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Actualité France - Page 390

  • Cinéma • Les Visiteurs 3 ou le vrai visage de la Terreur, vus par Jean-Christophe Buisson

     

    Jean-Christophe Buisson a vu Les Visiteurs 3 - La Révolution. Il estime que Jean-Marie Poiré et Christian Clavier ont pris le parti inédit et courageux de se saisir à bras-le-corps de cette page sombre de l'histoire de France. Sans complexe ni manichéisme [Figarovox - 7.04]. Jean-Christophe Buisson est homme de goût et de jugement. Il n'affiche pas grande inclination pour la période révolutionnaire. Pas plus que nous qui lirons son avis avec attention et ... sympathie.  LFAR 

     

    PHOace7ebf0-cac5-11e3-ae1d-fb39e4002cc5-300x200.jpgDepuis 1870 et l'instauration de la République en France, la Révolution a plutôt bonne presse. Le mot lui-même est synonyme universel de progrès, de nécessité, d'avancée, qu'il concerne un nouveau médicament, la mécanisation des outils agricoles ou les régimes alimentaires. Politiquement, il sonne comme une promesse d'avenir radieux : même le maréchal Pétain, instituant pourtant un régime aux accents résolument contre-révolutionnaires, se sentit obligé de reprendre le terme, invitant la France à se lancer dans une « Révolution nationale ». Et nous ne parlons pas d'Hitler et de sa « révolution nationale-socialiste »… Quant à l'événement lui-même, bien que Lénine, Trotski, Mao, Pol Pot et quelques autres dictateurs sanguinaires s'en fussent réclamés à corps et à cris (surtout ceux de leurs millions de victimes), il n'en garde pas moins, dans les livres d'Histoire comme dans la classe politique ou médiatique dominante, auréolé d'un prestige certain. 1789, c'est neuf, donc c'est bien.

    Bien sûr, une école de pensée contre-révolutionnaire qui va de Louis de Bonald à Charles Maurras s'est attelée, depuis deux siècles, à insister sur ses noirs aspects et ses fâcheuses conséquences. Mais la somme de ses réussites (droit de vote, Droits de l'Homme, abolition de l'esclavage, établissement d'une Constitution, création d'une Assemblée nationale, émancipation des Juifs, liberté de la presse, etc.) est jugée supérieure à celle de ses désagréments (guerre civile en Vendée, guerre contre la moitié de l'Europe, destruction des communautés traditionnelles, confiscation ou destruction des biens du clergé, loi Le Chapelier interdisant les regroupements professionnels et la grève, etc.). Cette vision globalement positive de la Révolution a conduit les cinéastes à la représenter, à de rares exceptions près (le sublime Le Duc et l'Anglaise, d'Eric Rohmer) de manière globalement positive. La Bastille vidée plutôt que les prisons remplies. La joie illuminant le visage des paysans libérés du servage plutôt que la grimace des propriétaires et des prêtres sur le point d'être raccourcis. Des foules qui réclament du pain plutôt que des têtes. La terrine plutôt que la Terreur.

    Dans Les Visiteurs - La Révolution, Jean-Marie Poiré et Christian Clavier, coauteurs du scénario, ont pris le parti inédit et courageux de se saisir à bras-le-corps de cette page sombre de l'histoire de France. Sans manichéisme, sans faux-fuyants, sans complexe. Leur film est un divertissement qui s'appuie sur une tragédie - c'est souvent une excellente recette (voir La grande vadrouille, La Vache et le prisonnier, Monsieur Batignole, etc.). Il débute en janvier 1793 et court jusqu'à la Grande Terreur. On y voit (furtivement mais réellement) des prêtres et des nobles de tous âges emprisonnés, puis conduits à l'échafaud comme des bêtes à l'abattoir. On y voit des hommes et des femmes dont la seule ambition révolutionnaire est de s'emparer du bien des anciens possédants pour en profiter à leur tour, quitte à substituer une inégalité sociale à une autre. On y voit des bourgeois confisquer le processus révolutionnaire pour chiper la place des aristocrates. On y voit un Robespierre glaçant, sinistre, terrifiant (remarquablement interprété par Nicolas Vaude) décider, en compagnie de ses amis du Comité de Salut public réunis autour d'un bon dîner au champagne, qui, demain, méritera la mort (« exterminer les ennemis », disait l'un de ses zélés membres, Couthon, annonçant par là quelques génocides futurs…). On y voit, en face, un preux chevalier du XIIe siècle pétri de valeurs qui ont pour noms courage, honneur, noblesse d'âme (Godefroy Amaury de Malefète, comte de Montmirail, d'Apremont et de Papincourt, dit le Hardi et alias Jean Reno) refuser la fatalité et préférer risquer sa vie que salir son nom en cédant, comme d'autres, à une mode égalitariste et progressiste qui est la négation de son éducation et de son statut de fidèle vassal de Louis VI le Gros. On le voit, à l'annonce de la mort de Louis XVI, se jeter à genoux et réciter le Pater Noster après avoir crié « Le Roi est mort, vive le Roi! ». Pui s'échapper de prison en assommant ses gardes pour gagner Paris afin de libérer Louis XVII de sa prison du Temple et « remettre le Dauphin sur le trône ». Puis s'étonner sincèrement de se retrouver face-à-face à un Noir habillé aux couleurs de la Révolution (« Les Sarrasins sont parmi nous ! »). Et enfin, écrasé par la puissance ennemie, décider de revenir dans son château pour le reprendre, les armes à la main, à ses nouveaux propriétaires car « si tu perds ta terre, tu perds ton âme ».

    Autant de scènes et de formules qui, bien sûr, font hurler les si prévisibles thuriféraires habituels de Robespierre et de la Terreur. Ils trouvent bien entendu ce film « réactionnaire ». Quitte à oublier la somme considérable de saynètes du film ridiculisant (donc dénonçant) aussi les familles d'Ancien Régime engoncés dans leurs rites et leurs mentalités parfois détestables. Mais pour ces gens-là, sur ce sujet-là, il ne saurait être question d'objectivité, de neutralité, d'honnêteté intellectuelle, d'équilibre, de mesure. Leurs slogans n'ont pas changé depuis deux siècles : pas de liberté pour les ennemis de la liberté, la vérité est révolutionnaire, etc. Montrer la Révolution sous son jour sanglant aussi, c'est forcément être suspect d'antirépublicanisme, d'antipatriotisme, de révisionnisme. Même s'il s'agit de cinéma. Même s'il s'agit de la réalité historique. Mais ils n'aiment pas la réalité. Ni celle d'hier ni celle d'aujourd'hui. C'est à cela qu'on les reconnaît. 

    Jean-Christophe Buisson

    Jean-Christophe Buisson est journaliste et écrivain. Il dirige les pages culture et art de vivre du Figaro Magazine. Il est notamment l'auteur d'Assassinés (Perrin, 2013).

  • Des flots ininterrompus

     

    par Jean-Baptiste d’Albaret

     

    A l’heure où nous bouclons ce numéro, les terroristes ont encore frappé. Trois jours après l’arrestation du dernier responsable en vie de la tuerie du 13 novembre à Paris, Salah Abdeslam, l’aéroport et le métro de Bruxelles ont été visés par des attaques meurtrières. C’est-à-dire que les terroristes, en dépit d’une présence policière massive, ont frappé, dans une sorte de riposte, le cœur du quartier européen de la capitale belge. Ainsi est l’ennemi islamiste : tapi au sein des populations, trouvant refuge dans des quartiers où il est protégé, il peut frapper n’importe où, n’importe quand, avec une rapidité d’exécution sans faille. L’idéologie dominante qui, il y a peu encore, osait parler d’« actes isolés », de « loups solitaires », voire même de simples « déséquilibrés », vole en éclat de façon dramatique. La vérité, c’est que le djihadisme, structuré et organisé, possède des réseaux et des relais partout en Europe. Nos élites dirigeantes ont laissé prospérer un communautarisme islamique en se voilant la face pour ne rien voir. Pour ces bonnes âmes, l’islam n’est-il pas la religion des réprouvés ? Leur responsabilité est aujourd’hui écrasante. Du renversement de Kadhafi, au moment même où le monde arabe implosait sous le coup de « printemps » prétendument « démocratiques » mais qui bénéficièrent d’abord aux islamistes de toutes obédiences, à la gestion de la crise syrienne, aboutissant au financement et à l’armement de groupes islamistes radicaux à seule fin de faire tomber Bachar al-Assad, le même humanitarisme manichéen a prévalu pour aboutir à ce désastre. Désastre consommé avec la décision abracadabrante et unilatérale d’Angela Merkel d’inviter tout le monde en Europe, provoquant un exode massif vers le Continent.

    Plus encore que la menace d’un Brexit, la crise migratoire pourrait porter le coup de grâce à une Europe qui ressemble de plus en plus à une citadelle assiégée, hérissée de barbelés. On le lira dans les pages de ce numéro de Politique magazine. Après 1,25 million de migrants en 2015, 250 000 sont déjà arrivés en Europe depuis le début de l’année, dont 150 000 en Grèce selon l’Organisation internationale pour les migrations. L’Allemagne d’Angela Merkel prévoit ainsi d’accueillir jusqu’à 3,6 millions de personnes d’ici à 2020 ! Loin de se tarir, le flot migratoire continue de jaillir sans interruption.

    Ce n’est pas l’accord signé le 18 mars entre Ankara et l’Union européenne qui résoudra le problème tant il paraît d’ores et déjà voué à l’échec. Pays en faillite et à l’état déficient, la Grèce n’a évidemment pas les moyens de fermer la « route de la mer Egée » ni de contrôler efficacement ses frontières. Organiser le renvoi systématique des arrivants vers la Turquie, même avec l’aide de l’Union européenne, est tout simplement pour elle une « tâche herculéenne », comme l’a dit, dans un trait d’humour involontaire, le président de la Commission, Jean-Claude Juncker. Et c’est Erdogan qui se frotte les mains ! Une fois de plus, le régime turc, passé maître dans l’art du double-jeu, roule les Européens dans la farine.   

    Au terme de cet accord – concocté en toute opacité, selon son habitude, par Angela Merkel –, la Turquie empoche 6,6 milliards d’euros, en principe destinés à financer l’accueil des quelques 2,7 millions de réfugiés qu’elle abrite déjà sur son sol. Mais elle repart aussi avec la promesse d’une libéralisation des visas pour ses compatriotes et d’une prochaine réouverture des négociations d’adhésion à l’Union européenne. Pendant ce temps, ses forces armées continuent de massacrer les Kurdes qui sont nos alliés dans la lutte contre l’état islamique. état islamique qui vient de revendiquer les attentats de Bruxelles. Comprenne qui pourra… 

    Rédacteur en chef de Politique magazine

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    Avril 2016 - Editorial

  • « La bien-pensance ou l'aveuglement démocratique » vus par Les Echos

    « Combien d'attentats, combien de tragédies faudra-t-il encore avant que l'on ouvre les yeux ? » C'est la question que pose le philosophe dans le livre « Contre la bienveillance ». - Photo Shutterstock
     

    Les Echos, où règne naturellement l'idéologie libérale, ont publié le 1er avril, signé de son rédacteur-en-chef, Daniel Fortin, l'article inhabituel qu'on va lire. Il traite du dernier ouvrage d'Yves Michaud, Contre la bienveillance, où se trouvent vigoureusement remis en cause quelques uns des dogmes fondateurs de la doxa régnante. Nous ne les énumérons pas : on les retrouvera au fil de l'article. Certes, il ne s'agit pas  d'autre chose que de « revenir aux conditions strictes de l'appartenance républicaine », ou encore au « contrat social des Lumières », mais on verra comment, en matière de diplomatie, de lutte contre l'islamisme, de dénonciation des bons sentiments, y compris droits-de-l'hommistes, le philosophe et son commentateur brisent les tabous et finissent par pointer, à travers nos élites défaillantes, droite et gauche confondues, la perversion de nos démocraties. Daniel Fortin explique ainsi la démarche du philosophe : « A sa manière, il est le produit d'une autre radicalisation en marche. Celle de la sphère intellectuelle française. » De cette évolution de la sphère intellectuelle française, nous traitons, ici, depuis de longs mois. A travers de fort nombreux ouvrages, articles, ou déclarations de toutes sortes. Les lecteurs de L'Avenir de l'intelligence reconnaîtront que se met ainsi en place l'une des conditions essentielles de toute éventuelle renaissance française. Acceptons-en l'augure.  Lafautearousseau.   

     

    h15_logo_echoshome.jpgPour le philosophe Yves Michaud, notre modèle démocratique, pétri d'une vision morale du monde, n'a plus les moyens d'affronter les menaces actuelles. 

     

    Imaginons un instant l'accueil que l'on aurait réservé à ce livre il y a seulement quelques mois. Représentons-nous l'effet qu'auraient produit des phrases comme : « L'islam ne pourra être accepté sans réserve que le jour où il reconnaîtra explicitement et inconditionnellement démocratie, pluralisme, liberté d'expression… » ; ou encore : « Le fait du fondamentalisme nous force à prendre conscience que l'accès automatique, somnolent et passif à la communauté politique ne peut plus avoir cours et doit faire place à un serment civique… » Que n'aurait-on glosé alors sur des propos réactionnaires, stigmatisants, droitiers, indignes de notre démocratie ouverte et tolérante ? Aujourd'hui, rien de tout cela. Yves Michaud, l'auteur de ces phrases, peut désormais cogner à son aise sur notre naïveté « droits-de-l'hommiste », sur notre démocratie des « bons sentiments », sans que ça lui vaille le moindre procès en sorcellerie.

    A sa manière, il est le produit d'une autre radicalisation en marche. Celle de la sphère intellectuelle française face à la répétition de l'innommable sur notre sol ou chez nos proches voisins : « Charlie », Bataclan, Bruxelles, d'autres encore. Combien d'attentats, combien de tragédies faudra-t-il encore avant que l'on ouvre les yeux ? C'est la question que pose le philosophe dans le livre « Contre la bienveillance », à mettre entre les mains de tout candidat à la future élection présidentielle.

    Yves Michaud est l'un des fondateurs de l'Université de tous les savoirs en 1998. Plutôt de gauche tendance chevènementiste, même s'il juge désormais périmés les traditionnels clivages politiques. Sa conviction, dit-il, il l'a forgée bien avant la nouvelle vague terroriste qui a frappé notre pays. Mais celle-ci l'a plus que confortée. Selon Yves Michaud, notre modèle démocratique, imbibé d'une vision morale du monde, pétri de bienveillance, animé par l'émotion, n'a plus les moyens d'affronter les menaces d'aujourd'hui : la montée du fondamentalisme religieux, celle du populisme et le désordre des nations. « Nous avons affaire à une situation fondamentalement nouvelle, en complet basculement, qui rend caduques nos manières anciennes de penser. La crise d'une situation est toujours aussi une crise des concepts pour l'appréhender. »

    Nommer les choses

    Dans son collimateur, un Parti socialiste aseptisé, à court d'idées, bêtement bien-pensant, asséché par ses années de hollandisme sans vision. Pas de pitié non plus pour Bernard-Henri Lévy et Bernard Kouchner, responsables d'une vision trop « humanitaire » d'un monde où seuls les rapports de force doivent fonder les politiques. Requiem, aussi, pour une droite déboussolée par la montée du populisme d'extrême droite, qu'elle tente de trianguler en le suivant sur des terrains aussi spongieux que l' « identité nationale » chère à Nicolas Sarkozy alors à l'Elysée.

    Yves Michaud, lui, a pris le parti de mettre les mots sur les choses, de les nommer, quitte à choquer. Les attentats en France ? Arrêtons de parler de « loups solitaires », écrit-il. « L'islam sunnite, en attendant le moment où il deviendrait tolérant et s'ouvrirait à la critique, est aujourd'hui une religion obscurantiste, intolérante et antidémocratique. » Le populisme ? Le fruit de multiples fractures (jeunes/vieux, français de souche/immigrés, riches/pauvres, personnel à statut/travailleurs précaires, jeunes éduqués/jeunes délaissés) qu'on a laissé prospérer faute de vouloir regarder la réalité telle qu'elle est.

    La conséquence est double : le vote extrême progresse et, surtout, il touche toutes les catégories sociales selon les fractures auxquelles il répond. Ce qui rend d'autant plus datée une réponse « de gauche » ou « de droite » aux problèmes. Le chaos géopolitique ? Il creuse la tombe d'une politique étrangère romantique qui veut, par exemple, que la France soit la seule nation européenne à engager des troupes sur les théâtres militaires étrangers alors que nos voisins se contentent de missions humanitaires.

    A bien des égards, Yves Michaud flirte avec les lignes. A force d'en découdre avec notre aveuglement démocratique, à force de désigner les ennemis de notre société, à force de s'en prendre aux élites, on finit par s'interroger : n'est-il pas lui-même atteint par ce mal populiste dont il dresse le constat ? Et, au fond, où veut-il vraiment en venir ?

    L'auteur, heureusement, ne se contente pas d'un énième pamphlet sur la perversion de nos démocraties. Sa proposition est toute simple : il faut en revenir aux conditions strictes de l'appartenance républicaine, réaffirmer que l'état de citoyen confère des droits mais aussi des devoirs. Bref, ressusciter le contrat social des Lumières, qui n'était nullement un blanc-seing, mais un engagement autour de valeurs communes. Ce livre dérange, car il nous met en face d'une culpabilité que l'on commence seulement à exprimer. Il contient à coup sûr quelques ingrédients sur lesquels pourront être à nouveau réunies les conditions d'un vivre-ensemble, pour parler comme la gauche morale. 

    Daniel Fortin
  • Retour sur André Bercoff et « ma cabane au Panama...»

     

    Par Jean-Louis Faure

    Repris des commentaires [7.04] à propos de l'article d'André Bercoff, publié dans Lafautearousseau, hier, jeudi, 7 avril.

     

    Un peu de technique

    La masse de documents qui a été « pompée » des ordinateurs de Mossack Fonseca signe une opération demandant de très gros moyens informatiques. Si d’origine privée, nécessairement financée, mais plus probablement décidée par les Services d’un Etat, ou peut être les deux en collaboration. Autre signature, l’informatique de Mossack Fonseca est ultra sécurisée, il faut donc des moyens d’attaque très sophistiqués, sachant que la protection chez ces « avocats » a été installée par des entreprises étrangères …

    Un peu de géographie

    Quand on va se promener à Panama, on est dans une colonie américaine. Un côté très émouvant pour des Français : le cimetière en bordure du canal où reposent nos compatriotes qui ont laissé leur vie dans le projet irréalisable de monsieur de Lesseps (construire un canal à niveau des deux océans).

    Un peu de politique

    Quand on traite des affaires à Panama, on découvre très vite que la finance et le courant d’affaires sont entre les mains de la communauté de monsieur Soros …

    Un peu de bon sens

    La maison Mossack Fonseca est très connue de tous les services juridiques et financiers des grandes entreprises de par le monde, il n’y a donc aucun scoop. Contrairement aux vociférations organisées par l’immonde, ils offrent avant tout un service de domiciliation visant à masquer les opérateurs réels dans des négociations où ils ne veulent pas apparaître. La fuite fiscale est assez secondaire.

    Un peu d’histoire

    Rien d’illicite. Avec des adresses aux iles Tortola pour être encore plus étanche. Très utilisé par tous les Services spéciaux du monde, assurant une coupure nette entre un pays commanditaire et un coup tordu. Que faisait le trésorier de la campagne de Hollande, Jean Jacques AUGIER, aux iles Caïmans ?

    Des écrans off-shore furent la technique de voyous utilisée par le Crédit Lyonnais pour flouer Tapie dans la vente d’Adidas (voir un excellent résumé dans Wikipédia : Bernard Tapie charge le Crédit lyonnais de vendre Adidas ; la banque se livre à une expertise minutieuse de l'affaire, et réalise que sa valeur est certainement bien supérieure au prix minimum demandé par Bernard Tapie dans son mandat (plus de deux milliards de francs). L'état-major de la banque conçoit donc un plan : se porter acquéreur d'Adidas, au prix minimum demandé par Bernard Tapie, et revendre la société au prix fort et à son seul profit par la suite, via des sociétés offshore (iles Caïmans) pour préserver l’anonymat des opérations.

    Si l’enquête sur les affaires de Cahuzac n’avait pas été bâclée (le même couple Van Ruymbeke – Jean Veil qui a œuvré contre Kerviel), on aurait trouvé que l’ami Jérôme a corrompu toute l’administration de la Santé au profit des plus grands labos français.

    Nous rejoignons André Bercoff sur la consternante niaiserie au sommet de notre pauvre pays.

    Sur ce sujet comme sur tellement d’autres, la communauté journalistique est absolument au dessous de tout.

  • Syrie : une lettre-témoignage du prince Jean de France

    Messe d'accueil au patriarcat grec-melkite catholique de Damas

     

    Le Prince Jean fait part dans la lettre ci-après de son récent voyage en Syrie où il vient de passer la semaine de Pâques. Le Duc de Vendôme, déjà engagé pour les chrétiens d’Orient, a accepté l’invitation de Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon, initiateur de ce voyage.

     

    david-niviere5.jpgLe chemin de Damas


    « Aidez nous à rester chez nous ». C'est par ces mots que les chrétiens de Syrie accueillent la délégation d'une quarantaine de personnes menée par monseigneur Rey en Syrie et dont je fais partie. Cinq jours de rencontres qui resteront profondément gravés dans mon âme.

    Cette semaine pascale nous mène de Damas à Homs en passant par un certain nombre de villages chrétiens le long de la frontière libanaise. C'est une zone stratégique plutôt stable que l'armée et ses affiliés, dont le Hezbollah, ont reprise au printemps 2014, après trois ans de combats qui ont laissé des traces, même si ici ou là subsistent quelques poches islamistes.

    Commencer par Damas où Saint Paul a été baptisé n'est pas anodin, la Syrie est le berceau des communautés chrétiennes. C'est le patriarche grec-melkite catholique Grégoire III Laham, un homme de 84 ans, mais portant la joie et la determination sur son visage, dans ses gestes et ses paroles, que nous rencontrons le premier jour. Tous les évêques et les prètres avec lesquels nous parlons ensuite sont taillés dans le même roc joyeux, pasteurs de leurs brebis dans les difficultés et les moments d'espérance.

    Yabrud, Qusayr, Rableh, Maaloula, Sednaya, des villages chrétiens - araméens, grecs, arméniens, syriaques, ... - catholiques ou orthodoxes, tous détruits, où les familles ont onnu le martyre. C'est le cas d'Antoine, à Maaloula, exécuté pour sa foi sur le perron de sa maison, devant sa femme Antoinette. Je lui ai promis que notre petite Antoinette prierait pour elle et sa famille. Elle a commencé hier.

    « Aidez nous à rester chez nous, pour repartir à nouveau, reconstruire nos lieux de vie. dans un pays stabilisé ». Après trois ans de guerre, depuis le printemps 2014, les familles se réinstallent. C'est d'abord le prêtre ou l'évêque qui revient et ensuite autour de lui les familles chrétiennes et les quelques familles musulmanes qui ont vécu en paix avec les chrétiens. Les églises sont reconstruites, les maisons et les écoles aussi. Que des beaux visages joyeux, pleins de vie et d'espérance, celle du Christ ressuscité.

    Si je peux terminer ainsi ce court témoignage, je souhaite remercier monseigneur Rey pour son invitation, SOS Chrétiens d'Orient pour l'organisation de ces rencontres et les personnes de la délégation pour les échanges que nous avons eus, en particulier toute cette jeunesse engagée, qui m'ont permis de vivre intensément cette semaine pascale auprès de nos frères syriens. 

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    Domaine Royal de Dreux, le 4 avril 2016

     

    Photos reprises du site Prince Jean de France

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    Le patriarche Grégoire III Laham et Monseigneur Rey

     

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    Village détruit de Qusayr

     

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    Maaloula, village où Antoine est mort pour sa foi chrétienne

     

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    Chantier de reconstruction de la cathédrale Notre Dame de la Paix à Homs

     

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    Une famille chrétienne qui s'est réinstallée à Qusayr

     

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    Le Duc de Vendôme dans une rue désertée de Homs

     

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    Vue de la Vallée des Chrétiens au pieds du Krak des Chevaliers

     

    PRINCE JEAN DE FRANCE

  • Syrie : Un voyage spirituel hautement symbolique conduit par Mgr Rey ... Le prince Jean dans les pas de Saint-Louis

    « Divine liturgie » à Damas © Charlotte d'Ornellas

    par Annie Laurent  

    Pour Lafautearousseau, Annie Laurent a bien voulu rédiger ses impressions de voyage. Un voyage, on va le voir, « en tous points exceptionnel », selon l'expression de notre confrère Péroncel-Hugoz. Et d'une indéniable portée symbolique s'agissant de l'amitié franco-syrienne, soulignée par la participation du prince Jean de France. Un grand merci à Annie Laurent !  LFAR 

     

    2444184188.jpgLe 28 mars dernier, lundi de Pâques, le prince Jean s’est envolé pour la Syrie en compagnie d’un groupe conduit par Mgr Dominique Rey, l’évêque de Fréjus-Toulon, qui avait d’ailleurs célébré son mariage en 2009. Ce court voyage, auquel Jean-Baptiste d’Albaret, rédacteur en chef de Politique Magazine, a également participé, et que j’ai eu le privilège d’accompagner, s’est achevé dans la nuit du 2 au 3 avril. L’organisation logistique avait été confiée à la jeune association SOS Chrétiens d’Orient, fondée en 2013 et très active sur le terrain. Grâce à elle, nous avons obtenu des autorités toutes les facilités pour circuler sans problèmes, étant entendu que nous sommes restés dans des régions dont l’armée a repris le contrôle, ce qui n’est pas le cas, par exemple, de certaines banlieues de Damas.

    Ce voyage avait un but précis : il s’inscrivait dans le cadre du jumelage conclu entre le diocèse varois et l’éparchie grecque-catholique de Homs, dont le titulaire est Mgr Abdo Arbach. Il s’agissait donc d’un pèlerinage et c’est pourquoi il ne comportait aucune rencontre avec des dirigeants politiques syriens. Notre groupe, composé de 45 personnes, parmi lesquelles un bon nombre de jeunes professionnels et étudiants, s’est rendu sur les pas de saint Paul à Damas ainsi qu’en divers sanctuaires de Homs et de sa région. Le séjour fut aussi, bien entendu, ponctué de rencontres avec plusieurs ecclésiastiques et des fidèles chrétiens appartenant à diverses Eglises orientales mais également à l’Eglise latine.

    A Damas, après une visite très recueillie à la maison d’Ananie, l’évêque qui eut l’honneur de baptiser Saul, le futur « apôtre des nations », la délégation a été accueillie par Sa Béatitude Grégoire III Laham, patriarche d’Antioche et de tout l’Orient des grecs-melkites-catholiques, de Jérusalem et d’Alexandrie, dont le siège se trouve dans la capitale syrienne. Invité à s’exprimer, le prince Jean s’est présenté en évoquant son lointain ancêtre Saint Louis ainsi que l’attention particulière que ce dernier portait aux chrétiens d’Orient et en se situant lui-même dans cette noble tradition de protection dont la France actuelle se doit d’être la digne héritière. Dans la soirée, après une messe célébrée en rite byzantin dans l’église patriarcale, Grégoire III a invité toute la délégation à un dîner officiel auquel il avait aussi convié le nonce apostolique en Syrie, Mgr Mario Zenari, et des évêques de divers rites, tous déjà présents lors de la « divine liturgie ». L’ambiance, très festive, ponctuée de chants français entonnés joyeusement par les prélats, suffisait à montrer la reconnaissance de nos hôtes syriens, touchés par notre visite alors que Paris a rompu toutes relations avec ce malheureux pays. Durant tout notre séjour, nous n’avons d’ailleurs croisé aucun autre Français.

    Dans la capitale toujours, sous la conduite de l’archevêque maronite, Mgr Samir Nassar, qui nous a fait visiter sa modeste cathédrale, nous avons aussi pu prier devant la tombe des trois bienheureux frères Massabki, martyrisés avec un groupe de franciscains lors des massacres de masse commis en 1860 contre les chrétiens du Mont-Liban et de Damas, ce qui avait préludé à l’expédition de troupes françaises à l’initiative de l’empereur Napoléon III.

    1459494701-887ba8a80b67b1aaeefec541655445ad.jpgLa deuxième partie du séjour s’est déroulée à Homs, ville terriblement sinistrée, où nous avons pu déambuler à pieds sur plusieurs centaines de mètres, sous la protection bienveillante des soldats syriens, très souriants comme tous ceux que nous rencontrions. Les deux cathédrales que nous avons visitées, la grecque-catholique et la syriaque-catholique, sont dans un état pitoyable : coupoles et toitures perforés par les obus, iconostase et autels brûlés, icônes aux yeux perforés par les balles des djihadistes. SOS Chrétiens d’Orient participe à la reconstruction de la première. Partout alentour, ce n’est qu’amoncellement d’immeubles détruits. Nous avons aussi prié sur la tombe du Père Frans van der Lugt, jésuite hollandais, qui avait tenu à demeurer sur place malgré les dangers, pour secourir les chrétiens qui n’avaient pas pu quitter la ville. Assassiné le 7 avril 2014, il est enterré dans le jardin de son couvent. Comme Homs, les deux autres villes de la région que nous avons visitées, Qussaïr et Yabroud, ont été pendant des mois le théâtre d’affrontements entre les djihadistes de diverses obédiences, y compris Daech, et l’armée nationale qui a finalement pu reprendre possession des lieux (en mai 2014 pour Homs), avec parfois l’appui du Hezbollah libanais. De notre autocar, nous pouvions alors contempler les sommets enneigés du pays du Cèdre.

    Les dernières étapes nous ont conduits dans la « Vallée des chrétiens », également très proche du Liban, avec notamment une visite captivante du célèbre Krak des Chevaliers édifié au XIIIème siècle sur un sommet stratégique. Une brigade de Daech a aussi séjourné dans ses murs avant d’en être délogée. Les dégâts ne sont heureusement pas irrémédiables et la restauration de l’imposant édifice est sur le point de commencer. Puis, nous sommes allés à Maaloula, l’un des trois villages syriens où les habitants parlent l’araméen, la langue du Christ. Cet endroit a beaucoup souffert. En 2013, lors de l’attaque des djihadistes, trois jeunes gens ont été abattus devant chez eux après avoir refusé de se faire musulmans et six autres ont été enlevés. On est sans nouvelles d’eux. La localité compte deux monastères, l’un dédié à sainte Thècle, cette disciple de saint Paul, venue d’Asie mineure, qui échoua ici sous une protection divine qui la fit échapper à la persécution. Les moniales qui y vivaient et qui ont pu quitter les lieux ne peuvent pour l’heure envisager d’y revenir car le bâtiment a été entièrement détruit par les rebelles. L’autre monastère, dédié aux saints Serge et Bacchus, est quant à lui beaucoup moins endommagé, mais il est encore vide de toute présence de religieux. Depuis la libération de Maaloula, la sécurité est en partie assurée par une brigade locale, affiliée à une « garde nationale » qui reçoit ses armes et ses munitions du gouvernement, ses membres conjuguant la surveillance avec leurs activités professionnelles.

    Enfin, nous sommes allés au sanctuaire grec-orthodoxe de Sednaya, situé à une heure de route au nord de Damas. 36 moniales résident en ce lieu qui abrite une célèbre icône représentant la Vierge Marie, dont la réalisation est attribuée à saint Luc. L’icône ne sort jamais de sa niche toujours fermée où elle est soigneusement gardée. Lors de notre passage, il y avait une foule de pèlerins, l’église était pleine de fidèles en prière.

    Partout, nos interlocuteurs ont montré une force d’âme, un courage et une vitalité vraiment étonnants et sans doute inattendus pour beaucoup d’entre nous. Comment oublier, par exemple, cette classe de l’école patriarcale grecque-catholique de Damas où les jeunes élèves, tous en uniforme, ont interprété pour nous des chants en français ayant pour thème le désir de paix ? Après ce voyage, on se dit que la France a vraiment trahi son histoire et ses responsabilités et que l’un des moyens de racheter cette faute majeure est de se rendre dans ce beau pays de Syrie, berceau du christianisme comme ont tenu à nous le rappeler tous nos interlocuteurs. 

     

  • Toujours plus de pauvres en France !

     Affiche Action française Provence 

    par Anthony Alberti

    Le site L'Or et l'Argent a publié l'étude suivante, intéressante à lire. « Tout ça pour ça ? » avons-nous souvent répété depuis la création de ce site. La situation ici décrite n'est en effet à l'honneur ni de la République, ni de ses supposées valeurs, ni du capitalisme moderne. « Liberté, égalité, fraternité » avez-vous dit ? Ce n'étaient que des mots, des slogans et, aujourd'hui, de la moraline. D'où le désenchantement du politique, le mépris dans lequel les Français tiennent très majoritairement le Système. Et Changer de paradigme deviendra au bout du compte un besoin impératif.  En attendant, la nouvelle génération d'Action française nous paraît avoir raison de penser aux pauvres de France [illustration en titre]. « Aidons la nation, pas l'immigration » : ainsi se reforment - au moins - les solidarités naturelles. C'est à dire historiques. LFAR

     

    Header1.jpgEn dépit de l’optimisme (discret) des pouvoirs publics relayés par l’Insee, et après des décennies de baisse régulière, le nombre de pauvres en France ne cesse de progresser depuis une dizaine d’années. Ainsi, la France compte désormais 8,6 millions de pauvres, principalement sous l’effet de la progression du chômage, dont 2 millions vivent avec moins de 667 euros par mois. Cependant, les demandeurs d’emploi ne sont pas les seuls concernés, loin de là, et de plus en plus de personnes vivent sous le seuil de pauvreté en étant pourtant salariés, retraités… voire chefs d’entreprise !

    Comment mesure-t-on la pauvreté ?

    D’après l’Insee, un individu (ou un ménage) est considéré comme pauvre lorsque ses revenus sont inférieur au seuil de pauvreté. Dans l’Union Européenne, on estime que ce seuil correspond à 60% du salaire médian (salaire théorique tel que 50% de la population gagne moins et 50% gagne plus). En France, il est donc d’environ 1000 euros par mois et par personne.

    En 2005, les Français dont les revenus se situaient en-dessous du seuil de pauvreté représentaient 12% de la population. Depuis, ce pourcentage n’a cessé d’augmenter pour atteindre 14.3% en 2014. Et aujourd’hui, la pauvreté touche un grand nombre de catégories sociales, avec ou sans emploi.

    Les exclus du monde du travail

    Avec plus de 14 mois d’indemnisation en moyenne (418 jours) selon les derniers chiffres Insee publiés au début de l’année, les chômeurs de longue durée formeront bientôt la majorité des demandeurs d’emploi (ils sont aujourd’hui près de 45%). Or on le sait, au-delà d’une certaine durée de chômage, l’employabilité des individus diminue et, bien souvent, les demandeurs d’emploi qui ne trouvent pas de travail au bout de quelques mois multiplie leurs risques d’épuiser tous leurs droits à indemnisation avant de sortir du système classique. Pour la plupart d’entre eux, ils deviennent alors éligibles au revenu de solidarité active (RSA) qui correspond à un peu moins de 500 euros par mois pour une personne seule. Aujourd’hui, la France compte 2 millions de bénéficiaires du RSA.

    Davantage de retraités pauvres

    En 2015, le nombre de retraités pauvres a franchi le seuil du million de personnes, en progression de près de 4% par rapport à l’année précédente. Elle semble loin l’époque où les seniors étaient la génération dorée, cible de tous les marketeurs, car aujourd’hui de plus en plus de retraités perçoivent les minimas sociaux. Quant aux autres, le système de retraite par répartition ayant atteint ses limites, les pensions ont de plus en plus souvent tendance à être gelées tout en se voyant désormais ponctionnées de prélèvements sociaux qui les épargnaient jusqu’alors.

    Un nombre croissant de travailleurs pauvres

    L’Observatoire des inégalités est formel : avoir un emploi ne protège plus de la pauvreté et les travailleurs dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté sont plus nombreux chaque année. En 2015, près de 2 millions de personnes exerçant un emploi disposaient ainsi d’un revenu net inférieur au seuil de pauvreté.

    Même les entrepreneurs peuvent être pauvres

    Dans l’inconscient collectif, un chef d’entreprise ne peut pas être pauvre. Et pourtant, sur les 3 millions de TPE et de microentreprises comptabilisées par l’Insee, une majorité est constituée d’entreprises dont l’effectif se limite au seul responsable et un grand nombre d’entre eux ne parviennent pas à vivre de leur activité. Ainsi, sur 1 million d’auto-entrepreneurs, plus de 80% gagnent entre 0 et 1000 euros par mois. Certes, beaucoup exercent à titre secondaire tout en ayant un emploi principal par ailleurs, mais pour tous ceux qui travaillent à temps plein dans leur micro-entreprise, les fins de mois sont particulièrement difficiles. Quant aux autres TPE (EURL, SASU, professions libérales…) plus de la moitié n’ont pas la possibilité de financer l’équivalent d’un salaire à temps plein à leur responsable, même au SMIC, et 20% des travailleurs indépendants sont désormais sous le seuil de pauvreté. Voire n’ont pas de revenu du tout.

    Au début du mois de mars 2016, l’Insee annonçait que la pauvreté avait légèrement reculé en France, passant de 14.3 à 14% de la population. Néanmoins, il reste toujours 3,8 millions de mal-logés et 3,9 millions de bénéficiaires de l’aide alimentaire...

    Anthony Alberti

  • Julliard : « Le vivre-ensemble est une blague, une blague sanglante »

     

    Jacques Julliard médite ici brillamment sur la violence des sociétés multiculturelles [Le Figaro 4.04, extrait]. Le diagnostic qu'il pose, avec force, lucidité et réalisme n'est guère contestable. Ce n'est pas que « la juxtaposition sur un même territoire de communautés différentes » doit toujours être redoutée, toujours être créatrice de violences, c'est que l'on se trouve en un tel cas lorsque les communautés en présence se rattachent à des civilisations, des mondes trop différents, trop radicalement antagonistes même, pour ne pas créer une explosion en forme de tragédies plutôt qu'une harmonie. Et tel est en effet le résultat d'un multiculturalisme où le présence de l'Islam est massive et a, parmi nous, ses défenseurs conscients ou non. Accord donc, avec Julliard, sur ce premier point. Sa conclusion, en revanche, est déroutante. Est-ce vraiment d'universalisme - fût-il chrétien - dont la France d'aujourd'hui a besoin ? A fortiori s'il s'agit de l'universalisme des Lumières ou de la Révolution française qui a ensanglanté le monde. D'universalisme - il est vrai de basse inspiration - la France nous paraît gorgée, saturée, profondément anémiée. Claude Lévy Strauss nous conseillerait plutôt de cultiver notre identité et Jean-François Mattei, avec Platon, de retrouver le chemin qui conduit chez nous. Telle nous paraît être l'urgence.  Lafautearousseau 

      

    Le communautarisme est une immense faillite

    Les attentats de Bruxelles ont-ils sonné le glas du communautarisme? Ce serait trop beau. Certes, la preuve par Molenbeek et Schaerbeek a été apportée qu'à laisser se constituer des ghettos ethniques au cœur des cités, on joue notre liberté et notre sécurité à la roulette russe, ou plutôt islamiste. Mais la culture de l'excuse a encore de beaux jours devant elle. Quand on ne trouve à l'action des terroristes que des mobiles légitimes, tels que la frustration, le refus de la discrimination et des fractures sociales, le désir de «socialisation» (sic), sans parler du « contexte international », on n'est pas très loin de leur donner raison (ainsi Corinne Torrekens, directrice de DiverCity, un groupe de conseil en sciences sociales et politiques lié à l'Université libre de Bruxelles, Libération, 24-03-2016). Il faudra encore beaucoup de crimes et de souffrances pour que l'on admette que le « vivre ensemble », cette expression inepte, indécente, derrière laquelle on camoufle l'apartheid des cultures, n'est qu'une blague, une blague sanglante.Nos sociétés sont multiculturelles et sont vouées à le devenir un peu plus chaque jour. La rapidité, le bon marché des transports, les énormes écarts de prospérité entre les nations font que les pays riches d'Europe et d'Amérique sont en train de devenir des mosaïques ethniques, tandis que les pays pauvres conservent pour l'essentiel leur identité. Pour les pays d'accueil, le communautarisme est une solution de facilité et une marque de candeur extrême. Pour permettre au migrant de « conserver ses racines », on somme le pays d'accueil de renoncer aux siennes, ce que les populations locales n'acceptent pas ; elles ont l'impression d'être déracinées sur leur propre sol.
     
    Ajoutez à cela un phénomène nouveau, qui est la marque propre de l'islamisme, et qui contraste avec l'immigration du passé : la détestation du pays hôte. Le résultat, c'est ce cocktail détonant qui est en train de gagner toute l'Europe et que l'on appelle sommairement le populisme. Le communautarisme, c'est-à-dire la juxtaposition sur un même territoire de communautés différentes par l'origine géographique, la langue, la religion, l'histoire, la culture, la philosophie, est une immense faillite. L'Europe, si le phénomène devait persister, ne lui survivrait pas. L'Allemagne, les Pays-Bas, les pays scandinaves l'ont reconnu depuis peu. La Belgique, le Royaume-Uni ne tarderont pas à le faire. Nos nations multiculturelles sont donc devant une alternative brutale, sans échappatoire: intégration ou guerre civile. Seule la version universelle de l'humanisme, héritée de la chrétienté, des Lumières et de la Révolution française, nous permettra d'échapper à ce désastre. 
     
     
    [LE CARNET DE JACQUES JULLIARD]           
  • François le mal-aimé

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

    Dans un an, en principe, nouvelle élection présidentielle. On ne sait s’il faut se réjouir ou se lamenter au vu des piteux résultats obtenus par M. Hollande à ce jour et au peu de crédit que l’on peut raisonnablement accorder à ses concurrents. La responsabilité de M. Hollande reste entière d’avoir tout donc trop promis : on se rappelle la fameuse anaphore (« c’est maintenant ») de son discours du Bourget le 22 janvier 2012. En promettant le paradis socialiste hic et nunc, il s’inscrivait comme il se doit dans la pure tradition de la démocratie élective par nature démagogique. Rien d’étonnant donc si son quinquennat est, pour l’essentiel, une succession d’échecs - d’une diplomatie guidée par une imbécile hostilité à M. Poutine à une incapacité évidente à inverser la courbe du chômage. Même sa tentative de récupération politicienne des attentats de 2015 a vite fait long feu et, la semaine dernière encore, on a eu droit à sa renonciation à la déchéance de nationalité tandis que la rue manifestait son hostilité au projet de loi de Mme El Khomri.  

    Reconnaissons deux exceptions, mais de taille et d’une certaine façon exemplaires - pour des raisons opposées. La première concerne l’intervention française au Mali : M. Hollande, transfiguré par son aura de chef des Armées, fit un temps illusion et consensus; mais, s’il put adopter une telle attitude, cela tient à des institutions qui lui confèrent un pouvoir quasi monarchique en matière de Défense nationale. La seconde concerne la loi sur le « mariage pour tous » : elle restera son « grand oeuvre », imprégnée qu’elle est de toutes les dérives idéologiques et sociétales de l’intelligentsia gaucharde. 

    En 2012, M. Hollande a donné à tous une leçon d’opportunisme : le petit Premier secrétaire du P.S. est venu à bout du président sortant en sachant profiter au mieux d’un certain rejet vis-à-vis de M. Sarkozy. Mais, remporter une élection est une chose, être chef de l’Etat en est une autre. Dans cette fonction, M. Hollande aura déçu jusqu’à ses plus chauds partisans : le dernier sondage Odoxa fait ainsi état d’une cote de popularité au plus bas en France (moins de 20%). Son problème est au fond d’être ce qu’il est : un chef de parti d’abord soucieux de l’échéance de 2017 et, pis sans doute, un chef d’Etat sans charisme, manifestement incapable d’être au niveau de sa fonction.  

    Il est vrai qu’avant lui M. Sarkozy n’a pas davantage réussi. Mais, au fond, le pouvaient-ils, politiquement parlant, l’un et l’autre ? La Ve République, taillée sur mesure pour un De Gaulle, est affaiblie de fait par le quinquennat et en proie à la résurgence de velléités parlementaristes (certains rêvent même d’une VIe République qu’ils parent de toutes les vertus « démocratiques »). Dans le même temps, l’Etat voit ses fonctions régaliennes plus ou moins remises en cause par les concessions faites à l’européisme (dont la conséquence ultime sera de le réduire à un état croupion). Si rien n’interdit, bien sûr, d’espérer en l’homme (la femme) providentiel(le), il est évident que la solution politique, c’est-à-dire s’inscrivant dans la durée, reste d’ordre institutionnel. 

     

  • Histoire & Actualité • Hommage républicain à la Résistance royaliste : Inauguration de la place Mireille-et-Jacques-Renouvin

     

    par Daoud Boughezala
    rédacteur en chef de Causeur

    S'il est plusieurs façons possibles d'être et agir en royaliste - pourvu de ne pas nuire à l'objectif poursuivi - cet article en est un exemple. Intéressant, honnête et bien écrit, comme d'ordinaire les articles de Daoud Boughezala. LFAR

     

    boughezala.jpgIls étaient venus, ils étaient tous là à Saint-Germain-des-Prés ce samedi 26 mars pour honorer un couple de grands résistants en inaugurant la place Mireille-et-Jacques-Renouvin : le maire de Paris Anne Hidalgo, le député frondeur Pascal Cherki, l’adjointe communiste Catherine Vieu-Charier et le maire LR du 6e arrondissement Jean-Pierre Lecoq. Quelque 250 quidams, parmi lesquels des militants d’Action française, des membres de la Nouvelle Action royaliste fondée par Bertrand Renouvin, mais aussi Gabriel Matzneff et Lorànt Deutsch côté people, vibraient au son du Chant des partisans.

    Jean-Pierre Lecoq a longuement rendu hommage au camelot du roi et compagnon de la Libération Jacques Renouvin qui avait participé « à tous les chahuts et bagarres décidés par Léon Daudet et Charles Maurras » dans sa jeunesse avant de se retourner contre ses anciens maîtres, à la signature des accords de Munich en novembre 1938. Le futur héros de guerre gifla publiquement le président du Conseil, Pierre-Antoine Flandin, après que celui-ci avait envoyé un télégramme de félicitations à Hitler.

    Non sans courage, Anne Hidalgo a reconnu la filiation « patriote » et « monarchiste » d’une branche de la Résistance qui s’était élevée contre « la démission de Charles Maurras face à la menace allemande ». Engagé volontaire la guerre venue, prisonnier des Allemands puis résistant FFI après l’armistice, Jacques Renouvin rencontra une dénommée Mireille Tronchon lors d’un sabotage antipétainiste. Particulièrement inspiré, le maire de Paris est longuement revenu sur cet amour né au cœur de la Résistance, entre une jeune démocrate-chrétienne et un « fervent catholique » monarchiste qui multiplièrent les opérations punitives anticollabos. Arrêtés en Corrèze par la Gestapo un jour de janvier 1943, ils se marièrent en prison avant de se séparer, Jacques mourant d’épuisement dans le camp de Mauthausen tandis que Mireille allait donner naissance à leur fils Bertrand, figure du royalisme de gauche.

     

    On connaît le mot de Clemenceau, « la Révolution française est un bloc » ; on peut en dire autant de la Résistance. Si on avait épuré sa mémoire des admirateurs de Staline, des royalistes germanophobes et autres nationalistes tenant d’une France éternelle, l’armée des ombres serait réduite à peau de chagrin. C’est pourquoi le Front républicain, le vrai, devrait s’étendre jusqu’aux royalistes !   

    Daoud Boughezala

  • Livres & Société • La misère du néoféminisme contemporain : Le livre d’Eugénie Bastié va faire hurler les féministes

     

    Eugénie Bastié publie Adieu Mademoiselle, qui sera en librairies le 8 avril et va faire hurler les féministes. Journaliste au Figaro et rédactrice en chef politique de Limite, la « revue d’écologie intégrale », elle avait accédé à la notoriété en crevant l’écran, en septembre dernier, sur le plateau de Ce soir (ou jamais !), lançant à Jacques Attali : « Le vieux monde est de retour Monsieur Attali ! ». Nous avons déjà dit notre sympathie de fond pour la réflexion que mène Eugénie Bastié. Une réflexion qui nous paraît marquée par cette pensée selon la Tradition qui est aussi la nôtre. On lira cette recension de Novopress - et naturellement le livre qu'elle évoque - avec beaucoup d'intérêt.  LFAR  

     

    CeUqV-uWQAAchwF.jpgAvec ce premier livre, qui a justement failli s’appeler La Défaite des femmes, la jeune et talentueuse journaliste s’en prend à la « misère du néoféminisme contemporain » et accuse « l’idéologie postmoderne » de travailler « à la défaite des femmes ». La thèse : alors que l’égalité des droits est actée, que le contrôle de la fécondité est acquis, que la parité a été rendue obligatoire, « les nouvelles ayatollettes entendent poursuivre sans fin le combat, et lutter sans relâche pour un monde déjà advenu. Quitte, pour exister, à promouvoir les pires cauchemars d’Orwell ».

    Selon Eugénie Bastié, les véritables menaces qui pèsent sur les femmes et, plus largement, sur l’humanité tout entière, sont à rechercher du côté des laboratoires de la Silicon Valley, dans le « tapage des Femen », dans le « déni de Cologne », dans les colloques « queer et trans », bref, dans ce mélange de postmodernité politiquement correcte et d’idéologie « transhumaniste » contre lequel s’étaient déjà dressés Eric Letty et Guillaume de Prémare dans leur ouvrage Résistance au meilleur des mondes.

    Cours toujours, Attali, le « vieux monde » retrouve de la vigueur et tu ne le rattraperas plus !   

    NOVOpress 28.03

  • Livres • Le secret de Pierre Boutang : retour sur l'ouvrage de Stéphane Giocanti

     

    Pierre Boutang a été et reste l'un de nos maîtres, comme on eût dit plus volontiers en d'autres temps. Mais un maître au sens de George Steiner, un maître duquel on apprend, mais avec qui l'on dialogue, dans une relation vivante, où parfois s'affirment divergences ou développements. Et à la différence des Maurras, Daudet, Bainville, nombre d'entre nous ont approché, connu, écouté, interrogé un Pierre Boutang de chair et d'os, qualités et défauts confondus. L'excellente recension qui suit du dernier ouvrage de Stéphane Giocanti nous le fait redécouvrir tel qu'en lui-même. Nous la devons à Philitt, un site de réflexion philosophique et culturelle qu'il faut, selon nous, connaître et faire connaître. LFAR   

    Après une biographie consacrée à Charles Maurras (Flammarion, 2006), Stéphane Giocanti s’attaque à l’un des plus talentueux disciples du maître de l’Action française : Pierre Boutang (Flammarion, 2016). Ce livre nous permet de découvrir un personnage complexe et souvent sous-estimé, de l’étudiant facétieux au philosophe virtuose en passant par le talentueux polémiste.

    Une des choses qui ravit lorsqu’on évoque le nom de Pierre Boutang, c’est qu’on sait d’emblée – à la différence des intellectuels d’aujourd’hui – qu’on peut le nommer écrivain ou philosophe. Car Boutang, bien qu’il ne soit pas si loin de nous – il meurt le 27 juin 1998 – était incontestablement les deux. Il avait à la fois l’âme d’un poète et celle d’un métaphysicien. Dans sa biographie consacrée à l’auteur d’Ontologie du secret, Stéphane Giocanti dresse le portrait d’un homme dont la complexité déroutera plus d’un lecteur, trop habitué que nous sommes au monolithisme de nos contemporains. D’abord normalien et militant de l’Action française, maréchaliste puis giraudiste pendant la Seconde Guerre mondiale, soutien de De Gaulle dans l’espoir de voir le comte de Paris succéder à ce dernier, disciple de Maurras renonçant petit à petit à son antisémitisme pour finir fervent défenseur d’Israël… Boutang est insaisissable bien que toujours mû par l’idéal monarchique et par son catholicisme.

    Jeune, Boutang se distingue par sa beauté, par sa force physique et par sa verve. Ce Rimbaud aux mains de paysan est aussi espiègle que charmeur. Il envoûte ses professeurs autant que ses camarades. Giocanti nous dépeint avec talent cette période de la vie du philosophe. On ressent nettement la tension inhérente chez Boutang entre sa curiosité intellectuelle inépuisable et son tempérament dionysiaque – qui va de ses nombreuses conquêtes à son besoin de faire le coup de poing. Ainsi, il manque d’être exclu de l’école Normale pour avoir réservé un accueil très spécial à Jean Zay qui venait donner une conférence en Sorbonne « Pour répondre à cette personnalité politique, qui en 1924 a comparé le drapeau français à un « torchecul » dans un poème antimilitariste, l’étudiant répand de haut en bas des murs de l’École quantité de papier hygiénique », raconte Giocanti. Mais dans le même temps, Boutang est un élève brillant, lecteur compulsif qui impressionne ses professeurs que sont, entre autres, Vladimir Jankélévitch, Gabriel Marcel et Jean Wahl. « […] il recopie ou commente Nietzsche, Kierkegaard, Hegel, Platon, Pascal, Bergson, rédige toute une dissertation sur le langage, commente l’article que Jean Wahl vient de consacrer à Karl Jaspers dans la Revue de métaphysique et de morale », souligne le biographe.

    La vie d’étudiant fut également pour Boutang l’occasion de rencontres décisives : Philippe Ariès, Raoul Girardet – tous deux futurs historiens de renom – Maurice Clavel, qui sera un écrivain et journaliste célèbre, puis celle qui deviendra sa femme, Marie-Claire Canque. Giocanti tient à montrer que, si Boutang est très fidèle en amitié, il l’est moins en amour. Le couple était déjà un petit miracle en soi : lui militant Action française, elle imprégnée d’un humanisme de gauche. Mais Boutang ne peut s’empêcher d’user de son charme sur les femmes. Il multipliera les conquêtes, les trahisons qui seront, en partie, à l’origine d’un de ses ouvrages les plus importants Le Purgatoire, son chemin de croix philosophique. « De son mariage, Boutang dira rétrospectivement qu’il a été heureux autant qu’il était possible », note Giocanti qui veut témoigner de ce pessimisme amoureux propre à Boutang.

    Maurras et Boutang_Giocanti.jpg

      Stéphane Giocanti                 Boutang parlant à Maurras

     

    S’il faut trouver un défaut au travail remarquable de Giocanti, il concerne le récit de la Seconde Guerre mondiale. L’auteur perd Boutang de vue pour parler en détail de la rivalité entre le général de Gaulle et le général Giraud. Si cette contextualisation a un sens puisque le « maréchaliste » Boutang a choisi le camp de Giraud pendant la guerre avant de célébrer De Gaulle dans les années 60, Giocanti s’éloigne un peu trop de son entreprise biographique pour aller sur le terrain de l’analyse historique. Pendant un chapitre entier, Boutang est un peu délaissé et on ne le retrouve véritablement que quand l’auteur se décide à aborder l’après 1945. On retiendra néanmoins la position complexe de Boutang dans ce conflit. Boutang reste fidèle à Maurras et soutient le maréchal Pétain. Pourtant, il ne se sent pas du tout proche de l’administration de Vichy et abhorre l’esprit de collaboration. Boutang se mobilisera pour faire sortir du camp de Drancy son ancien professeur Jean Wahl qui lui en sera reconnaissant toute sa vie. L’historien Simon Epstein dira de l’auteur d’Ontologie du secret qu’il fut « résistant à sa manière ». En lisant Giocanti, on comprend d’ailleurs que ce n’est pas le « maréchalisme » de Boutang qui lui a posé problème après la guerre mais bien plutôt son giraudisme. Sans doute aurait-il été ministre, comme Malraux, s’il avait rejoint Londres en 1940, dira de lui un ami.

    L’avènement d’un philosophe

    Boutang a 29 ans quand la guerre se termine. Philosophe royaliste et catholique, il doit ferrailler avec les existentialistes, les structuralistes et les marxistes qui dominent la scène intellectuelle française. Il mènera son combat depuis deux revues qu’il dirigera successivement, Aspects de la France puis La Nation française. Avec ce deuxième titre, Boutang veut donner un nouveau souffle à la pensée monarchique affaiblie depuis la mort de Maurras en 1952. « Le projet est de dépasser ce qui a été tenté à Aspects de la France et de tracer une voie intellectuelle et politique nouvelle. Il s’agit de créer un laboratoire d’idées et un espace de débat, de relever le royalisme politique et doctrinal », précise Giocanti avant d’ajouter que Boutang entendait résumer la ligne éditoriale du journal par une boutade : « Ne pas être trop bête. » Longtemps, cette carrière de polémiste va retarder le destin philosophique de Boutang qui éprouve beaucoup de difficultés à se retirer du monde. Il faudra attendre 1973 – il a alors 57 ans – pour que soit publiée sa thèse Ontologie du secret dans laquelle il a mis toutes ses forces. Ferdinand Alquié salue une « prouesse » tandis que Gabriel Marcel, son vieux maître, évoque un « monument ». De son côté, George Steiner parle d’un « rendez-vous décisif ». « Avec Ontologie du secret, Pierre Boutang s’impose comme un penseur à la fois considérable et singulier. Ce traité, qui est aussi le journal de bord d’une pensée qui se construit, aborde les fondements mêmes de l’ontologie et de la métaphysique, en examinant les articulations entre l’être et le secret », explique Giocanti.

    Dès lors, ce Boutang consacré peut envisager de rejoindre la Sorbonne. Il est élu professeur de métaphysique le 12 mars 1976. Mais son passé de militant politique le rattrape et une campagne est lancée pour l’empêcher d’enseigner dans cette prestigieuse université. Jacques Derrida, Pierre Vidal-Naquet, Pierre Bourdieu ou encore Luc Ferry font partie des signataires. Ils mettent en doute le sérieux philosophique de Boutang et lui reprochent d’avoir ressuscité « la presse d’extrême droite ». L’alliance des libéraux, des marxistes et des structuralistes contre le philosophe royaliste et catholique est un échec. Les défenseurs de Boutang sont nombreux, d’Emmanuel Levinas à André Froisard en passant par René Schérer. Avant que François Mitterrand, alors Premier secrétaire du Parti socialiste, ne rappelle : « […] la liberté de nos adversaires n’est-elle pas un peu la nôtre ? » En dernière instance, c’est le talent de professeur de Boutang, sa générosité aussi, qui légitimeront sa place à la Sorbonne. « Pédagogue de la liberté intérieure, Boutang donne aux étudiants l’occasion de rompre avec le conformisme marxiste et freudien ambiants, mais il leur offre surtout la possibilité d’interroger les textes comme ils ne l’ont pu auparavant, avec des recours à l’étymologie, aux comparaisons entre les langues, et des parallèles inattendus qui surgissent pour éclairer une notion, ouvrir un problème… », souligne Giocanti.

    Universitaire controversé mais respecté, Boutang pourra enfin se consacrer à l’essentiel : la philosophie. Après Ontologie du secret (1973), c’est Le Purgatoire (1976), Apocalypse du désir (1979) ou encore Maurras, la destinée et l’œuvre (1981) qui contribueront à forger sa réputation de penseur de premier plan. Cent ans après sa naissance, la biographie de Giocanti apparaît comme un hommage nécessaire à cet homme hors du commun qui aura traversé le XXe siècle comme une comète. 

    Crédits photo : Rue des Archives/mention obligatoire©Louis Monier

    Philitt

  • Jean Pierre Le Goff : « Malaise dans la démocratie » ?

     

    « L'impuissance politique est enrobée dans les bons sentiments »

    Une analyse éminemment politique mais aussi éthique, anthropologique, sociétale de notre situation française et européenne. Une analyse complète, profonde sans aucune complaisance et d'une grande pertinence. Seule l'idée que la prochaine échéance présidentielle pourrait être, pour les politiques, l'occasion de mettre fin à leurs luttes intestines et à leurs querelles d'égo « pour répondre aux exigences qu'implique l'état du pays et du monde » nous paraît ressortir davantage d'un vœu pieux mais illusoire que d'un espoir réaliste. Nous ne sommes pas sûrs que pour Jean Pierre Le Goff ce soit là autre chose qu'une clause de style.  LFAR

     

    Terrorisme, révolte dans la jeunesse, campagne antiraciste absurde, Europe impuissante, le titre du dernier livre de Jean-Pierre Le Goff, Malaise dans la démocratie, est plus que jamais approprié à la situation actuelle. Le sociologue et philosophe a fait le point pour FigaroVox [29.03].

    Remaniement ministériel digne d'une farce, débat sur la loi travail qui contredit totalement le programme du candidat Hollande en 2012, négociations avec la Turquie sur la crise des migrants: le titre de votre livre, Malaise dans la démocratie, n'a jamais semblé aussi approprié ….

    De quelque côté que l'on se tourne, c'est l'impression de confusion et de délitement qui domine avec le sentiment d'impuissance des États à s'attaquer aux causes des maux dont ils déplorent les effets. On réagit au plus vite pour essayer tant bien que mal de gérer des problèmes qui s'emballent : lutte contre le terrorisme, flux de migrants, Union européenne à la dérive, chiffres du chômage…, tout en ayant en vue des échéances électorales qui se rapprochent à grands pas.

    Chaque jour nous confronte à la vision d'un pays désorienté, d'une Union européenne à la dérive et d'un monde livré au chaos. Les images du flot de réfugiés et de migrants bloqués aux frontières criant leur colère renforcent l'angoisse des peuples européens : pour ces migrants, l'Europe est une terre promise quoiqu'il en soit du chômage, des différences de culture et des mœurs ; réfugiés politiques et migrants économiques se mélangent dans la plus grande confusion, sans parler des terroristes islamistes qui peuvent profiter de l'occasion. Les grands discours généraux sur la lutte contre la xénophobie, l'islamophobie, le racisme…, les leçons de morale données aux peuples européens qui craignent de voir à terme leur pays et leur culture s'en aller à vau l'eau n'y changeront rien. L'accord passé avec la Turquie d'Erdogan restera dans les annales comme un marchandage déshonorant impliquant des milliards d'euros, la possible dispense de visas d'entrée en Europe pour les citoyens turcs, la reprise des promesses de l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne… pour des mesures dont la mise en œuvre et l'efficacité restent largement aléatoires. Face à l'urgence, dira-t-on, il ne convient pas de faire la fine bouche, l'Union européenne fait ce qu'elle peut en essayant de gérer tant bien que mal une situation qui paraît devenue immaîtrisable. Il n'empêche : l'irresponsabilité et les revirements de la chancelière allemande, les déclarations hautaines et méprisantes d'Erdogan envers l'Europe, son rapport pour le moins ambigu aux islamistes, sa répression contre les kurdes et les opposants… sont autant de réalités que tous les discours embarrassés des responsables de l'Union européenne ne peuvent effacer. En octobre 2015 au Zénith à Strasbourg, les partisans d'Erdogan vivant en Europe, hommes et femmes séparés, après une prière collective menée par un iman venu de Turquie, ont écouté et applaudi à tout rompre son discours guerrier contres ses opposants et ses propos méprisants sur l'Europe dénoncée et huée par la salle parce qu'elle prétendrait donner des leçons. L'Europe serait affectée par la xénophobie, l'islamophobie et le racisme, tandis que la Turquie serait le « défenseur de la vraie civilisation ». De tels propos tenus en France et sur le sol européen auraient provoqué l'indignation et la réprimande en d'autres temps. Comment ne pas se sentir humilié et continuer de croire à l'Europe quand la France et les autres pays européens ont largement fait silence face à de tels propos ?

    La politique intérieure française ne semble pas plus sortie de ce que vous appelez la « démocratie de l'informe »…

    La présidence de François Hollande représente le summum du pouvoir incohérent et informe qui ne date pas d'aujourd'hui. La façon dont on prépare et multiplie les lois, dont on avance et on recule au gré des pressions des uns et des autres, pour aboutir à des « synthèses » alambiquées qui finissent par mécontenter tout le monde constitue une sorte de modèle-type d'une « gouvernance » post-moderne qui navigue à courte vue au gré des évolutions, des événements et des groupes de pression. . La concertation, la démocratie participative, la recherche d'un compromis acceptable… ont bon dos pour masquer l'absence de tout projet clair et cohérent. La loi El Khomri qui a, entre autres, pour objectif de faciliter la négociation a comme caractéristique paradoxale d'avoir été préparée sans consultation avec les organisations syndicales, avec menace plus ou moins claire d'utiliser le 49-3, avant de revenir en arrière, pour aboutir à une « simplification » du code du travail qui risque d'être des plus complexes… Au bout du compte, tout le monde est mécontent ou insatisfait, sauf le gouvernement. Quant au projet sur la destitution de la nationalité et la réforme de la Constitution, sa nécessité et son utilité ne vont nullement de soi au regard de textes de loi déjà existants et à la mentalité djihadiste qui se fiche pas mal de se savoir français ou non. N'importe comment, on ne voit pas comment elle pourrait aboutir. L'opinion finit par ne plus comprendre au juste de quoi il est question et pourquoi on a consacré tant de temps, de débats et de polémiques pour aboutir à retirer les projets en question ou à de piètres résultats. D'où l'impression justifiée d'une politique qui fait beaucoup de bruit pour pas grand chose (« Tout ça pour ça ! ») et dont le rapport avec la réalité du pays et les préoccupations des citoyens ordinaires est de plus problématique.

    En même temps, on continue la communication personnalisée, en essayant tant bien que mal de revaloriser son image dans un souci électoraliste dont les enjeux donnent une certaine idée de l'état de la politique: qui donc sera présent au second tour des élections présidentielles face à la candidate du Front national ? Vaste débat de prospective chez les spécialistes, proportionnel à l'état de désorientation et de désespérance d'un pays qui ne sait plus qui il est et où il va.

    Le « président normal » s'efforce d'incarner la fonction présidentielle dans une situation qui semble devenue immaîtrisable, tout en se livrant à quelques selfies lors de ses déplacements et des confidences dans des journaux branchés. Le citoyen ordinaire pourra ainsi connaître en lisant le magazine Elle quelques informations sur la famille du président, sur sa vie avec Ségolène Royal où il faisait les courses ou la cuisine, s'occupait de enfants, tout en regrettant de n'en avoir pas fait davantage… De tels propos suffiront-ils à rassurer les Français sur les compétences du Président à diriger le pays ? Les féministes toujours avides d'autocritique publique dans les médias, peuvent-elles se contenter de tels propos ? Dans tous les cas, dans la perspective de l'échéance serrée qui s'annonce, il n'y a pas de petits profits électoraux. Comment dans ces conditions, ne pas désespérer de la politique ?

    Après la France, c'est le Belgique qui a été touchée par le terrorisme. Cela traduit-il une extrême faiblesse des Etats européens…

    Oui, mais la lutte contre le terrorisme islamiste radical n'est pas une mince affaire qu'on peut régler rapidement, d'autant plus que depuis des années on a dénié ou sous-estimé l'influence de l'islamisme radical, les prêches haineux dans les mosquées, le nombre de départs pour le djihad… par peur de discriminer nos compatriotes de confession musulmane, en même temps on n'a pas voulu froisser nos liens avec les pays arabes qui prônent le salafisme et avec qui on entretient des liens commerciaux. Pour avoir la paix dans certains territoires abandonnés de la République, on a laissé se développer le communautarisme islamiste avec ses discriminations et ses pressions vis-à-vis des femmes, ses dénonciations des républicains laïcs, des « traîtres » et des « collabeurs »… Au nom de la lutte contre l'islamophobie, tout un courant intellectuel gauchisant a pris le relais accusant la République, la laïcité et notre propre histoire de tous les maux, renforçant le sentiment victimaire et le ressentiment existant chez une partie de nos compatriotes musulmans. Une police de la pensée et de la parole a accusé systématiquement nombre d'intellectuels et de journalistes d'« islamophobie », faisant pression et rendant plus difficile toute critique, toute réflexion et débat sur l'islam et son adaptation difficile à la civilisation européenne, réflexion et débat indispensables à son intégration. Dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres, on paie une politique de l'autruche qui ne date pas d'aujourd'hui alliée à une mentalité angélique et pacifique qui dénie le choc des cultures et des civilisations, et ne veut pas avoir d'ennemis. Malgré tous les efforts des bien-pensants pour dénier ou sous-estimer ces problèmes, il est plus difficile aujourd'hui de « remettre le couvercle » sur ces questions comme on l'a fait depuis des années.

    Comment peut-on sortir d'une telle situation ?  

    On ne s'en sortira pas avec le rappel de valeurs générales et généreuses et de bons sentiments, mais tout d'abord, comme cela a déjà été dit, par des moyens de police et militaires qui doivent frapper comme il se doit les ennemis qui veulent nous détruire. C'est la crédibilté de l'État détenteur de la violence légitime et assurant la sécurité des citoyens qui est en question. On a compris (tardivement) qu'on ne pouvait traiter le Ministère de la défense comme les autres en le soumettant à des restrictions budgétaires drastiques, même si on peut estimer qu'on est loin du compte pour faire face aux menaces dans un monde des plus chaotiques. Mais pour que l'État puisse effectivement jouer son rôle, il faut qu'existe en même temps une opinion publique qui le soutienne fermement dans la répression nécessaire dans le cadre de l'État de droit. Les demandes d'engagement dans l'armée et la police de la part des jeunes générations traduisent de ce point de vue une nouvelle dynamique qui rompt clairement avec la dépréciation dont ces deux institutions ont fait l'objet depuis près d'un demi-siècle.

    Mais dans la jeunesse comme dans d'autres catégories de la population, existent des fractures sociales et culturelles symptomatiques des difficultés à affronter le terrorisme islamique et la guerre. Je suis frappé de ce point de vue par des similitudes existant entre les réactions aux attentats islamistes à Bruxelles et à Paris. Dans les deux cas, les attentats ont produit des effets de sidération et donné lieu à un même type d'expression publique de l'émotion et de la douleur : on allume des bougies, on se tient par la main, on dessine des cœurs, on chante la chanson Imagine de John Lenon célébrant la paix et la fraternité universelle alors que viennent d'être commis des massacres de masse. Ces réactions émotionnelles expriment une sorte de catharsis nécessaire face au terrorisme et à la barbarie, l'indignation et la douleur d'un peuple qui pleure ses morts et proclame son refus du terrorisme. En même temps, l'unité et la solidarité ne peuvent seulement s'exprimer dans l'émotion et à la douleur partagées. Si nous voulons faire face et combattre efficacement nos ennemis, il s'agit de comprendre comment de tels actes ont été rendus possibles et le fanatisme islamiste qui leur est inhérent En d'autres termes, le terrorisme et l'islamisme radical n'ont pas surgi de nulle part et force est de reconnaître que ceux qui commettent ces actes barbares sont des citoyens des pays européens. Voilà ce qui est peut-être le plus difficile à admettre parce que cette question nous renvoie aux faiblesses internes des démocraties européennes, au refus d'affronter des réalités dérangeantes en essayant tant bien que mal de les masquer, comme pour mieux se rassurer en se croyant à l'abri des désordres du monde.

    Manuel Valls vient d'appeler clairement les pays de l'Union européenne à en finir avec l'angélisme. Il est temps. Mais encore s'agit-il en même temps de comprendre pourquoi et comment un tel déni des réalités et un tel angélisme ont pu se développer depuis des années. Comme je le souligne dans mon livre, cela pose le problème du bouleversement du terreau éducatif et sociétal des démocraties européennes, bouleversement qui a abouti à la dépréciation de leur propre histoire et à la mésestime d'elles-mêmes, au profit d'un multiculturalisme invertébré et sentimental qui a le plus grand mal à reconnaître qu'existe une pluralité des peuples et des civilisations. C'est une mentalité nouvelle qui a vu le jour pour qui la démocratie est devenue synonyme de relativisme culturel, la nation de xénophobie et de racisme, l'Europe et l'Occident étant eux-mêmes considérés, peu ou prou, comme les responsables de tous les maux de l'humanité. Les guerres, les totalitarismes et la shoah, le colonialisme… se sont trouvés intégrés dans un récit de plus en plus dépréciatif de notre histoire et la critique salutaire de l'ethocentrisme européen a versé dans un règlement de compte qui n'en finit pas. En contrepoint, les autres peuples du monde peuvent être considérés comme porteurs de vertus qui nous font défaut. La façon dont aujourd'hui on considère les « peuples premiers » comme des écologistes avant l'heure, voire porteurs de spiritualités indispensables à notre bien-être, est particulièrement révélatrice du grand retournement qui s'est opéré dans notre rapport aux autres peuples du monde.

    C'est précisément cette nouvelle mentalité qui s'est trouvée percutée et désarçonnée par le terrorisme islamique, sans pour autant être en mesure de comprendre ce qui est arrivé, parce que cette mentalité s'est formée dans une époque où la France et les sociétés démocratiques européennes se sont déconnectées de l'histoire et du tragique qui lui est inhérent.

    « Tout ce qui était n'est plus, tout ce qui sera n'est pas encore. Ne cherchez pas ailleurs le secret de nos maux. », écrit Musset en 1836. En 2016, on a également le sentiment d'assister à la fin d'un monde…

    Nous vivons la fin d'un cycle historique où nombre de schémas de pensée et de façon de faire de la politique se décomposent à grande vitesse avec le sentiment partagé par beaucoup que cette période de décomposition n'en finit pas de finir. C'est toute une façon de faire de la politique au gré des évolutions, sans stratégie et sans vision, dans une logique de réactivité et d'adaptation à courte vue qui est en question. Le déni du réel, la réactivité et la fuite en avant s'accompagnent d'un discours victimaire et compassionnel qui enrobe l'impuissance politique dans des valeurs généreuses et des bons sentiments, en essayant de cette manière compassée et compassionnelle d'incarner l'unité d'un pays désorienté et morcelé. La réactivité et la compassion dominent sur fond d'impuissance de proclamation insipide des grands principes, de coups de menton, d'indignation surjouée et de petits calculs électoraux. Au vu de tout cela, les citoyens ordinaires ont des raisons de ne plus croire à la capacité du politique à agir sur le réel et redonner confiance dans l'avenir. Face à un État incohérent qui navigue à vue, dit une chose et son contraire, avance et recule au gré des groupes de pression et des clientèles électorales, les citoyens désorientés perdent confiance dans la politique, se replient sur leurs réseaux et leurs communautés d'appartenance dans une logique de repli sécuritaire et de défense de leurs propres intérêts catégoriels.

    Dans le même temps, affaires, scandales, discours incohérents, démagogie et reculades, dénonciations en tout genre s'affichent dans les médias et les réseaux sociaux… Le lynchage médiatique dans les réseaux sociaux est devenu un sport national, le coupable est dénoncé et jugé avant même l'instruction, laquelle peut désormais se dérouler à livre ouvert dans les journaux. Sous les oripeaux de la « démocratie participative » et de la transparence, la mentalité « sans culotte » a gagné du terrain. Il ne sert à rien de dénoncer l'extrême droite et le « populisme » tant qu'on continuera de dénier les réalités délétères qu'ils savent exploiter à leur manière. On a l'impression à chaque fois de toucher le fond, avant que de nouveaux faits délétères enfoncent un peu plus le pays dans la spirale du délitement et de la mésestime de soi. Ce n'est pas seulement une question de « popularité » mesurée à l'aide de multiples sondages qui est en question. C'est le lien de confiance avec l'État et une bonne partie des élites qui est rompu entraînant la méfiance et la suspicion dans une optique victimaire empreinte de ressentiment.

    On assiste bien à la fin d'un monde avec des risques de conflits ethniques et de violences, une accentuation du chaos. Dans ces conditions, l'appel à l'optimisme, à la « mondialisation heureuse » a des accents de méthode Coué tant que ne sont pas clairement reconnues la gravité de la situation et les impasses auxquelles ont conduit une politique de l'autruche et de la fuite en avant qui n'appartient pas spécifiquement à un camp. Les politiques ne peuvent évacuer la question de la part de responsabilité qui leur incombe dans cette période critique de l'histoire que nous traversons. C'est l'une des conditions pour regagner la confiance du pays et des peuples européens et entamer une reconstruction qui tire les leçons d'une période dont on pourra dire qu'elle est vraiment terminée quand une nouvelle dynamique politique et historique verra le jour. Sans tout attendre du politique, les échéances présidentielles peuvent en être l'occasion, si les politiques parviennent à mettre fin à leur lutte intestine et leur bataille d'ego pour répondre aux exigences qu'implique l'état du pays et du monde. Les citoyens jugeront sur pièces. 

    Jean-Pierre Le Goff est un philosophe, écrivain et sociologue français. Son dernier livre Malaise dans la démocratie vient de paraître chez Stock

    picture-2540921-61yhv5dr.jpgEntretien par

    Journaliste au Figaro et responsable du FigaroVox. Twitter : @AlexDevecchio

     

  • La une de Charlie Hebdo qui a indigné les Belges ... et nous avec

    Repris du site belge Canoë [30.03]

     

    Alors que Charlie Hebdo a suscité une grande indignation en Belgique avec sa nouvelle une sur les attentats de Bruxelles, des internautes mécontents ont décidé de détourner l'image du magazine satirique français.

    La nouvelle couverture de Charlie Hebdo n'arrête pas de faire réagir. Dévoilée mardi, l'illustration montrant le chanteur belge Stromae chanter Papa où t'es, entouré de morceaux de corps déchiquetés, n'était pas du goût de tout le monde.

    Des internautes belges indignés ont parodié la une choc du magazine satirique. Sur une image portant comme titre « La réponse des Belges à la une de Charlie Hebdo », on peut voir en toile de fond le drapeau tricolore français avec en avant plan le célèbre personnage de bande dessinée Charlie. Une référence à peine masquée à l'attaque terroriste dont Charlie Hebdo a été victime en janvier 2015 et de la vague de sympathie qui s'en était suivie avec le désormais célèbre « je suis Charlie ».

    Le personnage au chandail rayé blanc et rouge, crayon à la main, verse une larme en demandant « où est Charlie ». Autour de lui, les mêmes morceaux de corps déchiquetés que l'illustration originale de Charlie Hebdo répondent « ici », « là », « et là aussi ». Peut-on parler d'arroseur arrosé ? 

    En tout cas, ils n'ont pas volé la réplique belge !

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