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Rechercher : Rémi Hugues. histoire & action française. Rétrospective : 2018 année Maurras

  • Jean Sévillia présente le dernier Zemmour, Mélancolie française...

                Voici quelques extraits de l'article de Sévillia consacré à Eric Zemmour, que vous trouverez dans son intégralité ici :

                Zemmour Sevillia.pdf

    zemmour melancolie francaise.JPG
    Disponible le 3 mars, 16 euros

                "…Dès lors, Eric Zemmour endosse le rôle de celui qui prend la parole pour s'exprimer à rebours de l'air du temps, vilipendant le politiquement correct et ne craignant pas de violer les tabous. Et c'est ainsi qu'à la télévision, et maintenant à la radio, vif et mordant, mais toujours souriant, il fustige, pêle-mêle, l'esprit soixante-huitard, la mentalité bobo, le féminisme, le multiculturalisme, le droit-de-l'hommisme, l'immigrationnisme, le consumérisme libéral-libertaire, l'antifascisme de commande et la politique réduite à la « com' ».

                Face aux caméras, une injonction lui revient en boucle : «Sur le service public, vous n'avez pas le droit de dire ça.» En réalité, ceux qui lui jettent l'anathème sont hérissés par la parole libre qu'il fait entendre, justement parce que, jusqu'alors, celle-ci n'avait pas droit de cité dans les grands médias. «Les Français qui réagissent comme moi, commente Zemmour, un brin narcissique, avaient le sentiment de n'être pas représentés sur le petit écran ou sur les ondes. Aujourd'hui, je suis leur porte-voix.»

                Son nouveau livre, Mélancolie française (le titre est de lui), est un miroir : la mélancolie dont il est ici question, c'est aussi la sienne, lui qui se sent saisi par une angoisse existentielle devant la destinée de son pays. L'ouvrage s'ouvre par une métaphore filée jusqu'à nos jours. La France, argumente Zemmour, a aspiré, dès l'origine, à être la nouvelle Rome. Au cours de son histoire, elle a trouvé sur son chemin Carthage (l'Angleterre) ou un empire (germanique) qui lui a disputé la prééminence. Au XXe siècle, la République états-unienne prétendant régenter la planète et la guerre s'éloignant du continent, la France a remis son sort entre les mains de l'Europe. Au XXIe siècle, sa démographie s'anémiant, la nation comble les vides de sa population en laissant s'installer des habitants porteurs d'une autre culture. Chute de Rome et retour de la guerre ?

                Le dernier chapitre de Zemmour prend le contre-pied du discours vantant les charmes de la diversité et les bienfaits du métissage. Ces pages courageuses, il faut s'y attendre, feront scandale. Le livre est dédié à sa femme, mais la conclusion, à la teneur grave, a été rédigée par l'auteur en pensant à ses enfants. «Parce que je suis inquiet pour leur avenir, et parce que je ne voudrais pas qu'ils me reprochent, plus tard, de leur avoir caché la vérité.»

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  • L'ASSOURDISSANT SILENCE DES FÉMINISTES FRANÇAISES

     

    Une insolence d'Eric Zemmour légitime et argumentée. Mais les consciences selon la doxa sont sélectives et leurs indignations ne sont rien d'autre qu'idéologiques.

     

    XVM46b79742-8908-11e5-8758-aadd64fa74f8.jpgElles se taisent. Et quand elles parlent, c'est pire. Depuis la révélation des violences commises à Cologne, pendant la nuit de la Saint-Sylvestre, par des nuées de migrants sur des femmes allemandes esseulées, les féministes se tiennent coites. Nos grandes consciences progressistes, nos suffragettes, nos chiennes de garde, nos « Osez le féminisme ! », nos Najat Vallaud-Belkacem et Christiane Taubira, nos théoriciennes de la théorie du genre, nos statisticiennes des quotas, qui voyaient des viols partout et l'égalité nulle part, font assaut de discrétion. Comme si devant la vraie violence, et non pas celle qu'elles inventaient, elles revenaient à l'antique conseil de leurs arrière-grands-mères : sois belle et tais-toi !

    Il faut dire que les médias ont fait tout ce qu'ils pouvaient pour cacher la réalité. Autrefois, la rumeur était mensonge et l'information vérité : désormais, la rumeur est vérité, que censurent les médias si elle ne se soumet pas à la doxa totalitaire du « vivre-ensemble dans la diversité ». Les féministes ont la même pudeur que leurs consoeurs des médias, écartelées qu'elles sont entre leur solidarité avec les prétendues victimes de l'Histoire et la défense des droits des femmes. Déjà, lors des querelles françaises sur le voile, elles n'avaient pas pu cacher leur gêne. Pour protéger l'islam, sacro-sainte « religion de paix et d'amour », elles avaient cru habile de mettre tous les péchés du monde sur les épaules de la « culture patriarcale » qui imprégnait encore ces populations venues d'ailleurs. Depuis Cologne, c'est de nouveau la petite musique que certaines essaient de faire entendre. Comme si la culture patriarcale des Italiens du Sud, des Grecs, des Corses ou des anciens pieds-noirs était connue pour ses viols massifs. Comme si le patriarcat - couplé avec le christianisme dans nos contrées - n'avait pas été avant tout une répression - excessive, avait jugé Freud ! mais civilisatrice des instincts !

    La leçon est rude : cette folie prédatrice dans les rues de Cologne nous ramène à l'aube de l'humanité, quand la femme était considérée comme une prise de guerre par des armées d'envahisseurs qui marquaient ainsi leur souveraineté sur le territoire qu'ils conquéraient. Dans toutes les guerres, les viols de masse ont accompagné l'avancée des troupes : rien que durant la Seconde Guerre mondiale, on se souvient des viols de femmes russes par les troupes allemandes en 1941, de femmes allemandes par les troupes russes en 1944, ou encore - moins connu, de femmes italiennes par les troupes françaises des tabors marocains après la bataille de Monte-cassino en 1944. Le silence assourdissant des féministes vaut aveu : leur prétendu amour des femmes libres était seulement une haine inexpiable du mâle blanc. A croire que ce n'était pas sa suprématie qu'elles contestaient, mais sa domestication ; pas sa force, mais sa faiblesse. 

    Figaro magazine du 15.01.2016

     

  • Sans l’histoire de Clovis, pas de sentiment national, par Hilaire de Crémiers.

    Source : https://www.bvoltaire.fr/

    En juillet 2010 se tenait la XIXe université d’été de Renaissance catholique, ayant pour thème l’identité nationale.

    À l’occasion des 10 ans de cet événement, Boulevard Voltaire publie durant l’été, avec l’autorisation de Jean-Pierre Maugendre, président de Renaissance catholique, des extraits des actes du colloque dont le sujet demeure plus que jamais d’actualité.

    hilaire de crémiers.jpgAujourd’hui, l’intervention d’Hilaire de Crémiers, fondateur du mensuel Politique Magazine et coauteur, en 2018, de l’ouvrage collectif Regards sur Maurras.

    Le sentiment national a caractérisé les Français comme peuple très tôt, plus tôt que tous les autres, du moins en Europe. Il a uni ceux qui s’appelleront les Français, qui dans les premiers siècles s’appelaient les Francs. Ils étaient une minorité guerrière dans une société gallo-romaine qui existait encore. Ce sentiment est né de la manière dont les protagonistes de cette histoire se sont perçus eux-mêmes – ou dont, d’abord, ils ont été perçus par les clercs de l’époque. En quelque sorte, les Français, plus précisément ceux qui deviendront les Français, qui se sont vus associés, soit volontairement, soit plus ou moins brutalement sous les contraintes de l’Histoire, au destin commun, ont été amenés de manière singulière à s’entendre raconter leur histoire, à se la raconter à eux-mêmes et pour eux-mêmes. Et cela très tôt. Et cela sous l’influence primordiale des clercs, dans une Église gallo-romaine qui revendiquait l’exactitude de sa foi catholique.

    La première histoire ou, plus exactement, le premier développement littéraire à prétention historique qui tente ce genre d’explication remonte, en effet, au VIe siècle, soit à ces fameux temps mérovingiens dont Augustin Thierry, au XIXe siècle, établira « les récits ». L’auteur en était Grégoire de Tours.

    À l’encontre des sensibilités scrupuleuses, le sentiment d’appartenir à un peuple – on dira plus tard une nation – particulier, singulier, d’une certaine manière élu, entraîne Grégoire dans la manière de présenter son histoire à utiliser des procédés qui relèvent de l’amplification symbolique, mythique, poétique. […] Quand ce qui deviendra la France commence à se constituer, un sens se dégage de l’histoire et c’est ce sens que les historiens français au cours des siècles ont discerné, depuis le premier d’entre eux, notre Grégoire de Tours, jusqu’à aujourd’hui – avec, bien sûr, plus ou moins de rigueur. L’histoire devient significative ; c’est le vrai sens de l’histoire. Quand un peuple se raconte à lui-même sa propre histoire, il faut bien qu’elle ait un sens, une intelligibilité. Sinon les événements humains se perdent dans des méandres où l’on ne comprend plus rien. Et, finalement, on se dispute ; ce sont des querelles indéfinies. L’intelligence a besoin de repères ; les repères donnent le sens ; ils tracent un itinéraire. C’est extrêmement important. Car la France est peut-être le premier peuple d’Europe qui se soit ainsi, de façon aussi typique, préoccupé d’écrire sa propre histoire. Lorsque Grégoire de Tours raconte l’histoire de , il a une intention. Certes, il ne fait pas encore figurer dans son récit la Sainte Ampoule ; le baptême ne se confond pas avec le sacre que recevra, le premier, Pépin le Bref. En revanche, il est des pages extraordinairement significatives. […] Grégoire de Tours donne à l’événement une amplification prodigieuse, miraculeuse, pour le placer dans une perspective totalement signifiante. se trouve être compris, déjà à cette époque-là, comme le prince qui saura refaire de la Gaule, de ce qui était la Gaule romaine, un ensemble uni et de foi catholique. Cette histoire restera gravée dans le fond de l’esprit des clercs et alimentera leurs réflexions par la suite. Elle contribuera à produire ce qu’elle avait présenté comme acquis.

    Ainsi, très tôt, une histoire et une manière de la raconter sont au départ de l’apparition, de la création d’un sentiment d’unité nationale proprement français, sans que cette expression soit employée, sans même que ce sentiment soit, à proprement parler, conçu philosophiquement ou politiquement. L’anachronisme serait abusif ; cependant, il existe une sorte de mythe fondateur qui s’ancre dans la religion, celle de la Gaule romaine qui est la religion catholique. Ce même mythe accompagne un dessein politique qui se cherche pendant de longs siècles et qui va aboutir avec les Capétiens. Ce dessein politique, comme tous les desseins véritablement politiques, s’est d’abord heurté à des difficultés qui paraissent insurmontables et, par conséquent, s’est fortifié et s’est imposé dans des épreuves. Ainsi va se forger cette conception politique nouvelle, politico-religieuse, qui accompagne et fait éclore avec le temps un sentiment nouveau d’appartenance à une communauté de destin, que l’on peut appeler justement, a posteriori, le sentiment national. S’il n’y avait pas eu les Capétiens, s’il n’y avait pas eu au fondement de tout la religion catholique, s’il n’y avait pas eu l’histoire de Clovis et tout ce qui a suivi, et si, donc, il n’y avait pas eu ces « mythes » fondateurs que les clercs ont constitués autour de ces grandes forces primordiales, il n’y aurait pas eu, dans la suite des siècles, de sentiment national français. Il est là, le sentiment national.

    Le grand malheur est que les Français ne le savent plus. Vouloir dissocier ces forces les unes des autres n’amènera, par la suite, que des catastrophes. Quand les Français se chercheront un destin et voudront exalter leur nation, être des nationaux, des nationalistes, des patriotes, en dédaignant ce qui fait le nœud de leur constitution originelle, les conséquences seront dramatiques. […]

     

    Hilaire de Crémiers

    Fondateur de la revue Politique Magazine
  • Francophonie : Trahison française... Par Péroncel-Hugoz

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    © Copyright : DR

     

    Péroncel-Hugoz qui créa en 1982 et anima jusqu’en 1997 la rubrique Francophonie du « Monde », a éprouvé le besoin, avant le XVe Sommet francophone de Dakar, les 29 et 30 novembre, de donner - depuis le Maroc - un « coup de dent » à la France. Son analyse nous a paru pertinente - en même temps que très informée ! - et il nous paraît intéressant de la mettre en ligne aujourd'hui.  Lafautearousseau   •  

    Ça devrait, ça pourrait être un événement mais hélas ! Trois fois hélas ! Comme les précédentes conférences de ce type – sauf la première, tenue à Versailles en 1986, quand des espoirs étaient encore permis – , cette coûteuse réunion déplaçant des centaines de dirigeants politiques, journalistes, politiciens, jolies femmes, experts, observateurs, etc. ne verra, en principe, que des mondanités et des parlotes sans fin sur les droits de l’Homme, le terrorisme, les pandémies, la parité hommes-femmes et autres thèmes en vogue – au lieu de parler de la Francophonie proprement dite, de voir comment pourrait s’organiser cette force en jachère, représentant 500 millions de personnes dont la moitié de locuteurs quotidiens* de l’idiome de Senghor, Houellebecq, Nédali ou Céline Dion ; une force qui s’exprime aussi à travers 800 universités usant du français dans 100 pays.

    Pourquoi cette inaction ? Elle n’a qu’un seul nom : France. Sans elle, matrice du français, aucun des 76 autres membres, même le Canada (où se trouve la seule implantation coloniale française pérenne : le Québec et ses six millions d’âmes perdues au milieu d’un océan anglo-américain…) n’est pas assez influent pour prendre la tête de la Francophonie et lui imprimer une direction.

    Ancien révolutionnaire gauchiste en Amérique latine, venu sur le tard au gaullisme, le penseur Régis Debray (né en 1940 à Paris) n’a pas craint de parler franc ; le responsable c’est "le mépris abyssal de la plupart des intellectuels français pour la Francophonie, auquel fait écho l’indifférence polie de nos gouvernants " (" A demain de Gaulle !", Gallimard, Paris, 1990). Le ministre égyptien Boutros Boutros-Ghali (secrétaire général des Nations-Unies puis de l’Organisation internationale de la Francophonie) me confia en 1995, en marge du Sommet de Cotonou (Bénin) : " La Francophonie, si elle se fait, se fera contre la France !" Eh bien, personne ne s’étant senti de taille à affronter Paris, qui tient quand même, par pure vanité, à son statut prééminent, les affaires de cette immense aire linguistique sont restées en déshérence. Couvrant les événements francophones durant trois lustres, je ne vis qu’un seul ministre français de la Francophonie, l’académicien et historien Alain Decaux, se battre comme un lion pour la place du français sur la planète. L’unique chef d’Etat français de la Ve République qui, après de Gaulle, s’intéressa à la Francophonie fut le président Mitterand – mais c’était surtout par goût de la bonne littérature. Le président sénégalais Senghor, un des inventeurs des concepts de négritude et de francophonie, me révéla qu’il n’abordait jamais la question francophone devant son pair Giscard d’Estaing, "pour ne pas l’ennuyer"… De ce président français anglomane et (bon) anglophone à son lointain successeur Nicolas Sarkozy, américanomane et (médiocre) américanophone, rien n’a changé. Idem avec l’actuel président Hollande, malgré son récent coup de chapeau in situ aux résistants linguistiques québécois…

    Cependant, l’énorme capital francophone demeure, même s’il n’est guère exploité : savants, inventeurs, écrivains, professeurs, sportifs, artistes, gastronomes, entrepreneurs, etc. ne demanderaient, pour la plupart, qu’à s’organiser afin d’être comme le préconisait en son temps le grand cinéaste arabe Youssef Chahine (1926-2008), membre du Haut Conseil international de la Francophonie : "Le fer de lance d’un bloc culturel non aligné, faisant face au rouleau compresseur des industries politico-culturelles états-uniennes, et cela en union avec la Hispanidad, la Lusophonie et la Ligue arabe". On est aujourd’hui très loin de cet idéal qui il y’a moins d’un quart de siècle, paraissait encore à portée de main. Cependant, l’Histoire est riche en retournements spectaculaires inattendus… 

    * Au Maroc on estime qu’environ 1/3 des habitants sont francophones
    ** De Bourguiba à de Gaulle via Paul VI et Chahine, "Florilège de 20 citations sur la Francophonie" : www.roumanie-france.ro/172

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    Source : Le 360ma - Péroncel-Hugoz 

     

  • Documents pour servir à illustrer une histoire de l'URP (15)...

    (Documents pour servir à illustrer une histoire de l'URP : contribution, commentaires, informations, renseignements, prêt de photos etc... bienvenus; retrouvez l'ensemble de ces documents dans notre Catégorie : Documents pour servir à illustrer une histoire de l'URP)

     

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    15 : 24 février 1968, les gauchistes - emmenés par Samuel Johsua  - attaquent notre réunion de la Salle Mazenod, avec Pierre Debray... (2/3)

    Pour "raconter" l'affaire de la Salle Mazenod, nous avons commencé, la semaine dernière, par faire une rapide entorse à la chronologie, en parlant des trois locaux successifs que nous avons connus, à l'Union Royaliste Provençale; la bagarre de la salle Mazenod eut lieu lorsque nous étions dans le premier de ces locaux : au 9 rue Saint Suffren...

    Aujourd'hui, nous n'allons pas faire une deuxième entorse à la chronologie, mais vous devrez cependant attendre encore une semaine avant de lire le récit de la bagarre proprement dit. Celle-ci étant le fruit et l'effet d'un contexte, il est impératif de commencer par présenter et rappeler ce contexte, sans lequel la compréhension du "pourquoi" de cette bagarre serait impossible; et sans lequel, d'ailleurs, cette bagarre n'aurait probablement pas eu lieu, tout simplement...

    Revenons donc au commencement... Nous sommes en septembre 1967 et, comme chaque année, nous reprenons nos activités militantes en nous retrouvant à Roquevaire, devant le caveau de famille des Maurras (j'ai rapidement expliqué le pourquoi et le comment de ce rendez-vous annuel dans le numéro 10 de ces Documents). Ce jour-là, aucun d'entre nous, comme du reste aucun Français et personne dans le monde ne se doute un seul instant que l'année scolaire qui s'ouvre ne s'achèvera pas, ou plutôt, qu'elle s'achèvera sous la forme de... "Mai 68" !

    En France, apparemment, tout est calme, mais, à l'international, ce qui domine, de toute évidence, c'est la guerre du Viet-Nam (l'offensive du Tết est de janvier 68, donc dans quatre mois, mais, là aussi, personne ne s'en doute...).

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    Pour les révolutionnaires, cette guerre est du pain béni, car elle leur donne l'occasion de se présenter en farouches défenseurs de la volonté d'indépendance d'un petit peuple contre les odieux capitalistes représentés par les USA et le monstre Dollar (alors que, c'est bien connu, l'argent est bien plus souvent et bien plus volontiers "à gauche" et du côté de la Révolution qu'ailleurs...) :

    •  le PCF est tout puissant à l'époque, il est une sorte de "krach des chevaliers" du point de vue de l'organisation : son candidat, Jacques Duclos arrivera en troisième position à la Présidentielle de 1969, en recueillant 4,8 millions de voix, soit 21,3 % des suffrages exprimés. Dans les Quartiers nord de Marseille, François Billoux, de 45 à 78, est élu au premier tour, sans besoin d'alliance, avec parfois 80% des voix. Et, en France, c'est par milliers que l'on compte les élus PCF (Députés, Sénateurs, Maires, Présidents de Départements... : l'intégralité des Maires du Département de la Seine Saint Denis est "PCF"...). Et, intellectuellement, le PCF régente tout : c'est l'époque où la "semaine de la pensée marxiste" est le nec plus ultra de l'année...

    mais, à côté de ce PCF énorme, une mouvance vient d'émerger : les "gauchistes". Eux aussi recrutent en masse grâce à l'opposition à la guerre du Viet-Nam. Et c'est à eux que nous allons avoir affaire. Voici comment, et pourquoi...

    Nous, royalistes, étions pris en tenaille dans ce sujet du Viet Nam : évidemment, nous étions anti-marxistes, forcément, mais nous ne tombions pas dans le piège grossier d'un soutien aux États-Unis, qui s'étaient crus malins en nous chassant de là-bas pour prendre notre place, puis en faisant tomber tout ce qui - à l'image de Ngo Dinh Diem - s'opposait réellement à la Révolution. Le matérialisme idéologique des marxistes s'opposait au matérialisme économique et "de fait" des USA dans une sorte d'affrontement fratricide. Trouver notre positionnement là-dedans, entre ces deux formes adverses mais consanguines du matérialisme, n'était pas chose aisée, et la tâche était beaucoup plus simple pour nos adversaires que pour nous...

    Cependant, en Provence et à Marseille, comme en France, le mouvement royaliste prenait et reprenait de l'ampleur, et progressait ("Il y a du vent dans les voiles du vaisseau royal", dit un jour Bernard Mallet, le Président du Comité directeur, dans ces années-là). Et nous cherchions - très banalement, comme toutes les sections de France - à grandir toujours plus, donc à recruter toujours plus afin de créer dans toujours plus de lieux toujours plus de sous-groupes royalistes.

    Nous eûmes donc l'idée de ce tract :

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    Il s'agissait tout simplement pour nous de "défendre l'Occident", ou ce qu'il en restait, contre les deux faces de la même barbarie matérialiste (URSS/USA). En aucun cas de nous mesurer frontalement au PCF (hypothèse absolument farfelue et inenvisageable) ni même à ces gauchistes que nous ne connaissions, finalement, que de nom et de renom. Le soldat Sud vietnamien que nous avions pris en exemple, était le symbole de la résistance au marxisme et à la Révolution, puisque nous voulions partir de quelque chose qui "parlait" au public, à l'époque; rien de plus. Mais il faut croire que ce n'est pas comme cela que les gauchistes l'ont compris...

    À côté de nos ventes régulières d'Aspects de la France (les jeudi puis mercredi après-midi, samedi après-midi et dimanche matin, aux Messes) et de nos affichages, nous commençâmes donc à distribuer ce tract un peu partout. Il reçut l'accueil habituel : une petite minorité intéressée et favorable; une autre minorité hostile, voire agressive, mais sans plus; et une majorité d'indifférents. Il n'y eut qu'au Lycée Saint Charles que l'accueil fut vraiment bon, mais nous y avions un  groupe nombreux, actif et dynamique (nous l'avions d'ailleurs baptisé, entre nous, pour nous amuser, le "lycée Saint Charles Maurras" !).

    Puis nous eûmes l'idée de tenter, avec ce tract, de lancer un groupe à la Fac des Sciences de Saint Charles (près de la Gare du même nom). Nous n'y comptions aucun adhérent ni même sympathisant affiché, alors que ladite Fac était notoirement truffée de gauchistes. Mal nous en prit : bien qu'assez nombreux, et décidés, nous tombâmes sur très largement plus fort que nous (car nous manquions d'informations sur cette Fac, n'y ayant personne "à nous"). Samuel Johsua, dont nous fîmes la connaissance à cette occasion, rameuta en un rien de temps une troupe de militants haineux et décidés à nous faire la peau, au sens propre. Nous eûmes la sagesse de comprendre au quart de tour que nous allions à l'abattoir, et ne dûmes notre salut qu'au fait que, ce jour-là, nous courûmes plus vite qu'eux; mais, vraiment, beaucoup plus vite... Ce n'est pas très glorieux à raconter, mais c'est ainsi...

    En fait, nous l'avons compris après : ces gauchistes de "la bande à Johsua" (il y avait aussi un certain Sanson, mais je ne sais plus s'il était de Saint Charles ou d'ailleurs...) avaient en quelque sorte "pris pour eux" ce soldat vietnamien du Sud, ils avaient vu là une sorte d'attaque contre eux. À tort, évidemment, car "la bagarre pour la bagarre" ne nous a jamais intéressée et la seule chose que nous voulions était de faire progresser notre section militante, de recruter et de nous implanter dans le plus d'endroits possibles, mais certainement pas de chercher à nous battre contre qui que ce soit...

    Mais voici que, peu de temps après, nous décidions d'organiser, avec Pierre Debray comme orateur, une Réunion publique sur ce même thème : Défense de l'Occident. Nous imaginions comme très probable, sans en avoir évidemment la certitude absolue ni la moindre preuve, l'hypothèse selon laquelle notre cher "meilleur ennemi" Johsua reviendrait, avec ses sbires, pour attaquer cette réunion et "finir le travail" : car, s'ils nous avaient mis en déroute à la Fac, et si nous avions piteusement quitté les lieux à toutes jambes peu de temps avant, aucun d'entre nous n'avait été blessé; notre local n'avait pas été attaqué et nos activités (ventes, affichages, tractages) se déroulaient sans encombre, même si nous étions très prudents, en tout cas plus qu' "avant"...

    Nous distribuâmes donc - mais pas à la Fac Saint Charles !... - le tract/invitation suivant, sans encombre, nulle part... :

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    Et nous accompagnions ce tract invitation du document suivant, destiné à faire connaître Pierre Debray :

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    Rendus prudents par l'affaire de la Fac Saint Charles, nous préparâmes avec soin la réunion du 28 février, en imaginant les divers scénarios possibles. N'étant pas sûrs qu' "ils" viendraient, mais sans pouvoir ni vouloir écarter l'hypothèse, nous prîmes la précaution d'acheter trente manches de pioche (tout de même...), Chauvet nous livra des casques de chantier (mais ils étaient peu commodes, et, finalement, nous ne les employâmes jamais); et, bien sûr, l'intégralité des militants fut prié d'être là, et prêts, "au cas où"...

    Ce "au cas où" eut lieu, et je vous le raconterai la semaine prochaine... 

    François Davin

  • Libye, Syrie, Ukraine : le Waterloo de la diplomatie française

    La bataille de Waterloo, 18 juin 1815 - Clément-Auguste Andrieux

     

    L'analyse de Jean-Michel Quatrepoint

    Alors que Nicolas Sarkozy vient de rendre visite à Vladimir Poutine, Jean-Michel Quatrepoint compare, pour Le Figaro deux diplomaties, la française et la russe. Il déplore l'absence de vision de la France sur le dossier syrien. Son analyse, comme toujours parfaitement renseignée, éclaire et corrobore la position qui est la nôtre sur ces sujets, en effet compliqués, comme l'est l'Orient, mais où les intérêts de la France ne sont plus défendus. LFAR. 

     

    PHO1159e20e-cc52-11e3-a4f2-b373f3cdeec9-150x100.jpgNicolas Sarkozy a rendu visite à Vladimir Poutine dans sa datcha proche de Moscou, jeudi 29 octobre, et a prôné le dialogue entre la France et la Russie. Ce virage de celui qui a fait rentrer la France dans le commandement intégré de l'OTAN en 2007 vous surprend-elle ? 

    L'ancien président de la République devrait commencer par reconnaître ses deux erreurs. La première est la guerre de Libye : il est responsable de sa déstabilisation. Deuxièmement, c'est sous son quinquennat que son ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, et le Quai d'Orsay, ont tout fait pour faire partir Bachar el-Assad. Par la suite, François Hollande, Laurent Fabius et le Quai ont aggravé cet échec diplomatique. Ceci dit, Nicolas Sarkozy peut se féliciter de ses relations anciennes avec Vladimir Poutine. Lors de la crise géorgienne, il avait su maintenir le contact avec celui qui était alors Premier ministre, n'hésitant pas, déjà, à se rendre à Moscou. 

    Comment qualifier l'attitude de la France en Syrie ? 

    C'est le Waterloo de la diplomatie française. Nous avons été exclus des dernières négociations. Les autres puissances se moquent de la voix de la France. Nous disposons, au même titre que l'Union européenne, l'Allemagne et l'Italie, d'un strapontin à la conférence de Vienne sur la Syrie ce vendredi. Les vrais décideurs sont en réalité la Russie et les Etats-Unis. Avec la réinsertion de cet Iran que la diplomatie française a tant ostracisé. Car le problème est bien plus complexe que la désignation des bons et des méchants. Si Assad est un dirigeant peu fréquentable, il est loin d'être le seul… 

    D'autres pays avec lesquels la France entretient d'excellentes relations sont également dirigés par des « infréquentables ». Dans cet Orient compliqué, prendre parti unilatéralement avec des idées simplistes comme nous l'avons fait était une erreur. Toute la diplomatie française s'est retrouvée en porte-à-faux ; sa tradition était de parler avec tout le monde et d'être un entre-deux, un médiateur qui facilite la résolution des problèmes de façon équitable. Là, nous avons choisi le camp le plus extrême qui soit puisque nous avons choisi comme alliés l'Arabie saoudite et le Qatar. On a adopté sans nuances la cause qatarie et saoudienne contre l'Iran et la Syrie. Aujourd'hui, l'Arabie saoudite, réaliste, s'asseoit à la même table que les Iraniens et discute avec les gens de Bachar. Nous sommes les dindons de cette farce tragique. 

    Quel bilan dresser de l'action diplomatique de Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères ? 

    Laurent Fabius a tout fait pour faire échouer les négociations sur le nucléaire iranien. Il a une part de responsabilité dans la crise ukrainienne. Il n'a pas veillé à ce que l'accord signé à Maïdan entre les Russes et les Ukrainiens soit respecté. On peut critiquer Fabius, mais la responsabilité incombe largement au Quai d'Orsay. La diplomatie gaullo-mitterandienne a connu son chant du cygne, en 2003, avec Dominique de Villepin. Beaucoup des diplomates du Quai, largement imprégnés par le courant néo-conservateur américain, n'ont pas apprécié le discours du Premier ministre à l'ONU sur la guerre d'Irak. En ce moment, ceux qui sont à la manœuvre sont les néo-conservateurs, qui ont dépassé leurs modèles américains! À vouloir imiter et servir les Américains et les Saoudiens, ils ne se font jamais respecter. 

    Il est par ailleurs absurde de privilégier une relation avec un pays aussi petit sur le plan démographique et culturel que le Qatar, au détriment d'un pays de 80 millions d'habitants tel que l'Iran. Le développement économique de l'Iran comparé à celui du Qatar est sans commune mesure. 

    Il se murmure que Laurent Fabius pourrait être nommé président du Conseil constitutionnel. Ségolène Royal est pressentie pour le remplacer. Ce choix paraît-il approprié ? 

    Mais il y a aujourd'hui un autre candidat pour le Conseil constitutionnel, Lionel Jospin. Et des négociations sont en cours en ce moment entre François Hollande et Jean-Louis Debré. Ségolène Royal était à Moscou en même temps que Nicolas Sarkozy, même si elle n'a pas été reçue par Vladimir Poutine à qui elle portait une invitation pour la Cop21… 

    En réalité, le problème n'est pas le ministre des Affaires étrangères, mais l'administration qui le soutient et le président de la République. C'est ce dernier qui donne l'impulsion diplomatique. Il a choisi de nommer un ambassadeur à Moscou qui, bien que membre de la promotion Voltaire à l'ENA, n'est ni russophone ni russophile. 

    La politique étrangère française se réduit-elle aujourd'hui à la diplomatie du climat ? 

    On a abandonné la diplomatie des droits de l'Homme puisque on a bien vu que tous les pays auxquels nous avons tenté d'apporter la démocratie ont été ravagés (Libye, Syrie…). Et qu'en Egypte, le maréchal Sissi a sauvé le pays des Frères musulmans en faisant peu de cas des droits de l'homme. Il a tout simplement appliqué le principe : pas de liberté pour les ennemis de la liberté. On a l'impression qu'après les droits de l'homme on s'est rabattu sur la diplomatie du développement durable. Il s'agit certes d'un enjeu important, mais on ne saurait limiter notre diplomatie à ce seul aspect des choses. Quant à la politique énergétique, on ferait mieux de valoriser ce qui reste un de nos points forts : le nucléaire. Et de relancer les recherches sur les futures générations de centrales. 

    Quelle est la stratégie de la Russie en Syrie ? 

    La diplomatie russe emmenée par Sergueï Lavrov est réelle, réaliste et réfléchie. Après la crise ukrainienne qui les a mis en difficulté, les Russes ont réussi à se repositionner avec habileté sur la Syrie. 

    À la fin du printemps, les Russes se sont rendu compte que l'armée d'Assad était exsangue. Des 300 000 soldats du départ, il n'en restait plus que 150 000. Cette armée a été minée par les désertions des sunnites, passés dans les rangs de Daech, al Nosra ou de l'Armée syrienne libre, et les morts. Les 250 000 morts dont on nous parle sont dans tous les camps : l'armée régulière, les groupes djihadistes et les civils. Le flux migratoire que l'on connaît en Europe s'est accéléré à partir de juin 2015. Une partie des Syriens favorable au régime craignant alors que Bachar el-Assad soit défait, a choisi de s'exiler. 

    Les Russes ont choisi de ne pas lâcher Assad pour plusieurs raisons. Dans les rangs de Daech, il y a 5 000 Tchétchènes, peuple musulman qui vit au Sud-Ouest de la Russie aux tendances séparatistes et islamistes. Si l'État islamique installe son califat, il y un risque majeur de déstabilisation de tout le Caucase. Ensuite, les Russes perdraient la base navale de Tartous qui leur est essentielle pour assurer leur présence en Méditerranée. Tout comme il était vital pour eux d'avoir une large ouverture sur la mer Noire. L'annexion de la Crimée visait d'abord à récupérer la base navale de Sébastopol. 

    Mais Moscou venait de resigner une concession de trente ans avec l'Ukraine pour sa base navale… 

    Oui, mais les Russes n'avaient plus confiance. L'évolution en Ukraine, le jeu trouble des États-Unis et de certains États européens leur ont donné à penser que cet accord pouvait être rompu du jour au lendemain. Ils ont donc préféré se servir avant d'être éventuellement mis à la porte. Par cet accès à la mer Noire, les Russes conservent une ouverture sur la mer Méditerranée. Il y a également une explication religieuse au soutien affiché à Assad. Bachar et son père ont protégé les minorités religieuses chrétiennes, orthodoxes, comme Saddam Hussein en Irak. Hussein, qui était sunnite - une minorité sunnite dirigeait d'une main de fer l'Irak, à majorité chiite - a préservé le million de chrétiens irakiens. Son ministre des Affaires étrangères, Tarek Aziz était précisément un chrétien. A contrario en Syrie, une minorité alaouite, variante du chiisme, gouverne, avec l'appui des chrétiens (5% de la population), une majorité de sunnites. Mais les Assad, comme Sadam Hussein, venaient du parti Baas, où les influences socialistes et les liens avec l'URSS étaient importants. La Russie de Poutine ne veut pas être exclue d'un Proche-Orient où l'URSS avait des alliés, au premier rang desquels la Syrie. 

    Comment les Russes ont-ils procédé ? 

    La prise de Palmyre par Daech en mai a accéléré le cours des choses ; même si cette prise est d'une importance stratégique secondaire, le poids symbolique s'est lourdement fait sentir. Le mouvement diplomatique opéré par le Kremlin a consisté à traiter avec les Saoudiens, avec le discret appui de Washington, et à les amener à rediscuter avec le régime syrien. Le 18 juin dernier, Poutine a reçu à Moscou le prince Mohammed ben Salmane, ministre de la Défense et vice-Premier ministre saoudien. Ils se sont mis d'accord sur une reprise du dialogue avec la Syrie. Les Saoudiens ont posé comme condition que la rencontre avec les Syriens se déroule à Riyad. Ces derniers ont accepté et envoyé leur numéro deux, le patron des services de renseignement, Ali Mamlouk, pour rencontrer Ben Salmane à Riyad. Chacun a vidé son sac. Les Syriens ont reproché aux Saoudiens de ne plus privilégier un comportement collectif — comme au temps où Egypte, Syrie et Arabie saoudite étaient les meneurs de la diplomatie du monde arabe -, d'armer leurs opposants et de briser ce lien qui les unissait en leur préférant les Qataris. Les Saoudiens, de leur côté, ont reproché aux Syriens leur proximité avec le régime iranien. Mais ils s'étaient reparlés ce qui était l'essentiel. 

    Les Russes ont ensuite préparé conjointement une habile stratégie diplomatique, pour se garantir un maximum d'alliés, et une offensive militaire dans la région. Leur but était de dégager l'étau qui enserrait Assad. Par conséquent, ils ont frappé d'abord ceux qui étaient directement à son contact, en l'espèce al Qaïda et al Nosra, et non Daech. Il est logique qu'ils aient frappé en premier lieu ceux qui menaçaient directement le régime syrien. Puis dans un deuxième temps, ils se sont plus largement attaqués à Daech. 

    Les Russes ont-ils une solution de rechange s'ils ne parviennent pas à maintenir Assad au pouvoir ? 

    Effectivement, leur idée initiale est de former un bloc uni - États-Unis, Turquie, Arabie saoudite, régime syrien, Iran - contre Daech. À l'évidence, ils ont expliqué à Assad, lors de sa récente visite à Moscou, qu'à terme il devrait quitter le pouvoir, si c'était la condition d'un accord politique, du maintien de l'intégrité du pays et d'un front uni contre Daech. Mais si ce plan A échoue, leur plan B consiste en une création d'un réduit alaouite sur la bordure méditerranéenne, autour de Lattaquié et Tartous, dont ils protègeraient les frontières contre l'EI. Les Russes soutiendraient le réduit alaouite comme les Américains ont soutenu Israël. 

    Ce qu'il faut souligner c'est que les Russes, bien que touchés par la crise économique, sont encore capables de déployer une stratégie diplomatique de grande ampleur. La Russie compte peu économiquement, c'est l'échec de Poutine ; il n'a pas réussi à reconvertir une économie de rente pétrolière et minière en une économie moderne. Mais diplomatiquement, elle a complètement repris pied sur le champ diplomatique depuis la fin de l'URSS.  •

    Jean-Michel Quatrepoint est journaliste économiste. Il a travaillé entre autres au Monde, à La Tribune et au Nouvel Economiste. Il a écrit de nombreux ouvrages, dont La crise globale en 2008 qui annonçait la crise financière à venir.

    Dans son livre, Le Choc des empires .Etats-Unis, Chine, Allemagne: qui dominera l'économie-monde ? (Le Débat, Gallimard, 2014), il analyse la guerre économique que se livrent les trois grands empires qui règnent en maîtres sur la mondialisation.  

    Entretien réalisé par Eléonore de Vulpillières et Alexandre Devecchio

  • Bock-Côté : « Depuis une quarantaine d'années, on a assisté à la criminalisation progressive du sentiment national, »

     

    2293089609.14.jpgGRAND ENTRETIEN - Dans une charge contre le multiculturalisme et le politiquement correct, le sociologue québécois puise dans l'actualité récente des exemples éloquents : suppression du mot « race » de la Constitution, passages piétons aux couleurs de la gay pride à Paris... Bien d'autres sujets essentiels sont évoqués dans cet entretien foisonnant et sans concession réalisé par Alexandre Devecchio pour Figarovox [29.06]. Serons-nous d'accord sur tout ? Pas forcément. Sur le fond, sur la pensée si riche de Mathieu Bock-Côté, nous le serons, à l'évidence.  LFAR 

     

    Sur fond de moralisation de la question migratoire et de radicalisation féministe, les députés ont voté en commission le retrait du terme «race» de l'article 1er de la Constitution et y ont également introduit l'interdiction de « distinction de sexe ». Que cela vous inspire-t-il ? 

    Cela faisait un bon moment que la proposition d'un retrait du terme « race » de la Constitution traînait dans le paysage politique. On rappelle avec raison que François Hollande en avait fait la promesse lors de l'élection présidentielle de 2012. Le raisonnement est le suivant : si les races n'existent pas, comme on le dit aujourd'hui, pourquoi les mentionner ? Ils y voient l'aboutissement constitutionnel d'un antiracisme authentique. Pourquoi pas ?

    Mais il y a néanmoins un paradoxe étonnant sur lequel on doit se pencher : c'est au moment où on veut bannir le mot race que la question raciale resurgit au cœur de la vie politique, à travers l'action des groupuscules identitaires d'extrême-gauche, dont les Indigènes de la République sont emblématiques. La mouvance indigéniste entend achever la décolonisation en dénationalisant la France, ce qui implique à la fois sa soumission et sa conversion à un multiculturalisme qui veut non seulement réintroduire la race dans le débat public, mais qui veut en faire la catégorie fondatrice de la citoyenneté et de la représentation. Elle pousse à une racialisation des appartenances qui accule ensuite au séparatisme racial revendiqué, comme on le voit avec la multiplication des « rencontres non-mixtes pour personnes racisées » dans le milieu universitaire, pour emprunter les termes de la novlangue diversitaire. En fait, si on se penche un peu sur les textes de référence de cette mouvance, on constate qu'elle cultive un racisme antiblanc décomplexé. S'il y a une tentation raciste en France, elle vient de là. La mouvance indigéniste excite le repli communautariste et cherche à fissurer le noyau intime de la nation. Mais cela ne semble pas troubler exagérément les grands médias, qui accueillent les représentants de cette mouvance à la manière de grands démocrates. La haine raciale est officiellement proscrite, sauf lorsqu'elle vise ceux qu'on nous invite à appeler les « Blancs » parce qu'il s'agirait simplement d'une critique des « dominants » par les « racisés ». La mauvaise conscience occidentale a de l'avenir.

    Qu'on me permette un mot sur cette sociologie racialiste qui s'impose de plus en plus dans l'université. Faut-il mettre le Français, l'Allemand, l'Écossais, l'Anglais, le Russe, le Letton, le Québécois et le Néerlandais dans la même catégorie parce qu'ils sont « Blancs » ? Faut-il faire de même avec le Malien, l'Haïtien, le Kenyan et l'Afro-Américain parce qu'ils sont « Noirs » ? Cette racialisation débile des appartenances est incroyablement régressive : elle pousse à l'abolition de l'histoire et de la culture pour naturaliser les groupes humains en grandes catégories zoologiques. Mais puisque cette proposition vient de la gauche, ou du moins, d'une certaine frange de la gauche radicale, on l'accueille favorablement, ou du moins, sans trop la condamner.

    Alors devant cela, je me demande quel est le sens de ce vote des députés, qui me semblent incroyablement détachés du réel politique, auquel ils devraient pourtant porter attention. Que pensent les députés qui se sont ralliés à cet amendement de cette effrayante racialisation des appartenances ?

    Ce progressisme langagier peut-il vraiment réduire ou corriger les injustices et les inégalités ?

    Allons-y d'une évidence : le langage évolue, et d'une époque à une autre, il y a une forme de tri naturel qui n'est rien d'autre qu'un mouvement de civilisation des mœurs. Dans notre monde, on ne dit plus nègre, on ne dit plus rital, on ne dit plus youpin, et globalement, c'est très bien. L'histoire de la politesse nous rappelle que ce qui peut se dire ou ne pas se dire d'une époque à l'autre varie et on peut se réjouir que certaines insultes hier prisées méritent aujourd'hui à ceux qui les emploient une très mauvaise réputation. Il arrive aussi que ce souci de « politesse » bascule dans l'euphémisation du réel, lorsque le sourd devient le malentendant ou l'aveugle, le non-voyant. On ne sait pas trop ce qu'on gagne à parler ainsi, sinon à déréaliser le langage et à l'enfermer dans un univers autoréférentiel.

    Mais ce n'est plus de cela dont il s'agit ici dans cette orwellisation du langage qui caractérise aujourd'hui la langue médiatique. Souvent, il s'agit de masquer le réel, tout simplement, comme c'est le cas avec la référence obsédante au vivre-ensemble, au moment même où la société se décompose et s'effiloche. Il peut aussi inverser le sens du réel. Il faudrait se souvenir de Jacqui Smith, l'ancienne ministre de l'intérieur britannique, qui en 2008, avait affirmé qu'il fallait parler non plus d'attentats islamistes, mais anti-islamiques, parce qu'ils seraient contraires à la vocation naturellement pacifique de l'islam. De la même manière, quand un homme comme Jacques Toubon joue avec les chiffres et les définitions pour laisser croire que l'immigration massive n'a pas eu lieu en France depuis 40 ans, comme on l'a vu récemment, il s'engage dans un travail de falsification de la réalité qui pousse le commun des mortels à croire que les autorités cherchent moins aujourd'hui à agir sur le réel qu'à le dissimuler. Cette idéologisation du langage devrait nous pousser à relire Milosz et Koestler, qui ont consacré des pages lumineuses à l'aveuglement idéologique.

    La guerre culturelle, qui s'est substituée à la lutte des classes, est d'abord une bataille pour déterminer la signification de notre univers symbolique et pour transformer les codes et repères qui constituent le monde commun. On veut déterminer les paramètres de la perception commune et décider quels phénomènes sociaux ou aura le droit de voir ou non. Comment se représente-t-on la société ? Comment a-t-on le droit de la représenter ? En fait, le politiquement correct est un dispositif inhibiteur installé au cœur de l'espace public qui a pour fonction de refouler dans ses marges ceux qui affichent leur dissidence avec l'orthodoxie diversitaire. Et le politiquement correct se radicalise au rythme où la société diversitaire se décompose, comme s'il fallait à tout prix empêcher qu'on en tienne compte. De ce point de vue, le multiculturalisme est un régime idéocratique et autoritaire.

    Je vous donne un exemple : on parle beaucoup, depuis quelques années, d'une « libération de la parole xénophobe » et il est bien vu de s'en inquiéter. Il y aurait même une montée de l'intolérance en Europe, et la démocratie serait mise en péril par la tentation du repli identitaire - on connaît ce lexique. Mais on peut voir les choses autrement : depuis une quarantaine d'années, on a assisté à la criminalisation progressive du sentiment national, au point où même la forme la plus bénigne de patriotisme a été assimilée à une inquiétante dérive nationaliste. À travers cela, c'est le besoin d'enracinement qu'on a moralement disqualifié. Il n'est plus légitime, pour un peuple, de vouloir assurer sa continuité historique ou de défendre ses frontières devant l'immigration massive sans qu'on présente de telles aspirations comme autant de symptômes de la progression de l'extrême-droite dans la vie publique.

    Alors s'agit-il vraiment d'une libération de la parole xénophobe, ou du simple éclatement d'une digue idéologique et médiatique qui censurait le sentiment national ? S'agit-il d'un retour du racisme 70 ans après la deuxième guerre mondiale ou d'un refus enfin affirmé de xénophobiser tout ce qui relève de près ou de loin de la nation ? À tout le moins, on comprend que toute bataille politique suppose une bataille pour définir la réalité, mais celle-ci n'est pas infiniment malléable et elle finit par regagner ses droits, que nous la regardions en face ou non.

    Plus anecdotique, Anne Hidalgo a décidé d'installer de manière permanente des passages piétons LGBT après qu'un passage piéton « arc-en-ciel » a été recouvert d'insultes homophobes. Dans le même temps, l'Assemblée nationale sera pour la première fois pavoisée aux couleurs LGBT. Cette politique en direction des minorités, sous prétexte de lutte contre les discriminations, ne trahit-elle pas finalement l'idéal égalitaire et anti-communautaire républicain ?

    Je ne suis pas certain que cela soit si anecdotique. Ces insultes contre les homosexuels sont inadmissibles, évidemment, et il est bien qu'on le dise, qu'on le répète, même. Ils relèvent d'une bêtise crasse, abjecte et militante qui devrait avoir honte d'elle-même.

    Mais on voit ici comment le politiquement correct récupère ces insultes pour les instrumentaliser : on cherche ainsi à faire croire qu'elles seraient symptomatiques d'une renaissance du démon de l'homophobie qui hanterait la France. Il faudrait urgemment se mobiliser contre lui pour le chasser de la cité. Cela correspond à la sociologie diversitaire qui soutient que les sociétés occidentales se définiraient aujourd'hui essentiellement par une structure patriarcale, homophobe, raciste et sexiste qu'il faudrait faire tomber urgemment. Pouvons-nous raison garder ? On constate ici que le système médiatique est prêt à récupérer n'importe quel événement pour maintenir en vie ce grand récit de l'hostilité occidentale à la différence.

    XVM70472746-7bc0-11e8-9b13-5c6ef20204ff-400x500.jpgEt cela peut aller plus loin. Si la France suit la pente nord-américaine, c'est au nom de la lutte contre l'homophobie, et demain, contre la transphobie, qu'on voudra de nouveau la convertir à la théorie du genre ou qu'on militera pour la reconnaissance d'un troisième sexe normalisé dans les formulaires administratifs, et cela, pour en finir avec la représentation binaire de la différence sexuelle. Et comme on doit s'y attendre, à ce moment, ceux qui ne participeront pas aux applaudissements obligatoires seront rangés dans le camp des réactionnaires. Cela devrait nous amener à réfléchir à la « lutte contre les discriminations », à laquelle en appellent tous les politiques, sans prendre la peine de réfléchir au cadre théorique dans lequel elle s'inscrit et qui la justifie. La moindre différence est désormais pensée comme une discrimination illégitime à combattre.

    Autre chose. Il faudrait se questionner sur ce qui, dans le logiciel médiatique, permet de transformer un fait divers en fait politique. Ces insultes sont comprises comme un événement politique exigeant une réponse politique. Mais quelle est la matrice idéologique qui transforme les faits divers en faits politiques, et comment fonctionne-t-elle ? Pourquoi, par exemple, le scandale de Telford est-il traité comme un fait divers n'ayant aucune signification particulière ? Pourquoi avons-nous parlé avec tant de pudeur des agressions sexuelles à grande échelle de Cologne ? Pourquoi la hausse de l'insécurité causée par l'immigration massive est-elle tue, ou même niée, au point même où ceux qui en font mention passent pour des agitateurs racistes et des prêcheurs de haine ?

    En fait, tout ce qui remet en question la grandeur de la société diversitaire est abordé avec une gêne extrême : on craint que si l'information se rend au peuple, ce dernier n'en tire des conclusions indésirables. Alors on ira même jusqu'à criminaliser les porteurs de mauvaises nouvelles, comme on le voit avec les procès idéologiques à répétition, qu'ont subi bien des intellectuels et journalistes français ces dernières années.

    De manière plus large, est-on en train d'assister en France à un nouveau tournant politiquement correct? Régis Debray a-t-il raison de parler d'américanisation de l'Europe ?

    Je ne suis pas particulièrement porté à l'anti-américanisme mais je constate qu'il est aujourd'hui nécessaire de critiquer une nouvelle forme d'impérialisme idéologique qui vient d'Amérique et qui pousse chaque nation à la déculturation. Ce n'est pas être anti-américain que de ne pas vouloir devenir américain et de ne pas vouloir plaquer sur la France des catégories historiques et sociologiques qui n'ont rien à voir avec elle. Pour parler du politiquement correct, on pourrait peut-être même parler, pour s'inscrire dans l'histoire culturelle américaine, d'une forme de puritanisme idéologique, qui consiste à vouloir purger une société de toutes ses aspérités culturelles et symboliques, pour les rendre conformes au dogme diversitaire. Il faut refouler les mauvais sentiments que nous inspire la postmodernité et envoyer sans cesse à ses contemporains des signes ostentatoires de vertu, pour emprunter la formule de Vincent Trémolet de Villers. On le fera en dénonçant rituellement, et sur une base quotidienne, s'il le faut, les phobies qui polluent notre monde, quitte à en inventer des nouvelles, comme la grossophobie ! Ceux qui prendront la peine de s'intéresser à ce que devient aujourd'hui l'université américaine et aux types de controverses qui l'animent seront sincèrement horrifiés.

    Mais on peut aussi voir dans l'idéologie diversitaire qui a fait du politiquement correct son régime de censure médiatique une poursuite de la tentation totalitaire qui hante la modernité et qui se présente aujourd'hui sous un nouveau visage. De nouveau, on rêve à un monde réconcilié, réunifié et absolument transparent à lui-même. Un monde sans identités, mais aussi sans carnivores, sans fumeurs, sans buveurs, sans dragueurs, sans aventuriers et sans relations particulières, c'est-à-dire un monde sans amitié, absolument programmé, lisse, amidonné - un monde qui aurait fait mourir d'ennui un Joseph Kessel et qui donnerait des envies d'exil à un Sylvain Tesson. Nous recommençons à rêver de l'homme nouveau, mais il s'agit cette fois de l'homme sans préjugés, délivré de ses appartenances, de sa culture, de ses désirs et du vieux monde auquel il était encore lié. Le politiquement correct a pour vocation d'étouffer la part du vieux monde encore vivante en lui pour lui permettre d'enfin renaître après son passage dans la matrice diversitaire, purifié et prêt à embrasser une nouvelle figure de l'humanité, délivrée de cette préhistoire morbide qu'aura été l'histoire de l'Occident. Car pour que l'humanité nouvelle advienne, on doit d'abord en finir avec l'Occident en général et l'Europe en particulier. Si on ne comprend pas cela, on ne comprend fondamentalement rien au progressisme d'aujourd'hui.

    Ce politiquement correct a été embrassé depuis longtemps en Amérique du Nord. Quand est-il né exactement? Comment a-t-il imposé son hégémonie culturelle ?

    En un mot, il naît sur les campus américains, à partir de la fin des années 1960, et se développe jusqu'aux années 1980, où il commence à s'institutionnaliser dans l'université, avant de devenir médiatiquement hégémonique avec les années 2000. C'est le fruit des Radical Sixties et d'un croisement bien particulier entre le néomarxisme et les formes les plus toxiques de la contre-culture. Très schématiquement, il repose sur une critique radicale de la civilisation occidentale, accusée d'avoir construit une figure aliénante de l'homme, qu'il faudrait déconstruire en s'appuyant sur les différentes minorités qui auraient subi son hégémonie. Il faut dès lors attaquer ou censurer ce qui était encore hier la norme majoritaire de nos civilisations, et valoriser ce qui était marginalis

  • Documents pour servir à illustrer une histoire de l'URP (19)...

    (Documents pour servir à illustrer une histoire de l'URP : contribution, commentaires, informations, renseignements, prêt de photos etc... bienvenus; retrouvez l'ensemble de ces documents dans notre Catégorie : Documents pour servir à illustrer une histoire de l'URP)

     

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    19 : Les années 74/75 : fin de première "période" pour notre groupe militant...

    J'ai rapidement évoqué, dans la livraison n° 14 de cette Chronique, où je parlais des trois locaux que nous avons occupé à Marseille, la façon dont s'est formé notre groupe militant, dans les années 63/64. A ce moment, l'un de mes frères, Jean-Marie, de quatre ans et demi mon aîné, et l'un de ses camarades de classe, décidèrent d'aller rue Saint Suffren, siège de l'URP. Bien que beaucoup plus jeune, et n'ayant évidemment pas lu une seule ligne de Maurras ou du moindre ouvrage politique, j'avais déjà lu, passionné d'Histoire, la trilogie Bainvillienne : l'Histoire de France, l'Histoire de deux peuples et le Napoléon. Je ne pouvais pas encore comprendre grand chose en politique pure, mais j'avais compris l'essentiel, avec et grâce à Bainville : la Royauté - et ses bienfaits - prouvée par l'Histoire; à l'inverse, la malfaisance de la République, elle aussi prouvée par l'Histoire. Aussi, quand mon frère me demanda si je voulais l'accompagner, j'acceptai avec plaisir, et l'accompagnai non par suivisme mais par conviction.

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    le n° 1063, du jeudi 30 janvier 69
     
     
    C'est là, rue Saint Suffren, que nous rencontrâmes Chauvet, Lavo et les autres "anciens", à l'époque dans la pleine force de l'âge. Et que nous trouvâmes un groupe de jeunes assez peu militants, avec qui le courant ne passa pas du tout, et qui du reste s'éclipsèrent assez vite. Ils furent heureusement remplacés par les Balanda, Lapeyrouse, Mondoloni et beaucoup d'autres jeunes motivés, eux, car nous avions initié tout de suite une dynamique autour de la vente du journal (Aspects de la France, ci dessus), ainsi que de notre mensuel étudiant AF Université, que nous appelions entre nous "A.F.U" (ci dessous):

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    Nous organisions aussi des affichages réguliers et longs (on finissait couramment à 3h/3h30 !...) avec cette affiche que nous avions trouvé au local, en très grande quantité !....

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    Mais aussi, et surtout, nous sortions des tracts sur un peu tous les sujets, ce qui nous permettait d'aller distribuer devant pas mal de lycées. Car, entretemps, mon frère Jean-Marie fut remplacé, si je puis employer l'expression, par un autre de mes frères, Jacques, qui lui n'a que quinze mois de plus que moi. Il était d'abord, lui, à la FEN, dans cette mouvance d'extrême-droite, qui devait donner, par exemple, le G.R.E.C.E. un peu plus tard, avec "l'ancien" Alain de Benoist. Je dis à dessein "l'ancien", en me référant au profond changement de sa personnalité, de ses positions, aujourd'hui, par rapport à cette époque; mais c'est évidemment bien du même Alain de Benoist qu'il s'agit. Mon frère Jacques était à la FEN avec un autre de mes frères, Philippe, et nous étions ainsi une famille bien partagée et même séparée, sans hostilité cependant, entre les deux royalistes et les deux FEN... Il faut bien reconnaître qu'à l'époque la FEN était très dynamique, et mon frère Jacques y avait appris pas mal de choses, d'un strict point de vue militant, qui devaient nous servir par la suite : notamment en ce qui concernait la conception et réalisation de tracts, avec photos intégrées (on appelait cela "stencil électronique"...). Cette "prise de guerre" nous permit à la fois de renforcer notre groupe mais, surtout, de prendre peu à peu le dessus sur la FEN, et de devenir le groupe le plus actif sur Marseille. D'où l'arrivée assez rapide de nombreux nouveaux, comme je l'ai dit plus haut, et la constitution d'un vrai groupe, nombreux parce qu'actif, et réciproquement...
    A de rares exceptions près, nous nous rencontrions tous, tous les soirs au local (rue Saint Suffren, puis rue Dieudé, puis rue Pavillon). Le local ouvrait tous les jours, de 18h à 20h, et le samedi de 15h à 20h. Mais, bien sûr, nous restions très souvent bien après 20h !... A partir de la rue Dieudé, puis rue Pavillon, Lavo me confia les clés, et c'était moi qui ouvrais (et, la plupart du temps, à 17h30 plutôt qu'à 18h !...).
    Cet heureux temps devait durer dix ans, jusqu'en 74/75. Il est clair que se voir aussi souvent, tous ensemble - du moins ceux qui étaient réellement impliqués dans la marche concrète des choses... - et pouvoir sans cesse proposer des idées nouvelles à Chauvet et Lavo, c'étaient les conditions idéales pour faire tourner une bonne équipe. 
    C'est pendant cette dizaine d'années, heureuse, que nous avons :
    - changé trois fois de local; 
    - passé Mai 68 à la rue Dieudé (en vendant 300 exemplaires du n° de Mai 68 d'AFU, dont 50 dans le seul Lycée "Saint Charles Maurras" : j'en reparlerai bientôt, car si nous faisions toujours tout tous ensemble, nous moquant éperdument des "titres" et autres organigrammes, il y avait quand même de l'organisation, et c'est moi-même qui m'occupait plus spécialement d'AFU : au Congrès de la RN de décembre 68, Michel Giraud, qui me logeait chaque année, à la Plaine Saint Denis (car nous montions au Congrès chaque année !...) parla à la tribune de "Marseille, qui a commandé, puis recommandé et encore recommandé, jusqu'à arriver à diffuser 300 n° du mois de Mai..." : dans la salle nous n'étions pas peu fiers !...

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    Couverture du n° d'Aspects spécial Mai 68
     
     
    - et, surtout, inventé et commencé à réaliser les Rassemblements royalistes : les trois premiers eurent lieu à Montmajour (69, 70 et 71), le quatrième à Saint Martin de Crau (là où avait eu lieu le Camp, dirigé par Hilaire de Crémiers, auquel j'ai participé - avec celui d'Etrie, en Vendée...) puis aux Baux, dans le Val d'Enfer, sur le terrain prêté gracieusement par notre ami François Cornille...

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    Malheureusement, cette mécanique bien huilée connut sa première sérieuse "ratée" en 74/75. Mon frère Jacques, puis moi, passâmes notre C.A.P.E.S. (lui de Lettres modernes, moi d'Espagnol). C'est connu, les jeunes professeurs, débutants, ont un "barème" de O points, et sont donc nommés "là-haut", dans le nord; alors que les professeurs âgés, au barème impressionnant, raflent les postes dans le Sud (Nice, Perpignan...). Mon frère fut muté à Longwy, dans l'Académie de Nancy-Metz, et moi à Amiens (où je réussis malgré tout à me faire transférer à Beauvais). Mon frère effectua bien sa première année de Capesien à Longwy, où il partit en septembre 74, mais il pensa que, s'il passait l'Agrégation, cela lui vaudrait, sinon une mutation dans l'Académie d'Aix, du moins une plus proche de Marseille. Je l'accompagnai à Paris, pour un mois de juin/juillet de révision vraiment très sérieuse avant son oral, m'occupant de tout le "matériel" (repas, courses...) afin qu'il puisse ne faire que réviser. Nous nous autorisâmes à peine deux sorties : une après-midi dans l'Île Saint Louis, le défilé du 14 juillet (deux excellents souvenirs...). J'étais persuadé qu'il réussirait, et pourtant, malgré tout son sérieux, une année de vrai travail et un mois de révision acharnée, il échoua. Mortellement déçu, et ne voulant pas repartir pour Longwy, il opta pour la Coopération, et partit - en septembre 75 - faire la plus grande partie de sa carrière au Maroc (avec quelques essais de retour, jamais concrétisés). 
    Quant à moi, ayant effectué mes deux ans de PMS, je partis le premier août 75 intégrer l'Ecole de l'EAABC à Saumur, pour quatre mois, après lesquels j'intégrais le 5ème régiment de Hussards, à Stetten, en Allemagne (RFA, à l'époque), devenu très vite le 3ème Régiment de Dragons (Colonel Albert Royer). C'est là que je devais rencontrer celui que je ne peux qu'appeler "Mon Lieutenant", même aujourd'hui, et dont vous avez découvert le nom sur la photo ouvrant cette note : on y voit mes Brigadiers et Maréchaux des Logis devant l'entrée de l'Escadron d'Instruction Wallaert (inutile de présenter !...), dans lequel j'eus la joie et le bonheur de servir, pendant mes huit mois. C'est juste dans le très court intervalle entre la fin des quatre mois d'Ecole et le départ pour le Régiment que nous allâmes à Madrid, pour les obsèques de Franco, avec Jean-Charles Masson, entre autres...

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    Je quittai donc Marseille moi aussi, puisque, après mon année de Régiment, j'intégrais le Collège Nord (vite devenu "Georges Sand) et le Lycée Félix Faure de Beauvais...
    Mais au moins, ayant préféré rester en France, je pouvais revenir à Marseille, dans ma famille et "mon" local, avec les amis d'AF, à chaque vacances (Toussaint, Noël, Mardi-Gras, Pâques...). Et, surtout, venir aux Baux chaque année puisque, très vite, dans les années 80, Chauvet et Lavo me demanderont de devenir "le régional de l'étape" en montant à la Tribune chaque année, pour un discours.
    Mais c'est une autre affaire, et nous en parlerons dans une autre livraison...
    En attendant, voilà pourquoi je propose cette date de 74/75 comme celle de la fin de la première partie de notre histoire commune : c'était fini, ces soirées parfois interminables, ou nous nous réunissions tous, tous les soirs, "au local", comme nous disions.
    Mais, bien sûr, ce n'était pas fini, ni pour l'URP ni même pour le groupe, qui, s'il dut s'adapter à la situation nouvelle, sut parfaitement continuer - en partie grâce à la très réelle dynamique des Baux - à faire ce pourquoi il s'était créé : diffuser, par tous les moyens, même légaux, les idées de Salut public...
  • Le dynamisme de la Guyane française, par Ilyes Zoari.

    Terre d’im­mi­gra­tion, la Guyane fran­çaise frôle les 300 mille habitants

    Grâce à une nata­li­té éle­vée et à une forte immi­gra­tion, la Guyane fran­çaise a mul­ti­plié sa popu­la­tion par onze depuis 1950. Faci­le­ment acces­sible et très dyna­mique, cette terre d’A­mé­rique du Sud reçoit désor­mais des migrants et des réfu­giés venant de nom­breux pays et de dif­fé­rents conti­nents.

    7.jpgSelon les don­nées publiées au mois de jan­vier par l’In­see (l’ins­ti­tut natio­nal fran­çais de la sta­tis­tique), la popu­la­tion guya­naise est offi­ciel­le­ment esti­mée à 288 mille habi­tants au 1er jan­vier 2020, soit au début de l’an­née pré­cé­dente. Compte tenu de l’im­por­tante crois­sance démo­gra­phique et de la dif­fi­cul­té de recen­ser l’in­té­gra­li­té des immi­grés clan­des­tins pré­sents dans le dépar­te­ment, la popu­la­tion actuelle de la Guyane fran­çaise peut être esti­mée à presque 300 mille per­sonnes, voire légè­re­ment davantage.

    Un grand dyna­misme démographique 

    Située en Amé­rique du Sud, entre le Bré­sil et le Suri­name, la Guyane a donc vu sa popu­la­tion consi­dé­ra­ble­ment aug­men­ter depuis sa dépar­te­men­ta­li­sa­tion en 1946, année à par­tir de laquelle les auto­ri­tés fran­çaises com­men­cèrent à s’in­té­res­ser réel­le­ment à ce ter­ri­toire presque aus­si grand que le Por­tu­gal, et recou­vert à plus de 90% par la forêt ama­zo­nienne. Un dépar­te­ment qui comp­tait un peu plus de 25 mille habi­tants en 1950, prin­ci­pa­le­ment d’o­ri­gine afri­caine et euro­péenne, et qui vit quelques années plus tard la construc­tion d’un vaste centre spa­tial à par­tir duquel sont aujourd’­hui lan­cées les fusées fran­co-euro­péennes Ariane, lea­der mon­dial du lan­ce­ment de satel­lites. La Guyane abrite éga­le­ment une base mili­taire, et consti­tue un impor­tant ter­rain d’en­traî­ne­ment pour la Légion étran­gère. Ce dyna­misme démo­gra­phique s’ex­plique par les niveaux éle­vés de fécon­di­té et d’im­mi­gra­tion, qui font de la Guyane le ter­ri­toire ayant à la fois la plus forte nata­li­té (3,6 enfants par femme) et la plus forte immi­gra­tion de l’en­semble du conti­nent amé­ri­cain, pro­por­tion­nel­le­ment à sa popu­la­tion. Sur les cinq der­nières années, le dépar­te­ment a reçu près de 4 000 deman­deurs d’a­sile par an, en moyenne, et venant s’a­jou­ter à l’im­mi­gra­tion régu­lière ain­si qu’aux immi­grés clan­des­tins ne for­mu­lant pas une demande d’a­sile. Désor­mais, plus du tiers de la popu­la­tion guya­naise est étran­gère, et envi­ron 70 % des nou­veau-nés ont au moins un parent de natio­na­li­té étran­gère (ceux de natio­na­li­té fran­çaise pou­vant eux-mêmes être d’o­ri­gine étrangère).

    Le ter­ri­toire euro­péen le plus acces­sible au monde

    Si la Guyane a long­temps reçu des migrants venant essen­tiel­le­ment d’Haï­ti et des deux pays fron­ta­liers, le Suri­name et le Bré­sil, ce dépar­te­ment fran­çais d’outre-mer accueille aujourd’­hui un nombre gran­dis­sant de migrants aux loin­taines ori­gines. Et ce, sur­tout depuis la qua­si-fer­me­ture des fron­tières de l’U­nion euro­péenne, sur le vieux conti­nent, et la qua­si-fer­me­ture de la fron­tière amé­ri­ca­no-mexi­caine (avec la construc­tion d’un mur et l’ins­tal­la­tion de grillages et de bar­be­lés le long d’une par­tie de cette fron­tière, et la signa­ture d’ac­cords avec le Mexique en vue d’en éloi­gner les migrants, en les main­te­nant dans le sud du pays). Compte tenu de ses plus de 1200 km de fron­tières (dif­fi­ci­le­ment contrô­lables, car prin­ci­pa­le­ment flu­viales et en pleine forêt ama­zo­nienne), du coût éle­vé des expul­sions des migrants vers leurs loin­tains pays d’o­ri­gine, et de la poli­tique très souple menée par cer­tains pays voi­sins en matière d’oc­troi de visas, la Guyane fran­çaise est donc deve­nue le ter­ri­toire euro­péen le plus faci­le­ment acces­sible au monde. Ain­si, de nom­breux migrants venant du bas­sin médi­ter­ra­néen tran­sitent par le Bré­sil afin d’at­teindre la Guyane fran­çaise, qui a reçu, par exemple et rien que pour le pre­mier tri­mestre de l’an­née 2020, envi­ron 500 réfu­giés syriens et moyen-orien­taux avant la qua­si-inter­rup­tion des liai­sons aériennes entre le Bré­sil et les pays du Moyen-Orient. Une faci­li­té qui contraste avec les dif­fi­cul­tés inhé­rentes aux voies tra­di­tion­nelles vers l’U­nion euro­péenne, désor­mais dan­ge­reuses et sou­vent meur­trières (par la médi­ter­ra­née, voire éga­le­ment le Saha­ra). Mais en dépit de ce dyna­misme démo­gra­phique, la Guyane demeure tou­te­fois très lar­ge­ment sous-peu­plée. À titre de com­pa­rai­son, sa popu­la­tion est encore infé­rieure à celle de l’île de la Mar­ti­nique, autre ter­ri­toire fran­çais des Amé­riques, qui compte envi­ron 360 mille habi­tants pour une super­fi­cie 74 fois plus petite (et, de sur­croît, à 42 % recou­verte de forêts). Le dépar­te­ment devrait cepen­dant bien­tôt dépas­ser la Mar­ti­nique, puis la Gua­de­loupe, et deve­nir ain­si le ter­ri­toire fran­çais le plus peu­plé du continent.

    Une éco­no­mie dynamique

    Por­tée par sa crois­sance démo­gra­phique, la Guyane connaît éga­le­ment un assez impor­tant dyna­misme éco­no­mique, et affiche régu­liè­re­ment le taux de crois­sance le plus éle­vé de l’en­semble des dépar­te­ments fran­çais (envi­ron 3 % en moyenne, et 4,1 % en 2019). La Guyane fran­çaise se pré­sente comme un véri­table chan­tier à ciel ouvert, où se mul­ti­plient les grands tra­vaux : infra­struc­tures, loge­ments, éta­blis­se­ments sco­laires… Si le sec­teur du bâti­ment et des tra­vaux publics est par­ti­cu­liè­re­ment dyna­mique, et source de nom­breuses oppor­tu­ni­tés d’af­faires et d’in­ves­tis­se­ment, le dépar­te­ment est éga­le­ment à la pointe de la haute tech­no­lo­gie, et en par­ti­cu­lier dans le domaine spa­tial (avec le centre spa­tial de Kou­rou, et les nom­breuses entre­prises qui y sont liées) et dans celui des éner­gies renou­ve­lables. Sur ce der­nier point, la Guyane pro­duit aujourd’­hui 68 % de son élec­tri­ci­té à par­tir d’éner­gies vertes (hydrau­lique, solaire et bio­masse), ce qui consti­tue, de très loin, le taux le plus éle­vé de l’en­semble des dépar­te­ments fran­çais. Ce taux devra d’ailleurs être por­té à 100 % d’i­ci 2030, confor­mé­ment à la poli­tique gou­ver­ne­men­tale qui impose à l’en­semble des dépar­te­ments fran­çais d’outre-mer, dépour­vus de res­sources éner­gé­tiques fos­siles, d’être tota­le­ment auto­nomes en matière de pro­duc­tion élec­trique d’i­ci à la fin de la décen­nie. Dans ce cadre, les grands pro­jets se suc­cèdent sur le ter­ri­toire, où une troi­sième cen­trale bio­masse vient d’en­trer en pro­duc­tion, en décembre 2020, et où une impor­tante cen­trale élec­trique solaire devrait voir le jour en 2023. Cette der­nière a même pour par­ti­cu­la­ri­té d’être, à l’heure actuelle, le plus grand pro­jet au monde de sto­ckage d’éner­gies renou­ve­lables inter­mit­tentes grâce à l’hy­dro­gène (capa­ci­té de sto­ckage de 120 MWh par ce pro­cé­dé, sur un total de 140 MWh).  Consé­quence de ce dyna­misme, et mal­gré un niveau de vie glo­ba­le­ment infé­rieur à celui de la France métro­po­li­taine, du fait des mul­tiples réper­cus­sions de l’é­loi­gne­ment, la Guyane fran­çaise consti­tue le ter­ri­toire le plus riche de l’en­semble de l’A­mé­rique du Sud conti­nen­tale, avec un PIB par habi­tant de 15 163 euros début 2020 (soit 16 983 dol­lars), devant l’U­ru­guay (16 190 dol­lars), le Chi­li (14 896 dol­lars) et l’Ar­gen­tine (9 912).

    Les ultra­ma­rins fran­çais : des citoyens à part entière

    Tout comme les autres citoyens fran­çais d’outre-mer, au nombre de 2,7 mil­lions, les Guya­nais jouissent exac­te­ment des mêmes droits civiques que leurs com­pa­triotes de France métro­po­li­taine. Une éga­li­té en droits qui paraît évi­dente, mais qui consti­tue pour­tant une dif­fé­rence radi­cale avec la situa­tion qui pré­vaut dans les ter­ri­toires d’outre-mer appar­te­nant au Royaume-Uni, aux États-Unis et aux Pays-Bas, soit les trois autres pays ayant de loin­taines pos­ses­sions. En effet, si les ultra­ma­rins fran­çais, quel que soit le niveau d’au­to­no­mie de leur ter­ri­toire, peuvent par­ti­ci­per à l’en­semble des élec­tions natio­nales (pré­si­den­tielle, légis­la­tives et séna­to­riales) et être repré­sen­tés au sein des ins­ti­tu­tions poli­tiques natio­nales (Assem­blée natio­nale et Sénat), ceci n’est abso­lu­ment pas le cas des ultra­ma­rins bri­tan­niques et de la grande majo­ri­té des ultra­ma­rins amé­ri­cains et néer­lan­dais, aux­quels inter­dic­tion est donc faite de prendre part à la ges­tion des affaires de la nation, et d’a­voir la moindre pos­si­bi­li­té d’in­fluer sur son pré­sent et sur son ave­nir. Un sché­ma de type colo­nial et une approche qua­si ségré­ga­tion­niste qui régissent encore aujourd’­hui la rela­tion de ces pays avec leurs ter­ri­toires d’outre-mer, majo­ri­tai­re­ment peu­plés de per­sonnes aux ori­gines non euro­péennes. Ain­si, les ultra­ma­rins bri­tan­niques ne peuvent prendre part à aucune élec­tion natio­nale, ni être repré­sen­tés dans aucune ins­ti­tu­tion poli­tique natio­nale. Côté néer­lan­dais, 92 % des popu­la­tions d’outre-mer n’ont pas le droit de par­ti­ci­per aux élec­tions natio­nales, ni d’être repré­sen­tés dans les ins­ti­tu­tions poli­tiques natio­nales. Les 8 % res­tants, béné­fi­ciant des mêmes droits civiques que leurs com­pa­triotes de métro­pole, cor­res­pondent aux habi­tants des trois ter­ri­toires d’outre-mer les moins peu­plés (Bonaire, Saint-Eus­tache et Saba), et n’ont obte­nu cette éga­li­té de trai­te­ment qu’en 2010. Enfin, et à l’ex­cep­tion des habi­tants d’Ha­waï, les popu­la­tions des ter­ri­toires amé­ri­cains d’outre-mer ne peuvent par­ti­ci­per ni aux élec­tions pré­si­den­tielles, ni aux séna­to­riales. Tou­te­fois, ils ont le droit de prendre part aux élec­tions légis­la­tives, …mais pour élire un dépu­té qui n’a guère le droit de voter à la Chambre des repré­sen­tants (équi­valent amé­ri­cain de l’As­sem­blée natio­nale). Ce qui revient donc à consi­dé­rer, de fac­to, que ces ultra­ma­rins amé­ri­cains ne peuvent prendre part à aucun scru­tin natio­nal, ni être repré­sen­tés dans aucune des ins­tances poli­tiques natio­nales. Quant à l’E­tat de Hawaï, l’ex­cep­tion dont béné­fi­cie ce ter­ri­toire s’ex­plique pro­ba­ble­ment par son carac­tère hau­te­ment stra­té­gique (situé à peu près au milieu du Paci­fique Nord, et ayant joué un rôle cru­cial pen­dant la seconde guerre mon­diale), et peut-être éga­le­ment par le fait que près de la moi­tié de la popu­la­tion de l’ar­chi­pel était blanche anglo-saxonne au moment où celui-ci acquit le sta­tut d’É­tat en 1959, et par la même des droits iden­tiques à ceux des 49 autres États fédé­rés des États-Unis (il s’a­gis­sait alors du ter­ri­toire d’outre-mer amé­ri­cain ayant la popu­la­tion blanche non his­pa­nique la plus impor­tante en pour­cen­tage, par­ti­cu­la­ri­té tou­jours valable aujourd’hui).

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

  • Sur C News, la Belle Histoire de France.

    Retour chronologique sur les grands moments de l'histoire française (17/01/21).

    "Quand la Gaule devient chrétienne".

  • Au cinéma : Une année difficile, par Guilhem de Tarlé

    Une année difficile - film 2023 - AlloCiné

     

    A l’affiche : Une Année difficile, un film français d’Éric Toledano et Olivier Nakache, avec Pio Marmaï (Albert, alias Poussin), Jonathan Cohen (Bruno, alias Lexo), Noémie Merlant (Cactus), Mathieu Amalric (Henri) et Grégoire Leprince-Ringuet (Quinoa).

    Une Année difficile … C'est l'histoire de deux individus surendettés qui intègrent par hasard un groupe écolo, davantage pour en tirer du profit que pour "sauver la planète", davantage pour « boire des coups (que pour) parler de justice sociale ».
    C'est aussi l'histoire de ce groupe qui veut « pousser un cri d’alarme » et (vieux relent de chrétienté) dénoncer la surconsommation (c’est la vertu cardinale de la tempérance) - Non au "Black friday" -.

    De même que Club Zéro enseigne "l'alimentation consciente" qui consiste à cesser progressivement de s'alimenter, ces écolos invitent quasiment à « se détacher des biens de ce monde », en tout cas se séparer des objets "inutiles" qui nous environnent. C’est l’« opération Désencombrement » qui répond à la même problématique que pose Henri contre le surendettement : « En ai-je besoin ? En ai-je vraiment besoin ? En ai-je vraiment besoin maintenant ? ».
    On peut, dans l’appartement de Cactus, la comparer à Mlle Novak, et je m'étonne des sorties simultanées de ces deux long-métrages que, sans en rien savoir, nous avons vus l'un après l'autre.

    Une fois n'est pas coutume, il ne s'agit pas d'un film militant, et c’est tant mieux ! on se réjouit, bien au contraire, de voir les réalisateurs se moquer manifestement de ces agitateurs.
    Une fois, encore, n'est pas coutume… aussi je vous suggère, en ce début d'année difficile, d’aller vous changer les idées au spectacle de cette farce burlesque. On en a "besoin maintenant », comme un Noël chez Cactus : "c’est fort (…) et c'est pas cher".

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  • 1971 : l'année terrible, par François Reloujac*

    (Continuation de La Suite économique de François Reloujac)

     

    Le ministre des Finances l’a lui-même reconnu : il y a en France un véritable « ras-le-bol fiscal ». Pour sauver la face, le président de la République et son Premier ministre expliquent benoîtement que le temps de la « pause fiscale » est arrivé… tout en divergeant sur le moment où celle-ci interviendra. C’est oublier que la Commission européenne ne va pas manquer d’intervenir ! 

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    Dans ce débat sur la fiscalité, important et grave, il manque un élément d’analyse : la nature de la monnaie. Car, sans le système monétaire imposé par les Américains en août 1971 – la rupture de la relation entre le dollar et l’or –, la situation n’aurait jamais pu se détériorer comme elle l’a fait. Sans l’euro, qui participe de la même philosophie globale, le gouvernement de la France ne serait pas privé de tous les moyens indispensables au redressement

    Un dogme préjudiciable

    Avec la monnaie plus ou moins directement liée à une marchandise (l’or), les impôts prélevés par l’état sur les citoyens constituent un transfert de pouvoir d’achat depuis les personnes privées vers la collectivité… sauf à faire fonctionner « la planche à billets », c’est-à-dire à dévaluer la valeur externe de la monnaie par rapport aux autres – ce qui dope les exportations et pénalise les importations. Dans le système en vigueur jusqu’en 1971, le crédit à la consommation était limité et le pouvoir d’achat des personnes, dont les impôts augmentaient, diminuait. L’impôt était en lui-même porteur d’un transfert de richesse, ce qui avait pour effet immédiat de limiter l’action des hommes politiques.

    Si besoin était, l’état pouvait bien emprunter, mais comme la libre circulation des capitaux n’était pas encore devenue un dogme, cet emprunt se faisait auprès des nationaux véritablement « les plus aisés », c’est-à-dire ceux qui se sentaient capables de distraire une partie de leurs revenus ou de leur épargne pour aider l’état, et non pas simplement ceux qui étaient déclarés « riches » par les hommes politiques en fonction de leurs besoins du moment.

    A partir du moment où la monnaie a été totalement déconnectée de toute marchandise, de toute valeur marchande et même de toute production réelle pour devenir une valeur abstraite sans lien avec l’économie réelle, on a, d’une part, permis au montant total du budget d’exploser en ne tenant plus compte que de ce que l’opinion pouvait accepter – ce qui ouvrait la porte à toutes les explications démagogiques et permettait tous les transferts de richesse finance.jpgles plus invraisemblables – et, d’autre part, permis un développement insensé de la finance sans relation avec la création de richesses. N’ayant plus à tenir compte d’un stock de marchandises – l’or – ni d’une production – comptabilisée à l’époque sous le nom de Produit national brut –, les pays ont pu s’endetter auprès d’autres agents économiques que les seuls citoyens.

     

    Quelle souveraineté ?

    Tant que les pays inspiraient confiance aux « investisseurs institutionnels », ceux-ci ont souscrit à tous les emprunts qu’ils proposaient, dans la mesure où le taux d’intérêt qu’ils offraient était suffisant pour couvrir le risque de défaut de paiement qu’ils redoutaient. Les sommes empruntées ont commencé à atteindre des sommets tels qu’aucun citoyen particulier n’était capable de participer sérieusement à leur couverture. Mais la spéculation financière ouverte par la nixon.jpgdécision du président Nixon du 15 août 1971 et la libre circulation des capitaux, a permis aux fonds de pension, sociétés d’investissement à capital variable, caisses de retraite et autres compagnies d’assurance, de se substituer aux citoyens. Seulement, aucun de ces organismes ne l’a fait gratuitement ; tous espèrent un jour être remboursés, avec les intérêts. Pour que le système fonctionne sans à-coups, on a demandé aux banques d’intervenir. Elles ont été de plus en plus sollicitées pour prêter « indirectement » aux états : du fait de la législation, elles ne pouvaient que prêter aux organismes financiers qui eux-mêmes prêtaient aux états – encaissant au passage la différence d’intérêts. Jusqu’au jour où, la crise aidant, les états, pour ne pas sombrer, sont venus au secours des banques qui étaient en réalité leurs créancières. Ces dernières années, les états ne sont pas intervenu pour sauver les banques par amour de celles-ci, ni encore moins de leurs déposants, mais parce qu’ils avaient trop d’intérêts communs pour les voir sombrer sans dommage. Lorsque les médias expliquent qu’il faut « éviter que d’éventuelles difficultés rencontrées par les banques se répercutent sur les comptes des états obligés jusqu’à présent de renflouer ces dernières avec de l’argent public pour leur éviter la faillite » (La Croix, 19 septembre), ils oublient de dire que cette faillite se répercuterait immédiatement sur les états eux-mêmes qui sont, en fait, les premiers créanciers mais aussi, et surtout, les premiers emprunteurs des banques. Une manière de faire jouer, ce que l’on appelle dans le jargon technique un « effet de levier » ; en faisant simple : pour huit apporté au capital de la banque, on peut lui emprunter cent.

     

    Le laxisme : voilà l’ennemi

    Lorsque François Hollande est entré en fonction, la situation économique de la France était déjà largement obérée par de nombreuses années de laxisme, rendu possible par le système monétaire mis en place en 1971. Dans une manœuvre purement politicienne, le gouvernement a fait voter la fameuse « règle d’or »… à laquelle le président élu s’était opposé pendant sa campagne électorale ! Autrement dit, indépendamment de la situation réelle du pays, indépendamment des orientations sociales qu’il veut mettre en œuvre, indépendamment de la pression fiscale réellement supportée par les citoyens, il va devoir respecter à tout instant les chiffres des ratios théoriques imposés par la Commission européenne. Et peu importe si ces ratios ne correspondent pas à ce que l’on croit. Rappelons, à titre d’exemple, que le Produit intérieur brut (PIB) censé enregistrer la croissance de l’économie, est composé, d’une part, de la valeur des biens réels produits, comptabilisés à leur prix de vente et, d’autre part, des services publics, ces derniers étant enregistrés à leur coût d’obtention, y compris quand ils sont financés par l’emprunt. Ce qui signifie concrètement que plus les emprunts publics financent les dépenses de fonctionnement de l’état, plus la croissance est censée augmenter.

    Parallèlement, dans son souci de promouvoir l’égalité, l’état, déjà trop endetté, ne répond plus à ses missions premières. Or, comme le remarque Yves de Kerdrel dans Valeurs actuelles, « l’impôt est justifié quand l’état qui le perçoit assure la sécurité des biens et des personnes, et les grandes missions régaliennes. Dès lors que ce n’est plus le cas, et que l’impôt est utilisé à des fins punitives ou comportementales, (…) il devient insupportable au propre et au figuré. »  

    * Article paru dans le n° 122 de Politique magazine (octobre 2013)

  • Sur C News, la Belle Histoire de France.

    Retour chronologique sur les grands moments de l'histoire française (10/01/21).

    "l’arrivée au pouvoir de Vercingétorix, en 52 avant Jésus-Christ".

  • En vente à la Librairie de Flore.

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    Pour soutenir notre combat et diffuser la pensée royaliste :
    "Maurras et la pensée d'Action française", une belle entrée en matière !
  • Une statue n’est pas un livre d’histoire, par Aristide Renou.

    Revenons un peu sur ces histoires de statues vandalisées ou bien, pire encore, retirées à titre « préventif » pour ne pas risquer la colère des « antiracistes ».

    Quel est le problème ?

    Accordons à tous ces modernes iconoclastes qu’une statue n’est pas un livre d’histoire : elle ne vise pas simplement à rappeler tel ou tel fait ou évènement du passé, elle est une manière d’attirer l’attention sur ce fait ou cet évènement.

    Statufier, c’est valoriser, c’est donner de l’importance. Et, lorsqu’il s’agit d’un personnage historique, statufier revient implicitement à donner à admirer. Eriger dans un espace public la statue, mettons, d’un homme d’Etat, est une manière de lui rendre hommage et on ne rend hommage qu’à ce qu’on considère comme bon. C’est donc affirmer implicitement que l’action de cet homme d’Etat a été essentiellement bonne, ou en tout cas suffisamment bonne pour que nous puissions l’admirer.

    Bien entendu la réalité est souvent, peut-être toujours, complexe, car quel homme peut se vanter de n’avoir fait que du bien dans sa vie ? Mais le principe ne me parait pas vraiment contestable : une statue d’un personnage historique dans l’espace public est une sorte d’hommage rendu à celui-ci.

    Je ne crois donc pas qu’il soit pertinent de s’opposer au déboulonnage de telle ou telle statue en disant que nous devons assumer toute notre histoire, ombres et lumières comprises. Oui, toute histoire nationale est faite d’ombres et de lumières, mais ériger une statue n’est pas une manière « d’assumer » son passé. L’évêque Cauchon, Ravaillac et le docteur Petiot, par exemple, font incontestablement partie de l’histoire de France, et cependant il ne nous viendrait pas à l’esprit de faire des statues de ces trois hommes et de les mettre au milieu de nos places ou de nos jardins publics.

    Il faut donc donner raison à Olivier Duhamel lorsque celui-ci dit que les Roumains n’ont pas à garder les statues de Ceaucescu au nom du « respect de l’histoire ».

    Plus pertinente, mais pas entièrement pertinente, me parait être l’objection selon laquelle l’actuel iconoclasme reviendrait à « manipuler l’histoire », comme l’a dit Marion Maréchal, et à la juger à l’aune de nos petites obsessions actuelles. En effet, l’anachronisme est souvent patent dans ces accusations portées contre tel ou tel personnage historique et il y a quelque chose d’insupportablement stupide et prétentieux dans cette manière de se placer en position de supériorité olympienne par rapport aux siècles passés, alors même qu’on les juge à partir de critères non examinés qui ne sont rien d’autre que de purs préjugés.

    Cependant, le refus légitime de l’anachronisme ne doit pas nous faire sombrer dans l’historicisme. La nécessaire contextualisation d’une action, et notamment d’une action politique, ne doit pas nous faire perdre de vue qu’il existe des critères objectifs, transhistoriques, du bien et du mal (je ne crois pas que Marion Maréchal me contredirait sur ce point). Le genre de critères qui nous permettent d’affirmer, par exemple, que Tamerlan a été un conquérant particulièrement cruel et un fléau du genre humain et que Staline a été l’un des plus abominables tyrans que la terre ait jamais porté.

    Quel est le véritable problème ?

    Une statue est toujours élevée par un peuple particulier et c’est du point de vue de ce peuple particulier qu’est jugée la bonté de l’action de celui à qui on élève la statue. En effet, la nature humaine étant ce qu’elle est et la nature de la politique, par conséquent, étant ce qu’elle est, il est impossible que les intérêts légitimes de tous les peuples puissent tout le temps s’accorder. Par conséquent, il est très difficile à un homme d’Etat, et même peut-être pratiquement impossible, d’être bon pour le peuple dont il a la charge sans causer parfois quelque préjudice ou quelque déplaisir à d’autres communautés politiques.

    L’humanité a toujours été et sera toujours divisée en nations souvent rivales, parfois ennemies, et jamais amies au plein sens du terme, c’est aussi simple que cela. Le bien commun est le bien d’un corps politique en particulier, ce pourquoi Aristote affirme que la justice n’existe véritablement qu’à l’intérieur de la cité. Cela ne veut pas dire que nous n’ayons aucune obligation vis-à-vis des autres peuples de la terre, simplement ces obligations passent après celles que nous avons vis-à-vis de nos concitoyens dès lors qu’il y a conflit entre les deux.

    Par conséquent, il est tout à fait inapproprié, et même injuste, de reprocher à nos voisins de célébrer une victoire qui fut pour nous une cuisante défaite, ou d’ériger des statues à un brillant général qui, sur les champs de bataille, fut notre fléau. Et inversement, bien sûr.

    Plus généralement, il est inapproprié de reprocher à un peuple de célébrer un homme d’Etat qui fut réellement bon pour lui, qui sut défendre ses intérêts légitimes, qui sut contribuer à sa grandeur et à son rayonnement, au motif que l’action de cet homme d’Etat ne fut pas bonne pour d’autres peuples quelque part sur la terre, que cela soit volontairement ou involontairement – pourvu, bien sûr, que cela fut en poursuivant le bien véritable de sa propre nation, et en ayant une indulgence raisonnable à la fois pour les contraintes qui limitent toute action politique et pour d’éventuelles erreurs de jugement qui peuvent difficilement être évitées dans des matières aussi complexes.

    Il est donc tout à fait normal que les Français élèvent des statues à Colbert, qui fut un grand serviteur du royaume de France, quand bien même il serait l’auteur du fameux « Code Noir » (je suppose, pour les besoins de la discussion, que ce code est aussi vilain que ce que l’on nous en dit aujourd’hui, même si je sais bien que tout cela est très contestable). Le bien que Colbert avait en vue, et devait avoir en vue, était celui de la France telle qu’elle était dans la deuxième moitié du 17ème siècle. Le bien des esclaves noir présents dans les colonies françaises était nécessairement pour lui une considération très secondaire. Admettons, si l’on veut, que le Code Noir ne soit pas ce qu’il a fait de mieux : cela ne saurait en aucun cas effacer les services signalés qu’il a rendu à la France et qui justifient pleinement qu’il y ait des statues de Colbert.

    De la même manière, oui, Churchill était un « impérialiste » : l’empire britannique lui paraissait une grande et belle chose, parce qu’il n’était pas un relativiste et qu’il croyait, si ce n’est à la mission civilisatrice de la Grande-Bretagne, du moins à la supériorité de sa civilisation, et d’autre part car il était un patriote fervent et qu’il considérait l’empire comme indispensable à la puissance et à la grandeur de sa patrie. Peut-être se trompait-il sur cette question de l’empire (ce qui, à mon avis, reste à prouver), mais cela n’efface aucunement les services immenses qu’il a rendu à la Grande-Bretagne, et d’ailleurs au reste du monde en rendant service à la Grande-Bretagne. Churchill est, sans doute, le plus grand Anglais du 20ème siècle et si quelqu’un mérite que les Anglais lui érigent des statues, c’est bien lui.

    Or donc, ceux qui aujourd’hui prétendent détruire les statues de Colbert ou qui souillent celles de Churchill démontrent une chose par leur action : ils ne considèrent pas l’action de ces grands hommes du point de vue qui fut le leur, et qui était celui de leur patrie. Ils la considèrent d’un point de vue extérieur. Ils la considèrent comme s’ils étaient des étrangers. Ce qui leur importe, ce n’est pas le bien que Colbert a fait à la France, c’est le fait que, à leur avis, il n’ait pas été bon pour les esclaves noirs. Ce qui leur importe, ce n’est pas le bien que Churchill a fait à la Grande-Bretagne, c’est le fait, par exemple, qu’il ait eu une piètre opinion des Indiens ou qu’il ait considéré l’islam comme une religion néfaste.

    Bref, nos iconoclastes démontrent qu’ils ne sont Français ou Britanniques que de nom mais que leur cœur est ailleurs. Ils démontrent que leur loyauté va à… je ne sais pas, à l’Oumma ? A la négritude ? A leur race ? Au pays de leurs ancêtres ? Mais en tout cas qu’elle ne va PAS à la France ou à la Grande-Bretagne.

    L’actuelle vague d’iconoclasme n’est rien d’autre qu’une nouvelle phase dans la longue guerre menée en Occident contre l’idée de nation et, dans la mesure où elle est avant tout l’œuvre de gens qui sont censés être nos concitoyens, bien qu’à l’évidence ils ne se considèrent pas comme tels, elle est un des prodromes de la guerre civile qui vient.