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LAFAUTEAROUSSEAU - Page 1246

  • Emmanuel Macron, le chantre de la société des individus

     

    Par 

     

    XVMb1a0a3cc-c313-11e7-b1f9-8e8a8cad8fcc-100x166.jpgMélenchon déprimé, Le Pen démonétisée, Wauquiez vilipendé, des socialistes cornérisés, tout se passe comme si «les sanglots longs des violons de l'Automne «avaient pétrifié toutes les formes d'opposition politique dans ce pays. 

    On envisageait la rue ? Celle-ci, nonobstant quelques mobilisations sporadiques, est restée calme.

    On envisageait des transports bloqués ? Rien n'est venu paralyser le pays, ni les routiers, encore moins les cheminots.

    D'aucuns suggèrent un mouvement étudiant, mais le mot de « sélection » , épouvantail totémique de bien des gouvernements, parait désormais accepté par une majorité de français et ne plus effrayer les jeunes entrants à l'Université.

    Force est de constater qu'avec sa ligne assumée, son usage des symboles de l'autorité, de la distance, du surplomb, et une communication de tous les instants, dosée entre la verticalité de la fonction et la proximité de la personne, le président de la République a pour l'instant déminé une rentrée qui lui permet de décliner sans trop d'encombres un programme que les électeurs n'ont même pas plébiscité, optant plus par défaut que par adhésion pour le marcheur.

    Le paradoxe veut que les Français aient choisi Macron et non le macronisme. Mais ce faisant , c'est bien le macronisme, quintessence des bourgeoisies de droite et de gauche enfin fédérées, qui applique sa politique dans les veines profondes du pays.

    Toute la question consiste à comprendre comment Macron est devenu en cet automne « le point de coordination tacite » ou s'agrègent les bourgeoisies et où se diluent et s'effilochent, pour l'instant, les élans protestataires en autant de mouvements velléitaires.

    L'essence du macronisme repose sur trois piliers qui, à ce stade, contribuent à sa stabilité automnale.

    Le style d'abord de son leader qui a fait de l'apparence, plus que ses prédécesseurs, la vitrine de sa politique.

    Macron rassure les bourgeois. Il les consolide dans cette croyance que gouverner c'est aussi obéir à des codes, à des usages, c'est-à-dire à une épure qui avait été quelque peu malmenée ces deux derniers quinquennats. Le bourgeois a reproduit de l'aristocratie de cour l'exigence de l'étiquette et du respect des formes. Il se déploie dans un « entre soi » où le regard jauge, évalue, contrôle.

    Macron récite l'histoire d'une bourgeoisie éclairée, sûre de son fait, déterminée à ne pas se laisser déposséder du pouvoir; il en incarne la posture, plus gentilhomme parfois que bourgeois, mais aussi trivialement bourgeois quand il laisse transparaître son agacement lorsque l'on proteste un peu bruyamment contre sa politique. C'est un fait que le bourgeois n'aime pas « le bordel ». Le désordre l'offusque et Macron sait parfaitement mettre en scène son indignation.

    Mieux : il décomplexe le bourgeois qui ne doit pas avoir honte de son statut, y compris dans le face-à-face avec le « populo ». Il n'hésite pas à dire au chômeur de « bosser » « pour se payer un costume » , et il n'est pas « le père Noël » quand il débarque à Cayenne, dans cette Guyane où le taux de chômage atteint 20 %.

    Macron libère les consciences embourgeoisées, les réinstalle dans le confort de leur morale et de leur vision du monde. Il est tout à la fois le héros et le héraut d'une révolution, non pas conservatrice, mais bourgeoise. Il restaure l'habitus de la bourgeoisie dans une société où l'envie, la frustration, le ressentiment constituent de puissants moteurs politiques.

    Et c'est là le deuxième facteur de l'apaisement apparent dont semble bénéficier le macronisme en ce début de mandat. Il martèle une conception de la société dont le leitmotiv, à la manière d'un Guizot exhortant les Français du XIXème siècle à s'enrichir par le travail et par l'épargne, consiste à les enjoindre de réussir.

    « Réussissez » clame Macron ; et surtout exige-t-il de ses concitoyens de renoncer à toute forme de jalousie à l'encontre de la réussite de leur voisin. Ainsi propose-t-il de rompre avec une culture de la culpabilisation du succès, vieil héritage catholique d'un pays laïque dont l'inconscient religieux ne cesse de se manifester, y compris parfois parmi les plus hostiles à la religion !

    Macron est ce président qui incite chacun d'entre nous à procéder sur terre à son salut. Il est le chantre de « la société des individus » pour reprendre le titre d'un ouvrage de Norbert Elias. Cet engagement, répété implicitement ou explicitement, constitue le fil rouge de la doxa macroniste. Il contredit existentiellement toute une sensibilité égalitaire, sidère par son caractère assumé et, prenant à contre-pied une société lassée des mobilisations catégorielles, impose son culot en flattant aussi l'individualisme, cette autre dimension de la sociologie française ...

    La communication du président théorise le mouvement - « En Marche »; illustre celui-ci en suggérant l'exemple de Macron comme modèle de réussite individuelle - les initiales du président « E M » rappellent cette convergence entre le slogan et le leader ; reproduit à satiété ce que le publicitaire Rosser Reeves conceptualisa au milieu du siècle dernier dans la notion de « Unique selling proposition » «ou « proposition unique de vente ».

    Toute la philosophie politique du macronisme vise à promouvoir l'individu, l'individuel, l'individualisme comme moteur de la cohésion sociale. De quoi s'agit-il au fond si ce n'est, au prix d'un raisonnement où le sophisme le dispute à une vision trivialement mathématique du social, de considérer que la somme des réussites individuelles est ce qui soude et fait sens pour la société ... C'est ce parti pris, philosophiquement libéral, que le jeune président promeut à un moment de grande fatigue collective.

    Bourgeoise, individualiste, la politique du jeune chef de l'Etat s'accompagne d'une pratique du pouvoir dont la discrétion frôle la méfiance et l'obsession du secret. Réalité que confirme, entre autres, la clause de confidentialité que vient de faire signer à ses collaborateurs le président ...

    À l'instar d'Auguste Comte qui observait que l' « on ne rentre pas dans les cuisines de la science » , Emmanuel Macron exige du pouvoir qu'il se fabrique dans le silence et la pénombre.

    C'est là le troisième pilier de la foi macroniste. Pas de dévoilement inutile : un rideau s'interpose entre la société et le Prince, quand bien même celui-ci orchestrerait avec une régularité de métronome sa présence au monde. La communication du président explicite des valeurs mais conserve cette énigme qui incite à s'interroger, à susciter une fascination implicite par le non-dit qu'elle suggère.

    Communiquer, c'est aussi savoir se taire et ne pas montrer. Le bourgeois est un individu secret . Par nature, par conviction et par intérêt. La métaphore du moment en quelque sorte mais qui ne constitue pas pour autant la vérité de demain.

    L'opinion n'est pas domestiquée, ni conquise ; elle attend. C'est l'expectative d'abord qui se lit dans le regard des Français ...  

    Arnaud Benedetti est professeur associé à l'Université Paris-Sorbonne, coauteur de Communiquer, c'est vivre (entretiens avec Dominique Wolton, éd. Cherche-Midi, 2016), et auteur de La fin de la Com' (éditions du Cerf, 2017).

  • Enfumage

     

    Par François Marcilhac

     

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    Emmanuel Macron serait-il en passe de réussir son pari et de «  modifier les choses  » en profondeur  ? Pourtant, les sondages, qui valent ce qu’ils valent, c’est vrai, ne semblent pas le confirmer. Et il a beau multiplier ce qu’il croit être de beaux coups médiatiques, notamment à l’international, ou donner dans une prétendue solennité à l’américaine en signant, lundi 30 octobre, de son bureau présidentiel, devant les caméras, entouré de Castaner, le porte-parole du Gouvernement, et de Collomb, le ministre de l’Intérieur, la loi «  renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme  » – il avait fait de même avec la loi de moralisation de la vie politique –, toutes ces pitreries médiatiques ne le font pas progresser dans l’estime des Français qui n’ont pas mis longtemps à percer l’arrogant mépris du personnage à leur endroit. Les médias et le pays légal dans son ensemble ne sont pourtant pas en reste pour faire son éloge. L’enfumage a même dépassé tout ce qu’on pouvait imaginer s’agissant de la directive européenne sur les travailleurs détachés, dont Macron avait fait du «  durcissement  » son cheval de bataille durant l’été, allant jusqu’à insulter les Polonais. Européiste fanatique, il veut faire de sa politique européenne le grand marqueur de son quinquennat. En l’occurrence, montrer que l’Europe saurait aussi protéger. C’est en gardant en tête cet axe qu’il faut juger sa prétendue victoire sur le sujet. Or, s’il est vrai que, désormais, le travailleur détaché devra recevoir une rémunération égale à celle de ses collègues locaux, selon les termes de l’accord trouvé à Luxembourg le 23 octobre dernier, il ne faut pas oublier que les cotisations sociales et retraites – du salaire différé – seront toujours celles du pays d’origine ou encore que Macron a dû jeter du lest concernant la durée des détachements (non pas six mois, mais douze, voire dix-huit). On dira que ce dernier point est symbolique, puisque en France – deuxième pays d’accueil derrière l’Allemagne –, la durée moyenne d’un détachement est de trente-cinq jours  ? Macron, d’un côté, ne fait donc que dans le symbolique et, de l’autre, n’a rien cherché à obtenir concernant les grosses entreprises du BTP, qui continueront toujours à avoir intérêt à embaucher des salariés qui socialement ne leur coûteront rien et dont ils pourront indéfiniment répéter les détachements. Quant aux transporteurs routiers, pourtant un gros morceau, ils échappent au «  durcissement  » de la directive, alors que le transport routier français a été divisé par trois en quinze ans en raison de la concurrence déloyale des pays de l’Est et des pays ibériques – qui auraient rejoint les premiers si Macron s’était entêté. Enfin, ces mesures entreront en vigueur, après l’accord du Parlement européen, au plus tôt en… 2022  ! Et la création d’une «  autorité européenne du travail  » permettant de contrôler leur application est renvoyée aux calendes grecques au profit d’une coopération administrative entre États… qui n’a jamais fonctionné jusque-là. On comprend immédiatement le caractère pernicieux de cet accord  : invalider dans l’œuf toute nouvelle critique de la directive en prétextant que son durcissement a réglé tous les problèmes. Ce qui est évidemment faux, comme on vient de le voir. Mais le but de Macron – comme de sa fausse opposition, de droite et de gauche, qui ne peut donc le critiquer sur ce point – est d’édifier une Europe sociale à bas coût, sur le modèle allemand dans un premier temps – il l’a explicitement annoncé à la Sorbonne – avant d’imposer une précarité encore plus grande. Alors qu’une vraie politique de protection de l’économie et des travailleurs français aurait été de contester le principe même de cette directive ou d’imposer, par exemple, sur les chantiers, la clause Molière. Mais Macron ne pense pas français. Macron thinks European

    Pour en finir avec le tirage au sort

    Les nouvelles mesures annoncées ce 30 octobre par le Gouvernement pour mettre fin au scandale – notamment l’ubuesque tirage au sort – de l’inscription des néo-bacheliers dans le premier cycle universitaire participent du même enfumage. Elles ont beau constituer pour le Premier ministre «  une réforme profonde du premier cycle universitaire  » assortie d’«  un contrat pédagogique  », elles trahissent le piège dans lequel se trouve pris tout gouvernement qui n’entreprendra pas une refonte totale du système. D’ailleurs, Édouard Philippe d’ajouter piteusement, comme pour plaire à tout le monde – et on sait que dans ce cas, on ne plaît à personne  : «  Je n’ai pas et je n’ai jamais eu peur du mot sélection, mais ce n’est pas ce que nous proposons. L’objectif n’est pas que l’université dise non. Dans la plupart des cas, elle dira oui, et dans certains cas elle dira oui si.  » Et les organisations étudiantes et lycéennes d’appeler à une mobilisation le 16 novembre contre une sélection qui ne dirait pas son nom, le «  oui si  », voire un «  non  » rarissime pour des potaches qui n’auraient décidément pas le profil des études envisagées leur paraissant encore trop sélectif. Mais comment leur donner tort  ? Et oublier que l’entrée à l’université est déjà soumise à une sélection, qui a pour nom, précisément, le baccalauréat, qui est non pas, comme on le croit ordinairement, un examen de fin de cycle mais le premier grade universitaire  ? Aussi le pouvoir se trouve-t-il coincé par plusieurs décennies de démagogie ayant abouti à priver le bac, désormais donné à tous, de sa raison d’être. Pourtant, dès les années 1970, le sociologue Raymond Boudon, dans L’Inégalité des chances, avait montré le caractère pervers, pour les élèves les plus défavorisés, de la massification des diplômes, qui les prive de toute valeur. Aussi les mesures prévues – outre le «  oui si  » des universités, un dispositif spécifique pour les filières en tension, l’avis des professeurs de terminale, la nécessité d’un prérequis pour les étudiants ayant reçu un avis sous condition ou encore des stages de prérentrée ou des cours renforcés (donnés par qui, où, avec quel argent  ? ) – seront-elles inefficaces et coûteuses tout en ne faisant qu’aggraver la situation, puisque Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, a annoncé que 500 millions d’euros seraient investis dans le but de créer de nouvelles places dans les filières les plus demandées par les étudiants, sans même que soit étudié le besoin social et économique auquel répondent ces filières. Comme si c’était à la société – l’université étant gratuite en France – de financer des études dans des filières dont le seul débouché est le chômage.

    Une impasse républicaine

    Oui, le pouvoir est coincé  : soit il restaure le bac dans sa plénitude de premier grade universitaire, ce qui impliquerait de le rendre à nouveau sélectif et de ne plus le donner à 80  % d’une classe d’âge, soit il en fait un simple diplôme de fin de cycle, et autorise les universités à organiser leur propre sélection. Avec la fac pour tous, nous sommes aujourd’hui dans le pire des scénarios, celui qui refuse tout sélection, la fac servant seulement à soulager Pôle emploi. Mais quelle serait l’acceptabilité sociale d’une de ces deux réformes auprès des familles, alors même qu’avoir le bac, et donc entrer à l’université, est devenu un droit  ? Et que faire des jeunes qui seraient refoulés  ? On voit bien qu’il faut reprendre le problème de l’orientation dès le collège… et celui de l’apprentissage des fondamentaux, parfois ignorés des étudiants de première année, dès l’école primaire. Tout en prévoyant des filières professionnelles valorisantes… Mais comment la République, qui repose sur le mythe incapacitant de l’égalité, pourrait-elle entreprendre une telle refonte  ?   

  • Éric Zemmour : Sélection à l'université, le choix du gouvernement, analyse ...

    L'affaire Malik Oussékine 

     

    BILLET - Comme un baigneur qui renonce à plonger dans l'eau après l'avoir longtemps tâtée du pied, le gouvernement a finalement renoncé.  [RTL 31.10]

    Sur ce même sujet, celui de la sélection à l'université, on lira ci-dessus l'analyse de François Marcilhac ...   LFAR 

     

     Résumé RTL par Éric Zemmour et Loïc Farge

    « L'eau du Rubicon était trop froide.» Éric Zemmour analyse le choix du gouvernement de ne pas mettre en place de sélection directe à l'université. « Comme un baigneur qui renonce à plonger dans l'eau après l'avoir longtemps tâtée du pied, le gouvernement a finalement renoncé », analyse-t-il.

    Pour Éric Zemmour, le sujet est au point mort depuis des décennies politiques. « Le dernier à avoir osé s’appelait Jacques Chirac. Il était Premier ministre d’un gouvernement de cohabitation en 1986 », rappelle-t-il. 

    Le ministre des Universités d'alors, Alain Devaquet, « était un naïf audacieux ». « En politique, on appelle ça un candidat au suicide. (...) Dans la fureur des manifestations étudiantes, on releva un mort sous les coups de la police : Malik Oussékine. Depuis, le syndrome Malik Oussékine tétanise tous les politiques », estime Éric Zemmour.  

    Éric Zemmour

  • Jean-Paul Brighelli au Café Actualité d'Aix-en-Provence ce soir mardi 7 novembre ... A ne pas manquer !

     

    18 h 45 : accueil. Entrée libre.

    19 h : conférence et débat animé par Antoine de Crémiers

    20 h 30 : fin de la réunion.

    Participation sous forme de consommation.

    Consommations à commander et régler au bar en arrivant. Merci !

    La soirée s'achèvera par un dîner réunissant les participants qui le souhaitent. 

    Inscriptions et renseignements: 06 16 69 74 85

    Café d'Actualités d'Aix-en-Provence : généralement, le premier mardi de chaque mois.

  • Comédie ou tragédie ?

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

    logo lundis.jpgNe nous moquons pas trop et trop vite de M. Puigdemont.

    Certes, jusqu’à maintenant on ne peut pas dire qu’il ait donné de lui une image très avantageuse. Certains ont même souligné le côté minable et ridicule du personnage. Pour M. Zemmour, « Puigdemont rappellera aux amoureux de l'histoire de France le destin tragi-comique du général Boulanger » (RTL, jeudi 2). Mais l’avenir seul dira si sa longue marche vers l’indépendance aura été un fiasco. En effet tout cela pourrait encore mal finir. Dès 2006, le nouveau statut d’autonomie, concocté et approuvé unilatéralement par le « Parlament de Catalunya », constituait une véritable injure à l’Espagne. La censure partielle du Tribunal Constitutionnel en 2010 a constitué une réponse légaliste, laquelle n’aura servi qu’à attiser le feu indépendantiste. M. Rajoy ferait donc bien de ne pas pécher par excès de confiance. 

    13e68f6_5354216-01-06.jpgL’organisation  d’élections régionales en Catalogne répond sans doute à une logique institutionnelle (la tutelle de Madrid n’ayant pas vocation à s’éterniser) mais en les convoquant pour le 21 décembre, et en se plaçant ainsi dans le rôle de celui qui identifie la défense de l’intégrité espagnole à l’application sourcilleuse de mesures dictées par la loi, le chef du gouvernement rabaisse le débat de fond sur la nature même de l’Espagne au niveau purement comptable d’une consultation électorale. Il prend ainsi le risque - qui existe, au vu du rapport de forces actuel - d’être désavoué. Rien ne serait pire qu’un score avoisinant, voire dépassant, les 50% pour les indépendantistes qui, rappelons-le, disposaient de 72 sièges (majorité absolue) dans l’assemblée sortante pour 47,8% des voix. L’Espagne a certes une constitution qui ne reconnaît pas à une de ses communautés autonomes le droit au séparatisme, elle se vit malheureusement aussi comme une démocratie exemplaire, même couronnée. M. Guetta (France Inter, mercredi 1) peut dire : « Indépendance ou pas, ce sont ainsi les électeurs qui auront à trancher […] Majoritaire à plus de 50% des suffrages exprimés, on voit mal comment l’indépendance ne deviendrait pas réalité. » 

    Les indépendantistes ont de toute façon plus à gagner qu’à perdre dans ces élections car, même battus, ils maintiendront leur revendication, soutenus qu’ils sont par une bonne partie de la jeunesse, littéralement enragée et dévoyée par un enseignement qui, depuis le statut de 1979, trahissant délibérément l’esprit même de ce statut, a fait de la langue catalane une arme de guerre contre Madrid en marginalisant la langue espagnole, langue de l’ensemble du pays. Les séparatistes catalans, pour reprendre les propos de M. Carderera, ambassadeur d’Espagne (France Inter, jeudi 2), « identifient la Catalogne avec eux-mêmes », allant jusqu’à dénier le droit aux Catalans qui ne votent pas comme eux de se dire catalans (propos explicitement tenus par l’ex-président du Parlement, Mme Forcadell). Le fanatisme anti-espagnol de certains n’a, on le voit, aucune limite. 

    Il conviendrait donc de relativiser la portée du scrutin de décembre en rappelant qu’il ne s’agit nullement d’élections destinées à (in)valider l’indépendance de la Communauté autonome de Catalogne, leur seul enjeu étant la composition d’un nouveau « parlament » en charge de la gestion et de la gouvernance d’une région autonome, rien de plus : le futur parlement catalan, quelle que soit sa composition, n’a pas vocation à s’ériger en assemblée « nationale », ses prérogatives étant déjà très étendues par ailleurs, puisque seules lui échappent la défense, la diplomatie et la fiscalité. On attend donc ensuite de Felipe VI, chef d’Etat du royaume d’Espagne, symbole et garant de l’unité et de la pérennité dudit royaume, commandant suprême des Forces armées, qu’il déclare solennellement qu’aucune élection et qu’aucun référendum, même démocratiques, ne sauraient exclure la Catalogne de la communauté de destin qu’elle forme irrévocablement avec les autres composantes de la nation espagnole, telle que l’Histoire l’a façonnée et laissée en héritage. 

    Là est la légitimité. Et ceux qui, au mépris des réalités, imaginent, fantasment même, une République catalane, sont des apprentis-sorciers dangereux prêts à toutes les impostures et toutes les tragédies.  

  • Où est passée la France « d'en bas » ?

     

    Par   

    TRIBUNE - Maxime Tandonnet, expose ici en termes très concrets comment, tandis que la France d'en haut s'étourdit avec le phénomène #balancetonporc et bientôt avec les célébrations de mai 68 et des JO, ou d'autres encore, la France d'en bas et ses millions de chômeurs et de pauvres est oubliée [Figarovox, 24.10]. Cette fracture nous semble relever d'une certaine façon, tout en l'actualisant, de la vieille distinction maurrassienne entre Pays Légal et Pays Réel, si souvent reprise en toute occasion. Elle est annonciatrice d'affrontements et de violence. Maxime Tandonnet n'y apporte sans-doute pas les réponses qui seraient les nôtres. Mais il pose avec lucidité et pertinence les justes questions.  Lafautearousseau   

     

    131.jpg« Tout cela va très mal finir » aurait déclaré en privé le président Sarkozy. Que voulait-il dire par là ? Deux France évoluent en parallèle et l'abîme entre elles, ne cesse jour après jour de se creuser un peu plus. 

    La France dite « d'en haut », ses milieux dirigeants, ses responsables publics et politiques, ses réseaux d'influence, ses médias radio-télévision, ses experts, ses milieux financiers, se porte plutôt bien.

    La personnalisation médiatique du pouvoir, autour du plus jeune président de l'histoire, atteint un niveau vertigineux, jamais égalé, oscillant entre l'exaltation et l'exaspération, dans un monde factice, illusoire, surmédiatisé, où le culte du chef est l'écran de fumée qui recouvre, de quinquennat en quinquennat, l'impuissance publique à régler les problèmes des Français.

    De même, les crises d'hystérie s'enchaînent à un rythme endiablé, venues des Etats-Unis, après l'affaire des statues dites racistes, la dernière en date autour des scandales sexuels et du « balancetonporc » comme le montre si bien M. Gilles Goldnadel.

    La course aux lynchages bat son plein comme dans un jeu de « soft terreur » ayant le déshonneur public pour guillotine. Dernier « suspect », dernier lynché: le député M. Lassale, longtemps coqueluche des médias. Nul n'échappe désormais au syndrome de l'arroseur arrosé, au spectre d'une dénonciation, pas même les bourreaux eux-mêmes, comme le couperet s'est un jour abattu sur la nuque des Robespierre, Saint Just et Fouquier-Tinville

    La fuite dans les commémorations solennelles est elle aussi de routine. Il est logique que cette France dite d'en haut s'apprête à célébrer mai 1968, son acte de naissance, avec son culte du nivellement et de la table rase, son « interdit d'interdire », ses « CRS = SS » et son individu-roi qui s'exprime dans le célèbre - et ambigu - « jouissez sans entraves ». De même, la France dite d'en haut s'enivre par avance dans l'éblouissement des jeux olympiques de Paris 2024, comme pour oublier le présent et le monde des réalités.

    Mais au-dessous du grand maelström hystérique, où en est la France dite « d'en bas », celle de la majorité silencieuse et des tracas de la vie réelle ?

    Où sont passés les 5 à 6 millions de chômeurs ? Les 2 millions de bénéficiaires du RSA ?, les 8 à 9 millions de pauvres et les 3,2 millions de mal logés ?

    Que ne ferait-on pas pour noyer dans un tumulte stérile la pire tragédie de l'histoire de notre pays depuis 1945, celle d'une France ensanglantée par le terrorisme islamiste ?

    Et qui parle encore des squats et des bidonvilles qui prolifèrent sur le territoire ? Où en est la crise migratoire, les arrivées incontrôlées en Europe de centaines de milliers de personnes victimes des passeurs criminels ? Où en est l'aéroport de Nantes, voulu par l'Etat, confirmé par référendum, mais bloqué par les zadistes ?

    Et la situation des cités sensibles, les territoires perdus de la République, les trafics qui y règnent, les phénomènes de communautarisme et de repli identitaire, la tragédie de leurs habitants surexposés à la violence et qui ne demandent qu'à vivre en paix ?

    Où en sont les milliers de collèges et de lycées en crise, où les professeurs débordés par le chaos, insultés, giflés, ne parviennent plus à faire leur métier de transmission des savoirs fondamentaux ?

    En 2017 s'est déroulé un événement politique d'une portée capitale, historique, passé quasi inaperçu : le taux d'abstention aux élections législatives, le cœur de toute démocratie, pour la première fois dans l'histoire, a dépassé les 50% signant ainsi le naufrage de la démocratie française, dans l'indifférence générale.

    Cette fracture entre les deux France, la France dite d'en haut qui se noie dans les gesticulations de sa bulle médiatique et la France dite d'en bas confrontée à la tragédie du monde réel, est la source de tensions explosives, qui peuvent s'enflammer à tout moment, sous une forme ou sous une autre, dans la rue ou par un vote de destruction en 2022. Certes, aucun signe d'une explosion imminente n'est aujourd'hui décelable mais rien n'est plus calme qu'un magasin de poudre, une demi-seconde avant l'étincelle.  •

    Maxime Tandonnet est historien. Auteur de nombreux ouvrages, dont Histoire des présidents de la République (éd. Perrin, 2013) et Au cœur du Volcan, carnet de l'Élysée (éd. Flammarion, 2014), il vient de publier Les parias de la République (éd. Perrin, 2017). Découvrez également ses chroniques sur son blog.

  • Culture • Loisirs • Traditions

  • Société • Pires que les pires curés

     

    Par  Mathieu Bock-Côté

    Cette tribune [4.11] est de celles que Mathieu Bock-Côté donne sur son blogue du Journal de Montréal et auxquelles nous faisons très souvent écho .    LFAR  

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    Il y a quelques jours, c’était l’Halloween. Normalement, pour l’occasion, on se déguise, et généralement, en autre que soi.

    C’est ce que s’était dit le directeur d’un collège montréalais. Apparemment, il aimait Bob Marley. Il s’est donc déguisé en Bob Marley et s’est noirci le visage.

    Erreur ! Dans le climat hystérique qui domine aujourd’hui, son déguisement a fait scandale sur les médias sociaux.

    Fanatisme

    Des agités lui ont non seulement reproché sa possible maladresse, mais l’ont accusé de racisme parce qu’il se serait livré à la pratique du blackface. Ils font comme si nous étions ici dans le sud des États-Unis ! À quand une leçon d’histoire et de géographie ?

    Ils hystérisent la société en lançant sans cesse des accusations de racisme et de sexisme. Il s’agit d’une minorité criarde qui impose ses lubies à la société entière en créant des controverses grotesques et des scandales artificiels.

    On a appris que ce pauvre directeur d’école a même dû faire la tournée des classes ensuite pour s’excuser à ceux qu’il aurait blessés. C’est ainsi qu’on met les adultes en pénitence : on les condamne à l’humiliation publique.

    La société est désormais patrouillée par des idéologues excités qui font penser aux pires curés d’hier.

    Ils vérifient les costumes d’Halloween et écrivent des codes pour nous expliquer comment nous déguiser de manière politiquement correcte. Ils surveillent les blagues. Ils inspectent les publicités. Ce sont des préposés aux tabous et des policiers des bonnes mœurs multiculturalistes.

    Censure

    Ils réclament un droit de veto sur tout ce qui se dit en société et se croient tout permis parce qu’ils s’imaginent les défenseurs des « minorités opprimées ».

    Ils ont le fanatisme de ceux qui croient avoir le monopole de la vertu. Ils rêvent de censure.

    Pour un costume d’Halloween qu’ils désapprouvent, ils peuvent vous gâcher la vie. Et ils n’hésiteront pas à le faire. 

    Mathieu Bock-Côté

    Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (VLB éditeur, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012) de La dénationalisation tranquille (Boréal, 2007), de Le multiculturalisme comme religion politique (éd. du Cerf, 2016) et de Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).

  • Histoire • Action Française : Les affrontements des années 30 à Marseille

     

    Le Comité du Vieux Marseille, association de défense du patrimoine, vient de sortir une superbe plaquette de 194 pages sur l’histoire de la Canebière. Parmi celles-ci, quatre pages évoquent l’Action Française à propos de Jeanne d’Arc, surtout dans les années 30. Ces éléments de l’histoire de l’Action Française marseillaise intéressent les lecteurs de Lafautearousseau.

     

    Affiche tract expo CANEBIERE v4.jpgLes affrontements des années 30

    Comme l’ont écrit Roger Duchêne et Jean Contrucci dans leur livre Marseille, la Canebière « est, dans les années 1920-1930, le point focal de Marseille », surtout après sa prolongation en 1927. Dans une ville où l’opposition entre droite et gauche se durcissait, chaque occupation de la célèbre artère était une victoire.

    L’émeute parisienne du 6 février 1934 où, à la suite du scandale politico-financier Stavisky, les ligues d’extrême-droite affrontèrent la police, n’eut pas son équivalent à Marseille. Quatre cents membres de l’Action Française défilèrent ; il y eut quelques affrontements avec des communistes, à la hauteur du cours Saint-Louis, mais le calme se rétablit vite.

    En revanche, la gauche s’organisa pour s’opposer à ce qu’elle considérait comme une tentative de coup d’État fasciste. Pour la première fois, socialistes, communistes et syndicalistes CGT et CGTU, défilèrent ensemble, le matin du 12 février, sur la Canebière, les boulevards de La Madeleine et de Longchamp. L’atmosphère se gâta l’après-midi où des frictions entre policiers et manifestants transformèrent le centre-ville en champ de bataille, peut-être avec l’aide de provocateurs. Une fusillade devant La Bourse fit un mort et plusieurs blessés.

    L’atmosphère s’alourdit de plus en plus, surtout après les élections municipales de 1935, à l’issue desquelles les socialistes d’Henri Tasso battirent les listes de Simon Sabiani.

    Poussés par cette dynamique, les 100 000 partisans de la Gauche unie remontèrent toute la Canebière, le 14 juillet 1936 ; la droite, quant à elle, avait réuni dix fois moins de Marseillais.

    Le 1er mai 1936 enregistra un record de participation pour descendre la célèbre voie. Le cortège traditionnel pour Jeanne d’Arc rassembla cette année-là 8 000 personnes dont 800 royalistes sous la bannière de divers groupements qui remplaçaient la Ligue d’Action Française dissoute le 13 février. Ainsi, le commandant Dromard se retrouva-t-il en tête de l’association Marius Plateau des Anciens combattants royalistes.

    Le Front Populaire remporta les élections des 26 avril et 3 mai 1936 qui furent suivies par un grand mouvement de grève. Le parti de Sabiani s’opposa violemment à lui, le 17 juin. « La Canebière est devenue un champ clos où, par petits groupes, on règle des comptes. Des autodafés de drapeaux rouges sont ponctuées par le feu nourri des armes. Des voitures sont renversées. Les dégâts matériels sont impressionnants » (in Simon Sabiani, par J.-B. Nicolaï).

    Ces incidents n’empêchèrent pas le succès du 14 juillet : 200 000 personnes allèrent du Prado aux Mobiles, d’après Fernand Pauriol (Rouge-Midi – 17 juillet), contre 20 000 dans le défilé des nationaux.

    La fête de Jeanne d’Arc du 8 mai 1937 montra que la droite marseillaise s’était unie contre le « péril rouge ». D’après l’Action Française, sur les « 20 000 patriotes qui défilèrent derrière Eugène Pierre, nouveau président du Comité, Simon Sabiani avec le P.P.F. et Jacques Arnoult avec le P.S.F. (ex-Croix de Feu), étaient présents pour la première fois ».

    Les Marseillais eurent de nombreuses occasions d’arpenter le pavé mais combien étaient-ils réellement ? Les chiffres publiés dans les journaux sont tous sujets à caution. Robert Mencherini, dans Midi rouge, ombres et lumières (éditions Syllepse, 2004), le souligne en citant l’exemple du 1er mai 1938 : dans Rouge-Midi, le journal communiste, la Canebière est noire de monde ; dans Marseille-Matin, le quotidien de Jean Fraissinet, elle est vide.

    Le 14 juillet 1939, on aurait dû fêter le cent-cinquantième anniversaire de la Révolution. La journée fut marquée au contraire par deux défilés marquant la division des Français à la veille de la guerre.  • (Fin)

    AF Canebière.jpg

    1er mai 1936, manifestation de force des syndicats

  • Culture • Loisirs • Traditions

  • Histoire • Action Française : Les royalistes sur la Canebière

     

    Le Comité du Vieux Marseille, association de défense du patrimoine, vient de sortir une superbe plaquette de 194 pages sur l’histoire de la Canebière. Parmi celles-ci, quatre pages évoquent l’Action Française à propos de Jeanne d’Arc, surtout dans les années 30. Ces éléments de l’histoire de l’Action Française marseillaise intéressent les lecteurs de Lafautearousseau.

     

    Affiche tract expo CANEBIERE v4.jpgL’importance de Jeanne d’Arc

    Après la Grande Guerre, la droite prit l’habitude de se montrer dans la rue à l’occasion de la fête de Jeanne d’Arc.

    Des hommages avaient commencé, avant 1914, souvent à l’initiative de l’Action Française. Après avoir été béatifiée en 1909, la libératrice d’Orléans fut canonisée le 16 mai 1920. Deux mois plus tard, le 10 juillet, une loi votée par les députés et sénateurs (et toujours en vigueur) instaurait « la fête nationale de Jeanne d’Arc et du patriotisme », le deuxième dimanche du mois de mai.

    Chaque année, pour une journée, le centre-ville et surtout la Canebière furent ainsi occupés par le cortège d’un grand nombre d’associations religieuses et politiques de droite.

    L’exemple du cortège du dimanche 10 mai 1935, tel qu’il est décrit par Le Petit Marseillais, Le Soleil et L’Action Française, montre comment on l’avait organisé et qui furent les participants. En tête, après la fanfare, venaient les porteurs des fleurs offertes par le Comité des Fêtes de Jeanne d’Arc, présidé par Dominique Piazza, le créateur de la carte postale illustrée. Puis, ce fut le tour des jeunes sportifs des patronages et des scouts. La partie catholique se terminait avec les groupes de travailleurs chrétiens, après qu’eurent défilé des délégations d’anciens combattants et d’officiers de réserve. La seconde partie comprenait les « groupements nationaux », c’est-à-dire les partis politiques nationalistes. On aperçut Solidarité française et les Jeunesses Patriotes de Francis d’Azambuja, mais on remarqua surtout le gros des troupes, constitué par les royalistes de l’Action Française. Ils suivaient le commandant Louis Dromard, président de la fédération provençale, et l’amiral Antoine Schwerer, président national de la Ligue d’Action Française, de 1930 à 1936, venu à Marseille assister au Cinquième congrès de la fédération, prévu ce même jour. Parmi les adhérents, se distinguaient les Dames et Jeunes Filles Royalistes, l’Association Marius Plateau (anciens combattants), les étudiants d’AF et les Camelots du Roi (service d’ordre du mouvement). Il faut noter que les Croix de Feu défilèrent de façon indépendante, un peu avant les autres.

    Le cortège démarra à 9 h 30, cours Pierre Puget, passa place de la Préfecture et rue Saint-Ferréol pour déboucher sur la Canebière qu’il remonta jusqu’à l’église des Réformés. Sur le trajet, les façades des immeubles étaient souvent décorées à la gloire de l’héroïne. On déposa des fleurs au pied du monument aux Mobiles, puis, en l’absence des autorités civiles, militaires et religieuses déjà entrées dans l’église Saint-Vincent-de-Paul, il y eut une minute de silence qui s’acheva par le cri de « Vive la France », poussé trois fois par Dominique Piazza ; la foule entonna enfin La Marseillaise et la messe solennelle put commencer. À 11 heures, la Société des Touristes du Midi donna un concert, au kiosque. Les festivités se poursuivirent l’après-midi au jardin zoologique avec un festival de chanteurs. Enfin, à 21 heures, les Marseillais purent profiter d’un feu d’artifice tiré sur la colline Notre-Dame de La Garde. En 1934, des navires de guerre japonais en escale à Marseille donnèrent le ton en braquant leurs puissants projecteurs sur la basilique pour l’illuminer.

    Si un tel déploiement de population donnait une grande impression de puissance il n’empêchait pas les incidents. Ainsi, le 10 mai 1935, à la sortie de la messe, des bagarres se produisirent entre vendeurs de journaux. D’autres, plus importantes, opposèrent, à l’angle du cours Belsunce, communistes et royalistes à la sortie de leur banquet. Dix Camelots du roi furent blessés. Dix ans auparavant, le 9 février 1925, une réunion catholique salle Prat, rue Paradis, avait été attaquée par l’extrême-gauche. La bagarre avait fait deux morts. La mairie de Siméon Flaissières prit prétexte de ce drame pour interdire plusieurs manifestations. Ce fut le cas de l’hommage à Jeanne d’Arc du 9 mai 1926. Les ligues politiques bravèrent l’interdiction sans incident.  (A suivre)

    AF Canebière réformés.jpg

    En 1943, le cortège de Jeanne d'Arc se termina par l’inauguration de la statue de la sainte placée sur le parvis des Réformés. L’oeuvre de Louis Bottinelly avait été financée au moyen d’une souscription lancée par le Comité Jeanne d’Arc en 1941. Le 9 mai 1943, le commandant Dromard, devenu président du comité, remit officiellement, en présence de Mgr Delay, la statue à la ville de Marseille, représentée par Henri Ripert.

  • Société • Ça doit être sympa, d’être de gauche…

     

    Par Gabrielle Cluzel

    Une excellente chronique qu'on ne peut qu'approuver, parue dans Boulevard Voltaire du 23.10. 

    Rappelons pour ceux qui l'ignoreraient que Gabrielle Cluzel a participé - d'ailleurs brillamment - au colloque du Cercle de Flore « Refonder le bien commun », du 13 mai dernier, à Paris (Illustration ci-dessous).  LFAR 

    2654943674.jpgÇa doit être sympa, d’être de gauche. D’être du côté des gentils, des bons, du bien, de ceux qui ont toujours raison.

    Christine Boutin vient de se retirer de la politique. Beaucoup de remerciements, bien sûr, mais il faut lire, aussi, les injures que cette annonce suscite. Il faut voir les seaux d’immondices que des anonymes, bien planqués derrière les volets occultants des réseaux sociaux, lui déversent sur la tête. Comme à chacune de ses interventions, d’ailleurs. Et elle, stoïque, ne répond rien. Peu ou prou comme Ludovine de La Rochère, et avec le même flegme, elle subit quotidiennement les flèches hargneuses, graveleuses, misogynes, ordurières, insultantes… de ceux-là qui arborent, deux tweets plus bas, le plus sérieusement du monde, le hashtag #BalanceTonPorc. Si Christine Boutin devait balancer tous les porcs qu’elle a, malgré elle, côtoyés, il ne suffirait pas d’une journée.  

    C’est chouette, d’être de gauche. On peut être schizophrène, de la plus grossière mauvaise foi… et se sentir dans son bon droit. 

    On dénonce, donc, le harcèlement sexuel, avec des airs douloureux de rosière outragée, mais – on ironise – « faut-il que vous ayez le front bas et l’esprit puritain ! » – on s’indigne avec effroi – « Goebbels, va ! » – si vous suggérez qu’on pourrait commencer par balancer (à la poubelle ou, en tout cas, hors de l’espace public) ces « œuvres d’art » autoproclamées imposant au passant un regard aussi poétique sur la femme et la sexualité que le « vagin de la reine », le plug anal ou, récemment, devant Beaubourg, « Domestikator » (sic). 

    C’est bien, d’être de gauche. On peut mettre ses neurones sur off, son cerveau en vacances, déserter toute réflexion critique en laissant simplement une alarme qui détecte les effractions dans la maison pensée unique : elle fonctionne avec quelques mots clés, s’appelle réductio ad hitlerum (ou, variante, ad FNum, ad LMPTum, ad SensCommunum) et, quand elle couine, fait un boucan de tous les diables. Aucune chance que le brigand téméraire – suicidaire ? – tente une nouvelle incursion. 

    C’est commode, d’être de gauche, parce qu’on fait sa propre loi. Robin de La Roche l’évoquait, hier, avec l’éloquence qu’on lui connaît : on peut publier, à l’instar d’Europe 1 sur l’Action française, les plus grossières Fake News – imaginons, mutatis mutandis, un fiché S soupçonné de passer à l’action qui aurait un court moment fréquenté telle mosquée, puis l’aurait quittée ne la trouvant pas assez « radicalisée »… que dirait-on du journal qui oserait titrer : « Enquête sur cette mosquée islamiste qui fomentait un attentat » ? – et continuer à plastronner sans complexe, auréolé du Décodex.

    Ça fait rêver, d’être de gauche. Ou pas. Le joker permanent qu’est l’anathème est mère de l’indigence intellectuelle la plus crasse. Plus besoin de réfléchir, de justifier, de traquer in petto ses propres incohérences avant de s’exprimer, puisqu’on ne démontre plus : on assène. On tient les autres licou serré, mais on se laisse aller, pour soi, avec paresse – qui jugerait les juges ? – à la pensée relâchée.

    Leur tyrannie intellectuelle aura eu cet effet purificateur de forcer le camp qu’ils exècrent à l’exigence, l’honnêteté, la rigueur, car observé, surveillé, matraqué, celui-ci n’a pas le droit à l’erreur. Et c’est sans doute le meilleur service qu’ils lui auront, involontairement, rendu.   

    Ecrivain, journaliste

    Son blog

  • Cinéma • Le tombeur de ces dames, une comédie de Jerry Lewis avec Jerry Lewis

     

    Par Guilhem de Tarlé 

    Le tombeur de ces dames, une comédie de Jerry Lewis avec Jerry Lewis 

    J’ai eu honte d’être allé voir ce film, honte d’y avoir entraîné mon épouse et honte en me disant qu’il me faudrait confesser ma faute, la « reconnaître devant mes frères » comme on dit maintenant,  dans un petit commentaire !

    Ma seule « bouée » était de me dire que je voyais cette comédie dans « le plus vieux cinéma du monde », l’Eden-Théâtre de La Ciotat, dans lequel  les frères Lumière réalisèrent en 1895 une expérience du cinématographe. J’ai pu donc, comme à l’origine, me décharger de mon péché. C’est L’Eden qui se déconsidérait en mettant cette « pochade » à l’affiche, et non pas moi qui la regardais !

    Nous étions 7 dans la salle en début de séance et 5 seulement à lire « The End »… et je remercie Anne, ma femme, d’être restée stoïque à côté de moi !

    Je me réjouissais pourtant de ce spectacle, en en ayant un autre en mémoire (lequel ?) qui m’avait beaucoup amusé quand j’étais enfant avec le duo Jerry Lewis et Dean Martin !

    Je mentirais si je disais que, cette fois-ci, je n’ai pas parfois éclaté de rire, d’autant plus que j’avais en perspective et je redoutais la réaction post-visionnage d’Anne, mais c’est quand même trop grand-guignolesque, trop clownesque, trop de grimaces pour être vraiment drôle. C’est réellement du cinéma nul pour les nuls… ça a d’ailleurs cet intérêt historique d’une réalisation américaine de 1961 !

    Ce n’est ni vulgaire ni scabreux… Peut-être cela amuserait mes petits-enfants autour de dix ans, et en tout cas c’est moins malsain que bien d’autres choses qu’ils pourraient être conduits à voir !  

  • De la mondialisation

     

    Par Stéphane BLANCHONNET

     

    648211564.jpgLe monde a déjà connu des phénomènes en partie comparables à ce que l'on nomme aujourd'hui la mondialisation. L'empire romain dans l'Antiquité, l'expansion européenne et la première épopée coloniale à la Renaissance, la seconde épopée coloniale et la domination économique et financière du Royaume-Uni à l'ère de la Révolution industrielle et jusqu'en 1914.

    Comme l'actuelle mondialisation, ces phénomènes furent des faits, ni bons ni mauvais en eux-mêmes, résultant de causes politiques, militaires, technologiques, démographiques, plus ou moins contingentes mais dont la force une fois déchaînée fut irrésistible, n'en déplaise à ceux qui pensent pouvoir nier ou arrêter l'histoire ! Notons à l'inverse, à l'intention des progressistes béats, que la mondialisation du commerce à la Renaissance a requis la traite négrière et que le libre-échangisme et l'accroissement des forces productives au XIXème siècle se sont achevés dans la Première guerre mondiale.

    La mondialisation contemporaine, comme les précédentes, est un Janus. Elle présente une face souriante, qui tient à la rapidité des communications et au développement technologique, et une face grimaçante avec le déracinement, les migrations, les catastrophes écologiques, les chocs de civilisation. Devant cette réalité, l'Action française, parce qu'elle défend l'idéal gréco-latin et chrétien de la raison et de la mesure, souhaite poser des digues, des frontières, des limites, pour corriger les effets pervers de la mondialisation sur notre identité, notre souveraineté et nos libertés. Mais parce qu'elle n'est pas un cénacle réactionnaire utopiste, elle n'appelle pas pour autant à une hypothétique décroissance, synonyme de renoncement de la France à la puissance, au rayonnement et à l'influence.

    Alors que les gauchistes militent vainement pour un monde sans frontière et sans limite (politique, humaine ou morale), manifestant ainsi leur rôle d'alliés objectifs du Capital le plus apatride, le nationalisme intégral souhaite que la France joue pleinement son rôle dans le monde tel qu'il est mais à sa manière (avec un État stratège par exemple), conformément à son génie propre et sans renoncer à son identité. C'est ce qu'ont réussi les Japonais à la fin du XIXème siècle. Un exemple à méditer à plus d'un titre.  •

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