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LAFAUTEAROUSSEAU - Page 1506

  • Chine, la puissance inquiète ... Il n’y a pas que la Grèce, dans le monde…*

     

    Nous avons publié cet article le 21 juillet dernier, il y a donc un peu plus d'un mois. Sous le même titre. Août et sa torpeur ont passé. Et voici que l'actualité rattrape notre sujet. Nous croyons utile de le remettre en ligne, de vous proposer de le lire ou relire. On nous accordera d'avoir visé juste et d'avoir posé de bonnes questions !  

    Cet article - de Jean-Luc Gréau, dans Causeur - nous a vivement intéressés. Il ouvre notre regard et notre réflexion non seulement à l'existant mais aussi à des possibles futurs, fussent-ils inquiétants et en contradiction avec ce que, jusqu'à présent, il a été convenu de penser. Ainsi de la Chine, comme puissance, ou même hyperpuissance de demain. De façon naturellement inélectable. Il suffit de prolonger les courbes, n'est-ce pas ?  

    Mais ici, nous n'avons jamais cru à la théorie de la fin de l'Histoire, ni au primat de l'Economie, ni que la mondialisation, réalité d'aujourd'hui, soit nécessairement le fait devant donner forme au monde de demain, ni qu'elle doive supprimer les peuples, les nations, leurs rivalités et leurs différences, ni qu'elle doive apporter à tous égale prospérité, niveaux comparables de développement et la paix universelle. Peut-être même est-ce tout le contraire.

    Le grain de sable grec a grippé pour longtemps - peut-être définitivement - la machinerie européenne. Qu'en sera-t-il si, démentant le conformisme des prévisionnistes, le géant chinois devait entrer en crise ? Economiquement, on peut l'imaginer. Mais d'autres domaines qui y sont corrélés, devraient appeler l'attention. Par exemple le surarmement dans lequel se sont lancées les puissances asiatiques (Chine, Inde et aujourd'hui Japon). Nous ignorons si Jean-Luc Gréau nous suivrait dans de telles considérations extra-économiques. Qu'il veuille bien nous en excuser. En tout cas, son analyse - qui plus est fort bien écrite - nous a amenés à y réfléchir.  LFAR  

     

    « La Chine m’inquiète » disait la duchesse de Guermantes dans Du côté de chez Swann. Le propos, dérisoire mais divertissant, a fini par devenir vrai quand la Chine a atteint récemment le statut de premier producteur mondial aux côtés et au grand dam des Etats-Unis, après avoir trente cinq années durant élargi et renforcé sa capacité économique.

    En juin cependant, tandis que l’imbroglio grec faisait perdre leur latin aux Européens, les bourses de Shanghai et de Pékin ont offert le spectacle d’un krach qui n’était attendu par aucun des économistes spécialisés. L’effondrement des cotes, de plus d’un tiers en deux semaines, a touché toutes les valeurs et la peur s’est emparée des entreprises qui étaient cotées ou voulaient se faire introduire en bourse.

    Il y avait deux façons d’aborder l’évènement. La première consistait à prendre le mouvement comme une profonde correction survenant après cinq mois de folie qui avaient vu, depuis janvier, les cotes s’élever de 55% environ. Il aurait fallu alors attendre la stabilisation spontanée du marché revenu à plus de réalisme. La seconde consistait à s’alarmer des répercussions du mouvement qui ont eu lieu dans sa foulée : report de toutes les introductions en bourse, report de toutes les augmentations de capital, à commencer par celles envisagées par les entreprises surendettées pour renforcer leur solvabilité. C’est ainsi qu’ont réagi les autorités de Pékin.

    D’abord, en injectant de la monnaie directement vers les brokers à partir des guichets de la banque centrale, ensuite en faisant intervenir un organisme public de marché, le Chinese Finance Securities Corp, ensuite encore en mettant en action les banques commerciales d’Etat, pour un montant de plus de 200 milliards de dollars, enfin en interdisant toute vente durant six mois aux détenteurs d’au moins 5% des actions. Le caractère massif de l’intervention en dit long sur l’inquiétude du pouvoir de Pékin.

    Un mois après la baisse initiale, la perplexité s’est installée. Personne ne sait si la hausse de la cote obtenue grâce aux mesures publiques de soutien du marché va déboucher sur une stabilisation durable. Nous pouvons dire cependant que cette stabilisation sera considérée comme acquise si le mouvement d’introductions et d’augmentations de capital reprend.

    A la faveur de l’épisode, la Chine a cessé de produire l’image d’une puissance orgueilleuse, dominatrice et sûre d’elle-même. Paraphrasant la duchesse de Guermantes, on dira « La Chine s’inquiète ». Elle s’enracine sans doute dans le fait central du surendettement qui touche d’innombrables entreprises liées aux secteurs du logement et des infrastructures. Entre 2008 et 2014, l’endettement global des Chinois a rejoint des niveaux « occidentaux », passant de 140% à 250% du PIB. L’endettement nouveau s’est concentré dans les entreprises et les collectivités locales.

    L’énoncé du problème économique chinois est désormais le suivant : ou bien les autorités de Pékin parviennent à réduire graduellement la croissance, sans la casser, pour contenir la dette des entreprises ; ou bien ils acceptent une fuite en avant consistant à doper sans cesse l’économie du pays, pour repousser l’échéance d’un « crash landing » dont le krach boursier de juin n’aurait été qu’un signal précurseur.

    Il n’y a pas que la Grèce dans le monde, il y a aussi la Chine. 

     

    Jean-Luc Gréau - Causeur

    *Photo : Zhengyi Xie/REX Shutter/SIPA/Rex_Stocks_Soar_China_4900402B//1507101258

  • La Saint Louis, c'était hier et Boulevard Voltaire l'a célébrée. Bravo !

    Saint Louis et notre temps, par Henri VI, Comte de Paris

    Texte publié dans Le Monde, en 1970, pour le 700e anniversaire de la mort du roi Saint Louis.  [Extraits]

     

    comte de Paris

     

    « Il n'est pas deux époques plus différentes, apparemment, que celle de Saint-Louis et la nôtre. Notre monde, gouverné par la science et les techniques, qui se veut matérialiste, où l'on ne connaît ni bien ni mal, ne peut que difficilement comprendre un siècle qui fut peut-être celui de la plus haute spiritualité, où le péché était en abomination, et qui reconnut pour héros celui dont tous les actes de la vie et jusqu'à l'holocauste final, n'eurent d'autre principe que la foi: la foi la plus ardente, la plus généreuse et la plus agissante qui s'empara jamais de l'esprit et du cœur d'un homme. La gratuité des dernières croisades, inspirées par le seul amour du Christ, apparaît comme aberrante à notre temps où il arrive qu'on en prêche de nouvelles, pour la défense d'une certaine forme de civilisation, sans doute, mais aussi pour sauvegarder le culte sourcilleux d'un tout autre dieu.

    Notre société, décomposée, où triomphe l'individualisme absolu, avec ses apparences égalitaires, son refus du sacré et son pouvoir banalisé, est certes à l’opposé de la société féodale du milieu du treizième siècle, rigoureusement organisée et hiérarchisée, mais couronnée par une autorité légitime, sacralisée, aux vertus évangéliques. Point n'est donc surprenant que ce règne, glorieux entre tous, qui malgré les vicissitudes de l'histoire, demeura si longtemps populaire et ne suscita qu'admiration et respect, soit aujourd'hui tenu pour négligeable, voire dénigré et contesté. 

    Certaines circonstances du temps de Saint Louis ne sont pas pour autant si éloignées du nôtre. Au jeu des comparaisons, il serait facile d'y trouver des similitudes étonnantes pour ceux qui douteraient de la constance de la nature humaine et du renouvellement des situations qu'elle explique: révolte de puissants mal contents; violences estudiantines ; ébranlement des maîtres, université en péril; poussées anarchiques au mysticisme déclamatoire; prétentions abusives et virulentes de groupes sociaux jaloux de leurs privilèges... Mais ce n'est pas à ces péripéties qu'il faut s'arrêter pour nous sentir plus proches du roi à la conscience héroïque; mieux vaut rechercher dans l'exemple qu'il nous a laissé, dans les enseignements qu'il nous a légués ce qui doit être utile au pays dans le présent, ce qui peut contribuer à assurer son avenir. Cela est bien, je crois, la meilleure manière d'honorer sa mémoire.

    D'abord, il faut constater que tous les principes par lesquels s'est constituée notre vie nationale se manifestent déjà ou sont en germination dans le règne de Saint Louis, « printemps de la France ». Avec Louis IX apparaît vraiment la notion de légitimité fondée sur le respect du peuple et du pouvoir qui le représente, le guide et le sert. C'est de lui que la monarchie capétienne tient son caractère spirituel qui donne à son œuvre de justice, d'unité et d'émancipation sa valeur profonde.

    [...] Nous sommes tous les fils de Saint Louis : quelles que soient les apparences présentes, les Français resteront les pèlerins de l'idéal, la seule recherche de biens matériels ne suffira pas à les satisfaire et n'apaisera pas leur soif de justice. » 

     

  • Imposteur ? Vous avez dit imposteur… ?

     

    Par François Reloujac

    Dans le courant de ce mois d’août 2015, Français et Anglais sont confrontés, par médias interposés, à la notion d’imposture. Les présentations et les points d’application ne sont pas les mêmes, les conséquences et l’ampleur des discussions non plus, mais ces deux débats permettent d’éclairer un peu le fonctionnement de notre société, de comprendre le sens des mots et de réfléchir sur l’importance du verbe dans toute société qui se réclame de la démocratie.

    L’Angleterre face au « syndrome de l’imposteur »

    Début août, le magazine britannique Vogue a publié une interview de la jeune actrice Emma Watson dans laquelle celle-ci déclarait que, malgré ses succès, elle se sentait un peu comme un « imposteur » dans le monde des acteurs et actrices. Faisant écho à cette déclaration, d’autres journaux d’Outre-Manche rappelaient que ce n’était pas la première fois que la jeune actrice laissait en confidence l’idée que son succès n’était pas mérité. Il serait donc obtenu comme par fraude. Surfant sur la popularité de l’actrice les médias britanniques ont exploité cette déclaration ; les uns pour dire, méchamment, que l’actrice faisait preuve de « fausse modestie » et les autres pour disserter, doctement, sur le « syndrome de l’imposteur ».

    Il y a peut-être une explication plus simple : Mademoiselle Watson est seulement une actrice dont l’humilité lui fait constater que l’art qu’elle cherche à servir est tellement grand que son jeu ne peut pas lui permettre d’atteindre la pureté et la plénitude de ce qu’il faudrait. Dans ce cas, le terme « imposteur » signifierait qu’elle croirait usurper une qualité qu’elle n’aurait pas. Sans aucune qualification pour en juger au regard de la technique cinématographique force est de constater que eu égard au succès populaire qui est le sien, elle n’usurpe rien du tout. Quant à vouloir expliquer cette réaction par un « syndrome » qui ferait d’elle une personne relevant de la médecine clinique, cela paraît invraisemblable. Et si, tout simplement, elle n’était pas qu’une véritable actrice et que, comme tout professionnel talentueux, elle était juste consciente de ses propres faiblesses ? Car plus quiconque maîtrise son art plus il connaît ses propres lacunes.

    Ici, donc, le terme « imposteur » est utilisé par une personne qui se qualifie ainsi elle-même, par une personne qui a peur de tromper les autres alors qu’elle ne le souhaite pas ; ce terme est par ailleurs en rapport avec une qualité extérieure que cette personne cherche à atteindre pour l’offrir aux autres alors qu’elle considère ne pas l’avoir. Dans ce cas l’« imposteur » se réfère au passé et met en garde ses admirateurs trop indulgents.

    Nous sommes aux antipodes de ce qui se passe en France.

    La France face à la suffisance de l’imposteur

    93318-imposteur-cotta,bWF4LTY1NXgw.jpgQuinze jours après le début de ce débat Outre-Manche, le président de la République française a déclaré, sans l’ombre d’un doute ni même d’une hésitation qu’il « continuerait » à baisser les impôts des Français en 2016… ajoutant, dans un premier temps, « si la croissance le permet ». Dans la présentation que les médias ont faite de son intervention, il n’est nulle part question d’imposture… et pourtant !

    D’abord, le président sait bien qu’il n’a pas baissé les impôts des Français, bien au contraire, il ne peut donc pas « continuer » à les baisser. Il n’a fait que réduire le nombre de ceux qui payent l’impôt au point que désormais, en France, le « consentement à l’impôt », fondement même de la démocratie, n’est plus accordé par les représentants des contribuables mais par les représentants de ceux qui ne payent pas l’impôt. On peut d’ailleurs se demander si les lois fiscales françaises, dans leur principe même, sont encore conformes à la Constitution. Ensuite, le président sait aussi que la croissance ne sera pas au rendez-vous, ni en 2015 ni en 2016. Il pourra éventuellement y faire croire en embauchant quelques fonctionnaires supplémentaires puisque le PIB est, pour faire bref, la somme de la valeur des productions vendues par le secteur privé et des dépenses engagées par le secteur public.

    Dès lors le mot « imposteur » doit ici être pris dans son autre acception – la plus courante –, celle d’une « personne qui abuse de la crédulité d’autrui par des discours mensongers » (dictionnaire historique de la langue française d’Alain Rey). En général, cette personne ne paraît pas souffrir d’un « syndrome ». Si syndrome il y a, c’est celui de crédulité et ce sont ses auditeurs qui en sont victimes et devraient se soigner. A l’inverse, bien souvent, ce genre d’« imposteur » est tellement sûr de lui et de l’autorité de son verbe qu’il en devient suffisant.

    Dans ce cas le terme « imposteur » concerne une personne qui ne veut surtout pas que quiconque le lui applique à elle-même car elle a pour but de tromper les autres ; ce terme est par ailleurs en rapport avec une action (réelle ou virtuelle) que cette personne cherche à vanter auprès des autres alors qu’elle sait qu’elle ne peut pas produire les résultats officiellement annoncés et attendus. Dans ce cas l’« imposteur » en appelle au futur et cherche à séduire ses « sujets » trop sceptiques, voire hostiles. •

  • Thalys : à quand le réveil européen contre l'islamisme ?

     

    Une humeur d'Alexandra Laignel-Lavastine, dans Figarovox 

    Il s'agit, en effet, d'une humeur, d'un coup de gueule, sur lequel on peut discuter. L'ensemble comme le détail nous paraissent très bien vus. On a aussi parfois l'impression de quelque démesure, mais il s'agit d'un coup de gueule. Après l'attaque terroriste contrée du Thalys, Alexandra Laignel-Lavastine estime que les autorités d'Europe ne prennent pas les mesures adéquates pour enrayer le phénomène djihadiste. Mais de quelles autorités européennes pourraient-elles bien venir ? il n'y a aucune chance que ce soit du côté des Institutions Européennes : elles sont immigrationnistes. Pourrait-il y avoir un réveil, une coordination, une conscience commune des peuples européens face à la menace djihadiste et se pourrait-il qu'alors des mesures adéquates soient enfin prises ? A notre sens, ce ne pourrait être que par les Etats, sous la pression de la menace, de son extension, de ses violences et, du coup, des opinions publiques. Ce qui n'interdirait ni aux Etats, ni aux opinions européennes de se coordonner. LFAR 

     

    Ayoub El Khazzani, le sinistre individu qui a bien failli provoquer un bain de sang dans le Thalys Amsterdam-Paris ce vendredi 21 août — n'eût été le courage de trois jeunes Américains, dont deux militaires chevronnés —, fêtera ses 26 ans le 3 septembre. Encore « un enfant perdu du djihad » victime du racisme, de l'exclusion et de l'islamophobie ?

    Probable. D'ici quelques jours, il est à parier que nous verrons fleurir quelques fines « analyses » de ce genre. Dans l'effrayant climat de déni bien-pensant qui continue d'entourer l'ampleur du danger islamiste en Europe — car c'est un fait, l'ennemi est désormais intérieur autant qu'extérieur —, rappelons en effet que la plupart de nos journaux se complaisaient, il y a encore un an, à reprendre en chœur cet euphémisme rassurant. Pieuse sidération. Un « enfant perdu », c'est mignon, cela suscite la bienveillance et la compassion. Et l'endormissement des consciences au passage, de quoi prolonger l'interminable sieste européenne. Du reste, un grand quotidien a choisi de traiter ce « fait divers » (?) en « société » et non dans ses pages internationales. Comme si nous n'avions pas affaire à un fléau désormais planétaire ; comme si Ayoub El Khazzani ne revenait pas de Syrie ; comme si quelque 10 000 jeunes musulmans d'Europe n'étaient pas désormais concernés par le djihadisme ; et comme si leurs mentors leur conseillaient à leur retour d'aller à la plage (encore que depuis la tuerie de Sousse…), au lieu de commettre des attentats contre un Occident honni et mécréant — aurait-on déjà oublié le décapité de l'Isère de la fin juin ?

    Et dans une semaine? On ne voit aucune raison pour que nos belles âmes n'accordent pas le statut de « victime » à ce terroriste-là aussi, muni d'une kalachnikov, de neuf chargeurs bien garnis, d'un pistolet automatique Luger, d'un chargeur neuf mm et d'un cutter, un fanatique prêt, autrement dit, à assassiner des centaines de passagers. Une « victime » ? Cela ne fera aucun doute puisque l'homme, un ressortissant marocain doté d'une carte de séjour lui permettant de se déplacer librement en Europe, appartient à la catégorie « damné-de-la-terre », humilié par une Europe intrinsèquement coupable et post-coloniale. Ne demandons plus à nos bigots « progressistes » et définitivement aveugles — ceux que certains intellectuels d'origine musulmane laïcs et démocrates n'hésitent plus à qualifier de « collabos face aux islamistes » —, d'entrouvrir un œil et de mettre leur montre à l'heure. Plus leur sens moral se perd, plus leur catéchisme binaire se révèle obsolète, plus ils s'y enferrent. Leur cas est désespéré, mais leur capacité de nuisance intacte. On l'a vu au lendemain des tueries de janvier 2015 à Paris : voilà déjà que quelques semaines plus tard, il ne s'agissait déjà plus de combattre l'islamisme radical, mais le « laïcisme radical » (Todd) ou encore, sur Médiapart, « le triomphe du Parti de l'ordre » (le plan Vigipirate…). Car, cela va de soi, les bourreaux étaient en vérité les victimes (des discriminations et de la haine des Noirs et des Arabes) et les victimes de Charlie ou de la supérette casher des bourreaux : les premiers avaient offusqué les musulmans avec leurs caricatures du Prophète et les Juifs faisant leurs courses un vendredi après-midi devaient être les suppôts d'un Etat « nazi », à savoir Israël…

    C'est dire si la maladie française et européenne est profonde. À se demander si elle n'est pas devenue incurable.

    En outre, est-on bien certain que les droits de l'homme auront été respectés dans ce que l'on appellera bientôt « l'affaire du Thalys » — la menace terroriste la plus grave à laquelle l'Europe fait face depuis le 11 septembre 2001, selon Europol —, comme on parle désormais de « l'affaire Merah » pour désigner (et banaliser) un massacre d'enfants juifs ? À la réflexion, se précipiter sur le terroriste afin de le neutraliser et même, pour ce faire, le rouer de coups et le mettre torse nu comme à Abou Graib, n'est-ce pas extrêmement vilain ? Circonstance aggravante : c'est pour l'essentiel à deux jeunes soldats américains hyper-entraînés, au sang-froid remarquable, que l'on doit d'avoir évité un carnage étant donné la persistante nullité des services de sécurité européens. A-t-on par ailleurs conscience de l'extraordinaire professionnalisme requis pour immobiliser un homme surarmé dans un wagon bondé ? Mais non. Les Américains, on les connaît. Et de surcroît, ces deux-là revenaient d'Afghanistan: des « impérialistes » donc, des « terroristes » selon le livre de Noam Chomsky qui s'étale dans toutes nos librairies et, bien entendu, d'abominables « racistes ». Les mêmes âmes vertueuses qui, au mois de mai, s'insurgeaient contre la loi sur le Renseignement enfin votée par les députés français — une loi naturellement « liberticide » —, se pencheront à n'en pas douter, confortablement installés dans leur fauteuil et leur lâcheté, sur cette grave question.

    Enfin, mais là inutile de parier tant la chose est courue d'avance, nous verrons ressurgir d'ici quelques jours l'inénarrable « loup solitaire » faute d'être capable d'appeler un chat un chat. Cette notion totalement absurde, nous lui vouons une affection toute particulière. Absurde, car si les nouveaux barbares peuvent passer à l'acte individuellement, ils y sont incités par leurs mentors tueurs et violeurs de masse de Syrie ou d'Irak, sans parler de la meute enragée qui se trouve de l'autre côté de leur écran. Qu'à cela ne tienne, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, qui semble particulièrement mal conseillé, nous l'avait ressorti lors de la tuerie perpétrée par Mehdi Nemmouche au Musée juif de Bruxelles en mai 2014 (quatre morts). Il faudra attendre le mois de novembre et la découverte tardive de Daech (L'Etat islamique) après la trêve estivale, pour que le premier flic de France se résigne enfin à parler « de terrorisme en libre accès sur Internet »… On aurait alors pu espérer que le « loup solitaire » allait définitivement rentrer dans sa tanière pour ne plus jamais pointer son museau. On avait tort : il a fait un retour triomphal sur les écrans de iTV comme de BMF TV à la fin juin 2015, après les crimes islamistes de l'Isère et de Tunisie.

    Il est vrai que notre ministre de l'Intérieur n'en rate pas une. Au lendemain de la tuerie antisémite de Bruxelles, il avait ainsi déclaré — sans rire —, que le salafiste français de 29 ans avait été « neutralisé dès son retour en France ». À moins que Marseille (où il fut arrêté à la descente d'un bus) ne se soit miraculeusement transplanté, pour l'occasion, sur la frontière franco-belge… Cette fois, le voilà qui nous explique, toute honte bue, que le tueur du Thalys, un ressortissant marocain, avait été signalé par les autorités espagnoles (qui l'avaient repéré pour « des discours durs légitimant le djihad dans des mosquées d'Algesiras ») aux services de renseignement français en février 2014. Que depuis, la DGSI avait émis une fiche « S » à son encontre « afin de pouvoir le repérer dans le cas de son éventuelle venue sur le territoire national ». Très drôle. Une source de l'antiterrorisme espagnol a en effet déclaré à l'AFP que l'islamiste avait déménagé dans l'Hexagone après mars 2014, et après avoir quitté l'Espagne (où il résidait depuis sept ans et où il était également connu pour trafic de drogues). Mais respect des « droits humains » oblige, on l'avait gardé parmi nous. À ce stade, Madrid prévient Paris, mais l'individu n'est pas localisé. Encore un exploit. Le 10 mai dernier, c'est cette fois au tour des services allemands d'alerter leurs homologues français sur le fait qu'El Khazzani, qui se promenait entre temps en Belgique, était sur le point de quitter Berlin pour s'envoler vers Istanbul. Il ne sera toujours pas arrêté. Si ce tableau reste encore flou, une source de l'antiterrorisme espagnol affirme c'est une fois en France que ce terroriste fiché « S » (pour Sûreté de l'Etat) est parti faire le djihad en Syrie avant de rentrer tout aussi tranquillement dans l'Hexagone. Sans être inquiété.

    Le ministre de l'Intérieur se sent-il vaguement concerné ? Aurait-il la conscience un peu lourde ? A-t-il songé à remettre sa démission au chef du gouvernement ? Après autant de bourdes, ce serait pourtant la moindre des choses.

    Comment comprendre une telle faillite de la part de nos services ? « Nous ne laisserons plus rien passer », proclamaient à l'envi nos responsables politiques après Charlie en même temps qu'ils annonçaient toute une série de mesures, dont une coopération renforcée entre services européens et une surveillance renforcée  des milieux fondamentalistes. Des mesures dont on se demandait par quelle aberration elles n'avaient pas été prises depuis belle lurette… Et à quoi bon un plan Vigipirate et des milliers de militaires français déployés sur le territoire national si c'est pour refuser de placer des portiques de sécurité et des agents bien formés à l'entrée des trains, des métros, des lieux publics, des salles de spectacles, des musées ? Car oui, nous en sommes là, il serait grand temps d'avoir le courage de le dire et de se le dire calmement à nous-mêmes. Et il faut n'avoir jamais vu des victimes déchiquetées par une bombe pour estimer que ce type de désagrément serait tout à fait intolérable aux Européens gâtés par le sort que nous sommes. De fait, notre ministre, décidément farceur, a choisi de mettre en place un numéro vert pour « signaler les situations anormales » sur notre réseau ferroviaire — on croit rêver.

    Mais ce n'est pas tout. Car à quoi bon des soldats patrouillant dans nos rues et nos gares quand on sait qu'ils ne disposent que d'un fusil d'assaut, leur Famas, dont l'usage est rigoureusement impossible sans risquer d'atteindre au passage des dizaines de civils, que ce soit dans les couloirs du métro, dans une gare ou sur la promenade des Anglais à Nice ? Ce dispositif est dissuasif, rien de plus. Y compris à son niveau le plus écarlate. Et l'irresponsabilité de nos dirigeants patente. Il est temps de mettre les pieds dans le plat, d'autant qu'il s'agit là d'un secret de Polichinelle et que les terroristes, eux, n'en ignorent rien. Sait-on par ailleurs que ces mêmes soldats républicains ne cessent de réclamer à leur hiérarchie des armes de poing pour pouvoir défendre comme il conviendrait leurs concitoyens en cas d'attaque et neutraliser les éventuels agresseurs ? En vain. Trop cher, paraît-il. La France n'aurait pas le budget. Seuls ceux qui se lient d'amitié avec l'armurier de leur régiment parviennent, plus ou moins en douce, à se procurer, avec la complicité de celui-ci, un pistolet de façon à répliquer, le cas échéant, de façon efficace et adaptée.

    Sait-on enfin que si un islamiste armé d'un cutter ou d'un couteau se précipite pour s'attaquer à l'un de nos jeunes militaires, garçon ou fille — cela est plusieurs fois arrivé —, son binôme est tenu de répliquer de manière « proportionnée» . Il est autrement dit censé courir vers son camarade pour s'en prendre à l'agresseur… à l'arme blanche ! Problème : il y a de fortes chances pour que son collègue soit déjà à terre, la gorge tranchée. Qu'attend au juste le ministère de la Défense pour réviser ce protocole scandaleusement daté et hors de saison ? Une mutinerie ? On se perd en conjectures. Et pour le reste, rendez-vous à la prochaine tuerie ?

    Se pourrait-il qu'après ce nouvel attentat du Thalys, déjoué de justesse à l'instar de dizaines d'autres en France depuis janvier 2015, les gouvernements européens envisagent enfin de se rendre au réel et de sortir de leur somnambulisme ? Pour l'heure, ils ne se lassent manifestement pas d'avoir un train de retard. Enfin si l'on ose dire désormais…   

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    Alexandra Laignel-Lavastine, philosophe et historienne, a publié en mai 2015 La Pensée égarée. Islamisme, populisme, antisémitisme: essai sur les penchants suicidaires de l'Europe (Grasset, 220 pages, 18 €).

  • Marie-France Garaud : « L'Etat français n'existe plus, nous sommes une province »

     

    Jeudi dernier, 20 août, Marie-France Garaud était l'invitée de la matinale de France Culture. Comme toujours, ses analyses méritent d'être écoutées et méditées. Elle pose une question préalable autour de quoi tout le reste s'ordonne : « Sommes-nous encore un Etat ? La réponse est non. » Suit une heure d'entretien remarquablement intéressante où Marie-France Garaud analyse avec l'extrême lucidité qu'on lui connaît, la crise grecque, la situation de l'Europe, le rôle de la diplomatie française au Moyen-Orient, la politique russe de la France, sa dépendance à l'égard des Etats-Unis. Sans négliger la situation intérieure du pays. A vrai dire, il n'y a guère de sujets où nous risquions d'être en désaccord avec ses points de vue. Elle a aussi le mérite de préciser que rien de ce qu'elle constate de très négatif dans la situation de la France n'est irréversible.   

     

    (A partir de la 34e minute)

     

  • Combien faudra-t-il de morts pour que la France ait une réaction à la hauteur de la menace ?

     

    Cela a été dit mille fois depuis trois jours : sans la présence évidemment fortuite de  jeunes militaires Américains courageux et efficaces dans le Thalys Amsterdam-Paris de vendredi après-midi, un carnage se serait très probablement produit. Horrible et numériquement considérable. L'impavide Bernard Cazeneuve l'a souligné le soir même, ému, sans-doute sincèrement,  à l'idée de ce qu'aurait pu être la catastrophe évitée. Mais évitée par un hasard heureux, une présence non programmée, et non pas du fait des services de sécurité français, qui montrent ici leurs limites. De sorte que comme l'a déclaré un ancien cadre de la DGSI, on peut redouter que le prochain coup sera le bon. En tout cas qu'il finisse par y en avoir un qui soit le bon.   

    Les Français ont-ils bien compris que leurs déplacements, leurs voyages, leur sécurité dans les lieux publics et autres, leurs libertés, s'en trouveront presque inévitablement modifiés, restreints, en tout cas affectés ? Que leur vie quotidienne en sera changée ? Que leur insouciance ne sera peut-être bientôt plus de mise ? Ont-ils mesuré que l'extension du phénomène terroriste, du nombre d'acteurs et de leurs actions, excèdera peut-être bientôt la capacité de nos services de renseignement et de sécurité à les protéger, à garantir la sécurité pour tous ? S'ils n'en sont pas encore conscients, il leur faudra bien le devenir.

    Force est de constater que cette insécurité grandissante n'est pas le fait de Français de souche, ni d'acteurs issus des autres peuples d'Europe, mais de terroristes très généralement venus de différents pays d'Afrique ou du Moyen-Orient. Et de communautés musulmanes. Cela ne se discute pas, n'incrimine pas, de très loin, tous ceux qui en sont arrivés, mais désigne, tout au moins, la provenance de tous ceux qui nous menacent.  

    Il y a longtemps que nous prévenons ici des dangers que notre législation laxiste, devenue inadaptée aux circonstances nouvelles, que notre politique - ou notre absence de politique - en matière d'immigration, que l'accueil d'étrangers en nombre excessif et de provenance monomorphe, qu'une certaine idéologie multi-culturaliste, que notre propension à la repentance, au déni voire au mépris de notre identité, que notre politique étrangère erratique, de surcroît, font courir au pays. Au peuple français. Il y a longtemps - huit ans - que nous disons ici-même que la République vit sur une poudrière. Il est évident que cette situation ne fait que s'aggraver. Jusqu'à quand, jusqu'à quelles extrémités, en laissera-t-on perdurer les causes ?    • 

    Lafautearousseau

     

  • Du krach boursier chinois au chaos mondial

     

    Une analyse d'Yves de Kerdrel

    Ces justes réflexions d'Yves de Kerdrel confirment - à l'autre bout de l'échiquier politique, au moins théorique -  l'analyse alarmiste de Jacques Atali que nous avons publiée vendredi dernier. Kerdrel rappelle à juste titre que le Chinois est joueur et qu'il saura plus ou moins s'accommoder de ses pertes. Ce n'est pas là, en principe, la psychologie française ni européenne. Il pointe aussi les lourdes conséquences sociales et politiques, voire géostratégiques, qui peuvent résulter de cette situation. Nous dirons quant à nous qu'après avoir longtemps eu peur que la Chine s'éveille, les nations développées, dont la France, ont sans-doute été bien légères de placer tout à coup en elle, tant de confiance, de se faire sur elle tant d'illusions. L'idéologie libre-échangiste et ultralibérale de nos milieux politico-économiques, l'appétence très court termiste des dirigeants d'entreprise pour des profits industriels et commerciaux accrus par des importations à bas prix, l'illusion que la Chine pouvait devenir sans dommages l'atelier du monde, les délocalisations massives qui s'en sont suivies, et, peut-être, au fond des choses, une certaine lassitude envers le travail, la facilité consistant à le transférer, tout cela compose, face à la situation présente, un tableau que l'on ne peut observer sans beaucoup d'esprit critique. Les désillusions peuvent être très grandes et les conséquences très graves. Il serait à souhaiter que nos sociétés en reviennent en matière d'activité et d'espace écomiques à des notions plus sages et, en un sens, plus modestement réalistes.  LFAR               

     

    1038351-investisseurs-pas-confiance-retour-proche.jpgLe lecteur me pardonnera, je l'espère, de lui assombrir ces belles journées d'été. Au-delà du drame humain qui se joue à Tianjin, je voudrais livrer quelques réflexions sur les conséquences du krach boursier qui frappe l'ensemble des marchés chinois depuis le mois d'avril. En l'espace de quelques semaines, ce sont près de 4 000 milliards de dollars de valeur qui sont partis en fumée. Comme pour l'heure cette déroute boursière est circonscrite à la Chine, et que, de surcroît, le régime communiste abreuve la terre entière de communiqués lénifiants pour assurer que la situation est sous contrôle, personne n'y prête plus grande attention, surtout dans la torpeur de l'été. Pire que cela, certains groupes occidentaux continuent même d'investir massivement en Chine.

    La première conséquence de ce krach boursier est bien sûr pour les investisseurs. À commencer par les actionnaires individuels chinois. Ils sont estimés à 90 millions, appartenant pour l'essentiel à cette classe moyenne qui contribue à la croissance du pays. Une grosse partie de son épargne est désormais partie en fumée. Ce que le Chinois peut accepter, parce qu'il est joueur. En revanche la chute des marchés chinois va entraîner un effet-richesse à l'envers. C'est-à-dire que cette classe moyenne va beaucoup moins dépenser. Ce qui va évidemment affecter une grosse partie de l'industrie locale.

    Déjà les importations de matières premières, notamment le cuivre et le fer, sont au plus bas. Plusieurs usines commencent à tourner au ralenti. Et, bien que le régime communiste tente de camoufler les chiffres, il semblerait que jamais il n'y ait eu autant de chômeurs déclarés que depuis la fin du mois de juin. Cela se justifie aussi par la perte progressive de la compétitivité de la Chine. Un ouvrier chinois est désormais payé plus cher qu'un ouvrier hongrois. Et un ingénieur informaticien à Shanghaï coûte le même prix que son homologue américain. D'où d'importants mouvements de relocalisation qui se produisent depuis quelques mois. C'est ce qui explique que la Banque populaire de Chine a dévalué trois fois la monnaie chinoise, en une semaine, pour un montant total de 5 %. Un geste inédit depuis plus de vingt ans.

    Il n'y a pas besoin d'être grand clerc pour affirmer que ces dévaluations ne résoudront pas les problèmes économiques de la Chine. Le pays a épuisé son modèle de croissance par les exportations sur lequel il s'appuie depuis des décennies. En revanche, les dévaluations vont inévitablement accélérer les sorties de capitaux. De plus, ce changement de parité ne permettra pas d'endiguer la crise de surendettement de l'économie chinoise avec un taux estimé à 240 %, et la crise latente du système bancaire local qui a prêté sans compter aux entreprises chinoises quand le rythme de croissance était supérieur à 10 % et qui va devoir s'adapter d'ici un ou deux ans à un taux de croissance compris entre 3 et 4 %.

    De fait, les Chinois qui avaient accumulé d'importants bons du Trésor américain et même des titres en euros vont être amenés à les liquider dans les semaines qui viennent. Ils auraient d'ailleurs commencé à le faire. Ce qui explique le regain de volatilité sur les places occidentales. Le problème, c'est que ces ventes de panique vont venir interférer en septembre prochain avec le désir de la Réserve fédérale américaine de commencer à remonter ses taux. Dans ces conditions, nous pourrions connaître d'ici peu un véritable krach obligataire annonciateur d'un krach boursier de grande ampleur qui ramènera les actions américaines ou européennes aux niveaux de cours plus en phase avec un monde où il n'existe plus de locomotive économique après dix années de croissance mondiale tirée par la Chine.

    Mais au-delà de ces conséquences purement financières, il faut s'attendre à voir la Chine connaître ses premiers troubles sociaux de grande ampleur, dans la mesure où la croissance économique va ralentir très brutalement. Surtout, le président Xi Jinping, qui avait déclaré il y a moins de deux ans, lors de son accession au pouvoir, « vouloir renforcer le rôle du marché dans l'économie chinoise », risque de connaître des heures difficiles. Le mythe de l'infaillibilité du plénum du Parti communiste pourrait bien s'effondrer. Et dans ce cas, ce serait tout le régime chinois qui serait sur la sellette. Ce n'est peut-être pas un hasard si les Japonais, qui surveillent leurs voisins comme le lait sur le feu, ont commencé à se réarmer de manière inquiétante.

    Sept ans après le krach de l'affaire Lehmann, qui suivait de sept ans celui des valeurs Internet, qui suivait de sept ans le krach des pays d'Amérique du Sud, qui suivait de sept ans le gigantesque krach d'octobre 1987, la loi des cycles pourrait bien frapper à la porte de cette rentrée économique. Encore une crise que François Hollande n'aura pas vue venir !   

    Yves de Kerdrel  -  Figarovox 

     

  • Un hôtel au château de Versailles ? Tous comptes faits, Frédéric Rouvillois doit avoir raison

     

    Chacun, après tout, se fera son avis, réagira à sa façon. Mais la position de Frédéric Rouvillois sur ce sujet sensible - particulièrement pour des royalistes -  nous paraît tout bien pesé raisonnable et positive. L'exemple des paradors espagnols nous paraît être un argument de poids. Ils ont sauvé de la ruine ou de la muséification quantité d'édifices anciens, désormais pleins de vie, parfois de pures merveilles architecturales et historiques comme l'hôtel San Marcos à Leon ou l'hôtel des Rois Catholiques à Saint Jacques de Compostelle. La France eût été bien inspirée de reprendre chez elle cette idée que l'Espagne a conçue et commencé de réaliser sous le règne du roi Alphonse XIII ... Il est encore temps ! LFAR 

     

    frederic-rouvillois.jpgPour Frédéric Rouvillois*, la probable installation d'une résidence hôtelière sur le domaine peut être un moyen astucieux de sauver des bâtiments en déshérence. Selon lui, « la muséification systématique du patrimoine a quelque chose de glaçant ».

    L'Établissement public du château de Versailles a lancé un appel d'offres pour transformer un ensemble de trois bâtiments longeant le Parterre de l'Orangerie, inoccupés depuis 2008, en hôtel. Certains s'opposent à une privatisation du patrimoine, d'autres pointent la baisse des crédits du ministère de la Culture et l'urgence de restaurer des bâtiments qui sont dans un état de délabrement avancé. Que pensez-vous de cette controverse ?

    Frédéric Rouvillois: Elle me rappelle celle qui a eu lieu récemment à propos de la vente des biens de la famille d'Orléans. Cette dernière a suscité un débat : certains se scandalisaient du fait que les princes de la maison de France vendent un certain nombre de biens importants liés à l'Histoire, aux enchères, comme de simples particuliers. Il me semble que ce réflexe était un peu bourgeois : dire « nous avons un patrimoine, il faut absolument le garder tel qu'il est, sans en modifier un atome » est inapproprié. Mais des objets à caractère historique - portraits, meubles ou argenterie - ne changent pas de nature en changeant de propriétaire. Au fond, qu'ils soient entre les mains de la famille d'Orléans ou d'un collectionneur chinois ou texan amoureux de l'histoire de France ne modifie pas la valeur des objets.

    La polémique actuelle est similaire. Se scandaliser que des bâtiments qui ont été conçus pour abriter des personnes et des activités humaines, et être des lieux de vie soient loués temporairement, et transformés en hôtels par leur propriétaire, ce qui permettrait de les sauver, est une réaction inadaptée. Dans l'appel d'offres se trouve l'idée que l'on restaurerait les bâtiments en question, leur toiture. Si cela permet de ne pas les laisser à l'abandon, de conserver un patrimoine même dévolu temporairement à des activités commerciales ou privées, cela importe peu. La muséification systématique du patrimoine a quelque chose de glaçant. Evitons de tomber dans le côté « poussiéreux » que peut avoir une certaine conception de la préservation du patrimoine français. L'Espagne fait cela depuis longtemps avec les Paradores [ndlr: établissements de luxe situés dans des châteaux, forteresses, couvents, et autres édifices historiques, fondés par le roi Alphonse XIII pour promouvoir le tourisme en Espagne dès 1928] et ce principe fonctionne très bien.

    Y-aurait-il des monuments non-transformables par nature ?

    Evidemment. Les monuments sacrés. Mais ici, on ne transforme pas une église en jacuzzi ! Il ne s'agit pas de faire comme les révolutionnaires de 1793 qui voulaient transformer les églises en grenier à blé ou les vendre à des marchands de pierres pour les détruire et en faire des pavés pour les routes… Ici, la destination n'est pas remise en cause ou dévoyée. Il s'agit de permettre à des gens, contre une somme élevée, de profiter de la beauté du patrimoine historique français, du témoignage le plus élevé, le plus noble de la grandeur de la France. Le projet ne me paraît pas devoir susciter immédiatement la condamnation.

    Cela ne risque-t-il pas de ternir l'esprit de ces lieux historiques ? Certains parlent de « disneylandisation » du patrimoine…

    Non, si « disneylandisation » il y a, elle serait plutôt du fait de ceux qui exposent des œuvres de Jeff Koons dans la galerie des Glaces ou des installations bizarres d'Anish Kapoor dans les jardins de Versailles. C'est cela qui ternit l'esprit des lieux.

    Ce projet voit-il le jour parce que l'Etat déserte toute une partie du domaine de la culture ?

    L'Etat a fait des choix en matière de culture. Il préfère subventionner l'art contemporain dans ce qu'il a de moins artistique et de plus lié à la spéculation financière. S'il s'occupait davantage du patrimoine, notamment architectural, on ne le verrait pas dans l'état d'abandon dans lequel certains monuments sont aujourd'hui. Une fois que l'on a fait ce constat, il convient de prendre des initiatives telles que cet appel d'offres pour éviter que ce patrimoine ne tombe en ruines.

    Pour le moment, seul le château de Chambord est touché par cette transformation d'une partie du domaine en gîtes de charme. Estimez-vous qu'à l'avenir, d'autres joyaux du patrimoine français puissent être concernés par ces privatisations ?

    C'est possible. Mais dès lors qu'on ne transforme pas la Sainte Chapelle en supermarché, ce n'est pas gênant. L'important est de ne pas commettre de contre-sens sur l'esprit des lieux. Lorsqu'ils ont été pensés pour abriter des gens, comme le sont les châteaux, ils peuvent l'être de nouveau - que ce soient des chefs d'Etat étrangers ou des riches clients amoureux de notre patrimoine. Certains monuments, comme le château de Compiègne par exemple, vide et peu visité, auraient à gagner à ce qu'une partie soit transformée en hôtel de charme et qu'ils retrouvent leur lustre d'antan plutôt que de s'engloutir que à peu dans le maelström de la poussière. 

    * Frédéric Rouvillois est professeur de droit public et écrivain. Il a publié de nombreux ouvrages sur l'histoire des idées, notamment L'Invention du progrès, aux origines de la pensée totalitaire (CNRS Éditions, 2010), ainsi que des essais sur la politesse, le snobisme et les institutions, et plus récemment Une histoire des best-sellers (Flammarion, 2011). Son dernier livre Crime et utopie, une nouvelle enquête sur le nazisme, a été publié chez Flammarion.

    Entretien réalisé par Eléonore de Vulpillières (Vox Culture)

                

  • Loisirs • Culture • Traditions ...

  • TERRORISME • Combien faudra-t-il de morts pour que la France ait une réaction à la hauteur de la menace ?

      

    Cela a été dit mille fois depuis avant-hier soir : sans la présence évidemment fortuite de  jeunes militaires Américains courageux et efficaces dans le Thalys Amsterdam-Paris de vendredi après-midi, un carnage se serait très probablement produit. Horrible et numériquement considérable. L'impavide Bernard Cazeneuve l'a souligné le soir même, ému, sans-doute sincèrement,  à l'idée de ce qu'aurait pu être la catastrophe évitée. Mais évitée par un hasard heureux, une présence non programmée, et non pas du fait des services de sécurité français, qui montrent ici leurs limites. De sorte que comme l'a déclaré un ancien cadre de la DGSI, on peut redouter que le prochain coup sera le bon. En tout cas qu'il finisse par y en avoir un qui soit le bon.   

    Les Français ont-ils bien compris que leurs déplacements, leurs voyages, leur sécurité dans les lieux publics et autres, leurs libertés, s'en trouveront presque inévitablement modifiés, restreints, en tout cas affectés ? Que leur vie quotidienne en sera changée ? Que leur insouciance ne sera peut-être bientôt plus de mise ? Ont-ils mesuré que l'extension du phénomène terroriste, du nombre d'acteurs et de leurs actions, excèdera peut-être bientôt la capacité de nos services de renseignement et de sécurité à les protéger, à garantir la sécurité pour tous ? S'ils n'en sont pas encore conscients, il leur faudra bien le devenir.

    Force est de constater que cette insécurité grandissante n'est pas le fait de Français de souche, ni d'acteurs issus des autres peuples d'Europe, mais de terroristes très généralement venus de différents pays d'Afrique ou du Moyen-Orient. Et de communautés musulmanes. Cela ne se discute pas, n'incrimine pas, de très loin, tous ceux qui en sont arrivés, mais désigne, tout au moins, la provenance de tous ceux qui nous menacent.  

    Il y a longtemps que nous prévenons ici des dangers que notre législation laxiste, devenue inadaptée aux circonstances nouvelles, que notre politique - ou notre absence de politique - en matière d'immigration, que l'accueil d'étrangers en nombre excessif et de provenance monomorphe, qu'une certaine idéologie multi-culturaliste, que notre propension à la repentance, au déni voire au mépris de notre identité, que notre politique étrangère erratique, de surcroît, font courir au pays. Au peuple français. Il y a longtemps - huit ans - que nous disons ici-même que la République vit sur une poudrière. Il est évident que cette situation ne fait que s'aggraver. Jusqu'à quand, jusqu'à quelles extrémités, en laissera-t-on perdurer les causes ?    • 

    Lafautearousseau

     

  • CULTURE • Culture et histoire dans nos tripes

     

    Le Festival Interceltique de Lorient vu par Pierre Duriot dans Boulevard Voltaire

    Bel article très écrit où tout est bien vu, sur le Festival Interceltique de Lorient, qui vient de s'achever. (Le 16 août). Nous avons évoqué ici plusieurs fois ces grands messes magiques de Lorient. Il nous a paru bon d'y revenir cette année. Et de la très bonne manière.

     

    f1d824392a11163465e4081225695234.jpegLorient… Une marée humaine déferle sur les quais, dans un mouvement concentrique autour des musiciens en costume, au rythme des instruments traditionnels, dans un genre de célébration païenne des racines et du folklore. Les Celtes, nos ancêtres, les morceaux d’histoire, de culture et d’art ont traversé les siècles et les héritiers des peuples du Nord, sculpteurs de Gaule et plus tard de France, s’affichent dans la cité bretonne, brandissant drapeaux, blasons et uniformes de clans aux côtés de notre emblème tricolore, baignés du son puissant des cornemuses qui vous prend aux tripes. Ils ont revêtu leurs atours séculaires, soigneusement cousus, à l’identique au fil des décennies. Des grand-messes et défilés donnent lieu à des danses et communions avec un public à la recherche de son histoire et sans doute de ses repères, dans une période où la dilution de l’identité culturelle semble entamée de la manière la plus insidieuse qui soit. Mais la modernité télescope les partitions d’antan dans des concerts où les instruments à vent celtiques sont mâtinés d’influences et de rythmes actuels. La voilà, cette nouvelle culture aimée du public battant des mains par milliers, en perpétuelle évolution, mais gardant sa fougue, ses sonorités, ses costumes et ses pas de danse, célébrant la femme, le couple et la séduction. Les jeunes, très majoritairement, se sont emparés de la culture de leurs aïeux, apportant un sang neuf et perpétuant un folklore éternellement renouvelé et ancré dans son époque, à contre-courant de la doxa négationniste ambiante et figée par la correction politique. Ils emmènent leurs concitoyens dans d’inoubliables instants où l’atmosphère tout entière ondule par vagues, rythmée par les talons qui claquent au sol, par les rondes collectives, les envolées de jupons et de dentelles. Le festival « off », celui des bars et tavernes, donne toute sa jeunesse à un folklore accueillant guitares électriques, basses, cuivres et dérivant vers un rock celtique puncheur qui fait aussi le bonheur des festivaliers. Des dizaines de milliers de visiteurs, durant la semaine, fréquentent cette extraordinaire ode à une culture bretonne adorée des Français. Les cornemuses lorientaises, comme tant d’autres fêtes régionales, sonnent comme un fantastique pied de nez à nos responsables politiques actuels, lesquels s’échinent à dévaloriser, ringardiser, culpabiliser des pans entiers de la culture de nos régions mises à mal. Dans le feu de la danse traditionnelle constamment entretenu brûlera, à terme, la mince affiche propagandiste plaquée sur les vitrines d’un pays à l’identité puissante qui ne s’accommodera jamais d’une liquidation pure et simple. Les citoyens démentent leurs responsables et manifestent, dans leur engouement pour ce festival mythique, leur attachement viscéral aux siècles qui les ont faits.  •

     
     
     - Boulevard Voltaire 
     
  • ACTUALITE & RELIGION • À toute volée…

     

    Par Camille Pascal* 

    Nous avons aimé ce texte qui peut concerner ceux qui croient au ciel comme ceux qui n'y croient pas mais sont attachés à « l'essence de la France ». LFAR

     

    Camille%20Pascal_22222222222222.pngLes cloches de France et d’ailleurs ont sonné, ce 15 août, pour les chrétiens d’Orient. Le plus ancien média reprend sa fonction d’alerte.  

    L’engagement de Mgr Barbarin fut d’abord regardé avec étonnement, peut-être même avec un peu de suspicion par un haut clergé français habitué depuis des décennies à ne plus trop faire parler de lui de peur, certainement, d’offenser l’indifférence religieuse érigée en dogme par nos élites médiatiques. 

    La France n’est pourtant pas, loin de là, la Pologne du général Jaruzelski, mais à observer certains de nos évêques, paléochrétiens au point de préférer le culte des catacombes aux fastes de l’Église triomphante, on pouvait parfois en douter…

    La tragédie que subissent aujourd’hui les chrétiens d’Orient a balayé scrupules, hésitations et fausses pudeurs. Toutes les cloches de France devaient sonner à l’unisson le jour de l’Assomption pour réveiller les consciences endormies en leur rappelant que des hommes, des femmes et des enfants étaient aujourd’hui martyrisés de façon épouvantable pour avoir commis le seul crime de prier Dieu dans la langue du Christ là où le Baptiste avait annoncé la venue de celui-ci et saint Paul prêché. Le mouvement lancé par les fidèles eux-mêmes, relayé par toute la puissance des réseaux sociaux et enfin soutenu par le cardinal Vingt-Trois, est devenu, le 15 août à midi, un phénomène de société.

    Une immense majorité des églises de France, le pays en compte tout de même plus de 46 000, a fait entendre le timbre de ses cloches. Jamais, peut-être, le pays n’avait ainsi sonné à toute volée depuis l’armistice de 1918 et le plus ancien média de notre pays, les cloches de nos églises, reprenait ainsi du service, non pas pour rassembler les fidèles, mais pour alerter la population des dangers de l’indifférence et des indignations sélectives.

    On imagine sans peine que tous les laïcistes dogmatiques qui aiment à confondre l’espace public avec l’espace social pour tenter de faire taire les clochers ont dû étouffer des cris de rage dans leurs oreillers comme autrefois les vieilles chaisières le soir du 14 juillet, et pourtant l’on n’aura pas le mauvais ton de s’en réjouir. Leur aveuglement devant les évidences de notre passé commun n’est en réalité qu’une forme, parmi d’autres, de haine de soi.

    Qu’ils croient au ciel ou qu’ils n’y croient pas, tous les hommes et toutes les femmes de bonne volonté ne pouvaient que soutenir une initiative qui n’avait en réalité d’autre but que de défendre les plus faibles et cette liberté essentielle qui consiste à pouvoir croire, célébrer et prier en toute tranquillité.

    En cela, et pour reprendre une expression de notre actuel premier ministre, dont chacun imagine bien que je ne partage pas nécessairement l’identité politique, la fête de l’Assomption de ce 15 août 2015 et son généreux carillon étaient en parfaite communion avec « l’essence de la France »…  • 

    * Camille Pascal - Valeurs actuelles

     

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