Charlie Hebdo : la Une de la honte


D’ailleurs, détail vestimentaire de première importance, il porte des sandales, pas des babouches. En outre, pour ajouter à la complexité du personnage, au-dessus de sa tête, il y a quelque chose qui fait penser à un triangle maçonnique.
C’est intéressant. C’est riche. Et ça ouvre de nouveaux horizons à une pensée dont les rédacteurs de Charlie Hebdo ne veulent pas qu’elle se résume à montrer du doigt les djihadistes.
Car ça, c’est d’un commun. C’est convenu, banal. Et un journal se doit de surprendre. La une de Charlie Hebdo est à cet égard d’une réussite exemplaire. Vous auriez dépensé 3 euros, vous, pour voir la tête des frères Kouachi ? Vous auriez mis la main à la poche pour regarder une caricature de djihadiste alors qu’on nous en abreuve tous les jours ? Bien sûr que non. Tandis que là, vous en avez pour votre argent.
Un Dieu gréco-judéo-chrétien : c’est lui l’assassin de janvier ! Si vous voyez quelqu’un qui lui ressemble, signalez-le à Cazeneuve, à Hollande, à Valls, au premier flic venu. Et arrêtez immédiatement de vous polariser sur les djellabas, les burqas et de scruter à la jumelle les cités de Roubaix, de Saint-Denis, de Stains, de Trappes. Le portrait-robot de Charlie Hebdo nous incite à voir plus haut, plus loin. Du côté de l’Olympe. Vers le mont des Oliviers. Et – pourquoi pas – à Saint-Pierre de Rome…
Entendons-nous bien. Il n’est pas question – et il ne peut en être question – de reprocher à Charlie Hebdo de ne pas nous avoir resservi un peu de Mahomet. Qui sommes-nous – et qui serions-nous – pour demander à d’autres d’aller se faire trouer la peau à notre place ? Mais pour autant, qui obligeait Charlie Hebdo à faire cette une, un sommet de la bien-pensance sirupeuse ? Oyez, oyez, braves gens ! Voici ce que nous annonce Charlie Hebdo. Toutes les religions se valent. Toutes les religions sont meurtrières. Un seul coupable : Dieu. Ne vous fiez pas aux apparences qui tendent ces derniers temps à accuser une religion d’être un peu plus agitée que les autres. Les rédacteurs de l’hebdomadaire (qui fut satirique) regardent pour nous le monde à l’échelle de l’Histoire et même de la Préhistoire. En janvier 2015, j’ai, comme beaucoup, souscrit un abonnement de soutien d’un an à Charlie Hebdo. Au vu de cette une, je viens à l’instant même d’y mettre fin. •
Benoît Rayski - Atlantico