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Rechercher : Rémi Hugues. histoire

  • Éphéméride du 28 juin

    1919 : Signature du calamiteux Traité de Versailles

     

     

     

     

    Célébration de saint Irénée, Primat des Gaules, mort en 202 

     

    Né à Smyrne, vers 130, Irénée arrive en Gaule en 157, et rejoint Pothin, à Lyon, dont il devient le deuxième évêque, puisqu'il succède à ce même Pothin, premier évêque de la ville - et même des Gaules - et qui fut victime (avec Blandine et ses compagnons) de la grande persécution de Marc-Aurèle en 177 (voir l'Éphéméride du 2 juin).

    Saint Jérôme et Grégoire de Tours affirment qu'il serait, lui aussi, mort martyr, durant la persécution de Septime-Sévère.             

    Saint Irénée est important à plus d'un titre :

    • D'abord, il enracine la ville de Lyon, et l'ensemble des Gaules, dans les origines mêmes du Christianisme, puisque - comme Pothin, à qui il succède - il a connu Polycarpe, compagnon de route et disciple de saint Jean l'Évangéliste.

    • Ensuite, en cette fin du IIème siècle, alors que les sectes gnostiques sapaient les bases mêmes de la religion chrétienne, saint Irénée contribua à rétablir la paix au sein de l'Église en prêchant la tradition : pour lui Rome est le centre de l'Église avec lequel "toutes les Églises doivent s'accorder à cause de sa principauté supérieure, car c'est par la succession des Pontifes romains que la tradition apostolique de l'Église est parvenue jusqu' à nous."

     

    "La tradition des apôtres est manifeste dans le monde entier : il n'y a qu'à la contempler dans toute église, pour quiconque veut voir la vérité. Nous pouvons énumérer les évêques qui ont été institués par les apôtres, et leurs successeurs jusqu'à nous : ils n'ont rien enseigné, rien connu qui ressemblât à ces folies. Car si les apôtres 28 juin,mont aiguille,vercors,charles viii,premiere guerre mondiale,traité de versailles,clémenceau,lloyd georges,wilson,alsace-lorraine,bainville,alexis carrelavaient connu des mystères cachés dont ils auraient instruit les parfaits, en dehors et à l'insu du reste (des chrétiens), c'est surtout à ceux auxquels ils confiaient les Églises qu'ils les auraient communiqués. Ils exigeaient la perfection absolue, irréprochable, de ceux qui leur succédaient et auxquels ils confiaient, à leur place, la charge d'enseigner... Il serait trop long... d'énumérer les successeurs des apôtres dans toutes les Églises; nous ne nous occuperons que de la plus grande et la plus ancienne, connue de tous, de l'Église fondée et constituée à Rome par les deux très glorieux apôtres Pierre et Paul; nous montrerons que la tradition qu'elle tient des apôtres et la foi qu'elle a annoncée aux hommes sont parvenues jusqu'à nous, par des successions régulières d'évêques... C'est avec cette Église (romaine), en raison de l'autorité de son origine, que doit être d'accord toute Église, c'est-à-dire tous les fidèles venus de partout; et c'est en elle que tous ces fidèles ont conservé la tradition apostolique."

     

    Cent ans avant l'arrivée de Saint Irénée, deux acteurs/témoins majeurs - mais non chrétiens... - de l'Affaire Jésus étaient venus en Gaule, pour y finir leurs jours : Ponce Pilate et le roi Hérode Antipas, ceux-là même qui, avec l'accord de Joseph Caïphe, chef du Sanhédrin, avaient jugé et condamné Jésus : voir l'Éphéméride du 27 février...

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    https://christus.fr/tag/saint-irenee/

     

     

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    1492 : La première "ascension" officielle...

     

    MONT AIGUILLE VERCORS.jpg

    Le Lorrain Antoine de Ville, alors capitaine de Montélimar, atteint le sommet du Mont Aiguille (2097 mètres), dans le massif du Vercors (ci dessous). La mission lui fut confiée par Charles VIII, curieux et impressionné par cette cime étrange que l’on disait "infranchissable".

    Parti avec près de vingt hommes et un notaire,  Antoine de Ville, après avoir accompli le premier véritable exploit montagnard répertorié, prend possession - au nom du roi de France - de cette terre jusqu'alors in explorée, au cœur du royaume, dans le petit pays de Trièves, en Dauphiné. Dans ce vaste terre-plein des hauteurs, il trouve "un beau pré" et une "belle garenne de chamois qui jamais n'en pourront partir", prisonniers qu'ils sont des parois vertigineuses limitant de toutes parts le sommet...

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    1545 : Androuet du Cerceau obtient des Lettres patentes royales
     
     
    Elles lui accordent pour 3 ans une complète protection contre la vente de copies non autorisées de ses "Ouvraiges et figures d'architectes, cornices, moresques, et compartiments".

    On ne possède que très peu de dates sûres concernant Jacques 1er Androuet Du Cerceau (ci dessous), auteur de la première anthologie d'architecture française avec son ouvrage Les Plus Excellents Bastiments de France (1579). Il y décrit et y dessine les plus célèbres châteaux de la Renaissance dont Chambord, Blois, Fontainebleau, les Tuileries, etc...

    Ce travail lui permet de nourrir ses propres recherches théoriques et esthétiques et c'est ainsi qu'il conçoit et propose de nouveaux modèles, de nouveaux plans, de nouveaux espaces, d'une extrême modernité, qui marqueront les siècles suivants.

    Mais, pour tout le reste, c'est un illustre inconnu...

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    De  Guillaume Benoit (sur Evene) :

    "...De Jacques Androuet Du Cerceau on ne sait pas grand-chose, sinon qu'il fut considéré à son époque comme l'un des plus grands architectes français. Mais un architecte sans construction authentifiée... La question a le mérite de plonger dans des abîmes de perplexité. Quelle révolution a pu mener ce créateur pour être reconnu par certains comme "l'inventeur de l'architecture à la française" ? Véritable virtuose, il multiplie les gravures, eaux-fortes et dessins pour représenter les trésors architecturaux historiques.

    Avec son ouvrage Les Plus Excellents Bastiments de France (1579), c'est d'abord un véritable panorama de l'architecture française que dessine, page après page, Androuet Du Cerceau. D'une finesse rare, les traits de l'architecte… (révèlent) les trésors du patrimoine, à l'image des châteaux de Chambord, Blois, Fontainebleau ou des Tuileries qui sont étudiés à travers le regard d'un architecte artiste. C'est là toute la force d'Androuet Du Cerceau qui, lancé à corps perdu dans un inventaire exceptionnel, rétablit les proportions, agrémente les ornementations d'influences originales et impose une exigence nouvelle à l'école française..."

     

    http://fr.structurae.de/persons/data/index.cfm?id=d000159

     

    http://www.richesheures.net/page-general/documents02.htm

           

     

    24 juin,loi d'exil,orléans,du pont de nemours

     

     

    1873 : Naissance d'Alexis Carrel
     
     
    Il reçut le Prix Nobel de Médecine 1912.
              
    alexis carrel.jpg
     
     
     "Certes les êtres humains sont égaux mais les individus ne le sont pas."

    "Le plus grand malheur que la civilisation scientifique a apporté aux hommes est l'oisiveté." - L'Homme, cet inconnu

    "C'est la sélection des détails et non pas leur nombre, qui donne à un portrait sa ressemblance." - L'Homme, cet inconnu

    "Chaque homme est une histoire qui n'est identique à aucune autre." - L'homme, cet inconnu

    "La civilisation a pour but, non pas le progrès de la science et des machines, mais celui de l'homme." - L'Homme, cet inconnu
     
     
    Courte biographie - en anglais -, qui a le mérite de ne présenter "que" les données objectives de sa vie, sans entrer dans le débat toujours biaisé et faussé, chez nous, par la tyrannie du politiquement correct et de la "vérité officielle", issue de 1945 :
     
     
     
     
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    1919 : Signature du Traité de Versailles
     
     
    Dans notre Catégorie Grandes "Une" de L'Action française, voir les deux "Une" suivantes :
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  • Frédéric ROUVILLOIS à Figarovox - ”La réforme territoriale de Hollande : Ubu roi !”

    frederic-rouvillois.jpgFrédéric Rouvillois vient de donner à Figarovox, à propos de la réforme territoriale en projet, un long entretien et fort intéressant que nous publions in extenso

    Figarovox le présente ainsi :

    "Frédéric Rouvillois est professeur de droit public et écrivain. Il a publié de nombreux ouvrages sur l'histoire des idées, notamment L'Invention du progrès, aux origines de la pensée totalitaire (CNRS Éditions, 2010), ainsi que des essais sur la politesse, le snobisme et les institutions, et plus récemment Une histoire des best-sellers (Flammarion, 2011). Son dernier livre Crime et utopie, une nouvelle enquête sur le nazisme, a été publié chez Flammarion."

    Nous ajouterons que Frédéric Rouvillois a donné de nombreux entretiens à l'Action française 2000, qu'il a participé à différents colloques organisés par l'Action française, ainsi qu'à plusieurs assemblées générales de Gens de France. Au cours de l'une d'entre elles, il s'est entretenu avec le prince Jean de France sur « l’action sociale des princes de France ». Le prince avait voulu y montrer que les rois de France, et à leur suite les princes de France jusqu’à aujourd’hui, ont toujours eu pour principal souci l’unité de la société française, qui passe par la solidarité de tous avec tous.

    Globalement, la réflexion de Frédéric Rouvillois sur la régionalisation,  notamment sur le projet gouvernemental actuel - qu'il qualifie d'ubuesque - éclaire la nôtre.

    FIGAROVOX/ENTRETIEN - Pour l'historien Frédéric Rouvillois la réforme territoriale proposée par le président de la République est un charcutage aberrant qui ne tient compte d'aucune réalité historique. Il rappelle les enjeux de la décentralisation.

     

    Figarovox: Vous avez écrit plusieurs ouvrages sur la «décentralisation à la française». La réforme annoncée par François Hollande vous parait-elle aller dans le bon sens?

    Frédéric Rouvillois: Je suis effaré par cette réforme. D'abord, par sa faible utilité: soit on y va vraiment, soit on ne fait rien. Mais ce que je trouve particulièrement révoltant, c'est le degré d'abstraction de ce redécoupage. La lecture de la presse était à ce titre édifiante. Le Monde a titré «Le jour où François Hollande a redessiné la France», comme si ce que l'histoire a fait en des siècles et des siècles, M. François Hollande pouvait le défaire en un jour! Dans Le Monde aussi, on apprend qu'à 16h, la région Centre ne savait pas encore quelle allait être sa taille. Ce n'est pas un redécoupage tracé au fil des siècles, ni même pensé dans une stratégie idéologique, économique ou culturelle, mais une totale improvisation, un charcutage administratif tempéré de magouille électoraliste. On a le sentiment d'un puzzle fait à l'arraché, sans imagination, sans ambition: se contenter de coller des régions existantes, on peut faire ça en 5 minutes! Sans doute est-ce le fruit de cette nouvelle volonté «d'aller vite» pour simuler une capacité à prendre des décisions, comme si l'activisme était un gage d'efficacité!

    4016346818 copie.jpgCette réforme traduit aussi une volonté frappante d'enfumage: en lançant dans le débat public un sujet brûlant, on fait oublier la défaite cuisante des européennes. A ce titre, la réforme territoriale consiste un sujet idéal de diversion, car tout le monde a un avis sur la question, de la taille des régions à leur nom. C'est la perspective du pain et des jeux: pour distraire la «populace» des vrais problèmes économiques et sociaux on lance un redécoupage ubuesque. Cela me parait caractéristique d'un système tyrannique.

    "C'est la perspective du pain et des jeux : pour distraire la « populace » des vrais problèmes économiques et sociaux on lance un redécoupage ubuesque. Cela me parait caractéristique d'un système tyrannique."

    Surtout c'est quelque chose qui va toucher quotidiennement l'existence des gens, leur façon de vivre, sur un plan culturel, économique, industriel. On veut prendre pour modèle, de manière totalement artificielle, ce qui a été fait en Allemagne, en Italie et en Espagne, où les grandes régions correspondent à des réalités historiques très anciennes et très profondes. La Bavière n'a pas été dessinée sur un coin de table par Angela Merkel ! La Catalogne existe depuis 1000 ans! Tant qu'à faire, pourquoi ne pas couper la France en quatre Nord-Sud-Est-Ouest!

    Avec cette réforme territoriale, Hollande qui a toujours ressemblé à Ubu, vient d'être sacré roi.

    La France s'illustre par une forte centralisation. Quelles sont les racines historiques de ce rapport centre/périphérie?

    Le rapport centre/périphérie s'inscrit dans une temporalité longue. Un certain type de centralisation, modérée et pratique, remonte à la reconstruction de l'état central à partir du XIIème et XIIème siècle et va se poursuivre sous les différents rois qui vont chercher à recentraliser le pouvoir et à le soustraire aux féodalités. Je suis en désaccord total avec la thèse de Tocqueville dans l'Ancien régime et la Révolution où il explique que la Révolution française ne fait qu'accompagner un processus de centralisation déjà entamé sous l'ancien Régime, et qu'au fond Robespierre serait l'héritier direct de Louis XIV, de même que les préfets seront considérés plus tard comme les héritiers des intendants de la monarchie.

    En réalité la centralisation d'Ancien Régime reste limitée et relative, elle a un objectif essentiellement pratique: permettre à l'Etat souverain de fonctionner, éliminer des concurrences féodales trop dangereuses. A la fin de l'Ancien Régime il y a encore des dizaines de coutumes différentes qui s'appliquent aux quatre coins du pays, et on laisse beaucoup de pouvoir à la périphérie. A cette centralisation monarchique pratique s'oppose la centralisation jacobine, idéologique et révolutionnaire. Elle est axée sur une construction idéologique, celle de l'Etat nation, fondé sur la théorie du contrat social selon laquelle les individus interchangeables, sortis de l'Etat de nature confèrent l'ensemble de leurs droits à l'Etat central, et à lui seul. Dans cette vision révolutionnaire, il n'y a que deux réalités: l'individu et l'Etat central à qui les individus ont confié leur pouvoir. Tous les autres pouvoirs sont frappés d'illégitimité. Tout le reste n'existe pas, les corps intermédiaires n'ont aucune légitimité, ils ne peuvent être à la limite que les relais de l'Etat dans un système déconcentré. On est dans une perspective inverse à la théorie de la subsidiarité, défendue notamment par l'Eglise catholique et Saint Thomas d'Aquin.

    "A la centralisation monarchique pratique s'oppose la centralisation jacobine, idéologique et révolutionnairen pour laquelle il n'y a que deux réalités : l'individu et l'Etat central à qui les individus ont confié leur pouvoir."

    Concrètement, comment se met en place l'uniformisation caractéristique de cette centralisation idéologique et révolutionnaire?

    L'unité par l'uniformisation est le grand rêve de la Révolution française. D'abord, les révolutionnaires créent de toutes pièces l'idée d'un peuple, unique et abstrait, résultat du contrat social, là où, sous l'Ancien Régime le roi de France disait «mes peuples»: le peuple provençal, le peuple picard, le peuple normand, en faisant allusion à des réalités sociologiques, historiques et culturelles concrètes. Lorsque les révolutionnaires disent le peuple, ils construisent une réalité abstraite composée des citoyens qui ont le droit de vote (les femmes en sont donc exclues). Ensuite la langue: il faut qu'il y ait une coïncidence entre l'outil de communication et le peuple souverain. Il faut donc exterminer les patois, résidus du passé comme le propose l'Abbé Grégoire dans son Rapport sur la nécessité et les moyens d'anéantir les patois et d'universaliser l'usage de la langue française présenté à la Convention en 1794. Cela passe enfin par une structure administrative uniforme: les communes

    "L'unité par l'uniformisation est le grand rêve de la Révolution française"

    qui remplacent les anciennes paroisses et les départements créés ex nihilo sans aucune réalité historique qui suppriment les anciennes provinces d'Ancien Régime. On remplace des réalités anciennes par des abstractions nouvelles, pour faire oublier le passé. Cette uniformisation administrative s'accompagne d'une unification du droit: la Loi est sacralisée et vient supprimer les anciennes coutumes.

    Alors que la centralisation d'Ancien Régime était modérée et relative et laissait place à une démocratie locale importante, la centralisation révolutionnaire et napoléonienne est absolutiste. Elle atteint son apogée avec Bonaparte qui conjugue la centralisation pratique à la centralisation idéologique pour aboutir à une centralisation totale, aboutie, extrêmement dure, celle des lois de l'an VIII, avec un système administratif pyramidal dominé par les préfets qui rendent compte directement au pouvoir central.

    Faut-il vraiment considérer cette centralisation excessive comme un «mal français»? Ne faut-il pas plutôt y voir une chance qui a permis l'unité de notre pays et fait sa force?

    La France de Louis XIV était-elle un petit pays sans perspectives et sans puissance? C'était pourtant un Etat beaucoup plus décentralisé que celui de Napoléon…

    Certes. Mais à l'heure où la nation française est remise en cause par le haut par la construction européenne et la mondialisation, et par le bas par les revendications communautaristes et localistes, la décentralisation n'est-elle pas un moyen de plus de la fragiliser?

    La décentralisation peut être éventuellement dangereuse dans un certain contexte politique qui est le nôtre. Peut-être faut-il réfléchir à l'inverse: si la France est tellement faible et inconsistante qu'il suffit d'une modification administrative pour la faire éclater, c'est que le problème est ailleurs. D'ailleurs, si la centralisation est très ancienne, la volonté de décentraliser l'est aussi. On n'a pas attendu les années 1980 pour mettre en place la décentralisation: sous la Restauration, tout un programme de décentralisation est pensé, notamment à droite chez les ultra-royalistes mais aussi chez les libéraux (Tocqueville, Constant, Guizot).

    C'est étonnant d'ailleurs, car si la tradition décentralisatrice s'inscrit plutôt dans le cadre de la pensée de droite, elle

  • La Nouvelle Revue Universelle publie les Actes du colloque « Pour un nouveau régime »

     

    PAR CHRISTIAN FRANCHET D’ESPEREY

     

    066.jpgIl y a un an – c’était le 6 décembre 2014 – se tenait, salle Rossini à Paris, le premier colloque du Cercle Vauban. « Vauban I Â» en quelque sorte… comme on dirait d’un concile ! À ses trois cents participants, il a laissé un souvenir marquant. Son programme s’était donné un air de slogan : « Pour un nouveau régime Â». Mais, précédant cet appel au changement de système, et au fil d’une suite serrée d’interventions, on put y assister à une rigoureuse démonstration : non seulement la France était en voie de décomposition, « en lambeaux Â», mais elle était politiquement dans une impasse, le régime se révélant incapable de remettre en cause ses propres bases. Pas d’autre issue, donc, qu’un bouleversement politique radical. 

    Un an plus tard, diagnostic et remède – s’en étonnera-t-on ? – n’ont pas pris une ride. Et leur évidence ne fait pas un pli… C’est pourquoi le Cercle Vauban a décidé de pérenniser sur le papier ce moment privilégié de vérité politique qu’a été son premier colloque en demandant à la Nouvelle Revue universelle de lui consacrer un numéro entier. 

    Les Actes de « Vauban I Â» : un instrument de travail et un message particulier à transmettre.   

    En publiant les Actes de « Vauban I Â», le Cercle Vauban n’entend évidemment pas s’accorder un brevet d’autosatisfaction. Son intention est de proposer un instrument de travail qui explicite où se situe l’axe central de sa réflexion. Dans l’ensemble de notre paysage politique et culturel, les objectifs qu’il s’est fixé présentent en effet, un caractère tout à fait spécifique. Sans du tout contredire les diverses et souvent superbes initiatives prises ailleurs – mouvements, associations et lieux de réflexion ou de formation animés par le même esprit de révolte, surtout depuis le succès de la Manif pour tous –, le Cercle Vauban est convaincu d’avoir un message particulier à transmettre. 

    Il vise tous ceux pour qui l’amour de la France est d’abord un sentiment inné, spontané, sorti du cœur, mais aussi une perception raisonnée, fondée sur l’héritage reçu, l’éducation, l’expérience et la culture. De son histoire millénaire, la France a, Dieu soit loué, hérité des reins solides. Il en fallait pour résister à des gouvernements qui, depuis des décennies, suscitent un esprit de guerre civile permanente allant jusqu’aux guerres de religion déclenchées par un laïcisme fanatique ; qui, de 1870 à 1940, ont en moins de 70 ans  provoqué trois invasions de la France ; qui, en Algérie, ont engagé une guerre gagnée militairement et perdue politiquement ; qui ont sacrifié l’indépendance et la prospérité nationales à des chimères pseudo-européennes et mondialiseuses ; qui ont laissé s’installer sur le territoire des populations entières dans des conditions suicidaires avec les conséquences dramatiques que l’on connaît aujourd’hui ; qui, enfin, à bout d’idées nocives, en viennent à vouloir liquider, en toute inconscience, les fondements même de notre culture et de notre civilisation. 

    Avec l’offensive contre l’institution conjugale, par cette trop fameuse loi Taubira issue d’un lobby au pouvoir d’influence inversement proportionnel à son importance numérique, la spirale du déclin paraissait en effet sans appel. Pour beaucoup, la France semblait en voie de dissolution inéluctable. Penser la disparition de la France, disait Bainville, serait impie, mais pas absurde. Nous y étions… 

    C’est alors qu’a surgi le Printemps 2013 ! Divine surprise, printemps de grâce, jaillissement inespéré d’un renouveau, la France de toujours descendait dans la rue pour crier son refus de mourir. Ces foules joyeuses, familiales, détendues, ces jeunes de tous âges, sans haine mais déterminés, ont révélé à la face du monde que la France pouvait encore se tenir debout, crier sa révolte et son indignation. Révolte vraie, authentique indignation qui ne devaient rien aux boursouflures d’un système médiatique aligné, aseptisé, robotisé. 

    La déception qui suivit fut cruelle. La loi scélérate, dénoncée et rejetée par le déferlement populaire, aurait dû être révisée, ou retirée, comme Mitterrand l’avait fait pour l’école en 1984. On sait qu’il n’en a rien été. S’arc-boutant sur deux piliers qu’il contrôlait l’un et l’autre, la force policière et l’institution parlementaire, le pouvoir est passé en force. Assumant cyniquement l’image d’un nouveau totalitarisme.     

    Réforme des institutions et réforme intellectuelle et morale vont de pair

    Tout ceci, direz-vous, est bien connu. Oui. Mais ce rappel est l’occasion de discerner ce que le caractère extrême de la situation de 2013 a ouvertement révélé. Est apparue d’une manière éclatante cette réalité demeurée, en général, latente : sous couvert d’une alternance droite/gauche d’apparence, un pouvoir qui sacrifie délibérément le bien commun aux intérêts particuliers qu’il sert peut parvenir à rester indéfiniment aux commandes. Et donc à assurer indéfiniment le blocage de toute réforme profonde, qu’elle concerne la famille, l’enseignement, la monnaie, la politique européenne, la défense ou les problèmes sociétaux. Pour assurer la continuité de ce monopole et de cette capacité de blocage, le pouvoir doit systématiquement empêcher toute remise en cause des institutions qui en garantissent le maintien. Tous ses efforts et toute son habileté consistent à préserver le système institutionnel de tout risque de transformation en profondeur qui ouvrirait la porte à l’indispensable réforme intellectuelle et morale. 

    C’est ce goulot d’étranglement sur la voie de notre salut, pas toujours clairement perçu, que le Cercle Vauban entend mettre en pleine lumière. 

    Que l’on ne s’y trompe pas. Il ne s’agit pas du tout de renoncer à rappeler la nécessité d’une réforme intellectuelle et morale. Les racines de la société française, aujourd’hui négligées, oubliées ou bafouées, la fonction des corps intermédiaires et le respect du principe de subsidiarité, le rôle du spirituel et de la religion dans notre équilibre politique, économique et social ou encore la place centrale du bien commun dans notre vie collective, ne quittent pas un instant le champ de nos préoccupations. 

    En réalité, réforme des institutions et réforme intellectuelle et morale sont indissolublement liées. Mais l’une doit-elle passer avant l’autre ? Éternelle question de l’œuf et de la poule. Dans l’univers marxiste, Gramsci l’avait tranchée en privilégiant la conquête des esprits, la prise de pouvoir culturelle, sans d’ailleurs parvenir à prouver une plus grande efficacité de sa méthode pour faire la révolution. 

    Certains de nos amis se demandent s’il n’y a pas du bon grain à y prendre pour servir notre propre cause. Ils ont sûrement raison d’y réfléchir, la question est importante. Le Cercle Vauban, pour sa part, est convaincu que de reconnaître la priorité pratique conférée au combat institutionnel n’obère en rien l’indispensable retournement de l’esprit public dans le sens du droit naturel et du souci primordial du bien commun : le « politique d’abord Â» n’a jamais rien signifié d’autre et, par la diversité de ses travaux, le Cercle Vauban prouve qu’il est le dernier à l’oublier. 

    Mais en France, dans les conditions présentes, l’expérience montre que c’est par la voie politico-institutionnelle que le mal – le mal français dénoncé dans la conclusion du colloque – s’est imposé. Et c’est par la même voie qu’il perpétue son emprise. Notre tâche est de le faire comprendre, et de le dénoncer, avec tous les moyens que nous sommes en mesure de mobiliser. 

    « Être (ou ne pas être) républicains »

    En pleine Révolution, découvrant la « république Â», les Français ont pu croire à un avenir limpide, le principe de base du « nouveau régime Â» semblant transparent : tout le pouvoir au peuple. C’est-à-dire à nous tous. À nous tous ? Est-ce à dire à chacun de nous ? Difficile question, inauguratrice d’une réflexion sans fin ni fond sur la nature de la démocratie. On y tombe sur des apories comme celle-ci : si le peuple choisit la dictature, la situation est-elle démocratique ? Aporie, certes, mais devenue une effrayante réalité : elle a mis le feu au XXe siècle, celui des camps de la mort et du goulag. 

    D’ailleurs, on l’a souvent noté, quand on parle de l’Ancien Régime, on sait ce que c’est, mais on serait bien en peine de dire ce qu’est le « nouveau régime Â». Depuis plus de deux cents ans, la France est à sa recherche. Dans une vieille chanson de notre folklore, la « femme du roulier Â» – les plus jeunes la découvriront sans peine sur Internet –, l’héroïne « cherche son mari de taverne en taverne, avec une lanterne Â»â€¦ Ainsi la République va-t-elle, les droits de l’homme à la main, à la recherche de la formule la mieux adaptée à ses « valeurs Â» du moment. Ses changements de numéro, IIIe, IVe, Ve, liés aux vicissitudes de l’histoire, ne traduisent aucune réalité de fond. On a vu, sous le même numéro, les situations les plus opposées : par temps d’orages (Clemenceau en 1917, de Gaulle en 1961), le rêve démocratique suspend son vol, le temps de sauver la République… Aujourd’hui, avec le quinquennat, nous sommes dans une VIe République de fait qui n’a jamais osé dire son nom. Et ceux qui réclament ouvertement une VIe République ne veulent rien d’autre qu’un retour à la IVe… D’ailleurs, à toutes les époques de turbulences et de violences latentes, les constitutions ont été soumises à des sollicitations plus ou moins brutales, voire à des viols répétitifs. Et même… en réunion. C’est Jacques Perret qui qualifiait la constitution de la Ve de marie couche-toi là ! 

    Aujourd’hui, rien n’est plus banal que de modifier la Constitution. À la manière des poupées Barbie, on peut l’habiller au gré des utilités ou des toquades du moment. Des deux procédures prévues, la plus « démocratique Â» – la voie référendaire – est tombée en désuétude car suspectée de servir la cause « populiste Â». On disait naguère de Giscard d’Estaing : son problème, c’est le peuple. Cela concerne maintenant tous les politiciens de l’oligarchie dominante. Leur problème, c’est le peuple… donc, exit le référendum. 

    Heureusement, il reste une autre procédure, celle qui permet de rester entre soi : la réunion de l’Assemblée nationale et du Sénat en Congrès. Il suffit de parvenir à y réunir une majorité. Les sujets les moins propres à figurer dans une charte institutionnelle, pour peu qu’ils correspondent aux dernières lubies des lobbys, peuvent dès lors devenir prétexte à révision. 

    La constitution se voit donc désacralisée au moment où s’impose une nouvelle sacralisation, celle des « valeurs de la République Â» et des nouveaux fétiches sociaux ou sociétaux comme la non-discrimination ou le droit à disposer de son corps. Une nouvelle sacralisation, soit dit en passant, parfaitement discriminatrice à l’égard de certains droits comme le droit à la vie, mais ceci est une autre histoire. Il demeure que la sacralisation du pouvoir, en France, a toujours eu pour objet de préserver l’intégrité de l’autorité mise au service du bien commun. C’est précisément cela que l’on désacralise aujourd’hui. 

    On ne doit cependant pas se dissimuler cette réalité de fait : aussi discréditées qu’elles soient, ces institutions demeurent un efficace instrument entre les mains de ceux dont l’intérêt est de bloquer tout espoir de les réformer en profondeur. Par une obscure conscience de se voir condamné par ses propres contradictions, le système a de lui-même organisé son caractère inamendable. 

    L’objectif de fond, essentiel, unique, est de conserver aux partis leur mainmise sur la vie politique. Mainmise sur les élections à tous les niveaux : les Français sont contraints à choisir leurs représentants locaux, régionaux ou nationaux selon des critères essentiellement partisans – et l’élection présidentielle elle-même n’a pas échappé longtemps à cette calamité. C’est là le point essentiel sur lequel nous devons porter le fer. 

    Le colloque Pour un nouveau régime : un essai de démonstration

    Le colloque Pour un nouveau régime n’a pas été, on l’a compris, de ces colloques universitaires où chaque intervenant est essentiellement attaché à développer ses idées personnelles sur le sujet de sa spécialité, ou à faire la promotion – sûrement justifiée ! – de son dernier livre. 

    Ici, au contraire, les interventions successives se sont enchaînées selon une logique rigoureuse et bien perçue par tous, dans le but d’en dégager une irrécusable démonstration.Le fil en est clair : la France est « en lambeaux Â», l’évocation de quelques grands sujets suffit à en apporter la preuve ; on ne sortira pas de cette situation en se bornant à vouloir régler chaque problème isolément : il faut une politique d’ensemble, et donc un gouvernement qui se mette au service exclusif du bien commun, ce qui implique un changement radical de régime politique. La première partie a déroulé d’une manière rigoureusement démonstrative l’ardente nécessité d’un changement de régime. Et la seconde a exposé les quelques principes de base nécessaires au développement durable d’un nouveau régime. 

    Telle a été la démarche collective de nos intervenants. Ce qui ne signifie pas qu’ils aient fait abstraction de leur personnalité, il eût été difficile d’attendre cela d’eux. Chacun a donné sa propre vision du sujet qui lui était proposé – mais, on le constatera, loin de nuire à la force de la démonstration, cette diversité a contribué à l’enrichir. 

    Les huit intervenants du colloque Pour un nouveau régime

    Il est temps, maintenant de laisser la place aux Actes du Colloque Vauban I. C’est-à-dire de laisser s’exprimer nos huit intervenants : par ordre d’entrée en scène, Frédéric Rouvillois, Jacques Trémolet de Villers, François Reloujac, Fabrice Hadjadj, Jean-Baptiste Donnier, Marie-Pauline Deswarte, Pierre Chalvidan et Axel Tisserand. 

    Grâce à eux, de simple petit groupe de réflexion qu’il était au départ, voilà le Cercle Vauban devenu force de proposition, et appelé Ã

  • L’épidémie de Coronavirus est-elle en réalité une guerre contre les peuples ? (Partie I), par Oli­vier Tournafond.

    Pro­fes­seur à l’Université de Paris XII

    Notre ami, le pro­fes­seur Tour­na­fond vient de don­ner une confé­rence à Mos­cou, sur   les ori­gines et la réa­li­té de la pan­dé­mie Covid 19 et pro­pose quelques éclai­rages sur ce qui semblent être des inten­tions cachées qui dépassent les États et qui engagent une trans­for­ma­tion pro­fonde de notre socié­té. Nous publie­rons cette confé­rence en deux par­ties. (NDLR)

    Col­loque inter­net à Mos­cou le 22 avril 2021

    Intro­duc­tion :

    L’épidémie actuelle n’est pas la pre­mière dans l’histoire de l’humanité : ces der­nières ont été légion :  peste noire, cho­lé­ra, grippe « espa­gnole », grippe asia­tique, grippe de Hong-Kong (1969), Grippe H1 N1, etc…etc…Mais cette épi­dé­mie a eu un impact poli­tique majeur et pla­né­taire qui risque de se pour­suivre plu­sieurs années.

    D’où une ques­tion, consi­dé­rée comme « com­plo­tiste » par les gou­ver­ne­ments et les grands médias, mais qui n’en demeure pas moins récurrente :

    « Cette crise est-elle une vraie crise sani­taire ou ne serait-elle qu’une habile mise en scène cachant une véri­table guerre contre les peuples ? »

    On ne peut pas se conten­ter de balayer la ques­tion d’un revers de main comme le font les ins­tances offi­cielles et les médias « mains­tream ». Elle mérite une ana­lyse scientifique…

    On ajou­te­ra que l’accusation de « com­plo­tisme » n’est que l’argument déri­soire de ceux qui n’ont pas d’arguments. Le com­plo­tiste au sens propre est celui qui croit avoir décou­vert un complot…Il n’est pas un com­plo­teur, mais ce que l’on appel­le­rait aujourd’hui un « lan­ceur d’alerte ». Par­fois le com­plo­tiste n’est qu’un para­noïaque qui ima­gine des com­plots ima­gi­naires comme le pré­ten­du com­plot « judéo-maçon­nique »… Mais quelque fois aus­si il dénonce une véri­table conju­ra­tion…Rap­pe­lons-nous la « Conju­ra­tion de Cati­li­na » à l’époque de Cicé­ron ou celle de la « Cagoule » en France avant la seconde guerre mon­diale. A tous les moments de l’histoire il y a eu des complots…

                L’histoire des hommes étant rem­plie de com­plots en tous genres depuis la plus haute Anti­qui­té, il y a tou­jours eu aus­si des « com­plo­tistes » pour soup­çon­ner les « comploteurs ».

                Par­fois d’ailleurs le com­plo­tiste est certes un para­noïaque, mais il a néan­moins détec­té une ano­ma­lie pas­sée inaper­çue aux yeux de tous …Il lui attri­bue seule­ment une cause fan­tai­siste ou déli­rante : un com­plot extra­ter­restre, juif, néo-nazi, russe, chi­nois, mon­dia­liste, etc, qui n’a aucune exis­tence réelle. Mais les faits qui lui servent de base existent néanmoins…

    La ques­tion actuel­le­ment posée est donc de savoir si la crise sani­taire pla­né­taire que nous tra­ver­sons est une véri­table épi­dé­mie à l’instar de celles du pas­sé ou bien si elle est avant tout une mise en scène orches­trée dans le cadre d’un « Com­plot mon­dia­liste » et d’une guerre sou­ter­raine contre les peuples et les nations.

    Nous allons voir que la ques­tion n’est pas si absurde que cer­tains le pré­tendent (I) et que l’on peut ten­ter d’y appor­ter des élé­ments de réponse sans pou­voir aller au-delà pour l’instant (II).

    I./ Une ques­tion qui mérite d’être trai­tée sérieusement :

                Un cer­tain nombre d’anomalies fla­grantes et de bizar­re­ries incom­pré­hen­sibles dans cette épi­dé­mie rendent la ques­tion légi­time, tant en ce qui concerne l’apparition du virus (A) que la ges­tion de la crise par les dif­fé­rents gou­ver­ne­ments (B).

                A) Un virus dont l’origine reste énigmatique.

    Dès le début de la crise en avril 2020, le Bri­ga­dier-Géné­ral Droz qui est l’un des chefs de l’armée suisse avait décla­ré : « Si quelqu’un avait vou­lu désta­bi­li­ser les démo­cra­ties occi­den­tales il ne s’y serait pas pris autre­ment ». Ce n’est qu’une remarque ano­dine, mais elle contient en germe une inter­ro­ga­tion qui va plus loin, sur­tout lorsque l’on connaît l’extrême qua­li­té et le pro­fes­sion­na­lisme de l’armée suisse et de son état-major qui ne parle pas à tort et à travers…

    1) Ori­gine : La thèse offi­cielle des médias a long­temps été celle du mariage incer­tain d’une chauve-sou­ris un d’un pan­go­lin dont le virus aurait conta­mi­né le mar­ché au pois­son de Wuhan point de départ de l’épidémie.

    Mais d’autres cher­cheurs n’excluent pas l’hypothèse sui­vant laquelle le virus se serait échap­pé du Labo­ra­toire bac­té­rio­lo­gique P4 situé jus­te­ment à 1600 mètres de ce mar­ché… Le virus y était étu­dié et pas mal de scien­ti­fiques de haut niveau estiment même que sa confec­tion pour­rait être arti­fi­cielle. Telle est l’opinion en France du doc­teur Godeau qui fut direc­teur de recherches à l’Inserm et de la célèbre géné­ti­cienne Alexan­dra Hen­rion-Caude. Le Pro­fes­seur Etienne Decro­ly écri­vait éga­le­ment fin 2020 dans la revue du CNRS que depuis 2010 beau­coup de labo­ra­toires bac­té­rio­lo­giques étaient en mesure de créer de tels virus en appor­tant des « gains de fonc­tion » et des « gains de vira­li­té » à des virus existants.

    D’où la ques­tion : com­ment le virus serait-il alors sor­ti du labo­ra­toire ? Est-ce un acci­dent lié à une mau­vaise appli­ca­tion des règles de sécu­ri­té, un « Tcher­no­byl chi­nois » en quelque sorte ? Ou bien une mise en cir­cu­la­tion volon­taire, ce qui ren­ver­rait à un acte cri­mi­nel pre­nant place dans un pro­jet machia­vé­lique global ?

    Comme le dit le doc­teur Godeau : « Il y a pro­ba­ble­ment eu homi­cide. La ques­tion est de savoir s’il a été invo­lon­taire ou volon­taire ? » La ques­tion nous place ici au cœur du sujet…

    2) Date d’apparition : Si l’origine du virus reste donc contro­ver­sée, la date réelle de son appa­ri­tion l’est aus­si puisque des cas assez nom­breux ont été signa­lés à l’automne 2020 tant en Chine à l’occasion des jeux olym­piques mili­taires, qu’en Europe…Une simu­la­tion « Event 201 » sur le thème d’une épi­dé­mie de Coro­na­vi­rus a même été orga­ni­sée par un cer­tain nombre d’institutions mon­dia­li­sées en octobre 2020 à New York. Y par­ti­ci­paient la Fon­da­tion Bill & Melin­da Gates et le Forum Eco­no­mique de Davos…

    Tout cela ali­mente l’accusation d’un com­plot mon­dia­liste où serait impli­qué des ins­ti­tu­tions et des mil­liar­daires comme Georges Soros, Bill Gates, l’OMS ou des ins­ti­tu­tions telle le forum éco­no­mique de Davos…Certains les accusent d’avoir pro­vo­qué cette crise en vue d’organiser la fin des nations, un « Great Reset » mon­dial qui est d’ailleurs le titre de l’ouvrage de Klaus Schwab le Pré­sident du Forum Eco­no­mique de Davos paru à l’été 2020) et le pas­sage à une socié­té de contrôle numé­rique des individus.

    Bref une « guerre contre les peuples » …

    B) Une ges­tion de la crise étrange, sou­vent inco­hé­rente, par­fois suspecte :

    Au prin­temps 2020 les sombres pré­vi­sions de Neil Fer­gus­son de l’Impérial Col­lèges de Londres annon­çaient une héca­tombe pla­né­taire de plu­sieurs cen­taines de mil­lions de morts, donc une épi­dé­mie capable comme par le pas­sé de déci­mer une par­tie de l’humanité. D’où les mesures de dic­ta­tures sani­taires dra­co­niennes qui ont été impo­sées à peu près par­tout dans le monde avec l’assentiment des popu­la­tions terrorisées…

    Mais au bout de quelques mois il est appa­ru que le virus n’était pas si effroyable que cela.  Que sa mor­ta­li­té était ana­logue de celle d’une mau­vaise grippe pan­dé­mique comme le fut la grippe de Hong-Kong en 1969 avec une mor­ta­li­té située entre 0,3% et 1% sui­vant les endroits et les moments. Qu’en outre elle concer­nait presque exclu­si­ve­ment les per­sonnes de plus de 60 ans ; les patients de plus 85 ans ou atteints de comor­bi­di­tés repré­sentent en France plus de la moi­tié des morts !

    On s’est en outre très vite ren­du compte, par la voix d’éminents cher­cheurs comme le Pro­fes­seur Raoult ou le Pro­fes­seur Per­rone en France, que des trai­te­ments éprou­vés per­met­taient de réduire signi­fi­ca­ti­ve­ment la mor­ta­li­té s’ils étaient admi­nis­trés dès les pre­miers symp­tômes : Hydroxy­chlo­ro­quine, Azi­tro­mi­cyne, Iver­mec­tine, vita­mines C & D, Zinc, anti­coa­gu­lants, etc…

    Enfin la sur­mor­ta­li­té de l’année 2020 a sou­vent été exa­gé­rée par les médias, les gou­ver­ne­ments et les ins­ti­tuts de sta­tis­tiques en omet­tant de tenir compte de l’accroissement natu­rel des classes d’âges très éle­vées, consé­quence du vieillis­se­ment de la popu­la­tion occidentale.

    Or au lieu d’avoir un débat public et scien­ti­fique digne d’un Etat de droit, qui se veut en outre « démo­cra­tique », les gou­ver­ne­ments ont adop­té pen­dant des mois et des mois des mesures dis­cu­tables, contro­ver­sées, archaïques, inutiles ou fran­che­ment nuisibles :

    - Mesures poli­cières de contrôle social pié­ti­nant les liber­tés indi­vi­duelles comme les confi­ne­ments, les inter­dic­tions de dépla­ce­ments et les couvre feux, alors que ces mesures sont sou­vent inutiles voire par­fai­te­ment contre-pro­duc­tives ain­si que l’ont rele­vé plu­sieurs études scien­ti­fiques comme celle du Pro­fes­seur Tous­saint en France ou celle du Pro­fes­seur Joan­ni­dis de l’université de Stantford…

    - Mise à l’arrêt déli­bé­rée d’une grande par­tie de l’économie au risque de pro­vo­quer une crise éco­no­mique bien pire encore que la crise sanitaire.

    - Inter­dic­tion des trai­te­ments exis­tants, en par­ti­cu­lier l’hydroxichloroquine.

    - Atteinte à la liber­té de pres­crip­tion des méde­cins dans plu­sieurs Etats dont la France.

    - Dégra­da­tion dans cer­tains Etats comme la France des capa­ci­tés hos­pi­ta­lières et finan­cières du ser­vice de san­té à un tel point que tout épi­sode viral qui dépasse la moyenne satu­re­ra immé­dia­te­ment les ser­vices d’urgence et de réanimation.

    - Mise sur le mar­ché à grands frais de trai­te­ments dan­ge­reux et inef­fi­caces comme le Rem­dé­si­vir que l’on soup­çonne d’avoir favo­ri­sé l’apparition des variants

    - Volon­té d’imposer à la tota­li­té de la popu­la­tion une vac­ci­na­tion de masse alors que la thé­ra­pie génique de ces vac­cins reste encore lar­ge­ment expé­ri­men­tale et qui ni leur effi­ca­ci­té, ni leur inno­cui­té à long terme ne sont connus…Tel est le cas notam­ment en Ita­lie, en Israël et dans cer­taines pro­vinces de l’Espagne…

    - Pro­jet de contrôle total sur les popu­la­tions ins­pi­ré des méthodes de la Chine com­mu­niste en par­ti­cu­lier par la mise en place d’un « Pas­se­port Vac­ci­nal » numérique.

    - Men­songes et fal­si­fi­ca­tions per­ma­nents éma­nant des gou­ver­ne­ments impliqués…

    Toutes ces dérives bien réelles ont puis­sam­ment ali­men­té dans les opi­nions publiques mon­diales l’idée qu’il n’y avait qu’une « pseu­do-épi­dé­mie » cachant en réa­li­té un vrai com­plot mon­dia­liste. Un com­plot des­ti­né à réduire les peuples en escla­vages, une véri­table guerre sou­ter­raine contre les peuples et les nations…C’est le thème du film « Hold-Up » qui a connu en France une large dif­fu­sion et un suc­cès non négligeable.

    Ce sen­ti­ment d’être entré dans une sorte de IIIeme Guerre Mon­diale contre les peuples a été encore accru par la révé­la­tion d’innombrables et incroyables conflits d’intérêts entre les admi­nis­tra­tions,  les gou­ver­ne­ments occi­den­taux, les ins­ti­tu­tions inter­na­tio­nales comme l’OMS ou le Forum Eco­no­mique de Davos, l’industrie phar­ma­ceu­tique connue sous le nom de « Big Phar­ma » (Giléad, Pfi­zer, Moder­na, Astra-Zéné­ca, etc…) et un cer­tain nombre de puis­sances capi­ta­listes pri­vées comme la Fon­da­tions Bill et Melin­da Gates ou l’Open Socie­ty de Georges Soros.

    Un uni­ver­si­taire gene­vois spé­cia­liste de l’anthropologie de la san­té, le pro­fes­seur Jean-Domi­nique Michel, constate que les Etats démo­cra­tiques occi­den­taux connaissent une véri­table « cor­rup­tion sys­té­mique », elle-même liée au fonc­tion­ne­ment de la démo­cra­tie par­le­men­taire. Ce point inté­res­sant nous ren­voie aux per­ti­nentes ana­lyses que votre grand socio­logue russe, Ser­gueï Kara-Mour­za, a consa­cré à ce régime poli­tique dans son ouvrage « La mani­pu­la­tion des consciences ».

                Ces innom­brables liens d’intérêts ont contri­bué à accré­di­ter la thèse du Grand Com­plot Mon­dial contre les peuples et d’une guerre mon­diale contre les nations… Il nous faut voire main­te­nant si ce pré­ten­du com­plot et cette guerre ont une exis­tence réelle. (A suivre)

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

  • Notre feuilleton : Une visite chez Charles Maurras (78)

    (retrouvez l'intégralité des textes et documents de cette visite, sous sa forme de feuilleton ou bien sous sa forme d'Album)

     

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    Aujourd'hui : À l'Académie française, Henri Bordeaux répond à Charles Maurras, qui vient de prononcer son discours de réception...

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    En 1952, Henry Bordeaux intervient, avec Maxime Réal del Sarte, auprès du Président de la République, Vincent Auriol, et obtient la grâce médicale pour Charles Maurras...

    "...Je suis fier d'avoir contribué à la liberté qui lui a été rendue - une liberté de sept mois après sept années d'injuste emprisonnement, car il est mort libre dans cette Touraine, coeur de la France qu'il a tant aimée..."

    Lorsque Maurras fut élu à l'Académie, et prononça son traditionnel Discours de réception, ce fut Henry Bordeaux qui, après lui, répondit à ce disours :



    Réponse au discours de réception de Charles Maurras
    Le 8 juin 1939
    Henry BORDEAUX

    Réception de M. Charles Maurras
    Monsieur,

    Le roi Louis XIV, dont vous avez en quelques pages tracé un magnifique portrait politique, le Roi-Soleil qui fut notre protecteur après Richelieu, manda un jour à Versailles certain abbé de Caumartin qui était alors directeur de notre Compagnie et il le morigéna vertement. Quelle faute le malheureux avait-il donc commise ? Il s’était permis de mal accueillir au Louvre, siège, avant cette Coupole, de nos réceptions, le nouvel élu, Mgr de Clermont-Tonnerre, évêque de Noyon. J’espère ne pas être appelé à l’Élysée par notre libéral protecteur actuel pour vous avoir distribué des louanges insuffisantes.

    D’Alembert, ratifiant le verdict royal, assure que l’orateur de l’Académie est voué et même condamné à l’éloge, comme le récipiendaire à la modestie et la timidité. Sans accepter cette condamnation qui exclurait une liberté dont nous revendiquons les privilèges, tempérés par la courtoisie, je ne serais gêné, pour vous accueillir, que par ma vieille et fidèle amitié. Elle est née, cette amitié, au pays latin où je vous rencontrais, mon aîné de peu d’années, au café Vachette en compagnie du poète Jean Moréas, célèbre déjà parmi nous, ou chez l’aimable et fringant Lionel des Rieux qui habitait dans le voisinage de la Sûreté générale et nous offrait des orgies de poésie d’où nous ne sortions guère qu’à trois ou quatre heures du matin, et par la fenêtre afin de ne point contrister le concierge. Je me hâte d’ajouter que notre hôte logeait au rez-de-chaussée.

    Jean Moréas, Lionel des Rieux, ne devais-je pas commencer ma réponse par ce rappel de votre jeunesse ? L’un, venu de Grèce pour vous faire plaisir et aussi pour enrichir notre patrimoine littéraire, l’autre dont vous avez célébré la mort héroïque dans la guerre et qui, dans le comte d’Orange, paraphrasant sans le savoir la formule de Maurice Barrès : « Nous sommes les instants d’une chose immortelle », écrivait ce vers digne de servir d’épigraphe à l’histoire de France :

    Tous nos êtres changeants font un peuple éternel.

    Tandis que vous hantait la poésie avant la politique, Henri-Robert, dont vous venez de prononcer le panégyrique avec une telle puissance d’évocation que nous avons cru le revoir quelques instants parmi nous, remportait ses triomphes oratoires dans ce Palais de Justice que vous ne fréquentiez pas encore pour votre compte personnel. Plus d’une fois j’ai connu la joie de l’entendre. Toujours il a mis des visages sur les dossiers, sur les chiffres, sur les mots, sur les idées. Il ne plaidait pas abstrait, il concrétait et à travers les faits on pénétrait plus avant dans le cœur des hommes. Sa manière, vous l’avez dit, c’était la tactique napoléonienne : il s’acharnait sur les points faibles et tout cédait. Il déployait ses arguments en ordre serré, jamais en ordre dispersé, et c’était la charge menée à une cadence prévue, soudaine, rapide, irrésistible.

    À mesure que l’âge venait, se reconnaissait son travail de ciselure à plus de hauteur de vues, à plus de sérénité. Il dominait sa matière. Il revêtait, avec l’auréole du prestige et des honneurs, une sorte de majesté.

    J’ai assisté à ce procès de Maubeuge dont vous avez souligné l’importance. Le général Fournier comparaissait devant le Conseil de guerre pour y répondre de la reddition de la place. Henri-Robert commença par un coup de maître : il vint s’asseoir à côté de son client. Son client, un petit homme blanc, d’un aspect si honnête, si consciencieux, mais si douloureux. Et tout de suite l’avocat eut cet art de le relever à ses propres yeux, de ne pas le laisser au rang des accusés, de le porter sur le même plan que l’assemblée des généraux appelés à le juger. Maubeuge n’était tombée que le 7 septembre. Maubeuge avait donc pris sa place dans le commencement de la bataille de la Marne en maintenant devant elle jusque là le corps d’armée qui l’assiégeait, et le maréchal Joffre l’avait déclaré. J’entends encore la voix incisive et musicale d’Henri-Robert, volontairement sans éclat, déclarer que le général Fournier réclamait à ses juges de pas lui enlever l’honneur sans quoi l’on ne peut vivre.

    — Prenez garde, ajouta-t-il. Vous êtes les bleu horizon qui allez juger les pantalons rouges. Votre expérience, à vous qui êtes les vainqueurs, n’est-elle pas faite des erreurs des autres ?

    Et j’entendis le président, cet admirable général Maistre qui, vainqueur de la plus parfaite bataille de la guerre, la Malmaison, était resté le plus modeste des chefs, murmurer à mi-voix :

    — Et des nôtres...

    Dans sa péroraison, Me Henri-Robert, rappelant que l’Allemagne vaincue n’avait pas cessé d’honorer ses Hindenburg et ses Ludendorf, demanda simplement aux juges de ne pas diminuer notre victoire en frappant des hommes entravés dans l’accomplissement de leur devoir par les instruments imparfaits qu’ils tenaient de notre imprévoyance politique.

    Ce fut peut-être la plus belle plaidoirie de celui qui en prononça tant d’émouvantes et qui connut tous les succès.

    Nous le vîmes plus tard chez nous ennobli par la plus redoutable épreuve. Frappé dans sa vue, il refusa d’abdiquer. Jamais on ne l’entendit se plaindre. Il écartait la compassion. Il prenait au contraire cette noblesse d’allure que le malheur communique à ceux qui l’acceptent et en l’acceptant le dominent. Tranquillement, il se contenta de modifier ses méthodes de travail. Le dévouement de ses secrétaires et le développement de sa mémoire lui permettaient de s’emparer de la lecture des pièces et, avec les conversations directes des clients, il composait ses plaidoiries où l’on ne pouvait relever nulle défaillance. C’était presque un continuel tour de force. De même, il se faisait lire les ouvrages d’histoire indispensables à la composition de ses conférences aux Annales et mentalement il en tirait l’ordonnance de ses exposés lumineux et de ses arguments toujours persuasifs, quand il faisait acquitter Louis XVI par le tribunal révolutionnaire, ou condamner une seconde fois Calas. Les auditeurs non prévenus ne pouvaient se douter de sa cécité. Il avait réussi à la vaincre, à l’asservir à sa profession. Mais elle lui avait apporté autre chose encore, dont lui-même ne se doutait pas, et qui était la grandeur. Rien n’est plus rare que la grandeur. Si peu de vies y parviennent ! Réellement, dans ses dernières années, cet homme d’un si beau talent, de tant de courtoisie et d’affabilité, qui aimait la vie et le monde, mais qui, somme toute, était paré des qualités et des défauts humains, s’était élevé au-dessus de lui-même. Il fut grand dans sa stoïque résignation et nous garderons le souvenir de cette existence brillante et de cette fin magnanime.

    La soumission au destin aboutissant à sa domination, comment la demander à un enfant ? Et pourtant c’est le drame que vous avez traversé dans votre adolescence. Avant de le rencontrer, ne dois-je pas remonter jusqu’aux années heureuses où vous fûtes bercé, mais aussi formé par la tendresse familiale et la terre de Provence ? Plus d’une fois, au cours de votre vie de batailles, vous vous êtes abandonné, dans vos livres ou vos préfaces, à ces confidences où l’on entend battre le cœur de l’homme, même s’il est recouvert d’une cuirasse, et c’est l’homme que je chercherai en vous avant de chercher la doctrine.

    Une sorcière du nom de Marthe qui accompagnait Marius dans les Gaules a donné son nom à Martigues, votre ville natale. Mais les Grecs, déjà soucieux de vous obliger avant leur descendant le poète Moréas, avaient précédé les Romains sur la terre de Provence. Peut-être même ont-ils débarqué chez vous avant d’aborder à Marseille et bâti une ville sur le promontoire qui domine l’étang de Citis, si l’on en croit les vestiges de ce beau mur antique, déjà palpé par vos mains d’enfant, que vous m’avez montré un jour avec émotion parce que vous y retrouviez l’empreinte des ouvriers qui bâtirent l’Acropole et le Temple de Delphes.

    Martigues est un pays de marins. Un de ses écrivains locaux assure que la mer est pour les enfants de Martigues un élément aussi naturel que le feu l’est aux salamandres : « À peine sortent-ils du berceau, écrit-il, qu’ils tendent vers elle leurs petites mains empressées ; à peine ils se soutiennent sur leurs pieds chancelants que les premiers pas sont pour le rivage... Le premier usage qu’ils font de leur liberté c’est d’entrer dans l’élément qui les attire ; on les voit en foule et tout nus, en dépit des remontrances et des coups du soleil et du vent, de la pudeur et de la police, se jouer au milieu des ondes et disputer aux poissons l’habileté de la nage. » Vous fûtes de ces gentils polissons. Plus tard, vous avez célébré comme des héros d’Homère, ces excellents marins, tels le patron Victor Domenge bravant la mer démontée avec les dix sauveteurs de Carro pour secourir le vaisseau la Russie échoué devant la plage de Faraman, digne descendant de ces Martégaux qui défendirent la tour de Bouc dont ils avaient la garde contre la flotte de l’amiral Doria envoyée par Charles-Quint.

    Tandis que le monde entier se contente de sept merveilles, vous avez relevé à Martigues jusqu’à trente beautés. C’est peut-être que vous la voyez de loin. Un de vos chroniqueurs, François Amy, avocat provençal, prétendait au XVIIIe siècle qu’il fallait naître à Martigues pour les talents, mais en sortir pour les faire valoir. Vous y êtes né, vous en êtes sorti, mais vous y retournez fidèlement.

    Henri III érigea la vicomté de Martigues en principauté. Ainsi le maréchal de Villars fut-il prince de Martigues. Vous pouvez revendiquer pour prédécesseur un maréchal de France. Vous en retrouvez deux ici pour confrères. Le prince de Martigues avait droit à l’encens à l’église : vous n’y avez droit que sous la Coupole.

    Je n’ai qu’à puiser dans vos livres, Nuits de Provence, Au signe de Flore, les Vergers sur la mer, l’Étang de Berre, pour connaître vos familles paternelle et maternelle. La première venait de Roquevaire qui n’est pas très loin de Martigues. Le passé romain se manifestait par les prénoms, tirés de Plutarque et de Tite Live, qui décoraient votre père et ses sept frères et sœurs. Vous-même, occasion d’une flatterie grecque, fûtes appelé Photius. Déçu par l’Empire libéral, votre père mourut plein d’espérance en M. Thiers. Mais votre famille maternelle se revendiquait de la vielle tradition religieuse et royaliste. En 1848, il fallut apprendre avec ménagements à votre grand’mère l’avènement de la IIe République : malgré ces précautions, elle s’évanouit. Encore n’avait-elle accepté Louis-Philippe que par condescendance pour son mari qui avait servi sous le prince de Joinville et que celui-ci vint voir en petite tenue de la marine. Votre mère, tout enfant, était présente à la visite. Elle s’attendait à voir un fils de roi en grand apparat. Ce fut, vous avoua-t-elle plus tard, sa première déception. Quelle compensation ne lui apporteriez-vous pas aujourd’hui avec l’habit vert ?

    Ces humbles vies provinciales, ces familles honorables de fonctionnaires, d’officiers, de magistrats, de médecins, d’architectes, proche les souches paysannes de Sophie, la servante de votre enfance, de cette Adrienne, sa pareille, qui garde aujourd’hui sur le chemin de Paradis votre maison ancestrale, de toutes ces petites gens si dignes et si probes qui transmettent dans leur pureté primitive la pensée et le langage populaires et qui ont entouré vos premières années des « chefs-d’œuvre de l’affection », c’est le bon terreau sur quoi a poussé la force française. Aujourd’hui encore, il n’y qu’à gratter le sol pour retrouver sous l’herbe ou les cailloux la glèbe qui attend la main du semeur et ne demande qu’à porter les moissons futures.

    Votre maison de famille, vous-même l’avez décrite un jour à l’un de vos plus anciens amis dont la présence, aujourd’hui, vous manque, ce Frédéric Amouretti à qui vous avez dédié le Chemin de Paradis : « Vous vous rappelez ce chemin. Il est pauvre, il est nu et triste, souvent pris entre deux murailles et seulement fleuri de joncs et de plantes salines. Je l’aime chèrement, comme tout ce qui est, je crois, ce que j’ai de meilleur au monde. Terre maigre et dorée où siffle le vent éternel, ses vergers d’oliviers, ses bois de roseaux et de pins voilent à peine ses rochers ; mais le ciel y est magnifique, exquis le dessin des rivages et si gracieuse la lumière que les moindres objets se figurent dans l’air comme des Esprits bienheureux. »

    Les parvenus tuent les châteaux rien qu’en les achetant, et les vrais terriens le font avec une chaumière, rien qu’en s’y succédant. Je connais votre maison, un peu au-dessus des eaux et de l’assemblée des barques, un peu au-dessous d’un moulin qui ne bat plus d’aucune aile. Le jardin fait figure de parc et de musée, avec son allée des philosophes, avec des vases de grès et des morceaux de sculpture antique.

    Vous y recevez en seigneur, comme Mistral recevait à Maillane. Charles Gounod, composant la musique de Mireille, écrivait que Maillane un jour signifierait Mistral, et Camille Bellaigue, commentant Gounod, ajoutait que Martigues un jour se confondrait avec Maurras. J’ai goûté les plaisirs de votre hospitalité et n’oublierai point ces soirées où nous nous enchantions, loin de la politique, et après une bouillabaisse parfumée, avec des poèmes alternés de Lamartine que vous appeliez l’archange, de Baudelaire qui sent, disiez-vous, le musc et les roses fanées, et du Jean Moréas de ces Stances parfaites et brèves comme les statuettes de Tanagra.

    Là, j’ai retrouvé vos origines et votre cœur. Toute la Provence s’est réunie, comme une assemblée de fées, autour de vos premiers ans, avec l’odeur spéciale de sa mer, la splendeur de son soleil, la beauté même de son ciel nocturne qui vous bouleversait enfant, avec ses chansons dont raffolait votre père, avec ses enchantements et ses sorcelleries qu’entretenait soigneusement Sophie, la vieille servante accordée aux secrets et au merveilleux de la terre. Toute une musique intérieure s’amassait en vous pour vous composer un trésor qui vous deviendrait bientôt nécessaire et ne s’épuiserait jamais. Vous avez quitté Martigues à huit ans pour Aix-en-Provence, mais vous n’avez pas cessé d’y revenir. Elle pouvait changer physiquement, vous acceptiez ces changements et preniez bravement votre parti des ponts métalliques et des autobus. « Tant qu’on ne touchera ici, disiez-vous, ni à l’eau, ni à l’air, ni au vent, ni à l’astre, les éléments sacrés se riront des entreprises de l’homme. »

    Et voici que, plus tard, vous y découvriez nos réserves historiques, cette large autonomie qui laissait à chaque province son caractère et ses libertés. Ainsi la Provence, réunie à la France, garda-t-elle sous le pouvoir royal ses lois et ses mœurs. Louis Veuillot pourra écrire en 1872 que le comte de Chambord serait le protecteur des républiques françaises et, lors du triomphe de Mistral, le maire d’Aix, évoquant le passé, s’écriera : « Alors nous avions des droits véritables. Alors nous avions des privilèges, nous avions des franchises, des prérogatives, des libertés ! Le rouleau de l’uniformité n’avait pas encore fait de la terre de France une grande aire plane ; les sangsues de la centralisation ne s’étaient pas encore gorgées de nos énergies : aujourd’hui la même cloche règle tout uniformément. »

    Continuant ce voyage de découvertes au pays du passé qui devait orienter un jour votre carrière politique, vous vous aperceviez encore que la différence des classes, qu’un parti ignorant de la vraie France a tenté de transformer aujourd’hui en haine de classes, ne ressemblait nullement au tableau tant de fois décrit avec complaisance par les écrivains révolutionnaires. Du peuple à la bourgeoisie, de la bourgeoisie à la noblesse, l’accession était insensible et continue, venue du libre effort accumulé du travail et de l’épargne. En philosophes réalistes qui connaissaient l’histoire, Bonald l’avait bien vu pour le Rouergue et Maistre pour la Savoie. Ainsi, plus tard, direz-vous de votre rencontre avec Maurice Barrès : « Nous venions de Mistral et de nos braves contes ; il dérivait de Claude Gelée, de Callot et de ses bons ducs. » Ainsi devait-il écrire les Déracinés comme vous entrepreniez vos campagnes pour décongestionner Paris et rendre au sang provincial, au bon sang de France, sa force vitale.

    La dette de gratitude que vous avez contractée envers la Provence, comment la rappeler ici sans évoquer celui qui fut ensemble son Homère et son Littré, Frédéric Mistral qui se fût réjoui tout à l’heure d’entendre citer sous la Coupole les vers d’un chanoine provençal et dont vous avez voulu mêler le souvenir à l’émouvante évocation des grandes ombres qui habitent toujours notre maison ? Sur chaque feu qui meurt dans l’âtre des mas provençaux a soufflé son génie pour en ranimer la cendre. Vous a-t-il apporté à votre naissance les présents d’usage, une couple d’œufs, un quignon de pain, un grain de sel et une allumette avec la formule sacrée : « Mignon, sois plein comme un œuf, sois bon comme le pain, sois sage comme le sel, sois droit comme une allumette » ?

    Il vous fallait cette provision de lumière et de bonheur pour les années qui allaient suivre. Vous voici donc à Aix à l’âge de huit ans. Vous étiez un bon élève, couvert d’accessits et même de prix. « Je jouais bien, me battais bien », vous souvenez-vous. Déjà ! suis-je tenté d’ajouter. « Je n’obéissais qu’à ma mère, dites-vous encore, mais, il est vrai, au seul mouvement de ses yeux. » La terrible épreuve est là qui vous attend. Une phrase, inscrite presque négligemment dans vos mémoires, contient à elle seule votre supplice d’enfant, votre volonté, la matière de votre action, comme disait Marc-Aurèle de l’obstacle. Elle évoque votre classe de quatrième au delà de laquelle l’enfant, qui avait engrangé les chants et la musique pour la saison mauvaise, n’aurait plus jamais accès dans le royaume des sons. Comme un oiseau blessé se cache dans les fourrés, vous avez tenté alors de vous abriter dans la passion intellectuelle et de vous perdre dans les livres. La vie vous était devenue indifférente. Quelqu’un avait compris ce grand drame douloureux qui se prolongea cinq années et vous me reprocheriez de ne pas rappeler son nom. C’était lâ

  • L'Europe dont les peuples ne veulent plus, par Hilaire de Crémiers*

    Le verdict populaire est sans appel. L’Europe qui était de moins en moins crédible, ne l’est plus du tout, mais tout sera fait pour maintenir le système et continuer dans la même voie. Quant à Hollande, il est devant une crise institutionnelle majeure.

     

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    François Hollande peut-il durer ? Tous les éléments sont contre lui...

     

    Le résultat des élections européennes était prévisible et depuis fort longtemps. Certains se croient obligés maintenant de s’en offusquer. Ils n’ont qu’à s’en prendre à eux-mêmes. L’Europe s’est faite contre les peuples ; les peuples votent contre l’Europe : il fallait s’y attendre.

    Et d’abord par l’abstention, ce qui facilite les interprétations des commentateurs patentés, mais qui est, en fait, un vote de refus et qui, de plus, est clair et net. Pas seulement en France, mais dans toute l’Europe. à quoi s’ajoutent toutes les listes dont les programmes récusent l’Europe officielle, le Front national en tête, puisque tel est le fait qui explose à la figure des gouvernants. L’ensemble regroupe une majorité qui dit ouvertement « non » à ce qui se fabrique à Bruxelles.

     

    Signification du vote

     

    Si ce refus signifie un évident rejet d’un projet qui devient de plus en plus une abstraction de technocrates et de politiciens, il manifeste en revanche une adhésion profonde à des réalités charnelles, vivantes, nationales qui font l’histoire et donnent un sens à la vie sociale. 

    Les peuples veulent rester eux-mêmes et n’acceptent plus d’être méprisés. Ce vote n’a pu s’exprimer dans toute la limpidité de son contenu positif. Et pour cause. L’objet sur lequel il portait est par nature abscons. 

    L’Europe est devenue une machine administrative incontrôlable et, de plus, une machine partisane dont la représentation n’a aucun caractère de véracité. Les peuples en sont concrètement absents. Aussi pareil scrutin n’est qu’un système de plus qui s’ajoute aux systèmes déjà existants et dont les élus sont censés contrôler un autre système, celui de la « gouvernance européenne » d’une complexité qui frise l’absurdité quand il s’agit de politique, avec ses domaines de compétence aux contours indistincts et donc trompeurs entre le régime dit « communautaire » et ce qu’il est convenu d’appeler encore « l’intergouvernemental ». Il est des gens qui vivent de ce « machin » et dont le combat quotidien consiste à grignoter des parts de pouvoir de l’un sur l’autre.

    Cette Europe est littéralement monstrueuse ! Ainsi l’ont voulue les apprentis-sorciers qui ont imaginé, au fur et à mesure de sa construction, cette maison de fous où se côtoient des fonctionnaires d’administrations aux vues totalitaires et incohérentes, des économistes sans responsabilités réelles et, du coup, d’autant plus dictatoriaux dans leurs prescriptions, des politiciens en mal de carrière et qui jouent d’autant plus aux matamores, des prébendiers de la technostructure européenne où sévit l’art de prendre les places – après Barnier, le tour de Moscovici est venu ! –, des malins qui ont fait de ce qu’ils appellent pompeusement l’aventure européenne, leur affaire personnelle, enfin des vagabonds de toutes sortes qui se sont donnés de l’importance, de l’influence et, fort judicieusement, des rémunérations en s’assurant des postes et en usant des groupes de pression qui vivent de, par et pour l’Europe. Ajoutez quelques belles âmes aux élans mystiques de démocrates-chrétiens qui couvrent d’une rhétorique fuligineuse et prétendument spirituelle cet affreux mélange de mercantilisme, d’affairisme, de politicaillerie et de cynisme, qui s’est doté non d’un véritable droit mais d’un appareil juridique aussi immoral qu’implacable, comme toute entité de type idéologique.

    Telle est la réalité de l’Europe aujourd’hui et c’est d’une évidence telle que les gens de bon sens ne veulent plus de cet univers kafkaïen. Il fallait faire l’Europe autrement. C’eût été possible, mais, aujourd’hui, c’est raté et c’est trop tard. Ni Guaino ni Wauquiez n’y changeront rien, malgré leurs éloquentes protestations : ils sont, d’ailleurs, traités de renégats par ceux qui tiennent les rênes de leur parti. L’Europe-diktat, c’est la formule obligatoire, forcée à gauche comme à droite dans les partis dits de gouvernement.

    En dépit de tout, malgré le dégoût manifeste des peuples, dans le mépris total des réflexions de bon sens des meilleurs chroniqueurs, il est interdit de remettre en cause les dogmes de la religion européenne, à quoi il faut tout sacrifier.

     

    Quoi derrière l’Europe ?

     

    Et, pourtant, qui ne voit que la machine échappe à tout le monde. Les Anglais pragmatiques n’ont qu’une idée, la quitter, après en avoir tiré tous les profits possibles et y avoir instillé leur conception du droit privé et du droit des affaires qui annihile notre propre droit de civilisés latins. Les juristes intelligents et honnêtes – ça existe encore – savent parfaitement de quoi il retourne.

    Les Allemands ne se sentent bien dans une telle Europe qu’en y préservant leur propre souveraineté de peuple allemand que leur Cour constitutionnelle établit naturellement en norme supérieure ; ils imposent en conséquence aux autres peuples leur conception de droit public, leur méthode d’organisation économique et de direction budgétaire. L’Allemagne a opéré sa réunification par décision souveraine sur un seul et unique mark, et ce grâce à l’Europe ; et l’euro n’est rien d’autre que sa propre monnaie. Tant que l’Europe servira les intérêts allemands, en particulier à l’Est, l’Allemagne la soutiendra, comme dans l’entre-deux-guerres avant qu’Hitler ne donnât un tour violent à ses revendications. Car Hitler rêvait aussi d’Europe unifiée !

    Les autres peuples d’Europe ont cru dans l’Europe bruxelloise comme à une sorte de songe heureux d’enrichissement facile que l’abus des fonds structurels semblait justifier jusqu’au moment du retournement de situation. Car qu’est la richesse sans le travail ? La Grèce en est le plus bel exemple.

    Quant aux Français – on leur serinait cette leçon –, ils s’imaginaient que l’Europe était leur affaire, leur grande idée, une transposition au niveau international de leur conception républicaine, socialiste autant que libérale, jacobine autant que libertaire, ce modèle que, d’après leur doctrine officielle, le monde entier leur enviait : quoi de plus réjouissant, en effet, dans le genre de conception qui anime nos politiciens et leurs intellectuels stipendiés, que de réglementer, oui, comme en France, encore réglementer, toujours réglementer afin de supprimer toutes les libertés particulières si gênantes et ainsi instaurer l’Égalité dans la Liberté. C’était ça, l’Europe d’abord et aussi ! Le socialisme français ferait l’Europe libérale et l’Europe libérale se plierait aux concepts du socialisme français ! Giscard, Mitterrand, Chirac, Jospin, Sarkozy, Hollande, même combat !

    Quel mécompte ! Schengen, Maastricht, Amsterdam, Lisbonne, ce ne fut successivement que des tours de passe-passe manigancés par des politiciens sans scrupule pour, d’une matrice mal formée, accoucher leur invivable idée européenne aux forceps. Et concrètement la France a été flouée et ses intérêts les plus certains sacrifiés : la voici envahie, jetée dans le chômage,  désindustrialisée, appauvrie, vendue, rackettée.

    Voilà déjà douze ans que dans ces colonnes il était écrit que l’Europe exploserait à cause de ses contradictions et, en particulier, que l’approfondissement et l’élargissement poursuivis concurremment se révéleraient une impossible gageure. Rien n’ouvre les yeux des dirigeants français qui se sont mis à l’abri, quant à eux, des conséquences néfastes de leurs décisions qu’ils continuent d’inscrire et d’accumuler dans le fatras inepte des pétitions de principe qui leur servent de conception politique. Tant que leurs comptes seront garnis en fin de mois, ils ne comprendront rien : ils ne connaissent pas la vie des Français. Il est même des élus aujourd’hui pour le dire. Salutaire prise de conscience !

    Alors que la France crève littéralement du régime des partis, ainsi qu’à peu près tous les pays d’Europe, il faut encore que ce système devienne une norme européenne, comme une prétendue panacée démocratique. Les pays ne sont plus représentés ; la représentation est livrée aux partis ! Il est vrai que pareil système a toujours fait bon ménage avec la pire des technocraties qui n’a rien à en redouter : le réel seul lui fait peur. Rien ne pourra arrêter cette machine folle, sauf l’abîme.

    Le vote partisan, même national, n’est malheureusement pas une solution. Que peuvent faire quelques députés européens ? Rien. Rien ne sera donc fait. Sauf que tout ira de mal en pis.

     

    Hollande vers la fin ?

     

    Dans sa ridicule situation, Hollande a trouvé un « truc » de plus pour tenter d’occuper le terrain : la réforme territoriale que Valls est chargé de mettre en œuvre. Mal conçue, de manière technocratique, pour complaire aux « lobbies » européens, elle sera mal faite et ne visera qu’à supprimer des réalités françaises dont tout ce personnel politicien se contrefiche pourvu que se maintienne son système à lui.  

    De quel droit ce petit monde de gens sans culture, sans attache familiale, sans enracinement historique, sans foi, sans autre loi que leur République abstraite, sorte de déesse qui justifie tous leurs abus de droit et leur passion déréglée du pouvoir, se permet-il de décréter l’existence ou la non-existence des régions de France, de nos provinces, de nos pays ? La France et ses provinces existaient avant eux. Sont-ils nos maîtres à ce point qu’ils en décident en fonction de leurs intérêts électoraux ? Questions financières ? Voire : il est à parier que les machineries qu’ils vont construire coûteront encore plus cher, comme il arrive à chaque fois qu’ils prétendent réformer. En vérité, la centralisation comme la décentralisation sont en France des échecs depuis des décennies pour l’unique raison qu’elles ne sont plus que des instruments du régime des partis. Tout fonctionnaire un peu sagace, tout élu sincère qui se dévoue à sa tâche, le sait parfaitement. Notre décentralisation est devenue aussi monstrueuse que notre centralisation. Hollande ni Valls ni les autres qui ne sont que des hommes de parti, ne résoudront rien. Il faudrait des hommes de gouvernement et, pour l’heure, ça n’existe pas sur le marché des politiciens.

    En revanche, ces politiciens sans morale continuent imperturbablement à détruire la famille française – c’est toujours en cours –, à faire de l’éducation un levier de pouvoir pour leur domination, à corrompre les mœurs et, pire encore, les esprits. Ce qu’ils veulent, une société à leur image qui légitime un pouvoir à leur image : leur pouvoir. De fait les armes du pouvoir sont à leur service. Rien n’est pour eux plus jouissif que de voir les Français, et souvent les meilleurs gens du monde, être obligés d’obéir et de collaborer à leur œuvre de perdition : au nom de l’intérêt national ! Au nom de la France ! Jusqu’à quand ?

    Hollande pour tenir en haleine un pauvre peuple désarçonné, et alors que la France est déjà en déflation, prend le ton prophétique d’un grand pontife en extase : « la courbe du chômage va s’inverser, la croissance est là, les impôts vont baisser ». Le tout assorti de janotismes qui émaillent si habituellement ses discours et qui ajoutent au grotesque de sa mauvaise comédie. Le président devrait méditer sur le sort réservé dans la Bible aux faux prophètes. Le sage Montaigne avertissait : « C’est don de Dieu que la divination : voilà pourquoi ce devrait être une imposture punissable d’en abuser… Ceux qui manient les choses sujettes à la conduite de l’humaine suffisance sont excusables d’y faire ce qu’ils peuvent ; mais ces autres qui nous viennent pipant des assurances d’une faculté extraordinaire qui est hors de notre connaissance, faut-il pas les punir de ce qu’ils ne maintiennent l’effect de leur promesse, et de la témérité de leur imposture ? » (Essai, I, XXXI).

    Hollande n’est qu’au début de sa punition. Hélas, ce sera dur pour tout le monde.  

     

    * Analyse politique parue dans le numéro 130 (juin 2014) de Politique magazine

  • Liberté ou identité, faut-il choisir ? Retour sur la conférence d’Alain Finkielkraut au Cercle Charles Péguy

    Le jeudi 27 mars dernier, le Cercle Charles Péguy recevait Alain Finkielkraut, qui, depuis, a été élu à l'Académie frnaçaise :

    http://cercle-charles-peguy.fr/qui-sommes-nous/vocation

     

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    Vous avez fait paraître L’Identité malheureuse (Stock) il y a quelques mois, un livre qui a soulevé de violentes passions. On vous a accusé, vous le descendant de Juifs polonais déportés, de faire l’apologie d’un « nationalisme barrésien. » Avez-vous changé dans votre sentiment vis-à-vis de la France ? 

    Ni dans ma pensée, ni dans mon sentiment, il n’y a eu de revirement : je ne suis pas passé de l’hostilité à l’amour. J’ai certes longtemps vécu dans un sentiment d’indifférence accompagné de méfiance à l’égard des formes du nationalisme français quand elles allaient de pair avec un antisémitisme. Si je me réfère à Barrès aujourd’hui, ce n’est pas pour une réconciliation. J’ai lu Les familles spirituelles de la France, où, en 1917, Barrès se réconcilie avec les Juifs, car il les avait vu payer le tribut du sang dans la guerre. Mais en aucun cas, je ne peux subir le reproche d’être barrésien. Je me rappelle que dans un débat où on l’interpellait sur son antidreyfusisme, Barrès répondait : « Dreyfus est coupable, je le sais de sa race, il est couleur de traitre ». Evidemment, je n’ai jamais subi pour ma part les effets de ce nationalisme. Reste que j’ai été élevé dans la méfiance à l’égard de ses manifestations.

    En tant que juif, j’ai été élevé dans l’amour inconditionnel pour Israël. Pour moi, la politique se posait en termes universalistes, et ici j’avais le sentiment de vivre dans une société plus que dans une nation. Mon identité restait juive au fond. Mais en même temps, toute ma vie intellectuelle a été placée sous le signe de Péguy qui dit qu’il faut suivre des indications sans faire de plan. Or, le problème s’est posé à moi un jour sans que je l’aie cherché : la France a fait son apparition en 1989, à l’occasion du débat sur la laïcité. A Creil, un principal avait exclu trois jeunes filles qui voulaient porter le voile en classe. Cette mesure suscita une polémique très vive : les responsables des églises dirent tout de suite leur hostilité et leur inquiétude devant le retour d’une laïcité de combat. L’archevêque de Paris, le Grand rabbin comme les chefs protestants élevèrent la voix. Les associations antiracistes, elles aussi, soutenaient les jeunes filles. Avec quelques autres, je publiai un texte sous le titre : Profs, ne capitulons pas. Le Ministre de l’Education nationale de l’époque était prêt à reculer. Il pensait alors que la République ne pouvait être menacée par cette offensive.

    En 2004, l’interdiction des signes religieux ostensibles est votée, sous la houlette de Bernard Stasi, venu d’ailleurs de la communauté chrétienne. La France s’impose de plus en plus à  ma réflexion car le débat s’est élargi, européanisé et même mondialisé. La France est montrée du doigt, l’Occident pointe une loi et un comportement liberticide. C’est là que je comprends que la laïcité n’est pas universelle. Si la sécularisation a eu lieu dans toute l’Europe, la France reste singulière, d’une singularité qui doit être défendue face à une offensive islamiste. La France devient pour moi un objet de civilisation à préserver. L’Europe est devenue un continent d’immigration malgré elle : quand certains l’incitent à devenir une société post-nationale pour être mieux à même de gérer l’apparition de nouvelles communautés, je pense pour moi qu’elle doit rester une nation. Car la France d’après ne sera pas métissée mais extrêmement crispée. Nous risquons d’aller jusqu’au séparatisme culturel puis territorial.

     

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    Si l’on vous écoute, on peut avoir l’impression que le vieux dicton juif allemand qui disait Heureux comme Dieu en France s’inverse. Ce serait plutôt Malheureux comme Dieu en France, sous le régime de cette laïcité…

    J’ai toujours été frappé par l’idée que la définition la plus profonde de la laïcité se trouve chez notre plus grand penseur chrétien, à nous Français : Pascal et sa célèbre distinction des ordres. Selon le legs de la métaphysique classique, il y aurait deux ordres, dans un partage dualiste du monde : la chair d’un côté, et le spirituel de l’autre. Mais Pascal ne s’en contente pas. Il distingue trois ordres : la chair, la charité qui procède de la grâce et entre les deux l’ordre spirituel. Il dit même qu’on ne peut les confondre. Or, la laïcité, c’est précisément l’ordre de l’esprit, celui qui est entre la chair et la charité. Cette distinction est vivante même chez ceux qui ne se réclament pas de Pascal. Elle explique le type de construction des lycées anciens aux hauts murs, qui sont parfois d’ailleurs d’anciens couvents. L’école est même appelée sanctuaire. A l’inverse, elle est aujourd’hui « le lieu d’ouverture sur la vie ». Ce n’est plus la laïcité pascalienne, celle que l’on trouvait aussi chez Péguy, celle de Notre Jeunesse où, en 1911, alors qu’il est devenu catholique, il dit ne retirer aucune phrase de son œuvre. Où il rappelle que l’instituteur n’est pas le représentant d’une majorité, ni même de l’Etat, mais le représentant des poètes et de la culture qui ont fait l’humanité. La laïcité, c’est cela. Le moment où les valeurs suprêmes ne sont plus seulement religieuses mais également culturelles. C’est sa conception de la laïcité en tout cas. C’est même une singularité de la France : si identité il y a, elle n’est pas que folklorique. La littérature y a occupé une place centrale. Beaucoup le reconnaissaient jusqu’aux première décennies du XXe siècle, notamment dans l’élaboration de la langue française. L’école a un rôle de transmission de cette culture. J’en en ai bénéficié en tant qu’élève mais je me suis rendu compte que les enfants aujourd’hui n’ont plus cette chance. L’école a changé de mission. La littérature n’est plus au coeur de la représentation que la France a d’elle-même.

     

    Vous faites le constat de la désaffection pour la littérature et la culture françaises. Mais quelles réponses imaginez-vous à cela ?

    La France subit simultanément deux crises : celle de l’intégration d’abord. Les nouveaux arrivants refusent de jouer le jeu de l’intégration. Les rapports en témoignent depuis Les territoires perdus de la République ou encore  Le rapport Aubin de 2004, et cela jusqu’aux rapports du Haut Conseil à l’Intégration. Les autorités font le choix de la reddition. Les rapports sur l’intégration de l’ère Hollande nous mènent vers une société « inclusive ». Le problème viendrait de l’intégration elle-même : intégrer, ce serait unilatéral, normatif et violent, et le français ne serait que la langue dominante. L’Ordonnance de Villers-Cotterêts a pourtant marqué l’histoire nationale, mais aussi la constitution de l’Europe.

    Mais il y a aussi une crise de la transmission qui vient relayer cette crise de l’intégration. La démocratie et la technologie nous font vivre au présent. L’adolescent par exemple n’est plus jamais seul, même dans sa chambre. Pourtant, la lecture est une expérience de déconnexion. C’est grâce à elle que les morts nous parlent. Et une société est composée de plus de morts que de vivants. Mais la dynamique égalitaire de la démocratie tend à mettre toutes les pratiques et tous les discours sur le même plan. On voit le sort fait au mot de discrimination. Or, toutes les discrimination ne sont pas mauvaises. Le fait même de discriminer devient suspect. Il n’y a plus de place pour la transmission de la culture pour l’établissement des valeurs. C’est cela qui met en péril l’identité française et qui émeut chez moi le « patriotisme de compassion » dont a parlé Simone Weil. Si Simone Weil est très lue en Europe centrale, c’est par l’élaboration de ce concept, où elle parle des « petites nations », dans le sens de celles qui ont toujours été fragiles. Un concept qui peut valoir pour la France demain si elle se démet d’elle même. Mais elle y perdrait le meilleur de ce qu’elle est.

     

    On a l’impression que vous avez admis la défaite de votre pensée. Gardez-vous cependant une espérance ?

    Il n’a pas de réponse à cette question. C’est trop difficile. Je ne sais pas comment il serait possible de traduire aujourd’hui en termes politiques cette inquiétude. Car nous vivons dans la hantise du retour des années 30. Pour les progressistes, Hitler n’est pas mort, il revient tous les jours. Il est difficile dans ces circonstances de faire entendre le discours que j’essaie de tenir. Puisque le Front National occupe ce terrain, alors  les traqueurs de la bête immonde pensent avoir raison. Le sens politique serait de dire que l’inquiétude identitaire des Français est légitime. Tous les partis devraient la prendre en charge. Mais nous sommes de fait paralysés. En 2005, Le Monde publiait un article frappant, au lendemain des émeutes, qui rendait compte de la difficulté d’être minoritaire chez soi. Les journaux avaient pourtant presque  tous soutenu les révoltes, en parlant de mai 68 des banlieues. Il n’y avait pourtant dans ces émeutes pas de parole, pas de verbe, pas de revendications, mais beaucoup de gestes, très violents et surtout pas de femmes.

    L’exercice de la mémoire en France conduit à l’oubli du présent. La problématique d’aujourd’hui est sans cesse la projection d’hier. Déjà François Furet expliquait que l’antifascisme était l’idéologie principale du communisme après la guerre. Le communisme est mort mais l’antifascisme reste présent. Quand Olivier Py ne veut pas s’occuper du festival d’Avignon si le maire est FN, il est sincère. Il y voit le retour d’Hitler. Tout ce qui le contredit est alors frappé de déni.

     

    Vous dites cela aujourd’hui, mais n’avez-vous pas participé à la naissance de la repentance généralisée dans les années 80 ?

    Le choix de l’antiracisme mitterrandien était un voile pour cacher ses propres défaites, et je l’ai critiqué très tôt. Nicolas Sarkozy a essayé de remettre le sujet de « l’identité nationale » sur le tapis, mais Nicolas Sarkozy n’a-t-il pas tout essayé en même temps ? Il fut aussi à l’initiative d’une commission se demandant si le terme de diversité pouvait entrer dans la Constitution française. Heureusement, le Conseil constitutionnel y répondit par la négative. Sinon, la France deviendrait une auberge espagnole.

     

    Et le mariage pour Tous ? Quelle est votre position ? Les réformes menacent-elles la civilisation ?

    Je ne suis pas intervenu dans le débat, même si j’étais convaincu par les arguments de Frigide Barjot. La revendication de l’union civile est légitime pour moi. Mais le vrai problème est celui de la filiation. Car derrière, il y avait la PMA puis la GPA. On y va tout droit aujourd’hui. Ces pratiques se répandent dans le reste du monde, on les rapatriera en France. Il faut réveiller la droite comme la gauche conservatrice. Il s’agit de préserver et de fixer des limites. Il faut se défaire de l’enthousiasme du progrès. C’est ici qu’il faut un amour compassionnel du monde et de la terre. Suis-je de gauche ou de droite ? Je ne sais pas. En revanche, je suis intervenu sans réticences lors du débat sur l’introduction des études de genres à l’école. Jules Ferry disait qu’un instituteur ne pouvait rien dire qui puisse choquer un père de famille. La volonté de transformer les enfants en traqueurs de stéréotype est très inquiétante. Les enfants sont des nouveaux venus du monde, il faut donc les intégrer. C’est ce que dit Hannah Arendt. On veut en faire des êtres critiques de ce monde avant de les y intégrer. De plus, la différence des sexes est présente dans toute notre tradition littéraire. C’est le passé entier qui devient un stéréotype. On apprend alors aux enfants à se moquer du monde. C’est effrayant, c’est une atteinte à la civilisation. Il faudrait rompre avec cela en fondant une humanité sans aucune différence, alors que la première des différences est la différence sexuelle. Dans ce monde, toutes les positions sont désormais échangeables, il n’y a plus rien d’irréductible. Certains y voient une apothéose humaine. J’y vois personnellement une menace pour la civilisation.

     

    Cercle Charles Péguy du 27 mars 2014

    Par Jacques de Guillebon

  • La Libye du Boulevard Saint Germain : Une guerre civile ? (I/III), par Champsaur.

    Le terme peut sembler excessif, mais c’est celui retenu par le pertinent analyste, ex officier, Patrick Haimzadeh (Au cœur de la Libye de Kadhafi, chez J.C. Lattès). 

    LYBIE AU COEUR DE LA LYBIE DE KHADAFI.jpg 

    200 pages, 15 euros

    Que sait-on vraiment de la Libye ? Que dissimule la personnalité fantasque et mégalomaniaque du colonel Kadhafi… Pour tenter de mieux cerner les origines et les enjeux de la guerre civile, et pour comprendre comment ce régime a pu perdurer plus de quarante ans, Patrick Haimzadeh, l’un des meilleurs connaisseurs de la Libye, nous propose un tableau clair et complet de ce pays. 
    Il y est question d’histoire, des conquêtes phéniciennes jusqu’à la Libye actuelle, en passant par l’occupation italienne, de géographie humaine aussi, où l’on apprend que cette région a toujours été une interface entre Maghreb et Machreq, ainsi que de culture. 
    Cet ouvrage se nourrit d’entretiens multiples effectués ces dernières années, avec des Libyens de tous horizons, mais également d’imprégnation de terrain et de confidences recueillies au fil d’amitiés suivies. 
    C’est donc autant à un voyage livresque qu’incarné que nous convie l’auteur. On y trouvera notamment le portrait d’une ville ordinaire, Tobrouq, essence même de l’échec du système kadhafien, ou encore celui d’un jeune entrepreneur de Tripoli, et, bien sûr, des pages édifiantes sur la véritable nature du Guide, de son épopée et de son régime. 
    Mais la Libye, c’est avant tout un peuple de plus de quatre millions d’habitants dont la grande majorité n’a d’autre aspiration que de vivre dans la dignité et la paix.

     

     

    * Patrick Haimzadeh est arabisant et spécialiste de la Libye où il a été en poste diplomatique pendant plusieurs années. Outre la connaissance des organes officiels du pouvoir, ce séjour lui a permis d’aller à la rencontre du pays réel. Il a travaillé auparavant en Egypte, en Irak, au Yémen et au sultanat d’Oman, pour le compte de la France ou des Nations Unies, en tant que coopérant, analyste ou négociateur dans des contextes de crise. Il vit maintenant à Paris, dans le 18e arrondissement.

    Le 7 Avril dernier, le grand reporter du quotidien britannique The Independent, Patrick Cockburn titre un article «L’avenir de la Libye parait sombre alors que les media tournent leurs camera vers d’autres évènements. Deux ans après l’intervention de l’OTAN, les milices continuent de terroriser le pays» lien http://www.independent.co.uk/voices/comment/libyas-future-looks-bleak-as-media-focus-turns-elsewhere-8563076.html

    Sur les évènements de Libye depuis le printemps 2011 notre site est très riche en billets remarquablement documentés, archivés dans la catégorie International 2. Depuis le premier jour de cette intervention extérieure, tous allaient dans le sens d’une mise en garde sur les différentes conséquences.

    Une reprise alarmante sur le blog de Jean-Dominique Merchet le 9 Juillet, http://www.lopinion.fr/blog/secret-defense/libye-nouveau-centre-gravite-terrorisme-1874

    Et dans sa dernière livraison de l’Afrique réelle, Bernard Lugan parle d’embrasement.

    Nous ne répèterons pas ce que d’éminents africanistes ont déjà publié, mais la dégradation est à présent tellement visible, catastrophique et inquiétante, qu’elle mérite un nouveau point de situation dans un pays où il n’y a plus d’État.

    La France s’est positionnée en flèche de cette intervention dans des conditions politiques hasardeuses, sans que l’on détecte très bien où étaient les intérêts : ceux de l’Élysée ? ceux de la France en Libye ? étaient-ils menacés ? la feuille de vigne de l’humanitaire ? provoquer la chute du régime et pourquoi ?

    Mais les connaisseurs de ce pays et de ses voisins limitrophes, les africanistes avertis, les gens du renseignement qui suivaient Kadhafi depuis le premier jour de son coup d’État en 1969, découvrir éberlués et incrédules ce philosophe milliardaire du Boulevard St Germain, ex maoïste, que Raymond Aron appelait dans ses mémoires un érudit de pacotille (mais authentique imposteur), virevolter et dicter sa conduite au Président de la République.

    Une lecture critique des opérations militaires

    Cette aventure n’a pu que susciter de très forts soupçons, loin des coups de clairon et roulements de tambours dont on nous a abreuvés pour positionner Nicolas Sarkozy comme « chef de guerre ».

    Notons tout d’abord que ce que les militaires et leurs états-majors appellent les ODB, (pour Ordre de Bataille), c’est-à-dire la liste tant des unités constituées, que des dotations en matériels, sont suivies, connues et publics pour les trois armées, Terre, Air, Mer, et rassemblés pour chaque pays dans un document britannique en vente, le Jane’s. C’était  donc le cas pour les armées de la Libye, ajouté au fait qu’une intense assistance technique existait depuis longtemps, par tout le complexe militaro-industriel, français en particulier. Il n’y a donc eu aucune surprise en face de nos forces et le médiocre niveau des matériels libyens n’était pas en mesure de défier les moyens techniques de l’OTAN. L’insistance française un peu puérile à vouloir «tirer les premiers» n’apporta aucune valeur ajoutée à la suite des opérations. Le samedi 19 mars 2011 l’Armée de l’Air française entra en action contre quelques aéronefs libyens de facture très ancienne (héritage de l’époque soviétique) qui ne respectaient pas l’interdiction de survol de certaines zones, décidée par l’ONU (résolution 1973). La suite des opérations fut une grande classique américaine, consistant à intervenir sans l’afficher ouvertement, et laissant volontiers les media, français en particulier, claironner que les États Unis, échaudés par les coûts de l’Irak et de l’Afghanistan, ne voulaient plus conduire de guerres à l’extérieur. Pure intoxication car dans la réalité, ils étaient présents partout, ici comme ailleurs, et dès le premier jour. Comme dans n’importe quelle guerre le premier objectif est la destruction et la désorganisation des communications de l’adversaire, neutralisant ainsi les commandements et les systèmes de tirs de missiles. Le bilan de la première semaine fut ainsi de 199 missiles de croisière Tomahawk et de 455 munitions de précision, tirés depuis des sous marins. Matériels que la France ne possède pas. Les USA ont fourni les fameux avions A10 (tueurs de chars), les avions ravitailleurs (80 % des heures de vol de la coalition), les capacités de renseignement (satellites et avions, où 75% des vols de renseignement sont américains). Au total on peut affirmer que la totalité de l’armée de Kadhafi fut hors de combat au bout de la première semaine. Les gesticulations françaises ne furent en réalité qu’à destination des journaux télévisés du soir, et pour la gloire de monsieur Sarkozy. Ajoutons quelques remarques de simples bon sens. Tous les praticiens de la chose militaire savent que depuis notre retour dans le commandement intégré de l’OTAN, pas un avion ne peut décoller, pas un navire ne peut prendre la mer, sans communications de l’intégralité des ordres d’opération au commandement intégré, avec, au sommet de la pyramide, la bannière étoilée. Ce que S. A. R. le Prince Sixte Henri de Bourbon Parme a appelé «Voir l’OTAN engager nos forces aériennes».

    Selon une technique d’intoxication de masse désormais au point, arrivent très vite sur les plateaux de télévision les 6.000 tués de Kadhafi. Et la colonne de chars fonçant sur Benghazi, frissons entretenus à l’envi. L’excellent Rony Brauman eut beau s’évertuer sur les rares plateaux de télés où il était invité, il ne réussit pas à faire entendre que 6.000 cadavres ne se dissimulent pas aux yeux des photographes qui cherchent en priorité l’image « saignante ». Il parlait d’expérience en tant que médecin, ex patron de MSF (douze ans), et praticien des zones de guerre. Seuls quelques réseaux « sociaux » ont très vite réalisé la propagande qui était derrière et se sont donc efforcés d’en trouver les sources. De nombreux journalistes indépendants ont alerté sur le fait que l’intervention en Libye n’avait rien a voir avec le printemps arabe, ni avec l’idée d’y défendre les droits de l’homme. L’intervention de l’OTAN nous a été soumise au nom d’une contestation du régime de Kadhafi qui a été orchestrée en dehors des centres de décisions français. Nous nous demandions comment aucune image de « bombardements intensifs » n’était disponible et comment Benghazi semblait intact malgré les frappes. Concernant une répression féroce, très peu d’images sont arrivées jusque dans les rédactions des grands médias. Quelques vidéos prises dans les hôpitaux ont certes montré qu’il y avait eu une répression sanglante dans différentes villes de Libye. Mais de là à voir des milliers de morts et encore plus de blessés, rien.

    En fait, ces « 6000 morts » reposaient sur une unique déclaration reprise en boucle. Personne ne s’est intéressé à la légitimité de la personne qui avait déclaré ce chiffre. L’information a été donné par Ali Zeidan. Ce Libyen était présenté comme le «porte parole de la Ligue libyenne des Droits de l’homme», ou sur plus de 100 sites internet anglophones comme directeur ou président. Alors que le président était en réalité Sliman Bouchiguir, comme indiqué sur le site de la LLDH. Et le pire, c’est que le site ne reprennait nulle part l’affirmation de ces « 6000 morts ».

    Mais Ali Zeidan n’était pas seulement le récent porte-parole de la LLDH, il était aussi celui du Comité Nationale de Transition (CNT) en Europe, l’opposition libyenne reconnue légitime par l’État français. Ce monsieur était donc à la fois juge et partie.

    S’il s’est improvisé défenseur des droits de l’homme, il ne s’agit pas de son unique spécialité. Le 23 mars 2011 à Paris, devant les invités de marque conviés par Bernard Henri Levy, il promettait concernant le pétrole que «les contrats signés seront respectés», mais qu’un futur pouvoir «prendra en considération les nations qui nous ont aidés». Porte-parole de quoi ?

    Autre voix discordante, l’ambassadeur de France en Libye, M. François Gouyette (aujourd’hui notre ambassadeur en Tunisie depuis Août 2012), lors de son audition à l’assemblée nationale le 8 mars 2011 dit : » Nous avons certes vécu, entre le 16 et le 26 février (2011), jour de notre départ, une dizaine de jours de fortes tensions et d’affrontements – non pas tant à Tripoli que dans les autres régions –, mais leur relation a fait l’objet d’exagérations, voire de désinformation. Ainsi, l’information, reprise par les médias occidentaux, selon laquelle l’aviation aurait bombardé Tripoli est parfaitement inexacte : aucune bombe n’est tombée sur la capitale, même si des affrontements sanglants ont eu lieu dans certains quartiers. »

    En fait de colonnes de chars, six obusiers de marque italienne, certes suffisants pour faire de gros dégâts à Benghazi, mais pas le « carnage » invoqué par le plus beau décolleté du Boulevard Saint Germain. Au total la propagande servie fut du même niveau que les précédentes, armes de destruction massive de Saddam Hussein ou Afghanistan foyer du terrorisme islamique international, montrant ainsi qu’en France on ne pouvait plus accorder une once de crédibilité à nos autorités.       (à suivre...).

  • (Communiqué) Courrier reçu du Carrefour des Acteurs Sociaux (CAS)...

    2014 COMMEMORATION 1914.jpgMadame, Monsieur, 

    Sans doute êtes-vous au courant de l’affaire évoquée dans le document que vous trouverez ci-dessous. Il m’est l’occasion d’une réflexion en lien avec les commémorations prévues en 2014. Je signale au passage que nous venons de prêter la main aux actions ayant visé à reclasser en France (logement, emploi, formation)  les Afghans qui ont été au service de l’Armée français pendant les opérations en Afghanistan. 

    Chez les militaires c’est la première fois depuis les années 60 que la grogne prend un tour politique et je m’en suis aperçu en prenant contact avec les organisateurs des commémorations qui auront lieu en 2014 (commémoration de la guerre 14/18).

    J’ai notamment pris contact au nom de certaines associations franco-africaines qui gravitent dans l’orbite du Partenariat Eurafricain et qui commémorent annuellement les Tirailleurs Sénégalais.

    Les manifestations commémoratives de 2014 verront le budget dégagé par l’Etat au quasi seul service du 14 juillet 2014. Mais le plus important est ailleurs ; ces commémorations n’échapperont pas au maelstrom « sociétal » qui va s’y engouffrer. Déjà, les informations qui nous viennent des « allées du pouvoir médiatique » permettent de discerner  quelques points forts qui seront montés en épingle :

    - Evidemment l’apologie du pacifisme;

    - La réhabilitations des condamnés par les tribunaux militaires;

    - Une campagne baptisant les combattants d’Afrique « les engagés involontaires »;

    - Le reformulation du débat sur l’identité nationale;

    Les points d’applications seront multiples et notamment dans les écoles et les collectivités locales.

    Il n’est pas dans la vocation du CAS d’aller sur ces terrains où du moins de s’y déployer. En revanche il ne lui est pas interdit de sensibiliser son réseau aux enjeux historique et culturel qui se joueront en 2014. J’ai déjà des demandes émanant d’associations africaines gravitant dans l’orbite du Partenariat Eurafricain, de sociétés savantes et d’associations civiques agissant dans les zones difficiles. 

    Je recherche donc quelqu’un disposé à piloter les initiatives que prendront nos membres et d’autres  (choix de conférenciers dans les écoles et les associations ; recension des colloques vers lesquels orienter nos amis ; mise en relation localement avec des autorités militaires ou des associations d’Anciens Combattants, par exemple le Service Historique de l’Armée.

    Bien cordialement, 

    Joël Broquet

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    COMITE VALMY.jpgQuestion au Premier Ministre sur la Syrie :

    Le gouvernement a-t-il présenté un faux à la représentation nationale ?  

    samedi 28 septembre 2013, par Comité Valmy 

    Le comité Valmy recherche un député susceptible de briser l’omerta en posant cette question au 1er Ministre. Quand le gouvernement viole la loi en tentant d’obtenir un consensus du Parlement au moyen d’un faux document dans le seul but d’entraîner la France dans un conflit au bénéfice des auteurs du crime qu’on prétend combattre, les députés sont face à une responsabilité historique : doivent-ils se coucher et accepter honteusement cette manipulation, ou, au contraire, demander des comptes, laver l’honneur de la République, et mettre sous la tutelle des élus de la Nation ce gouvernement qui a fait la démonstration de son irresponsabilité ?

     

    Question au Premier Ministre sur la Syrie :
     Le gouvernement a-t-il présenté un faux à la représentation nationale ?

     

    Monsieur le Premier Ministre,

    Le 2 septembre dernier, avant le débat à l’Assemblée nationale visant à obtenir un consensus sur une intervention militaire en Syrie, vous rendiez public un document déclassifié des services DRM et DGSE, document censé établir la preuve que l’armée régulière syrienne serait l’utilisatrice des armes chimiques contre le peuple syrien, le 21 août 2013.

    Les lecteurs de ce document ne pouvaient qu’être frappés par l’absence de fait précis et la médiocrité de son contenu : après une présentation scolaire laborieuse de l’histoire de l’armement syrien, l’auteur pense pouvoir deviner l’identité des criminels de la seule nature des armes... Comme si toutes les utilisateurs de six coups étaient américains et russes les utilisateurs de Kalachnikov !

    De l’affirmation non étayée que seule l’armée régulière serait en capacité technique de manipuler de telles armes, la représentation nationale devait conclure comme un seul homme à la responsabilité du gouvernement syrien. Pourtant, seuls les "rebelles" avaient intérêt à fournir le prétexte requis par le président Obama pour intervenir militairement. Par ailleurs, ce document occultait la présence d’éléments non syriens parmi les "rebelles", dont certains étaient armés, formés et épaulés par de nombreux services étrangers capables de leur fournir la capacité d’utiliser des armes chimiques, ce qui ruinait le raisonnement précité.

    Depuis le renoncement des États-Unis à l’attaque contre la Syrie, aucun service occidental et anti-syrien n’a été capable d’apporter la moindre preuve tangible de la responsabilité du gouvernement syrien dans les drames du 21 août. A l’inverse, nombre de documents, de témoignages et de faits incontestables tendent à établir la culpabilité d’éléments de la rébellion.

    Sans un salvateur vote à la Chambre des Communes britannique, suivi d’un accord russo-américain, la France aurait été entraînée dans une agression militaire aux risques incalculables, très certainement pour soutenir les utilisateurs des armes chimiques, sur la seule foi de ce document.

    Nous découvrons maintenant que ce document [1] présenté comme émanant des services secrets français porte la signature électronique de M. Sacha MANDEL [2] (« smandel »)et semble bien, en réalité, avoir été concocté par ce conseiller en Communication du Ministre de la Défense.

    L ’introduction précise que « Ce document est constitué de renseignements déclassifiés issus des sources propres françaises. Il repose également sur l’analyse technique approfondie des sources ouvertes réalisée par nos services. » Force est de constater qu’aucun avis de Commission Consultative du secret de la défense nationale n’a été publié au Journal Officiel, seule preuve de déclassification légale de renseignements. [3] La Commission n’a donc pas été saisie, la procédure [4] n’a donc pas été respectée.

    ( "le ministre ne peut déclassifier sans avoir préalablement demandé cet avis, même s’il est favorable à la demande." [5]) L’introduction du document étant mensongère, la question se pose : ces « renseignements déclassifiés » n’existent t-il que dans l’imagination d’un communicant du ministère de la Défense ?

    De quel droit le gouvernement prétent-il présenter aux parlementaires des renseignements déclassifiés sans qu’aucune procédure de dé-classification n’ait existé ? Quelle est la véritable origine de ces pseudo « renseignements déclassifiés » sur la base desquels il fallait déclencher de toute urgence un conflit au conséquences planétaires ?

    Pouvez-vous, monsieur le Premier Ministre, désigner le véritable auteur de ce document ?

    S’agit-il de M. Sacha MANDEL, responsable en communication de M. le Drian ou des services de renseignement, dont la DGSE qui a vu la prise de fonction d’un nouveau directeur [6] la veille de la parution de ce document ?

    S’il s’agit de M. Mandel, les services précités ont-ils accepté d’en porter malgré tout la responsabilité ?

    S’il s’agit des services officiels, pourquoi M. Mandel n’a t-il pas démenti ? Et dans ce cas, des sanctions ont-elles été prises ? Les services ont-ils été appelé à fournir des renseignements de meilleure qualité, au minimum pour que la France ne se trouve pas entraînée dans un conflit en se trompant d’adversaire, sur la base de renseignements erronés ?

    Enfin, en prétendant que ce document essentiel émanait des services DRM et DGSE, qu’il contenait des « renseignements déclassifiés », le gouvernement a t-il présenté un faux à la représentation nationale ?

     

    Notes

     

    [1] -Document sur le site du Premier Ministre

    [2] -Organisation du cabinet du ministre de la Défense

    [3] -CODE DE LA DÉFENSE : Commission consultative du secret de la défense nationale

    [4] -Rapport de la CCSDN, procédure page 73

    [5] -"Secret Défense" sur le site du Secrétariat Général pour l’Administration

    [6] -Décret du 22 août 2013 portant nomination d’un directeur à la direction générale de la sécurité extérieure - M. BIGOT (Christophe)

    Appel du Comité Valmy :
    > Construire un front républicain, patriotique, anti-impérialiste et de progrès social !

  • REPRENDRE LE POUVOIR ? QU'EST-CE A DIRE ?

    237497988.jpgLe Camp Maxime Real del Sarte , université d’été d’Action française, tout particulièrement destinée aux jeunes, à leur formation politique, se tiendra du 25 au 31 août au château d’Ailly, dans le pays roannais.
     
    Le thème choisi cette année, repris du titre d'un livre important de Pierre Boutang, paru en 1977, sera : Reprendre le pouvoir; thème difficile et sérieux, sur lequel il nous a semblé bon de revenir ici, en remontant à la source, c'est à dire au livre lui-même et à son sens vrai.
     
    En lisant la suite, on en trouvera une analyse détaillée. La matière en est ardue. Mais elle dit l'essenrtiel. Et Elle explique aussi pourquoi nous préférons illustrer l'annonce de la prochaine université d'été des jeunes d'Action française avec l'image d'un ardent feu de camp plutôt que celle - utilisée par les organisateurs - d'une scène des journées d'émeutes - d'ailleurs inabouties - de février 1934... Mais nous aurons à reparler de Pierre Boutang à propos du Qui suis-je ? d'Axel Tisserand !
     

    RETOUR SUR « REPRENDRE LE POUVOIR »

    OU LA LÉGITIMITÉ RETROUVÉE …

     

    Que dit Pierre Boutang dans ce livre profond et érudit ? Il n’envisage évidemment pas l’acte en lui-même de prendre le pouvoir, encore moins les techniques du coup de force, du coup d’Etat, que les royalistes, comme d’autres, ont évoquées tant de fois dans le passé. Boutang sait trop bien que cette affaire, dans l'immédiat, n’est pas sérieuse ; qu’elle n’est pas d’actualité ; que, sur ce plan là, comme, d’ailleurs, sur le plan électoral, les royalistes sont « un néant de force » ; que la leur est autre ; qu’il est donc illusoire et coupable de les entretenir dans ce mythe aujourd’hui irréalisable et ridicule. Ce n'est pas que les royalistes aient jamais renoncé à faire la monarchie - Pierre Boutang, en vérité, y a songé, y a travaillé toute sa vie - mais que les conditions doivent préalablement en être réunies; que la chose doit devenir possible et réalisable; qu'elle doit sortir de l'ordre du fantasme. On verra comment...

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    Le propos de Reprendre le pouvoir est, en effet, d'en redéfinir, d'abord, une idée acceptable. Si l'avenir n'est pas au chaos, il ne peut être qu'à la Légitimité retrouvée, instaurée, restaurée, vaste et profonde réalité dont le respect et le culte pourraient seuls définir une droite qui serait digne de ce nom et la distinguer suffisamment de toutes ses caricatures, fasciste, libérale, conservatrice...

     

    SAUVER UN PEUPLE

     

    Ce que Pierre Boutang rappelle d'abord, c'est qu'il y a en tout temps un peuple à sauver. Hier, de l'emprise terrorisante du Communisme mais aujourd’hui de l'empire corrupteur de la finance internationale. Or pour qu'un peuple fasse son salut temporel, il lui faut le secours d'un Pou­voir politique.  « Rebâtir quelque idée du pouvoir » (147) est d'abord nécessaire. « Les nouveaux philosophes ne sont pas les seuls à être dépourvus de théorie du pouvoir Ce que j'observe dans l'histoire contemporaine, c'est que la théorie politique s'effrite à mesure que le pouvoir s'use. Moralité, on ne fait plus de distinction entre les bons et les mauvais pouvoirs - ceux que j'appelle les pouvoirs mal vécus » (Nouvelles Littéraires, 26 janvier 1978). En un sens, c’est aussi ce que dit aujourd’hui Edgard Morin, à l’horizon de la gauche, où les mythes fondateurs se sont écroulés, depuis quelques décennies, déjà.

     

    LE POUVOIR LÉGITIME

     

    Quelle est donc la nature du Pouvoir qui sauve, dont les pouvoirs qui écrasent, qui corrompent et qui tuent, l'âme et le corps, sont les contrefaçons ? « Ce n'est pas simple, résume Pierre Boutang lui-même, dans un entretien donné aux Nouvelles littéraires, au lendemain de la parution de Reprendre le pouvoir. Le pouvoir apparaît au mieux par la nature et le jeu de ses éléments. Ces éléments sont au nombre de trois : la légitimité - qui pose la souveraineté, l'existence même du souverain et son intention d'agir pour le bien commun; le consentement populaire - sans quoi le pou­voir n'est qu'une contrainte évacuant l'humanité; enfin l'auto­rité - l'acte, le résultat de droit et de fait auquel il est consenti ».

     

    « Les variétés de pouvoir - c'est-à-dire aussi les variétés de sa perversion - se définissent selon l'ordre ou l'absence par­tielle de ces éléments. Vue de l'État, la légitimité a besoin du consentement pour justifier l'autorité; vue du peuple, l'autori­té a besoin de la légitimité pour obtenir le consentement. L’ordre dans lequel se composent ces éléments constitutifs du pouvoir n'est donc jamais le même, à un moment donné, pour le peuple et pour l'État : sinon il n'y au­rait plus dialogue entre eux, mais monologue, monologue d'un souverain sans peuple - tyrannie - ou d'un peuple sans souve­rain - anarchie -. Comme vous le voyez, le dialogue du peuple et de l'État obéit à une dialectique complexe, toujours recom­mencée. Le peuple, par sa liberté de consentement commence là où le Prince finit; le Prince par l'autorité que lui confère le consentement, commence là où le peuple finit. »

    « Qu'y a-t-il de nouveau dans votre théorie du pouvoir ? - Ce qu'il y a de nouveau, c'est qu'elle était oubliée ». Pourtant, la manière, en particulier, dont Boutang fonde toute sa Politique sur l'idée de souveraineté, non idée en l'air, mais idée d'une réalité de naissance, réalité pater­nelle, toujours antécédente donc légitime, donc fondatrice d'ordre (49-106), est neuve et admirable.

    Quelle est donc pour nous, aujourd'hui, la figure la plus accessible de cette nécessaire légitimité ? La plus naturellement présente à notre esprit français, évidemment, c'est la monarchie. « C'est quoi, pour vous, l'idée monarchiste ? C'est l'idée d'un pouvoir qui ne s'achète pas; ni par le nombre, ni par la force, ni par l'argent.» Magnifique !

     

    SERVITEUR DE LA LÉGITIMITÉ

     

    Pour parler ainsi, il faut être libre. Pierre Boutang était libre. Contre le Communisme, qu'il méprise consciemment et délibérément. « Le marxisme n'est jamais qu'une aberration de la pensée vraie, une négation de la légitimité; il n'a rien créé, il a exclusivement détruit. Il portait le Goulag en puissance. En quoi, je vous le demande, ce tragique aboutissement d'une pen­sée nulle, d'une pensée minable, d'une pensée morte, pourrait-il fonder une théorie du pouvoir ? »

    Mais également ennemi de la ploutocratie dite libérale : « Aujourd'hui, la société ne transmet plus que les vices et les dysharmonies des classes supérieures. Il n'y a plus rien à con­server, la droite a complètement échoué. Réduite à l'instinct de combinaison, n'ayant plus rien à sacrifier, elle n'encourt même plus le risque de paraître lâche ou hypocrite; le type du bourgeois libéral, c'est le PDG toujours absent qui abandonne sa femme au bridge et à la psychanalyse, et que ses fils s'en vont vomir dans le gauchisme. On ne me soupçonnera de rien si j'affirme que la gauche, elle, peut encore raconter des trucs généreux : elle ne vaut pas mieux.

    « Je ne suis pas un conservateur: à condition que ça ne fasse pas de mal aux êtres, je dis que la société d'argent peut bien crever ! A bas l'usure, l'argent selon moi ne doit pas faire de petits : ce principe salubre définit ce que Marx appelait le so­cialisme féodal. Et bien, va pour le socialisme féodal.»

     

    AUX SOURCES SACRÉES DU POUVOIR

     

    Celui qui l'interroge alors pour les Nouvelles littéraires ne s'y est pas trompé, ce mépris de tout culte de l'homme suppose un autre culte. « Quand on-rejette l'intérêt matériel, la vanité de puissance, le commerce des pseudo-valeurs, et qu'on veut se prémunir contre tout cela, il arrive fatalement un moment où, faute de faire confiance à l'homme, on réhabilite la Providen­ce... C'est ce que vous faites à la fin de votre livre en rêvant d'un Prince chrétien, qui sera le « serviteur de la légitimité ré­volutionnaire. — Bien sûr, je crois en la Providence.»

    En vérité, pour Pierre Boutang, cette transcendance, Dieu, le Dieu de l'Évangile catholique, est présent non à la fin mais à la source de toute souveraineté légitime, comme il est à l'origine de sa réflexion, et dès la première page de son livre. D'accord avec Simone Weil : « Il n'y a que par l'entrée dans le transcendant, le surnaturel, le spirituel authentique que l'homme devient supé­rieur au social. Jusque-là, en fait et quoi qu'on fasse, le social est transcendant à l'homme. Dès lors la seule protection possi­ble pour l'homme est que ceux qui sont sur la route de la sain­teté aient une fonction sociale reconnue. Mais quel danger ! »

    Comment faire ? Appellera-t-on les saints (!) à gouverner ? La solution que choisit Boutang est plus sage, celle d'un Pouvoir dont l'institution, à ses yeux, est sainte, jaillie des sources doublement sacrées de la paternité divine et de la paternité humaine, et triplement sa­crées si l'on accepte la « modification chrétienne » que déve­loppe magnifiquement sa Troisième Partie (147-180), suivant, en cela, l’idée d’Urs von Balthasar. Car, pour lui, c'est bien le Christianisme qui fonde la distinction du roi et du tyran, par la légitimité or­donnatrice, seule forme viable, stable, loyale d'une monarchie populaire. 

  • Notre entretien sur Charles Maurras à Martigues, avec Georges Bourquard, du Dauphiné libéré...(V/V)

    MAURRAS PROCES.JPG... et sa condamnation en 1945 ?

    A ce stade, final, de notre conversation, nous avons choisi d'aborder ce thème d'une façon un peu différente de la "traditionnelle", en commençant par parler d'abord... de la Guerre de 14 !

    Nous avons ainsi rappelé à notre interlocuteur quelle avait été la politique de L'Action française lors de la Première Guerre mondiale : sa politique d'union nationale, ou d'union sacrée - surtout lorsque ce fut autour de Clémenceau, l'un des "ennemis de toujours" - ne fit pourtant pas l'unanimité dans ses rangs - et ne la fait toujours pas - puisque certains faisaient remarquer, avec justesse, que ce serait la France, certes, mais aussi la République qui gagnerait la guerre.

    Malgré sa justesse, cet aspect des choses n'ébranla ni Maurras, ni Daudet, ni Bainville, et L'Action française soutint l'effort national, jusqu'à la victoire finale. Ce qui lui valut un prestige considérable, les remerciements officiels de Raymond Poincaré et une estime générale dans le pays, une fois la guerre gagnée.

    Oui, mais voilà : après la Victoire si chèrement acquise, la France pouvait et devait démembrer l'Allemagne. Et lui enlever la rive gauche du Rhin, soit pour la "réunir" à la France, soit pour la laisser devenir une ou plusieurs républiques indépendantes. Le Système, ou le Pays légal ne le fit point et se laissa voler la Victoire par nos "chers Alliés anglo-saxons", malgré les avertissements de Bainville et de L'AF. Puis il y eut la farce de "L'Allemagne paiera" : là aussi, le Système ou Pays légal, et toujours malgré les conseils quotidiens de L'Action française, laissa l'Allemagne non seulement "ne pas payer", mais se relever, prospérer de nouveau, se réarmer, réoccuper la rive gauche du Rhin et, finalement, nous envahir vingt ans après notre Victoire, exactement comme l'avaient prévu Bainville, les grands généraux et les esprits lucides.  

    Quelle différence, alors, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, avec la fin de la première ! Malgré la justesse des analyses de L'Action française pendant les vingt ans de l'Entre-Deux Guerres, et le sabotage de la position de la France par le Régime, amenant au désatre, on vit au contraire, lorsque la Guerre s'acheva, L'Action française décapitée, le journal interdit, et le royalisme effacé d'un coup du paysage politique ! Phénoménal triturage de la réalité et de la vérité des faits; stupéfiante falsification historique, et fabrication d'une "vérité officielle" fondamentalement mensongère.

    Que s'était-il donc passé ?

    Pourtant, juste avant la guerre, à sa sortie de prison, en 1937, Maurras avait été acclamé dans un gigantesque meeting au Vel d'Hiv' par 60.000 personnes; il venait d'être élu à l'Académie le 9 juin 1938; le mouvement, malgré la dissolution des ligues en 36, restait un mouvement avec lequel il fallait compter; et Maurras jouissait d'un prestige intellectuel considérable, qui dépassait de beaucoup les frontières du territoire national... Alors ?

    maurras,chemin de paradisD'abord, il faut se souvenir qu'au début de la guerre, Maurras - né le 20 avril 1868 - a plus de 71 ans (76 aux débuts de la Libération); il a perdu Jacques Bainville, le sage, trois ans auparavant; et Léon Daudet, qui mourra trois ans plus tard, en 1942 d'une hémorragie cérébrale, commence déjà à ressentir les premiers signes du mal qui l'emportera, et n'était déjà plus le flamboyant Daudet de l'Avant-guerre (de 14) ni de l'entre deux guerres... Maurras n'était donc pas seul, mais le trio historique des grandes heures de L'Action française était disloqué.

    A partir de là, et Georges Bourquart en est convenu, il est facile, aujourd'hui, confortablement assis dans nos salons, et ne risquant strictement rien, de savoir ce qu'il fallait faire, ou pas; dire ou pas etc. puisque l'on sait comment les choses ont fini. Mais, à l'époque ? Si l'on a un minimum d'honnêteté intellectuelle et de connaissances historiques, on sait bien que, jusqu'à la fin, plusieurs scénarios étaient possibles. Les révolutionnaires, formidablement poussés par Staline, pouvaient prendre le pouvoir; les Américains, qui avaient imprimé une monnaie spéciale, pouvaient fort bien organiser un régime dont ils auraient tiré les ficelles (et, pourquoi pas, avec Pétain, Lebrun ou Herriot, éventualités qui furent envisagées par les Américains et les Anglais) : il y avait plusieurs sorties de guerre possibles, et ce n'est qu'à la toute fin du conflit que les choses se sont décidées.

    Ce qui est certain, par rapport à la Première Guerre mondiale, c'est la nouveauté radicale que représenta l'intrusion de l'idéologie dans la Seconde. Que Maurras ait mal apprécié, mal évalué, ce fait, comme certains maurrassiens le pensent, cela ne fait de lui ni un coupable, ni un criminel. On peut dire que, d'une certaine façon, il a considéré cette Seconde guerre comme la Première, et qu'il a répété la même stratégie d'union nationale - Pétain remplaçant Clémenceau - que durant le premier conflit; rejetant "le clan des yes" comme "le clan des ya", il élabora une ligne de conduite, certes, difficilement tenable, de fait, sur le terrain, mais au moins conforme à l'idée qu'il se faisait de l'union nationale, à préserver absolument.

    On peut juger irréaliste sa position, la juger périlleuse - surtout aujourd'hui... - mais, au moins, n'obéissait-elle aux pas aux intérêts partisans ni à l'esprit de division. Certes, les Allemands - victorieux et maîtres chez nous, à la différence de 14 - occupaient le territoire, accentuaient de jour en jour leur pression, manipulaient de plus en plus la fiction d'un "pouvoir" de plus en plus inconsistant, ce qui rendait chaque jour plus inaudible et plus incompréhensible le soutien que continuait d'apporter Maurras au pouvoir légal, mis en place dans la débandade générale - ne l'oublions pas - par ce qui restait alors des élus de la République.

    Mais, encore une fois, même son supposé irréalisme de fait, ne suffit pas à faire de Maurras un traître, ni de son attitude, en soi, un crime ni un délit. Ni, bien-sûr, à disqualifier sa pensée, son oeuvre politique.

    Le sort ne fut pas favorable à Maurras, la "fortune" lui fut contraire : revenus triomphants, les révolutionnaires ont été d'autant plus haineux et violents contre Maurras qu'ils devaient hurler très, très fort, afin que que leur vacarme assourdissant fasse oublier leur(s) trahison(s) initiale(s) :

    * soutien inconditionnel à l'URSS, s'alliant avec Hitler par le fameux pacte de non agression, qui dura officiellement du 23 août 1939 au 22 juin 1941, soit tout de même près de deux ans !..

    maurras,chemin de paradis* désertion et fuite de Thorez à Moscou où, arrivé le 8 novembre 39, il restera jusqu'à son amnistie par de Gaulle, en novembre 44. Passer toute la guerre à Moscou, c'éait, évidemment, beaucoup plus "facile" et beaucoup moins périlleux que de rester en France tout ce temps-là...

    * quantité impressionnante de nombreuses personnalités venues du socialisme et du communisme dans la Collaboration (les socialistes Marcel Déat et Pierre Laval, le communiste Jacques Doriot); 

    A partir de là, c'est Vae victis, et l'histoire offcielle écrite par les vainqueurs... On fit le procès de Maurras, mais on attend toujours le procès le plus important, celui des responsables de la défaite : ceux qui n'ont pas préparé la France à la guerre qui arrivait et qu'annonçait Jacques Bainville, dès le calamiteux Traité de Versailles, dans L'Action française "pour dans 20 ans"; ceux qui sont restés sourds aux avertissements, du sabotage de la Victoire à l'impréparation de la France face aux revanchards allemands, emmenés par Hitler.

    Un Hitler que Jacques Bainville fut le premier, dès 1930, et dans L'Action française, à dénoncer, comme "l'énergumène" Hitler : voici quelques notes de son Journal (Tome III) : Bainville et l'énergumène Hitler.pdf , dans lesquelles il écrit : "Qui eût dit qu'Adolf Hitler, l'énergumène en chemise brune, recevrait un jour la visite du ministre des Affaires étrangères de Grande Bretagne ?". Ou : "Sir John Simon sera dans quelques jours à Berlin. Il verra Hitler, c'est-à-dire le monstre lui-même..."

    C'est à cette aune que doit être mesurée la condamnation de Maurras, totalement inique si l'on veut bien se souvenir de cette phrase d'Otto Abetz (tout de même, un connaisseur !) : "L’Action Française est l’élément moteur, derrière les coulisses, d’une politique anti-collaborationniste, qui a pour objet, de rendre la France mûre le plus rapidement possible, pour une résistance militaire contre l’Allemagne".

    Que Maurras ait été condamné est donc un fait.

    Que cette condamnation soit juste, à l'évidence, non. Mais il eût été naïf d'attendre une juste sentence d'un procès conduit par ses ennemis.  

    Qu'elle signifie que ses idées n'existent plus, qu'il n'ait plus rien à nous dire aujourd'hui, et qu'il doive être rayé de la carte des penseurs, des esprits féconds, des "vivants", encore moins !

    Voici donc l'essentiel de ce qui s'est dit pendant cette heure et demie de discussion courtoise, à bâtons rompus; augmenté de toutes ces choses que nous n'avons pas eu le temps d'ajouter à tel ou tel moment de la conversation, ou que nous n'avons pu qu'effleurer ou évoquer trop rapidement, donc superficiellement; mais qu'il s'impose naturellement de rajouter lorsqu'on passe à la transcription, écrite, du langage parlé.

    De toute évidence Georges Bourquart n'avait pas la place - nous ignorons s'il en avait le désir ou la possibilité - pour tout rapporter; nous, oui : il nous a semblé qu'il aurait été dommage de s'en dispenser. (fin).

  • Pas de tribunal de Nuremberg pour la Force Brute. Vae victis … par Champsaur (I/II)

    "Il n’y a pas plus lieu de sacraliser que de diaboliser cette fédération de marchands enivrée de sa grandeur et résolue à nous imposer ses standards, ses coutumes, son idéologie, ses produits en tous genres, bref ses canons dans les deux sens du mot.

    ... par la guerre ou dans la paix, les Etats Unis ne supportent plus et brisent tout ce qui leur résiste, qu’ils usent ou qu’ils abusent des droits que leur donne la force et que cette force même les conduit à prétendre dire le droit..."

    Dominique JAMET (America über alles) 


    "... il n’est de justice entre les hommes que lorsqu’ils traitent à force égale, tandis que les plus puissants exécutent tout ce qu’ils peuvent se permettre et les faibles s’y soumettent". Les Méliens continuant à repousser ce raisonnement et les propositions des Athéniens sont massacrés ou dispersés...

    Thucydide (dans "La guerre du Péloponnèse" 400 avant J.C.)


    etats-unis2 Octobre 2002

    Il n’est venu à l’esprit de personne de célébrer cet anniversaire. Mais quelques parlementaires américains ont rappelé le désastre et la honte de leur pays car ce jour-là Georges Walker Bush et sa camarilla déposait au Congrès (les deux chambres) une résolution pour partir en guerre contre l’Irak. Vote obtenu le 10 Octobre.

    Lien : http://uspolitics.about.com/od/wariniraq/a/jt_resolution.htm

    Aux États Unis même il n’y a eu aucun élan particulier pour soutenir cette équipée. Les résultats des votes furent les suivants :

    Chambre des représentants : 133 voix contre, pour 435 élus.

    Sénat : 23 voix contre, pour 100 élus.

    D’ailleurs à l’époque sur 435 membres de la Chambre basse, 260 n’avaient pas de passeport car ils n’étaient jamais sortis de leur pays. Très loin d’avoir regardé un jour une mappemonde …

    Ces chiffres à dire vrai modestes en faveur de la guerre, montrent que les élus ne voyaient aucun péril immédiat, et que le déluge de propagande pour emporter la décision, n’eut qu’un effet limité.

    Pour ne citer que deux exemples de l’ambiance de l’époque :

    "...Je pense que l’on ne peut mettre en doute les faits qui nous ont conduit à ce vote fatal. Saddam Hussein est un tyran qui a torturé et tué son peuple … les rapports des services de renseignement prouvent que Saddam Hussein a reconstruit son stock d’armes chimiques et biologiques, ainsi que sa capacité de lancement de missiles, et son programme nucléaire. Il a aussi offert aide, protection et refuge aux terroristes et à ceux d’al Qaida…" (Sénateur Hillary Rodham Clinton, 10 Oct. 2002)

    etats-unis

     

    Si l’on se souvient que cette politicienne briguait l’investiture démocrate au printemps 2008, personne ne lui a tenu rigueur d’avoir raconté n’importe quelle sornette six ans auparavant.

    On pouvait lire aussi le New York Times :

    "Inutile de débattre pour établir que Saddam Hussein est un dictateur qui continue à développer des armes non conventionnelles qui menacent la paix au Moyen Orient, et au-delà en violation des interdictions des Nations Unies." (The New York Times, Edito du 3 Oct. 2002) l'un des plus prestigieux journaux américains (très proche de la communauté juive mais pas nécessairement d’Israël).

    On trouvera une chronologie détaillée de la montée à la guerre sur le lien suivant : 

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Chronologie_de_la_guerre_d'Irak

    dans cette phase précédant l’agression.

    Elle permet de retrouver les dates importantes de la manipulation américaine, assez peu secrète, qui signe très bien comment s’impose le Droit du plus fort, son cynisme, et la lâcheté d’un certain nombre de pays suiveurs, dont certains d’Europe centrale, anciens du glacis soviétique. Attitude courageusement dénoncée par Jacques Chirac.

    Celles que je retiens :

    Vendredi 7 février 2003 : le gouvernement britannique est contraint de reconnaître que le dossier décrivant en détail "les activités de dissimulation irakienne", fourni par ses soins au gouvernement américain et mentionné, par Colin Powell, devant le Conseil de sécurité des Nations unies, a été constitué à partir de travaux universitaires dont les informations remontent à 1991.

    14 février : discours de De Villepin à l’ONU ; visite de Tarek Aziz au Vatican.

    17 mars 2003 : face à une menace de veto de la Russie et de la France, les États Unis renoncent à déposer une seconde résolution au Conseil de Sécurité.

    20 mars 2003 : ouverture du feu par les Américains, premiers bombardements de Bagdad. Sans aucun mandat international ; les pays satellites de la bannière étoilée, Royaume Unis en tête, l’espagnol Jose Maria Aznar (ami personnel de G.W. Bush, il paiera cet engagement au prix fort avec l’attentat sanglant de la gare de Madrid le 11 Mars 2004 ; 180 morts et 1.400 blessés).

    Et j’en ajoute deux qui n’ont pas été retenues :

    le 8 Décembre 2002 : ce jour là, entre 23 h et minuit, les États Unis volent dans les bureaux de l’ONU, le rapport de 12.000 pages remis par les Irakiens quelques heures auparavant à l’organisation internationale, pour être étudié par les inspecteurs sous les ordres de Hans Blix. C’était sans compter sur la panique que ce document aurait pu déclencher s’il avait contenu plusieurs informations sur la collaboration des Irakiens pendant plusieurs années avec des entreprises américaines, allemandes, britanniques ou françaises. Washington a donc décidé de le visionner avant que les autres membres et les inspecteurs y aient accès, afin de retirer les listes de fabricants d’armes, et des officiels gouvernementaux qui avaient négocié avec les Irakiens. Le procédé relevait d’un comportement de voyous.

    etats-unisle 17 Juillet 2003 : ce jeudi le docteur David Christopher Kelly est retrouvé mort près de son domicile ; la police parle sans tarder d’un suicide, veines du poignet gauche tailladées ; le docteur Kelly était un employé du ministère de la défense britannique et un expert en guerre biologique. Il était inspecteur de l'ONU en Irak, où il était allé 37 fois. Il fut découvert après sa mort qu’il savait parfaitement comment Tony Blair avait artificiellement amplifié le risque irakien.

    La principale caractéristique, sinistre, de cette décision d’intervenir, est qu’elle fut totalement fondée sur une liste de mensonges. C’est en vain que la France et les Russes ont agité leur droit de veto. Dans les faits les États Unis ont réalisé leur invasion sans aucun mandat, déclinant à la face du monde, dans un absolu cynisme le droit du plus fort.

    Il est souvent fait grand cas des nombreuses manifestations populaires contre la guerre à travers le monde. À cela près qu’elles ne mirent jamais en cause le prétexte fallacieux de cette intervention (présence d’armes de destruction massive), et que les protestations ne portaient que sur le simple rejet de la guerre.

    Ce que fit la France ?

    etats-unisLe gouvernement français adopta une ligne claire sans s’en écarter, ayant la certitude que rien ne justifiait la guerre. Le refus de s’aligner sur l’administration Bush fut assumé malgré la lourde machinerie de propagande mise en œuvre par tous les moyens, même les plus vils, les plus sordides et les plus épais. Qui ne se souvient de tous les media Murdoch mettant notre pays en accusation sous les photos des croix du cimetière de Colleville – Omaha Beach. Un soutien à la guerre existait en France sous forme de relais inféodés à la bannière étoilée, tels des Mariton ou des Goasguen, heureusement peu nombreux mais combien bruyants, et toujours bardés des certitudes de ce qui est connu dans les Services Spéciaux comme « le mystère qui cache du vide ». Au final le discours de De Villepin le 14 Février 2003 à l’ONU fut un bel exercice mais il a été admis ultérieurement qu’il ne pouvait changer le cours des évènements. De plus il ne faut pas particulièrement honorer ce qui fut surtout une posture politique destinée aux media intérieurs français comme la suite l’a prouvé. Le même jour au Vatican, le pape recevait le vice-premier ministre irakien Tarek Aziz (chrétien chaldéen de Mossoul). Et son destin tragique incite qu’on s’y attarde.

    Proche de Saddam Hussein dont il fut le ministre des affaires étrangères, Tarik Aziz était, entre autre, un grand ami de la France où il comptait (et compte toujours) de nombreuses relations fidèles, où il était respecté, aimé et soutenu. Personnage particulièrement cultivé, collectionneur de beaux livres, de tableaux et d’objets historiques, merveilleux connaisseur de sa région, et de son histoire, il a pensé jusqu’au bout que la raison l’emporterait dans les pays de l’Occident. Très introduit dans tous les pays arabo-musulmans où il était respecté de la même manière, il était une source précieuse pour la diplomatie française. Autorisé à recevoir dans son lieu de détention un journaliste britannique, il exposa le 5 août 2010 dans le Guardian, comment il avait été témoin de la manipulation anglo-américaine pour détruire les structures gouvernementales de son pays, et l’envahir. Dans les quelques semaines précédant l’agression, il pouvait difficilement aller dans des pays de l’Ouest ; il s’en remit donc à Amin Gemayel pour faire passer des messages à la France. Les mêmes qui avaient joué les flamboyants à l’ONU, ne furent pas pressés de renvoyer des signaux, et ne firent aucune intervention. Et le courage de l’Élysée, n’alla pas jusqu’au accuser publiquement etats-unisWashington de mensonges … La réponse américaine à cette insolence de certains hauts fonctionnaires français fut ultérieurement des accusations dans le dossier pétrole contre nourriture, par une instruction totalement contrôlée par les Américains, conduites en France par le très "indépendant" Courroye, sous l’œil de son ami Sarkozy.

    Ce fut à mon sens la dernière action diplomatique d’une France indépendante

    Comme Eric Zemmour l’a très bien montré, ce fut aussi l’opportunité pour beaucoup d’intellectuels, maoïstes soixante huitard, et de leurs soutiens, de faire le pèlerinage à Washington. Les BHL, les Glucksmann, Arno Klarfeld etc..., tombèrent le masque, et dévoilèrent leur véritable engagement. Les atlantistes de métier, fidèles relais des néoconservateurs américains, ne nous étonnèrent pas avec à leur tête le trio Heisbourg, Tertrais, et feu Thérèse Delpech. Chacun envahissant les plateaux de télé, toujours avec "le mystère qui cache du vide". Ici tout ce beau monde avait des preuves voire des certitudes sur le fameux armement interdit, mais ils ne pouvaient pas en dire plus … !

    Que nous affirme aujourd’hui le député américain Dennis Kucinich (Ohio, démocrate assez à gauche) ? "...La guerre en Irak a été vendue aux Américains grâce à des mensonges facilement démontrables… Il était prouvé à cette époque déjà que l’Irak ne possédait pas d’armes de destruction massive, qu’il n’y avait aucun lien avec le 11 Sep.et qu’il n’était pas non plus une menace pour les États Unis… alors que la plupart de nos soldats sont rentrés, les Etats Unis maintiennent une présence importante au travers du Département d’Etat, et des milliers de compagnies de sécurité privées…"

    Le texte complet en anglais chez Huffingtonpost, lien :

    http://www.huffingtonpost.com/rep-dennis-kucinich/iraq-ten-years-a-million_b_1932280.html?view=print&comm_ref=false

    Et Kucinich développe que l’opération a couté un million de vies irakiennes, et plusieurs milliards de milliards de dollars.

    Les observateurs critiques des évènements survenus depuis ce jour sombre à marquer d’une pierre noire (ce devrait être chacun de nous) tentent un bilan avec les moyens les plus objectifs possible dont ils disposent.

    Les conséquences sont de trois ordres : matérielles, financières, morales... (à suivre...) 

    etats-unis

  • La Laïcité. Le sens des mots..., par Champsaur (I/II)

    Faut il rappeler la passion qui accompagne toute réflexion sur la laïcité ? Or nous sommes toujours surpris de découvrir à ces occasions que le sens des mots est ignoré, ainsi que leur origine, alors même que les débats s’engouffrent assez vite vers des prises de position péremptoires et sectaires (dernier en date, Mars 2011, sans que le sujet de fond de l’islam n’ait été correctement traités). Il nous semble que beaucoup d’aspects de la laïcité « à la française » seraient abordés plus sereinement si l’évolution du sens des mots au cours de l’histoire était mieux connue. 

    Pour revenir aux sens premiers des mots :

    1. Le kleros grec (Κλήρος) était à l'origine le lot reçu par le hasard ou par l'héritage.

    Dans un glissement progressif chez les juifs et chez les chrétiens il s'est assimilé à ceux qui avaient reçu Dieu en héritage. Puis pendant tout le Moyen Age il a désigné les lettrés dans les monastères et chez les contemplatifs réguliers, seuls lieux de connaissances, de lecture et d'écriture. Désignant peu à peu le moine copiste d'un monastère, le clerc s'est identifié à tout homme savant et lettré (définition chez Littré). Le Petit Robert le définit comme une personne instruite. Pendant près de 1.400 ans le clergé a été le seul dépositaire des connaissances jusqu'à la diffusion de l'imprimerie.

    2. Le laos grec (λαος - différent du peuple constitué comme force politique dans la Cité demos (δήμος) - était la foule, la foule des guerriers, foule non instruite. λαός a aussi donné liturgie avec la racine ἐργο « faire, accomplir », qui désigne donc, littéralement, le service du peuple. C'est un culte public et officiel institué par une Église. 

    Le Christ s'adressait aux foules, laos (Odon Vallet); laicos, λαίκός signifie "du peuple", puis "profane", au sens premier de non religieux. Le terme a évolué vers le latin ecclésiastique laicus (pour la première fois chez Tertullien, vers 230 après J.C.) pour désigner logiquement une personne "ni ecclésiastique ni religieuse" (Littré).

    Inusité jusque vers le XVIème siècle, il a désigné ceux qui ne font pas partie du clergé (Petit Robert).

    Littré le trouve dans Bossuet : "un pape laïque", et dans Fénelon.

    Le Petit Robert le trouve chez Voltaire : " missionnaires laïcs".

    C'est uniquement en France à partir de 1870, que le mot laïque tout en conservant le sens de non-religieux a progressivement désigné une posture anti-religieuse, anticléricale, surtout anti-catholique glissement sémantique alimenté par les ateliers les plus à gauche du Grand Orient. Cette obédience avorton de la maçonnerie universelle, non reconnue par elle, de création purement française, athée et délibérément anticléricale, fut à la pointe du combat contre l'église catholique de France et le demeure aujourd'hui. 

    Sur l'universalité

    Ce petit détour vers l'origine des mots n'est pas sans intérêt car il met en lumière deux points:

    * La conception française de la laïcité telle qu'elle a été développée depuis Gambetta et ses républicains ne relève d'aucune universalité, contrairement à ce que s'acharnent à défendre les adeptes d'une laïcité de combat à la française.

    * Elle est de naissance très récente sur une échelle historique, dont l'unité de mesure est de 200 ans chez tous les historiens classiques de l'Université. 

    On cite souvent le 5ème amendement de la Constitution américaine comme modèle et source de la laïcité. Or que dit il ? :

    "Le Congrès ne pourra prendre aucune loi ayant pour objet d'établir une religion ou d'en interdire le libre exercice".

    Non seulement une telle rédaction ne contient pas l'idée d'un combat contre les clergés, quel qu'ils soient, mais les pères fondateurs de la Fédération étaient imprégnés de la Maçonnerie Écossaise, dite régulière et universelle, dont l'initiation impose:

    · la croyance en Dieu

    · la croyance en l'Immortalité de l'âme

    Et s'il y avait un doute, le billet de One Dollar porte imprimé les principaux symboles du 33ème grade...

    La déclaration de Philadelphie proclame un certain nombre de vérités "tenues pour évidentes" telles que "l'existence de la Divinité, la vie à venir, le bonheur des justes, le châtiment des méchants, la Sainteté du Contrat social et des lois." Sur de tels fondements, la violence des attaques anticléricales à la française à la fin du XIXème siècle et au début du XXème aurait été inconcevable aux États Unis.

    Ce que l'on appelle la séparation de l'église et de l'État est donc toute relative dans la Fédération. Qu'on en juge:

    · Lors de son investiture tout personnage officiel (Président, présidents de Chambres, assemblées des États, Juges ... etc), prête serment sur la Bible, souvent en faisant un signe maçonnique.

    · La référence à la religion est permanente. Des candidats à l'investiture affichent leur appartenance. Il est courant d'entendre le "God bless you" en toute occasion. Non seulement on ne cache pas sa religion mais on l'affiche volontiers par des signes extérieurs: beaucoup de juifs portent leur kippa, et il n'est pas rare de voir les catholiques arriver à leur travail, le front ostensiblement enduit de cendre, le lendemain du mercredi des cendres.

    · Comme il n'est pas rare de prononcer le bénédicité en début de repas dans les familles.

    Toute la société américaine est imprégnée de religiosité. Madame Michèle TRIBALAT fait très bien ressortir ces points. Mais au total et très objectivement, quel rapport avec la France du XXème siècle ? 

    Et pour regarder les choses de plus près faisons un petit tour du monde. 

    Au Royaume Uni, le souverain est le chef de l'église anglicane, la révolution de 1689 (la seconde) s'étant bornée à imposer que les lois du Parlement sont supérieures au pouvoir du monarque. Le matin, la BBC débute ses émissions avec la lecture d'une page de la Bible, et il n'est pas rare qu'une messe soit diffusée dans la semaine. Les fêtes chrétiennes y sont célébrées. Le grand quotidien The Times maintient en bonne place une devise fameuse "Dieu et mon Droit". La société anglaise étant une société de classe, élitiste par nature, les communautés se cotoient. 

    En Russie, la Pâques orthodoxe est célébrée avec des banderolles dans les rues affichant "Christ est ressuscité" et les gens se saluent dans la rue en se disant "Christ est ressuscité". 

    En Inde, toutes les fêtes hindoues d'un panthéon très riche sont fidèlement célébrées et le personnel politique ne manque pas de faire savoir qu'il a rempli son devoir spirituel vis à vis du Temple. Là encore les signes extérieurs des célébrations sont portés avec naturel. 

    En Allemagne on déclare sa religion sur sa feuille d'impôts, et la notion de "libre penseur" n'a pas grand sens pour un Allemand. En Octobre 1977, l’évènement dramatique du détournement d’un avion de la Lufthansa vers Mogadiscio, se conclut par l’assassinat du pilote, et l’assaut réussi des forces spéciales, mais en représailles, l’assassinat du patron du patronat allemand Hans-Martin Schleyer quelques jours plus tard. Devant le Bundestag le chancelier Helmut Schmidt effondré déclare « avec l’aide de Dieu, nous gagnerons contre la barbarie ». (Faut il préciser que ce serait impensable en France ?). 

    Dans tous les pays à système de monarchie parlementaire, le monarque est la référence spirituelle en tant que Royauté Sacrée, même dans les pires situations, comme au Cambodge. En Thaîlande le premier ministre révère le Roi. 

    Petit voyage incomplet si l'on ne cite pas les taoïstes, les shintoïstes et les bouddhistes qui entretiennent et vénèrent le petit autel des ancêtres à l'entrée de l'habitation.

    Comme nous le voyons, prétendre que la laïcité héritée de 1870 est universelle et que la France serait la référence, a quelque chose de totalement irréel et de fâcheusement présomptueux, avec un orgueil mal placé qui le dispute à l'aveuglement. 

    Sur l'Ancienneté

    Il est aussi de bon ton de lui attribuer une ancienneté qu'elle n'a pas. Michèle Tribalat (citée), emportée par son élan, nous dit " ... Historiquement, la laïcité française, c’est, après des siècles de rivalité, la mise au pas de l’Eglise par la République, pour qu’elle se cantonne dans son magistère spirituel ...". En fait de siècles, la République sous la forme d'aujourd'hui n'a jamais que 140 ans d'âge !

    Tel député de bonne foi, dans un article de mars 2004, " La laïcité pour tous" nous dit " Plongeant ses racines loin dans le passé ..." ce qui est tout aussi rapide.

    S'agit il d'évoquer la lutte éternelle entre les Prêtres et l'État, dans les trois fonctions indo-européennes ? Elle ne date pas de 1789. Le Gautama Bouddha s'est heurté aux Brahmanes 500 ans avant notre ère, un rabin qui a fini sur une croix avait demandé que les deux pouvoirs soient honorés (ce qui, donc, n'allait pas de soi ...). Et plus près de nous le Droit divin de la Monarchie a volé en éclat devant Luther, Calvin et la Réforme qui a soufflé sur l'Europe, et en France le Jansénisme. 

    Une troisième affirmation hasardeuse nous inflige que le triptyque de la République serait une création révolutionnaire, alors qu'il est d'essence strictement religieuse, diffusé par la Maçonnerie universelle des Constitutions d'Anderson :

    · Liberté : au sens où l'Homme est la seule créature vivante sur la Planète à pouvoir choisir en toute conscience entre le Bien et le Mal; pouvoir unique qui imprègne tous les Livres sacrés de l'Humanité.

    · Égalité : c'est l'égalité devant la mort, la seule réelle, fatalité très tôt perçue dans la destinée de l'Homme, là aussi partout inscrite, aussi loin que l'on peut décrypter des textes et des vestiges.

    · Fraternité : l'idée que tous les Hommes sont issus de la même matrice. 

    On est donc très loin des élucubrations d'un jacobinisme centralisateur. Il va de soi que le petit instituteur barbu à la tignasse hirsute, fabriqué par les IUFM de monsieur Jospin, n'a pas les connaissances pour enseigner ces fondements comme nos maîtres et nos professeurs "de la laïque" les offraient avant mai 1968, aux jeunes cervelles dont ils avaient la charge, secondés par les manuels d'Albert Malet et de Jules Isaac.

    Le G.O. a organisé un tintamarre à l'occasion du discours de Nicolas Sarkozy à Latran (20 décembre 2007), faisant à nouveau le contresens d'appeler à l'aide les Lumières comme rempart à toute référence religieuse. Agitation bien inutile dans la mesure où monsieur Sarkozy lui-même n'a certainement rien compris à ce qu'il lisait, mais surtout sans fondement étant donné que les Lumières en question n'ont jamais prétendu éradiquer la Transcendance.

    Le professeur canadien de sciences politiques (aujourd’hui disparu) Jacques Zylberberg résume un tour de la « laïcité » dans quatre pays, Allemagne, Angleterre, États Unis, Canada en ces quelques mots : « Dans les quatre pays étudiés, il n’existe pas de laïcité juridique ou sociétale au sens français. Même aux États-Unis des pouvoirs publics et un système scolaire neutre coexistent avec une société civile balisée par les institutions religieuses. Dans les trois autres pays, des régimes quasi concordataires maintiennent des situations de confessionnalité importantes en dépit de la sécularisation sociétale. Dans ces quatre pays, le pluralisme et la fragmentation des appartenances et des références influencent des espaces publics et des sociétés civiles sécularisées mais non laïques ». (à suivre)

  • François Hollande, la rose ou l'épine, par Hilaire de Crémiers

    (Voici l'analyse politique d'Hilaire de Crémiers, parue dans le numéro 104 de Politique magazine, février 2012)

     

    Jamais le système politique français n’a paru plus extravagant que dans ces temps d’échéances électorales. François Hollande peint l’avenir au couleur de sa rose, mais ce qui s’annonce, c’est un paquet d’épines.

            François Hollande s’est déclaré à la nation française : il veut l’épouser. Il l’a dit solennellement au Bourget, le dimanche 22 janvier, devant un parterre socialiste savamment rassemblé. Il a affirmé vigoureusement qu’il se montrerait apte à remplir sa fonction. Il a décliné son pédigree ; il a affiché son passé ; il a su convaincre qu’en dépit de l’envie, dans la conduite de sa vie, se lisait clairement la ligne de son destin : oui, son destin ! 

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            Maintenant quel doute serait permis ? Depuis l’origine, c’était prévu. Est-il besoin de préciser que ce qui était prévu, c’était que François Hollande était prévu ? Exactement comme naguère apparut François Mitterrand, cette figure exemplaire, à jamais tutélaire, dont il recueille aujourd’hui l’esprit, emprunte l’itinéraire, imite les formules et jusqu’aux gestes et jusqu’à la voix. Il en a les accents épiques qui étonnent le monde et qui cependant détonnent dans cette bouche aux nonchalances bourgeoises qu’on croyait plus habituée aux bons restaurants et aux bons mots des discours de compromis. Après tant de mois de luttes fraternelles, c’est acquis : François Hollande qui était pris pour un benêt diplômé, un mou sans envergure, est l’homme que les circonstances imposent, que la République veut, qui va s’unir à elle. C’est une révélation : le mot a été employé.

     

    La gauche éternelle

            Son éloquence en a gagné une violence virile qui effarouche et enthousiasme, le but recherché ! Comme Mitterrand. Il se dresse face à l’histoire dans une posture à la fois protectrice et vengeresse. 

            Comme Mitterrand. Il invective ce qu’il dénonce comme son seul ennemi personnel, la finance, l’argent, « le gros argent ». Sa véhémence alors touche à cette indignation presque sincère où excellait le vieux Mitterrand. Les compagnons et anciens concurrents interloqués en sont venus, au pied du tréteau, à se regarder : l’art du disciple l’égalerait-il au maître ?

            Lui qui a toujours vécu à son aise et sans scrupule en se pliant d’instinct à toutes les roublardises du politicien, et qui par principe ne connaît pas de principes puisqu’il s’est plu à transgresser les mœurs bourgeoises, se hausse ainsi par la parole jusqu’à cette vertu rhétorique qui a toujours fait le succès des agitateurs d’opinion. Lui aussi, toujours comme Mitterrand et comme tant d’autres hiérarques du socialisme à la française, il vient d’une bonne famille où lui ont été inculqués et le souci de la vérité et les règles de l’honnêteté. Un aiguillon intime l’a poussé à la rupture. Ce fut avec détermination qu’il a résolu de se façonner une personnalité de gauche. Il l’a confessé au Bourget : il l’a fait contre son père. Comme d’autres, bien connus, de tout ce petit monde des hauts dignitaires socialistes. Qui ne compâtirait ? Ce n’est ni la faim, ni la soif, ni la misère, ni la vue du dénuement, ni le dévouement aux misérables, ni la dureté de la vie, ni le besoin d’amour et de solidarité qui l’ont rendu socialiste. Non, c’est l’épreuve d’une conviction personnelle qui a su très vite repérer que la voie socialiste était celle de sa réussite politique et qui s’est heurtée – avec quel courage – à la tradition de ses pères ! Douloureuse épreuve et qui mérite sa récompense.

             Des journalistes émus ont su noter qu’il a évoqué cette souffrance avec pudeur et discrétion. Comment ne pas être sous le charme d’une telle vergogne qui interdit le moindre sourire ? Il n’est pas douteux que, de telles épreuves, ne peuvent sortir que des personnalités trempées.

    Le projet

            Aussi l’homme adhère-t-il au « projet ». Il ne fait qu’un avec lui. Le « projet » ! Répété à l’infini, ce mot est sacré. 

            Voici qu’il l’endosse comme un ornement sacerdotal ! Oui, « le projet » investit toute sa personne et l’élève à une dignité inviolable. Cependant il a précisé à l’entourage que ce « projet » était sien, même, bien sûr, et pourtant autre que le « projet » confectionné par le parti et les partisans. L’ambivalence du propos embrasse toutes les nuances du programme, de la rigueur la plus nette au laxisme le plus coulant. La conception générale, d’une générosité débordante, englobe tout le système qu’il ne s’agit que de régénérer, ce bon vieux système républicain qu’il a appris à aimer lors de son ambitieuse jeunesse, mis à mal aujourd’hui non par l’usure du temps, ni par la vieillerie de ses rouages trop compliqués, ni par la tempête actuelle qui secoue sa carcasse démantibulée, mais uniquement, exclusivement – il le répète – par les agissements irresponsables et criminels du président en exercice. Aussi se fait-il fort de le remettre en état et en marche, de lui redonner brillant et dynamisme. Il a certifié avec ce sourire qui lui est si caractéristique et qui se veut finaud, que ce serait tâche facile.

            Il résoudra tous les problèmes existants ; mieux encore : il les résoudra sans problème. Dans cette aisance se reconnaît cette force tranquille qui revendique « la normalité » et devant laquelle toutes les difficultés s’aplanissent. Il y a du prophétisme dans pareille assurance : égaliser les chemins, tous les chemins, c’est bien ce à quoi appelle cette voix qui crie son message de salut. Et aussitôt qui ne sent que le désert va fleurir ? Aucun roman d’anticipation n’a fait rêver pour la société à venir d’une plus parfaite platitude : tout sera raboté ; pas le moindre monticule sera épargné. Le nouveau messie peut passer. Cette égalité universelle à laquelle la France et l’Europe et le monde sont appelés par la voix exigeante de l’homme qui a su s’identifier à cette suprême loi morale, est devenue la norme absolue qui uniformise et harmonise toutes ses fameuses propositions aussi longues que larges : les deux barres du signe « égal » deviennent son logo de campagne. Il a même décidé, d’avance, de rabaisser sa rémunération de président. Qui fait mieux ?

     

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     l’art du disciple l’égalerait-il au maître ?

     

    L’avenir en rose

            Aucun obstacle ne saurait résister à pareille détermination. 

            C’est déjà tout vu, tout dit, tout chiffré. La crise de la dette sera résorbée en cinq ans, calcul à l’appui. Toute la question de l’Éducation nationale sera traitée d’un seul coup en y mettant les moyens et les emplois qu’il faut et sans coûter un sou de plus. 

            Il n’y aura plus de problème de logement : l’offre sera multipliée, les prix encadrés, les mairies des « riches » contraintes à bâtir sous peine d’amendes. Travail, chômage, tout sera réglé par de nouvelles lois qui donneront au code du travail ce poids supplémentaire qui lui permettra d’écraser définitivement les problèmes sociaux. La Sécurité sociale trouvera naturellement les recettes suffisantes pour que ses avantages soient garantis indéfiniment et étendus, même au-delà de nos frontières, le modèle français ayant une vocation à l’universalité. Mais en même temps les PME seront soutenues : des fonds seront créés à cet effet. L’immigration sera conçue comme le régime normal d’accès à la citoyenneté, ce qui enlèvera tout prétexte de se manifester aux émeutiers et aux incendiaires.

            Il est certes reconnu que les chefs socialistes qui n’ont pas le privilège de vivre dans les zones de non-droit et de goûter les plaisirs raffinés qui s’y pratiquent, n’ont pas su évaluer l’importance de la sécurité pour « les petites gens ». Pour eux, par condescendance, il est admis que la sécurité doit aussi avoir la séduction d’une certaine rigueur. Cette audace du candidat n’a pas manqué d’être saluée. 150 000 emplois-jeunes viendront dynamiser les zones de pauvreté. L’argent sera pris sur les familles françaises qui sont toutes soupçonnées à fort juste titre d’être riches. Impôts, taxes, prix des services, tout sera établi au prorata des revenus et des patrimoines qui seront par conséquent constamment vérifiés, inspectés, contrôlés, pesés.

            Nicolas Sarkozy ayant disparu et François Hollande étant au gouvernail, la croissance sera immédiatement au rendez-vous. Evidence incontestable et qu’il n’est pas besoin de démontrer. L’Europe subjuguée se convertira aux recettes hollandaises ; les traités seront révisés pour enregistrer ces merveilleuses trouvailles dans une unanimité telle que les sommets ne seront plus que de convention. 

            L’Amérique, la Chine, les pays émergents dont le masochisme est bien connu, se mettront avidement à l’école du nouveau président de la République française qui les flagellera de ses règles dont le nombre incalculable les fera gémir de volupté. Les islamistes n’auront pour la France que des sourires : ils n’auront plus à conquérir ce qui leur sera gracieusement offert. Par anticipation, l’islam sera reconnu comme la religion majoritaire en France. Il n’y aura donc plus de terrorisme et de guerre. La France retirera ses troupes d’à peu près partout et le budget de la Défense, déplacé vers l’Éducation nationale, ne sera maintenu que pour le minimum du défilé du 14 juillet. Les réformes sociétales, dans une conception hardie de l’écologie, favoriseront tout ce qui est contre nature, et comme il convient, au nom d’une implacable liberté, interdiront non seulement d’encourager mais même de penser le contraire !

     

    L'épine

            Toute la presse soutenue, payée par « le gros argent » de gauche – inutile de donner les noms – et pour qui curieusement Hollande n’éprouve que de la sympathie, fera campagne pour lui ouvertement.

            À l’heure actuelle, sauf, renversement de tendances, c’est le candidat qui est donné vainqueur. Mélenchon, malgré ses coups de gueule, lui donnera ses voix, quitte à les monnayer pour les législatives. Dans cette hypothèse, la France se retrouvera intégralement à gauche, de haut en bas, alors qu’elle n’est pas de gauche ; elle l’est artificiellement, les vrais politologues le savent bien.

            Nicolas Sarkozy, dimanche soir 29 janvier, après que ces lignes seront écrites, expliquera les réformes qu’il propose pour essayer de sortir de la crise mais dont les effets ne pourraient que s’étaler dans le temps. Et le temps lui manque ! Et son bilan, c’est ainsi en France, ne plaidera pas pour lui. Il est mal pris dans une mécanique institutionnelle qui le broie : plus il en fera pour se montrer actif jusqu’au dernier moment, plus l’opinion le critiquera, et s’il n’en fait pas assez – et cette même opinion jugera que, vu les circonstances, il n’en fait pas assez ! – il sera tenu pour responsable de tous les échecs. À quoi s’ajoute l’écrasement impitoyable d’un étau électoral : François Bayrou qui joue maintenant le patriote, lui rafle le centre droit, avec des airs de juge et de maître, et Marine Le Pen ramasse à pleines pelletées un électorat populaire qui n’en peut plus d’une situation dont la classe politique est considérée comme responsable.

            Que peut-il sortir d’un pareil imbroglio, alors que l’affaire grecque pourrit la finance européenne, que malgré les 400 milliards avancés par la BCE aux banques, en attendant l’équivalent bientôt, ni le problème portugais, ni le problème italien, ni le problème espagnol ne sont réglés, loin s’en faut ? Quant à la France, elle a beau protester contre les dégradations de ses finances et de ses institutions financières, elle est dans une situation qui la livre au bon vouloir allemand, lui-même, malgré les apparences, fort fragile.

            Les élections présidentielles et législatives ne résoudront rien. 

            S’il est une solution, elle est ailleurs. C’est d’abord d’une autre conception politique que la France a besoin. À quand un État qui soit capable de dominer les évènements ? ■

  • Le Comte de Paris s'exprime....

            La Famille de France continue d'affirmer, de renforcer sa présence dans tous les domaines, et de gagner, ainsi, en visibilité. La naissance du Prince Gaston, la brillante représentation par la Princesse Philomena de notre pays aux obsèques d'Otto de Habsbourg, le voyage du Prince Jean, Dauphin de France, - au même moment ... - en Asie centrale, et, prévue pour janvier, la deuxième naissance dans le couple princier : voilà quelques uns des derniers évènements qui ont marqué ces derniers mois, et conforté les perspectives d’avenir de cette Famille de France....

            Il y a eu, aussi, cet entretien accordé par Monseigneur le Comte de Paris à L'Action française 2000, que nous reproduisons ci-après, et dans lequel le Prince rappelle quelques vérités bien venues.  

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    L’Action Française 2000 : Monseigneur, quel bilan économique et social tirez vous de l’année écoulée ?

    SAR Monseigneur le comte de Paris : Le mal dont souffre la France est mondial. La crise n’est pas seulement financière, elle touche l’économie du monde et par ricochet les classes moyennes et surtout les plus défavorisés. Dans les temps anciens, les premières monnaies étaient frappées à l’effigie des dieux puis à celle des rois dont l’image était inscrite dans l’or, l’argent ou le cuivre. Tels les dieux, ils étaient garants du bien-être des hommes et donc de la monnaie source d’échanges. Apparut alors la République sans visage et anonyme. Le papier remplaça le métal bien qu’il demeurât convertible en or. De nos jours, la monnaie est devenue virtuelle, ce qui vient à dire qu’elle ne repose que sur du vent ou des impulsions électroniques. Depuis les accords de Breton Woods, au lendemain de la dernière grande guerre, le dollar qui garantissait cette illusion devient lui-même illusoire. Ceux qui détiennent actuellement des créances sur les États-Unis d’Amérique peuvent se réveiller, demain, comme tant de Français lors des emprunts Russes en 1917, avec seulement du papier qui ne vaudrait plus rien, des souvenirs égarés.

    Cet engrenage mortifère doit impérativement être repensé, et les dirigeants d’Europe comme ceux du G20 doivent édicter des règles strictes et contraignantes, de sorte que les banques tout comme les traders et les spéculateurs n’outrepassent pas des bornes fixes, afin de ne plus mettre en péril l’économie du monde. Règles assorties de sanctions sévères, comme il en existe pour les citoyens qui ont été incités à se surendetter.

    Une société, à l’image du corps humain, a nécessairement besoin que son sang circule de façon à irriguer la plus lointaine petite cellule. Or actuellement, comparable au sang, l’argent est aspiré à sens unique vers les sphères multinationales de plus en plus inaccessibles et ne retourne pas vers les plus modestes cellules du corps social. Il y a carence, il y a un début de gangrène, il pourrait y avoir embolie. Et ce ne seront ni les perfusions forcées, ni les dialyses imposées qui régleront durablement le problème. Il ne sera que déplacé.

    Le Français, sans plus de points d’appui, se trouve déséquilibré et déboussolé. La confusion saisit cette nouvelle tour de Babel et s’installe à presque tous les niveaux de la société, faisant exploser notre monde en un kaléidoscope de factions trop souvent hostiles les unes aux autres. Une société sans objectif autre que l’argent, sans âme et sans amour, est vouée à la destruction. Notre époque qui a tant besoin de signes pour espérer ne reçoit de ceux qui, par essence, devraient nous réconforter, que des réponses pieuses ou politiquement correctes et trop souvent sans rapport avec la réalité vécue au quotidien et sa nécessité vitale. Or la France n’a pu se bâtir - comme les pyramides d’Égypte - que dans un acte de foi et de solidarité, et dans le respect des principes qui l’avaient fondée.

    AF/2000 : Face à ces défis, comment analysez vous l’action de l’État et celle de la classe politique ?

    Monseigneur : Une "règle d’or" vient d’être proposée par l’Allemagne et la France. Déjà, quelques pays y adhèrent. Il est nécessaire et urgent que l’Europe en son ensemble adopte ce concept de réduction drastique des déficits publics. Encore faut-il s’entendre sur la méthode et les moyens d’y parvenir. Lorsque l’on sait que 54 % du budget voté par le Parlement se perd dans les sables mouvants de l’État, il y a gabegie et une gestion irrationnelle et discordante. Dans ce pourcentage, les budgets de l’Éducation nationale et celui des Armées ne sont pas pris en compte, pourtant essentiels pour une nation. Devrait-on en venir comme dans la nuit du 4 août 1790 à la suppression des nouveaux privilèges ? C’est une hypothèse à ne pas écarter. Avant d’en arriver à cette nécessité, à cette urgence, examinons le présent et préparons l’avenir pour les générations qui nous suivent et celles qui viendront. L’apocalypse, si souvent annoncée pourrait aussi être désignée par le terme de mutation en profondeur de nos systèmes de gouvernance. La réduction du temps de gouvernance du Chef de l’État, quel qu’il soit, me semble une aberration. Gouverner, c’est prévoir, dit le dicton. En un si court laps de temps, cela devient impossible. Alors que, par ailleurs, les partis d’opposition, en France, démontrent plus d’intérêt pour leur propre accession au pouvoir, que d’amour véritable pour reconstruire notre pays.

    Pour ce qui concerne la "règle d’or", je suggère qu’une agence de surveillance impartiale et supranationale européenne soit mise en place pour veiller au bon déroulement de celle-là. Mais également pour exercer une surveillance nécessaire des banques, des assurances et des bourses et traders afin qu’ils ne dérèglent plus le système mis en place. En effet tout le système financier européen a nécessairement besoin de règles et de garde-fous et d’un "gendarme" pour y veiller.

    AF/2000 : Quelle forme d’Europe envisagez-vous ?

    Monseigneur : Telle qu’elle existe aujourd’hui, la constitution européenne m’apparaît non seulement inappropriée mais également totalement désordonnée. La monnaie unique doit pouvoir continuer d’exister car elle nous est indispensable désormais, sans pour autant atteindre des niveaux surélevés qui ne peuvent que nuire à nos exportations ainsi qu’à la vie au quotidien. En revanche, cette constitution arbitraire autant que dérisoire devrait être remise à plat pour un examen plus réaliste de ce qu’il est possible et souhaitable de faire ensemble.

    Il est plus clair que jamais, chacun des vingt-sept pays que l’on tente d’aligner sur un même schéma n’ont ni les mêmes possibilités, ni les mêmes attachements, compte tenu de leur propre culture d’origine à laquelle ils demeurent ancrés. Je proposerais que des thèmes communs, aussi importants que la défense, l’éducation, la fiscalité et certains aspects de la technologie (comme cela existe pour Airbus) ou même des recherches scientifiques (comme pour ITER) fassent l’objet d’alliances au cas par cas et sur un nombre d’années à fixer et, bien entendu, renouvelables si les résultats s’avèrent positifs.

    AF/2000 : Que pensez-vous de la politique étrangère de la France ?

    Monseigneur : La France n’est pas seule, elle participe, au sein de l’Europe, à l’élaboration d’une politique commune extérieure et concourt militairement à la force commune de l’OTAN, c’est un fait indéniable. De surcroît, l’Angleterre et la France possèdent une armée qui fournit sur le plan humain et celui de l’armement une force de frappe très conséquente (sans oublier la force nucléaire de dissuasion), bien supérieure au reste de l’Europe. Cet état de fait a amené le président de la République française à prendre ses responsabilités pour entraîner ses partenaires, non sans difficultés, dans des missions essentielles, comme en Libye, mission approuvée par l’ONU et soutenue par l’OTAN. Rien n’aurait été possible sans cet aval. Il faut aussi prendre en considération les bouleversements qui ont modifié l’échiquier méditerranéen depuis un an, secoué le monde arabe et l’Islam. Nous avons assisté au soulèvement "pacifique" mais parfois sanglant de populations qui aspiraient à la liberté et désireuses de mettre un terme aux dernières séquelles de féodalités obsolètes et souvent dictatoriales. Cela prendra encore du temps et de la douleur pour instaurer une véritable démocratie, mais les premières pierres de cette fondation ont été posées. Dans ce contexte, un grand pays islamique, de tradition moderne et démocratique, est demeuré stable, c’est la Turquie. Dans son isolement actuel, elle ne se prive pas d’agir. Elle frappe les Kurdes dans leurs bases en Iraq et y pénètre militairement, sans que personne n’ose bouger, et demain si la Syrie continue à provoquer des incidents de frontière, elle pourrait être tentée de mettre au pas son voisin du Sud. Par ailleurs elle aide les nouveaux régimes d’Égypte et de Libye à programmer leur reconstruction. Il n’y a qu’un pas pour faire renaître de ses cendres l’empire Ottoman. La France et l’Europe doivent revoir leur copie. La Turquie doit être arrimée à l’Europe par des liens forts et préférentiels. Une sorte de statut à part, sans pour autant s’installer dedans. Il faut trouver la sémantique adéquate pour ne blesser personne. Mais agir vite.

    AF/2000 : Quelle est votre vision de la royauté ?

    Monseigneur : La royauté, précisons-le, n’est pas une institution politique, un système parmi d’autres systèmes, mais un principe par surcroît spirituel. La royauté ne signifie pas : "pouvoir d’un seul". C’est le rappel le plus parfait au principe d’unité qui est le caractère essentiel de la fonction royale et qui a permis à la France d’être une et indivisible. Le roi n’a pas vocation à légiférer, d’ailleurs le vieux dicton du droit français dit : « Le Roi en son conseil. Les peuples de France en leurs États. » Séparation des pouvoirs et décentralisation étaient déjà de règle. En revanche, le roi incarne la tradition dont il est la mémoire historique, vivante et dynamique. Tout le monde sait qu’il existe sept royaumes, un grand duché et deux principautés en Europe. Ils incarnent l’identité de leurs peuples.

    Pour conclure, je suis intimement persuadé que la France a les moyens, les hommes et la richesse de son terroir pour accomplir la magnifique mutation que l’on attend d’elle : entrer dans la modernité du troisième millénaire, mais rien ne s’accomplit de durable, rien ne peut se faire sans justice et sans le respect de la dignité de l’être humain quel qu’il soit. J’ai lu ce jour cette phrase écrite par un philosophe péruvien, Fernand Carvello : « Je n’ai jamais cru les prophètes de malheur. À chaque fois que j’ai senti l’appel du chagrin, je me suis tourné vers la réserve d’espoir que nourrissent l’histoire de France et sa littérature. » Je laisse le dernier mot à Machiavel : « Il n’est rien de plus difficile de prendre en main, de plus périlleux à diriger, de plus aléatoire, que de s’engager dans la mise en place d’un nouvel ordre de choses. » Et pourtant, il le faut, et vite.

    Henri, Comte de Paris, Duc de France - 30 août 2011