de ses fils au cours d’un accrochage dans la province de Homs, et l’EI n’a mis aucune difficulté à le reconnaître et à saluer la mémoire du « martyr ».

    Sa localisation approximative est connue : à l’est de la Syrie, non loin de l’Euphrate à l’ouest et de la frontière irakienne à l’est. Cette zone est sous contrôle américano-kurde et les Syriens en sont interdits d’accès. Des mercenaires russes, aidés de milices pro-régime, ont bravé l’interdit il y a plusieurs mois en franchissant l’Euphrate et en se rapprochant de puits de pétrole occupés par les Kurdes. L’aviation américaine (officiellement aviation de la « coalition ») est aussitôt intervenue et les imprudents ont perdu plusieurs dizaines d’hommes.

    Très mécontente de ce fiasco et de la perte inutile d’autant de combattants, l’armée russe a alors vigoureusement interdit à tous de franchir l’Euphrate, interdiction respectée depuis.

    Ce vaste territoire au-delà de l’Euphrate est donc occupé, sans aucun mandat ni accord de qui que ce soit bien sûr, par des fantassins kurdes encadrés par des « conseillers » américains. Des Français des forces spéciales sont également présents comme nous avons déjà eu l’occasion de le dire ici. Tout cela sous protection aérienne américaine.

    damaged_buildings_are_pictured_during_the_fighting_with_isis_in_the_old_city_of_raqqa_syria._reuters_0.jpgCompte tenu de la portion de territoire assez réduite où le dernier carré de Daech se terre, y compris al-Baghdadi, les Américains étaient assez confiants : cette dernière offensive après la prise de Raqqa (au prix d’ailleurs de sa destruction totale) serait rapide, quelques semaines au plus.

    Il a vite fallu déchanter : non seulement les islamistes se défendent avec acharnement mais en plus ils ont conduit des contre-attaques meurtrières, profitant à chaque fois de tempêtes de sable qui empêchaient l’intervention de l’aviation. Les Kurdes ont perdu des centaines d’hommes dans ces opérations et s’ils n’avaient pas un besoin vital des Américains pour éviter des attaques turques dans le nord, il y a longtemps qu’ils auraient plié bagage.

    Les Américains, qui n’ont jamais rien compris au Proche-Orient (le chaos irakien est leur œuvre emblématique), n’ont pas mesuré l’impopularité des Kurdes dans cette zone exclusivement arabe. Leur autoritarisme brutal n’a fait qu’accélérer un processus inéluctable : de nombreuses tribus et villages sunnites aident les combattants de Daech par simple haine des Kurdes.

    De ce fait, l’affaire traîne en longueur et la zone désertique à cheval sur la Syrie et l’Irak, constitue une cache idéale car ce n’est pas un désert plat et sableux mais tourmenté et caillouteux, parsemé de multiples grottes.

    De nombreuses tribus sunnites, situées à l’ouest de l’Euphrate, se sont ralliées à Damas depuis qu’elles ont compris que Bachar avait gagné la guerre. Pour étendre ce processus à l’est, il faudrait laisser l’armée syrienne reprendre le contrôle de son propre territoire.

    Mais ce serait un aveu d’échec. Alors en attendant, Baghdadi est toujours vivant.  ■

    Retrouvez l'ensemble des chroniques syriennes d'Antoine de Lacoste dans notre catégorie Actualité Monde.

  • Retour sur la disparition d'Edmond Siméoni

    Edmond et Gilles Simeoni à Lozzi, plus haut village de Corse à 1044 mètres d'altitude

    Par Michel Franceschetti 

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    Tous les Corses sont devenus orphelins vendredi 14 décembre, quand Edmond Simeoni a rendu son dernier soupir à Ajaccio. 

    Il incarnait la défense de la Corse et de son peuple depuis si longtemps... 

    Né le 6 août 1934 à Corte, il fit ses études de médecine à Marseille et exerça à Bastia au milieu des années 1960 comme gastro-entérologue. 

    Avec son frère Max, il anima la contestation au projet d’un centre d’expérimentation nucléaire en Corse (1960), créa le CEDIC (centre d'étude et de défense des intérêts de la Corse) puis l’ARC (Action Régionaliste Corse) en 1967. Il se fit connaître en 1970 par son opposition au déversement des boues rouges de la société italienne Montedison au large de l’île de Beauté. Pour sauver une Corse en état de sous-développement avancé, son mouvement s'engagea dans la dénonciation de la mainmise des clans sur la vie politique locale, la redécouverte de la culture traditionnelle corse, la lutte contre la spéculation et la défense de l’environnement. 

    En 1974, l'ARC publia son livre-manifeste « Autonomia » réclamant la reconnaissance du peuple corse et une autonomie interne dans le cadre de la République. 

    Tout bascula le 21 août 1975. Un commando de militants de l’ARC dirigés par Edmond occupa une cave d’Aleria pour dénoncer les scandales financiers dans la filière viticole et l'impunité dont bénéficiaient certains pieds-noirs. Le ministre de l’intérieur, Michel Poniatowski, couvert par le 1er ministre Jacques Chirac, utilisa des moyens démesurés: 1.500 gardes-mobiles, blindés, hélicos… Les armes parlèrent et firent 2 morts à Aleria et 1 à Bastia le lendemain. Le jacobinisme n'avait pas voulu discuter.

    Incarcéré, Edmond fut amnistié en 1981. Mais le FLNC, fondé en 1976, avait commencé ses actions terroristes. Simeoni s'opposa toujours aux violences clandestines, ce qui lui valut de nombreuses critiques des extrémistes. Il continua à incarner un courant modéré dans la forme mais intransigeant sur la défense des racines qui font l'identité  corse. Elu plusieurs fois sur les bancs de l'assemblée territoriale, il était reconnu comme un sage qui gardait une grande influence. Il eut la joie de voir son fils Gilles devenir maire de Bastia puis président du conseil exécutif de la Corse.    

     

    Edmond travaillait beaucoup auprès des Corses de l'extérieur, persuadé que leur appui était nécessaire pour sauver son île. Il écrivait toujours beaucoup et certains de ses très récents textes sont très instructifs. 

    Droit à l'existence du peuple corse 

    « Le Peuple Corse qui a le droit imprescriptible à la vie - il le tient de l'Histoire et de sa légitimité -, a aussi le droit en vertu des conventions internationales, le droit imprescriptible, à la reconnaissance officielle, à la maîtrise de son destin dans son Pays, pour y vivre paisiblement dans la paix; mais aussi par la création d'un développement maîtrisé et mieux partagé, projet dont le socle est constitué par les principes de l'humanisme. »

    Blog d'Edmond Simeoni, 21 novembre 2018 

    Sur la violence 

    « Que notre combat engagé, pour la reconnaissance, la dignité et la liberté, n’a jamais eu pour vocation de démembrer nos Etats respectifs. Leur intransigeance, leur refus systématique de dialogue ont inévitablement suscité, dans certains cas et suivant les Pays, des actions violentes  que l’on peut regretter mais  qui sont tout à  fait  compréhensibles ; L’objectif a toujours été de faire reconnaître les droits et la légitimité de nos peuples en lutte. Il y aurait suffi une volonté et des évolutions adaptées, conformes aux intérêts légitimes des parties pour prévenir cette évolution. »

    Remise du Prix Coppieters à Edmond Simeoni le 24 novembre 2018

    L'autonomie 

    Le plus important est, écrit Edmond Siméoni dans son billet du 1er mars, de « poursuivre notre chemin sans outrances, sans violences avec pour objectif un statut d’autonomie de plein droit dans la République. »

    Qu’est-ce que cette autonomie ? Edmond le précise dans le quotidien « La Dépêche » du 7 février :

    « Nous voulons rester dans une République qui conserve ses pouvoirs régaliens : la monnaie, la Défense, la Police, la Justice, les Affaires étrangères, avec pour le reste une autonomie de gestion. » 

    Idées et personnalité d'Emmanuel Macron

    (publié sur son blog le 1er mars 2018). 

    « Le Président de la République Française est un homme pressé, affairé, ambitieux ; il voit le monde à travers le diagramme, les ratios, la productivité ; il est parfaitement à l’aise à Davos et il vit les rendez-vous avec les grands de ce monde avec une jubilation manifeste. Il croit que le monde économique en particulier doit être tiré vers le haut, par des entreprises leaders performantes et qu’ainsi le cycle vertueux finira par profiter à toutes les bases. 

    On cherche en vain, dans sa démarche générale, une once d’humanité, de compassion, de compréhension; on a l’impression, peut-être fausse, qu’il considère les sociétés, les peuples, les entreprises, les institutions comme de simples variables d’ajustement qui doivent progressivement trouver leur juste place, grâce à l’harmonie rédemptrice du capital, des grands groupes, des financiers ! Un fantasme.

    A mon sens, le lien avec la Corse est clair ; il ne connaît pas du tout le dossier et la modestie des enjeux locaux, à l’échelle mondiale, le dissuade de s’y intéresser .»

  • Saint Augustin actuel [1]

    St. Augustin History Museum, Floride.

    Par Rémi Hugues 

    saint_augustin visuel.jpgA l'approche des Fêtes, Rémi Hugues propose une série de sept articles consacrés à l'actualité de la pensée de Saint Augustin, père de l'Eglise. Ils seront publiés chaque jour à partir de celui-ci. Bonne lecture !  LFAR

     

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    Augustin dʼHippone, premier grand philosophe de lʼÉglise 

    Le numéro de juin 2018 du magazine LʼHistoire (n° 488,) était consacré au premier grand philosophe de lʼÉglise, Augustin dʼHippone, qui vécut au IVème siècle sur lʼactuel territoire algérien, à lʼépoque une province de lʼEmpire romain[1]

    Signe de lʼesprit propre au temps présent, le revue insiste sur le rapport dʼAugustin à la sexualité. Lʼauteur des Confessions – il fut lʼinventeur du genre autobiographique – livra effectivement à la postérité ses désirs les plus profonds, certains pouvant être considérés comme coupables. Mais à réduire saint Augustin au libidinal, au charnel, au désir sexuel, à ce quʼil y a de plus frivole au fond, lʼon omet de dire lʼessentiel sur ce grand artisan de lʼédification du théologico-politique chrétien, qui sʼingénia à opérer la synthèse entre les héritages gréco-latins et hébraïques, à la lumière de ce que les Évangiles relatent sur la vie de Jésus, et particulièrement sur la Passion christique. 

    Augustin fut plus quʼun passeur. Il fonda une tradition nouvelle, vivifia les philosophies antiques, qui étaient devenues sclérosées, et sʼappliqua à aider chacun à mieux comprendre les mystères contenus dans la Bible. Sa prose nous aide par exemple à mieux entendre ce très mystérieux texte quʼest lʼApocalypse johannique : « Dans ce livre qui a pour nom lʼApocalypse, il est sans doute beaucoup de propos obscurs, destinés à exercer lʼesprit du lecteur, et il en est bien dʼassez clairs pour permettre de se lancer, et non sans peine, sur le reste, dʼautant quʼil répète les mêmes choses de tant de façons quʼil semble dire des choses différentes, alors quʼon sʼaperçoit quʼil dit les mêmes, mais de manière différente. »[2] 

    Cité_de_Dieu.jpgLa rédaction de LʼHistoire a été judicieuse dans son choix de nous rappeler lʼimportance de de lʼœuvre de l’évêque dʼHippone, notamment du livre La Cité de Dieu. Il y a bel et bien une actualité de saint Augustin. Pour comprendre les enjeux de lʼheure, lʼétude de sa pensée est très précieuse. 

    Nous nous arrêterons sur trois points qui nous paraissent les plus notables : Augustin, ce précurseur de la sociologie politique (I), a inspiré Karl Marx et sa théorie du matérialisme historique dialectique sans que lui-même en soit réellement conscient (II), et nous a donné de solides clefs pour nous aider à théoriser le phénomène Daech, le problème le plus crucial de notre époque (III). 

    Penser, cʼest-à-dire représenter le réel, nécessite de disposer dʼune matière bien précise. Ce matériau, on lʼappelle en philosophie le concept. Grâce à saint Augustin, il est possible de développer une interprétation pertinente sur lʼessor du takfirisme, le terrorisme des musulmans sunnites dʼinspiration wahhabite, et de Daech en particulier, à lʼaide ce qui est le plus précieux en philosophie, et qui est même lʼessence de la philosophie, à savoir le concept. 

    LIEN SOCIAL ET SOCIÉTÉ CIVILE 

    Un concept très en vogue aujourdʼhui chez les sociologues a justement été inventé par Augustin dʼHippone. Ce concept, cʼest celui de lien social. Dans La Cité de Dieu, il définit une cité – au sens antique de ville-État, dʼentité politique – selon les termes suivants : « une multitude dʼhommes, rassemblés par un lien social »[3]. Ce lien social quʼAristote voyait comme consubstantiel à lʼhomme, dans sa nature propre ; dʼoù sa fameuse sentence du livre I des Politiques : par essence lʼhomme est un animal politique. Opinion que partage également Augustin. 

    Tant la vulgate universitaire (bourdieusienne ad nauseam) que le discours médiatico-politique usent sans limite de ce vocable de lien social. Les uns déplorent le délitement du lien social, les autres justifient tel point de leur programme en affirmant que la mesure quʼils préconisent dʼinstituer recréera du lien social. Comme si générer du lien social était synonyme de produire du bonheur public. 

    Ainsi lʼœuvre dʼAugustin préfigure la discipline moderne, qui se veut une science, appelée sociologie. Le vocable a été inventé par le révolutionnaire Sieyès, popularisé par Auguste Comte et Émile Durkheim en posa les jalons épistémologiques. Cette science de lʼhomme nʼenferme-t-elle pas lʼhomme dans un carcan, le privant de sa liberté, en le réduisant à un objet dʼétude, à une chose objectivable, tel le précipité du chimiste ou la mouche drosophile du biologiste ? Cette volonté de réifier lʼhomme dans ses interactions avec autrui, Durkheim lʼexprime ainsi : il sʼagit de traiter les faits sociaux comme des choses

    81WyQe5+kNL.jpgCharles Baudelaire suggère cela dans un poème publié dans le recueil Le Spleen de Paris qui est une critique radicale du positivisme comtien, et qui a pour titre le « Le joujou du pauvre ».

    464756177_small.jpgCette poésie, composée au milieu du XIXème siècle, peut être également vue comme une réflexion sur la question sociale, apparue durant ce siècle, cʼest-à-dire la question ouvrière, ainsi quʼune réponse à la théorie de la lutte des classes de Karl Marx, théorie que le communiste allemand nʼinventa pas mais reprit aux historiens libéraux français Guizot et Augustin Thierry, tout en lui donnant un autre sens, transformant les classes laborieuses, considérés chez ces derniers comme une classe dangereuse, en classe messianique. (A suivre)  

    [1]  Ce choix éditorial se justifie par la publication, en ce printemps, des Aveux de la Chair, le quatrième tome de lʼHistoire de la sexualité de Michel Foucault, chez Gallimard, où les Confessions de saint Augustin sont examinées minutieusement. Ce dernier est né le 13 novembre 354 à Thagaste (petite ville au sud dʼHippone).
    [2]  Saint Augustin, La Cité de Dieu, II, Paris, Gallimard, 2000, p. 928.
    [3]  Ibid., p. 609.

    A lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même ...
    (Cliquer sur l'image)

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  • Le prince des nuées

    Par Philippe Mesnard 

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    La présidence d’Emmanuel Macron a commencé dans les épais nuages d’un encens si généreusement distribué qu’on ne distinguait pas la route qu’il traçait.

    Ses troupes, galvanisées par un projet si brillant qu’il les aveuglait, marchaient en masse dans toutes les directions montrées « en même temps ». Depuis quelques semaines, la présidence d’Emmanuel Macron baigne dans les fumées des barricades de pneus flambants, des préfectures incendiées et des gaz incapacitants. Les fumigènes ont remplacé les encensoirs. Ces fumées plus palpables ne rendent pas l’avenir plus certain : Macron-Jupiter, réfugié dans son olympe élyséen, ou jouant à saute-mouton autour de la planète, reste inaccessible, chef qu’on serait bien en peine de venir chercher, comme il le réclamait naguère.

    Désormais se dressent, entre le peuple et lui, plusieurs obstacles, glacis et autres ouvrages défensifs : ceux du langage, mur du mépris des petites phrases qui assassinent et fossé des mesures technocratiques incompréhensibles ; ses ministres et porte-paroles, aussi méprisants, aussi abscons, et en plus ne répugnant pas au mensonge, tout en votant des lois contre les infox, comme Philippe parlant d’une hausse de 3% du Smic net, Darmanin évoquant de mirifiques augmentations mensuelles (avant que son ministère ne modifie son communiqué triomphant), Castaner accusant les blocages des Gilets jaunes d’avoir fait périr, à Angoulême, une octogénaire en fait déjà décédée avant même que l’ambulance ne parte – et nous pourrions allonger la liste à loisir ; ses députés, qui ânonnent qu’ils ont manqué de pédagogie – le peuple est si bête ! – alors qu’ils refusent de voir ce qui crève les yeux : ceux qui manifestent sont ceux que la sacro-sainte croissance a en fait ruinés ; sa politique européenne et mondialiste, enfin, qui inquiète tous les Français et ne convainc aucun Européen : il n’a jamais rien obtenu de ses “partenaires”, ni sur les travailleurs détachés, ni sur les transporteurs routiers, ni sur la taxation des Gafa, ni sur le budget européen, ni même sur la défense européenne (cf. p. 12), qu’il ne fait avancer qu’en proposant de céder notre place à l’Allemagne, piquante conclusion de son « itinérance mémorielle » ; le Pacte pour l’immigration est la dernière barrière en date dressée par ses propres soins, incompréhensible quand on voit la manière dont la société française est fracturée (cf. p. 32).

    On croirait la tour de Babel peinte par Breughel, entassant enceintes sur enceintes, inachevée et en partie déjà ruinée. Ses entrailles sont un labyrinthe, son sommet se perd dans les cieux : Macron y siège, prince des nuées. Voilà un président français qui s’acharne, après quarante ans de destruction minutieuse de la souveraineté et de l’identité française, à abattre ce qui résiste encore sous prétexte de le sauver, et qui s’énerve qu’on ne le salue pas en sauveur. Les pauvres ne comprennent pas qu’ils doivent s’appauvrir encore ? Quels réfractaires ! Les patriotes ne saisissent pas en quoi l’Autre est si merveilleux que la France doive disparaître ? Bande de lépreux ! Les vieux partis ont tous failli, La REM est en train de trahir, et les citoyens manifestent ? Quels séditieux ! « À moi la disruption, je suis le seul qui puisse rompre avec les usages et maîtriser les horloges, et j’exige le respect, la soumission, la crainte et le tremblement ! » Si assuré de son droit qu’il s’affranchit de la loi et décide de rendre au Bénin des œuvres pourtant inaliénables (p. 44)…

    Mais les Français sont démocrates, ne comprennent pas qu’on les méprise puisqu’ils sont le peuple, censé avoir délégué son autorité et non pas avoir abdiqué toute volonté. Mais les Français ne sont pas européens, ils sont de leurs villages et de leurs régions (c’est-à-dire Angevins ou Provençaux, Bourguignons ou Normands), ils veulent que leur travail les nourrisse et constitue un capital à transmettre, ils veulent payer l’impôt non pas pour bâtir de chimériques univers numériques ou verser avec une générosité déréglée des sommes dont les Français ont besoin ; ils veulent des transports publics nombreux, des écoles et des maternités. Ils veulent que les “territoires”, ce nom mystérieux qui désigne presque des contrées sauvages, ne soient pas gérés depuis Paris par des technocrates qui ignorent les réalités diverses et dressent, eux, une barrière financière devant toutes choses.

    Donc, les Français crient : les maires interpellent, les présidents de région aussi (p. 21), et toute la masse de ceux qui ne se sentent pas représentés et doutent de la légitimité de leur chef. Leur clameur finira-t-elle par secouer Jupiter-Macron et le tirer de son rêve éveillé, là-haut ?   ■ 

    Les pages notées renvoient au numéro de décembre de Politique magazine.

    Philippe Mesnard