Août 2003. Dans une pièce sombre, porte verrouillée, Myriam entend sans les écouter des sourates du Coran résonner en boucle. La douleur des coups assénés par son mari se fait plus lancinante. Son tort ? Avoir manifesté son mécontentement en découvrant l'existence de sa deuxième épouse en Algérie. Au milieu de cet enfer, pourtant, Myriam reçoit, dit-elle, «des apparitions». De la Vierge Marie. Elle la prie et est «exaucée» : délivrée, elle repart en France avec ses enfants. Après un long chemin de reconstruction, la Française, séparée de son mari, reçoit finalement le baptême à Antibes en 2018, à 52 ans.
Chaïnez a 16 ans lorsque sa mère, pourtant musulmane, la «force» à se rendre à la basilique Notre-Dame de la Garde, à Marseille, pour sortir d’une profonde dépression. «C’est un lieu très visité par les musulmans qui viennent y mettre un cierge», explique-t-elle. Face à une statue de la Vierge à l’Enfant, Chaïnez est bouleversée : «C’était comme si on m’enlevait un poids. Je n’ai jamais ressenti un tel bonheur». Depuis ce jour, en secret, elle cherche des réponses dans la Bible. 12 ans plus tard, elle est baptisée à Pâques 2023.
Mehdi Djaadi, 37 ans, a lui aussi été élevé dans une famille musulmane. Après avoir sombré dans la délinquance, et même été tenté par l’islam radical, il fait une rencontre déterminante avec un pasteur. Baptisé en 2007 dans l’Église réformée de France, il se convertit ensuite au catholicisme, avec une première communion en 2013. Aujourd’hui, il témoigne de sa foi dans un seul en scène à succès, «Coming out».
Comme eux, plusieurs centaines d’ex-musulmans reçoivent le baptême catholique chaque année en France.…"
![Cette année, qui enregistre une hausse record des baptêmes d'adultes (+31%), selon l'enquête annuelle de la CEF, 5% des nouveaux baptisés sont issus de familles de tradition musulmane, soit environ 350.]()
Ce
Tout le monde s'en souvient, c'était il n'y a pas si longtemps : Jean-Luc s'en va-t-en guerre !...(air connu).....
Malheureusement, il semble qu'il ne s'en prend à "eux" que lorsqu'il est attaqué, lui. Quand c'est le Pape, qui est traîné dans la boue, odieusement diffamé par ceux-là même qui défendent Mitterrand (Frédéric), Cohn Bendit ou Polanski, là, pour Jean-Luc (comme pour Georges...) c'est silence radio : motus et bouche cousue !...
Il n'empêche: même si on ne doit pas se leurrer, ni sur la chose ni sur la personne, elle était réjouissante, la salve qu'il a tiré contre "les journalistes pourris"...
Et elle nous fait juste regretter qu'il se soit - semble-t-il... - arrêté en si bon chemin (1)...
![melenchon.jpg](http://lafautearousseau.hautetfort.com/media/00/00/3475160264.jpg)
Une grande voix s'est tue ? Déja ? Il serait dommage que la basse politique politicienne accapare et récupère des colères qui seraient mieux employées dans cette oeuvre de salubrité publique qu'est la nécéssaire dénonciation de la "cléricature médiatique"...
Souvenez- vous : "Une certaine caste médiatique se déchaîne contre moi ! J'ai commis le crime de lèse vache sacrée..."
C'était le bon temps, où Mélenchon venait de découvrir l'eau tiède, et où cela le faisait rugir, nous promettant des lendemains saignants. Hélas, il semble plutôt devenu adepte des émissions de télé réalité genre Perdu de vue. A moins que son brusque silence, après un si bon départ, ne s'explique par ses tractations électorales pour savoir qui sera le candidat du Front de gauche (il souhaite que ce soit lui, évidemment) à la prochaine présidentielle...
A la bonne époque, donc, au bon vieux temps d'il n'y a pas si longtemps, Mélenchon rugissait contre la police de la pensée, la censure, la diabolisation, la reductio ad hitlerum, la mise au pilori dès qu'on sortait des clous. Bien sûr, il savait que tout cela existait. Seulement il n'en faisait pas les frais, avant, alors.... c'était bon pour les autres ! Mais, comme il venait d'y goûter, au lynchage en direct, alors il a réagi. Mieux vaut tard que jamais !...
C'est vrai que, d'où qu'elles viennent, on n'en n'aura jamais assez des dénonciations de "la cléricature médiatique"; du "pouvoir de l'argent" (vite, il faut faire lire à Jean-Luc l'Ephéméride du 20 avril, naissance de Charles Maurras, où se trouve résumé à grands traits L'Avenir de l'Intelligence, qui montre bien que c'est la Révolution qui a libéré les forces de l'Argent et leur a ouvert toutes grandes les portes d'une domination qu'elles exercent, maintenant, sans partage...); et on n'en n'aura jamais assez non plus, d'où qu'ils viennent, des appels à la lutte et à la résistance contre ce pouvoir tyrannique: n'est-ce pas Daudet qui disait -cette phrase étant sa devise-: "Qui n'a pas lutté n'a pas vécu !"...
Donc, Jean-Luc a annoncé urbi et orbi qu'il allait lutter et se battre. Oui mais, voilà, quelques semaines, et même quelques mois maintenant après cette sympathique ruade dans les brancards, quid ? On attend toujours, on reste sur sa faim, et Jean-Luc semble totalement récupéré par ses intrigues politico-électorales. La torpeur estivale arrivée puis passée, la rentrée elle aussi arrivée et en passe de passer, on commence à s'inquiéter. Car, de fait, lutter contre la cléricature médiatique, c'est une tâche qui urge. Et, pour le public, c'est bien plus intéressant que les petites questions de personnes...
Il serait dommage que, sitôt attelé à la tâche, Jean-luc dételle...
(1) petit florilège, pour ceux qui auraient oublié : "sale corporation voyeuriste", "vos sujets de merde", "tu fermes ta petite bouche", "ton métier pourri", "...tellement votre tête est pourrie...", "petite cervelle"..., et trois extraits glanés sur le net :
I :
Le politique : Regardez cette semaine par exemple. Le jour 2 après qu'on ait tous jeté de grosses larmes sur l'abstention populaire, quel était le titre du journal Le Parisien ? Faut-il rouvrir les maisons closes, sujet qui est venu sur quatre ou cinq radios, c'est intéressant ça non ? Alors ce mélange de voyeurisme et de prostitution publique va continuer jusqu'à la catastrophe évidemment, évidemment bien sûr.
L'étudiant : En tout cas on dirait que ça intéresse les gens la réouverture des maisons closes.
Le politique : Mais si vous parliez de choses intelligentes, ça les intéresserait aussi.
L'étudiant : Mais c'est un débat important, c'est...
Le politique : Non c'est un débat sans aucun intérêt. Aucun intérêt.
L'étudiant : ça dépend... C'est un débat sur l'hypocrisie de notre société
Le politique : Voilà c'est ça, c'est tout le problème à vous le refoulé politique (sic) de la petite bourgeoisie. Moi je m'excuse mais ce que vous racontez ça concerne personne dans mon quartier. Personne s'est dit “tiens je préfèrerai aller dans une maison close que d'aller chercher les putes au coin de la rue”. J'ai jamais entendu quelqu'un me parler de ça. Sinon vous et votre sale corporation voyeuriste et vendeuse de papier.
L'étudiant : Parce que le problème c'est qu'elles sont dans les bois les prostituées...
Le politique : Mais j'en ai rien à faire. Si vous voulez me parler de ça, vous allez trouver quelqu'un d'autre, d'accord. Avec moi vous parlez de choses sérieuses. Dignitas and Gravitas, la maxime romaine. Avec moi vous parlez de politique et vos sujets de merde vous allez les faire avec des gens qui veulent répondre à la merde.
L'étudiant : Non mais ce que je veux dire c'est
Le politique : Non non c'est fini. Terminé. (bruits de bouche et clapets avec la main gauche) Tututututut.
L'étudiant : Non mais vous m'avez emmené sur le terrain de...
Le politique : Tu fermes ta petite bouche. Tu me parles de politique. Moi, je te parle de médias et de ton métier pourri et si tous ce que tu trouves à faire c'est de me répondre ça tu vas faire ton interview plus loin. Ok.
L'étudiant : Mais je ne comprends pas cette agressivité, enfin c'est...
Le politique : C'est vous qui êtes agressif, vous vous en rendez même pas compte tellement votre tête est pourrie.
L'étudiant : Mais c'est vous qui avait commencé à
Le politique : Vous vous trouvez digne de parler à un homme comme moi? Vous trouvez digne alors que je vous donne comme exemple un titre pourri du Parisien de commencer avec moi un débat sur la prostitution. Mais vous me prenez pour qui bonhomme? Je ne veux pas parler avec vous de ça, c'est clair? Si vous voulez me parler de politique, je vous répondrai.
L'étudiant : Bah fallait pas parler du titre du Parisien si vous ne vouliez pas parler de ça.
Le politique : Je veux vous parler du titre du Parisien petite cervelle, pas de la prostitution, du titre du Parisien
L'étudiant : C'est moi qui suis insultant ? Vous me parlez de petite cervelle et c'est moi qui suis insultant?
Le politique : Parce que je crois que c'est une limite que vous avez atteint.
L'étudiant : Ah bon... bah merci.
Le politique : Moi je ne vous dis pas merci. Vous êtes tous les mêmes et vous êtes en train de nous préparer un drôle de métier. Vous allez être comme les autres, à mouliner du papier qui se vend.
II :
Jean-Luc Mélenchon a déclaré qu'il menait une "lutte politique" contre le système médiatique qui "interdit l'indépendance d'esprit" aux journalistes, se disant "partisan d'une révolution citoyenne des médias", après la polémique autour d'une vidéo qui a fait florès sur internet. Entre les deux tours des régionales, l'eurodéputé s'était emporté contre un étudiant en journalisme qui l'interrogeait avec une caméra, parlant de "métier pourri" et de "sale corporation voyeuriste".
Pour le président du Parti de Gauche, cet "incident de départ n'a aucun intérêt", émanant d'un étudiant qui n'a pas de carte de presse. "Qui penserait à dire qu'un étudiant en médecine est un médecin ?", a-t-il lancé, dans un discours parfois confus, debout devant quelque 70 étudiants du Centre de formation des journalistes (CFJ) à Paris, lors d'un débat sur les médias. A un étudiant le qualifiant de "showman" qui réussit à faire rire son auditoire, M. Mélenchon a répondu qu'il n'était "pas au spectacle".
"Ma critique est devenue une critique sociale et une critique radicale, je suis partisan d'une révolution citoyenne des médias", a-t-il fait valoir. "Comment être révolutionnaire dans la société (...) et m'arrêter à la porte de la cathédrale médiatique ?", a-t-il demandé, répétant qu'il n'y aurait "ni excuses ni regret" de sa part sur l'épisode de la vidéo. "Je mène une lutte politique", a-t-il martelé.
III :
«Un débat sans aucun intérêt (…) C'est vos problèmes à vous, le refoulé de la petite bourgeoisie (…) Moi, ce que vous racontez, ça ne concerne personne dans mon quartier, personne ne m'interpelle pour me dire "Tiens, je préférerais des maisons closes que d'aller chercher des putes au coin de la rue"…»), les relances de Félix Briaud font sortir l'eurodéputé de ses gonds.
«Avec moi, vous parlez de politique! Vos sujets de merde, vous les faites avec les gens qui veulent répondre à de la merde!», lâche-t-il, avant de conclure l'entretien, sans grande commisération envers son interlocuteur: «Ecoute-moi bien petite cervelle: Tu fermes ta petite bouche, tu me parles politique… moi je te parle de médias et de ton métier pourri!»
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Par Henri BEC
Alain Finkielkraut a prononcé son discours de réception à l’Académie française (on dit son « remerciement »), où il avait été élu en avril 2014. On se souvient que cette élection avait été accompagnée des cris d’orfraie du petit monde médiatico-bobo, scandalisé de l’élection d’un pareil réactionnaire.
D’une part elle nous a donné le plaisir d’assister à l’effondrement d’une pensée, et peut-être même d’un système qui ne séduit plus les esprits. Les mouvements de l’histoire sont toujours lents nous a appris Jacques Bainville, ceux de la pensée également. Mais l’Académie s’est une fois de plus honorée de résister au mauvais air du temps.
D’autre part, le discours prononcé sous la coupole n’en fut pas moins éminent : « Le nationalisme, voilà l’ennemi : telle est la leçon que le nouvel esprit du temps a tirée de l’histoire, et me voici, pour ma part, accusé d’avoir trahi mon glorieux patronyme diasporique en rejoignant les rangs des gardes-frontières et des chantres de l’autochtonie. Mais tout se paie : ma trahison, murmure maintenant la rumeur, trouve à la fois son apothéose et son châtiment dans mon élection au fauteuil de Félicien Marceau. Les moins mal intentionnés eux-mêmes m’attendent au tournant et j’aggraverais mon cas si je décevais maintenant leur attente » .
Alors il a répondu à leur attente mais il les a déçus.
La France s’oublie elle-même
Dans de nombreux ouvrages dont le très controversé L’identité malheureuse, Alain Finkielkraut n’a cessé de déplorer la disparition progressive de notre culture, notre langue, notre littérature, notre religion, nos traditions et tout simplement notre art de vivre, pour en arriver à l’être désincarné dont rêve tout dictateur, notamment le dictateur consumériste américain. Et de regretter que la France « semble glisser doucement dans l’oubli d’elle-même ».
« Notre héritage, qui ne fait certes pas de nous des êtres supérieurs, mérite d’être préservé, entretenu et transmis aussi bien aux autochtones qu’aux nouveaux arrivants. Reste à savoir, dans un monde qui remplace l’art de lire par l’interconnexion permanente et qui proscrit l’élitisme culturel au nom de l’égalité, s’il est encore possible d’hériter et de transmettre » .
Fils d’un juif déporté, son remerciement, au terme duquel il devait, selon une belle tradition, faire l’éloge de son prédécesseur, Félicien Marceau, homme de lettres belge, condamné par contumace à 15 ans de travaux forcés pour collaboration avec l’ennemi, condamnation qu’Alain Finkielkraut juge « exorbitante » , était très attendu. « Il n’y a pas de hasard, pensent nos vigilants, et ils se frottent les mains, ils se lèchent les babines, ils se régalent à l’avance de cet édifiant spectacle ».
Mais il eut été étonnant que Finkielkraut s’abaissât à un jeu malsain.
Rappelant Richelieu, fondateur de l’Académie, il cite Pierre Gaxotte, l’historien de l’Action française, évoquant Blum : « Comme il nous hait ! Il nous en veut de tout et de rien, de notre ciel qui est bleu, de notre air qui est caressant, il en veut au paysan de marcher en sabots sur la terre française et de ne pas avoir eu d’ancêtres chameliers, errant dans le désert syriaque avec ses copains de Palestine ». Il reprend Simone Weil (la philosophe, pas l’autre) et affirme, comme elle l’avait écrit dans L’enracinement, avoir été étreint par le « patriotisme de compassion » … « non pas donc l’amour de la grandeur ou la fierté du pacte séculaire que la France aurait noué avec la liberté du monde, mais la tendresse pour une chose belle, précieuse, fragile et périssable. J’ai découvert que j’aimais la France le jour où j’ai pris conscience qu’elle aussi était mortelle, et que son « après » n’avait rien d’attrayant » .
L’hommage à Félicien Marceau
Puis c’est tout en nuances qu’il analyse l’évolution intellectuelle de Louis Carette, le véritable nom de Félicien Marceau.
Celui-ci occupait le poste de chef de section des actualités au sein de Radio-Bruxelles, placé sous le contrôle direct de l’occupant. Lorsque la connaissance des mesures prises contre les juifs commence à se répandre, il écrit « Je puis concevoir la dureté. Je suis fermé à la démence. Je résolus de donner ma démission » .
« Ce geste ne lui est pas facile » commente Finkielkraut. « Deux hontes se disputent alors son âme : la honte en restant de collaborer avec un pouvoir criminel ; la honte, en prenant congé de laisser tomber ses collègues et de manquer ainsi aux lois non écrites de la camaraderie » . Il explique longuement sa démarche, « révulsé par la guerre immonde qui suscite tout ce qu’il y a d’immonde dans le cœur déjà immonde des braillards » et rappelle que De Gaulle lui a accordé la nationalité française en 1959 et que Maurice Schumann a parrainé sa candidature à l’Académie française.
Son discours stigmatise tous ceux qui, sans nuance mélangent les époques et les hommes pour ne juger qu’à l’aune d’un moment : « Aux ravages de l’analogie, s’ajoutent les méfaits de la simplification. Plus le temps passe, plus ce que cette époque avait d’incertain et de quotidien devient inintelligible. Rien ne reste de la zone grise, la mémoire dissipe le brouillard dans lequel vivaient les hommes, le roman national qui aime la clarté en toutes choses ne retient que les héros et les salauds, les chevaliers blancs et les âmes noires » …
… « Car les hommes prennent pour l’être vrai le système formé par la rumeur, les préjugés, les lieux communs, les expressions toutes faites qui composent l’esprit du temps. Cartésiens et fiers de l’être, ils ont le cogito pour credo. « Je pense, donc je suis » disent-ils alors que, le plus souvent, au lieu de penser, ils suivent « Les démocrates, les modernes que nous sommes, prétendent n’obéir qu’au commandement de leur propre raison, mais ils se soumettent en réalité aux décrets de l’opinion commune ».
Et de déclarer solennellement sous cette coupole, devant les représentants de l’intelligence et de la culture française, protecteurs de la langue : « Je ne me sens pas représenté mais trahi et même menacé par les justiciers présomptueux qui peuplent la scène intellectuelle » …
Il analyse enfin longuement l’œuvre littéraire de Félicien Marceau : « Félicien Marceau appartient à cette période bénie de notre histoire littéraire, où les frontières entre les genres n’étaient pas encore étanches. Les auteurs les plus doués circulaient librement d’une forme à l’autre et savaient être, avec un égal bonheur, romanciers, essayistes, dramaturges« .
Contre le prêt-à-penser
Sa conclusion résume, dans un magnifique raccourci, les pensées distillées quotidiennement par les penseurs-censeurs enfermés dans leurs certitudes, leurs caricatures et finalement leurs erreurs, grands prêtres satisfaits du penser correct :
« C’est la mémoire devenue doxa, c’est la mémoire moutonnière, c’est la mémoire dogmatique et automatique des poses avantageuses, c’est la mémoire de l’estrade, c’est la mémoire revue, corrigée et recrachée par le Système. Ses adeptes si nombreux et si bruyants ne méditent pas la catastrophe, ils récitent leur catéchisme. Ils s’indignent de ce dont on s’indigne, ils se souviennent comme on se souvient » .
La place manque ici pour évoquer la magnifique réponse de Pierre Nora. Le directeur des Débats a rendu un hommage appuyé à Alain Finkielkraut après le départ de quelques grincheux. Dans Marianne (oui, oui Marianne !) Laurent Nunez se demande si ces « idiots » (sic) ont bien tout compris.
Il entretient avec le nouvel académicien, dit-il, « une amitié distante » faite de « tout ce qui nous rapproche et nous réunit : une sensibilité attentive au contemporain, un judaïsme de génération et d’enracinement décalé, un souci de l’école et de la transmission, un rapport intense à la France, à sa culture, à sa langue, à son histoire. »
Il formule le même constat sur « la désintégration de l’ensemble national, historique et social et même sur le naufrage d’une culture dans laquelle nous avons tous les deux grandi » .
Mais : « À mon sens, le mal vient de plus loin, de la transformation douloureuse d’un type de nation à un autre que tout mon travail d’historien a cherché à analyser. Ses causes sont multiples et l’immigration me paraît avoir joué surtout un rôle d’accélérateur, de révélateur et de bouc émissaire. En un sens, je suis, en historien, encore plus pessimiste que vous. L’identité nationale, vous disais-je, serait peut-être aussi malheureuse s’il n’y avait pas un seul immigré, car le problème principal de la France ne me paraissait pas la puissance de l’Islam, mais la faiblesse de la République » .
Et pour finir : « L’Académie française représente, sachez-le, le conservatoire et le condensé de tout ce qui vous tient le plus à cœur : une tradition historique vieille de près de quatre siècles, la défense de la langue dans son bon usage, le respect de la diversité des personnes dans l’unité d’un esprit de famille et le maintien, par-delà l’abîme de nos différences, d’une éternelle courtoisie. La Compagnie vous a ouvert les bras, vous allez connaître avec elle ce que c’est qu’une identité heureuse » .
Déception bien sûr de ceux qui attendaient une condamnation sans appel, sinon une exécution, de Félicien Marceau d’abord, d’Alain Finkielkraut ensuite. Aussitôt les écrans et les radios se sont fermés, les patrons de la pensée manipulée sont partis pratiquer leur terrorisme intellectuel sur une autre victime, la discrétion s’est abattue sur cette brillante entrée à l’Académie où, faut-il le rappeler, la famille d’Orléans a son siège attitré sous la coupole. Ce fut, pour l’occasion, une fille de feu le comte de Paris qu’une limousine noire aux vitres teintées a amenée jusqu’à la cour intérieure pour respecter cette règle multiséculaire. Il est plaisant de constater que l’Académie n’entend pas rompre le fil de l’histoire. •
Henri BEC
Politique magazine
La technocrature, maladie sénile de la démocratie : (14/15)
Nébuleuse maurrassienne et Technocratie
Si un mouvement politique à considéré la prise de pouvoir par la Technocratie « normale », c’est bien l’Action française. Depuis 1956, elle a été sensibilisée à la montée en puissance technocratique. C’était, a rappelé Christian Franchet d’Esperey dans une belle émission de Radio-courtoisie1, la grande idée de Pierre Debray lorsqu’il rendait compte dans Aspects de la France, des évolutions de la société industrielle. Par sa grande pédagogie, Il fit comprendre le « phénomène technocratique » à toute une génération d’étudiants monarchistes des camp CMRDS.
![](http://lafautearousseau.hautetfort.com/media/00/01/2737274333.106.jpg)
Pour Hilaire de Crémiers, Debray avait compris par Maurras que la technocratie n’était pas un pure produit de la société industrielle mais la complice nécessaire à l’idée et aux institutions républicaines dans beaucoup de pays, y compris en Union Soviétique. Une sorte de dénonciation avec quarante ans d’avance de ce que certains appellent la super-classe mondiale qui prétend diriger, car les « technos » pensent avoir le savoir du pouvoir et le pouvoir du savoir. Et maitre Trémolet de Villers de renchérir sur le phénomène du « complot des éduqués » qui cherchent où se placer pour trouver les places où coule l’argent publique, se cooptent en passant du public au privé, ne prennent pas le risque de se faire taxer de « sale capitaliste » mais profitent des résidences d’été, des voitures de fonction, des grands hôtels, des aéroports. A son tour Franchet d’Esperey rappelle que Debray fut le premier a mettre en évidence dans la Nomenklatura soviétique la rivalité entre les bureaucrates – disons l’élite politique – et les technocrates. En fait Debray avait été influencé par les analyses postmarxistes des revues Arguments et Socialisme et Barbarie. D’où son espérance de la montée d’une « nouvelle classe ouvrière » française pouvant faire revivre l’anarcho-syndicalisme avec lequel l’Action française des origines avait cherché la jonction. On ne trouvait ce langage nulle part ailleurs, d’autant qu’il était exprimé en totale fidélité maurrassienne.
Les boutangistes de l’hebdomadaire La Nation Française – ces maurrassiens séparés de la « vieille maison » – s’opposaient aussi au groupe social des technocrates mais sur d’autres bases. D’abord les influences des positions « humanistes » et anti-techniques de philosophes comme Heidegger et Gabriel Marcel. Ensuite la volonté de s’appuyer sur les « poujadistes », cette classe moyenne agressée par les développements de la société industrielle.
Les deux héritiers catholiques de Maurras ont montré une hostilité à l’égard de la société de consommation déracinante, massifiante et désacralisée. Leur opposition à la technocratie est différent de l’anti-synarchisle communiste et de celui des contre-révolutionnaires catholiques, même proche comme Louis Daménie. Depuis longtemps les maurrassiens s’attendent à une prise du pouvoir politique par les technocrates. Au point d’ailleurs qu’ils envisagèrent d’appuyer une stratégie royaliste sur ce groupe sociale.
Retournement et Technocratie
En 1980, les maurrassiens2 de la Nouvelle Action Française qui étaient entré en dissidence avec la ligne « ralliée » des Renouvinistes, avaient développé une réflexion stratégique novatrice sur la base du phénomène technocratique et celui de la « société du spectacle » dénoncée par Guy Debord.
Dans le n° 13 du laboratoire d’idées de La Revue Royaliste, le sociologue Michel Michel proposait « un modèle » stratégique basé sur une ligne politique différente de celle de Debray et des boutangistes, concernant la technocratie : « Une autre ligne est possible que nous inspire la pratique même des contre-révolutionnaires dans la situation créée dans le passé par la modification des élites du début de l’ère industrielle. Au début du XIX° siècle, le système de valeurs des contre-révolutionnaires semblait indissolublement lié à I ‘ancienne société féodale et s’appuyait sur I ‘aristocratie terrienne et les portions de la société qu’elle contrôlait. Pourtant, la pensée contre-révolutionnaire a su tout au long du XIX° siècle, conquérir des fractions importantes des « nouvelles élites », rechristianiser en partie une bourgeoisie voltairienne, etc… De même, au début du XX° siècle, I’Action française a su présenter à des groupes non acquis (intellectuels, syndicalistes, « producteurs » de Valois, etc…) une synthèse leur permettant de s’accorder avec les groupes qui avaient conservé la sensibilité de l’ancienne France. Pourquoi donc ne pas rechercher à convertir une fraction des élites nouvelles de la technocratie, non à la sensibilité de la bourgeoisie conservatrice ni même à celle héritée de Ia société féodale, mais à ce que notre système d’analyse et de valeurs a de permanent ? » En d’autres termes Michel proposait d’infiltrer la Technocratie afin de retourner ses meilleurs éléments au profit de la restauration monarchique.
Appelons désignons la voie technocratique proposée par Michel, comme un modèle stratégique de type « retournement », cette tactique si chère au spécialiste du renseignement Vladimir Volkoff, ancien étudiant maurrassien rédacteur à Amitié Française Université. Le retournement appartient bien à la « boite à outils » maurrassienne. Le doctrinaire du néo-royalisme la revendiquait dès 1909 : « Lorsque j’étais enfant, explique Maurras, le plus beau des faits d’armes, celui qui unissait la bravoure à l’utilité, me semblait devoir être d’accourir à toute bride sur la batterie ennemie, de hacher à leur poste les servants et les canonniers, puis, au lieu d’enclouer vainement les pièces conquises, de les retourner aussitôt pour leur faire jeter le désordre et la mort dans les lignes de l’adversaires.3 » Rêverie d’enfant que Maurras mettra en application pour retourner la jeune Action française alors républicaine – cette élite en fusion d’après l’historien Jean-Pierre Deschodt – au service du roi. Rêverie d’enfant qui deviendra modèle stratégique dans son texte trop méconnue Mademoiselle Monk4. Modèle stratégique que le maurrassien Patrick Buisson déploya auprès de Nicolas Sarkozi, au point de lui permettre d’acceder à la Présidence de la République en 2005. Car une stratégie n’a de valeur que déployée.
Débat de stratégie royaliste
Un débat s’instaura entre le maitre et l’élève, entre Pierre Debray et Michel sur le bienfondé du modèle proposé. Pour ce dernier « De même qu’il y a aujourd’hui des enseignants contre l’école, des curés contre I ‘Eglise et des magistrats contre I ‘appareil judiciaire, on doit s’attendre à ce que les plus exigeants des technocrates ne soient plus des instruments dociles de la « raison d’Etat » technocratique. Pourquoi ne pas envisager d’être les promoteurs dans ce milieu d’une « nouvelle synthèse » et d’y organiser l’équivalent de ce que te syndicat de la magistrature a été pour le milieu judiciaire ? A I’ancienne synthèse, aujourd’hui en décomposition, fondée sur la dialectique entre une intelligentsia progressiste (eschatologie du progrès et de la « libération de I’Homme ») et une technocratie de la rationalité abstraite (mal) régulée par I’opinion publique€, nous proposons de substituer une nouvelle synthèse fondée sur une intelligentsia anti-progressiste (néo-traditionnaliste,… ) et une technocratie enracinée (service public des communautés concrètes), plus tard (peut-être) régulée par un pouvoir politique indépendant. »
Pour sa part, dans Je Suis Français, Debray argumenta contre l’hypothèse du retournement technocratique : « En 1956 quand j’ai commencé à étudier le phénomène, je l’ai abordé sous un angle purement sociologique et non pas historique. A L’époque je parlais de bureau-technocratie. Ce qui prêtait à malentendu. Ainsi La Revue Royaliste semble s’imaginer que je refusais le progrès technique, que je versais dans le poujadisme et que je suivais trop servilement certaines analyses des « gauchistes » de Socialisme et Barbarie… Il est vrai que ce sont des marxistes dissidents qui ont été les premiers à nous alerter sur la véritable nature de la société soviétique et sur les transformations d’un capitalisme détaché du capital. Mais il fallait reprendre ces analyses, exactes au niveau des faits, en fonction de l’empirisme organisateur. » Ce qu’il fit. Partant du constat de physique sociale de la création d’une Nomemklatura par le « citoyen-général Bonaparte », il contesta le modèle stratégique proposé par Michel.
Ce débat fut interrompu par l’élection de François Mitterrand à la présidence de la république. Il n’en reste pas moins vrai que le dossier de retournement technocratique proposé par Michel Michel reste un modèle du genre digne de celui de la « Stratégie nationaliste » proposé en 1962 par Pierre Debray et qui lui aussi ne fut pas déployé.
C’est donc par l’intérêt constant qu’elle porte au phénomène technocratique et à sa prise de pouvoir politique, jusqu’à y voir prospectivement un potentiel stratégique, que l’Action française à jugé à minima « normale » la prise du pouvoir politique par Macron en 2017. Nous verrons qu’elle va même au-delà.
Germain Philippe ( à suivre)
1 « Centenaire de la Revue Universelle fondée par Jacques Bainville en 1920 », Libre journal de Jacques Trémolet de Villers , émission du 28 mai 2020, Radio-Courtoisie, avec Jacques Trémolet de Villers, Hilaire de Crémiers, Christian Franchet d’Esperey.
2 Olivier Dard, « « Des maorassiens aux maoccidents : réflexions sur un label et sa pertinence en lisant un essai récent », in Bernard Lachaise, Gilles Richard et Jean Garrigues (dir), Les territoires du politique. Hommages à Sylvie Guillaume, Presses universitaires de Rennes, 2012, pp. 167-176.
3 Charles Maurras, Préface de 1909 à Enquête sur la Monarchie, Les éditions du porte-glaive, 1986, p.5.
4 Le texte de Maurras est paru en 1902 dans la Gazette de France avant d’être repris en 1905 dans L’Avenir de l’intelligence sous le titre Mademoiselle Monk.
Source : https://www.atlantico.fr/
Michel Onfray publie ces jours-ci le douzième volume de sa contre-histoire de la philosophie –La résistance au nihilisme- (Grasset) ainsi que le premier numéro (en ligne) de sa revue « Front populaire ». Double actualité du philosophe le plus populaire de France.
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Lire Michel Onfray ces derniers temps, l’écouter sur un plateau ou à la radio, c’est constater le même phénomène. Onfray est devenu bon. Très bon. Pourquoi ? Depuis sa -regrettable- lettre à Macron, et la mise en lumière d’erreurs et d’approximations dans certains textes concernant l’histoire des religions, le fondateur des « universités nomades» s’est repris. Michel Onfray est une éponge. Il lit, écoute, entend, ressent et corrige le tir. Très réceptif, celui qui fait aimer la philosophie un peu partout en France apprend de ses erreurs, s’il y en a : tant et si bien qu’en ce début d’été 2020, le « sachant » médiatique qu’il est devenu parvient à une sorte de perfection dans la consolidation de son image.
« Le gauchisme culturel fait la loi dans la plupart des médias traditionnels », précise l’auteur dans « La résistance au nihilisme », douzième volume de sa contre-histoire de la philosophie ( Grasset). Après cet hommage aux théories de l’essayiste et sociologue Jean-Paul Le Goff « Le gauchisme culturel et ses avatars » (cf. revue « Le Débat » 2013), Michel Onfray déroule sur 528 pages une somme considérable : Le panorama intellectuel de la France d’après 68. Un vade-mecum du « nihilisme contemporain comme symptôme de ce que les déshérités n’ont plus aucune consolation » précise l’éditeur. Une sorte de défilé des penseurs du demi-siècle, avec le déroulé des œuvres, théories et opinions, espoirs, contradictions, désillusions en mémoire d’une époque assez bouillonnante ; facile à lire - malgré son érudition-, « La résistance au nihilisme » regroupe, tels les onze précédents volumes de cette « Contre-histoire de la philosophie », les cours que le philosophe délivra à ses étudiants de tous âges lors de ses « universités populaires itinérantes ». Le volume 12 de cette «philosophie alternative » fait l’inventaire des vraies- ou fausses- valeurs du dernier demi-siècle, dans le vide des promesses non tenues de Mai 68. « Il s’agit de l’extraordinaire chantier de Michel Onfray :écrire une contre- histoire cheminant le long de la » philososophie officielle » indique la quatrième de couverture. Nous croisons Bernard- Henri Levy et les « Nouveaux philosophes », tels que vus par Gilles Deleuze (1925-1995) : « Ils ont introduit en France le marketing littéraire ou philosophique au lieu de faire une école (…) Il faut que la multitude d’articles de journaux, d’interviews, d’émissions de radio ou de télé remplacent le livre, qui pourrait très bien ne pas exister du tout. Au fil des pages, nous rencontrons Bourdieu (1930-2002) : « Pierre Bourdieu fait exploser les catégories qui voudraient qu’on soit de droite donc contre mai 68, ou de gauche, donc pour mai 68 ». Or il y eut des gens de droite pour Mai 68, Maurice Clavel par exemple, et des gens de gauche contre, ainsi Régis Debray » rappelle l’auteur.
Onfray renverse certaines statues à bon escient. « Pour le dire autrement, tous ceux qui ont trempé dans Vichy, Guitton, Valéry, ou Maurice Clavel, la collaboration, soit activement comme Rebatet, Chardonne ou Morand, soit passivement comme Beauvoir, Sartre, et Merleau-Ponty, ces derniers en ayant vécu normalement, sans rien faire contre l’occupant, en s’arrangeant même plutôt bien de sa présence (…) ». Beau chapitre consacré à Jankélévitch, et à l’antisémitisme tel que défini par « Yanké », qui exige de « pouvoir revendiquer sa judéité sans qu’autrui l’assigne à ce qu’il aura présenté comme étant sa définition. »
Comment ce «nihilisme » contemporain est-il advenu ? Outre le « gauchisme culturel » qui en est le principal artisan, s’est déchaîné l’antiracisme. « SOS Racisme a introduit le principe racial et le communautarisme ethnique qu’il affirme combattre. Cette façon de faire marque une rupture avec la tradition républicaine française : les Juifs, les « Beurs », les Maghrébins, les »Blacks » revendiquent des droits pour eux, ils mènent un combat politique en leur faveur et de ce fait, ils inaugurent la revendication identitaire qui fait fi de l’appartenance commune à la collectivité. (…) La République a vécu. » ,dit Michel Onfray à ce propos.
L’auteur règle ses comptes à l’écologie punitive. » Leur critique de la raison, du cartésianisme, de la science, du progrès, des Lumières est partielle et partiale. (…)» Contrairement à ce que font croire au peuple les clichés du gauchisme culturel ,Michel Onfray note la présence d’hommes de droite dans les rangs de la Résistance, dont le premier d’entre eux, le Général de Gaulle « sans cesse récusé par la gauche pour n’être pas des siens a été l’homme qui a initié la Résistance en France « mais les légendes ont toujours été préférées aux vérités qui gênent », conclut Onfray sur ce chapitre.`
« Dans l’histoire de la philosophie, il existe une domination idéaliste, notamment platonicienne. Or, on peut proposer une contre-histoire de la philosophie qui se soucie d’un autre lignage : matérialiste, hédoniste, nominaliste, athée, sensualiste,etc. », dit encore Onfray pour définir le concept de ses recherches. D’abord repris par France-Culture, ses cours sont commercialisés « sous forme de coffrets comprenant chacun 11 à 13 disques compacts audio », édités par Frémeaux & Associés ». On les trouve aussi sur le site de Michel Onfray. Le discours se propage.
Et voici que le philosophe alternatif devient éditeur de presse, alors que paraît sa revue « Front populaire » (titre qui a les défauts de ses qualités, mais pourquoi pas ?) (« Déjà imprimée, la revue papier trimestrielle sera disponible le 23 juin en kiosques et le 25 en librairies. Mais d'ores et déjà, cette publication de 166 pages qui entend "mener le combat des idées pour retrouver notre souveraineté" a gagné le pari financier de son lancement. (cf. Challenge/juin 2020.)»Soyez résolus à ne plus servir et vous voilà libres ! » : tel est la profession de foi de « Front Populaire » ( cf.Discours de la servitude volontaire/1548/. La Boétie) « Le Discours sur la servitude volontaire » n’est rien d’autre qu’un manuel d’insurrection – mais quel manuel! », précise Onfray, dans son édito. « Résister à la petite musique crétinisante du pouvoir »… Et de tous les pouvoirs, au fond : la formule pourrait définir non seulement la revue, mais le projet de la galaxie Onfray 2020. Le fondateur et l’ animateur treize années durant de la « l’université populaire » de Caen est aujourd’hui le dirigeant d’une entreprise « made in Onfray ». Entreprise pensée au millimètre près, depuis le site : contact@michelonfray.com, avec comme logo les lunettes rectangulaires du philosophe. Lui qui n’a pas de passion pour les journalistes- et c’est un euphémisme- en est devenu un. Editeur de presse, à lui et à Stéphane Simon -son associé- (ex associé de Thierry Ardisson), les joies du « business plan », du retour sur investissement ,du stress et du surmenage propres aux lancements de presse. Les contributeurs de « Front Populaire « sont des « souverainistes de droite ou de gauche » issus de la société civile.
Les cours de « contre-philosophie » sont dans l’air du du temps. Une fureur sourde gagne le pays. Tout le monde est « contre » tout. Les amphithéâtres des universités populaires sont bondés. Michel Onfray a compris. Le public n’en peut plus des discours idéologiques préfabriqués. Onfray est donc devenu imprévisible. Plus libre. Et c’est ce que son public attend. Cette liberté de ton, cette proximité qui force le respect car il n’y a jamais de préétabli des mots, de théorie guidant le téléspectateur dans la « bonne » direction.
Jadis impressionnée par « La stricte observance » (Gallimard/Folio), petit texte (128 pages) limpide, d'une grande importance, peu remarqué, dans lequel Onfray s'interrogeait sur la mort (celle de la femme aimée, suivie du décès de son père, ouvrier agricole en Normandie), j’en avais rendu compte ici. L’auteur posait des questions à la foi chrétienne, qu’il respecte. L’homme qui advenait était vrai. Croyants ou pas, nous partagions sa peur. Sa douleur. "Humain, trop humain" : Michel Onfray nous ressemblait. "On ne fait jamais son deuil, disait-il, "c'est le deuil qui nous fait”. Bras tendus dans le noir,Onfray cherchait la lumière. Cela arrive à des gens très bien.Le deuil, la solitude, la peur.Pas très gai, mais universel. Ce récit romanesque, inspiré de « Vie de Rancé », dernière et magnifique oeuvre de Chateaubriand, disait presque tout de Michel Onfray. « Heureuse solitude, Seule béatitude, que votre charme est doux, De tous les biens du monde, en ma grotte profonde, Je ne veux plus que vous ». (François-René de Chateaubriand, Vie de Rancé/1844)
Avec « La résistance au nihilisme » et « Front populaire »Michel Onfray s’impose. Au point que le philosophe, de plus en plus « populaire », pourrait (dit-on) « songer à un destin politique ». Problème. Il y a deux Onfray. Le tribun, qui a l’art et la manière de développer la planète Onfray, et l’auteur de « La stricte Observance ». Pudique, sauvage. Une sorte d’ennemi intérieur du premier, résistant à la résistance. Entre l’homme des vidéos, des sites, des abonnements et de l’édition, et l’écrivain secret qu’est Onfray, - qui va l’emporter ? L’artiste fasciné par le « Cosmos », ou le dompteur des foules assoiffées de considération ? Le romancier de « La Stricte Observance » ou le bateleur du tarot ? A suivre.
« La résistance au nihilisme »/contre- histoire de la philosophie 12 (Grasset)/29 euros/ 528 pages
« Front populaire »/ Revue trimestrielle mise en ligne le 18 juin/ publiée en kiosque et dans les librairies le 23 juin/166 pages/ 14,90€.
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Notre note du samedi 12 avril (Bernard Maris sur France Inter : "La zone euro est en train de créer une guerre économique qui est en train de détruite l'Europe") a suscité un long et intéressant débat de 17 commentaires substantiels que nous trouvons utile de vous faire connaître.
Le débat pour le débat, ce n'est pas notre affaire, bien-sûr. En revanche, les débats ont un évident intérêt lorsqu'ils servent à s'approcher de positions justes, lorsqu'ils sont utiles à la clarification de notre ligne politique. C'est à dire, au fond, utiles à rechercher quel est, en chaque matière, (ici, en matière de politique européenne) l'intérêt de la France. C'est, en effet, cela notre souci.
Lafautearousseau
Participants à ce débat qui a duré près de deux semaines : Patrick Haizet; Catoneo; de Wargny; LUC; Thulé; Anatole et Marcel. Qu'ils en soient remerciés.
Désolé, je ne suis pas du tout convaincu par l'argumentaire de M.Maris.
Le principal problème de la France, c'est son régime politique, lequel, s'il était bon, saurait nous protéger des supposés méfaits de l'Euro, par une politique appropriée. Pourquoi s'empresser d'oublier la judicieuse remarque du baron Louis à Louis XVIII - qui reste valable - et s'adonner aux fâcheuses habitudes et délices ratés des 3 dernières républiques qui ont passé leur temps à pratiquer des dévaluations compétitives ? (Mitterrand et Delors ont même dévalué 3 fois de suite au printemps 1981).
Car il ne faut pas se leurrer, une sortie de la France de l'€ impliquerait immédiatement une défiance (économique et politique) de tous les marchés vis-à-vis de notre pays et un renchérissement du coût de la dette française, plus une série imprévisible de dévaluations du FF, même rattaché à l'€ par un faux serpent monétaire. Cela pourrait également provoquer une crise de toute la zone euro, et un réajustement international de toutes les monnaies, y compris du $ qui serait tiré vers le bas (sans que la France ait son mot à dire).
Sortir de l'€ est plus facile à dire qu'à faire !
Ce n'est sûrement pas aujourd'hui une priorité. Il y a mieux à faire politiquement.
Et notre gouvernement socialiste a déjà suffisamment fait d'erreurs comme cela, pour en ajouter une autre aux effets parfaitement incontrôlables.
C'est une matière ou l'idéologie est hors de propos, car la France n'est pas seule au monde Elle est même un opérateur relativement secondaire sur le plan monétaire.
Patrick Haizet | samedi, 12 avril 2014
L'euro est toxique pour les pays malades, peuplés de gens apeurés. Je rejoins le commentaire de M. Haizet en confirmant que la France n'est pas du tout un opérateur monétaire, sa devise fut toujours cotée par opposition, car il n'y a que 5 devises internationales et ce depuis très longtemps : dollar, sterling, euromark, franc suisse et yen.
Ce pays doit être réformé de fond en comble. C'est bien ce qu'ont ressenti des peuples latins dans la panade qui crient de douleur mais qui aucun n'exigent que leur pays sorte de l'euro. Bizarre ! Grèce, Irlande, Portugal, Espagne, Italie remontent la pente en sueur, mais remontent.
Ceux que nous toisons volontiers seraient-ils plus intelligents que les Français ? Pas difficile, à voir le succès nulle part ailleurs des programmes économiques du Font de gauche et du Front national.
Catoneo | samedi, 12 avril 2014
M. Maris est un prédicateur bien connu de la gauche. Son expertise est celle de gribouille, qui pour se protéger de la pluie, se place sous une gouttière. En somme, une autre version de l'arroseur arrosé. Les recettes idéologiques pour des problèmes liés à la mauvaise gouvernance, de gauche ou de droite, ont toujours abouti aux assignats de la révolution et à la banqueroute. Le baron Louis, l'excellent ministre de l'économie et des finances de Louis XVIII, avait bien raison de dire qu'il fallait au pays une bonne politique pour avoir une bonne économie. C'est ce que font les Allemands ou les Néerlandais. Mais, hélas, notre pays a la fâcheuse habitude de choisir les solutions de facilité ou pire la lâcheté. Le terme de "rigueur" dont se gargarisent si volontiers nos gouvernants et l'élite bureaucratique n'est qu'une vaste fumisterie ou une rodomontade de boulevard. Pour le reste, je partage les points de vue de M.Haizet et de Catoneo.
de Wargny | samedi, 12 avril 2014
Je regrette, pour ma part, que Patrick Haizet, grand connaisseur de l'univers économique et financier mondial, comme Catoneo, dont je lis les notes avec grand intérêt, ne répondent directement à aucun des arguments avancés par Bernard Maris et, même, dans une certaine mesure, par Dominique Seux.
Est-ce qu'une certaine défense a priori de l'euro ne serait pas en elle-même aussi une idéologie ? Voire un dogme, une religion ? Une simple peur ? Bref, comme réflexes classiques de la Droite libérale ?
Si l'euro est toxique pour les pays malades, l'on pourrait légitimement en conclure qu'il l'est donc pour nous tant que nous n'aurons pas recouvré la santé ... Même remarque s'agissant de notre régime politique malfaisant. Si l'on peut dire, il règne. Nul Louis XVIII, ni baron Louis à l'horizon. Et si nous étions l'Allemagne, l'euro nous irait assez bien ! Mais nous ne le sommes pas. Et même : est-il si sûr qu'un jour ou l'autre, l'Allemagne, à force de garantir ou de payer pour les autres, ne finira pas par considérer que, tous comptes faits, la défense de l'euro lui coûte, en définitive, plus cher qu'il ne lui rapporte ? Les Allemands sont meilleurs que nous pour ce genre de calculs ... Il n’est pas sûr du tout que la première à « sortir de l’euro » soit la France !
Je n'ai, sans-doute, ni les compétences économiques et surtout financières de Patrick Haizet, ni celles de Catoneo. Mais, au moins en partie, du bon sens peut y suppléer.
Je comprends que l'on ait à se méfier de l'aventurisme politique et économique comme de l'amateurisme des socialistes actuellement au pouvoir.
Mais j'ai lu, hier, dans le Figaro, une argumentation serrée – quoiqu’à mon sens, trop hostile à l’Allemagne - de Philippe Villin banquier d'affaires et ancien directeur général du Figaro, qui, lui aussi, prône une sortie organisée de l'euro. Il n'est ni socialiste, ni homme de gauche.
Que dire des analyses - qui me paraissent intelligentes et sérieuses - d'Hervé Juvin, qui, lui non plus, n'est ni socialiste ni homme de gauche, et va dans le même sens ? Ou, dans un autre univers, d’Eric Zemmour, analyste perspicace ?
Patrick Haizet nous dira-t-il que ce sont des idéologues ; qu’ils n’y entendent rien ? Ne leur faisons pas crédit a priori, mais ne rejetons pas leurs positions d’un simple revers de main.
Les arguments en faveur d'une sortie de l'euro n'émanent plus seulement des politiques et de leurs discours. Ils gagnent, sont partagés, par de nombreux esprits avisés, droite et gauche confondues.
J'ai l'impression qu'il ne suffit plus aux défenseurs de l’euro de leur opposer quelques idées générales souvent caricaturales ou simplement polémiques et, finalement, assez rebattues. Il faudrait être pointus, répondre point par point !
C'est rarement le cas.
LUC | dimanche, 13 avril 2014
L’instauration de l’euro aurait été une chose excellente à condition de respecter deux conditions : que le niveau de la monnaie unique ne soit pas indexé sur l’ancien mark, et que sa mise en place s’accompagne d’un système de protection commerciale aux frontières. Or, aucune de ces conditions n’a été remplie. Au lieu d’assurer une protection communautaire, c’est la carte du libre-échangisme intégral que l’on a décidé de jouer. On a assisté au démantèlement du tarif extérieur commun qui, jusque là, protégeait en partie l’Europe de la concurrence. La surévaluation chronique de l’euro a ensuite accentué les déséquilibres. En même temps, on a artificiellement plaqué une monnaie unique sur des économies divergentes à tous égards.
Le grand argument que l’on oppose en général à une éventuelle sortie de l’euro serait que les pays qui s’y risqueraient verraient instantanément leur dette augmenter, puisque celle-ci resterait libellée en euros. On peut répondre qu’en contrepartie ces pays pourraient adopter des mesures susceptibles de favoriser la hausse de la demande intérieure et le rétablissement de leur compétitivité, ce qui leur permettrait au contraire de mieux faire face à leur endettement. Un retour aux monnaies nationales associé à une forte dévaluation – comparable à ce qui s’est passé dans les pays de l’Est lorsque ceux-ci ont abandonné le rouble après l’effondrement du système soviétique – abaisserait le coût des produits pour les acheteurs étrangers, et stimulerait d’autant les exportations, ce qui donnerait de meilleurs moyens de régler la dette. On a aussi fait observer que toute dévaluation consécutive à un retour aux monnaies nationales se traduirait fatalement par un renchérissement des produits importés hors de la zone euro. Mais ce dernier est en réalité assez faible : pour la France, les importations de biens et de services hors de la zone euro ne représentent que 13 % du PIB.
Sortir de l’euro ne suffirait toutefois pas à s’affranchir de la dictature des banques et des marchés. Le retour aux monnaies nationales n’est en effet pas une panacée. Il ne réglerait aucun des problèmes structurels des sociétés actuelles, et ne constituerait en aucune façon une rupture avec la logique du Capital. Selon Jacques Sapir, "Recouvrer notre souveraineté monétaire n’aurait pas de sens si cela ne devait pas s’accompagner d’un changement radical de notre politique".
Thulé | samedi, 12 avril 2014
Le problème de fond est que la science économique n'est pas prédictive, et si elle reste un bon outil d'analyse historique, elle ne donne aucune assurance de bonne application de la théorie universitaire.
Chaque fois que la "science" est prise en défaut, les économistes distingués signalent que la mise en application n'était pas chimiquement pure ; voulant oublier qu'aucune société humaine n'est chimiquement pure.
Je crois que Sapir intègre de plus en plus les scories d'impureté dans son raisonnement depuis qu'il est bien moins catégorique dans les solutions à retenir d'urgence avant la mort du malade annoncée chaque année pour la Noël.
Reste la question de la fracture de l'Eurogroupe à l'initiative de l'Allemagne et de ses "alliés". Berlin fera tout pour l'éviter car le taux de change actuel est au maximum commercial compatible. Un euromark prendrait mécaniquement 15% sur le dollar. Par la dévaluation symétrique des monnaies de ses "clients douteux" le gap serait porté à 30%. C'est insoutenable.
Mais si d'aventure, Paris tombait aux mains d'aventuriers et recréait le franc, il n'en deviendrait pas pour autant une monnaie d'échange à l'international. Peu de fournisseurs étrangers accepteraient de facturer en franc, surtout s'il y a du délai de fabrication.
Rappelons-nous que jusqu'aux derniers jours du franc, les acteurs maritimes français de l'arc atlantique cotaient leur fret en Deutsch Marks au départ des ports français (Manche et Gascogne) à destination de tous les ports d'Afrique atlantique.
Certes le franc français ressuscité circulera de force, mais à l'intérieur de l'hexagone et sur les bulletins de paie, sans que l'on ne sache jamais, passé vendredi midi, sa parité future du lundi matin. Les échanges économiques, même intérieurs, se feront en partie en monnaie sérieuse parce que les intrants étrangers dans les produits distribués resteront importants et en détermineront leur valeur. Le grossiste lambda sait en quelle monnaie d'origine il achète ses stocks quelle que soit la monnaie libellée dans la facture.
Pas besoin d'aller à l'université écouter Bernard Maris pour comprendre cela, il suffit d'avoir un peu travaillé dans le secteur du commerce extérieur pour savoir que le franc est une piastre à usage domestique.
Il serait possible de conserver le seul avantage incontestable de l’euro – constituer à terme une monnaie de réserve – en transformant la monnaie unique actuelle en une monnaie commune au niveau déterminé à partir de l’euro et des monnaies nationales restaurées.
La monnaie commune établit une barrière face au reste du monde, mais n’interdit pas l’ajustement des parités de change entre les pays membres.