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  • Eh, oui, tout arrive : pas d'accord du tout avec un article paru sur Boulevard Voltaire...

    Boulevard_Voltaire1.jpgC'est évidemment une excellente chose que Robert Ménard ait ouvert Boulevard Voltaire, le Cercle des empêcheurs de penser en rond. Comme, par exemple, sur Causeur, d'Elisabeth Lévy (Surtout si vous n'êtes pas d'accord...), il s'y publie quotidiennement des articles qui sont autant de contrefeux aux mensonges imposés par une petite coterie qui impose ses vues, pour reprendre l'expression de Chantal Delsol. Ce sont autant de bouffées d'oxygène indispensables, pour qui veut combattre le politiquement correct, et tous les "ment" qui vont avec : historiquement, moralement, culturellement, on en passse, et des meilleurs !

    Et pourtant - heureusement - être souvent d'accord ne veut pas dire être toujours d'accord, et Robert Ménard sera sûrement... d'accord avec nous là-dessus : il y a peu, est paru, donc, sur Boulevard Voltaire un article de Jean-Claude Lauret à propos de François Reynaert…

    D'après Jean-Claude Lauret, dans son papier intitulé "Pour en finir avec les fadaises de notre Histoire", François Reynaert est un "un gentil garçon,  un passionné d’histoire. Il s’est donc plongé dans les œuvres des grands auteurs du passé…. etc… etc…"

    Avant de donner notre réaction, on lira ci-après ce que nous estimons être les surprenantes amabilités de Jean-Claude Lauret, parlant - beaucoup trop gentiment à notre goût - de Reynaert, dénonciateur -soi-disant... - des "fadaises"  de notre Histoire : 

    http://www.bvoltaire.fr/jeanclaudelauret/livre-pour-en-finir-avec-les-fadaises-de-notre-histoire,21251?utm_source=La+Gazette+de+Boulevard+Voltaire&utm_campaign=e816cbfb1d-RSS_EMAIL_CAMPAIGN&utm_medium=email&utm_term=0_71d6b02183-e816cbfb1d-25455017

    reynaert.jpgVoici maintenant ce que nous souhaitons dire à ce sujet : un mouvement est en marche, inéluctable, et il se déroule inexorablement, même si nous le trouvons trop lent : le mouvement de re-découverte et de ré-appropriation par les français de leur Histoire, enfin débarrassée et expurgée de l'idéologie et des mensonges de la vérité officielle.

    Et pourtant ! Pourtant, il y a encore des intoxiqués qui s'obstinent à maintenir, envers et contre tout, les contre-vérités les plus énormes, les déformations et travestissements de la réalité les plus scandaleux : François Reynaert (photo) est de ceux-là...

    A l'occasion de la sortie de son livre Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises... il avait été reçu, sur LCI, par un Julien Arnaud fort complaisant envers lui, gobant avec admiration tout ce que disait Raynaert, et son désir de corriger certaines fadaises que nous avons tous, affirmait-t-il, apprises à l'école.

    Mais, en fait de fadaises, c'est lui qui les débite, et avec un aplomb, une assurance littéralement stupéfiantes !

    Nous rappellerons juste trois énormités, dans ce triste entretien, que -semble-t-il - Jean-Claude Lauret n'a pas écouté, et qui ne restera pas dans les annales comme un grand moment de liberté intellectuelle, mais bien plutôt comme un pénible moment de passage de brosse et de partage de conformisme, réellement attristant :  

    1 : Julien Arnaud pose la question :"...pour Louis XVI... auriez-vous voté la mort ?" Reynaert commence alors la classique contorsion du je ne suis pas favorable à la peine de mort mais..... Mais, oui, il aurait voté la peine de mort. Et pourquoi ? Mais voyons, parce qu'il est prouvé que Louis XVI a trahi !

    Alors que c'est, évidemment, la Révolution qui a agressé l'Europe, déclarant une guerre funeste et anti naturelle, contraire à tous nos intérêts de l'époque. Que Louis XVI ait mal réagi, sans amis, sans conseillers, non préparé qu'il était à des faits extra-ordinaires auxquels, de toutes façons, personne n'était préparé, voilà ce que personne ne peut nier. Mais il convient de commencer par le commencement. La folie des folies, le crime des crimes, c'est d'avoir mis le feu à l'Europe. Un feu qui devait ruiner notre position dominante sur le continent, briser notre puissance militaire et démographique, et amener par deux fois les coalisés de l'Europe entière sur notre territoire, qui n'avait plus été envahi depuis des lustres. Attaquer l'Autriche - devenue notre alliée évidente, depuis que nous l'avions vaincue, contre la Prusse, puissance montante et menaçante, qui devait devenir cette Allemagne qui nous a fait tant de mal aux XIXème et XXème siècle - c'est, bel et bien, de "l'intelligence avec l'ennemi". Ce n'est donc pas Louis XVI qui a trahi, mais les philosophes prussophiles, puis la Révolution, la République et les deux Empires prussophiles - jusqu'à Sedan, terme logique de tout cela... -

    De cela, pas un mot de notre prétendu correcteur de fadaises : drôle d'historien ! et beau boni-menteur ! Il ne retient qu'une chose de tout ce gigantesque gâchis voulu et créé par la seule Révolution, sa vérité-mensonge officielle : Louis XVI a trahi. Plus aveugle ou plus menteur que moi, tu meurs !.....

    2 : la seconde énormité de l'entretien est peut-être encore plus grandiose que la première. Non, ni la Convention, ni Robespierre, ni leur système et leur régime ne peuvent être qualifiés de totalitaires. Tiens donc, et pourquoi, s'il vous plaît ? Accrochez-vous ! Parce que la Convention a produit la réaction thermidorienne ! Et, donc, un système qui génère sa propre limitation ne peut être qualifié de totalitaire "puisque", avec le 9 Thermidor, c'est la république de ce moment-là qui "peut en son sein se renverser..."!

    Et, hop, passe la pirouette verbale ! Il est pas beau, mon sophisme ? Avec cet historien de pacotille, et cette explication (!) à dix centimes d'euros (en comptant large !...), on est en pleine bibliothèque rose ! Notre boni-menteur nous ferait presque entendre les cui-cui des oiseaux dans les arbres, les moutons bêlant gentiment dans les champs et, au loin, le "il pleut, il pleut, bergère !...". C'est l'Histoire et la Politique ramenés au Monde de Martine !...

    Raynaert prend vraiment les gens pour des imbéciles ! La vérité sur Thermidor n'est évidemment pas ce qu'il dit, dans son Histoire bidon pour lecteurs et lectrices fleurs bleues : il s'agit uniquement - comme l'explique Jacques Bainville - du réflexe de survie "des plus sagaces et des plus subtils", "ceux qui, par peur, avaient dit oui à tout" et à qui "une peur suprême... donna le courage du désespoir", rien de plus; et rien de bien glorieux, en soi. En tout cas, rien de ce que croit y trouver notre historien de pacotille.

    On lui citera le passage du chapitre XVI de L'Histoire de France de Jacques Bainville, La Révolution :

    "...Au mois d'avril 1794, la Terreur dure toujours. Danton a été supprimé, Camille Desmoulins et sa Lucile aussi. Les hommes de la Révolution se sont dévorés entre eux. Seuls ont échappé les prudents et les habiles, ceux qui ont eu, comme disait Sieyès, le talent de vivre. Mais à force d'épurer la Révolution, Robespierre en a tari la sève. Lui-même, avec le jacobinisme, il est toute la Révolution. Il n'y avait plus rien après les opinions de Marat. Il n'y a plus personne après Robespierre. Il a grandi, depuis la Constituante, par les surenchères que favorisait le principe politique en vigueur depuis 1789 : pas d'ennemis à gauche. Maintenant, quelles sont ses idées ? Que veut-il ? Où va-t-il ? Il ne le sait pas lui-même. On prête à ce despote les projets les plus bizarres, et la cour de Vienne s'intéresse à « Monsieur de Robespierre ». Pourtant il n'invente plus autre chose que la fête ridicule de l'Être suprême, tandis que la guillotine fauche tous les jours, éclaircit les rangs de l'Assemblée, dégarnit jusqu'à la Montagne. Il ne restait plus guère que ceux qui, par peur, avaient dit oui à tout. Une peur suprême leur donna le courage du désespoir. Robespierre sentit que la Convention lui échappait et il voulut recourir au moyen ordinaire, celui dont l'effet, jusque-là, n'avait jamais manqué : l'intervention de la Commune. On vit alors, au 9 thermidor, cette chose extraordinaire. Les Conventionnels qui survivaient étaient les plus sagaces et les plus subtils, puisqu'ils avaient réussi à sauver leur tête. Ils s'avisèrent de ce qu'on ne semblait jamais avoir compris depuis le 10 août : que ces fameuses « journées » n'étaient au fond que de petites affaires de quartier, qu'avec un peu de méthode, d'adresse et d'énergie, il était possible de mettre les émeutiers en échec. Sur quoi reposait la Commune jacobine ? Sur les sections. Il s'agissait, pour empêcher une « journée », pour arrêter Santerre et Henriot, de protéger d'abord le point menacé avec des sections modérées, puis de prendre l'offensive contre l'émeute. Il ne suffisait donc pas, pour renverser Robespierre, de voter sa mise en accusation. Il fallait être sûr de ce qui se passerait hors de l'Assernblée. Tallien et Barras se chargèrent de la manoeuvre. Elle réussit grâce à une seule section, la section Le Pelletier, qui donna le signal de la résistance. Robespierre, réfugié à l'Hôtel de Ville, connaissait trop bien le mécanisme de la Révolution pour ne pas savoir qu'il était perdu si l'émeute et la Commune commençaient à reculer. ll voulut se tuer, se manqua et, le lendemain, fut porté tout sanglant sur l'échafaud (27-29 juillet 1794)...." 

    3 : La troisième énormité de l'entretien n'est même pas proférée, puisqu'elle n'a même pas besoin de l'être : elle découle de la précédente. La Convention n'étant pas totalitaire, ni Robespierre, ni la Terreur, il n'y a évidemment pas eu de génocide vendéen. Et, donc, notre historien du dimanche n'en parle pas, du génocide vendéen ! Puisqu'il n'existe pas !

    CQFD, et le tour est joué ! Elle est pas belle, la vie ? 

    Et notre invité, à la fin de son entretien, est reparti tout guilleret, tout content; et Julien Arnaud aussi, tout guilleret et tout content. Dans le meilleur des mondes conformiste et historiquement correct possible...

    Alors, désolé, et sans rancune, Jean-Claude Lauret, mais votre papier sur François Raynaert, vous pouvez le garder : un bonimenteur pareil, et des propos pareils, on n'est pas preneurs !...

  • Le terrible 20ème siècle et les génocides. Tous les génocides sont-ils égaux ou certains sont-ils plus égaux que d’autre

    Ce n’est pas le moindre des paradoxes de ce terrible XXème siècle que la dénonciation des génocides, et parfois leurs jugements, appréhendés comme une absolution dont il s’est fait une obligation, ne s’accompagne pas de l’inventaire aussi précis que l’on pourrait légitimement attendre. Les moyens ultrarapides d’échanges et d’acquisition de l’information, d’accès aux bibliothèques et aux archives, qui sont ceux d’aujourd’hui ne devraient pas laisser dans l’ombre, le moindre assassinat de masse.

    genocides.jpg

    Ce n’est pas non plus la moins effrayante des interrogations que le terme même de génocide, création de circonstance, soit l’objet de dissertations sans fin, tant de la part de juristes, que d’historiens et d’universitaires, quelques soit l’atrocité des chiffres. On découvre alors que le mot de génocide n’est pas figé dans une définition immuable. Jusqu’à oser contester la nature du massacre de la Vendée. Et donc malgré le titre de ce billet, nous resterons autant que possible à l’écart de ce vocable.

    joel kotek.jpgOn trouve par exemple sous la plume d’un politologue belge bardé de titres pompeux, Joël KOTEK (photo, ndlr), maître de conférences à l’Université Libre de Bruxelles, directeur de la formation au centre de documentation juive contemporaine (CDJC), un des responsables du mémorial de la Shoah, que le XXème siècle compte quatre génocides, au sens propre du terme (disons plus précisément, tel que défini par lui-même) :

    - 1904 - 1907 : l’éradication du peuple nomade des Hereros, en Namibie, par les troupes coloniales allemandes du général Von Trotha qui donne un Vernichtungsbefehl (Ordre dit d’extermination).

    - 1915 : le génocide des Arméniens par les Turcs (près de 2/3 des Arméniens (plus d’un million de personnes) périssent victimes de massacres planifiés) ;

    - 1941 - 1945 : la Shoah, destruction des Juifs d’Europe (6 millions de morts dont 1,5 millions d’enfants) ;

    - 1994 : génocide des Tutsis au Rwanda : un million de morts en 100 jours.

    Pas un de plus, à la limite de l’imposture ! Et selon son axiome, toutes les souffrances se valent, tous les crimes, non ! On réalise la difficulté d’appréhender l’assassinat de masse avec la création de néologismes : mémoricide, génocide (Raphael Lemkin, juif polonais installé aux Etats Unis, qui chercha le premier dès 1921 à installer la pénalisation des crimes de masse commis par un État), démocide (Rudolph Joseph Rummel).

    Vyshinsky.jpgQuelle gradation instaurer dans l’assassinat de populations sur un mode industriel ? L’ONU s’y est essayée en 1948, à la rédaction de la charte universelle des droits de l'homme. Une précédente définition du génocide, adoptée lors de la première assemblée générale de l'ONU le 11 décembre 1946, intégrait la destruction d'un groupe politique, à côté des groupes raciaux, religieux et autres. En 1948, le groupe politique disparait de la définition onusienne : l'URSS, représentée par le procureur Vychinski (photo, ndlr) a fait retirer la référence au politique en raison de ce qu'elle pouvait se reprocher. On reste médusé de cette complaisance et du rôle autorisé au premier tueur de masse du siècle, le procureur de Staline, Andrej Vychinski. Il avait déjà donné sa mesure au procès de Nuremberg, où agissant dans la coulisse sur ordre de Staline, il s’assura que les actes d’accusation ne viseraient bien que les nazis et leurs complices, sous l’œil bienveillant des Américains et des Britanniques. Or ceux-ci n’ignoraient rien de son activité meurtrière pendant les années trente, les plus sanglantes de la dictature stalinienne.

    Mais les limites de l’exercice devinrent évidentes 50 ans plus tard, à la création de la Cour Pénale Internationale, dont les États Unis refusèrent de faire partie, car un citoyen américain ne peut être jugé que par une juridiction américaine … S’en suivent aussi de multiples contorsions pour décréter unique l’assassinat des juifs par les nazis. Quelle est donc cette unicité ? Les historiens les mieux disposés n’en voit qu’une, le lien direct du peuple élu avec Dieu. Ce qui laisse sans rédempteur plusieurs dizaines de millions de victimes au long de ce cruel 2Oème siècle.

    En outre quand on tente un inventaire des assassinats de masse au long du siècle, on découvre des inexplicables approximations, des silences et d’invraisemblables oublis, mystères qui heurtent l’historien, même quand ils sont dictés par un parti pris idéologique. Trouve-t-on des auteurs qui ont tenté d’établir une liste ? Ce lien vers un article touffu permet tout juste d’avoir un aperçu : http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_de_massacres .

    On notera qu’une nouvelle fois (nous y reviendrons), le désastre humain que fut dans la Chine de Mao « le grand bond en avant », n’est pas mentionné.

    Ainsi à défaut d’être plus précis il n’est pas vain de dégager quelques sordides dénominateurs communs aux tueries qui émaillent le siècle.

    Abba Eban.JPG* C’est d’abord la monstruosité des chiffres, insupportable nouveauté dans l’Histoire de l’Humanité. Dans ses mémoires le diplomate israélien Abba Eban (photo, ndlr), se livre à la comparaison suivante : « Entre Waterloo, 1815, et le début de la Grande Guerre, cent ans se sont écoulés, avec 2.5 millions de soldats tombés sur des champs de bataille, en outre sans que la population civile ne soit particulièrement touchée. Sur les trois décades de 1914 à 1945, on compte 100 millions de morts militaires et civils »

    * C’est aussi, malgré l’horreur des chiffres, une invraisemblable approximation dans des proportions inacceptables dont on n’appréhende plus l’incongruité.

    * Puis vinrent les tentatives de faire juger par des tribunaux ; il s’est alors appliqué une loi aussi ancienne que la guerre du Péloponnèse, ou antérieure, celle du plus fort, car ces juridictions sont toujours entre les mains des vainqueurs.

    Avec son corollaire, l’idée de criminaliser la guerre.

    Reynald secher du genocide au memoricide.jpg* Et enfin un tri mémoriel s’est instauré, qui est entretenu, et que l’on essaie de justifier. La France cultive un triste privilège en la matière piétinant allègrement la liberté de recherche historique …

    Une lecture chronologique est la plus conforme mais elle montre qu’à l’évidence chaque massacre n’a jamais dissuadé de perpétrer le suivant. C’est la leçon à retenir.

    Par ailleurs l’objet de ce billet n’est pas de ressasser des faits régulièrement relayés dans les mass media, avec objectivité ou non, sous forme de documents d’archives, ou par les films d’Hollywood. Il s’agit ici de rappeler des évènements peu connus, ou jamais cités, ayant impliqué des massacres de masse, où l’unité de comptage est la dizaine de milliers de martyrs.

    Sans éviter l’écueil de l’arbitraire dans le choix des drames, nous nous arrêterons plus précisément sur la liste suivante :

    *La guerre des Boers

    *Le massacre des Arméniens

    *La révolution bolchevique

    *Le Japon contre la Chine

    *La réunion de Wannsee et la « solution finale »

    *La partition de l’Inde

    *La révolution chinoise

    *Le grand bond en avant

    *Indonésie 1965

    *Cambodge 1975

    *Rwanda Avril 1994

    *Et très près de nous depuis 1991, la série d’opérations militaires lancées par les États Unis d’Amérique contre le monde arabo musulman.

     

    Pour commencer avec le siècle, la guerre des Boers

    En Mai 1902, se termina la seconde guerre contre les Boers. Ce conflit dans lequel les Britanniques mirent en œuvre toutes les techniques du terrorisme comme la terre brulée, la destruction de 30.000 fermes, et d’une 40aine de petites villes, vit l’apparition des camps de concentration, répertoriés comme tels (personne âgées, femmes et enfants, environ 120.000 détenus et en final autour de 45.000 morts).

     

    Le massacre des Arméniens

    arnold toynbee.jpgL’ensemble des évènements qui se sont déroulés en 1915 et 1916 dans l’empire ottoman, fut rassemblé sans retard par celui qui sera un des grands historiens du 20ème siècle, le britannique Arnold Toynbee (photo, ndlr) dès 1916 (vingt six ans à l’époque), dans une première édition à Londres (Meurtre d’une nation). À cette date les évènements étaient connus et largement médiatisés comme une centaine d’articles dans le New York Times. Dès Janvier 1915, et tout au long de cette année tragique la presse des pays de l’Entente (France, Angleterre, Russie) et des « Neutres » (Etats Unis et Suisse) a rendu compte en direct des déportations et de l’extermination des Arméniens de l’Empire Ottoman. Témoins oculaires des faits, les diplomates, les missionnaires, les voyageurs qui écrivent sur « l’extermination d’une race » ou « l’assassinat de l’Arménie ». Est répertorié tout le spectre de la sauvagerie dont le trou noir de l’Humanité est capable. En profitant cyniquement du conflit mondial qui empêche une ingérence extérieure. Un document accablant diffusé sur la chaine Histoire, montre que la camera commençait à entrer en action, et que donc les tueries ou leurs résultats étaient filmées.

    Et cent ans plus tard, les historiens se heurtent à des portes fermées par Ankara sur des archives dont on connait l’existence, perpétuant un déni consubstantiel aux crimes, dès le début. Beaucoup plus tard, Sécher inventa le terme de « mémoricide » pour qualifier les efforts déployés à effacer le massacre de la Vendée. Et c’est ainsi que le massacre des Arméniens est approximativement chiffré à 1,2 millions (les deux tiers de la population) en Anatolie et les hauts plateaux de l’Arménie. Ne tenant pas compte que deux séries de tueries avaient déjà frappé ces chrétiens d’Orient, connus comme les massacres hamidiens (entre 80.000 et 300.000 morts ; comment peut on oser produire une telle évaluation ?) et les massacres de Cilicie (ou d'Adana), 30.000 morts.

    robert fisk.jpgEt jusqu’à une date récente, décembre 2005, où le britannique Robert Fisk (photo, ndlr), résidant à Beyrouth, consacre 35 pages sur 950 dans son ouvrage, titré par dérision « La grande guerre pour la civilisation. L’occident à la conquête du Moyen Orient » au « Premier holocauste » (ch. 10). Avec sa collègue Isabel Ellsen photographe à The Independent, ils découvrent en Syrie, sur la colline de Margada, région de Alep, à l’époque Arménie turque, un charnier qu’ils évaluent à 50.000 martyrs, liés les uns aux autres. Et 90 ans après le drame, ils entament leur enquête en bons journalistes. Pour finir par ce que Fisk appelle un négationnisme, en premier lieu aux États Unis, consistant à nier la tuerie. Impensable de faire de la peine à Ankara. (à suivre)

  • Matières premières - Nécessités vitales et spéculation, par François Reloujac

    (Article paru dans le n° 94 de Politique Magazine, de mars 2011)

            Au début du mois de février, le président de la République déclenchait un début de polémique avec la Commission européenne à propos de l’influence de la spéculation sur la variation des cours des matières premières. Certains économistes en ont alors profité pour expliquer tout l’intérêt de la spéculation dans le monde économique d’aujourd’hui.

     

    matieres premieres.jpg

            Pour bien comprendre l’enjeu de ce différend, il convient d’examiner la spéculation dans son contexte entre les fluctuations des prix des matières premières et les conséquences économico- sociales qui en résultent. Comment expliquer, par exemple, que les pièces d’un, deux et cinq centimes d’euros aient disparu du Nord de l’Europe, soit que les gouvernements ne les mettent plus en circulation soit que les populations les récupèrent ? Le prix du cuivre a augmenté de 35 % en un an et de plus de 250 % par rapport à son point bas de 2008. De la même façon, le prix de l’étain a augmenté de près de 80 % en un an. A cette mesure, l’aluminium fait figure de parent pauvre qui n’a augmenté que de 12 % au cours des douze derniers mois. Mais certains experts pensent que ce métal va bientôt avoir sa revanche, pouvant dans de nombreuses applications, servir de substitut au cuivre. Et, dans cet envol du prix des métaux, mieux vaut ne pas examiner les prix de l’argent, de l’or et des terres rares ! Comme chacun le sait les prix du pétrole et du gaz ne sont pas près de connaître une baisse. Reste donc, dans ce survol des prix des matières premières, à regarder rapidement celui des matières premières agricoles. Et, de ce point de vue, force est de constater que le prix du coton a atteint des sommets qu’il n’avait pas connus depuis la fin de la guerre de Sécession.

            Au cours des derniers mois, les prix des matières premières alimentaires qui avaient un peu baissé depuis 2008, année qui avait été marquée par les « émeutes de la faim », se sont à nouveau envolés battant, les précédents records. Quelle qu’en soit l’origine, mauvaises conditions climatiques ou spéculation internationale, tous les prix des matières premières augmentent, entraînant des hausses de prix dans les pays où ils ne sont pas artificiellement fixés par des intermédiaires puissants et des règles étatiques pesantes. Dans les grandes villes chinoises, le prix des principaux produits alimentaires a augmenté de plus de 30 %. 

            En Russie, la hausse moyenne des prix dépasse les 8 %, emportée par l’explosion des prix du chou, du sarrasin et de la pomme de terre. 

            Il en est de même en Inde et au Brésil à cause du prix du blé. 

            Pour la FAO, les prix alimentaires vont continuer à croître alors qu’ils ont pourtant déjà globalement atteint des sommets jamais vus auparavant. L’indice des prix alimentaires établi par la FAO a en effet augmenté de 28 % au cours des douze derniers mois (dont 15 % au cours des seuls trois derniers mois).

    Des records inusités

            La production de blé est insuffisante, la sécheresse ayant sévi en Chine et en Ukraine et les inondations ayant recouvert l’Australie n’y étant pas étrangères ; et ce n’est peut-être pas sans surprise que l’on constate que sur la liste des plus gros importateurs de blé de la planète, l’Egypte arrivait au premier rang. Le prix du sucre s’est envolé pour atteindre un niveau que l’on n’avait pas connu depuis la bulle spéculative d’il y a plus de trente ans. Or, rien ne permet de penser que cela va s’arrêter puisque la pénurie en Inde s’accroît et que son premier fournisseur, l’Australie, a été dévasté par le cyclone Yasi. En Europe, c’est le prix des produits laitiers qui a augmenté de plus de 9,5 % en un an… à cause d’une sécheresse en Nouvelle- Zélande où se trouve le plus gros marché laitier du monde. Il n’est pas sans intérêt de noter que, si la France à elle seule produit 35% de plus de lait que la Nouvelle-Zélande, 37 % du lait en poudre mondial est vendu sur le marché néo-zélandais contre à peine 22 % sur l’ensemble des marchés européens. 

    matieres premieres 1.JPG

     

     De l’assurance à la spéculation

            Ce dernier exemple laisse supposer que la spéculation pourrait jouer un rôle dans cette envolée. Mais cette spéculation est-elle utile ? 

            Est-elle légitime ? Oui, répondent en cœur ceux qui, pour légitimer leur position, se réfèrent souvent à l’exemple d’Air France. Le coût d’un voyage aérien est, disent-ils avec raison, fortement tributaire du prix du pétrole consommé pour faire voler les avions. Or, ce prix évolue sans cesse au gré de la demande. Si aujourd’hui le prix du baril est de 80 $, qui peut assurer Air France que dans trois mois il sera toujours au même niveau, qu’il ne sera pas à 100 ou 120 ? Si la demande augmente du fait de la croissance économique mondiale, si l’offre diminue du fait d’un accident sur une plateforme pétrolière au milieu du Golfe du Mexique ou d’un accès de fièvre des monarchies pétrolières ou encore d’un blocage ne serait-ce que temporaire du canal de Suez, il faut bien qu’Air France puisse s’en protéger. Pour cela, il existe une méthode simple l’achat à terme à prix fixe : Air France achète au prix d’aujourd’hui le pétrole qui lui sera livré demain. Air France se couvre ainsi contre les risques futurs d’augmentation des prix. Comme les producteurs, eux, ne veulent pas vendre demain au prix d’aujourd’hui, il va bien falloir qu’interviennent entre les deux un intermédiaire qui va retenir aujourd’hui pour le compte d’Air France la quantité de pétrole nécessaire. Cet intermédiaire va donc virtuellement devenir « propriétaire » d’une certaine quantité de pétrole non encore extraite. Au moment de la livraison par le producteur à Air France l’intermédiaire lui vendra la quantité qu’il avait retenue et se fera payer le prix convenu à l’avance ; il règlera alors le producteur au prix du jour. Pour le risque qu’il aura pris, il se fera aussi payer par Air France le coût de cette assurance.

            Cet intermédiaire est, pendant un un laps de temps, devenu propriétaire virtuel du pétrole. Il peut donc utiliser les droits qu’il possède sur ce pétrole et les vendre à son tour, quitte à les racheter juste pour pouvoir les revendre à Air France au jour convenu. Cette faculté est, en principe, destinée à le protéger contre une fluctuation trop importante du prix du pétrole qui le conduirait lui-même à ne plus pouvoir honorer le contrat d’origine, et donc de se voir substituer un autre intermédiaire plus solide. Mais il peut aussi être tentant pour cet intermédiaire de profiter des fluctuations erratiques du cours du pétrole et de faire quelques allers et retours afin d’engranger des bénéfices rapides. Aujourd’hui, le marché du pétrole virtuel représente plus de trente fois le marché du pétrole réel. Autrement dit, le pétrole non extrait et non livré change de main trente fois avant d’arriver à son utilisateur final. Il y a gros à parier que ces mouvements intermédiaires sont plus dictés par la recherche d’un gain financier rapide de la part des intermédiaires que par le simple mécanisme de réassurance d’un intermédiaire fragilisé.

            Ce que l’on dit moins, c’est que ce mécanisme permet aussi à Air France de faire des projections de résultats. Ceci lui permet de donner des prévisions aux agences de notation facilitant par contre- coup le développement d’une spéculation sur les cours de Bourse. 

            La spéculation sur les matières premières sert donc aussi d’aliment à la spéculation financière.

            Ce qui est vrai pour le pétrole est vrai pour toutes les matières premières. Sur le seul marché à terme de Chicago, le blé change de mains plus de quarante fois avant même d’avoir été récolté. Au mois de juillet dernier, le fonds spéculatif britannique d’Anthony Ward détenait plus de 15 % des stocks mondiaux de cacao, soit 7 % de la production mondiale annuelle. La banque J.P. Morgan détient ainsi le plus gros stock mondial de cuivre…

     

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    De lourdes conséquences

            Souvent, lorsque l’on examine l’évolution du prix des matières premières et que l’on constate leur augmentation, on commence par penser au risque d’inflation. Celui-ci est réel, surtout si les Etats en mal de politique à court terme cherchent à relancer la consommation en inondant les marchés de liquidités. Cependant, cette inflation, dans un monde où le chômage est devenu endémique, ne s’envole qu’après une certaine période de latence au cours de laquelle divers désordres peuvent apparaître. Ce moment doit être l’occasion, notamment pour les hommes publics, d’examiner le bien fondé des politiques économiques actuelles au regard de la poursuite du bien commun dont ils ont la charge.

            Le 19 février, à Paris, le président de la banque mondiale, R. Zoellick, a rappelé que 44 millions de personnes supplémentaires vivaient au-dessous du seuil de pauvreté, fixé à 1,25 $ par jour et par personne. Elles seraient ainsi plus d’1,2 milliard dans le monde. Il s’est, en marge du G20, déclaré inquiet des effets potentiels que les prix « peuvent avoir sur la stabilité politique ». La moindre variation du prix des biens de première nécessité peut en effet transformer une situation déjà dramatique en issue fatale. Que cette évolution soit le fruit d’une catastrophe naturelle est un mystère qui nous dépasse ; qu’elle soit le résultat de la spéculation de quelques multinationales anonymes qui ne cherchent qu’à faire croître un profit nominal virtuel, est un scandale qui peut conduire beaucoup de régimes à leur chute. Lorsque la révolte a éclaté en Tunisie, celle-ci était un pays riche. 

            L’Egypte, non plus, n’était pas ce que l’on appelle habituellement un pays pauvre ; au cours des six dernières années, son produit intérieur brut avait bondi de 7 % par an en moyenne. Mais ces deux pays ont en commun la grande hétérogénéité de la répartition des richesses au sein de leurs populations : à côté de quelques fortunes immenses subsistent de nombreux pauvres qui sont non seulement privés des biens de première nécessité mais surtout du principal d’entre eux, l’accès au travail. Les président Ben Ali et Moubarak avaient l’un comme l’autre fait de lourds efforts pour augmenter la richesse globale de leurs pays respectifs. Mais cette richesse n’était pas le fruit du travail de tous. Dans un monde où la consommation est considérée comme une valeur plus importante que la production, l’homme est privé de sa liberté fondamentale de participer à l’œuvre de création. Parmi les migrants qui quittent leur pays en proie au chaos, il ya bien sûr des personnes qui vont chercher ailleurs la paix et les allocations, mais il y a aussi des personnes qui veulent simplement aller chercher de quoi gagner leur pain à la sueur de leur front. Le malheur veut que, dans les pays où ils arrivent, les deux soient mélangés et que les autochtones les confondent comme le bon grain et l’ivraie. Dès lors ces déracinés transmettent à leur tour les germes d’une déstabilisation sociale, surtout s’ils arrivent en masse dans des régions où la richesse globale n’est pas réellement plus grande que celle du pays qu’ils ont fui. ■

  • Sevran, violence(s) : des Casques bleus ? l'armée ? l'analyse fausse - parce qu'incomplète - du Maire.....

            .... mais aussi du Député, et de tous ceux qui crient "au loup !", mais refusent obstinément de voir, et ne veulent pas avouer, qu'on récolte aujourd'hui les fruits mauvais de leur politique insensée. "Les parents ont mangé des raisins verts, et les enfants ont eu les dents agacées..."

            Pour vivre en paix, les Casques bleus ?  Et, après Sevran, où déployer Armée et Casques bleus : dans la France entière ? On est aux limites de l'absurde : va-t-on engager la moitié de la France pour protéger l'autre moitié ?.....     

     

                                               Guerre des Gangs : Sevran au bord de l'implosion...

          Voir la page du site TF1 News du vendredi 3 juin : http://lci.tf1.fr/france/faits-divers/2011-06/violences-a-sevran-le-maire-en-appelle-a-l-armee-6516930.html avec la demande du maire Stéphane Gatignon(EELV) : "Je demande au ministre de l'Intérieur d'envisager une présence de l'armée 24 heures sur 24 avec une fonction de force d'interposition afin de faire cesser les règlements de compte et d'éviter les risques de balles perdues et de tragédies" a déclaré le maire. "Malgré son implication et son professionnalisme, la police ne semble plus à même d'assurer cette présence, je demande donc à ce que l'armée puisse prendre le relais". Et celle, qui va dans le même sens, du député PCF de la circonscription "pour démanteler les réseaux mafieux liés à la drogue".  

            Ainsi donc, Stéphane Gatignon, maire EELV (Europe Écologie Les Verts) de Sevran, veut des Casques bleus pour sa ville ! Ou l'armée ! Et François Asensi, député PCF de la circonscription, est d'accord avec lui. Mais, la demande est curieuse : si on en est arrivé là, c'est bien parce qu'il y a un problème, et grave, mais lequel ? Maire et député disent, certes, qu'il y a "de la violence", et même beaucoup, et même trop, mais restent dans le vague sur les causes profondes de cette violence. Serait-elle une sorte de phénomène extra-terrestre, surgi de nulle part, par génération spontanée ? N'est-ce pas bizarre ?.....     

            En effet, cela fait tout de même des siècles que Sevran est en France, et des siècles qu'on y vit normalement, et en tout cas, du moins, sans qu'il ait été besoin d'y envoyer l'armée (pas plus que dans les autres agglomérations de France...). Il y a certainement toujours eu, à Sevran comme ailleurs, les habituels problèmes inhérents à toute concentration urbaines, mais, malgré tout, on en était toujours resté, jusqu'à présent, au registre habituel des problèmes de toute agglomération, sous toutes les latitudes et sous tous les climats.

             En clair, la violence, qui a toujours existé, et qui existera toujours et partout, à Sevran comme ailleurs, restait jusqu'ici à son seuil incompressible, ou pas très loin; elle a explosé, d'une façon exponentielle : pourquoi ? Que se passe-t-il donc, tout d'un coup, pour que Maire et Député demandent, assez théatralement, des Casques bleus, ou l'armée ?

             Leur justification, sur "la violence", en général - on dirait qu'ils parlent d'une notion abstraite... - ne tient pas : ils en disent trop, ou pas assez. Quelle(s) violence(s) ? Et faite(s) par qui ? Voilà ce qu'il faudrait savoir, afin de règler le problème, et avant même d'avancer des solutions, afin qu'on puisse, justement, proposer des solutions efficaces.

            Mais, en réalité, tout le monde sait très bien de quoi il s'agit, de quelle(s) violence(s) il s'agit, et faite(s) par qui. Y compris le Maire et le Député, puisqu'ils sont, peut-on dire, aux premières loges. Mais ils préfèrent faire semblant de ne pas savoir, parce que, s'ils disaient ce qu'ils savent, s'ils disaient la vérité, tout simplement, cela reviendrait à officialiser ce que le peuple français dans ses profondeurs a admis et reconnu depuis longtemps : l'échec d'une politique insensée, menée depuis plusieurs décennies par l'ensemble du Pays Légal, Droite, Gauche et Centre confondus et complices.

            Cette politique, c'est celle de la délocalisation de masse(s), consistant à faire venir en France des quantités astronomiques de personnes - qui vont manquer à leurs pays d'origine... - et à qui l'on n'a, de toutes les façons, rien de vraiment sérieux à offrir ici : qui peut justifier, et par quel argument, cet octroi annuel de la naturalisation à environ 200.000 personnes par an ? Des populations qui, de plus, et comme pour créer un déséquilibre supplémentaire, ne viennent pas - harmonieusement réparties entre elles - des cinq parties du monde mais viennent quasi exclusivement d'Afrique - Afrique noire ou Afrique du Nord. Et ont une tendance de fait à se concentrer et à se regrouper sur certains territoires, ce qui est, bien sûr, un frein supplémentaire à une intégration - ne parlons même pas d'assimilation... - que leur nombre excessif, sur une durée de temps aussi courte, rend de toutes façons illusoire...

            On a ainsi créé - ou voulu créer, ou laissé se créer, peu importe... - une balkanisation de territoires, en se réjouissant même, parfois, de la quantité de nationalités différentes vivant sur une même commune : jusqu'à quarante, et plus.... Dans un monde, évidemment utopique, de richesse pour tous et de développement partagé - c'est-à-dire, en fait, dans les rêves les plus optimistes - cela pourrait, peut-être, marcher. Mais "la" politique, et le rôles "des" politiques, ne consiste pas à rêver, ni à prendre un désir pour une réalité.

            Et la seule chose qui compte, c'est ce qui se passe réellement sur le terrain, ce qui se vit vraiment au quotidien. Et, là, que voit-on, lorsqu'on observe froidement la réalité, sans lunettes roses ? On voit qu'on a libanisé des portions nombreuses du pays, dans lesquelles  une partie importante de ces populations nouvelles vit en l'absence de toute perspective d'avenir réelles, et de toute politique d'intégration sérieuse : comment s'étonner, dès lors, que, dans ces conditions, l'irruption massive - et, redisons-le, sur un temps très court - de ces populations nouvelles ait destabilisé fondamentalement - et, maintenant, structurellement... - la vie en société, en créant des situations intenables, ingérables, invivables ? Et que, ceux qui se tiennent mal prenant toujours le pas, dans ces conditions, sur ceux qui se tiennent bien, les trafics en tous genres, les réseaux mafieux, les activités (!) souterraines et l'économie parallèle (!), bref la violence, sous toutes ses formes, explose ? 

            C'est être bien naïf, ou volontairement aveugle. Ou, encore plus simple, ne pas vouloir reconnaître ses torts, ne pas vouloir admettre que l'on s'est trompé, ne pas accepter de dire que la politique menée n'a pas été la bonne (doux euphémisme !).....

            Le problème n'est pas la violence : on sait évidemment très bien qu'il y en avait avant, et qu'il y en aura après; et on sait évidemment très bien que nul ne peut imaginer éradiquer la violence en soi, ni à Sevran, ni ailleurs. Le problème vient de cette nouveauté qu'est cette violence exponentielle inédite, que l'on voit croître et grandir, pour ainsi dire, à vue d'oeil dans ces banlieues et zones de non-droit qui sont une nouveauté dans notre pays, ceci expliquant cela; qui empoisonne notre pays, et l'empoisonnera de plus en plus. C'est d'abord et avant tout un problème politique, dont les causes - qui sont, maintenant, structurelles... - sont archiconnues, et ont été archidites et archiredites.

            Plutôt que de se donner le ridicule de demander à l'armée d'aller accompagner les ménagères pour faire leur courses ou les enfants pour aller à l'école etc.. etc... il faut avoir le bon sens et le courage d'affirmer qu'il faut rompre avec ce qui se fait depuis 1975, et mener non pas la même politique en sens contraire, mais le contraire de cette politique....

            Au Sud, il faut relocaliser les populations déracinées, et développer les pays d'origine de l'émigration, afin de traiter enfin, dignement et comme des êtres humains, ces masses de gens qui doivent pouvoir vivre et travailler au pays, et êtreheureux chez eux; ces populations qui sont, parce que pauvres, les enjeux sordides de calculs qui les dépassent...

            Et, au Nord, il faut cesser de piller les ressources humaines des autres - de l'Afrique, en particulier... -, forme moderne du néocolonialisme, dont deux des résultats les plus évidents sont la dilution des vieilles Nations historiques d'accueil, et la fourniture de chair à profit pour les Mafias de toutes sorte.....

  • A propos de notre note sur le génocide arménien et « les turcs, ces nazis qui ont réussi… » (1) : réponse à Nag….

                  Il est vrai que nous nous sommes fait plaisir en nous défoulant un bon coup : "les turcs sont des nazis qui ont réussi" et "Hitler en a rêvé, les turcs l'ont fait". Nag se déclare « scandalisé » par ce qu’il appelle  nos « raccourcis et interprétations » et nous assène : « vous remettez l’Histoire en question ».

                  Suivent quatre lignes d’imprécation fourre-tout (2) d’où il semble ressortir que tout le monde a « génocidé » (ce qui n’est pas faux, et que nous n’avons aucun mal à accepter totalement) ; que notre "visison étroite" (?) de l'Histoire rejoint celle des nazis et que, en suivant notre raisonnement, il faudrait remettre en question l’attitude des principaux peuple européens : et là, pour nous, c’est du grand n’importe quoi, désolés Nag.

                 Vous parlez du génocide des Algériens (et des Rwandais : pour faire bon poids ? comme au marché ?....). Il y avait un million d’autochtones en Algérie quand nous y sommes arrivés, dix quand nous sommes partis : vous appelez cela un génocide ? Chapeau ! Et ne parlons pas de l’extarordinaire réseau d’infrastructures que nous avons laissé en partant : routes, écoles, hôpitaux, bâtiments de toute sorte (postes, adduction d’eau, réseau électrique etc…). La vérité est simple : soit vous mentez ; soit vous répétez les mensonges qu’on vous a appris, et dans ce cas vous êtes un peu moins coupable que si vous mentiez, mais coupable quand même, car on ne doit pas répéter, tel un perroquet, les falsifications des menteurs. On a un devoir de vérification et d’honnêteté intellectuelle.....

                  Vous pouvez parfaitement dire que vous n’approuvez pas le fait que la France soit allé en Algérie. Cela ne nous choque absolument pas : c’est une idée, une prise de position, et en tant que telle elle est légitime.  Par contre vous n’avez pas le droit de dire que la France a commis un génocide, tout simplement parce que ce n’est pas vrai. Ayez une idée, c’est sans problème ; mais ne perpétuez pas les mensonges des personnes de mauvaise foi : vous vous disqualifieriez avec elles….

                 Vous tombez dans la même erreur ou le même mensonge (et vous méritez donc le même reproche..) lorsque vous répétez la même vulgate erronée en parlant du soi-disant génocide des indiens de l’Amérique latine par l’Espagne, en reprenant la tarte à la crème des gentils indiens et des méchants blancs. Que les conquistadores n’aient pas été des enfants de chœur, cela n’a échappé à personne. Mais nul ne l’était à l’époque, vous semblez l’oublier, et c’est injuste d’en accuser un seul peuple, alors que tous les peuples européens pratiquaient allègrement ce travers. Par ailleurs, ce que les espagnols ont détruit, au Mexique et au Pérou, c’est le pouvoir politique, l’organisation politique, l’administration aztèque et inca. Pas les peuples. On parle plus le nahuatl (langue des aztèques) aujourd’hui qu’avant la conquête espagnole ; et c’est pareil pour le quechua (la langue des Incas). Par ailleurs, les descendants directs des indiens quechuas et mexica sont aujourd’hui toujours là, et bien là ; et nombreux, et en plus grand nombre qu’avant.

                Vous oubliez de verser deux pièces au dossier : 1°) : s'il y a eu population décimée, c'est du fait de la variole;

                                                                                      2°) : et les espagnols amis des indiens ont été extraordinairement actifs lors de la conquête, faisant progresser le droit international, grâce par exemple à la contribution décisive de Francisco de Vitoria (on lira avec le plus grand profit l'extraordinaire ouvrage de l'universitaire états-unien Lewis Hanke, La lutte espagnole pour la justice dans la conquête de l'Amérique). Et là aussi, comment pouvez-vous parler de génocide ? Sauf , comme nous l’avons vu plus haut, à être un menteur conscient ou un propagateur/répétiteur des mensonges des autres…..

                 Mais revenons-en à notre note. Nous avons cru comprendre que si vous étiez "scandalisés" c'est que vous deviez bien être, un tout petit peu, favorables à ces turcs que nous n'avons pas ménagés ? Et peut-être un peu favorables à l'Islam ? Eh bien, nous persistons et nous signons : les turcs ont bien génocidé les arméniens en particulier, et les chrétiens en général . Là où les descendants directs des algériens en Algérie, des Incas au Pérou, des Aztèques au Mexique sont toujours là et bien là, toujours nombreux, souvent majoritaires en Amérique et maîtres du pays en Algérie, où sont les descendants des chrétiens qui représentaient 100% de la ville de Constantinople lorsque les turcs sont arrivés ? Il n’y en a plus. Par mort, départ ou conversion forcée, le statut de dhimmi étant tout sauf enviable. Donc, là oui, on peut parler de génocide, physique ou intellectuel et moral.

               Nous ajouterons que ceci n’est pas seulement imputable aux seuls turcs, mais à l’Islam en général (pas dans sa totalité cependant: il y a en effet des ilôts de tolérance en terre d’Islam, malheureusement très rares et très minoritaires….). A quoi assistons-nous en Irak ? Sinon au nettoyage ethnico/religieux, au détriment des chrétiens. Qui sont pourtant les premiers habitants du pays, et qui étaient là 600 ans avant les musulmans. La moitié est déjà partie, l’autre n’a plus de choix qu’entre la mort et le départ. Et que dire de l’Egypte, où les coptes, pourtant les premiers habitants, vivent comme des étrangers dans leur propre pays (notre sort à nous ici, demain ?....), dans la peur et le danger de mort quotidien, ce que l’on ne peut qu’appeler une  « sous-vie ».

              Alors c’est bien beau de nous dire que nous faisons des « raccourcis » et des « interprétations » : allez demander aux irakiens chrétiens si nous « interprétons » leur situation et si nous faisons un « raccourci » en l’évoquant ; allez le demander aux coptes d’Egypte….

             La vérité, Nag, c’est que l’Islam (et plus concrétement la Turquie, dans le cadre de notre note) est peut-être la plus extraordinaire machine à dé-diversifier que le monde ait jamais connu depuis qu’il existe. Où l’Islam passe, la diversité trépasse. Au point qu'on pourrait lui appliquer, en la paraphrasant, cette célèbre formule de Chateaubriand : "Les forêts précèdent les hommes, les déserts les suivent". Que sont devenues les antiques et millénaires civilisations Perse, Egyptienne, Syrienne, Assyrienne, Grecque (en Asie mineure), et autres, depuis que l'Islam a tout recouvert de l'effrayant éteignoir de son monolithisme ?.....

             Il y a plein de musulmans chez nous, et des mosquées partout : peut-on en dire autant –mais à l’inverse- des chrétiens en Arabie saoudite ? Récemment un lecteur (JEG) envoyait un commentaire pour dire que finalement il était heureux que Barack Obama ait été élu ; il écrivait entre autre : « L 'élection d' Obama a été rendue possible dans un pays de tradition et de civilisation chrétienne, avec ses qualités et ses défauts. Quand verra t on le même scénario électif dans une autre culture que la notre? » Nous vous posons la question, Nag , fût-ce d’une façon provocante : à quand un président arménien en Turquie ? Blanc et chrétien dans un grand pays musulman ?

             Il est là votre gros défaut : comme tant d'autres, vous parlez d’un Islam qui n’existe pas, mais vous ne parlez pas de l’Islam qui existe : persécuteur et nettoyeur ethnico/religieux. Et c'est sur ce point précis que nous l'avons comparé aux nazis. Et nous persistons et signons : l'épuration que le III° Reich voulait effectuer sur ses terres, les turcs l'ont faite sur la leur.....

     

    (1)     : Voir la note du 19 novembre:  « Nous l’avons toujours, dit : les turcs sont des nazis qui ont réussi….. », dans la catégorie « Ainsi va le monde… »

    (2)    : Voici le texte complet du commentaire de Nag : «  Nous sommes scandalisés par vos raccourcis et interprétations. Vous remettez l'Histoire en question. Vous rejoignez parfaitement les Nazis par votre vision étroite de l'histoire. Alors si nous allons plus loin, il faut remettre en question l'attitude de l'Espagne (conquistadors) génocide des indigènes de l'Amérique du sud avec l'accord du Vatican; Portugal idem; de la Grande Bretagne pour le génocide des Aborigènes, des Américains pour le génocide des indiens d'Amérique, de la France pour le génocides des Algériens et Rwandais, de la Belgique pour le génocide des Congolais, etc...Vous voyez où je veux en venir? »

  • Le Prince Jean à Rome, pour l'ouverture de l'année Henri IV

                Dans la note du 22 novembre dernier ("2010, l'année Henri IV"), nous vous avons présenté les objectifs et l'importance de cette initiative, placée rappelons-le sous le parrainage direct du chef de l'Etat; et nous avons tenté d'expliquer l'intérêt qu'il y avait à la soutenir.

                "En rendant compte -écrivions-nous- de cette initiative officielle du Gouvernement français, en s'y associant et en y participant, on fait tout à fait autre chose que de se complaire dans un passé aboli. On accomplit, certes, un geste de mémoire, en exaltant ce roi pacificateur et réconciliateur, mais tourné vers le présent et l'avenir. On contribue à pousser à la roue pour la reconquête de notre Histoire, la ruine de la Bastille du mensonge de l'histoire officielle, grâce à laquelle nos adversaires ont réussi à falsifier notre passé, à le faire prendre en haine à une part du peuple, le coupant ainsi de ses Racines authentiques. Beaucoup de français en effet, abusés par l'ignorance et le mensonge, ne s'aiment pas, n'aiment pas la France, du moins la caricature mensongère qu'on leur en a montrée, et ne souhaitent donc pas prolonger cette aventure exaltante que représente notre Nation.

                 Exaltante, du moins, quand on connaît vraiment son Histoire, avec ses grandeurs et ses faiblesses (et même ses laideurs...) car comment pourrait-elle l'être -exaltante- lorsqu'on a été élevé en haine de son passé ? La réflexion n'est pas nouvelle, et elle n'est pas de nous: l'histoire de France -l'histoire officielle, enseignée dans les Écoles- paraît avoir été écrite par les ennemis de la France......"

               ( pour lire, ou relire l'intégralité de cette note:  2010 année Henri IV.pdf ).

                Le Prince Jean était à Rome, tout récemment, pour les festivités et manifestations marquant le coup d'envoi de cette année Henri IV. L'occasion de signaler, donc, le démarrage de cette année, et aussi de revenir un petit peu sur deux points d'histoire, mais qui vont vont bien plus loin que l'anecdote, puisqu'ils nous ramènent à l'Histoire, à la Culture et à la Civilisation: parlons donc un peu de la Messe annuelle célébrée depuis 1604 dans la cathédrale de Rome « pro felice statu gallicæ nationis », et des Pieux Établissements français de Rome.....

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    Le Prince en compagnie du cardinal Poupard et de l'Ambassadeur de France auprès du Saint-Siège, Stanislas de Laboulaye

                I :  La Messe annuelle « pro felice statu gallicæ nationis », dans la cathédrale de Rome:

     

                Cette messe que valait bien Paris, le roi Henri IV voulait l’entendre en bon catholique. Il chargea donc l’abbé Arnaud d’Ossat de négocier avec le pape Clément VIII la délicate affaire de son absolution. Elle n’était pas simple en effet. De nombreux cardinaux liés à la Cour d’Espagne se montraient hostiles et il fallait convaincre le Pape de la sincérité du roi. L’abbé d’Ossat déploya une extrême habileté et fut soutenu dans ses négociations par le chapitre du Latran.

     

     

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    Le Prince Jean devant la statue d'Henri IV, son aïeul

    (oeuvre de Nicolas Cordier, 1608).

     

     

                Le 17 septembre 1595, étant parvenu à faire accepter et la formule par laquelle le roi serait absous et la reconnaissance de la légitimité des prétentions d’Henri IV sur la couronne de France, l’abbé d’Ossat prononça, au nom du roi, la formule d’abjuration et reçut, en son nom, l’absolution de Clément VIII.

     

                Pour remercier le chapitre du Latran de son aide décisive, Henri IV lui accorda par brevet en date du 22 septembre 1604 les bénéfices, alors importants, de l’abbaye de Clairac, située dans le diocèse d’Agen. Il disposait, en outre, qu’une messe solennelle « pro felice statu gallicæ nationis » serait célébrée chaque année par l’archiprêtre de la Basilique, assisté par le chapitre, au jour anniversaire de sa naissance, c’est-à-dire le 13 décembre, fête de la Sainte Luce.

     

                En remerciement, le chapitre décida de reconnaître pour Henri IV et ses successeurs le titre de « Premier et unique Chanoine d’honneur du Latran ». Il fit également élever, à ses frais, une grande statue d’Henri IV en pied, un glaive à la main. Cette statue,  due au sculpteur lorrain Nicolas Cordier, se trouve dans le portique du transept de droite. Elle fut inaugurée à Rome en 1608 par le marquis de Villeroy, ambassadeur de France.

     

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    Devant la statue d'Henri IV, le Prince entouré par Jean Gugliotta (à sa droite) et Fabrice Madouas  (à sa gauche)
     
     
     
     
     
     
     

                II :     Les Pieux Établissements de la France à Rome et à Lorette sont une fondation française installée en Italie, constituée au cours des âges de dons et de legs de Français illustres ou obscurs, dirigée par des organes propres, et placée sous la tutelle de l'Ambassade de France près le Saint Siège.

     

                L'affectation de certains de ses biens, comme l'ensemble conventuel de la Trinité des Monts et l'église de Saint Claude des Francs-Comtois de Bourgogne, fait l'objet d'accords internationaux bilatéraux entre la France et le Saint Siège. En outre, son dernier règlement, du 25 août 1956, a été approuvé par bref du Pape Pie XII, en date du 8 septembre 1956.

     

    Ils comprennent aujourd'hui :

     

    - Cinq églises et leurs dépendances:

     

        * · Saint Louis des Français - Piazza San Luigi dei Francesi, 5

        * · La Trinité des Monts - Piazza Trinità dei Monti, 3

        * · Saint Nicolas des Lorrains - Largo Febo, 19

        * · Saint Yves des Bretons - Vicolo della Campana, 8

        * · Saint Claude des Francs-Comtois de Bourgogne - Piazza San Silvestro

     

    - 13 immeubles de rapport dans Rome.

     

    - A Lorette, 1 petit immeuble, la Chapellenie nationale de France, dans le centre ville, et quelques hectares de terres.

     

     

                La vocation première de cette fondation, conformément aux dispositions testamentaires de ses nombreux légataires, est d'entretenir les communautés religieuses qui desservent ses cinq églises (communauté de Saint Louis, couvent et rectorat de la Trinité des Monts, chapellenie nationale de France à Lorette) et d'assurer l'accueil des pèlerins francophones à Rome (Maison d'accueil Saint Joseph de la Trinité des Monts, Centre pastoral d'accueil).

     

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    "Raço racéjo !" : De Henri IV au Prince Jean,  la même simplicité et cordialité de bon aloi
     

     

                Au-delà, elle contribue, par l'organisation de manifestations, au rayonnement de la France à Rome : par exemple, en 2002, fut commémoré le cinquième centenaire de la pose de la première pierre de l'église de la Trinité des Monts, par une exposition, un colloque en partenariat avec l'École française de Rome et une série de concerts ; en 2003, fut célébré le 700ème anniversaire de la mort de Saint Yves par un colloque "Riches et pauvres devant la justice", présidé par le Cardinal Mario Francesco Pompedda, alors Préfet du Tribunal suprême de la Signature apostolique, et par l'inauguration de la façade rénovée de Saint Yves des Bretons.

     

                Enfin les cinq églises françaises de Rome, considérées comme des monuments historiques français, font l'objet de vastes campagnes de restauration, menées en partenariat avec le Ministère français de la Culture et de la Communication, le Sénat de la République française, les Conseils régionaux de Bretagne et de Lorraine, les surintendances italiennes territorialement compétentes et les Musées du Vatican. Une nouvelle convention liant le Ministère français de la Culture et de la Communication et les Pieux Établissements a été signée par M. Jean-Jacques Aillagon lors de sa visite, le 8 mars 2003.

     

                Les Pieux Établissements sont dirigés par la Congrégation générale, composée de 12 Français de Rome, pour moitié ecclésiastiques, pour moitié laïcs, et présidée par l'Ambassadeur de France près le Saint Siège, M. Stanislas Lefebvre de Laboulaye. Il est assisté par la Députation administrative que préside le Ministre Conseiller de l'Ambassade, M. Alexandre Morois, et qui comprend l'Administrateur, Le R.P. Bernard Ardura, et le Trésorier des Pieux Établissements, M. Pierre Blanchard. Une petite équipe exécutive de quatre personnes est conduite par l'Administrateur-délégué (à titre indicatif, le budget 2007 des Pieux Établissements est de 3.720.000€).

  • Deux Conférences du Cycle d'Yvan Blot : I/II, Chapitre deux : le gouffre des finances publiques.....

            Dans notre Tableau "Activités France entière", nous publions - entre autres... - les lieux, dates et sujets du Cycle de Conférences d'Yvan Blot 2011/2012 :

    LA FRANCE AU BORD DU GOUFFRE OU LE SUICIDE DE LA FRANCE (Face à la trahison des élites irresponsables, le recours au peuple)  

     
            Très amicalement, Yvan Blot nous a envoyé le scripte de deux de ces conférences, en nous autorisant à les reproduire : voici donc, aujourd'hui, la Conférence du 17 octobre : Le gouffre des finances publiques

    -  Le gaspillage des fonds publics ou le référendum financier ?

    -  La spoliation fiscale et l’endettement ou le contrôle par l’initiative populaire ?

            Et nous publierons demain la Conférence du 21 novembre : Criminalité, perte des valeurs ou sauvegarde des traditions

    -  Le laxisme des élites envers le crime ou le bon sens populaire ?

    -  Travail, famille, morale et religion, institutions ringardes ou conditions du renouveau ?

    * Yvan Blot, Président de "Agir pour la démocratie directe" - Courriel : atheneion@free.fr

     

    Chapitre deux : le gouffre des finances publiques 

            Le 20ème siècle fut celui de la croissance illimitée des finances publiques. Autrefois, les Etats n’avaient qu’un seul très gros poste de dépenses, le poste militaire. Aujourd’hui, les dépenses dites « sociales » sont les plus importantes. Les gérants politiques élus pour un temps courts, qui ne sont nullement propriétaires du pays ont intérêt à tirer des avantages à court terme de leur gestion, notamment dans la perspective de leur réélection, mais n’ont pas d’intérêt personnel à assurer la fortune du pays en longue période. L’évolution démographique à long terme, l’accroissement du capital en longue période ne les  concernent pas. C’est pourquoi là où c’est possible, les citoyens, en général propriétaires de quelques biens et attachés à leur famille et à l’avenir de leurs enfants, prennent par référendum des décisions que les gouvernements ne prennent pas.

            En France, la préférence pour les choix à court terme a sans doute atteint des sommets sous les présidences de François Mitterrand et de Jacques Chirac. Sous ces deux présidence, l’une dite de gauche et l’autre dite de droite, les dépenses publiques ont beaucoup progressé ainsi que les impôts, les budgets publics ont été systématiquement en déficit et la dette publique s’est envolé vers des hauteurs insoupçonnées. Mais la France n’est pas une exception et tout l’Occident, Etats-Unis en tête a connu plus ou moins des errements semblables. C’est largement du au système politique en place où les citoyens propriétaires ne peuvent pas décider et où le monopole des décisions publiques est dans les mains d’oligarchies irresponsables.

    A propos d’un livre de Jacques Attali 

            « Tous ruinés dans dix ans » tel est le titre d’un ouvrage récent de Jacques Attali. Dans ce livre, l’auteur dit : « jamais, sauf en période de guerre, la dette publique n’a été aussi élevée dans les pays occidentaux ». C’est vrai mais il ne dit pas pourquoi : la vraie raison est que la démocratie représentative pure est devenue un régime oligarchique gouverné par des gérants irresponsables : politiciens mais aussi hauts fonctionnaires des finances, dirigeants de syndicats et associations irresponsables, dirigeants des medias, etc. Attali ajoute : «  jamais l’endettement n’a fait peser autant de dangers sur la démocratie ! » Là, il se moque du monde car nous ne sommes plus en démocratie sinon formellement et c’est la démocratie directe qui permettra de sortir de cette spirale infernale d l’endettement comme le montrent de façon différente les exemples islandais et suisses. Enfin, Attali propose pour réduire cette crise de réduire les dépenses publiques mais surtout d’augmenter les impôts et de réduire le pouvoir d’achat par l’inflation. Autrement dit, Attali propose de réduire les dépenses publiques mais surtout d’augmenter les impôts ou de réduire le pouvoir d’achat par l’inflation. Autrement dit, le contribuable paiera les fautes des gérants de l’Etat et des banques : c’est ce que les Islandais ont récemment rejeté par référendum. !

    La préférence pour l’immédiat

            Le livre d’Attali est superficiel. Pour comprendre pourquoi nos Etats se sont tant endettés, il faut lire les analyses du professeur d’économie Hans Hermann Hoppe, allemand vivant aux USA, sur « la préférence pour l’immédiat ». Selon lui, conformément aux travaux de l’école autrichienne libérale (von Mises et von Hayek) seuls les propriétaires et pères de famille sont prêts à investir systématiquement à long terme. Les gérants non propriétaires veulent gagner le maximum à court terme, en raison de leur statut instable de gérant. Or, notre société est dirigée principalement par des gérants : les élus politiques et les managers : ils agissent avec l’argent des autres et perdent donc toute prudence ! C’est vrai des politiciens comme des banquiers non propriétaires de leurs établissements. Le professeur d’économie Pascal Salin montre quant à lui que nous ne sommes plus en régime capitaliste car ce ne sont pas des propriétaires mais des « managers » qui dirigent et qui prennent des décisions où le court terme est l’horizon déterminant.

            La préférence pour l’immédiat est un phénomène humain universel. On préfère avoir une satisfaction immédiate plutôt qu’une satisfaction future. Ainsi, la préférence pour l’immédiat est l’ennemi de deux comportements civilisateurs essentiels qui sont l’épargne et l’investissement. Beaucoup de facteurs agissent sur cette préférence pour l’instantané : les circonstances extérieures, le temps biologique, le contexte social ou institutionnel.  Une catastrophe naturelle ou une guerre accroît la préférence pour l’immédiat. L’enfant veut « tout et tout de suite » car il néglige l’importance du temps future. La vieillesse joue un rôle analogue excepté si l’on a des enfants dont on veut assurer la prospérité future. Un sociologue cité par Hoppe, Edward Banfield explique la persistance des classes sociales par des différences de préférence pour l’immédiat chez les individus. « Les membres des classes supérieures se caractérisent par l’orientation vers le futur, l’autodiscipline, la capacité de renoncer à une gratification immédiate au profit d’un avenir meilleur, les basses classes sociales sont orientées vers l’hédonisme et la préférence pour le présent ».

            Hoppe note que les violations du droit de propriété accroissent la préférence pour l’immédiat des victimes : ces violations viennent des criminels ou de l’Etat. Un citoyen qui est dans un Etat au comportement arbitraire aura moins tendance à épargner et à investir à long terme. Par ailleurs, le criminel ou l’Etat qui porte atteinte au droit de propriété le fait parce qu’il a lui-même une préférence forte pour l’immédiat. Il veut des avantages tout de suite. Le criminel parce que c’est dans sa nature d’être dominé par son cerveau instinctif ou reptilien et l’Etat parce que le mécanisme des réélections le contraint à gérer sa carrière dans le court terme.

            Hoppe pose le problème des gérants (caretaker). Le problème est le même pour une entreprise et pour le gouvernement. Le gérant peut utiliser les ressources mais il n’est pas propriétaire du capital. Un propriétaire n’a aucun intérêt à gaspiller son capital  Pour Hoppe, le gérant a intérêt à s’endetter car il ne sera pas lui-même contraint de rembourser. Le gérant au pouvoir va pratiquer trois formes de redistribution. Les transferts d’un groupe à un autre groupe social, les services gratuits (payés en fait par le contribuable) et les règles de protection de tel ou tel groupe qui sont exigées par des lobbies économiques. Ces transferts découragent la productivité des meilleurs. Punir les gens efficaces rend la société globalement moins efficace. Pour Hoppe, un gérant au pouvoir pourra être tenté par la guerre et en politique intérieure, il augmentera les impôts et les dettes ; Autrement dit le gérant va exploiter les citoyens. La croyance que le gouvernement est démocratique émousse la résistance des citoyens. La hausse des dépenses publiques s’accompagne d’un déclin de la propriété individuelle.

    HOPPE 68 

            La préférence pour l’immédiat fait des ravages en Occident. Le comportement correspondant est celui du « je veux tout et tout de suite » des enfants mal élevés et des délinquants. Pour Hoppe, la crise démographique, la montée du crime, l’accroissement de l’endettement public et même l’invasion migratoire ont une cause commune, la préférence pour l’immédiat. Les pouvoirs publics ne défendent pas l’espace public contre les intrus avec autant d’énergie que le feraient des propriétaires privés.

            Dans le secteur privé, comme dans le secteur public, les propriétaires responsables sont marginalisés par les managers irresponsables qui négligent le long terme. Il faut responsabiliser les décideurs. En politique, Hoppe préconise la privatisation du pouvoir (retour à la monarchie !) mais on peut aussi prôner la démocratie directe, les deux n’étant nullement incompatibles comme le montre le Liechtenstein. Ses suggestions ont fait l’objet de débats passionnés aux USA mais la France est restée à côté de la discussion, politiquement correct oblige !

    Supériorité de la démocratie directe en gestion des finances publiques

            L’étude, censurée en France, des professeurs Feld et Kirchgässner (2008) montre que les outils de la démocratie directe, le référendum financier, le référendum veto, voire l’initiative populaire, permettent de réduire le niveau des impôts et des dépenses de 30%  et le niveau des dettes publiques de 50%. Ces résultats ont été prouvés par des études empiriques portant sur de longues périodes aux USA et en Suisse.

            Ils ne sont pas étonnants. Depuis longtemps, les économistes du « public choice » montrent qu’en régime parlementaire pur, les politiciens ont intérêt à faire des cadeaux à leurs électeurs et donc à augmenter les dépenses. Le financement est assuré par des impôts frappant des minorités électorales (IRPP) ou des impôts indolores (TVA) ou l’endettement qui reporte la charge sur les générations futures. Les socialistes sont passés maîtres pour faire ces largesses avec l’argent des autres mais ils ne sont pas les seuls !

            En Suisse, au niveau cantonal ou municipal existe une arme redoutable pour lutter contre cette dérive : le référendum financier. Les dépenses publiques très fortes ou les dépenses récurrentes sont en effet soumises à des référendums obligatoires. Ainsi, les citoyens de Zurich  ont refusé par deux fois la construction (très chère) d’un métro ! Ils ont préfère le tramway et le maire (socialiste) a du se résigner. Tout ce qui est palais des congrès, tours en centre-ville ou cité administrative géante est soumis au bon vouloir des citoyens qui imposent souvent le retour à la mesure et à la raison. De même, l’endettement est soumis à référendum ce qui a pour effet d’en réduire le montant. Une autre arme est le référendum facultatif ou référendum veto. Par pétition, les citoyens peuvent contester une décision de l’assemblée locale ou nationale et déclencher un référendum. C’est ainsi que les citoyens suisse ont par trois fois refusé la TVA. Celle-ci a fini par être adoptée mais avec un taux très faible. Quant à l’initiative populaire, elle a permis de réduire les impôts pour obliger les pouvoirs publics à réduire les dépenses lorsque l’outil du référendum financier n’existait pas : on se souvient de la Californie du temps de Reagan et de la proposition13 !

            Pourquoi les citoyens freinent-ils les dépenses, les impôts et l’endettement lorsqu’on les consulte ? C’est que leur argent à eux est en cause alors que les oligarques politiques, syndicaux ou de la fonction publique ou des banques jouent ave l’argent d’autrui. Dans nos sociétés occidentales, les classes moyennes ont un poids électoral prépondérant. Il s’agit souvent de petits propriétaires qui n’ont pas des réflexes de gérants à court terme ! C’est pourquoi une bonne gestion exige que la démocratie des propriétaires l’emporte sur l’oligarchie des managers. C’est ce qui se passe en Suisse.

            Petit fait significatif : la Suisse s’appelle officiellement en allemand : Schweizerische Eidgenossenschaft. On traduit à tort (y compris en Suisse) par confédération suisse. Mais le mot « Genossenschaft » signifie « association de copropriétaires ». Eid veut dire « serment ». L’expression veut dire mot à mot : association de copropriétaires unis par un serment de se défendre en commun. On est loin de l’Etat socialiste ou de l’Etat abstrait des Jacobins !

  • La guerre est là. Que faire ?

     

    Hilaire de Crémiers, directeur de Politique magazine, donne son analyse sur les évènements dramatiques que la France vient de subir.

     

    hilaire-de-cremiers-510x327.jpgLa guerre est là, devant nous. Politique magazine l’a déjà écrit à plusieurs reprises. Cette guerre nous est faite sans déclaration préalable et par tous les moyens dont le terrorisme n’est qu’un des multiples aspects. Les attentats de Paris sont des actes de guerre, a constaté le chef de l’État qui est aussi le chef des Armées. François Hollande a décrété l’état d’urgence et en a demandé la prolongation sur trois mois. Il a réuni l’ensemble de la représentation nationale en congrès à cet effet, pour souligner la gravité de l’heure, appeler au rassemblement de la nation et définir les impératifs de la sécurité de la France en précisant les mesures qui s’imposent. Le Premier ministre, de son côté, parle maintenant avec une extrême fermeté de l’éradication du terrorisme et, en conséquence, de la répression de l’islamisme radical qui l’alimente. Il invoque, lui aussi, l’union nationale nécessaire dans des circonstances aussi dramatiques.

    Situation alarmante

    La situation, en effet, est alarmante. La France est engagée à l’extérieur sur plusieurs fronts, en Afrique, au Moyen-Orient. Elle se trouve aussi partie prenante dans le dispositif en Méditerranée pour faire face à l’intarissable flux migratoire et elle s’est engagée dans l’accueil des migrants innombrables qui arrivent sans discontinuer de Syrie, de Turquie et, d’une manière générale, du sud-est de l’Europe.

    Et voilà que s’ouvre un front intérieur que les responsables politiques commencent seulement à entrevoir. Les mises en garde des services spécialisés et des autorités militaires n’avaient pas manqué ni de nombreuses alertes au cours de ces dernières années.

    Ce front intérieur face à un ennemi de l’intérieur constitué en ce qui s’appelle communément « une cinquième colonne », exigera, à cause de son indétermination fondamentale, beaucoup d’hommes, beaucoup de moyens et d’efforts, beaucoup de dépenses aussi, sans garantie aucune, en raison du pourrissement prévisible de la situation et surtout en raison du mode opératoire du terrorisme islamique. Ce qui n’était qu’actes individuels devient actes collectifs dont la logique suppose la répétition et la coordination. Leur fréquence et leur violence ne cesseront d’augmenter.

    Que faire contre l’horreur terrifiante d’attentats frappant les citoyens au hasard et, pourtant, en tant qu’actes, méticuleusement voulus, programmés, préparés, conceptualisés, réalisés par des hommes fanatisés et déterminés ? L’atrocité y est conçue comme une perfection de l’acte ! Il faut donc comprendre que le terrorisme répond à une stratégie, constitue en lui-même un but de guerre ; il se relie à une vision militaire de l’islamisme ; l’armée djihadiste, les armées même puisqu’elles sont nombreuses et souvent s’entretuent, mènent leur combat sous toutes les formes, sur tous les fronts, par tous les moyens, en territoires qui relèvent de l’islam, comme en territoires extérieurs à conquérir. La conception est globale, religieuse, politique, militaire ; cette conception même se prétend un État – mais quel État ? – un califat qui a vocation à dominer le monde et à y imposer sa loi.

    Nul ne sait au juste ce que c’est que cet État, ni qui se cache sous ce nom, ni ce qu’il représente, ni de quoi il vit et comment il vit. Très peu de nos responsables politiques ont compris cet aspect des choses. Ils se croyaient couverts par leur laïcité qui ne fut jamais en son temps et encore maintenant qu’une machine de guerre contre le catholicisme français et qui n’est qu’un vide, une prétendue neutralité gentille, face à l’islam, c’est-à-dire une absence totale de réponse.

    Des mesures insuffisantes

    Autre inquiétude : c’est qu’il apparaît clairement que ce genre d’ennemis est maintenant chez nous partout. Ils surgissent de territoires dont il est vain d’affirmer qu’ils sont contrôlés, les fameux « territoires perdus » de la République. Là aussi les responsables politiques feignaient de les ignorer.

    Des banlieues entières, aujourd’hui des quartiers de villes échappent pratiquement à l’autorité de l’État, en France, en Belgique et, en fait, pratiquement dans toute l’Union européenne. Les armes s’y entassent ; les gens s’y radicalisent ; le banditisme y fait la loi : tous ces symptômes de gangrène sociale sont liés ; les prisons sont des lieux de radicalisation. L’Europe de Schengen a créé un espace où les brigands et les terroristes armés peuvent circuler pratiquement en toute impunité et de là partir en Syrie ou ailleurs pour en revenir en choisissant les moyens de leur départ et de leur rentrée.

    Les mesures dictées par François Hollande sont toutes dans le quantitatif, certes, sans doute, nécessaires, mais insuffisantes devant la menace multiforme. Plus de gendarmes, plus de policiers, plus de juges et des militaires encore plus présents ne sont que des ripostes mais ne constituent pas une réponse de fond à la question. Pas plus que la multiplication des bombardements par l’aviation française.

    Nous ne sommes qu’au début d’un processus qui n’ira qu’en s’amplifiant et d’autant plus que les réponses qui seront apportées seront d’abord en discours, en attitudes prises sous le coup de l’émotion et avec des visées politiciennes et des arrière-pensées inavouables. Le politicien joue de tout, y compris de la peur. Chacun fera son affaire des événements, à sa manière et pour son compte ; le soupçon parfaitement compréhensible en pèsera sur les autorités en place. Affreux à dire, mais, hélas, terriblement réaliste.

    Manque de compréhension

    Ceux qui se souviennent encore de la guerre d’Algérie – il y a beaucoup de ressemblances – comprennent parfaitement cette logique de guerre civile qui s’enclenchent inéluctablement. A l’époque de l’Algérie française, l’État français par la voix de ses ministres – dont François Mitterrand – avait assuré, répété que jamais, au grand jamais, la République ne céderait au terrorisme. Or, non seulement elle a cédé, mais elle s’est déshonorée puisqu’elle a livré les musulmans fidèles à la France à leurs adversaires et tortionnaires, ce qui fut un crime contre l’humanité.

    La parole de la République n’est plus fiable et, les premiers à le savoir, ce sont malheureusement les Français musulmans. N’oublions pas que le gouvernement républicain de l’époque avait envoyé l’armée dans ces territoires qui relevaient de la souveraineté française, qu’il avait mobilisé le contingent ; c’était des socialistes qui étaient au pouvoir ; ils décrétaient l’état d’urgence. Comme aujourd’hui. Aujourd’hui, c’est en métropole ! François Hollande envisagerait de rappeler des réservistes en forme de garde nationale. Ce fut fait en Algérie avec les unités territoriales. Rien de nouveau.

    Les responsables politiques ont la chance d’avoir encore des services relevant des fonctions régaliennes de l’État qui fonctionnent bien et, pour certains, excellemment, avec des moyens pourtant trop limités. Ces services font leur travail. Mais déjà tout ce que l’on sait des enquêtes révèle des défaillances internes à l’État : sous prétexte de justice, de lois, de considérations humanistes, voire de politique pénale, les bandits, les assassins, les terroristes échappent à la répression nécessaire, tandis que les honnêtes citoyens sont harcelés de contrôles. Les impératifs de l’ordre et, aujourd’hui, de la guerre sont occultés, systématiquement bafoués. A tel point que les forces de l’ordre en son dégoûtés.

    Il ne s’agit pas de revenir sur l’état de droit, ni même d’en rajouter dans les mesures d’exception. Une réforme constitutionnelle supplémentaire telle que l’a proposée François Hollande n’apportera rien. Ce qui existe aujourd’hui suffit amplement. Il s’agit de savoir ce que l’on veut. Et la seule vraie question est de savoir si le régime sait lui-même ce qu’il veut. Sur le moment, de beaux discours sont prononcés, des postures martiales sont affichées, des décisions sont prises ; mais aucune politique de fond, aucune stratégie proprement française ne se dégage.

    Il est évident que la politique intérieure et la politique extérieure doivent être coordonnées intelligemment et s’aligner sur les mêmes nécessités. Il a fallu une tuerie pour que l’Exécutif s’en rende compte ! Poutine combat les mêmes ennemis que nous. Il se dit de plus en plus que Laurent Fabius fut le plus calamiteux des ministres des Affaires étrangères. Il est temps de s’en apercevoir.

    De terribles contradictions

    Mais que dire de nos politiques pénales, de nos politiques migratoires, de l’ordre intérieur constamment remis en cause, de l’Éducation dite nationale, de nos politiques familiales ? Le souci premier de nos gouvernants ne fut que de détruire tout ce qui constituait la France, son histoire, ses frontières, ses familles, ses entreprises. Le chef de l’État semble aujourd’hui prendre conscience que les frontières sont utiles et même nécessaires. Espérons que dans son esprit cette conscience ne soit pas que temporaire.

    Que penser de nos manières d’envisager d’intéresser à la France toute une jeunesse abandonnée, quand, partout et toujours, l’État lui-même ne lui apprend qu’à la mépriser. Croit-on qu’on les attachera à la République en leur enseignant le rejet de l’histoire de France, en culpabilisant la France et les Français à longueur de temps ? La République n’est-elle pas née du sang jailli d’une tête coupée, de milliers de têtes coupées et d’une terreur organisée jusqu’au génocide ? N’est-ce pas là qu’elle prétend puiser sa légitimité ? Le monde entier le sait. Les Pol Pot, les Ho Chi Minh, les chefs du FLN avaient appris leur leçon chez nous ! Lénine et Staline y ont vu leur archétype, les terroristes du monde entier un exemple. Où est l’esprit national, la volonté de défense, l’intelligence de l’avenir ?

    Il ne faudrait pas que la réponse du moment ne soit faite que pour l’électeur, justement terrifié. Et comment ne pas penser que le politicien, habitué à jouer de tout, ne jouera pas aussi de la peur ? Mais la peur n’est pas bonne conseillère. Les élections vont venir où tous les responsables politiques sont impliqués avec leurs petites tactiques à courtes vues. Il est impossible de construire une politique française sur de telles bases. Tout sera sujet non seulement à discussions, mais à controverses et à oppositions systématiques. Dans un climat délétère, les luttes partisanes peuvent allumer des incendies et déboucher, dans le pays, sur les pires violences. Les organisations terroristes auront beau jeu. Surtout si la France, ce qui est probable, retraverse une crise financière et budgétaire aggravant encore la crise économique et politique.

    La vérité est que personne en France ne maîtrise la situation. Parler d’unité nationale, c’est bien, mais où est l’unité de pensée, de vision, de décision, de contrôle ? Nos élections présidentielles seront un capharnaüm sans nom. Le pays en sortira divisé plus que jamais et vraisemblablement ingouvernable. Or l’ennemi connaît cette faiblesse essentielle et il n’est pas douteux qu’il en usera.

    Il vient un temps où les sociétés pour survivre doivent se donner des institutions adaptées. La vraie réforme est à faire à ce niveau. 

  • Martinique, ”Vendée créole” : la victoire des royalistes sur les républicains en 1794...

    vendée créole.jpg

    Vendée créole - La chouannerie en Martinique, Odile de Lacoste Lareymondie, Via romana, 2015, 89 pages, 15 euros

    Quatrième de couverture :

    Histoire inconnue du grand public et ignorée des manuels scolaires, la victoire de la Vendée créole contre la République en 1794 fut celle des blancs, mulâtres et noirs unis dans une même résistance à la barbarie révolutionnaire.

    Mais quelles furent les motivations, les figures et les campagnes de cette armée fidèle à son Dieu, fidèle à son roi ? Qui connaît encore l'incroyable destinée de son chef, Bernard de Percin, le Charette de la Martinique, celle de Dubuc de Marcoussy le fier artilleur, de Sainte-Catherine et Montlouis Jaham à la tête de leurs compagnies d'hommes de couleur ?

    Odile de Lacoste Lareymondie est la descendante directe de ce Percin-canon dont elle fait revivre l'épopée, ce "triomphe des humbles sur les chimères des coupeurs de têtes jacobins".

    Sa courte monographie se lit très facilement mais, surtout, très agréablement et très utilement, car elle rend bien compte de l'essentiel : dans une société raffinée, sur une île paradisiaque, dans un monde où tout respirait la joie de vivre, l'irruption foudroyante de la folie sanguinaire des idéologues.

    On pense évidemment à Talleyrand : "Qui n'a pas vécu dans les années voisines de 1789 ne sait pas ce que c'est que le plaisir de vivre", mais aussi à ce passage de la correspondance entre Voltaire et Frédéric II de Prusse, que Gustave Thibon aimait à citer, dans lequel Frédéric écrit : "Nous avons connu, mon cher Voltaire, le fanatisme de la Religion; un jour, peut-être, connaitrons-nous celui de la Raison, et ce sera bien pire !..."

    C'est ainsi que commence l'histoire contée par Odile de Lacoste Lareymondie : dans la douceur de vivre, l'insouciance, la légèreté. Puis, très vite, les choses s'accélèrent : de la métropole n'arrivent plus que des nouvelles de fureur, de Terreur; et, surtout, de sinistres représentants d'un pouvoir fanatique, intolérant, brutale et, très bientôt, sanguinaire... :

    Donatien de Rochambeau.jpg(page 78) "...Rochambeau est vainqueur (ci contre; il est le fils du Rochambeau envoyé par Louis XVI  aux Amériques, ndlr). Il est maître de la Martinique, installe toutes les lois de la Convention nationale : tribunal révolutionnaire, guillotine, chasse aux clercs, fermeture des églises, confiscation des biens des émigrés.

    Alors commence une chasse aux esclaves perdus ou enfuis, les nègres marrons, ceux qui n'ont plus de maîtres, plus de maison, et il les fait fermement rentrer dans leur état d'esclaves, et les répartit sur les habitations encore debout.

    La Martinique s'enferme dans la Terreur révolutionnaire, coupée de ses voisins par un blocus décidé par Rochambeau, pour empêcher le retour des émigrés et des Anglais..."

    Mais la Martinique ne va pas se laisser faire, et Bernard Percin va devenir le symbole de la résistance, dont le point d'orgue sera l'action dite "Bataille de l'Acajou", qui se déroula sur les deux jours des 24 et 25 septembre 1970...

    (page 36) : "...Le 24 septembre 1790, un détachement de la garde nationale quitte Fort-Royal : ils sont vingt, commandés par Labarthe, un pharmacien, pour chercher des vivres, des hommes et des mulets... Prévenu par ses guetteurs (...) Bernard attend le signal chez son ami Barthouil, dans la plaine du Lamartinique lamentin.jpgmentin (ci contre) (...) Avec ses mulâtres, il fond sur le détachement. Tapis dans les marais, les hommes tirent et font mouche avec leurs fusils. Plusieurs révolutionnaires tombent; Bernard se réserve Labarthe. Il avance vers lui et, de ses deux pistolets, l'abat. Le reste de la petite troupe s'enfuit..."

    Ensuite, Bernard va tendre un piège aux républicains, venus venger leurs camarades, et les attaquer, exactement comme le faisaient vendéens et chouans :

    (pages 37 à 40) : "...Nous sommes le 25 septembre 1970, en pleine saison des pluies, et le niveau de la mangrove est assez haut (...) et l'ennemi arrive : 1.400 hommes sortent de Fort-Royal pour se diriger sur le Lamentin, puis le Gros-Morne. 600 hommes au Pain de Sucre, sur la côte atlantique, doivent les rejoindre au Gros-Morne sous les ordres de Bacquié. Chabrol, à la tête de 500 soldats, se sépare de la colonne et choisit un autre sentier pendant que Dugommier et ses 900 hommes avancent en direction de l'Acajou où ils doivent faire leur jonction. Les grenadiers sont en tête, quatre pièces d'artillerie suivent; tous ces hommes ont chaud, ils sont moites, et une grosse pluie tropicale s'abat sur eux.

    Arrivés trempés à la Trompeuse, ils s'engagent sur le chemin encombré de débris d'arbres, de cocos, de palmes, d'arbres du voyageur éparpillés. Les habitants (surnom donné aux "locaux", face aux républicains venus de métropole, ndlr) laissent l'ennemi approcher, avancer au milieu de cette barricade, au pas, les chevaux hennissent, leurs pattes empêtrées dans ces obstacles, toute la troupe se retrouve dans ce dédale au ralenti.

    Dugué, fils, les observe, tapi avec ses 150 hommes dans la végétation luxuriante qui marquait la frontière avec la mangrove. Il ouvre le feu sur la queue de la colonne, qui est décimée par les tirs.

    martinique case navire.jpgBernard de Percin, depuis les hauteurs de l'Acajou, assiste au début de l'offensive. Il se met en marche en direction de l'habitation Jorna de la Calle pour attaquer par le flanc et renforcer Dugué. Au grand galop, il tire sur le milieu de la colonne, à la tête de sa petite troupe. (illustration : Case-Navire d enos jours, où vivait Bernard de Percin)

    Courville et Dugué père, à l'Acajou, sur l'habitation Levassor, attendent, prêts à recevoir la tête de colonne qui a pu s'extraire de la barricade. Ils l'accueillent par des décharges de fusil.

    Les patriotes sont en situation critique, harcelés sur trois côtés. Les habitants et les hommes de couleur, tous habiles chasseurs, abrités derrière les arbres, tirent à coup sûr.

    Dugommier crie ses ordres mais les patriotes sont affolés, fuient en désordre, c'est la mêlée puis le carnage. Bernard décharge ses deux pistolets à la fois sur tout ce qui bouge, il brise son épée en combattant puis se lance à la cravache sur les canons; corps à corps, les artilleurs défendent leurs pièces, Lacoste saute sur un soldat, Perrcin prend l'autre et lui casse la tête à coup de crosse de son pistolet puis s'empare du canon. Il le point contre l'ennemi et en abat 22.

    Le chemin est inondé de sang, couvert de cadavres. La moitié de la colonne (470 hommes) reste sur le champ de bataille, l'autre a pris la fuite avec Dugommier... Dugué, Lacoste, Courville, Passerat de la Chapelle ont fait 70 prisonniers. Bernard donne l'ordre à ses hommes de ramasser fusils, sabres, munitions et, fier, avec son canon, remonte au Gros-Morne suivi des trois autres pièces d'artillerie.

     

    Gribeauval 2.jpg

    Les canons en service dans l'armée royale, sous Louis XVI, étaient ceux dits "de Gribeauval", très certainement les meilleurs du monde en leur temps (voir notre Ephéméride du 9 mai)...

     

     

    Le gouverneur en les voyant arriver avec leur trophée s'adresse à Bernard :

    - Bernard, vous êtes le plus remarquable des chefs du parti de la campagne, grâce à votre courage, vous avez pris un canon, seul, à la cravache. Nous vous devons la victoire. Cette bataille de l'Acajou va galvaniser nos troupes.

    - Vive Percin, vive Percin-Canon, crie la foule des femmes et des enfants.

    Le camp, couvert de gloire, s'endort dans la nuit tropicale bruissante. Victoire et son père sont rassurés : Bernard est vivant, ils ont gagné, peut-être pourra-t-on rentrer à Case-Navire et reprendre la vie paisible d'avant ? (fin du chapitre, page 40).

    Malheureusement, la guerre civile follement déclenchée en métropole par la folie sanguinaire des idéologues révolutionnaires totalitaires va s'exporter "aux îles"; et il va falloir se battre, encore, pour préserver la liberté de l'homme intérieur contre les fanatiques de la Raison...

    vendee coeur.jpg(page 56) : "...Le 13 décembre 1792, l'Assemblée coloniale déclare la guerre à la France républicaine. Les colons et l'Assemblée, sous l'autorité du gouverneur Béhague, proclament :

    "Autorisés par les princes, frères du roi, ils conserveront le pavillon blanc et ne recevront aucune li ni nouvelles forces de la métropole, jusqu'à ce qu'elle soit en paix, qu'en conséquence de l'état déplorable du royaume, ils ouvrent leurs portes à toutes les nations commerçantes d'Europe et d'Amérique."

    Bernard de Percin et Gallet de Saint-Aurin se regardent, amers, eux qui ont combattu avec leurs pères les Anglais pendant des années, ils sont obligés maintenant de faire appel à eux, pour se protéger de leur mère-patrie, la France, qui les trahit..."

    A partir de là, tout va très vite : le 10vril 1793, les royalistes s'emparent du Fort de la Trinité, après avoir neutralisé les batteries du Fort du Marin, tenues par les républicains. C'est toujours l'héroïque et indomptable Bernard Percin, Percin-Canon, qui mène les assauts victorieux : "Si dans cent ans - dit-il - on exhume mes ossements et qu'on les heurte les uns contre les autres, le son qui en sortira sera celui de "Vive le Roi !"..."

    "...En quelques jours, ils se rendent maîtres de Case-Pilote, du Gros-Morne, de Trinité, du Robert, du François, du Lamentin et du Marin. Une grande partie de la population, restée très attachée aux Bourbons et au clergé, les soutient activement..."(page 66). Bernard Percin a choisi d'établir un camp fixe, où il concentrera ses nombreuses prises (armes, canons, munitions...) : ce sera le Camp-Décidé. Rochambeau vient l'attaquer. Il a fait prisonnier Jaham Desrivaux, fidèle compagnon de Bernard, et l'un des meilleurs parmi les royalistes. L'assaut de Rochambeau est un désastre pour lui : humilié, affaibli par la perte de tant d'hommes et de matériel, il se venge en faisant fusiller Jaham. Pourtant, Bernard Percin était prêt à se rendre, seul, en échange de la vie de son ami et lieutenant... "Au petit matin, on vit avancer sur la savane de République-ville Jaham Desrivaux, escorté d'un détachement de soldats. Sur sa figure régnait une expression sublime et héroïque car il venait de refuser la vie qu'on voulait lui conserver à la condition de renier son parti et ses opinions. Il tomba et mourut comme il avait vécu, brave, et dévoué à Dieu et au Roi..."

    Héroïsme pur, noblesse de l'âme et du coeur, sommets du dévouement : face à la plus ignoble et à la plus implacable des barbaries qu'elle ait eu à connaître dans son Histoire, partout la France suscitait des modèles et des héros; ainsi s'accomplissait, ainsi se vivait cette sentence de saint Paul, "Où le péché abonde, la grâce surabonde..."

    Peu de tempTERREUR.jpgs après, Rochambeau réussit un coup de main sur Vert-Pré : cette défaite obligera Bernard Percin à abandonner le Camp-Décidé. Il faudra même fuir temporairement vers Trinidad (dans une zone appartenant aux Anglais et aux Espagnols) : "...Rochambeau est vainqueur. Il est maître de la Martinique, installe toutes les lois de la Convention nationale : tribunal révolutionnaire, guillotine, chasse aux clercs, fermeture des églises, confiscation des biens des émigrés... La Martinique s'enfonce dans la Terreur révolutionnaire..."

    Mais, heureusement, cela ne va pas durer, et les royalistes vont revenir, bien plus vite que n'aurait pu l'imaginer Rochambeau... Ce sera le 5 février 1794 : les Anglais, contre qui les Français ont si souvent combattu, naguère, et qu'ils ont si souvent vaincus, aident cette fois-ci les royalistes à revenir "chez eux", où Rochambeau ne dispose plus que de 900 hommes, qu'il a fractionnés en trois parties égales.

    "...A peine une année, et les voilà, émus, à nouveau sur leur terre..."

    Il faudra malgré tout quarante-trois jours de siège pour venir à bout du dernier des trois fortins, où s'est retranché Rochambeau : son nom est tout un symbole, Fort-La-Convention ! : "...Ce 22 mars 1794, la Martinique se met sous la protection des Anglais, avec l'accord des colons. Elle garde le drapeau blanc des Bourbons. Cette protection durera sept ans, jusqu'à la paix d'Amiens, où Napoléon Bonaparte signera la paix avec les Anglais et récupèrera ainsi la Martinique.

     "...Grâce à cet épisode, que l'on a appelé la "Vendée créole", et grâce à son chef Bernard de Percin, la Martinique n'aura pas connu longtemps les troubles révolutionnaires. Les idées républicaines n'auront pas eu le temps d'imprégner les esprits... C'est ainsi que, contrairement à la Guadeloupe, la Martinique a gardé pendant tout le XIXème siècle, et longtemps après, des habitudes et coutumes d'Ancien Régime. La plupart des colons ont pu rester sur place, et y sont encore. Cela fait le charme de cette île à l'atmosphère un peu Vieille France..."

  • Disparition : Max Gallo, l'historien amoureux de la France

    Max Gallo et le Prince Jean de France  à la Sainte Chapelle [2009]

     

    L’académicien français Max Gallo est mort le 18 juillet 2017 à l’âge de 85 ans. Il avait dialogué avec le Prince Jean, dans Le Figaro magazine, en novembre 2009 (Photo). Max Gallo venait de publier un livre d'histoire des premiers capétiens, le Prince Jean son ouvrage Un Prince français. On pourra retrouver trace de leur entretien - Jean d'Orléans et Max Gallo, la France au coeur - dans Lafautearousseau*.

    Pour Figarovox, Paul-François Paoli a évoqué, dès hier soir, son souvenir dans l'intéressant article repris ci-dessous.  LFAR

     

    Atteint de la maladie de Parkinson depuis plusieurs années, Max Gallo nous a quittés mardi, à l'âge de 85 ans. Historien de vocation mais aussi romancier et essayiste à succès, Max Gallo était entré à l'Académie française le 31 mai 2007, où il avait succédé à son ami Jean-François Revel. Une consécration pour ce fils d'immigrés italiens, né à Nice le 7 janvier 1932, quivouait à la France un véritable culte, qu'il exprimera à travers son œuvre et son action politique.

    Après avoir obtenu un CAP de mécanicien ajusteur puis un bac mathématique et technique au lendemain de la Libération, Max Gallo allait poursuivre des études littéraires et développer une passion pour l'histoire qu'il étudie à l'université. Devenu agrégé, puis docteur en histoire, il enseigne au lycée Masséna à Nice et à l'université de cette même ville et enfin donne des cours à Science Po Paris à partir de 1968. Une ascension sociale et intellectuelle commence pour ce jeune provincial qui a très fortement ressenti les différences de classe et ne se sent pas à l'aise avec les enfants de la bourgeoisie parisienne. Ayant adhéré à 17 ans au Parti communiste qu'il identifie à la Résistance, il rompt après la mort de Staline et devient un anticommuniste convaincu tout en continuant de se situer à gauche jusque dans les années 1990. Ses premiers romans, notamment Le Cortège des vainqueurs, publié en 1972, qui raconte la destinée d'un jeune fasciste italien jusqu'aux années 1975, sont imprégnés par les drames politiques de son temps. Depuis la célèbre Baie des Anges, saga niçoise publiée en 1976, qui connaîtra un grand succès - plus de 700 000 exemplaires vendus - à La Machinerie humaine, suite de 11 romans publiée entre 1992 à 2002 qui peut se lire comme une enquête sur la France des années 1990, l'œuvre romanesque de Max Gallo, qui compte une cinquantaine de romans, est toujours liée aux enjeux d'une histoire collective à laquelle des individus en quête de destin sont confrontés.

    «Dans mes romans, le plafond est bas, il pèse, il écrase, mais mes personnages se battent quand même. Beaufort, le personnage principal de La Part de Dieu (1996, Fayard), est un homme apparemment sans espoir. Il a perdu sa fille et ne se fait plus guère d'illusions sur l'amour. Malgré tout il se bat. Pour quelle raison? Il est simplement plus digne pour un homme de rester debout le plus longtemps possible», écrit-il.

    Ayant dû faire un choix entre sa vie à Nice à la fin des années 1960 et son existence à Paris, Max Gallo choisit la seconde option, laquelle ne sera pas sans conséquences sur sa vie de famille. Le jeune Niçois devient parisien, et bientôt une figure de la vie intellectuelle parisienne.

    Il écrit d'abord des romans de politique-fiction sous le pseudonyme de Max Laugham. En 1971, il prête assistance à Martin Gray pour la rédaction d'Au nom de tous les miens, histoire romanesque d'un jeune rescapé du camp de Treblinka. Le livre rencontre un immense succès. Ce sera pour Gallo le premier d'une très longue série de best-sellers.

    Puis à partir des années 1980, cet écrivain infatigable publie des biographies consacrées à Robespierre, Garibaldi, Jaurès ou Jules Vallès.

    Sa série de quatre tomes sur Napoléon, publiée en 1997 chez Robert-Laffont (Le Chant du départ, Le Soleil d'Austerlitz, L'Empereur des rois, L'Immortel de Sainte-Hélène), est un des points culminants de sa carrière d'auteur aussi populaire que prolifique: désormais Max Gallo privilégie systématiquement la part de lumière de l'Histoire de France. Ses livres visent explicitement à célébrer, à élever plutôt qu'à critiquer. C'est pour l'ancien professeur le seul moyen de faire aimer la France à la jeunesse, notamment d'origine immigrée.

    Doté d'une énergie physique exceptionnelle, l'homme est debout à l'aube. Il travaille comme un chef d'orchestre. Devant lui, des chevalets où sont disposés les matériaux historiques et biographiques de ses travaux en cours. Gallo tape directement ses ouvrages sur une vieille machine à écrire, comme il le ferait sur un piano. Ses livres dépassent bientôt la centaine de titres.

    Parallèlement à son travail d'écrivain prolixe, Max Gallo poursuit une carrière d'éditorialiste à L'Express, qu'il rejoint à partir des années 1970 sur la demande de son ami Jean-François Revel, puis il prend la tête de l'éphémère Matin de Paris dans les années 1980.

    Après la victoire de François Mitterrand en 1981, l'écrivain adhère au Parti socialiste et se présente aux élections municipales de Nice qui l'opposent à Jacques Médecin durant une campagne violente qui verra son adversaire l'emporter. Ayant rencontré Mitterrand dans une émission d'Apostrophes, il garde de la politique une vision singulière, nourrie par l'histoire. Devenu secrétaire d'État et porte-parole du gouvernement en 1983 (il se dote d'un directeur de cabinet nommé François Hollande), il ne tarde pas à marquer des distances avec le Parti socialiste, où il ne s'est jamais senti à son aise, dira-t-il plus tard. Il réprouvera ce qu'il appellera le cynisme de Mitterrand concernant la montée du Front national tout en poursuivant sa carrière de député européen.

    En 1983, il publie une tribune retentissante intitulée Le Silence des intellectuels, initiative spectaculaire à gauche, qui montre que son auteur n'entend pas se faire dicter sa parole et son comportement.

    Il rompt officiellement avec le PS en 1992 pour fonder le Mouvement des citoyens avec Jean-Pierre Chevènement, parti dont il devient le président et participe à la campagne du non au traité de Maastricht avec Philippe Seguin. Durant les élections européennes de 1999, il soutient Charles Pasqua et Philippe de Villiers à la tête d'un éphémère Rassemblement pour la France. Enfin, en 2002, il participe activement à la campagne présidentielle de Jean-Pierre Chevènement et intervient comme orateur dans ses meetings, regrettant toutefois que son ami n'ait pas réussi à faire le lien avec les «Républicains de l'autre rive», ceux de la droite souverainiste.

    Sa participation régulière à l'émission L'Esprit public de Philippe Meyer, avec Jean-Louis Bourlanges et Yves Michaud, en font une voix familière et aimée des Français. Il se révèle un formidable pédagogue et, fort de son délicieux accent niçois, un excellent conteur.

    Durant ces années, Max Gallo engage une réflexion sur la destinée de la France et développe l'idée d'une «crise nationale» qu'il compare à la guerre de Cent Ans, crise qui aurait débuté après la Première Guerre mondiale et se poursuit aujourd'hui. Il publie plusieurs livres liés à ce thème, notamment Fier d'être français puis L'âme de la France, histoire de la nation des origines à nos jours, pour dénoncer la notion de repentance historique qui se développe à partir des années 2000 et encourt l'ire de ceux qui lui reprochent de mettre en doute le fait que le rétablissement de l'esclavage aux Antilles par Napoléon relève du «crime contre l'humanité». Max Gallo sera poursuivi en justice mais ses accusateurs seront déboutés.

    Il participe aussi à la polémique engagée en 2005 par un groupe d'historiens, dont Pierre Nora et Jacques Julliard, qui refusent, au nom de la «liberté pour l'histoire» une réécriture du passé à l'aune des lois mémorielles, notamment celles ayant trait au « crime contre l'humanité ». Cette évolution vers la droite conduira l'auteur de la Lettre ouverte à Robespierre sur les nouveaux Muscadins, pamphlet paru en 1986, peu avant le bicentenaire de la Révolution française, à reconsidérer l'événement dans un sens plus critique. Avec le temps, Max Gallo, tout en restant jacobin, s'est rapproché de la vision de François Furet.

    En 2007, il soutient la candidature de Nicolas Sarkozy qu'il qualifiera de «républicain d'autorité» et rédigera plusieurs grands discours sous son quinquennat, notamment celui consacré au dernier poilu de la guerre de 14, Lazare Ponticelli.

    Quand il entrera à l'Académie française, le 31 janvier 2008, reçu par Alain Decaux, le président de la République sera présent, privilège rare sous la Coupole.

    Toutes ses activités d'acteur de la vie publique ne le détournent pas de son travail d'écrivain qui publie parfois jusqu'à trois livres par an. Il multiplie les grandes séries consacrées ici à la vie du général de Gaulle, là à celle de Saint Louis, Louis XIV, Victor Hugo, Richelieu. La Résistance, le Moyen Âge, les premiers temps de la chrétienté, rien ne paraît étranger à cet esprit insatiable, curieux de tout savoir, de tout comprendre.

    En 2013, il convient avec son éditeur et ami Bernard Fixot qu'il publiera durant les cinq années qui viennent une série sur le premier conflit mondial, chaque volume portant spécifiquement sur une année de guerre. Dès la fin de 2014, les cinq volumes sont déjà écrits, et bientôt publiés. Son rythme de travail défiait les lois de l'édition. Seule la maladie le contraindra à ralentir son activité et ses publications en rafale.

    Républicain dans l'âme et gaulliste de conviction, Max Gallo se définissait comme catholique. À ses yeux l'identité de la France, mais aussi de l'Europe, était inséparable de l'empreinte chrétienne et il ne cachait pas ses inquiétudes quant à la progression de l'islam, un thème que l'on retrouve d'ailleurs dans un de ses romans, La Part de Dieu.

    Homme d'une puissance intellectuelle exceptionnelle, porté par le succès, il aura vendu plusieurs millions d'ouvrages en un demi-siècle - Max Gallo aura marqué son époque en devenant un intellectuel dont les points de vue comptaient.

    Dans Histoires particulières (CNRS, 2009) et dans ses Mémoires, L'oubli est la ruse du diable, il rendit un hommage appuyé à son père qui lui avait inculqué l'amour de la France et le culte de la volonté qui peut permettre à un homme de vaincre la fatalité de l'origine. Il aimait voir en lui l'exemple d'une histoire d'immigration réussie par le travail et l'intégration. « Français de préférence », comme l'avait écrit Aragon…

    Son inlassable activité, ses livres en cascade cachaient un drame intime: le suicide en 1972 de sa fille de seize ans. Cette blessure était toujours à vif. Elle ne fut pas étrangère à son retour à la religion comme il l'avait confié dans la préface d'un de ses livres. Max Gallo cherchait l'apaisement à sa souffrance de père dans le travail. Il va le trouver, désormais, dans le repos éternel.  

    Paul-François Paoli

    Il trace son sillon : le Prince va à la rencontre des gens

  • Olivier Rey : La politique n'existe plus. Elle s'est évaporée dans la « planétarisation » (2/2)

     

    Par Alexis Feertchak et Vincent Trémolet de Villers     

    Le philosophe et mathématicien Olivier Rey a accordé au FigaroVox [5 & 6.08] un grand entretien dont nous avons publié hier la première partieDans cette seconde partie, il expose comment le monde actuel connaît un processus de planétarisation, à dominante largement économique, où la politique se dissout. Nous n'ajouterons rien à ce déjà long entretien où beaucoup de choses essentielles sont dites. Il s'agit ici d'y réfléchir et, le cas échéant, d'en discuter tel ou tel élément, d'en débattre. Nous avons affaire ici, de toute évidence, à une critique de fond de la modernité ou postmodernité.  LFAR

                

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    Le langage commun dit « on n'arrête pas le progrès ». Est-ce vrai ?

    Ce que désigne ici le mot progrès est le développement technique. Dans un régime capitaliste et libéral, orienté vers le profit, l'appât du gain ne cesse de stimuler ce développement, qu'on appelle désormais « innovation ». Réciproquement, toute technique susceptible de rapporter de l'argent sera mise en œuvre.

    On pourrait penser que les comités d'éthique contrecarrent le mouvement. Tel n'est pas le cas. Jacques Testart (biologiste ayant permis la naissance du premier « bébé éprouvette » en France, en 1982, et devenu depuis « critique de science », ndlr) considère que « la fonction de l'éthique institutionnelle est d'habituer les gens aux développements technologiques pour les amener à désirer bientôt ce dont ils ont peur aujourd'hui ». Ces comités sont là pour persuader l'opinion que les « responsables » se soucient d'éthique, et ainsi désarmer ses préventions. Quand une nouvelle technique transgressive se présente, le comité s'y oppose mais, en contrepartie, avalise d'autres techniques un tout petit peu moins nouvelles ou un tout petit peu moins transgressives. Finalement, les comités d'éthique n'arrêtent pratiquement rien, ils se contentent de mettre un peu de viscosité dans les rouages. Ils ont un rôle de temporisation et d'acclimatation.

    Dans le domaine environnemental, il y a aujourd'hui une certaine prise de conscience. Pourquoi cette prise de conscience dans le domaine écologique n'est-elle pas étendue au domaine sociétal ?

    Le lien entre la destruction des milieux naturels et certaines actions humaines est flagrant, ou à tout le moins facile à établir. En ce qui concerne la vie sociale, beaucoup s'accorderont à penser que la situation se dégrade, mais les causes de cette dégradation sont multiples et les démêler les unes des autres est une entreprise ardue. Les initiatives « sociétales » jouent certainement un rôle, mais compliqué à évaluer, d'autant plus que leurs conséquences peuvent s'amplifier au fil des générations et, de ce fait, demander du temps pour se manifester pleinement. Dans ces conditions, il est difficile de prouver les effets néfastes d'une loi et, y parviendrait-on, difficile également de faire machine arrière alors que les mœurs ont changé.

    En matière d'environnement, la France a inscrit dans sa constitution un principe de précaution : lorsqu'un dommage, quoique incertain dans l'état des connaissances, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités doivent évaluer les risques et prendre des mesures pour prévenir ce dommage. Ce principe, sitôt adopté, a été détourné de son sens : on l'invoque à tort et à travers pour de simples mesures de prudence - ce qui permet de ne pas l'appliquer là où il devrait l'être. (On parle du principe de précaution pour recommander l'installation d'une alarme sur les piscines privées, mais on oublie son existence au moment de légiférer sur les pesticides ou les perturbateurs endocriniens qui dérèglent et stérilisent la nature.) L'expression « principe de précaution » mériterait de voir son usage restreint aux cas qui le méritent vraiment. En même temps, cet usage devrait être étendu aux mesures « sociétales », dont les effets sur le milieu humain peuvent être graves et irréversibles. La charge de la preuve doit incomber à ceux qui veulent le changement, non à ceux qui s'en inquiètent.

    On parle de plus en plus souvent du clivage entre le « peuple » et les « élites ». Qui est à l'origine des lois sociétales ? Est-ce la société dans son ensemble, le droit ne faisant que s'adapter, ou sont-ce au contraire les « élites » qui tentent de changer celle-ci par le truchement du droit ?

    Je suis réservé à l'égard des partages binaires de l'humanité. Par ailleurs, il me semble que le problème central aujourd'hui tient moins à l'existence d'élites qu'au fait que les prétendues élites n'en sont pas. Je veux dire que certaines personnes occupent des places en vue ou privilégiées. Mais il suffit de les écouter parler ou d'observer leur comportement pour comprendre qu'elles constituent peut-être une caste, mais certainement pas une élite ! Le risque aussi, à opposer frontalement « peuple » et « élites », est d'exonérer trop vite le peuple de maux auquel il collabore. Par exemple, les électeurs s'indignent à juste titre que ceux qu'ils élisent trahissent leurs promesses. Mais quelqu'un qui serait à la fois sensé et sincère serait-il élu ?

    La vérité est que nous sommes tous engagés dans un gigantesque processus de planétarisation (je préfère ce terme à celui de mondialisation, car ce vers quoi nous allons n'a aucune des qualités d'ordre et d'harmonie que les Romains reconnaissaient au mundus, traduction latine du grec cosmos). S'il y avait un partage pertinent de la population à opérer, ce serait peut-être celui-ci : d'un côté les ravis de la planétarisation - en partie pour le bénéfice qu'ils en tirent à court terme, en partie par aveuglement ; de l'autre les détracteurs de la planétarisation - en partie parce qu'ils en font les frais, en partie parce qu'ils voudraient que la possibilité de mener une vie authentiquement humaine sur cette terre soit sauvegardée.

    Il est indéniable que ce qu'on appelle aujourd'hui l'élite compte presque exclusivement des ravis de la planétarisation. Cela étant, ces soi-disant dirigeants dirigent très peu : leur rôle est d'accompagner le mouvement, de le favoriser, d'y adapter la société. C'est le sens, par exemple, du « En Marche ! » d'Emmanuel Macron. En marche vers quoi ? Peu importe, l'important est d'« aller de l'avant », même si cela suppose d'accentuer encore les ravages. Les lois sociétales participent de ce « marchisme ». Par exemple, la famille à l'ancienne est un des derniers lieux de résistance au mouvement de contractualisation généralisée. Tout ce qui peut la démantibuler est donc bon à prendre, « va dans le bon sens ».

    D'où est venu ce processus? Pourrait-il s'arrêter un jour ?

    On décrit souvent la modernité comme un passage de l'hétéronomie - les hommes se placent sous l'autorité de la religion et de la tradition -, à l'autonomie - les hommes se reconnaissent au présent comme les seuls maîtres à bord. Un espace infini semble alors s'ouvrir aux initiatives humaines, tant collectives qu'individuelles. Mais libérer l'individu de ses anciennes tutelles, cela signifie libérer tous les individus, et l'amalgame de cette multitude de libertés compose un monde dont personne ne contrôle l'évolution, et qui s'impose à chacun. Comme le dit l'homme du souterrain de Dostoïevski, dans une formule géniale : « Moi, je suis seul, et eux, ils sont tous ». L'individu est libre mais, à son échelle, complètement démuni face au devenir du monde. Le tragique est que c'est précisément la liberté de tous qui contribue, dans une certaine mesure, à l'impuissance de chacun. La politique se dissout dans un processus économique sans sujet. Comme l'a écrit Heidegger, nous vivons à une époque où la puissance est seule à être puissante. Ce qui ne veut pas dire que tout le monde soit logé à la même enseigne : il y a ceux qui se débrouillent pour surfer sur la vague, beaucoup d'autres qui sont roulés dessous.

    Ce processus est-il maîtrisable par une restauration politique ?

    Politique vient de polis qui, en grec, désignait la cité. Pour les Grecs, les Perses étaient des barbares non parce qu'ils auraient été ethniquement inférieurs, mais parce qu'ils vivaient dans un empire. La politique ne s'épanouit qu'à des échelles limitées, au-delà desquelles elle dépérit. C'est pourquoi le grand argument qui a été seriné aux Européens, que leurs nations étaient trop petites pour exister encore politiquement et devaient transférer leur souveraineté à une entité continentale, où la politique retrouverait ses droits, a été une pure escroquerie. La politique n'a pas été transférée des nations à l'Union européenne, elle s'est simplement évaporée - à vrai dire tel était, sous les « éléments de langage » destinés à le masquer, le but recherché.

    La nation mérite d'être défendue parce que c'est la seule échelle où une vie politique existe encore un peu. En même temps, des nations comme la France, l'Allemagne ou le Royaume-Uni sont déjà trop grandes pour que la politique y joue pleinement son rôle. Dans les années 1850, Auguste Comte déplorait l'unification italienne comme un mouvement rétrograde, et pensait qu'à l'inverse, c'était la France qui aurait dû se diviser en dix-sept petites républiques (soixante-dix en Europe). Selon lui, c'était seulement après s'être ancrées dans une vie à cette dimension que les petites patries auraient été à même de se réunir de façon féconde, afin de traiter ensemble les questions qui outrepassent leur échelle.

    Aujourd'hui la Suisse, avec ses huit millions d'habitants et sa vie cantonale, est l'État européen où la démocratie est la plus vivace. Et historiquement, les cités de la Grèce classique, entre le VIe et le IVe siècle avant notre ère, ainsi que les cités-États italiennes de la Renaissance (Florence comptait moins de 100 000 habitants du temps de sa splendeur) constituent des réussites inégalées, qui montrent qu'en étant ouvertes sur le monde, des patries de petite taille sont capables de resplendir dans tous les domaines.

    Le problème est que même si beaucoup de petits États sont préférables à quelques gros, un gros État dispose d'un avantage : il est en mesure d'écraser un voisin plus petit. De là la tendance à la croissance en taille, quand bien même tout le monde, au bout du compte, devrait y perdre.

    Le processus inverse est-il possible ? Peut-on imaginer que la petitesse devienne la norme ?

    L'Autrichien Leopold Kohr (lauréat du prix Nobel alternatif en 1983) demeure malheureusement très méconnu. En 1957, dans son livre The Breakdown of Nations, il écrivait : « Il n'y a pas de détresse sur terre qui puisse être soulagée, sauf à petite échelle. […] C'est pourquoi par l'union ou par l'unification, qui augmente la taille, la masse et la puissance, rien ne peut être résolu. Au contraire, la possibilité de trouver des solutions diminue au fur et à mesure que le processus d'union avance. Pourtant, tous nos efforts collectivisés et collectivisants semblent précisément dirigés vers ce but fantastique - l'unification. Qui, bien sûr, est aussi une solution. La solution de l'effondrement spontané ».

    Les choses étant ce qu'elles sont, je crains qu'il ne faille en passer par de tels effondrements. Quand je dis cela, je me fais traiter de Cassandre. Je rappellerai toutefois que dans la mythologie grecque, les mises en garde de Cassandre étaient toujours fondées, le problème étant que personne ne la croyait. Ainsi, malgré ses avertissements, les Troyens firent-ils entrer le cheval de bois dans leur ville. On ne peut pas dire que cela leur ait réussi. Par ailleurs, si les effondrements qui se préparent ont de quoi faire peur, car ils engendreront de nombreuses souffrances, la perspective n'est pas seulement négative : ils peuvent aussi être l'occasion pour les peuples d'échapper aux fatalités présentes, et de revenir à la vie. 

    Olivier Rey est un mathématicien et philosophe français né en 1964. Polytechnicien de formation, il est chercheur au CNRS, d'abord dans la section « mathématiques » puis, depuis 2009, dans la section « philosophie », où il est membre de l'Institut d'histoire et de philosophie des sciences et des techniques (IHPST). Auteur de plusieurs ouvrages, il a notamment publié Itinéraire de l'égarement. Du rôle de la science dans l'absurdité contemporaine (éd. Le Seuil, 2003) ; Une folle solitude. Le fantasme de l'homme auto-construit (éd. Le Seuil, 2006) et Une question de taille (éd. Stock, 2014) pour lequel il a reçu le Prix Bristrol des Lumières 2014.      

    A lire ...

    Olivier Rey : « Le discours sur les droits de l'homme est devenu fou » (1/2)

       

  • Mémoire • Homélie de la messe de requiem pour le roi Louis XVI, à Saint-Germain-l'Auxerrois

     

    Prône de la messe de Requiem pour le roi Louis XVI, le samedi 21 janvier 2017, il y a exactement deux semaines, en l’église Saint-Germain-l’Auxerrois, par le P. Jean-François Thomas s.j. 

    Monseigneur, Madame, mes chers Frères,

    Si le Roi des rois a connu une telle déréliction et une telle solitude lors de son passage parmi nous, il ne faut point être surpris qu’un roi terrestre digne de sa mission doive connaître une souffrance identique par imitation du Maître. Les succès humains sont toujours entachés d’une certaine prosternation devant les règles du monde et ceux qui les inspirent. Un fils de saint Louis, par son sacre, plie la nuque sous les insignes royaux et devient un serviteur du Christ, et donc de ses frères, se condamnant à ne pas être compris ou aimé s’il demeure fidèle.

    Les deux sceptres

    Le 11 juin 1775, dans la cathédrale Notre Dame de Reims, Louis XVI reçoit les deux sceptres : la main de justice, symbole de vertu et d’équité, ornée de la dextre divine bénissant, aide le roi à guider les égarés, à relever ceux qui sont tombés, à récompenser l’humilité et à confondre l’orgueil ; le sceptre royal, marque de puissance, rappelle au roi ses devoirs de mener une vie droite, de lutter contre le mal pour le bien de son peuple chrétien et d’aider chacun à demeurer sur un chemin de justice. Le Roi était pieux et il comprit la symbolique de tous les rites de son couronnement, désirant restaurer l’élan religieux brisé dans le royaume par la décadence et l’immoralité du siècle des Lumières. Il accepta le poids de la couronne et avec elle les épines qui le rendraient de plus en plus conforme à Celui qui l’avait revêtu de son autorité. Il entra ainsi, seul, dans sa fonction, entouré par la médiocrité tintamarresque de son époque. Dieu allait permettre que ce roi, le plus vertueux de tous depuis bien des règnes, connût l’abjection la plus complète, le dénuement, la trahison, la mort ignominieuse.

    L’homme seul

    Cette solitude vécue par le Roi, il ne la subit pas mais il l’embrassa, chaque jour davantage, alors qu’il avançait vers le sacrifice et vers le martyre. C’est là que réside son héroïsme et, osons le dire, sa sainteté. Un parcours identique fut suivi, cent trente ans plus tard, par Nicolas II et sa famille. Seulement la Russie moderne, de nouveau orthodoxe, a eu l’humilité de reconnaître son crime et de canoniser ces victimes de la violence diabolique. La France, elle, n’a pas eu le courage de confesser son péché, de courber la tête et l’Eglise catholique se désintéresse des vertus de ce Roi. La solitude consentie du Roi nous renvoie à la solitude qui est la nôtre depuis que nous l’avons assassiné en commettant ce parricide. Ce qui surgit du bain de sang de la révolution, et qui nous poursuit comme un spectre, est l’homme que nous sommes, dans toute sa faible nature, se condamnant à errer seul dans le monde par orgueil car il repousse désormais toute dépendance et toute servitude vis-à-vis du transcendant. De tout temps, cet homme a aimé la rhétorique, qu’elle tombât de la tribune ou de la chaire, du comptoir de bar ou d’un fauteuil d’académie. Cependant, la rhétorique révolutionnaire, mijotée par les soins pernicieux des philosophes de ce siècle enténébré, poussa l’homme dans un gouffre dont il ne remonta jamais. Les rhéteurs et les orateurs de Quatre-vingt-treize ont tous été engloutis par leur propre fureur, laissant l’homme, c’est-à-dire nous, leurs fils hélas, tout pantelants et pataugeant dans notre bourbier, ceci jusqu’à ce jour, puisque nous avons refusé de crier notre solitude de damnés et d’implorer le pardon. Léon Bloy écrit dans La Chevalière de la Mort : « Une rhétorique telle qu’on en avait jamais vu chez aucun peuple, apparut en ces temps, comme un météore prodigieux, annonciateur désorbité de la débâcle universelle. (…) Sous le masque sanglant d’une rhétorique transcendante poussée jusqu’à l’égorgement et jusqu’à la terreur suprême, l’homme immuable, le misérable Homme de la Chute, suait et haletait dans son éternelle lamentation. »

    Les consolations spirituelles

    Louis XVI fut privé de tous les dictames humains à partir de 1789 et il ne mit plus son espérance que dans les consolations spirituelles. Le 11 mars 1791, il écrivait dans une lettre adressée à un des précepteurs du Dauphin : « Parlez-lui et toujours avec respect de Dieu, de ses attributs et de son culte : prouvez-lui que l’autorité des rois vient de Dieu ; et que s’il ne croit pas à la puissance du Maître des rois, il sera bientôt la victime de ces hommes qui ne croient rien, méprisent l’autorité, et s’imaginent être les égaux des rois. Qu’il apprenne dès à présent, que la religion est digne de tous ses hommages ; que l’incrédulité et la fausse philosophie minent sourdement les trônes, et que l’autel est le rempart des rois religieux. Méfiez-vous de tous ces principes erronés, enfants perdus de la nouveauté, de l’esprit du siècle, et du poison de l’incrédulité. Loin de lui tous les ouvrages où la philosophie prétend juger Dieu, son culte, son église et sa loi divine. »

    « Mon frère, bientôt je ne serai plus… »

    Au fur et à mesure qu’il perdit de son pouvoir, il gagna en autorité naturelle car il s’en remit sans crainte entre les mains du Créateur. Ce que Bossuet souligna dans son oraison funèbre du grand Condé, pourrait s’appliquer à Louis XVI : « Lorsque Dieu forma le cœur et les entrailles de l’homme, il y mit premièrement la bonté comme le premier caractère de la nature divine, et pour être comme la marque de cette main bienfaisante dont nous sortons. » Cette bonté du Roi est éclatante dans les pires jours de son asservissement, de son emprisonnement, de son accusation, de sa condamnation. Il écrit du Temple, à Monsieur de Malesherbes, un de ses avocats : « Je ne me fais pas illusion sur mon sort ; les ingrats qui m’ont détrôné ne s’arrêteront pas au milieu de leur carrière ; ils auraient trop à rougir de voir sans cesse, sous leurs yeux, leurs victimes. Je subirai le sort de Charles I, et mon sang coulera pour me punir de n’en avoir jamais versé. » Et à Monsieur, son frère, il avoue dans une missive du 28 avril 1792 : « Lorsque la tempête brise le vaisseau, il ne reste au passager que le courage de la résignation ; c’est à peu près ma position. Les périls qu’on me fait appréhender, n’altéreront jamais ce que je me dois comme Roi, et comme chef d’une des premières nations du monde. » Le 11 août 1792, n’ayant plus d’illusion sur l’issue de son sort, il lui demande : « Mon frère, bientôt je ne serai plus, songez à venger ma mémoire, en publiant combien j’aimais ce peuple ingrat. Un jour rappelez-lui ses torts, et dites-lui que je lui ai pardonné. »

    1759951582.jpgExemple immortel…

    Extraordinaire vengeance que celle qui avoue son amour et qui répond à l’offense par le pardon ! Il s’agit là de la solitude et de l’horreur de la Croix. L’imitation est parfaite, et ceci sans ostentation et sans faux semblant car il ne s’agit pas d’une de ces déclarations grandiloquentes, ne prêtant pas à conséquence, dont sont familières les personnalités civiles et religieuses de notre époque. Nous connaissons trop, depuis deux siècles, ce qu’est la miséricorde républicaine qui écrase sans pitié ses ennemis comme lors de l’épuration de la Libération ou les événements de 1962, ou la mansuétude religieuse des autorités qui n’hésitent pas à rejeter ou à persécuter ceux qui n’ont pas l’heur de leur plaire. La déclaration d’amour et de pardon de Louis XVI n’est pas sournoise ou politique. Elle jaillit du cœur car elle y était enracinée depuis longtemps. Louis XVI est devenu grand dans cette solitude, dépassant la gloire de François Ier ou de Louis XIV. Le chaos révolutionnaire a fait émerger, malgré lui, ce que la monarchie de droit divin possédait de plus précieux, et que nul autre régime ne pourra jamais atteindre : une communion profonde et inaltérable avec Dieu duquel toute autorité légitime découle. Les révolutionnaires, dans leur cruauté satanique, ont rendu l’exemple de Louis XVI immortel et inégalé.

    … et fructueuse infortune

    Notre pays, plus que jamais, devrait méditer sur la fructueuse infortune solitaire du Roi qu’il a décapité. Tous les candidats possibles pour occuper la plus haute charge dans notre terre ancestrale ne seront jamais capables d’atteindre une telle altitude car leur ambition ne repose pas sur cet amour et ce pardon uniquement reçus dans le sacre par le souverain. Dieu ne permettra de restaurer le trône qu’à un homme habité par cette passion pour son peuple, ceci jusqu’à accepter de verser son sang malgré l’ingratitude.

    Ecoutons ces vers profonds du grand poète catholique oublié, Armand Godoy, dans Ite Missa est : 

    « Ce n’est pas pour moi que je demande ta miséricorde.

    Ce n’est pas pour moi : c’est pour les autres, pour mes pauvres frères.

    J’attends à genoux que ta clémence, Agneau de Dieu, m’accorde

    La fin de tous leurs désespoirs et de toutes leurs colères.

    J’attends à genoux que le souffle infernal de la Discorde

    Devienne azuré baiser de violettes printanières

    Et que l’Angoisse aux voix multiples et l’Ennui monocorde

    Se taisent à jamais sous le chant lumineux des rosaires.

    J’attends à genoux que la sinistre et ténébreuse horde

    Des crimes soit le clair essaim des caresses tutélaires.

    J’attends à genoux que ta clémence, Agneau de Dieu, m’accorde

    La fin de tous les tourments, la fin de toutes les misères.

    Ce n’est pas pour moi que je demande ta miséricorde.

    Ce n’est pas pour moi : c’est pour les autres, pour mes pauvres frères. »

     

    Nous attendons nous aussi que la divine Providence redonne à notre royaume orphelin le père que nous ne méritons plus. Des pages douloureuses de notre histoire vont s’ouvrir devant nous. Qui saura résister ? Qui saura demeurer fidèle aux dons insignes accordés jadis à cette terre ? Qui saura aimer et pardonner dans une solitude accablante ? Qui saura offrir sa tête pour le salut des autres ? Qui saura monter les marches de l’échafaud en regardant le ciel où le soleil commencera de se lever ? Il nous faut implorer et nous convertir, et ne jamais cesser d’espérer.   

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  • Une impressionnante évocation : Bouvines, 27 juillet 1214, par Pierre de Meuse (1)

    Il s'agit, en vérité, de bien davantage qu'un récit - quoique tout y soit décrit par le menu - et de bien davantage que d'une évocation. Mais, outre tout cela, d'une étude politique, militaire, historiographique de la bataille de Bouvines, dont la France commémore les 800 ans. Compte-tenu de son importance, nous publierons cette étude en trois parties, dont voici la première. Signalons encore que ce texte est repris du numéro 36 de La nouvelle revue universelle (avril-mai-juin) - que nous recommandons de lire en totalité *.  

     

    AG DREUX 026.JPGLa France capétienne a bénéficié tout au long de son histoire, d'un avantage considérable : celui d'être le pays le plus peuplé d'Europe. Cette supériorité démographique, notre pays la conservera jusqu'au XIXème siècle, au cours duquel l'Angleterre et l'Allemagne la dépasseront lorsque les règles fiscales issues de la Révolution viendront briser le dynamisme familial issu de l'Ancien régime. Il est donc logique que les concurrents de la France n'aient pu envisager de la vaincre, lorsqu'elle était unie, que par une coalition. Il arrive que ces coalitions triomphent, comme à Waterloo, ou qu'elles échouent, comme à Denain. Dans tous les cas, c'est un grave danger pour la nation française. Il y a huit cents ans cette année que la première de ces grandes coalitions européennes fut formée, et qu'elle vint se disloquer à Bouvines. Voilà un anniversaire plein de sens, puisque depuis quelques années l'héritage français se trouve menacé de submersion. Il convient donc de se remémorer les circonstances de cet évènement capital, qui est la deuxième grande bataille livrée par les rois depuis la fondation de la dynastie.

    À l'origine de ce conflit, il y a, comme ce fut souvent le cas au cours des âges, l'hostilité de l'Angleterre et de Jean sans -Terre, son roi. Les motifs de cette hostilité sont patents : Philippe Auguste, roi intelligent et calculateur, a habilement su récupérer dans son Domaine royal la plus grande partie de ce que son père Louis VII (1120-1180) avait perdu à cause de la répudiation de son épouse Aliénor d'Aquitaine : pratiquement toute la partie ouest de la France, c'est-à-dire la moitié du royaume.  Normandie, Bretagne, Maine, Saintonge, Angoumois, etc... Philippe s'est appuyé avec diplomatie sur les dissensions familiales de la dynastie anglaise. D'abord entre Henri II Plantagenet et son fils cadet, Jean sans Terre, puis entre les deux frères Richard Cœur de Lion et le même Jean sans Terre, enfin sur les révoltes causées par la paillardise et le manque de qualités guerrières de ce roi Jean après la mort de Richard, tué au siège de Châlus en 1199. Jean, qui a succédé à son frère mort sans postérité légitime, décide donc de reconquérir ses territoires perdus. Il noue alors une coalition avec tous les ennemis potentiels du roi de France, le comte de Flandre Ferrand (qui est en fait portugais) et celui de Boulogne, le duc de Brabant ainsi que le titulaire du Saint Empire Romain Germanique, Otton IV de Brunswick, tous unis dans un désir commun d'en finir avec la puissance de la monarchie capétienne. Chacun reproche au roi de France, soit de lui avoir pris des villes ou des territoires, soit de soutenir ses ennemis. Il y a aussi la forte dépendance entre l'économie drapière flamande et l'Angleterre. Il faut préciser que Philippe soutient le pape Innocent III qui vient d'excommunier Otton, et ils soutiennent tous deux le petit-fils de Barberousse, Frédéric de Souabe, un Hohenstaufen, alors qu'Otton est un représentant de la dynastie concurrente des Welfes. L’excommunication est à l'époque un procédé de pouvoir, et n'a rien de doctrinal : les seuls conflits que le pape sanctionne sont des questions de fiefs non cédés, d'indemnité non réglées ou de dîmes arriérées.

     

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    Le roi Philippe tente d'abord la voie diplomatique afin de desserrer l'étau qui se constitue contre lui. Il se rend compte que c'est impossible, et apprend par ses espions quel est le plan des coalisés : prendre les Français en tenaille et se retrouver à Paris avant la mi-août 1214. Alors il réunit autour de lui ses fidèles et compose deux armées : il sait que le roi d'Angleterre va débarquer là où il est fort, parce qu'il y possède encore des suzerainetés : à la limite du Poitou et de l'Anjou, au port de La Rochelle. Philippe envoie donc son fils Louis pour l'arrêter avec une armée. Dans le même temps, il « lève l'ost », 'est-à-dire qu'il appelle les chevaliers de son vasselage à la guerre et aussi, à Saint-Denis, il fait déployer par les milices communales la « Montjoie », la grande oriflamme de ralliement, de couleur « rouge sang semé de lys sans nombre », placé sous la garde des piétons communaux. Ces milices ne vont pas jouer un rôle très important sur le plan tactique, mais elles ont un effet considérable sur le plan symbolique, cat leur présence rend patente la solidarité du peuple avec le roi. Cela dit, gardons-nous des anachronismes : la France concernée par ces évènements est celle du nord de la Loire. Champagne, Ile-de-France, Artois, Picardie, quelques Bourguignons. C'est celle qui a fait les croisades. En aucune façon les provinces du centre ni la Bretagne, ni évidemment le midi toulousain ou la Provence ne sont concernées. 

    Si l'on regarde qui entoure l'ost du roi, on y voit ses cousins : le comte d'Auxerre, qui sera roi de Constantinople, le comte Robert de Dreux, le duc de Bourgogne, le comte de Bar et Mathieu de Montmorency. À ceux-là, et à leurs bans, il faut ajouter deux hommes d'Eglise, Philippe de Dreux, évêque de Beauvais, et un chevalier hospitalier, Frère Guérin, désigné évêque de Senlis. Théoriquement, ils ne peuvent pas se battre car, selon le précepte Ecclesia abhorret a sanguine, ils n'ont pas le droit de faire couler le sang. Ils n'en sont pas moins des fervêtus et se placent au premier rang de la chevalerie. Derrière eux sont les autres chevaliers, dont les noms et surnoms sont venus jusqu'à nous. Citons Gérard La Truie, Pierre Mauvoisin, le Mauclerc et bien d'autres, plus ou moins bien équipés. En tout 1300 hommes. Se rajoutent les sergents avec Pierre de la Tournelle ; ils vont chevauchant mais non nobles : au nombre de 1500, et la piétaille : en tout 7000 hommes. En face, Otton de Brunswick, le comte de Hollande Guillaume le Poilu, Guillaume de Salisbury dit Longue-épée, frère bâtard du roi Jean, le comte Ferrand de Flandre et Renaud de Dammartin, comte de Boulogne. Et puis les troupes communales des Flandres. En tout 11 000 hommes. Remarquons que l'organisateur de la coalition, Jean sans Terre, ne participe pas à la bataille car, le 2 juillet, assiégeant la forteresse de La Roche-aux-Moines, près d'Angers, il apprend que le fils du roi Philippe, Louis, est en passe d'arriver. Il s'enfuit sans gloire le 2 juillet, se disant qu'après tout l'essentiel est fait, dans la mesure où le roi de France a dû diviser son armée, et qu'il peut laisser ses alliés se battre à sa place.

     

    COUP D'CEIL ET PRAGMATISME DU ROI PHILIPPE

    Lorsque les coalisés arrivent par l'est, ils se dirigent vers le roi Philippe, qui a planté son camp à Tournai. Constatant que le rapport de forces lui est défavorable, le roi de France ordonne la retraite afin de rejoindre Lille, le 27 juillet à l'aube. Cette manœuvre est portée à la connaissance d'Otton, qui réunit les chefs des armées pour décider s'il faut poursuivre le roi ou se borner à le « marquer, pour choisir le moment favorable. Les chefs sont divisés : le comte de Boulogne ne croit pas à une fuite, Salisbury reste méfiant, alors que les Flamands, craignant de voir leur proie leur échapper, sentent l'odeur de la rapine, qui leur permettrait de calmer les routiers aux soldes impayées. C'est cette dernière option qui est prise, sans tenir compte d'un fait qui n'est pas sans importance : le 27 juillet tombe un dimanche, et la « trêve de Dieu » (concile d'Elne, 1027) interdit de faire la guerre le jour du Seigneur. Ce fait, convenablement exploité, contribuera à démoraliser les coalisés et sera un argument permettant de glorifier le roi français respectueux des commandements divins. D'autre part, en se portant sur l'arrière-garde française, l'empereur Otton a sous-estimé la discipline et la cohésion de l'armée royale. Car les troupes du roi de France ne se sont pas débandées mais ont fait retraite en bon ordre. Le roi sait qu'il est poursuivi, il donne aux féaux l'image impassible d'un chef conscient et maître de la situation. En fait, il ne tarde pas à constater que le pont sur la Marque, qui le conduit à Lille, ne permettra pas un passage dans les temps voulus, ce qui livrerait ses troupes sans défense aux poursuivants. D'un autre côté, le terrain est propice à une bataille inégale, car il rend difficile le déploiement d'une armée ennemie plus nombreuse que la sienne. Calmement, il s'arrête, se recueille dans une chapelle, puis il prononce une allocution et met son armée en bataille. Nous sommes dans la plaine de Bouvines, un lieu-dit à l'est de Lille, à cheval sur ce qui est aujourd'hui la frontière franco-belge, à l'époque sur la limite du Royaume et de l'Empire.

    La bataille, qui va durer quelques heures, est essentiellement composée de charges de cavalerie successives, menées par la fleur de la chevalerie européenne. Il n'y a pas de raffinements tactiques, de contremarches géniales, mais essentiellement l'assaut et le choc, qui précèdent la victoire ou la fuite. Lorsque les coalisés se trouvent en vue de l’armée royale, la surprise a changé de camp : les poursuivants croyaient tailler en pièces une arrière-garde en perdition, et ils se trouvent en face d'un adversaire résolu prêt à l'attaque sur le terrain qu'il a choisi. Ce sont, tout naturellement, les plus aventurés des poursuivants - les chevaliers flamands - qui vont subir l'effet de cette pugnacité inattendue. D'assaillants, en effet, ils deviennent assaillis. Car chaque corps de bataille de chaque armée va se trouver aux prises de celui qui se trouve en face de lui, et cette succession va résumer toute la journée de Bouvines. On a donc une bataille de droite, une bataille de gauche et une bataille du centre.

     

     

    La nouvelle revue universelle, 7 rue Constance, 75018 PARIS - 4 numéros par an - Tarif : m Normal, 1 an, 70 €  m Soutien, 1 an 100 €  m Normal, 2 ans, 130 € m Réduit, 1 an (étudiants, chômeurs) 40 €. 

     

  • Mode vestimentaire musulmane : et si nous en tirions un enseignement ?

     

    par Yves Morel

     

    La polémique

    De grandes sociétés commerciales de produits vestimentaires (Dolce et Cabana, Marks & Spencer, H & M, Uniqlo) se lancent à la conquête de la clientèle musulmane, désormais très présente sous nos latitudes, et lui proposent des gammes de vêtements aussi couvrants qu’élégants. En France, cette offensive commerciale donne lieu à une polémique, surtout depuis que Mme Laurence Rossignol, ministre des Droits des Femmes, a fustigé ces grandes maisons, complices objectives de l’asservissement de la gent féminine à la Charia, allant même, dans son emportement, jusqu’à dérailler au point de comparer l’attitude des musulmanes adeptes de cette mode vestimentaire (qualifiée d’islamique), à celle des « nègres » (sic!) d’Amérique qui, au milieu du XIXè siècle affirmaient préférer demeurer des esclaves humiliés mais nourris par leurs maîtres plutôt que de devenir des hommes libres à la dignité enfin reconnue, mais sans moyens de subsistance. Si l’emploi de cette épithète raciste de « nègre » a valu à Mme Rossignol des volées de bois vert de toutes les associations antiracistes « et pour l’amitié entre les peuples » (un adhérent du FN ou même de la droite « républicaine » aurait eu droit à une assignation judiciaire), elle a reçu le soutien de toutes les organisations féministes.

    Une dizaine d’entre elles félicitent la ministre d’avoir « réagi avec force et indignation à la banalisation du port du voile islamique ». Mme Danielle Bousquet, présidente du « Haut Conseil à l’Egalité entre les Femmes et les Hommes » (cela ne s’invente pas) estime que la ministre « a eu raison de dénoncer l’irresponsabilité des grandes marques qui, au nom du profit, n’hésitent pas à reprendre à leur compte une stratégie fondamentaliste politico-religieuse ». Mme Badinter, elle, appelle à boycotter ces produits. Les hommes de gauche (ou tout simplement « républicains ») ne sont pas en reste. M. Gilles Clavreul, « délégué interministériel, chargé de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme » (Diantre !) vole au secours de Mme Rossignol « dont le seul crime est de défendre la dignité et la liberté des femmes contre les noces barbares du cynisme marchand et de la bigoterie ».

    Héroïque Laurence Rossignol, émule laïque de sainte-Geneviève, qui tente d’arrêter les barbares modernes. Pierre Bergé, millionnaire affairiste de la haute couture se juge fondé à prodiguer des leçons de morale à ses confrères : « Renoncez au fric, ayez des convictions. Vous êtes là pour embellir les femmes », leur a-t-il lancé avec un bel aplomb. Un bel aplomb, oui, car ce chevalier qui vole au secours de la femme opprimée (en même temps que des gays) a montré, tout au long de sa carrière, que lui-même ne renonçait pas facilement au « fric », tout au contraire (cf ses condamnations passées pour délit d’initié, etc…) et qu’au cours des années 1960, il vendait (force publicité à l’appui) des vêtements orientaux totalement couvrants destinés aux musulmanes et promus dans ses catalogues où l’on pouvait voir des femmes voilées (par ses soins). Notre Premier ministre lui-même y est allé de son couplet : « Ce que représente le voile, non ce n’est pas un phénomène de mode, non ce n’est pas une couleur qu’on porte, non c’est un asservissement de la femme ».

    Comment ne fondrions-nous pas devant tant de protestations indignées émanant de si irréprochables professeurs de vertu ?

    Ils ont pourtant tout fait pour en arriver là

    En vérité, l’irruption, en Europe occidentale, de cette mode vestimentaire islamique est riche de méditations auxquelles se livrer, et d’enseignements à tirer.

    Tout d’abord, de quoi se plaignent tous ces républicains et gens de gauche ? Durant des décennies, tout particulièrement pendant toutes les années 1980 et tout le septennat de M. Mitterrand, ils n’ont cessé de promouvoir le droit à la différence dans tous les domaines, d’inciter les immigrés à ne pas s’assimiler à notre société et, au contraire, à promouvoir leur propre culture d’origine, en opposition à la nôtre. Dans certains hypermarchés, des pancartes étaient rédigées en arabe à leur intention. Il était jugé très seyant d’arborer la fameuse épinglette « Touche pas à mon pote ». Les socialistes affirmaient qu’ainsi « la France s’enrichirait de ses différences » (propos de Gérard Collomb, entre bien d’autres) ; M. Mitterrand déclarait, sur le ton péremptoire de l’exigence comminatoire : « Je veux qu’on bouscule les traditions, les habitudes et les usages français » (pas à l’Elysée, ni à Latché, cependant), tandis que son épouse Danielle défendait expressément « le port du tchador » (à vrai dire, elle confondait voile et tchador).

    Eh bien, c’est fait : nos musulmans ne se sentent pas français, n’aiment pas la France, rejettent peu ou prou notre société, ne souhaitent pas s’y intégrer, et se contentent d’une citoyenneté purement juridique et du respect superficiel de nos lois. Ils s’amarrent à qui mieux mieux à leur culture d’origine, et, pour quelques-unes d’entre eux, basculent dans l’islamisme radical. Ils n’ont que faire de nos principes républicains, libéraux, démocratiques et laïques, cherchent à nous imposer leur mode de vie, leurs coutumes alimentaires, le respect de leur religion, et fustigent nos femmes, trop libérées et découvertes à leur gré. Nos gens de gauche, et d’ailleurs presque toute notre classe politique, notre intelligentsia, nos « élites », ont voulu cela, et ont fait en sorte que cela advienne. Il est donc tout à fait déplacé, voire scandaleux, de leur part, de critiquer certains des effets, pourtant très prévisibles, de la situation qu’ils ont eux-mêmes créée. Et il n’y a rien d’étonnant, ni même de scandaleux (d’un point de vue strictement logique) à ce que, dans une société « polyethnique et multiculturelle », cultivant à l’envi la « diversité » et le « droit à la différence », en laquelle le marché est devenu l’étalon unique de toute valeur, les musulmanes achètent des vêtements conformes aux exigences éthiques de la culture arabe et de l’islam.

    Et il n’y a rien de scandaleux, non plus, du même point de vue, à ce que des sociétés de confection et de vente de vêtements, cherchent à attirer cette clientèle. L’apparition de cette mode vestimentaire musulmane n’est que l’une des très nombreuses et très logiques conséquences de toute notre politique d’immigration, suivie depuis le début des années Mitterrand, et préparée dès avant, avec la loi Pleven en faveur des immigrés (1972) et le décret Giscard d’Estaing-Chirac-Durafour autorisant le regroupement familial (1976). Et elle constitue une preuve de plus de l’inanité de notre modèle républicain d’intégration.

    Mais elle nous interpelle également au sujet de notre conception de la dignité de la femme. Mme Rossignol et autres nous présentent ces musulmanes élégamment couvertes comme des êtres dégradés, asservis et dénaturés au point d’aimer leur servitude et d’en assurer la défense, l’illustration et la promotion.

    En vérité, qui est asservi ? Qui est libre ?

    Mais enfin, Madame la Ministre, Mesdames et Messieurs les Députés (imitons le langage rituel des débats de notre Assemblée nationale), mesdames et messieurs les femmes et hommes politiques, les haut(e)s fonctionnaires, les journalistes et autres hérauts (et héros ?) de la modernité, de la « diversité » et de la « multiculturalité » (en même temps que de la « liberté »), réfléchissez un tout petit peu et appliquez à vous-mêmes et à vos propres idées la salutaire distance critique que vous préconisez pour l’examen de quantité de questions relatives à notre identité culturelle, à notre passé et à tout ce qui va à l’encontre de votre vision du monde. Après tout, comment pouvez-vous être si certains que toutes les femmes musulmanes voilées sont ces créatures asservies, humiliées, dégradées et aliénées que vous présentez, et que nos femmes occidentales prétendûment libérées et souvent vêtues de manière provocante sont des personnes humaines fières et dignes, maîtresses de leur corps et de leur âme, saines d’esprit, droites de jugement, éclairées et moralement supérieures ?

    En réalité, tout montre que les secondes, sous l’apparence d’une libération provocante, sont complètement asservies à un univers perverti par une sexualité débridée et une marchandisation de toutes les « valeurs » et du corps (qu’il s’agisse de celui de la femme ou de l’homme). L’Occidental, homme ou femme, n’est plus qu’un obsédé de la chair, qui voit et met du sexe partout, et en fait la seule dimension de l’existence et la seule finalité de notre espèce, ravalée au rang de l’animal. Il se croit libre, mais n’a jamais été aussi aliéné qu’à notre époque frelatée. Est-il donc impensable, dans ce contexte, qu’une jeune fille, une jeune femme arabo-musulmane saine d’esprit, intelligente, digne, un peu fière, ayant une certaine force de caractère, fasse le choix de vivre conformément à une éthique religieuse qui prescrit le refus de la mise à l’étalage de la chair et de la réduction du corps à un objet (convoité mais méprisé) de concupiscence, soumis aux lois du commerce ? S’il existe incontestablement des femmes asservies à la tyrannie des mâles et à une conception obscurantiste de la religion, dans beaucoup de cas, le port de vêtements couvrants illustre le refus de la décadence matérialiste, mercantile et perverse de notre société occidentale et le choix d’un mode de vie plus digne, plus moral et plus respectueux du corps et de la dignité de la femme, en même temps que de l’homme.

    Dans les amphis, les bibliothèques universitaires, les médiathèques des grandes villes, on peut voir des jeunes filles et des jeunes femmes studieuses, intelligentes, instruites, cultivées, saines de corps et d’esprit, tout à fait capables de jugement et de libre arbitre, et qui pourtant, conformément aux préceptes de leur éthique religieuse, portent le voile traditionnel (qui laisse apparaître leur visage) ; et on peut gager sans risque qu’elles sont, du point de vue intellectuel et moral infiniment plus libres et maîtresses d’elles-mêmes et de leur corps que bien des écervelées françaises de souche légèrement vêtues, adonnées à toutes les frasques sexuelles possibles, accros à tous les sites pornographiques, et qui se bousculent dans les boîtes de nuit , discothèques et autres salles de spectacle.

    Contradiction et échec de notre modèle républicain

    On ne peut pas à la fois souhaiter que notre nation devienne le melting pot de toutes les cultures jusqu’à voir son identité profondément altérée, et refuser les conséquences naturelles de l’introduction des cultures étrangères en France. Lors de la mémorable émission du 26 septembre dernier On n’est pas couché, M. Yann Moix lançait à la figure de Mme Morano (qui avait commis le crime inexpiable de définir notre nation comme étant « de tradition judéo-chrétienne et de race blanche ») que « demain, la France sera peut-être musulmane », et que l’observation de notre valeur républicaine de laïcité imposait de ne surtout rien tenter pour prévenir cette évolution. Seulement voilà : M. Yann Moix se trouve justement, en tant que républicain démocrate et libéral, hostile à l’islamisme et à toutes les tenues vestimentaires musulmanes qui lui paraissent asservir la femme. Eh bien, mon cher Monsieur, c’est bien regrettable : vous ne pouvez pas, sans une insoutenable contradiction, accepter l’islamisation de la France et rejeter les préceptes moraux et les coutumes de l’islam. Accepter l’islamisation de notre nation dans le cadre républicain, laïque et libéral, c’est vouloir tracer un cercle carré.

    En définitive, cette polémique autour de mode vestimentaire dite islamique est une excellente occasion de nous remettre en question, de nous interroger sur la prétendue supériorité absolue de notre modèle républicain ouvert à tous les vents et censément propre à intégrer les cultures les plus diverses. En cela, cette mode est plutôt une bonne chose. 

    Docteur ès-lettres, écrivain, spécialiste de l'histoire de l'enseignement en France, collaborateur de la Nouvelle Revue universelle

  • Reportage du Dauphiné libéré : Le « 4 » accueille le prince

    Le prince Jean d’Orléans est devenu officiellement hier le parrain du 4e Régiment de chasseurs. Sur la place d’arme Clermont-Prince, il a présidé sa première cérémonie, celle entérinant la création du Groupement tactique désert. Il nous a également accordé un long entretien sur la place de sa famille ou encore sur sa vision de la politique actuelle. Photo Le DL/Vincent OLLIVIER

     

    Le prince Jean d’Orléans, descendant des rois de France, est devenu le parrain du régiment haut­-alpin bien connu sous le nom de “4”

    Visite royale au 4e Régiment de chasseurs

    Son altesse royale Jean d’Orléans, duc de Vendôme, est officiellement depuis hier le parrain du 4e Régiment de chasseurs. La convention de parrainage qui scelle l’engagement du Prince avec le régiment des Alpes du Sud a été signée dans la salle d’honneur du “4” après une genèse assez longue débutée il y a plus de deux ans. Le prince Jean d’Orléans est le fils d’Henri d’Orléans, comte de Paris, chef de famille de la Maison d’Orléans, prétendante au trône de France. Il a répondu aux questions du Dauphiné Libéré.

    Monseigneur, la genèse de votre parrainage du 4e Rch a été longue. Il y a un lien historique entre votre famille et Clermont-Prince. Le régiment vous a été présenté, quel est votre sentiment ?

    3135457778  2.jpg« Je suis très heureux pour de nombreuses raisons. Il y a plusieurs aspects qui ren­trent en ligne de compte : la dimension humaine, les as­pects techniques et opéra­tionnels. Moi qui n’ai fait que mon service militaire, je vois une autre partie de  l’armée d’aujourd’hui. C’est une  bon­ne façon de poursuivre cet engagement dans un  envi­ronnement complexe de no­tre société française à la fois à l’intérieur et  à l’extérieur. J’observe que notre armée est de plus en plus nécessaire et que  même les politiques s’en sont rendu compte en augmentant les effectifs. Le “4” est une entité en pleine dynamique qui doit faire face à de nombreux enjeux. Je suis admiratif de tout ce qui se met en place et de l’évolu­tion entre l’armée que j’ai pu connaître et l’armée d’aujourd’hui. »

    Ce parrainage est-il une responsabilité pour vous, comment va-t-il s’incarner, s’exercer ?

    « Concrètement il y aura certainement  des  événements  liés à la vie du régiment com­me la Saint­-Georges. Le dis­positif  reste  à  déterminer  et préciser.  Peut­-être  dans  les  étapes  d’instruction  ou  mê­me la présence sur le terrain, qui sont des moments privilé­giés  qui  favorisent  les  ren­contres.  Mon  intégration  de la  réserve  citoyenne  donne  un  sens  à  ce  parrainage  et s’inscrit dans les orientations menant à cultiver l’esprit de défense et de le relayer dans des couches qui n’ont pas for­cément  accès  à  toute  cette connaissance. À Dreux, nous travaillons sur la connaissan­ce  de  l’histoire  et  le  témoi­gnage  de  l’engagement  du  4e RCh  peut  être  un  prolon­gement  à  ce  travail.  Nous avons la chance d’avoir une unité de lieu et de temps sur notre domaine qui nous per­met d’évoquer l’environne­ment  historique  et  militaire des  régiments auxquels no­tre famille est attachée. »

    Si vous deviez vous adresser aux soldats du “4” avant leur départ pour l’Afrique, que leur diriez-vous ?

    « D’abord ma fierté d’être le parrain de ce régiment enga­gé  dans  la  défense  de  nos idéaux  et  de  notre  pays.  Il  faut aujourd’hui toucher l’en­nemi  sur  ses  bases.  La  mis­sion que portent  les  sol­dats  du  “4” est  très  im­portante pour  le  pré­sent  et  pour notre  avenir et toutes les promesses por­tées. »

    Nous sommes à un an des élections présidentielles, va-t-on entendre votre voix dans cette effervescence préélectorale, et même cette cacophonie ?

    « Sur les questions politiques, pas plus que ça. D’abord par­ce que je ne suis pas le chef de ma famille. Sur des sujets plus  particuliers,  je  peux  avoir des choses à dire ; mais dans  tout  ce  brouhaha,  ma  voix est inaudible. Je préfère m’exprimer dans l’action plutôt que dans la parole, c’est une qua­lité ou un défaut. Je préfère travailler sur les questions de long terme que de m’arrêter à une élection qui, je l’espère, n’enfoncera pas un peu plus notre pays au regard des dif­ficultés qu’il traverse.

    La monarchie et son rétablissement sont un recours politique possible, comment vous positionnez-vous ? En “militant” de votre propre cause ou en spectateur discret en retrait mais disponible ?

    « Je ne suis pas un “militant”, je suis dans la retenue. J’incarne cette tradition des prin­ces qui ont servi leur pays et je  le  montre  par  un  certain  nombre d’actions que je mè­ne ; et ce parrainage en fait partie. J’ai d’autres flèches à mon arc avec la défense des chrétiens d’Orient. J’étais en Syrie  au  mois  d’avril  avec  l’évêque de Toulon pour un jumelage d’évêchés. J’ai  tout  ce travail  local à Dreux mais aussi  l’édu­cation de mes enfants, ça  fait  beaucoup  de  choses. La question de la monarchie peut  apporter  des  éléments  intéressants.  C’est  le  fait  de ne  pas  s’arrêter  au  moyen  terme et de se projeter sur le long terme, être dans une dy­namique  de  construction. Une  fois  accomplie,  c’est  le  fils  qui  poursuit  cette  cons­truction  puis  le  petit­-fils.  Le pré capétien a grandi petit à petit. On a besoin de référen­tiel  et  de  perspective. Aujourd’hui, le monde politi­que  tel  qu’il  est  n’en  donne plus vraiment. De là à un re­tour  à  la  monarchie ?  Les Français  sont  monarchistes  de cœur, mais pas encore de raison. »

     Avez-vous un lien avec les Hautes-Alpes ?

    « J’ai un lien avec les Alpes, j’ai  vécu  de  7  à  11  ans  tout  près d’Annemasse ; mais hé­las, pas avec la ville de Gap. Je suis heureux de ce parrai­nage avec le 4e RCh qui est dans la tradition de notre fa­mille où les héritiers avaient des  régiments  où  ils  étaient  colonels. Voilà le lien. » 

    Propos recueillis par Alain BARADAT­

     

    Le prince Jean d'Orléans a présidé sa première cérémonie

     

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    La  famille  d'Orléans  a  un lien  historique  avec  le 4e Rch  :  Louis  de  Bourbon  Condé,  comte  de  Clermont, ancêtre du prince, a laissé le nom.  C'est  au  terme  d'une  journée marathon de présen­tation  de  l'unité,  où  le  “par­rain du 4” a visité l'emprise du quartier général Guillaume et fait  la  démonstration  de  ses qualités de tireur au simula­teur de tir aux armes légères (Sittal), qu'il a présidé sa pre­mière cérémonie sur la place d'armes de Clermont­-Prince, celle de la création du grou­pement tactique désert (GTD) baptisé  “Edelweiss”.  Ce GTD, constitué sur l'ossature de Clermont-­Prince renforcée de  deux  sections  du  27e Ba­taillon  de  chasseurs  alpins, d'une section du 2e Régiment étranger  du  génie  et  d'une  équipe du 93e Régiment d'ar­tillerie de montagne, sera dé­ployé  dans  quelques  semai­nes sur la bande sahélo­-saha­rienne pour 4 mois.

    Le chef de corps du “4” s'est adressé  au  prince  Jean  de­vant les troupes : «  Votre fa­mille se trouve donc aujourd'hui encore réunie auprès des soldats de monta­gne,  cavaliers  et  fantassins mais  surtout  chasseurs,  dont  l'action complémentaire  est gage  de  succès.  Quel  beau symbole que cet attachement familial  et  patrimonial  aux  unités de montagne qui se re­trouvent  depuis  leur  profes­sionnalisation  engagées  en  opérations  extérieures  sous un même commandement. » « Merci prince Jean et longue vie  au  groupement  tactique  désert Edelweiss », a conclu le colonel Fatinet.  A.B.

    EN IMAGES

    DANS

    LE BUREAU

    3135457778  2 a - Copie.jpgLa signature de la convention de parrainage entre le prince Jean d’Orléans et le olonel Jean-Jacques Fatinet, chef de corps du 4e RCh. Photo Le DL/V.O. 

     

     

     

    AU SIMULATEUR DE TIR

    3135457778  2 a.jpgAu Sittal, simulateur de tir aux armes légères, le prince a fait carton plein. Il avait officié dans la cavalerie lors de son service militaire. Avec 100 % de réussite, il a “abattu” tous les ennemis. Le scénario demandait de répondre à une attaque
    de terroristes en milieu urbain. Photo Le DL/V.O.

     

    Reportage repris du Dauphiné Libéré 5.05.2016