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MEDIAS • Robert Ménard : On peut mentir à la France entière sur ce qui se passe dans une ville. On ne peut pas mentir à ceux qui y vivent
Robert Ménard a le double mérite de revendiquer la liberté de pensée - liberté aujourd'hui menacée - et de penser juste, ce qui n'est pas donné à tout le monde. On devrait lui en savoir gré. LFAR
Entretien avec Robert Ménard
Robert Ménard, Béziers est encore « au cœur du scandale ». Cette fois, c’est la rubrique DVD du journal de la mairie qui est incriminée : la recension du célèbre film La Famille Bélier serait suspecte. La presse évoque aussi le caractère tendancieux des mots croisés. À quand la couleur de vos chaussettes ? On peut dire que vous êtes observé au microscope…
L’État, dans toutes ses composantes, porte un regard vigilant et permanent sur ce que nous faisons. Nous savons que le ministère de l’Intérieur est friand de notes et d’informations à notre sujet. Quoi de plus normal alors que les médias, qui comme chacun le sait sont libres en France, nous observent également avec la même attention.
J’ai défendu la liberté de la presse dans le monde durant 25 ans. Un peu partout, j’ai vu des journalistes oppressés. Ce que je vois en France est différent. Je vois des médias qui oppressent la vérité, qui oppressent tous ceux suspects de ne pas penser comme il faut penser sur l’immigration, les mœurs, le social, etc. Est-il sain dans un pays démocratique que plus de 80 % des journalistes votent à gauche et qu’un bon nombre d’entre eux soient des militants ? Est-ce normal lorsqu’il s’agit de médias qui sont financés par l’État ? Je ne le crois pas et des millions de Français partagent mon constat. Cette fracture entre une grande partie du peuple et cet élément de la classe dominante qu’est le monde médiatique est d’une extrême gravité. Un pays où la quasi totalité des médias ne pensent que d’une manière est-il encore un pays démocratique ?
On reproche à certains maires de faire de leur journal municipal un outil de promotion personnelle ; on vous soupçonne, vous, d’en faire un outil de combat culturel. Que répondez-vous à cela ?
Ce serait prétentieux et faux que de dire que notre journal est un outil de combat culturel. Mais qu’on puisse en débattre démontre surtout que ce que nous écrivons n’est écrit dans aucun autre journal municipal. Là est le problème. La plupart des maires se satisfont d’un petit canard plus ou moins bien fait, plus ou moins lisse, presque toujours ennuyeux à périr. Certains veillent surtout à y figurer en photo autant que possible. Mais combien de leurs administrés lisent leur journal ?
Nous, nous avons fait le choix de faire un vrai journal d’information locale. Ce n’est pas une fantaisie, mais une nécessité. Face à Midi libre, le seul quotidien local depuis la disparition du journal communiste L’Hérault du Jour que, cette fois, les banques capitalistes n’auront pas sauvé, il y a un besoin de pluralisme. Les Biterrois qui lisent Midi libre doivent disposer d’un autre point de vue sur l’actualité locale. Midi libre ne nous le pardonne pas et, de façon pathétique, nous mène une guerre que le talent relatif de sa rédaction ne lui permettra pas de gagner.
Béziers n’a jamais été autant sous les projecteurs que depuis votre élection. Comment ses habitants le vivent-ils ?
Fort bien si je m’en tiens à la jauge démocratique que sont les élections, puisque les candidats que je soutenais lors des élections départementales ont tous été élus. Mieux encore si j’en crois le courrier que nous recevons. En fait, cette tension médiatique permanente a beaucoup moins d’effet sur les Biterrois que sur les habitants de Lunel, de Metz ou de La Rochelle. On peut mentir à la France entière sur ce qui se passe dans une ville. On ne peut pas mentir à ceux qui y vivent et qui, chaque jour, peuvent se faire une opinion par eux-mêmes, en comparant le discours médiatique et la réalité. Le discours médiatique vise à agir sur les esprits pour agir sur la réalité. Nous faisons l’inverse. Nous partons de la réalité pour libérer les esprits. •
Entretien réalisé par Gabrielle Cluzel - Boulevard voltaire
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Théâtre • Entretien avec le docteur Destouches, par Bruno Stéphane-Chambon*
Une perle, Céline, interprété par Marc-Henri Lamande, se confie, déchiré, avec des sentiments à fleur de peau. Tout y passe, la famille, son père, la médecine, la littérature et le style ! Et aussi Sigmaringen et l’antisémitisme.
L’acteur, Marc-Henri Lamande, possède son personnage, ou plutôt est possédé par son personnage, plus vivant que nature avec ses tics et son débit haletant. Cette écriture au rythme syncopé, marque d’un renouveau exceptionnel dans la littérature du XXème siècle, est parfaitement maîtrisé par l’acteur, qui arrive même entre deux respirations, à nous faire entendre les points de suspension si chers à l’auteur. Le théâtre de la Reine Blanche est situé dans un quartier parisien, populaire, mais la ruelle qui l’abrite, est un havre de paix. Jusqu’au jeudi 28 mai ! •
Dieu, qu’ils étaient lourds ! Entretien théâtral et littéraire avec le professeur Y, écrit par Louis-Ferdinand Céline dans les années 50 à la demande de Gallimard.
Adaptation théâtrale et mise en scène de Ludovic Longelin, avec Marc-Henri Lamande, Ludovic Longelin, Thomas Ganidel et Mathieu Wilhelm.Théâtre La Reine Blanche
2 bis, Passage Ruelle, Paris 18ème
Téléphone : 01 40 05 06 96
Site web : www.reineblanche.com
Email : reservation@reineblanche.com
Les mardis, jeudis et samedis à 21h
Places : de 15 € à 20 € -
LITTERATURE • A propos de Céline ... Le dernier feu d'artifice de Luchini à France Inter : "Notre époque est ennuyeuse à mourir !"
Fabrice Luchini est au théâtre des Mathurins jusqu'au 27 mai pour son spectacle Poésie ?. Il était l'invité de Patrick Cohen, hier matin. Hommage à la langue française, aux grands auteurs et au style s'y mêle à une critique féroce de la socité moderne. On écoutera, si on le souhaite, les deux vidéos qui suivent avec un réel plaisir. LFAR
Deuxième partie de l'émission avec les questions des auditeurs et des internautes
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Université d'été d'Action française, le Camp Maxime Real Del Sarte, se tiendra dans deux mois (17 - 23 août 2015)
Voici donc d'ores et déjà annoncés, le lieu, les dates, le thème du prochain Camp Maxime Real del Sarte.
Le Camp Maxime Real del Sarte (CMRDS) est une université d’été d’Action française, surtout destinée aux jeunes Français soucieux de l'avenir de leur pays - dont, à travers les générations, l'A.F. n’a jamais cessé d’intéresser et de former un nombre non négligeable. L’on serait en effet étonnés si l’on dressait la liste des personnalités du monde politique, économique, littéraire ou médiatique d’aujourd’hui qui y sont passées, et qui, même si elles ont parfois gagné d’autres rivages, y ont forgé des liens, des amitiés et des convictions restés toujours vivaces.
La réflexion précède l’action mais aussi elle s’en nourrit et c’est de leur perpétuelle interaction que naissent les œuvres du long terme. L’Action française, dans sa meilleure tradition, a, ainsi, toujours su tout à la fois maintenir sa ligne fondatrice et l’actualiser suivant les réalités de chaque époque, de même que ses méthodes d’action.
Ainsi, après le colloque du 9 mai dernier, dont le thème, heureusement formulé était Dessine-moi un roi, le Camp Maxime Real del Sarte 2015 s'est logiquement donné pour sujet : Les rois ont fait la France, un roi la refera.
Le site du Centre Royaliste d'Acion Française donnera prochainement le programme du CMRDS 2015 et l'on a dores et déjà la possibilité de s'y inscrire. On s'y reportera avec profit.
Les jeunes qui s’y réuniront cette année seront invités à combiner étude, réflexion, sport, détente et un grand fond d'amitié. Il leur faudra, sans-doute, beaucoup de lucidité et de courage pour affronter les difficultés du monde qui vient. Il faut les leur souhaiter. •
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Prise de Palmyre par l'État islamique : pourquoi une telle inaction de la coalition ? L'analyse d'Hadrien Desuin*
Il est seulement à craindre que l'analyse qui suit - d'Hadrien Desuin - ne se révèle, hélas, tristement exacte. LFAR
L'État islamique s'est entièrement emparé de Palmyre ce jeudi. Hadrien Desuin, dénonce l'inaction de la coalition qui préfère sacrifier la cité antique plutôt que d'apporter son concours à Bachar al-Assad.
Le 13 mai, l'offensive de l'État islamique débutait à Palmyre, carrefour névralgique du désert syrien et vestige antique d'une civilisation bel et bien disparue. Deux grosses larmes de crocodiles ont coulé sur les joues de Laurent Fabius et François Hollande. Une semaine plus tard, une contre-offensive djihadiste fait reculer l'armée syrienne fidèle à Bachar Al-Assad. Laquelle doit céder à nouveau le nord de la ville après l'avoir repris quelques heures. Les combats continuent, pourtant la coalition anti-Daesh emmenée par les occidentaux détourne pudiquement le regard.
Elle continue de bombarder avec succès les positions djihadistes face aux kurdes, hier à Kobané et aujourd'hui à Hassaké, mais Palmyre l'indiffère. Quelques raids aériens bien guidés auraient pu stopper net les colonnes du Djihad. Mais parce que ce sont des alaouites qui résistent à la barbarie, rien ne sera fait.
L'indignation de la communauté internationale est unanime, la directrice générale de l'Unesco Irina Bokova s'active pour sauver Palmyre. Jack Lang, président de l'institut du monde arabe, a pris les accents des soldats de l'an II sur Europe 1: « il faut massacrer ces massacreurs et sauver Palmyre ! » Décidément ses camarades font peu de cas de nos racines gréco-latines. La culture n'a pas d'importance quand les « méchants » la défendent. Comme si l'Occident ne parvenait pas à sortir de son manichéisme pour prendre la moins mauvaise des solutions.
Cette indignation stérile s'explique aisément: la bataille de Palmyre remet en cause le dogme de l'alliance tacite entre Bachar et l'EI. C'est le conte que rabâche depuis quatre ans les chantres de « l'opposition syrienne »: Bachar et l'EI sont alliés, ils sont les deux têtes d'un même hydre bicéphale. Tandis que des combats opposent depuis des années les troupes loyalistes aux soldats du califat à Der Ez Zor, à Damas et ailleurs; tout est fait pour minimiser sinon effacer la part que prend l'armée loyaliste dans la lutte contre Daesh.
Une fable qui cède le plus souvent à la facilité complotiste: l'EI est une créature de Bachar Al-Assad. Conclusion imparable des derniers rêveurs du printemps arabe: pour vaincre Daesh, il faut renverser Bachar. Et si, après Palmyre, c'était l'État islamique qui renversait Bachar, le maître de Damas serait-il encore coupable ?
Soucieuse de se montrer réactive, la diplomatie française se hâte lentement. Elle a décidé de prendre une initiative bien de chez nous; Ses partenaires internationaux, dont John Kerry, sont invités le 2 juin à Paris, pour une réunion. Mais que sera Palmyre dans douze jours? Il suffit d'un ordre pour modifier la trajectoire de nos aéronefs qui bombardent l'EI de l'autre côté de la frontière syrienne. On voudrait enterrer Palmyre discrètement qu'on ne s'y prendrait pas autrement.
Parce qu'on préfère sacrifier un pan entier de notre civilisation plutôt que de donner une victoire à Bachar, rien ne sera fait pour sauver Palmyre. Dans une quinzaine de jours, quand nos diplomates se réuniront au quai d'Orsay, les ruines fumantes de la ville porteront d'autres stigmates que celles du temps, celles de la furie et de l'indifférence des hommes, celles des duels d'artillerie. Une deuxième fois, et quelque soit le vainqueur, Palmyre sera détruite. •
* Hadrien Desuin - Figaro actualités
Ancien élève de l'École spéciale militaire de St-Cyr puis de l'École des officiers de la Gendarmerie nationale, Hadrien Desuin est titulaire d'un master II en relations internationales et stratégie sur la question des Chrétiens d'Orient, de leurs diasporas et la géopolitique de l'Égypte, réalisé au Centre d'Études et de Documentation Économique Juridique et social (CNRS/MAE) au Caire en 2005. Il a dirigé le site Les Conversations françaises de 2010 à 2012. Aujourd'hui il collabore à Causeur et Conflits où il suit l'actualité de la diplomatie française dans le monde.
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Eric Zemmour : L'opposition démocratique à Assad, la belle blague ! A quand Daech dans Bagdad et Deaech dans Damas ?
Le roi Ibn Séoud et le président Roosevelt - Entrevue du Quincy, 14 Février 1945
Eric Zemmour, une fois de plus, donne une analyse pessimiste mais juste des convulsions du Proche-Orient. Même son assimilation de l'Arabie Séoudite à un Daech qui a réussi, est, à la réflexion, recevable. Les lecteurs de Jacques Benoist-Méchin et de son indispensable Ibn Séoud* s'en étonneront peut-être. Il n'empêche : loin de la sagesse du vieux roi, après sa jeunesse guerrière, l'Arabie Séoudite d'aujourd'hui joue, en fait, le jeu de l'expansionnisme sunnite qui est probablement le fond de sa tradition religieuse et politique. LFAR •
* Ibn-Séoud ou la Naissance d'un royaume, Albin Michel, 1955
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Barrès visionnaire, comme Maurras ?
Ignacio Zuloaga, Portrait de Maurice Barrès devant Tolède, 1913
Ah !... des demi-bienfaiteurs sont aisément des malfaiteurs !
J'entrevois qu'ils imposeront au monde une règle morale, comme ils lui proposent une règle économique.
Maurice Barrès
L'Ennemi des lois (1892)
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Dans les archives de Lafautearousseau, voyez nos « grands auteurs », retrouvez leurs réflexions ...
Grands auteurs auxquels, aujourd'hui, s'est ajouté Maurice Barrès.
Grands auteurs ou acteurs de l'Histoire s'enrichit, chaque semaine, en principe le vendredi, de pensées et réflexions particulièrement pertinentes. Vingt-huit Français, neuf grands esprits européens, anglais, allemand, espagnol, russe et tchèque. et trois non-européens, Edgar Poe, le Dalaï Lama et le pape François. Bien d'autres grands auteurs éclectiques et profonds sont à venir. « Du bonheur d'être réac ? » C'est, entre autres, en termes très simples et dans des sens divers, ce qui les rassemble. N'hésitez pas à consulter cette bibliothèque qui s'étoffe et se construit !
Accès : Icône en page d'accueil, colonne de droite. •
Déjà cités : Edgar Poe, le Dalaï Lama, Tocqueville, Baudelaire, Vaclav Havel, Claude Lévy-Strauss, Charles Péguy, Dostoïevski, Goethe, Anouilh, Malraux, Unamuno, la Satire Ménippée, George Steiner, Shakespeare, Frédéric II, Jacques Perret, Georges Bernanos, Anatole France, Auguste Comte, Balzac, Racine, Pierre Manent, Louis XIV, Charles Maurras, Alexandre Soljenitsyne, le Pape François, Wintson Churchill, Alfred de Musset, Michel Houellebecq, Jean Giraudoux, Gustave Thibon, Choderlos de Laclos, Jacques Ellul, Simone Weil, Jacques Bainville, Albert Schweitzer interpelant Charles De Gaulle.
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Paris : A l’affiche, une pièce de Fabrice Hadjadj
Le Transhumanisme nous réserve-t-il le « meilleur des mondes » ? Est-ce encore de la science-fiction ?
A voir : la pièce de Fabrice Hadjadj, avec Véronique Ebel, Siffreine Hadjadj, Luca Boschetti
Jeanne et les posthumains
Tous les soirs à 20h45 les 20, 21, 22 et 23 mai + 16h30 samedi 23 mai
A l’Espace Saint Pierre (Neuilly sur Seine – métro Sablon)Infos et réservations en cliquant ici
Quelques avis de spectateurs qui l’ont vu à Lyon en novembre 2014
« un électrochoc » Pierre C.
« une pièce très riche, très percutante, très affolante…merci » Edwige
« Quel feu d’artifice !!! » Brigitte et Jacques
« une belle extrapolation d’une réalité qui s’annonce » Pia
« bravo pour l »humour grinçant qui sonne le tocsin » Catherine
« Pièce extraordinaire, merci pour les acteurs et cette pièce sortie des entrailles de l’auteur, c’est prophétique ! Très belle pièce de théâtre actuelle « Yasmine
« quelle jubilation ! il n’y a bien longtemps que notre intellect n’avait pas été autant stimulé! Merci infiniment! » François
« Choc et pas chic, merci pour ce texte et ces acteurs, ce coup de théâtre » Marc B. • -
Qu'on fiche donc la paix à Poutine ! Par Péroncel-Hugoz
Vladimir Poutine et le roi Mohammed VI à Moscou en 2002
Depuis le Maroc où il réside, Péroncel-Hugoz traite ici du harcèlement politico-médiatique dont, à son avis, Vladimir Poutine est l’objet de la part du camp euro-américain. Harcèlement qu'il réprouve... Et sa chronique est, une fois encore, fort intéressante.
La France a-t-elle annexé l’Alsace-Lorraine en 1918 ? le Maroc a-t-il annexé le Sahara en 1975? L’emploi d’« annexer » au lieu de « récupérer » en dit plus long que des heures de discours sur les arrière-pensées des uns et des autres … Idem avec la Russie et la Crimée. Cette province russe, peuplée majoritairement de Russes, fut arbitrairement rattachée à l’Ukraine en 1954 par Nikita Khroutchev, alors maître rouge de toute l’Union soviétique, et non pas «annexée» mais récupérée par la Russie en 2014, de par la double volonté et de Poutine et d’une large majorité de Criméens. Néanmoins neuf sur dix des commentateurs nord- américains ou européens continuent de dénoncer l’«annexion» de la Crimée, comme l’Algérie officielle (le peuple algérien n’est pas de cet avis, en général) le fait pour le Maroc et son Grand Sud saharien.
La France actuelle, au lieu de reprendre la fructueuse politique gaullienne de coopération multiforme avec la Russie (que de Gaulle n’appelait pas « Union soviétique », quitte à se faire tancer alors par la gent journalistique de gauche …), s’est intégrée sans gloire ni résistance à la campagne harcelante de Washington et Bruxelles contre Moscou. Une Europe alliée à la Russie, ce qui est dans la nature géopolitique des choses, permettrait seule de dire non à l’américanisation du Vieux Monde. Aussi a-t-on excité Kiev contre Moscou; aussi, Mrs Clinton, entre autres voix états-uniennes influentes est allée jusqu’à comparer Poutine à Hitler…
Depuis des décennies que je m’intéresse à l’actualité internationale la « reductio ad hitlerum » a été agitée par l’Ouest à l’endroit de Nasser, Castro, Péron, Benbella, Mao, Saddam Hussein, Pinochet, Enver Hodja, N’Krumah, Sékou Touré, Assad père et fils et j’en oublie. D’ailleurs pourquoi toujours Hitler et jamais Staline qui, ayant dominé plus longtemps, a tué encore plus de gens que le Fuhrer ? C’est un autre débat…
Ajoutons que Poutine, au lieu d’enfoncer son pays dans la décadence, où il sombrait depuis le triste épisode alcoolisé de Boris Eltsine, paraît au contraire être en train de redresser peu à peu la Russie, avec le soutien d’une bonne majorité de ses concitoyens et malgré les cris d’orfraie d’intellos moscovites occidentalisés…
Loin de ces diabolisations politiques, le Maroc contemporain a poursuivi autant que faire se peut sa diplomatie d’équilibre, recevant Poutine avec égards au Palais royal de Casablanca en 2006 en attendant que Mohamed VI mette à l’ordre du jour son projet de nouvelle visite au locataire du Kremlin, où il alla dès 2002 afin d’établir un «partenariat stratégique» bilatéral. Pour le moment, Rabat semble avoir répondu aux attentes russes depuis que Moscou, à cause de la Crimée en particulier, subit les effets du blocus européen, et les producteurs marocains livreraient donc à la Russie fruits et légumes que celle-ci importait jusqu’ici surtout d’Europe méridionale. On dit même que quand le Maroc ne peut satisfaire toute la demande alimentaire fraîche des Russes, il prend discrètement sous son pavillon quelques cargaisons vertes dont les agriculteurs espagnols, pris au piège de la «solidarité» euro-américaine, ne savent plus que faire… Le petit axe Madrid-Rabat jouerait-il donc des tours à l’omnipotent axe Washington-Bruxelles ? •
Le 360 - Péroncel-Hugoz
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Roland Dumas : « Bernard-Henri Lévy se prend pour le ministre des Affaires étrangères. Je n'ai aucune sympathie pour ce flibustier de la politique. »
Cette note de Roland Dumas, alors ministre des Affaires étrangères de François Mitterrand, date d'il y a vingt-deux ans. C'était en 1993 ... Déjà ! Est-il utile d'ajouter que les jugements que Dumas et Mitterrand portent alors sur BHL nous paraissent valoir tout autant pour aujourd'hui ? Flibustier de la politique ... Permanence de sa capacité de nuisance ... C'est à lire ! LFAR
9 janvier 1993
Nous sommes en pleine crise d'hystérie à propos de la Bosnie. Monsieur Bernard-Henri Lévy se prend pour le ministre des Affaires étrangères. Il multiplie les déclarations et fustige notre prétendu immobilisme à propos de la guerre en Bosnie. Je n'ai aucune sympathie pour ce flibustier de la politique et son omniprésence médiatique m'agace au plus haut point. (...).
À l'Élysée, je fais part à François Mitterrand de l'effet que les déclarations de Lévy suscitent au Quai d'Orsay. Comme à son habitude, il minimise et devant mon air furieux, que je ne cherche pas à dissimuler, il me « cajole » comme il sait si bien le faire :
« N'y prêtez pas attention, Roland, cela n'a aucune importance mais je suis obligé d'en tenir compte car il a une grande capacité de nuisance. Continuez votre action. Ne vous en préoccupez pas. »
Il est vrai que la marge de manoeuvre est faible. On ne peut démettre quelqu'un d'une position qu'il s'est lui-même arrogée. L'« affaire» aurait pu en rester là mais elle rebondit quand il invite chez Lipp le président bosniaque, Izetbegovic, en compagnie de Mmes Simone Veil, Élisabeth Guigou, Anne Sinclair, Claire Chazal et de MM. Dominique Strauss-Kahn, Harlem Désir et Dominique Bromberger. Au menu: pot-au-feu pour tout le monde, mais surtout photographes et télévision. •
Roland DUMAS
Politiquement incorrect, secrets d'Etat et autres confidences, carnets 19884-2014, Cherche Midi 2015
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Questions autour du Charles De Gaulle, par Guillaume Priou*
Sans doute, cet article pose des questions et peut susciter le débat...
Le Charles De Gaulle rentre de quatre mois de mission en océan Indien, plus précisément dans le golfe Persique d’où ses avions ont participé aux opérations en Irak. La France est en guerre dans cette partie du monde où elle déploie régulièrement son porte-avions, son aviation bombarde quotidiennement les positions de l’État islamique au côté de l’aéronavale américaine : la question ne se pose pas de savoir s’il fallait y envoyer le fleuron de la Royale. Ne pas le faire aurait été équivalent à décider de son désarmement sine die.
Mais au-delà de cette intuition initiale, le retour du groupe aéronaval à son port d’attache est l’occasion de dresser un bilan en demi-teinte. Du côté obscur, vient tout d’abord le discours de François Hollande annonçant le départ du porte-avions dans ces vœux aux armées, à bord du Charles De Gaulle, tout imprégné de ce fameux « esprit du 11 janvier ». Alors qu’un tel déploiement nécessite des semaines de préparation, le président nous a laissé entendre qu’il s’était fâché tout rouge et ordonné l’appareillage immédiat de 2 800 marins… Les terroristes allaient voir ce qu’ils allaient voir !
Et c’est la seconde et principale ombre au tableau : l’État islamique n’a rien vu d’autre qu’un motif supplémentaire de tourner en dérision l’engagement militaire de la France au côté des Américains : la cyber-attaque de TV5 monde, qui fait explicitement allusion au Charles De Gaulle, n’est-elle pas aussi spectaculaire que la mise en œuvre d’un porte-avions nucléaire ? En attendant, les bombardements de la coalition permettent à peine de stopper la progression des djihadistes sur le terrain, mais à quel prix ! Le porte-avions rentre à Toulon mais la bannière noire du calife continue de flotter sur Mossoul.
Heureusement, il y quand même quelques motifs de se réjouir de cette mission « Arromanches » qui se résument en ceci : la France appartient toujours au club restreint des puissances militaires capables d’agir au loin. Et pour cela, il arrive encore qu’elle soit prise au sérieux dans les dossiers stratégiques.
Par les Américains d’abord, qui ont ouvert leurs états-majors à l’occasion de ce déploiement pour intégrer le groupe aéronaval français dans leur dispositif militaire, ce qui est tout de même plus efficace pour coordonner des opérations aériennes complexes… Si la participation du Charles De Gaulle allège modestement l’effort de guerre américain, c’est surtout un gage de confiance de l’oncle Sam, et la preuve d’une convergence d’intérêt avec lui, ce qui est souvent le cas dans les dossiers sécuritaires.
On peut se demander aussi si la présence du porte-avions aura pesé sur les négociations avec l’Iran à propos du nucléaire, négociations qui ont connu un quasi dénouement pendant la présence du Charles de Gaulle dans le golfe Persique. En soi, certainement pas directement, mais que le plus virulent des négociateurs dispose d’une telle capacité militaire lui donne tout de même un peu de poids. Pourvu que ça dure, pourvu surtout que la diplomatie française sache l’utiliser…
Enfin, l’indépendance militaire de la France, dont le porte-avions est le symbole plutôt que la garantie, a permis concomitamment à ce déploiement, de finaliser la vente de Rafale aux pays qui cherchent un avion moderne indépendant de la technologie américaine. Espérons seulement que l’industrie de défense de la France soit toujours au service de son indépendance stratégique et non l’inverse, ce dont on peut malheureusement commencer à douter. •
Guillaume Priou - Politique magazine
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Sauver Palmyre !
Le groupe terroriste s'est emparé hier soir de la quasi-totalité de la ville.
« Les loups sont entrés dans Palmyre. Et le monde, au balcon, spectateur indifférent, regarde. »Dominique Jamet -
L'égalité, cette tromperie républicaine, par Jean-Philippe Chauvin*
La fin d'année scolaire approche et c'est le temps de la préparation des derniers cours de Seconde : entre deux paquets de copies et quelques lectures des journaux du jour, je suis en train de compléter ceux qui porteront sur la Révolution française. Autant dire que je me régale, même si la période n'est pas forcément la plus heureuse de l'histoire de France... En fait, elle est l'une des plus denses et des plus agitées, et m'apparaît de plus en plus comme la trahison des espérances populaires et la prise de pouvoir d'une « classe », d'ailleurs pas du tout homogène, ni dans ses formes ni dans ses idées, que l'on pourrait qualifier, par facilité plus que par réel discernement, de « bourgeoise », à rebours de ce que pensait Maurras (et tant de conservateurs de son temps), qui voulait sauver la bourgeoisie de cette sorte de péché originel révolutionnaire : il y voyait plutôt le fait de déclassés et d'esprits rousseauistes, sans convaincre totalement. Bernanos était plus sévère, et plus lucide, sans doute, sur cette question.
Je me souviens d'une préface de Pierre Chaunu au livre magistral de Victor Nguyen intitulé « Aux origines de l'Action française » dans laquelle il chiffrait aux alentours de « 80.000 » les personnes ayant tiré un profit économique et financier de la Révolution française, ce qui, en définitive, n'est pas beaucoup au regard du sang versé et des souffrances endurées jusqu'au retour des Bourbons sur le trône, en 1814 puis 1815, et cela « sans que 20 millions de paysans ne récoltent mieux qu'une broutille ». Pour une Révolution qui se voulait égalitaire, quel drôle de bilan !
En fait, l'égalité proclamée par les révolutionnaires de 1789 et « appliquée » durant la Terreur de 1793, n'était pas celle des fortunes ni celle des conditions mais devait se comprendre comme, d'une part un grand mouvement d'unification (d'uniformisation ?) au sein de la Nation (celle qui se voulait « Une et indivisible ») qui en finissait avec les « privilèges » provinciaux ou professionnels, d'autre part un mouvement visant à l'égalité de traitement des individus, en particulier par -et devant- la loi, ce qui, pour ce dernier, n'a rien pour me choquer, même si la réalité sera, en ces temps-là, beaucoup moins favorable...
Là où je considère qu'il y a escroquerie, c'est que cet idéal d'égalité cache, le plus souvent, une forme malsaine et détestable de jalousie sociale, et qui pourra se traduire par une terreur (avant même qu'elle ne devienne majusculaire), un vandalisme et un brutalisme (dans le sens que lui donne, sur le plan architectural, le prince Charles d'Angleterre) sans égale mesure dans l'histoire de notre pays jusqu'alors, sauf peut-être au moment des guerres de religion. Il suffit de se promener en France et de constater que, lors des visites de monastères ou de cathédrales, de châteaux ou de beffrois, l'on n'échappe pas à une évocation, parfois discrète et un peu gênée, des « destructions de la période révolutionnaire », quand il serait plus simple et historiquement plus juste de parler des « destructions de la Révolution » elle-même ! La rage égalitaire qui motivait les saccages et les pillages au nom d'une « table rase » qualifiée de « républicaine » m'a toujours effrayé, et je suis d'autant plus sensible aux massacres archéologiques actuels qui ravagent le patrimoine de la Syrie et de l'Irak, que j'y aperçois, à deux siècles de distance, la même fureur contre un passé pourtant millénaire, la même détestation de ce qui n'est pas « l'ordre nouveau » du moment, républicain ou islamiste, la même haine contre les « inégalités protectrices » que sont les diversités familiales, sociales, religieuses ou communautaires.
L'égalité nie la diversité française...
L'égalité est trop souvent la négation des différences, de l'altérité et des libertés, et non la correction des injustices qu'elle se prétend être, ou que prétendent ceux qui parlent pour elle. Durant la période révolutionnaire, elle fut aussi le paravent d'une confiscation et d'un détournement des fortunes, non pour le partage mais pour la rapine de quelques uns. Quand Balzac s'écriait que « derrière chaque grande fortune, il y a un grand crime », sans doute avait-il à l'esprit ce qui s'était passé dans les années 1790, et que dénonçait Pierre Chaunu : « La Révolution, c'est la distribution d'une bonne partie de la propriété noble (…) à un taux truqué (entre 7,5 et 12,5 % de la valeur du marché de 1789) à 80.000 apparatchiks et affidés. (…) La Révolution c'est aussi le vol ! Et le non-dit. La redistribution au profit d'une nouvelle couche dirigeante d'une catégorie de notables qui comprend les anciens et majoritairement des nouveaux (…). » L'on sait aussi que les grands hommes de la Révolution (hormis les incorruptibles de la Terreur, du moins ceux qui disparurent brutalement de la scène politique en Thermidor) aimaient l'argent, comme Danton qui passe désormais pour le modèle-type du corrompu, ou Fouché, et quelques autres au républicanisme si bien avéré qu'on les vantait jadis dans les manuels d'histoire de la IIIe République...
Deux siècles après, l'on mesure mieux, sans doute, l'imposture égalitaire de la Révolution : l'égalité a beau être inscrite au fronton des mairies et des écoles primaires, il n'y jamais eu autant d'injustices, en particulier sociales, et les citoyens, se sentant trahis, désertent les partis qui se réclament trop bruyamment d'une République qui, en définitive, n'a pas su répondre aux intérêts de tous, une République prisonnière des féodalités de l'Argent qui, désormais, font les élections présidentielles...
Tous pareils, tous connectés : formatage égalitaire...
Dans le même temps, à défaut de favoriser une certaine et nécessaire justice sociale, la République pratique un égalitarisme niveleur des intelligences, non pour assurer l'égalité des chances mais pour « égaliser » des élèves qui, pourtant, ne demanderaient pas mieux, au moins pour une partie d'entre eux, d'aller plus loin dans l'acquisition de nouvelles connaissances ou dans la curiosité intellectuelle : alors qu'il faudrait se mettre à la portée des élèves et leur donner à la fois l'envie et les moyens de s'élever, l’Éducation nationale, par ses réformes « néopédagogistes » préfère que les professeurs se mettent à leur niveau (ce qui n'est pas du tout la même chose) par des pédagogies « ludiques » ou « informatiques » qui négligent l'effort et la réflexion personnels... Là encore, l'égalité sera un leurre pour les générations futures, juste une « valeur de la République » que l'on apprendra en « éducation à la citoyenneté » (ou « à la laïcité », selon la titulature du moment...), et qui tentera de cacher l'échec d'un système éducatif déjà bien malade...
A moins que... Mais cela, c'est déjà, au double sens du terme, une autre histoire ! •