Lundi 11, M. Sarkozy dénonce « la médiocrité » de Mmes Taubira et Belkacem. Réaction immédiate sur les ondes de R.T.L. et B.F.M. de M. Cambadélis, Premier secrétaire du P.S., qui juge cela « légèrement xénophobe » et de M. Sapin, ministre, qui parle de « bas instincts ». Pour eux, M. Sarkozy « a mis dans une même phrase une ministre qui a une couleur de peau et une ministre qui a un nom ». M. Sarkozy serait donc xénophobe. Or, puisqu’elles sont réputées françaises, ce sont MM. Cambadélis et Sapin qui ramènent ces deux dames à leurs « origines ». On est en droit de soupçonner que, pour eux, certaines personnes, du fait de leur « nom » ou de leur « couleur de peau », sont intouchables - ce qui, pour le coup, ressemblerait furieusement à une approche « ethnique ». En fait, cela porte un nom, cela s’appelle la discrimination positive.
Le piquant de l’affaire, c'est qu’en faisant de Mmes Taubira et Belkacem des ministres de premier plan, M. Hollande n’a fait qu’avancer dans la voie de son prédécesseur, lequel avait déjà promu des dames issues de « la diversité » (Mmes Amara, Dati, Yade) et en raison même de cette origine, pour bien montrer son esprit d’ouverture et de modernité. Qu’aujourd’hui M. Sarkozy cible principalement Mmes Taubira et Belkacem n’est donc peut-être pas tout à fait neutre mais s’inscrit à coup sûr parfaitement dans son jeu politicien. Il sait qu’elles sont d’abord là pour ce qu’elles sont, pour le symbole qu’elles représentent, malgré leur échec patent et l’échec annoncé des mesures dont elles nous menacent. Il sait aussi que c’est pour ce symbole que M. Valls défend bec et ongles ce que M. Bilger appelle « l'idéologie péremptoire de Mme Taubira et l'amateurisme souriant et buté de Mme Vallaud-Belkacem »: le Premier ministre ne rate ainsi jamais une occasion d’intervenir, allant jusqu’à répondre à leur place, lors des questions qui leur sont posées dans l’hémicycle.
En fait, et qu’on le veuille ou non, la fameuse « diversité » pose un problème, et d’abord à ceux qui sont directement concernés, ceux et celles qui, pour reprendre les mots de MM. Sapin et Cambadélis, ont « un nom » et « une couleur de peau » : témoin, Mme Rokhaya Diallo, militante associative, qui, à l’entendre, veut tout à la fois être reconnue pour ce qu’elle est mais sans être remarquée… Qu’on n’ait pas à s’en prendre aux gens pour ce qu’ils sont relève du bon sens et, surtout, du savoir vivre le plus élémentaire. Peu importent les « origines » de Mmes Taubira et Belkacem. Ce qui compte, sur le plan politique, c’est le fiasco de leurs ministères respectifs. Le vrai scandale est que cet échec ne puisse être dénoncé sans que certains poussent des cris d’orfraie en raison d’une « origine » qui, à leurs yeux, devrait leur valoir une sorte d’immunité.
Si on va au bout de la logique de MM. Cambadélis et Sapin, il conviendrait sans doute de judiciariser cette immunité, ce qui équivaudrait ni plus ni moins à la reconnaissance d’un véritable privilège que rien ne saurait légitimer. •