Les Français ne croient pas aux prévisions du gouvernement ... Lui, non plus, d'ailleurs !

Source Valeurs actuelles
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Source Valeurs actuelles
Crèche de la Mairie de Béziers [2014]
Cher monsieur le tribunal,
J'ai pris connaissance il y a quelques jours de votre décision d'interdire la crèche de Noël traditionnellement installée dans le hall du Conseil Général de la Vendée.
Quelle mouche vous a donc piqué ?
Vous avez fait des études je suppose. Peut-être savez vous donc que Noël vient du latin Natalis qui veut dire Naissance. Alors je vais vous livrer un secret que vous voudrez bien transmettre à vos confrères qui peut-être nagent avec complaisance dans la même ignorance que vous. La naissance dont il est question est celle d'un certain Jésus de Nazareth né il y a un peu plus de 2000 ans. je dis ça parce qu'étant donné que vous n'avez pas interdit les illuminations de Noël, je suppose que vous ignoriez ce détail. Voyez-vous, Noel n'est pas l'anniversaire de la naissance du Père Noel (je suis désolé si je casse ici une croyance ancrée en vous) mais bien celle de ce Jésus. Interdire une crèche sans interdire toute manifestation publique de cette fête est aussi stupide que si vous autorisiez la fête de l'andouillette tout en interdisant la consommation d'andouillette le jour de la fête de l'andouillette.
La crèche c'est ce qu'on appelle une tradition. Et ne me faites pas croire, Monsieur le Tribunal, que le principe de la tradition vous est étranger. Sinon, comment expliquer que les magistrats exercent leur métier dans un costume aussi ridicule si ce n'est parce qu'il est le fruit d'une tradition ?
Vous êtes un briseur de rêves Monsieur, vous êtes un étouffeur de sens. La crèche c'est Noël et Noël c'est la crèche. La crèche c'est aussi l'histoire d'une famille qui faute de droit opposable au logement est venue se réfugier dans une étable. C'est un signe d'espoir pour tous les sans logement. La crèche c'est aussi un roi arabe et un autre africain qui viennent visiter un Juif. C'est un signe d'espérance et de paix en ces temps de choc de civilisations et de conflit au Moyen Orient. La crèche c'est aussi des éleveurs criant de joie et chantant dans une nuit de décembre. Connaissez vous beaucoup d'agriculteurs qui rigolent en cette période de crise ? La crèche c'est un bœuf, symbole de la condition laborieuse de l'homme. Enfin, la crèche, c'est un âne, même si une rumeur court disant que cet âne a quitté la crèche en 2013 pour rejoindre le Tribunal administratif de Nantes et ne semble pas en être revenu.
Malgré le fait que vous allez sans doute, par souci de cohérence, vous rendre à votre travail le 25 décembre,
Je vous prie de croire, Monsieur le Tribunal, à l'expression de mes souhaits de bon et joyeux Noël.
Jean Pierre Santon •
[Merci à Jean-Louis Faure]
Les crèches ne seraient pas à leur place dans les mairies; le sapin suffit largement. Laïcité oblige. Mais ...
Pas de crêches donc, à Noël, mais, avec Najat Vallaud Belkacem, on fête le nouvel an berbère en mairie. Et pour ce faire, on ouvre l'hôtel de ville de Paris et la mairie de Lyon. En soi, la chose pourrait être compréhensible, voire acceptable, s'il n'était pas fait preuve envers les traditions ancestrales de notre pays, notamment celles liées à la religion catholique, d'ostracisme actif et d'un sectarisme particulièrement agressif et exclusif ...
la vidéo dure 1 mn, tout est dit à 0 mn 40... Et c'est assez étonnant. LFAR •
La COP 21 s’est achevée samedi sur un succès si l’on en juge par les images de liesse collective et les commentaires journalistiques, tous centrés sur la joie d’en avoir fini et pas du tout sur le texte. Devant les récriminations de quelques esprits chagrins – du genre jamais contents – le ministre des affaires étrangères, président de la conférence, a donné quelques assurances et a notamment répété, comme il l’avait fait quelques semaines auparavant, que l’accord était « juridiquement contraignant ». Ces mots ont un sens précis et clair pour le commun des mortels, pas seulement pour le commun des juristes : la contrainte consiste à forcer quelqu’un à agir contre sa volonté, la contrainte suppose des sanctions en cas de violation de la norme. M. Cornu, dans son inoxydable Vocabulaire Juridique (Quadrige / PUF) en propose plusieurs déclinaisons dont celle-ci : « L’ensemble des voies et moyens de droit offerts et garantis par l’État en vue de l’exécution (au besoin forcée) des obligations et du respect des droits. » Les contribuables, par exemple, savent ce que « juridiquement contraignant » veut dire.
Or l’Accord de Paris, contrairement au Protocole de Kyoto, ne comporte pas de sanctions. On pourrait ne pas s’arrêter à ce détail, ce que font d’ailleurs des juristes émérites, pour soutenir que l’accord « met une telle pression » sur les États parties à la conférence qu’il y aurait là comme une sorte d’équivalence à la contrainte juridique. Peut-être, et on reconnait que « comportant une équivalence à la contrainte juridique » n’est pas une expression très marketing ce qui pourrait expliquer le raccourci saisissant de « juridiquement contraignant ». La pression existe, c’est indéniable, mais elle résulte davantage de la dynamique collective des conférenciers que de l’accord lui-même. Là encore, inutile d’être expert en droit pour distinguer le présent ou le futur (contraignants) du conditionnel (non contraignant). Or, dans le texte final en version anglaise, les « should » ont remplacé les « shall » dans les passages les plus sensibles, notamment la première phrase de l’article 4.4. Nous sommes en mesure, pour nos lecteurs, de dévoiler l’évolution des corrections successives de ce texte récupérées dans les corbeilles recyclables de la conférence :
Developed country Parties shall should shall should shall should continue taking the lead by undertaking economy-wide absolute emission reduction targets.
Juridiquement alternant, accommodant, boitillant, captivant, consolant, emballant… Les participes présents ne manquaient pas pour la conférence de presse. Mais contraignant… •
Journaliste, essayiste, conférencière, spécialiste du Proche-Orient, de l'Islam et des chrétiens d'Orient.
Docteur d'Etat en sciences politiques. Thèse sur "Le Liban et son voisinage" (Université Paris II).
A participé comme experte au Synode spécial des Evêques pour le Moyen-Orient, convoqué par Benoît XVI en 2010.
Ouvrages
Guerres secrètes au Liban (1987) - Vivre avec l'Islam ? - Saint-Paul (1996) - L'Europe malade de la Turquie (2005) - Les chrétiens d'Orient vont-ils disparaître ? (2005) - L'islam peut-il rendre l'homme heureux ? (2012)
© Copyright : DR
par Péroncel-Hugoz
L’économie chinoise vient d’entrer en crise. Pas étonnant, estime Peroncel-Hugoz, qui a testé personnellement ce qu’il nomme « la qualité inférieure » des produits Made in China, vendus notamment au Maroc, où il réside habituellement. Ajoutons seulement que y en a marre de la camelote chinoise en France aussi !
Ah! Certes les produits importés de Chine et sous lesquels croulent littéralement les kissarias* et souks marocains, ne sont pas chers mais ce « bon marché » est fallacieux car, à la longue, on débourse beaucoup pour compenser les défectuosités des articles achetés.
Et encore je m’en tiendrai à mon expérience personnelle et à celle de mon entourage, depuis deux ou trois ans. Des exemples de mes déceptions, j’en ai à revendre. Citons en vrac, sans hiérarchie, quelques uns de ces tests décevants :
• Les ciseaux à papier qui déchirent au lieu de couper
• Les clés cassantes
• Les jouets coupants
• Les aiguilles à coudre dont le chas est bouché
• Les parapluies qui se tordent ou se retournent au premier petit coup de vent
• Les sécateurs, pinces et pioches qui se déglinguent aux premières utilisations et sont « inremontables » même par le plus habile artisan local
• Les agrafeuses qui se détraquent très vite quand elles ne vous agrafent pas un doigt (bon là, j’exagère un tantinet, mais vraiment à peine …)
• Le papier collant et la colle qui ne … collent pas
• Les sous-vêtements (en pur coton, il est vrai, mais il n’a pas la tenue de celui d’Egypte) dont les élastiques se distendent après deux ou trois lavages.
• Les vélos dont les pneus crèvent à la première sortie (cela s’est passé en France, laquelle, pauvre naïve, s’est, elle aussi, laissée envahir sans méfiance par les importations chinoises) et s’avèrent, comme les sécateurs, irréparables. Eh bien sûr, aucun de ces produits n’est garanti ! Pas bête la Chine …
• Les clous qui se cassent ou les punaises qui se plient et nous blessent (là, je n’exagère pas, ça m’est positivement arrivé au Maroc et en France)
• Et pire que tout, les alarmes d’auto, hypersensibles et qui se mettent à hurler à répétition en pleine nuit suite au passage d’un chat sous le véhicule ou bien, m’a affirmé un mécanicien de Casablanca, suite aux simples évolutions d’une seule mouche ou d’une guêpe restées enfermées dans la voiture …
• Enfin l’inimaginable, l’intolérable : des babouches jaunes citron, théoriquement spécificité marocaine et qu’un ministre du gouvernement Benkirane a eu la très désagréable surprise de trouver dans le souk de Marrakech: en simili cuir et, bien sûr, collées au lieu d’être cousues. Et en plus tamponnées made in China ! Sans vergogne. Halte là ! Pour leur propre réputation, industrie et artisanat du royaume, ont tout intérêt à faire pression sur les autorités publiques afin qu’un contrôle technique rigoureux soit imposé aux articles exportés de Chine vers le Maroc.
Précision : non, je ne suis pas le moins du monde sinophobe ! En reportage en Chine, naguère, j’y fus au contraire séduit d’emblée par la conscience professionnelle des artisans du cru, par la finition de leurs objets, par leur amour du travail. Notamment dans le domaine des tissages. Mais ces produits de qualité ne sont apparemment pas exportés. Jadis, ce fut pareil au Japon; bons articles au pays, qualité inférieure à l’export. Nul doute que les Chinois sont capables de suivre la voie nipponne de la qualité. En attendant, faites gaffe à vos achats ! •
* Survivance, dans le parler arabe marocain du XXIe siècle du « Césareum », le forum ou place centrale des cités berbéro-romaines du futur Maroc.
Repris du journal en ligne marocain le 360 du 04.12.2015
En 2012, on allait voir ce qu’on allait voir. François Hollande, devenu chef de l’Etat, reprenait les rênes du pays et l’espoir renaissait à gauche. Le président de la République élu autant par inadvertance que par rejet de l’ancien hôte de l’Elysée allait appliquer son programme, ses 60 engagements et son exemplarité, grâce à un « gouvernement de combat », à des parlementaires dévoués., etc. Oui on allait voir ce qu’on allait voir ! Mais entre l’intention et sa concrétisation, il existe un monde. Et ceux qu’on croyait être de gauche montrent finalement un tout autre visage : celui d’une droite complexée, empêtrés qu’ils sont dans leurs contradictions, ne trouvant pas le bon ton, reniant leurs idées, leurs amis, trahissant leurs promesses, et, in fine, dégoûtant le peuple de gauche et cristallisant un plus encore les rancœurs des électeurs de droite. C’est ce fil rouge que tire à l’envi le dessinateur Aurel, de son vrai nom Aurélien Froment. S’appuyant sur l’actualité et les grands thèmes développés depuis trois sans (travail le dimanche, lutte contre le chômage, la crise grecque…), le dessinateur s’enivre du vitriol qu’il lance dans chacun des dessins qu’il a publiés dans Le Monde, Le Canard enchaîné ou Politis. Avec hardiesse (Oui vraiment Aurel est hardi ! ), il décrit le monde politique tel qu’il est. Ni antigauchiste ni antidroitiste primaire, Aurel est avant tout un bon analyste, un peu anarchiste et iconoclaste. Il rejoint en ce sens Coluche qui disait : « La droite vend des promesses et ne les tient pas, la gauche vend de l’espoir et le brise ». Et cette compilation de dessins en est le remarquable exemple. •
La droite complexée – Aurel – Editions Glénat – 160 pages – 15 euros.
La République Charlie, place du même nom
Par Jacques Burnel
Sous ses deux formes, adjectivale et nominale, le mot « République » a littéralement envahi le discours des médias, des pouvoirs publics et du personnel politique. Or, explique Frédéric Rouvillois dans un livre jubilatoire (Être ou ne pas être républicain, Le Cerf, 237 p., 14 euros), si les républicains sont partout, la République est nulle part...
« Le terrorisme ne détruira pas la République ; c'est la République qui le détruira » ; « La riposte de la République sera totale » ; « Les associations qui s'en prennent aux valeurs de la République seront dissoutes »... Du président François Hollande au Premier ministre, Manuel Valls, en passant par le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, les propos martiaux de nos dirigeants politiques, réagissant à la tuerie de masse du 13 novembre, ont été salués unanimement. Tout juste quelques rares observateurs ont-ils pu faire remarquer qu'ainsi placés sous les auspices de la République, ils avaient l'immense avantage d'exonérer ceux qui les prononcent de toute forme de responsabilité dans ces tragiques évènements. Événements dont la nation en deuil pourrait légitimement tenir rigueur à ses représentants...
Au début de l'année 2015, en d'autres circonstances dramatiques, les Français l'avaient appris à leurs dépens : certains clichés mobilisant mécaniquement la pensée (le « pas d'amalgame » avait alors fait florès) peuvent être utilisés comme des armes dialectiques qui paralysent la pensée. Il suffit d'entendre les mots magiques pour que chacun s'incline et passe son chemin. Circulez, il n'y a rien à voir ! Et dans cet arsenal d'expressions toutes faites et de mots qui enivrent, le terme « républicain » n'a pas d'équivalent. Exemple : pourquoi s'est-on cru obligé de parler de mobilisation « républicaine » au lendemain de l'attaque contre Charlie Hebdo et pas de manifestation « royale » ou « monarchique » en 2004 après les attentats de la gare de Madrid ? C'est cet « usage invraisemblable et littéralement diluvien du terme « républicain » » qui a poussé le professeur de droit public et historien des mentalités, Frédéric Rouvillois, à s'interroger sur la signification de ce mot pour le moins redondant dans la parole publique. Suffrage universel, pluralisme, éducation, universalisme, laïcité : dans un livre au titre réjouissant - Être (ou ne pas être) républicain -, il passe en revue les critères habituellement admis du « républicanisme ». Et le moins que l'on puisse dire, c'est que le piédestal sur lequel on a placé la République vole en éclats. Reste un concept creux, usé jusqu'à la corde, mais qui ôte immanquablement toute substance au débat politique contemporain. La pantalonnade de cour d'école autour de la nouvelle dénomination de l'ex-UMP l'atteste : chacun accuse l'autre de s'approprier un terme censé appartenir à tous.
UN MOT QUI RENVOIE À TOUT ET SON CONTRAIRE
Pourquoi alors, répété comme un mantra, demeure-t-il aussi envahissant ? La « forme républicaine du gouvernement », comme il est dit dans la Constitution de 1958 sans que l'on sache de quoi il retourne exactement, est-elle menacée ? Mais même s'il continue à vivre intellectuellement, notamment dans les pages de ce magazine, le royalisme est politiquement mort depuis longtemps. Du Parti communiste au Front national, des souverainistes de droite aux fédéralistes de gauche, des plus libéraux aux plus étatistes, les républicains revendiqués sont partout. D'ailleurs, fait justement remarquer Rouvillois, le mot « République », res publica, la chose publique, synonyme le plus souvent d'État ou de communauté de citoyens, se retrouve dans les écrits officiels de la monarchie, mais aussi dans le langage courant de l'Ancien Régime. Monarchie et République ne s'oppose donc pas nécessairement, pas plus d'ailleurs que République et dictature, la première s'accommodant volontiers de la seconde. En témoignent de nombreux épisodes de notre histoire, du Comité de salut public au « Gouvernement de défense républicaine » de Waldek Rousseau en 1899. Songeant à la République romaine et à ses dictateurs, Mussolini ne disait-il pas que le fascisme est essentiellement républicain ? « Faute de définition claire, note notre auteur, on est obligé de reconnaître que tout le monde a le droit de se qualifier de républicain, dès lors que le mot de « République », auquel renvoie ce qualificatif, a lui-même recouvert à peu près toutes les hypothèses imaginables. »
UNE RELIGION DE SUBSTITUTION
Contrairement à ce que la répétition compulsive du mot voudrait laisser croire, il n'existe donc aucune définition de la République. Ni comme régime politique, ni comme doctrine ou comme philosophie hormis quelques vagues références à la devise abstraite de la Révolution française et à « l'esprit » des Lumières. Bref, « la République », comme essence, est une vue de l'esprit. Rouvillois dit : une légende. De fait, dans sa version française, qui est spécifique, cette légende s'est construite sous la Ille République et au moment de l'affaire Dreyfus quand elle s'est en quelque sorte figée en une « construction mythologique » et même en une « religion de substitution ». Une tentation que le régime républicain a eue dès son origine : en 1793, les Hébertistes ont institué le culte républicain de la Raison et Robespierre celui de l'Être suprême ; Michelet parlait d'ailleurs des Jacobins, le parti républicain par excellence, comme du « parti-prêtre ».... Mais c'est sous la Ille République que l'éducation fut conçue comme un conditionnement des esprits, un dogmatisme destiné à républicaniser le pays... et à lui faire oublier qu'il y avait eu une France avant 1789. La République, conclut Rouvillois, est un mot vide et sacré. Vide, parce qu'il renvoie à tout et son contraire. Sacré, car il exclut tout ce qui n'est pas lui : cela risquerait de « brouiller le récit légendaire, de le rendre incohérent, d'affaiblir son rôle mobilisateur »...
Ainsi « la République », cette ancienne notion désignant le bien commun qui fut utilisé dans les ordonnances d'Henri IV et de François Ier, est-elle devenue, par glissements successifs, la religion républicaine d'un petit clergé qui sermonne, catéchise et excommunie au nom de « valeurs » à la fois absolues et contradictoires. En ce sens, elle est anti-démocratique puisqu'elle s'apparente à une prébende et justifie toutes les prévarications. Est-ce un hasard si ce qu'il est convenu d'appeler les « élites » - médias, pouvoirs publics, personnel politique -, ne disent presque jamais « la France » mais presque toujours « la République » ? « République » : ce mot-posture qu'en période de crise elles psalmodient en attendant le miracle... •
Jacques Burnel - Politique magazine
C'est à la veille du deuxième tour des régionales que l'auteur de Quand la gauche agonise, a accordé l'entretien qui suit à FigaroVox. Il dénonce l'instrumentalisation des valeurs républicaines par une gauche qui a oublié sa propre histoire. Sans absoudre par ailleurs une droite incapable de penser par elle-même, du moins sans l'autorisation normative de la gauche. Quant à nous, ce sont les valeurs républicaines en tant qu'elles procèdent de l'idéologie révolutionnaire, qui nous paraissent devoir être contestées. Sur le plan intellectuel, c'est bien la remise en cause de cette idéologie qui constitue le bouleversement en cours. Et, comme l'écrit Houellebecq, si la défaite de cette pensée-là devait se confirmer, nous n'aurions rien à regretter. Lafautearousseau
Après le premier tour des élections régionales, nous avons assisté à un retour du Front républicain face au FN. Quel est le sens politique de ce front contre front ?
Nous assistons à un chantage plus effréné que jamais concernant ces « valeurs républicaines » qui, bien souvent, servent de mantra à des hommes politiques en mal d'inspiration. Et comme d'habitude c'est la gauche qui demande des comptes à la droite, comme si elle était la dépositaire de la quintessence républicaine. Ce qui est intéressant dans l'affaire est l'incroyable mauvaise foi d'un camp politique que la défaite historique qu'il vient de subir ne rend pas plus modeste. Qui a, ces dernières années, bradé les symboles républicains auxquels les Français sont, dans leur ensemble, attachés, sinon la gauche ? Souvenons-nous des sifflets du stade de France lors du fameux match France Algérie, en 2002. La gauche écolo-socialo communiste de l'époque, acquise au thème de la repentance coloniale, y était allée de sa « compréhension ». Quelques semaines plus tard, Jean Marie Le Pen accédait au second tour des présidentielles. Souvenons-nous des régulières railleries des Verts concernant les défilés du 14 juillet ou des protestations de Mme Dominique Voynet contre La Marseillaise ce « chant guerrier archaïque ». Souvenons-nous des milliers de supporters algériens, notamment à Marseille et à Paris qui, durant le dernière coupe du monde de football, ont brandi leur drapeau en clamant leur identité algérienne alors qu'ils sont, pour beaucoup, Français de droit. Protestation ou étonnement à gauche ? Mais vous rêvez. A l'époque, Mme Aurélie Filippeti avait même trouvé sympathique ces débordements. Et elle ne fut pas la seule. De son côté, le philosophe Alain Badiou, icone de la gauche intellectuelle, ne s'est pas gêné, au lendemain de l'attentat contre Charlie hebdo pour exprimer tout le mépris que lui inspirent le drapeau tricolore et l'idée de république française dans une tribune du Monde, parue le 28 janvier 2014. C'est un secret de polichinelle : la gauche - à l'exception de Jean Pierre Chevènement, Le Drian et quelques autres - n'aime pas une République française toujours trop française à son goût.
Après les attentats du vendredi 13 novembre, la gauche s'est cependant réapproprié certains symboles: le drapeau, la Marseillaise et même l'idée de frontière …
François Hollande et Manuel Valls ont été habiles sur ce plan là. Hollande est un maître de l'ambivalence et sa culture politique n'est peut être pas très éloignée de celle d'un Jacques Chirac. L'un et l'autre ont en commun cet habillage républicain qui peut toujours servir en état de crise. Du reste on ne voit pas très bien ce qu'il aurait pu faire d'autre. Les symboles républicains, depuis le drapeau jusqu'à la Marseillaise, rassurent les Français. D'un autre côté il est aussi un fossoyeur du principe républicain, notamment quand il revient agiter le thème du droit de vote des étrangers, une sorte de chiffon rouge symbolique qui affaiblit l'idée même de citoyenneté nationale.
Pour la gauche et même une partie de la droite, l'idée de la préférence nationale défendue par le FN exclut ce parti du champ républicain…
Certains s'insurgent contre toute idée de préférence nationale, laquelle serait par nature anti républicaine. Ils oublient que la République radicale socialiste a, entre les deux guerres, renvoyé des dizaines de milliers d'ouvriers italiens ou polonais dans leurs foyers avec l'accord de la CGT qui souhaitait réserver l'emploi aux travailleurs français. Ils oublient le fameux décret-loi du 2 mai 1938 sur la police des étrangers signé par le président du conseil Edouard Daladier et le garde des sceaux Paul Reynaud, tous deux membres du part radical qui œuvra durant le Front populaire. Le rapport au président de la République française stipulait ceci: « Et tout d'abord la France ne veut plus chez elle d'étrangers « clandestins », d'hôtes irréguliers: ceux-ci devront dans le délai d'un mois fixé par le présent texte, s'être mis en règle avec la loi, ou s'ils préfèrent, avoir quitté notre sol ». Dans le décret lui-même il était écrit ceci: « Pour déceler et identifier les étrangers clandestins et ceux qui ne sont pas en règle, il nous aura paru indispensable d'étendre à tout logeur professionnel ou bénévole l'obligation de déclarer qu'il héberge un étranger. Rien de vexatoire dans une telle obligation, simple mesure d'ordre dont on aperçoit toute la portée pratique, comme toute l'efficacité ». La délation n'est plus anti républicaine quand c'est la gauche républicaine qui l'instaure. De même: la déchéance de la nationalité n'est plus antirépublicaine dès lors que c'est François Hollande qui la propose. Dans ce pays il suffit que la gauche mette en œuvre une disposition proposée par la droite pour qu'elle devienne aussitôt compatible avec les « valeurs républicaines ». C'est une chance quand on prétend donner aux autres des leçons de valeurs. Mais n'est-ce pas à la droite, aujourd'hui, de demander des comptes aux socialistes sur ce qu'ils ont fait de la République ?
La gauche de la troisième République se reconnaitrait-elle dans la gauche d'aujourd'hui ?
Je ne crois pas car il y a eu la rupture de Mai 68. La gauche hollandaise est acquise aux thèmes sociétaux de la post modernité, notamment la parité des sexes et le mariage pour tous. On imagine mal Pierre Mendès France ou Guy Mollet défiler pour le mariage gay. En réalité la gauche hollandaise a vidé le principe républicain de sa substance. La république chère à Mendès France, pour évoquer celui qui fut une des grandes figures de la gauche française au XXe siècle, était indissociable de la souveraineté nationale et d'une certaine conception de la vertu.
Une certaine presse de gauche accuse les intellectuels d'avoir basculé à droite. La gauche conserve-t-elle vraiment l'hégémonie culturelle ?
La gauche est entrain de perdre l'hégémonie culturelle et cela constitue un événement de la plus grande importance. Et ce pour la première fois depuis la Libération ! Il ne va plus de soi désormais qu'un intellectuel soit de gauche en France, ce qui constitue un changement inoui. Le lien, quasiment génétique, entre la gauche et l'intelligentsia est en train de rompre. D'où l'affolement de la gauche institutionnelle. Elle a déjà égaré le monde ouvrier en route et voilà qu'elle se retrouve sans ténors intellectuels ! Qui plus est, comme je l'explique dans mon prochain essai, la république des bons sentiments, le dernier grand penseur que la gauche pouvait revendiquer, à savoir Michel Foucault, dont l'œuvre entre dans la Pléiade, fut un des plus grands fossoyeurs de la gauche, aussi bien républicaine que social démocrate ou marxiste. Michel Foucault a déconstruit les fondamentaux du progressisme qui reposent sur la croyance au Progrès et en la Raison. Pour lui la notion de valeur républicaine n'avait aucun sens. Ni celle de nation et encore moins celle d'Etat. Les grands thèmes sociétaux, notamment celui de la théorie du genre ou du mariage pour tous, lui doivent beaucoup. A gauche on se croit intelligent en se référant en même temps à Michel Foucault, qui a ruiné toute idée de morale et aux valeurs républicaines, qui sont très moralisatrices. Si la droite politique était tant soit peu intellectualisée elle enfoncerait le clou et renverrait la gauche politique à son néant philosophique.
Sur le plan intellectuel les lignes bougent, sur le pan politique c'est plus compliqué …
Les politiques sont en retard sans doute. La droite politique n'a pas pris la mesure du bouleversement en cours et Eric Zemmour a raison de dire qu'ils sont, pour beaucoup, incapables de penser par eux mêmes, sans l'autorisation normative de la gauche. D'où la surenchère réthorique sur les « valeurs républicaines », ce bouche trou de la pensée. Alain Juppé va vers la gauche et liquide les fondamentaux du gaullisme quand les Français se radicalisent à droite, c'est étonnant quand on y pense !
Les élections régionales vont-elles accoucher d'une recomposition ou d'un grand brouillage idéologique ?
Il est possible qu'un bouleversement se produise au niveau des Républicains car je ne vois pas comment faire tenir ensemble une base qui pense majoritairement comme Nadine Morano et des notables qui ont une peur bleue d'être réprouvés par les médias. Churchill plaisantait avec Staline au Kremlin qui est un des plus grands criminels du XX e siècle, mais eux ont peur de discuter avec les responsables du Front national, on croit rêver ! •
Paul-François Paoli est chroniqueur littéraire au Figaro et essayiste. Son dernier essai Quand la gauche agonise paraît le 25 janvier 2016 aux Editions du Rocher
PROPOS RECUEILLIS PAR ALEXANDRE DEVECCHIO
A Paris, mardi 1er décembre, Philippe de Villiers était au Cercle de Flore pour présenter son dernier ouvrage - dont on sait qu'il connaît un grand succès - « Le moment est venu de dire de que j’ai vu ».
Il y était déjà venu à plusieurs reprises, parler de ses livres précédents, sa trilogie, Charette, Jeanne d'Arc et Saint-Louis, trois héros français révélateurs de la filiation et des modèles que Philippe de Villiers propose à ses lecteurs, et, au delà d'eux, aux Français. Comme, d'ailleurs, il le fait au Puy du Fou, ce qu'il aura peut-être réalisé de mieux et de plus pérenne.
Au Cercle de Flore, il ne manque jamais de marquer, d'une manière ou d'une autre, sa proximité avec le mouvement, l'école de pensée, les maîtres dont l'œuvre s'y trouve poursuivie.
Nous ne jugeons pas, ici, de ce qu'a été sa carrière politique, sur laquelle lui-même porte un regard critique; nous ne présumons en rien de ce que pourrait être - ou ne pas être - à plus ou moins court terme, son engagement politique. Il s'affirme aujourd'hui comme un « dissident », hors du Système.
Nous examinons les idées qu'il exprime, ses paroles et ses écrits. Et nous considérons qu'en tant que tels, ils peuvent être d'une évidente utilité pour un redressement national. C'est ce qui nous importe et c'est dans cet esprit que nous reprenons ici cette conférence dont l'enregistrement en vidéo est dû au Centre Royaliste d'Action Française qui doit en être remercié. Philippe de Villiers y invite à la résistance... LFAR •
En avant-première la couverture du numéro de Valeurs actuelles, de ce jeudi 17 décembre.
Ces gens qui aident le prince
Certains viennent de Grenoble, de Marseille, d'autres de Toulouse, les plus jeunes arrivent de Paris… Ils sont une cinquantaine, mardi soir, dans le petit salon de la famille du prince Jean d'Orléans, au fond du parc de la chapelle royale.
Ils forment l'association Gens de France présidée par la princesse Philomena et sont venus pour l'assemblée générale.
250 membresL'occasion pour la princesse de remercier ces fidèles à la famille de France : « Ils nous soutiennent et nous permettent de poursuivre un projet cher au c'ur de Jean de France. Celui de tendre la main à la jeunesse. »
Le prince Jean, depuis son retour en terre drouaise, cherche à ouvrir les portes de la chapelle royale et à transmettre le goût de l'histoire de France aux jeunes. « Il a déjà reçu huit classes de collégiens et des classes de l'Institut Saint-Pierre pour des visites guidées. »
Le prince Jean se plaît à faire la visite lui-même et à raconter l'histoire de Louis Philippe. Un goûter est offert ensuite à son domicile aux jeunes visiteurs.
« Pour financer ces visites, le concours de l'association et ses 250 membres est essentiel », poursuit la princesse ravie du bon accueil que Wassim Kamel, le sous-préfet, a réservé à ces initiatives pédagogiques et culturelles.
L'idée du prince Jean et de l'association Gens de France n'est pas d'aller frapper aux portes des établissements scolaires.
« Nous avons fait savoir que nous proposions ces visites. On répond aux sollicitations mais on ne les impose pas. »
Valérie Beaudoin
valerie.beaudoin@centrefrance.com
..Source FigaroVox [11.12.2015]..
ANALYSE. La guerre est là... Oui, mais la guerre suppose des décisions, des moyens, des buts, une continuité dans l'action et une unité de point de vue. Avec l'état d'urgence, Hollande essaye de répondre à l'impossible problème du régime.
par Hilaire de Crémiers
Qui pourrait se flatter de connaître l'avenir ? La vie politique française se concentrait, il y a quelques semaines encore, sur les élections. Les élections régionales prenaient une allure nationale ; les partis étaient en effervescence ; ils s'excitaient à vivre déjà une sorte de premier tour des élections présidentielles, en avant goût de 2017, l'objet de tous leurs désirs. Le cirque électoral se remplissait de clameurs. Diagnostics et pronostics allaient bon train. À qui mieux mieux, chacun se réclamait de la démocratie, invoquait la république et c'était pour mieux déclarer sa haine du concurrent, appeler à la mort politique, sociale et morale, sinon physique de l'adversaire.
LA GUERRE INTÉRIEURE
Et voilà que, soudain, tout ne fut plus qu'incertitude, attente, angoisse, étrange silence. Pour combien de temps ? La France est en deuil. Elle a été frappée sauvagement. Elle peut l'être à nouveau d'un jour à l'autre ; elle n'est plus maîtresse de ses lendemains.
Les attentats, maintenant répétitifs, qui sont perpétrés sur son sol la mettent en état de guerre. Ellecroyait cette guerre simplement extérieure et s'en souciait peu - une affaire de militaires -, et voici que cette guerre éclate chez elle, à l'intérieur de ses frontières, au centre même de sa capitale. Tirs et explosions-suicides ont été effectués, semble-t-il, au hasard des circonstances du moment ; en revanche les objectifs et les quartiers ciblés ont été délibérément choisis. Comme les fois précédentes ! Même esprit et, vraisemblablement, même organisation relevant de mêmes donneurs d'ordre : le recoupement des enquêtes le prouve. Les terroristes qui menacent la France savent ce qu'ils veulent. Nous ne sommes sur ce plan et pour le moment que dans la riposte. C'est l'ennemi qui frappe où il veut, quand il veut, comme il veut, avec les moyens et la violence qu'il veut. D'individuelles, les actions deviennent collectives et coordonnées. Il est certain que le but logique des commanditaires est de multiplier et d'intensifier les attentats. Demain encore ? Paris ? Bruxelles ? Mais aussi bien Bamako au Mali, Beyrouth, Tunis ? ... Partout dans le monde ? Chez nous sera-ce à Noël ? Dans une salle de spectacle ? Un magasin ? Un métro ? Un train ? Un avion ? Allez savoir !
OÙ EST L'ENNEMI ?
Car l'ennemi est sur notre sol, sinon dans l'espace Schengen où il se déplace comme il l'entend et d'où il sort et où il rentre à son gré, en profitant, de plus, de l'immense désordre des migrations. Comme il est aussi au Sahel qu'il ravage, au Proche et au Moyen-Orient qu'il détruit. Bref, il est maître de son action, de son temps, de son espace de déploiement. Chez nous, tout comme ailleurs, mais peut-être plus encore, car des cités, des quartiers, des territoires hors contrôle en temps ordinaire lui servent de refuges. Là, la graine djihadiste pousse drue dans un milieu propice qui vit en circuit fermé et en quasi autonomie, coupé du reste de la nation, dans un climat de brigandages et de trafics illicites permanents où banditisme et terrorisme font bon ménage. Les responsables de la sécurité et du renseignement le savent parfaitement et depuis longtemps. Mais qu'ont fait, que font les politiques ? Des discours... Les causes de cet état de fait sont connues, pour ainsi dire répertoriées : la faiblesse générale de l'État qui n'est fort que contre ses citoyens qui ne sont pas de son obédience socialisante et maçonnique ; les politiques incohérentes, absurdes et criminelles, menées depuis des décennies, qui, avec l'accord d'un certain patronat et de toute une élite politico-économique, ont alimenté en populations immigrées et privées de tout lien avec la France des territoires entiers, livrés de ce fait à eux-mêmes ; la complicité passive quasi permanente et parfois active - soit lâcheté, soit complaisance des autorités constituées, des magistrats, des services administratifs et sociaux ; la promotion militante par tout un ensemble de médias dont la plupart relèvent de l'État, d'une gauche bavarde qui se croit maîtresse et juge de tout et qui se pavane en étalant sa fausse morale qui n'a rien de moral dans son ignorance absolue et son mépris souverain du vrai et du faux, du bien et du mal.
BONNE OU MAUVAISE RÉPONSE ?
C'est dire si la France est malade. Elle l'est moralement, socialement, politiquement, maintenant économiquement. Tout le monde le sait ; il suffit d'écouter les conversations sur les marchés et dans les bistrots. Et cette France malade a concédé de fait au djihadisme intérieur une liberté d'agir dont il a usé et dont il compte bien, évidemment, user encore. Le cursus des acteurs des attentats est une fois de plus effarant et révélateur de nos impérities !
La radicalisation islamique ne s'étend pas seulement sur des territoires ; elle touche des entreprises : les transports, la SNCF, la RATP, plus gravement encore les industries de haute sécurité, comme le nucléaire. Tout se découvre d'un seul coup. Il est temps. Les Français musulmans sont les premiers à attendre des signes forts d'une reprise en main. Rien ne serait plus criminel qu'une lâcheté de plus à leur égard : ce serait les livrer, comme jadis en Algérie, au couteau des égorgeurs.
Mais nos dirigeants ne sont perpétuellement que dans le factuel : jamais d'analyse des causes ; jamais de prévision des conséquences. Ils réagissent dans l'immédiateté avec leurs habitudes électoralistes et quelques idées simplistes qui leur tiennent lieu de pensée. Hollande se croit un chef de guerre en courant de Washington à Moscou, en conférant avec Cameron et Merkel, en redoublant les frappes sur Daech, mais l'ennemi est chez nous et surtout chez certains de nos prétendus alliés sur qui nous nous sommes appuyés et avec qui nous faisons affaire. La diplomatie française a été au rebours des intérêts bien compris de la France ! Mais qu'est-ce qu'un politicien, socialiste ou non, peut bien comprendre de la situation ? La radicalité islamique lui est totalement étrangère ; toute radicalité, d'ailleurs. La vie n'est pour lui qu'une suite d'élections à gagner. Sa stratégie n'est qu'électorale. Le propos d'un responsable socialiste dit tout à ce sujet : « Jusqu'à présent, on essayait de se détacher du contexte national. Là, si François Hollande gère bien l'affaire, ça peut être positif pour nous... » Propos normal dans notre république normale !
Face à une stratégie de guerre totale dont le terrorisme est une des armes de prédilection, le politicien de service pense aux gains électoraux possibles. Les militaires ne sont-ils donc déployés que dans ce but ? Et le porte-avions Charles-de-Gaulle ? Et les forces de sécurité mises en alerte maximum ? Et l'état d'urgence de trois mois n'a-t-il été voté que dans cette intention ? Et cette idée de constitutionnaliser une nouvelle forme de pleins pouvoirs entre les mains de l'autorité politique n'est-elle conçue que pour dominer la scène électorale en 2017 ?
Les Français dans leur ensemble comprennent parfaitement les nécessités impérieuses de la guerre. Encore faut-il la mener comme il faut. n
Humeur de Théophane Le Méné
Nicolas Sarkozy était dans les tribunes du Parc des Princes lors de la soirée du deuxième tour des élections régionales. Un choix étonnant dont Théophane Le Mené ne s'est toujours pas remis. Nous ne sommes pas sûrs que la circonstance mérite en soi-même tant d'attention ni d'agacement. Même si elle a fait amplement jaser le microcosme. Comme on le dit trivialement, Nicolas Sarkozy en a fait d'autres... Mais voilà justement l'occasion de le rappeler s'agissant de domaines et de circonstances d'une beaucoup plus grande importance ... Que Théophane Le Mené ne manque pas d'évoquer. LFAR
C'était plus fort que lui. Quelque chose d'incoercible et que l'on peine à expliquer. Comme cette attraction à laquelle on ne saurait résister lorsque l'âge nous exempte de tout sens de la responsabilité. Comme ce penchant dans lequel on cède lorsque la désinvolture écrase la retenue. Comme ce stupéfiant qui annihile toute forme de raison dès lors qu'on y a goûté. On peut être enfant, dilettante ou stupéfait et verser dans la poésie, la littérature, l'aventure, le voyage et dans bien d'autres champs qui convoquent tout autant la légèreté que l'obsession. Mais à ceux qui se veulent premier magistrat de France, c'est la lourde cape de la responsabilité, de l'ascèse, de la circonspection ; et seulement elle. Malgré tout cela, Nicolas Sarkozy n'aura pu s'empêcher de se précipiter au Parc des Princes pour assister au match PSG-Lyon, alors même que tombaient les premiers résultats des élections régionales. Que la Normandie et l'île de France ne savaient pas si elles étaient bleues ou roses. Que la recomposition politique était visible en direct sur les plateaux de télévision.
Par goût de la provocation, on pourrait admirer cette liberté suprême qui confine à l'indifférence. Mais on remarquera que l'ancien président en fit un usage quelque peu déplacé lorsque devenu clef de voûte des institutions, il préféra prendre villégiature dans un yacht plutôt que dans une abbaye - il l'avait pourtant promis. Par goût des passions populaires et de la France gouailleuse, on pourrait objecter que Nicolas Sarkozy signifiait ici la beauté spécifique du football et l'humanité de ses héros, convoquant Albert Camus dont il est, dit-on, un grand lecteur («Tout ce que je sais de la morale, c'est au football que je le dois») ou bien encore Pier Paolo Pasolini («Le football est la dernière représentation sacrée de notre temps»). Mais il y a le football des gradins et le football des loges. Et puis il y a ce qu'en dit Eduardo Galeano dans «Football, ombre et lumière»: «L'histoire du football est un voyage triste, du plaisir au devoir. A mesure que le sport s'est transformé en industrie, il a banni la beauté qui naît de la joie de jouer pour jouer. [...] Le football professionnel condamne ce qui est inutile, et est inutile ce qui n'est pas rentable.»
En définitive, par goût du réel, on se résoudra à constater que rien n'a changé chez Nicolas Sarkozy. L'homme n'a jamais réussi à épouser le sens du sacré, à assimiler le sens tragique de l'Histoire, sinon lors de la parenthèse enchantée de 2007. Sa passion pour le ballon rond un soir d'élection où l'on demande au peuple français de se prononcer en dit long sur sa conception de la politique. Et à revoir cette séquence pour le moins indécente, on ne peut s'empêcher de penser qu'à l'expression de la souveraineté populaire à laquelle on le sent décidément hermétique, Nicolas Sarkozy ne se sent dans son élément que dans le sport. Le malheur est que ce sport a été transformé par la fameuse jurisprudence de l'arrêt Bosman où la libre circulation des joueurs a bouleversé la sociologie du football, au point que les entraineurs sont devenus des coachs, les présidents de club, des nababs du pétrole ou de la finance ; les agents de joueurs, des grands frères ; et les joueurs eux-mêmes des voyous tenant d'une main l'escort et de l'autre la Ferrari. Incompréhensible donc, à moins que Nicolas Sarkozy entende toujours devenir président mais de la Ligue 1. •
Théophane Le Méné (FigaroVox)