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Actualité France - Page 310

  • Banlieues • Entre le petit « mâle blanc » et les grands blacks, Emmanuel Macron a choisi

     

    Par Catherine Rouvier

    Voici une intéressante et pertinente tribune de Catherine Rouvier, [Boulevard Voltaire, 29.04] sur fond d'intelligence, de subtilité et d'humour, comme à son ordinaire. Catherine Rouvier a participé à quelques unes de nos réunions en Provence. Et nous en gardons un très bon souvenir ...  LFAR 

     

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    Emmanuel Macron a utilisé l’expression « mâle blanc » en évoquant le plan Borloo pour la banlieue. Ce plan serait inapproprié car constituant « l’échange entre deux mâles blancs ». La banlieue, devenue zone « sensible » serait donc devenue si sensible qu’elle devrait être considérée comme une terre à part, domaine des seuls « racisés », interdite aux Gaulois ?

    Yvan Rioufol, sur Cnews, a dénoncé à juste titre cette expression comme favorisant le communautarisme. C’est vrai, mais il y a plus. Cela s’inscrit dans le projet international d’une inversion des rapports de domination. 

    En Europe, le Noir est apparu sous sa désignation grecque de « Maure » (mavros = noir) dès l’Antiquité. Au XIIe siècle, dans La Chanson de Roland, il apparaît sous les traits du roi sarrasin de Saragosse, Marsile. Fin XVIe le modèle d’Othello, le Maure de Venise, de William Shakespeare, est aussi un roi – marocain, cette fois.

    Mais au XIXe, le Noir apparaît comme une victime, celle du commerce d’esclaves avec le Nouveau Monde décrit par La Case de l’oncle Tom, de Harriet Beecher Stowe, ou Les Aventures de Huckleberry Finn et de Tom Sawyer, de Mark Twain. 

    Au XXe siècle, la littérature enfantine de Jean de Brunhoff – Babar– et de Hergé – Tintin au Congo – véhicule une double image. Gentil naïf et drôle, il éveille la sympathie. Cannibale, soumis à un sorcier jeteur de sorts au masque terrifiant, il est ressenti comme une menace.

    Notre XXIe siècle pérennise l’image de la victime – sans-papiers jetés dans des bateaux de fortune au péril de leur vie pour fuir la guerre ou la famine et aborder sur nos côtes – mais lui superpose une image valorisante. Devenu l’unique ancêtre d’une humanité présumée entièrement africaine à l’origine, star multimillionnaire des terrains de foot, pouvant revendiquer le président de l’État le plus puissant du monde comme un des leurs hier, l’accueil par la plus vieille famille régnante de l’État le plus colonisateur de la planète d’une des leurs, le « Noir », aujourd’hui devenu « Eurafricain » ou « Afro-Américain », est passé du mépris à la gloire.

    L’expression « mâle blanc » s’inscrit dans ce contexte. 

    Désormais, en Occident, ce n’est plus le seul Noir qu’on désigne comme présentant une particularité visible le distinguant de l’ensemble de la population autochtone, mais aussi le Blanc. 

    De même, le héros n’est pas seulement Arnaud Beltrame, mais aussi Lassana Bathily, qui a sauvé des otages de l’Hyper Cacher en 2015, ou Mamadou Gassama, qui a sauvé hier un petit garçon menaçant de tomber d’un balcon.

    Entre Borloo, le petit « mâle blanc » rigolard à barbe grise, et les grands blacks intrépides des cités, Emmanuel Macron a donc choisi. La banlieue sera leur affaire. Ainsi se réalisera la « politique inclusive » qu’il a mentionnée lors de la conférence de presse de vendredi dernier en Russie à propos de la Syrie, devant un Poutine dubitatif. 

    Dès 2011, Guy Hagège, dans Le Monde, la définissait comme « un projet universel de personnalisation de la politique » en fonction « des différences de la personne », afin de lui donner « toutes les chances de réussite dans la vie ». À l’époque, la « différence » était le handicap, et cela concernait toute la France.

    Mais en Syrie, comme dans nos banlieues, on peut craindre que cette « politique inclusive » n’implique une reconnaissance, voire une promotion des « différences » ethniques et religieuses qui pourrait mener au séparatisme.

    Ce qui, comme au Kosovo, pourrait favoriser un autre projet universel : le projet postnational.   


    Docteur d'Etat en droit public, avocat, maitre de conférences des Universités

     
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  • Complicité

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

    sinistra-italiana_una-nuova-proposta-il-documento_sfondo-rosso-170204 - Copie.jpgEn utilisant dans son intervention du 22 mai l’expression « deux mâles blancs » pour parler de M. Borloo et de lui-même, et justifier ainsi son rejet du « plan banlieues » concocté par celui qui fut ministre délégué à la Ville et à la Rénovation urbaine de M. Chirac, et qui est considéré on ne sait trop pourquoi comme une autorité indépassable en la matière,

    M. Macron a commis une faute grave. Il a peut-être cru faire un bon mot, conseillé en cela par un communicant irresponsable : on rejette le plan (d’un coût de quarante-huit milliards tout de même) mais on donne satisfaction aux plus extrémistes des « post-colonisés » en reprenant leur langage, lui-même formaté par celui de mouvements américains conjuguant féminisme et racialisme. 

    Son propos aurait même pu être franchement ironique, à prendre au second degré donc, de la part de quelqu’un qui, quelques années plus tôt affirmait ne pas avoir à « [s]’excuser d'être un jeune mâle blanc diplômé » (extrait non publié - ce n’est pas anodin - de l’entretien accordé en 2010 au magazine des anciens élèves de Sciences Po). Il aurait alors fallu comprendre quelque chose comme : vous [M. Borloo] et moi [chef de l’Etat] ne devons plus nous conduire comme des « post-coloniaux », cessons d’infantiliser les habitants des banlieues - « nos semblables, nos frères » - qui s’en sortiront bien tout seuls… Une pirouette verbale qui paraît quand même peu probable. 

    7793497879_emmanuel-macron-et-jean-louis-borloo-le-22-mai-2018-a-paris.jpgEn fait de bon mot, M. Macron a choqué sur le fond et sur la forme. Sur la forme, le chef de l’Etat aurait d’abord pu comprendre par lui-même, et sans l’aide d’un conseiller, la vulgarité de l’expression : pour parler net, « mâles blancs » suppose en toute logique l’existence de « femelles noires », en tout cas pas ou peu blanches, lesquelles femelles peupleraient donc en partie nos chères (ici, double sens garanti par la rédaction) banlieues. La langue est sans pitié pour les apprentis-sorciers et on voit quels abîmes côtoie ainsi M. Macron. 

    Sur le fond, il aurait eu en fait grand intérêt à lire deux ouvrages très récents, deux enquêtes sérieuses sur les banlieues. Dans le premier, La Communauté (Albin Michel), deux journalistes, Mmes Bacqué et Chemin montrent comment la petite ville de Trappes est devenue ce qu’elle est aujourd’hui (…), le fil conducteur étant bien la religion musulmane. Dans le second, La Tentation radicale (PUF), deux spécialistes, M. Galland et Mme Muxel, montrent que le terreau de la radicalisation islamique est moins socio-ethnique (comme le prétend une certaine presse) qu’idéologique. 

    Oui, M. Macron a eu raison d’opposer une fin de non-recevoir aux quarante-huit milliards du plan Borloo : nous avons déjà assez donné et pour rien. Mais, si les mesures annoncées contre la drogue et la radicalisation relèvent de la bonne intention, mais pas plus, celles sur les avantages à accorder (permis de conduire, primes de crèche, bourses de stage, « testing ») sont purement démagogiques. Ces dernières en effet occultent le vrai problème, celui que ni M. Macron ni M. Borloo n’ont voulu nommer et qui tient en une équation : immigration incontrôlée + islam =  communautarisation = rejet de l’appartenance à la France. D’où l’existence des « mâles blancs », conséquence et non cause d’un racisme anti-blanc dont M. Macron s’est fait, ce 22 mai, le complice peut-être inconscient mais certainement objectif.   

  • Religion & Société • Le cardinal Sarah aux 12.000 pèlerins de Chartres : Terre de France, réveille-toi !

     

    Par Gabrielle Cluzel

    « Secouer les puces de l'Occident chrétien » plus qu'endormi, dénaturé, appeler « le peuple de France à se réveiller, à retourner à ses racines », c'est ce que Gabrielle Cluzel a retenu de l'homélie du cardinal Sarah lors du dernier pèlerinage de Chartres, dans cette excellente chronique [Boulevard Voltaire, 21.05] .  

    Rappelons pour ceux qui l'ignoreraient que Gabrielle Cluzel a participé - d'ailleurs brillamment - au colloque du Cercle de Flore « Refonder le bien commun », du 13 mai 2017, à Paris (Illustration ci-dessous). Et qu'elle a donné aussi une conférence aux mardis de Politique magazine en novembre dernier.  LFAR

     

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    On peut décider de ne pas en parler. C’est, d’ailleurs, le choix d’une grande partie de la presse qui préfère, ces jours-ci, se concentrer sur Mai 68, le ramadan ou la poignée de bloqueurs d’université.

    Ce n’est pas les intéressés, d’ailleurs, que ça va déranger, leur génération ne regarde plus depuis longtemps la télé. Mais, disons-le tout de suite aux médias : il ne faudra pas, ensuite, aller se plaindre, les gars, s’ébaubir, pousser des oh, des ah (comme pour LMPT), « Menfin ! d’où sortent tous ces gens-là ? » quand ce mouvement de fond silencieux, cette jeunesse florissante, discrète, mais décomplexée – c’est ce qui fait la différence avec ses aînés -, sortira du bois pour telle ou telle cause, et que l’on ne pourra plus l’ignorer.

    Car cela viendra.

    Mai 68 a 50 ans, Daniel Cohn-Bendit, 73. Eux autres, les 12.000 pèlerins lancés sur la route de Chartres en ce week-end de Pentecôte par le pèlerinage Notre-Dame de chrétienté, ont 21 ans en moyenne. 30 pour le clergé qui les encadre.

    Ils rient, ils s’amusent, ils prennent des airs tragico-comiques pour contempler leurs ampoules, leur bronzage agricole et leurs cheveux en pétard après deux nuits sous la tente, comme tous les jeunes de leur âge. Et puis ils prient, ils chantent, ils s’agenouillent, ils souffrent, ils offrent, ils méditent, ils posent leur téléphone pour descendre, durant trois jours, au fond de leur âme, comme aucun jeune de leur âge.

    Ils ont affreusement mal aux pieds et horriblement mal dormi mais – allez comprendre – en redemandent chaque année, et ramènent en sus des copains au « pélé ». La liturgie y est, depuis toujours, en forme extraordinaire mais, par une porosité croissante, l’origine des pèlerins dépasse largement le cercle des chapelles dites « tradi ».

    Sur les réseaux sociaux, même les identitaires, qui ont habituellement la dent dure avec les cathos (naïfs, cuculs, gentillets), s’étonnent, admiratifs : « 12.000 jeunes rassemblés, 0 embrouille, 0 dégradation, pas un papier par terre. Comment ce miracle est-il possible ? Qui est ce peuple éduqué et respectueux ? Quelle est cette communauté qui n’emmerde personne ? », tweete Damien Rieu.

    La messe de clôture solennelle du lundi, en la cathédrale de Chartres, est comparable, mutatis mutandis, à la Rollex de Sarkozy vue par Séguéla : qui n’a jamais assisté à l’immense procession, sous les cantiques, de ce jeune clergé précédé par un interminable cortège de bannières, d’étendards et de statues de la Vierge, a un peu raté sa vie. La bonne nouvelle est que, dans l’Église, toute erreur a sa rédemption : il pourra y aller l’an prochain.

    Cette année, elle était célébrée par le cardinal Sarah, et cette présence symbolique, infiniment touchante, sonnait comme un juste retour des choses : dans son premier livre Dieu ou rien, sans renier sa culture familiale, il disait sa grande reconnaissance pour les missionnaires français : « Mon entrée dans la famille du Christ doit tout au dévouement exceptionnel des pères spiritains. Je garderai ma vie durant une immense admiration pour ces hommes qui avaient quitté la France, leurs familles et leurs attaches afin de porter l’amour de Dieu aux confins du monde. »

    Des dizaines d’années après, c’est lui qui vient transmettre le précieux dépôt à de jeunes Français pas plus vieux que le gamin qu’il était, c’est lui qui vient rendre son héritage à un peuple qui l’a oublié. Et il le fait d’une voix forte, sans ambages, avec des accents de Jean-Paul II au Bourget : « Terre de France, réveille-toi ! », « Peuple de France, retourne à tes racines ! » Il fustige un monde occidental pris en étau entre le nihilisme et l’islamisme, l’exhorte à prendre exemple sur ses ancêtres dont la foi a bâti ces cathédrales, demande aux jeunes d’être « les saints et les martyrs » de demain. Pour la langue de buis, ne pas compter sur lui. Le cardinal guinéen a secoué les puces, pour son bien, de l’Occident chrétien. Et si c’était cela, aussi, l’universalité de l’Église ? • 

    Ecrivain, journaliste

    Son blog

  • Le président de la République au pied du mur s'obstinera-t-il ?

     

    En deux mots.jpgQue fera le président de la République lorsque ses grandes conceptions – l’européenne et la mondialiste - finiront par buter sans retour contre le mur des réalités ? S'obstinera-t-il à courir après des solutions impossibles et caduques ou sera-t-il capable de tirer les conséquences de la situation telle qu'elle est vraiment ? Sera-t-il suffisamment souple d'esprit, aura-t-il assez de lucidité et de volonté réunies, pour redéployer sa politique - celle de la France -  la redéfinir de sorte qu'elle soit applicable, selon le vieux précepte qui veut que la politique ne soit rien d'autre que l'art du possible ? C'est en soi une question intéressante pour l'observateur de l'histoire politique en train de s'écrire. Elle est cruciale pour qui n'est pas indifférent au sort de la France, de l'Europe et du monde. 

    Cet homme jeune, cultivé, volontaire et avide de réaliser se condamnera-t-il longtemps - toujours ? - à une fidélité inféconde aux idées chimériques que de fumeux aînés lui ont inculquées ? Ou opèrera-t-il ce retournement réaliste qui lui sauverait la mise et pourrait donner â la France, à l'Europe, une politique salvatrice ? Comment le savoir ?

    Il semble bien en effet que nous nous trouvons à l'un de ces tournants de l'histoire où les cartes se rebattent et où le jeu reprend sur des bases renouvelées.

    Voyons ! Du Brexit aux élections italiennes qui viennent d'aboutir à la formation d'un gouvernement antisystème à Rome, en passant par la constitution du groupe des pays de Visegrad, par l'essor de l'AfD en Allemagne, par la présence de Marine Le Pen au second tour de la présidentielle française, et par le vote autrichien, il est clair que le rejet des institutions de Bruxelles par les différents peuples d'Europe, va croissant, comme une déferlante qui finira par les recouvrir. Fonctionnaires bruxellois, tremblez pour vos sinécures ! Il n'y a plus grand monde pour les défendre. Leur discrédit est grand, quasi général. Leur Europe se défait, malgré qu'ils en aient. Une Contre Europe s'organise hors des institutions technocratiques de Bruxelles. Une Europe réelle face à une Europe légale. 

    Quant au couple franco-allemand qui est en tout cas le seul vrai moteur de toute construction européenne, il est clair – nous l’avons dit souvent - qu'il se disjoint. Ce n'est pas qu'on le veuille consciemment des deux côtés du Rhin. C'est seulement qu'il arrive un jour où quelques données objectives essentielles se chargent de défaire ce dont on avait longtemps rêvé et fait semblant de pratiquer. Alors, après les sourires de convenance et les accolades fraternelles, les mots fusent.  De sourds reproches et des impatiences jusque-là contenues finissent par s'exprimer. Ainsi d'Emmanuel Macron qui trouve qu'Angela Merkel est toujours trop lente à décider. Alors que tout simplement elle n'a ni l'envie ni le pouvoir de le suivre vers plus de fédéralisme européen. Plus amer encore, Emmanuel Macron fait remarquer que les bénéfices des uns font les déficits des autres. Cruel reproche qui touche au cœur d'une terrible disparité entre les deux nations, celle de leur commerce extérieur. A quoi s'ajoutent l'excédent budgétaire allemand et le déficit français.

    L'Allemagne quant à elle, a deux fermes résolutions : ne rien céder de sa souveraineté et ne pas payer pour les autres davantage qu'elle ne le fait déjà. Ou moins s'il se peut. Elle n'est tout de même pas assez puissante pour être l'hégémon dont l'Europe aurait besoin pour se constituer en État mais elle restera dominante et, en tout cas, souveraine, soyons en assurés. Macron n’y changera rien.

    Le délitement structurel du couple franco-allemand obère donc l'avenir de l’U.E. au moins autant que la montée des populismes dans presque tous les pays de l'Union.

    Du reste, si le fossé se creuse entre la France et l'Allemagne, il se creuse aussi entre cette dernière et ses voisins de la Mitteleuropa :  Autriche, Hongrie, Pologne, Tchéquie, Slovaquie, etc. En gros, d'ailleurs, l'ex-empire des Habsbourg en quelque sorte reformé. L'Europe bruxelloise craque aussi à l'Est ...

    Que l'on ne se méprenne pas : ce rejet ne vaut pas hostilité à l'Europe en tant que telle. Il y a, à vrai dire, au sein des peuples européens, fort peu d’opposants à l'idée d'Europe en soi. Au contraire. Le reproche des peuples est bien plutôt dirigé contre le cosmopolitisme, l'universalisme, le multiculturalisme, le libre-échangisme sans frein ni limites de Bruxelles. En matière de politique migratoire comme en matière d'ouverture de l'Europe aux quatre vents du mondialisme économique et financier. A bien y regarder, ce qui est reproché aux instituions de Bruxelles est bien plutôt de n'être pas vraiment, pas assez, et même fort peu européennes. Les nations d'Europe veulent simplement rester elles-mêmes, conserver leur souveraineté, leur identité, et ne pas être envahies de migrants. Mais, sur ces bases, elles restent ouvertes à une Europe des nations ou, plus précisément, des États. Ce chemin respectueux et réaliste reste ouvert. Ainsi pourrait se définir une nouvelle politique européenne de la France. Il est même possible qu’elle finisse par s'imposer d'elle-même - da se - comme la solution réaliste, le recours obligé. Nonobstant Macron, le fédéraliste.

    En même temps, l'irruption de Donald Trump sur la scène internationale semble sonner aussi le glas de la mondialisation programmée et paisible dont Jacques Attali avait transmis naguère le rêve à Emmanuel Macron. Trump est en train de briser la ligne imaginaire de cet horizon qu'Attali avait dit indépassable au jeune Macron. Sens de l’Histoire oblige. Attali a toujours attendu l'avènement d'une gouvernance mondiale. Trump renoue à l'inverse avec le protectionnisme et déchire les traités signés par son prédécesseur. Ses discours martiaux, ses drôles de gesticulations et de mimiques le font parfois ressembler à une sorte de Mussolini yankee, qui eût été le chef de la première démocratie du monde ... Mais laquelle ? 

    Hubert Védrine signale au contraire, il nous semble à juste titre, que cette évolution des États-Unis d'Amérique - America first ! - ne tient pas essentiellement à la personnalité de Donald Trump lui-même mais plutôt à une sorte d'État profond américain qui aspire à restaurer sa puissance. Fût-ce au détriment de ses amis et alliés européens. Les nations, on le sait bien, n'ont pas d’amis ; elles ont des intérêts.

    Trump met ainsi l'Europe au pied du mur - sous le joug américain dans l’affaire iranienne. Il la révèle à elle-même : malgré sa cohésion de façade, l'Europe n'est pas une puissance. Parce qu’elle n’est ni un seul peuple ni un Etat.  Seulement une communauté de civilisation.  Ce n'est pas la même chose. Emmanuel Macron s’obstine à le nier. En vain. 

    Ni Maurras ni De Gaulle ne s'y sont trompés : nous ne sommes pas encore sortis de l'ère des nations. Tant s'en faut.   

    Retrouvez l'ensemble de ces chroniques en cliquant sur le lien suivant ... 

    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • La police de la pensée

     

    Par  Mathieu Bock-Côté 

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpgDans  cette chronique fort intéressante du Journal de Montréal [1.05] Mathieu Bock-Côté, après avoir dit que « nous aimons croire que nous vivons en démocratie », expression singulièrement restrictive et dubitative, ajoute que nous aimons croire aussi que « jamais, dans l’histoire, les hommes n’ont été aussi libres que maintenant » ». Et il concède : « Globalement, c’est vrai. » Précaution oratoire ? On peut le penser car la suite de sa réflexion est tout entière non pas tout à fait pour démontrer le contraire, mais pour marquer toutes les redoutables limites et restrictions de tous ordres qu'il est réaliste d'opposer à cet optimisme de principe. L'article dans son énoncé et sa composition est nuances, prudence et habileté. Au bout du compte, c'est la vérité vrai, lucide et réaliste qu'il dévoile. Et nous sommes d'accord.    LFAR

      

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    Nous aimons croire que nous vivons en démocratie et que jamais, dans l’histoire, les hommes n’ont été aussi libres que maintenant. Globalement, c’est vrai. Nous jouissons de réelles libertés et pouvons élire nos dirigeants.

    Mais cela ne veut pas dire que nos gouvernants ne cherchent pas à contrôler nos pensées.

    Rumeurs ?

    On en a encore eu une preuve récemment avec la Ville de Montréal qui, comme nous le rapportait Radio-Canada la semaine passée, va implanter un programme « d’agents anti-rumeurs » qui auront pour vocation de surveiller nos conversations et de nous corriger quand nous exprimons des pensées incorrectes à propos de l’immigration. 

    Ces agents, recrutés dans tous les milieux, auront pour mission d’intervenir dans la vie quotidienne pour nous corriger idéologiquement. 

    Comment ne pas voir dans cela une odieuse propagande à tentation totalitaire ?

    Qui distinguera les vérités à propager et les rumeurs à déconstruire ou censurer ?

    Si je considère que l’immigration massive n’est pas une bonne chose pour le Québec, s’agit-il d’une fausse rumeur ?

    Si je refuse de croire l’étrange théorie soutenant que la discrimination est à l’origine du taux de chômage élevé dans certaines communautés culturelles, est-ce une fausse rumeur ?

    Si je constate que l’islam s’intègre mal partout en Occident, est-ce une fausse rumeur ?

    Si je dis que les « migrants irréguliers » qui traversent la frontière sans permission sont des immigrés illégaux, est-ce une fausse rumeur ?

    Pensée correcte

    En gros, suffira-t-il d’être défavorable à l’immigration de masse pour être corrigé par cette nouvelle police de la pensée qui se veut ludique, mais qui fait surtout penser au roman 1984 de George Orwell ?

    Car c’est de cela qu’il s’agit : de nous rééduquer à partir du logiciel multiculturaliste.

    Est-ce que nous voyons à quel point le gouvernement devient intrusif lorsqu’il se permet de surveiller les pensées de la population pour mieux la soumettre à l’idéologie officielle ?     

    Mathieu Bock-Côté

    Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (VLB éditeur, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012) de La dénationalisation tranquille (Boréal, 2007), de Le multiculturalisme comme religion politique (éd. du Cerf, 2016) et de Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).

  • Macron, notre Orphée national

     

    Par Hilaire de Crémiers

     

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    Emmanuel Macron poursuit sa quête et n’arrête pas son chant. L’univers en est témoin. 

    Emmanuel Macron, dès le début de sa présidence, s’est situé là où, dans sa pensée sûrement réfléchie, il devait se situer, c’est-à-dire au plus haut niveau international : entre Vladimir Poutine et Donald Trump, en chef naturel de l’Europe et en « penseur » du monde de demain. Le nouveau président français n’avait parlé de réformer et de redynamiser la France que pour pouvoir s’adresser avec plus de liberté et plus d’autorité au monde. Car, le monde, comme l’Europe et la France, a un grand et urgent besoin de se réformer, lui aussi, et d’abord en esprit, tant les risques encourus qui accompagnent la mondialisation heureuse, s’accumulent à l’horizon.

    Il fallait, il faut un lanceur d’alerte. Le voici : c’est lui. Il a tout vu, tout jugé, tout soupesé, des immenses possibilités de progrès pour l’humanité tout entière si les peuples qui la constituent, font les bons choix, comme des dangers non moins immenses qui la menacent dans le cas inverse.

    La France idéale de Macron

    La France s’est administré la leçon à elle-même et par sa voix à lui, légitimée, sacralisée dans la verticalité par son élection à lui, bien à lui, et qui a tranché heureusement un débat crucial où la France – il est catégorique sur ce point, il l’a dit et redit – s’est retrouvée elle-même dans un choix fondamental entre ce qu’il appelle lui-même le recroquevillement nationaliste, le pire de tous les maux, et l’ouverture audacieuse où brille le champ du possible pour parler comme le lyrique grec.

    La France peut donc à son tour administrer sa leçon au monde et, toujours et encore, par sa voix à lui ; car sa voix à lui est dorénavant la voix de la France. C’est le moment, le fameux « kairos » grec où tout se joue du passé, du présent et de l’avenir, où le sens des destins se dessine à coup sûr. Il n’est pas permis de manquer une telle « occasion ».

    Et donc voici que, par, avec et en Macron, la France est de retour – c’est ce qu’il pense et affirme – : à la fois monarchique et révolutionnaire, impériale et républicaine, humaniste et résolument moderne. Elle peut et doit se faire entendre : enfin intelligente, audible, cohérente en ses multiples facettes et ses composantes aussi indéfiniment variées qu’indéfiniment accueillantes, elle s’inscrit avec la dignité qui s’impose et dont il s’est totalement investi, dans la grande tradition qui la caractérise, une et multiple, qui est, comme il l’a expliqué, beaucoup plus qu’une culture particulière et qui la place à cette hauteur de certitude et de compréhension où s’épanouit son magistère aussi ferme que bienveillant que personne au monde ne peut lui contester. Là, amour et justice, comme dans l’antique psaume, s’embrassent ; philosophie et politique se retrouvent et s’épaulent ; technologie de la modernité et littérature du cœur et de l’esprit frayent le même chemin de l’antique tragédie humaine enfin comprise et sentie ; poésie et histoire recommencent à célébrer leurs noces éternelles. Qui pourrait ne pas être sensible à une telle voix ? La nature elle-même y répond, car elle s’adresse aussi et d’abord à elle. Les animaux s’enchantent à ce sort meilleur qu’elle promet ; alors, comment l’homme se montrerait-il plus sauvage ? Les arbres et toute la végétation du monde s’apprêtent à l’écouter religieusement comme dans le tableau de Poussin ; le ciel, la terre, le climat, oui, le climat si perturbé par l’homme, vont lui obéir : c’est qu’une telle voix sait leur parler. Le nouvel Orphée conquiert le monde par le charme irrésistible de sa pensée et de son discours. Ah ! que seulement sa douce et belle chimère, son Eurydice, cette « justice » aussi vaste que lointaine qui devrait être la raison même du monde, cette Eurydice qu’il chérit, ne s’éloigne point de la voix et de la lyre de son Orphée de peur qu’en s’égarant, poursuivie par quelque méchant Aristée, jaloux et impie, elle ne se fasse piquer au talon par le serpent captieux.

    Un langage mythologique

    Mythe, direz-vous, Ami lecteur ? Non point, c’est le réel de notre président qui refaçonne le monde à son idée. Il en est le centre ; il le dit en toute simplicité. Il n’est que de prendre connaissance de l’entretien qu’il a donné récemment à La Nouvelle Revue française.

    « Les Français sont malheureux, dit-il, quand la politique se réduit au technique, voire devient politicarde. Ils aiment qu’il y ait une histoire. J’en suis la preuve vivante. Je suis très lucide sur le fait que ce sont les Français et eux seuls qui m’ont fait et non un parti politique. »

    Et encore :

    « Je suis une aberration dans le système politique traditionnel… En réalité, je ne suis que l’émanation du goût du peuple français pour le romanesque. Cela ne se résume pas en formules, mais c’est bien cela le cœur de l’aventure politique. En somme, on est toujours l’instrument de quelque chose qui vous dépasse …»

    À propos de l’Europe qui incontestablement, après tant d’espoirs grandiosement exprimés, lui inflige depuis six mois une série de déceptions, il se revanche en lui annonçant des temps tragiques que lui, plus qu’aucun autre, saurait et sait assumer :

    « Ce vieux continent de petits-bourgeois – ce n’était pas ce qu’il disait sur la Pnyx à Athènes ni à la Sorbonne ! – se sentant à l’abri dans le confort matériel, entre dans une nouvelle aventure où le tragique s’invite. Notre paysage familier est en train de changer profondément sous l’effet de phénomènes multiples, implacables, radicaux. Il y a beaucoup à réinventer… Paradoxalement ce qui me rend optimiste, c’est que l’histoire en Europe redevient tragique

    Et de conclure :

    « Dans cette aventure, nous pouvons renouer avec un souffle plus profond dont la littérature ne saurait être absente. »

    Ah bon ! Colette et Giono, Gide et Camus, Proust et Céline sont les auteurs qu’il cite comme l’ayant structuré. Qu’est-ce à dire, au juste ? On ne sache pas que Gide soit structurant ! Et ce n’était certes pas les intentions d’un Proust ni d’un Céline.

    Et voilà qui rend compte et de l’homme et de ses décisions et de ses prétentions. Rappelons-nous : Poutine reçu à Versailles ; Trump invité le 14 juillet ; sa longue mélopée prophétique sur la Pnyx où l’histoire se récapitule ; son cours magistériel et initiatique à la Sorbonne ; sa leçon sympathique, d’allure aussi réaliste qu’impertinente, faite en Afrique et à l’Afrique ; ses mises en garde adressées à l’Europe ; son intervention en Syrie, à ce qu’il dit, à la fois médicinale, philosophique, exemplaire ; sa récente visite d’État à Washington, ses entretiens tout en souplesse, en compréhension, en incitation, en subtil aménagement des compromis internationaux avec un Trump aussi brutal qu’amical, les embrassades réciproques à tous moments qui n’empêchèrent point son discours solennel, de conviction historique, prononcé en anglais au Congrès et salué par des applaudissements unanimes, où il n’omit aucun des articles de son credo, y compris sur le climat ; son voyage en Australie où il redit sa vision du monde ; son court passage en Nouvelle-Calédonie où il se garde de prendre parti sur la question pendante pour laisser s’exprimer la seule liberté ; son prochain voyage à Moscou en ce mois de mai où il se propose de dire tout ce qu’il doit dire… Si cette voix était entendue, il n’est pas de problème qui ne trouverait sa solution, n’est-ce pas ?

    Il y a du Hugo chez Macron – plus que du Camus ou du Proust ! –, cet art de faire des synthèses qui se veulent poétiques, en cascades successives, où la France, c’est l’Europe, l’Europe, c’est le monde, le monde, c’est l’univers, l’univers, c’est Dieu, et Dieu, c’est tout, le grand Tout que l’Esprit domine. Quel Esprit ?

    Une conception surannée

    05fe6f673edb12c50532f31ec1805c65.jpgNotre Orphée réussira-t-il à conquérir et reconquérir son Eurydice ? De sourds grondements se font entendre. Que se passera-t-il le 12 mai quand Trump prendra sa décision au sujet de l’Iran ? Le conflit israélo-palestinien prend des proportions dont nul ne peut prédire les conséquences ; le Moyen-Orient explose littéralement et de tous les côtés. L’Europe n’est plus qu’une superstructure sans cohésion interne. Tout ce qui était annoncé dans ces colonnes, il y a six mois, se réalise ; ce n’est plus nous qui écrivons que le rêve européen de Macron s’évanouit : tous les commentateurs s’y mettent ! La Russie sera de plus en plus russe et la Chine – de nouveau impériale – de plus en plus chinoise. La Corée du Nord et la Corée du Sud se rapprochent… Les tensions commerciales et monétaires qui ne font que commencer, exaspèrent les enjeux nationaux. Rien ne se passe comme prévu selon le plan idéal du songe macronien ; l’initiation orphique risque de se perdre dans le sombre néant des jours.

    Et, cependant, Orphée chante… Il continue de chanter. Et Eurydice va disparaître. Qui ne sait d’avance qu’il échouera ?… Trop amoureux d’elle ! Sa tête arrachée quelque jour par les Ménades vengeresses et roulant dans les flots impétueux de l’histoire, de sa langue glacée réclamera aux échos indéfiniment son Eurydice.

    Eurydicem vox ipsa et frigida lingua

    Ah ! miseram Eurydicen, anima fugiente, vocabat ;

    Eurydicen toto referebant flumine ripae.     

    Hilaire de Crémiers

  • Après l'attentat de Paris, la déclaration d'Emmanuel Macron ce sont paroles que vent emporte

     

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    En déclarant que « la France ne cédera pas un pouce aux ennemis de la Liberté », Emmanuel Macron ne dit, ne désigne, ne montre du doigt, à peu près rien.  

    Ce langage vaguement et faussement idéaliste, est tout simplement erroné, impropre, singulièrement faible et en tout cas très inférieur à la radicalité de la guerre qui nous est menée. 

    L'ennemi qui nous agresse le fait au nom de l'Islam. Il ne s’attaque pas à la Liberté, avec majuscule, abstraite et idéale dont il se moque comme d'une guigne, au besoin en exerçant la sienne qui est de tuer et de mourir, mais à notre société, à notre Civilisation, ou du moins à ce qu'il en reste, qui est fondé sur tout autre chose que le droit-de-l'hommisme hors sol du président Macron.  

    Ce que nous avons à défendre contre l'agression de l'Islam guerrier, c'est en vérité ce qui demeure encore debout ou pourrait renaître de ses cendres de notre héritage, de nos racines, de nos origines, de notre être profond débarrassé des miasmes de la modernité.  C'est aux ennemis de ces biens précieux que nous ne devons pas céder un pouce. Et ce n'est pas du tout ce que nous faisons. 

    Dans l'ordre pratique, c'est en effet bien plus qu'un pouce que nous avons déjà cédé et continuons bel et bien de céder à nos ennemis, en dépit des belles paroles lancées depuis les palais de la République.  

    Que l'on regarde tout bêtement le cursus du tueur tchétchène soi-disant français qui a frappé samedi soir à Paris, près de l'Opéra, et que l'on nous dise si nous n'avons pas déjà cédé bien plus qu'un pouce aux ennemis de la France. Et que l'on nous dise aussi si l'on va continuer à leur en céder encore beaucoup de la sorte ou si l'on va se décider enfin à prendre envers eux les mesures d'exception qui s'imposent. 

    En attendant qu'elles soient prises, les déclarations martiales d''Emmanuel Macron, pour reprendre un poète de nos commencements, ce sont paroles que vent emporte.   

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Mémoire & Actualité • Mai 68 : 50 ans plus tard

     

    Par  Mathieu Bock-Côté 

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpgDans  cette chronique du Journal de Montréal [8.05] Mathieu Bock-Côté dit en seulement quelques mots, quelques lignes, ce qu'est le véritable héritage de Mai 68. Au moment où les médias - dont nous-mêmes - sont emplis de l'évocation de cet épisode d'exaltation que Malraux qualifia jadis de psychodrame et qui le fut, sans-doute vraiment pour ceux qui l'ont vécu, il est salutaire de dire, à contre-courant, ce qu'il en est fondamentalement ressorti : « depuis une cinquantaine d’années, nous avons appris à nous détester comme civilisation ». Détestation radicalement mortifère, pathologie dont on ne sort comme le professait Pierre Boutang que par une métanoia, un retour sur nous-mêmes, nos racines, nos origines, nos enfances, au double sens historique et anthropologique.   LFAR

      

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    Ces jours-ci, en France, on cherche à commémorer les 50 ans de Mai 68.

    On se souvient évidemment des émeutes, des conflits avec la police et des slogans révolutionnaires dont les étudiants tapissèrent alors les rues de Paris.

    Individualisme

    Mais l’essentiel, à l’époque, se trouvait ailleurs que dans ce carnaval révolutionnaire que cherchent à répéter sur une base régulière les nouvelles générations militantes. 

    Mai 68, en France comme ailleurs en Occident, marque plutôt un changement de civilisation et le passage d’un monde à un autre. Notre civilisation bascule.

    Mai 68 annonce l’avènement d’une société où triomphera un individualisme de plus en plus absolu. Certains s’en réjouissent en applaudissant la liberté nouvelle de ceux qui ne se retrouvent pas dans les valeurs dominantes. On peut comprendre. 

    Dans les faits, on doit surtout constater que cet individu ne connaissant plus que ses droits et ne voulant plus entendre parler de ses devoirs a quelque chose de troublant. L’héritage de Mai 68, c’est celui d’une société qui sacralise les désirs de chacun comme s’ils étaient des commandements divins. L’enfant-roi en est le symbole indiscutable.

    Surtout, Mai 68, à la grandeur du monde occidental, ouvre une époque vouée à la déconstruction de toutes les grandes institutions, notamment l’école. On voudra faire disparaître la relation d’autorité entre le maître et l’élève. On renoncera aussi à transmettre à ce dernier un vrai savoir, de peur de brimer son développement personnel.

    Occident

    Mais ce refus de transmettre l’héritage culturel ne s’explique pas seulement par de nouvelles techniques pédagogiques débiles.

    Fondamentalement, depuis une cinquantaine d’années, nous avons appris à nous détester comme civilisation. Nous nous accusons de racisme, de sexisme, d’homophobie, d’islamophobie, et ainsi de suite. Pourquoi poursuivre une civilisation si détestable ?

    Et nous diabolisons systématiquement ceux qui ne se reconnaissent pas dans l’accusation.

    Tel est le véritable héritage de Mai 68.     

    Mathieu Bock-Côté

    Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (VLB éditeur, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (Boréal, 2012) de La dénationalisation tranquille (Boréal, 2007), de Le multiculturalisme comme religion politique (éd. du Cerf, 2016) et de Le Nouveau Régime (Boréal, 2017).

  • Mai 68, la bacchanale des dupes

     

    Par Christian Tarente

     

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    Politiquement, ce fut un vrai jeu de massacre : tout au long des « événements » de Mai 1968, les gagnants ont tous fini dans les cordes.

    Lancé par des groupuscules d’étudiants trotskystes, doctrinaires austères durement embrigadés, le mouvement s’amplifia à la faveur d’une vague anarcho-libertaire qu’ils vouaient aux gémonies. Et lorsque les vieilles organisations syndicales, obsolètes et minoritaires, tentèrent de reprendre la main, elles se virent doublées par la « base » qui, portée par ses rêves de bien-être, les entraîna au blocage total du pays. La gauche socialiste, enfin – avec Mitterrand et Mendès –, persuadée de pouvoir « surfer » sur la vague avant de ramasser la mise, dut assister, impuissante, au triomphe électoral du parti gaulliste. Triomphe lui-même éphémère : il préludait à la chute brutale, un an après, du général de Gaulle.

    En 1974, après la parenthèse pompidolienne, cette bacchanale des dupes allait connaître son ultime prolongement : l’élection de Giscard d’Estaing consacrera l’aboutissement des valeurs intimes de Mai 68. Son programme « décomplexé » – primauté de l’économique et libération des mœurs – célébrait les noces du libéralisme et de l’idéal libertaire. Sous le signe d’un libre-échangisme généralisé, l’extrémisme libéral embrassait l’illimitation du désir. Giscard, jeune surdoué convaincu d’avoir découvert la pierre philosophale de la politique, le nombre d’or de la « société libérale avancée », entendait mettre la France sur la voie du Progrès, identifiée à sa dissolution dans le conglomérat européen. Il lui a offert un veau d’or : la déesse Consommation devenait reine de France, vouée à l’adulation des foules.

    2166583028.jpgEt les choses se déroulèrent ainsi afin que s’accomplît la parole des prophètes : Maurras dans L’Avenir de l’Intelligence (1905) – « le règne de l’or, maître du fer, devenu l’arbitre de toute pensée séculière » – et Péguy dans L’Argent (1913) – « cet automatisme économique du monde moderne où nous nous sentons toujours plus étranglés par le même carcan de fer…»

    Aujourd’hui, le veau d’or est vainqueur, mais où est sa victoire ? Là où croît le péril, croît aussi ce qui sauve : au milieu des décombres de Mai 68, ne l’oublions pas, a aussi germé une profonde insurrection de l’esprit. 

    Christian Tarente

  • Mai 68 – Mai 2018

     

    Par Hilaire de Crémiers

     

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    Dans la foule des 15 000 manifestants du défilé du 1er mai à Paris, la police a dénombré 1 200 « casseurs », venus dans l’unique intention d’en découdre, de régler leur compte avec la société et de causer le plus possible de dégâts. Les forces de l’ordre plus spécialement chargées de contenir et d’arrêter ces émeutiers ultra-violents se montaient à environ 1 200 hommes, des CRS, soit le même nombre que les « casseurs ». Pour le reste, en quelque sorte, la police habituelle suffisait. 

    Il n’est pas douteux que la Préfecture de police et le ministère de l’Intérieur ont donné des ordres pour éviter au mieux ce qu’il est convenu d’appeler « les dommages collatéraux ». C’est-à-dire des passants, autrement dit des manifestants « honnêtes » (!) ou des « curieux » se hasardant sur les lieux, qui pourraient être bousculés ou blessés à l’occasion de charges policières ou de heurts frontaux. Ce qui provoquerait aussitôt des hurlements d’indignation, l’indignation ne fonctionnant comme toujours qu’à sens unique ! La grande voix de Libération, entre autres, ne manquerait pas de se faire redoutable : le bourgeois anarchiste et gauchard adore le désordre, tant, bien sûr, que les coups ne l’atteignent pas.

    Donc, les cortèges se rassemblent librement. Il est connu d’avance par les réseaux sociaux et par les renseignements que l’ultra-gauche sera de la partie et mènera la danse. Le petit monde cagoulé du black bloc est au rendez-vous sans problème. Pas question de procéder à des arrestations préventives, contrairement à tous les usages de naguère. Et voitures de brûler, devantures d’exploser, magasins et établissements d’être saccagés, pillés, détruits. Et policiers et gendarmes d’être blessés : s’ils pouvaient être massacrés, ils le seraient.

    Le bon vieux défilé syndical, où le service d’ordre de la manifestation faisait lui-même la police, n’existe plus. C’est la raison pour laquelle, en dehors de la CGT et de Sud, il ne se pratique presque plus. Les risques de débordements sont trop importants. L’heure est à l’affrontement brutal. Des minorités s’essayent de plus en plus à créer soit des zones de non-droit, soit des journées insurrectionnelles. Jeux plus ou moins infantiles, plan concerté, excitation de l’imagination, désir d’un « jusqu’auboutisme » qu’on croit libérateur ; mélange de tout cela, sans doute. Jeunesse désœuvrée et livrée à toutes les propagandes ; société éclatée, privée d’autorités naturelles, toutes systématiquement détruites par la loi elle-même ; « communautarismes » flagrants qui s’étendent sur des villes entières et qui refusent la nation, qui récusent la France et tout ce qu’elle représente, et où l’islamisme règne en maître ; enseignement et médias qui ne cessent d’inspirer le mépris de l’histoire, de l’ordre, de la vraie famille, de la société traditionnelle…

    Bref, tous les fruits gâtés de mai 1968 s’accumulent en pourritures, du bas en haut de la société, en ce mois de mai 2018.

    Facultés, bientôt lycées, quartiers, villes – même avec leur maire et leur député de gauche, d’archi-gauche qui ont l’inconscient culot de s’en étonner ! –, maintenant zones entières de départements et de régions en sécession pratique où aucune police et aucun service d’Etat ne peut pénétrer. La aucun service d’État ne peut pénétrer. La situation est tenue en main, dit-on dans les hautes sphères pour se rassurer. Voire ! La fameuse convergence des luttes souhaitées par le bourgeois Mélenchon qui se fait plaisir à jouer le tribun de gauche, se feront tout autrement que ce que des imaginations politiciennes croient inventer. Qui, dans les banlieues, croit encore dans la République bourgeoise ?

    Pour le moment, Macron, en rappelant à l’ordre, pense ramasser une fois de plus la mise à son profit. C’est le calcul républicain. Mais chacun devine que tout peut échapper. A force de glorifier la révolution comme principe même de gouvernement, tous, de droite comme de gauche, ne font que rendre la France complice de sa propre destruction. Jusqu’où ?   

    Hilaire de Crémiers

  • Anniversaires et impostures

    Samedi 5 « la fête à Macron »

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

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    M. Macron fête aujourd’hui son premier anniversaire à l’Elysée. Il avait, paraît-il, envisagé de commémorer (pour d’aucuns « célébrer ») le cinquantenaire des événements de Mai 68. Il y aurait renoncé.

    Dans les faits, d’autres s’en chargent à sa place et à leur façon, c’est-à-dire dans un alliage confus de violence, de mensonge et de vulgarité - sans qu’on sache trop si cela est dû à l’arrivée du printemps, à une sorte de manoeuvre politicienne ou, plus simplement, à cette manie de certains de penser qu’ils peuvent tout dire et tout faire en toute impunité. 

    Certains étudiants, fort peu nombreux au demeurant, ont voulu rejouer Mai 68 en occupant des locaux universitaires. Grand écho dans la presse de gauche où, militantisme oblige, on a substitué la formulation volontairement mensongère  « les étudiants » à la bonne, c’est-à-dire « des étudiants ». Quelques « crasseux » donc (le mot est de Mme Le Pen), quelques gauchards minables réclamant une bonne note sans examen (pour eux, bien entendu, le seul moyen de l’obtenir, à en juger par le niveau zéro de leurs banderoles), quelques voyous colportant dehors de faux témoignages après avoir cassé et dégradé dedans tout ce qu’ils pouvaient : les étudiants bourgeois de mai 1968 avaient cru - c’en était grotesque - qu’ils rejouaient les barricades de 1848 ; ceux de 2018 n’ont fait jusqu’à présent que singer des singes. 

    D’aucuns arguëront que les douze cents black blocs du 1er mai sont la preuve qu’un mouvement sérieux et dangereux existe. Ce n’est pas si sûr. Derrière la logorrhée d’extrême gauche, on devine une « dimension carnavalesque » (l’expression est de M. Boulouque, historien de l’ultra-gauche). De fait, les propos tenus sous couvert de l’anonymat par certains participants renvoient à un comportement infantile de jeunes adultes pensant bien participer à un jeu video grandeur nature. Et, comme d’habitude, il est avéré que les révolutionnaires en noir sont de bons bourgeois bien installés dans l’existence comme le montre le profil de ceux qui ont été arrêtés (reportage de France Info). 

    Les syndicats paraissent a priori plus respectables. Voire ! Ces organisations nullement représentatives (taux de syndicalisation autour de 10%), donc indûment qualifiées de « corps intermédiaires » par une presse inculte, sont plutôt de riches entreprises propriétaires d’importants biens fonciers (et autres), financées par l’Etat et assurant à leurs nombreux permanents des revenus plus que corrects. Ils jouissent pourtant du privilège exorbitant d’organiser des grèves fort préjudiciables pour le pays, dans le cadre d’un système socio-politique qui les privilégie au détriment de l’intérêt général. Les grèves actuelles montrent que certains sont prêts à aller beaucoup trop loin, oubliant qu’il y a des limites - comme le prouve la disparition de la S.N.C.M.* victime, entre autres choses, d’une emprise syndicale meurtrière. 

    Et comment ignorer ici les politiciens dits « insoumis ? On sait que M. Mélenchon, conforté en cela par l’admiration béate de certains médias (la même qu’ils vouaient et pour les mêmes raisons à Mme Taubira, la culture, si peu qu’on en ait, en imposant toujours aux ignares), se prend pour Victor Hugo parce qu’il donne à ses interventions et ses vaticinations une dimension historique et littéraire. En ce mois de mai, son compère, M. Ruffin, fils d’un bourgeois de Calais, qui a eu le privilège de faire une partie de ses humanités chez les jésuites d'Amiens (dans le même établissement que M. Macron) mais se veut, comme il se doit, « un homme du peuple », lui fait écho en s’auto-proclamant porte-parole des obscurs, des petits et des sans grade. Au nom de quoi il a organisé, samedi 5 « la fête à Macron », manifestation dont le seul intitulé fleure bon la violence vulgaire, au moins verbale (ceux qui en douteraient n’ont qu’à consulter un dictionnaire) en contradiction totale avec l’interprétation bon enfant donnée par son promoteur (« une manifestation pot-au-feu »). 

    Pendant ce temps-là, M. Macron voyage(ait) aux antipodes. A Canberra, il aurait été question « d’un axe Paris-New Delhi-Canberra […] pour faire contrepoids à ce qui pourrait bientôt devenir l’hégémonie chinoise en Asie » (M. Guetta, France Inter). Voilà qui, contredisant son idéologie mondialiste, pourrait ne pas être de mauvais augure. En tout cas, vu de là-bas, Mai 68 paraît bien loin.   

    * Société nationale Corse-Méditerranée

  • Société & Actualité • Yvan Blot : Sans courant historique profond, pas de succès politique possible !

     

    Par Yvan Blot 

     

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    Le succès, en politique, reste un mystère pour beaucoup de ses acteurs. Des personnages médiocres triomphent. Des politiciens exceptionnels sont parfois marginalisés, tel de Gaulle pendant sa « traversé du désert » sous la IVe République.

    Cela vient du fait que l’Histoire a son propre rythme qui n’est pas celui des hommes.
    Le philosophe allemand Heidegger a distingué entre l’Erlebnis, le vécu, et l’Ereignis, l’événement historique.

    Les événements historiques ont leur propre loi d’évolution : en 1960, si on avait attaqué l’URSS, on obtenait une guerre mondiale dévastatrice. En 1990, l’URSS s’effondrait et abandonnait l’Europe de l’Est sans combattre.

    La différence n’est pas dans les chefs ou la technologie. Les mentalités ont changé en profondeur. En surface, les acteurs politiques même expérimentés n’ont souvent rien compris.

    Ainsi, François Mitterrand a envoyé un soutien au putsch des généraux qui tentaient de maintenir l’URSS. Il préférait que rien ne bouge. Mais les forces de l’Histoire poussaient dans d’autres directions.

    Mme Merkel est l’autre exemple de cette myopie à l’évolution souterraine de la société. Brusquement, elle s’est retrouvée confrontée à un parti anti-immigration de millions d’électeurs. Visiblement, elle n’a rien compris au fait que les immigrés entrant en masse étaient une foule sans pilote, éventuellement violente. Les Allemands de souche agressés par une foule délinquante ne pouvaient pas avoir de réaction de défense.

    Au XIXe siècle, il y eut encore de grands penseurs politiques, libéraux, socialistes ou nationalistes qui ont tenté de comprendre ces mouvements souterrains de l’opinion populaire.

    Actuellement, on est dans le vide total de la pensée.

    Les discours des vieux partis n’ont pas de prise sur le réel.

    On le voit au niveau européen. Les partis alternatifs, qui ont voulu se fonder sur un discours avant tout anti-européen, ont échoué brutalement. Seuls les partis qui se sont réorientés contre le danger migratoire de masse ont été validés par les électeurs.

    Cela veut dire que la force principale du mouvement populaire repose sur la critique de l’immigration de masse. Mais ce discours n’est pas accepté ou mal accepté dans le milieu « bourgeois ». À ce sujet, une nouvelle lutte des classes est en train d’apparaître. Les innovations politiques à venir seront donc structurées autour des questions d’identité, que cela plaise ou non.  

    Ancien député, président de l’association « Agir pour la démocratie directe »

  • 1er mai : Face à la gauche radicale, les syndicats ne font plus le poids

     

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    Ce qui s'est passé à Paris le 1er mai - un terrorisme en action en plein centre-ville - ne nous renseigne pas seulement sur la virulence de l'ultragauche mais aussi sur la déchéance syndicale.

    On se paye de mots, en effet, avec le syndicalisme français qui n'a de représentativité que celle qu'on lui reconnaît par habitude, facilité et lâcheté. (5% d'adhérents dans le secteur privé, 7% dans le secteur public !). 

    images.jpgLes troupes ont fondu, vieilli, les militants sont partis au Front National ou chez Mélenchon, les ex-gros bras de la CGT d'antan sont de vieux messieurs démotivés. Comme le PCF somme toute, qui n'a pour ainsi dire plus d'électeurs ni d'organisations militantes dignes de ce nom. Et encore moins de capacité révolutionnaire comme jadis. Tout cela ce sont des souvenirs. Ne restent plus que des bureaux, des apparatchiks à hauts salaires et des services comptables pour gérer les subventions et les aides diverses. Des coquilles vides. Le décompte des manifestants des grandes démonstrations de force se faisait jadis pour Paris et quelques grandes villes. Pour produire des chiffres de participation un peu moins ridicules, les syndicats, la police et les médias donnent désormais des résultats nationaux. 250 000 ? 140 000 ? Pour toute la France, cela ne fait plus grand chose. Le mythe révolutionnaire du Grand soir a fait long feu et le syndicalisme français, divisé, discrédité et exsangue, est une immense faillite, même s'il conserve, par le jeu de quelques minorités, un pouvoir de nuisance résiduel dont Emmanuel Macron fait en ce moment l'expérience. 

    Place donc dans la rue aux terroristes de la gauche radicale face à laquelle, désormais, les appareils syndicaux ne font plus le poids. Finis, en effet, les grands services d'ordre musclés de la C.G.T. ou du P.C.F. qui, il fut un temps pas si lointain, les auraient expulsés sans coup férir, ce premier mai.

    Nous n’avons plus affaire aujourd’hui à la révolution prolétarienne mais à la violence pure, aveugle et nihiliste.  

     

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

     

  • Sous le régime de l'immigration et du gauchisme accepté, l'on ne coupera pas à la violence

     

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    Au lendemain du premier mai, la société française se découvre agitée, violente, éclatée, antagoniste, haineuse, et finalement terriblement dangereuse.

    Faut-il en plus qu'elle en soit surprise ? 

    Voyons les choses avec simplicité. Ne laissons pas les idées et les politiques responsables de cette situation exonérées des dénonciations, des sérieux et graves reproches qu'elles méritent ; ne laissons pas leurs auteurs faire les innocents, feindre l'étonnement et, par surcroît, déplorer le misérable état de fait qu'ils ont eux-mêmes créé.

    Deux types de responsabilités souvent croisées, cumulées ou complices sont à incriminer.

    D'abord, l'idéologie et les politiques que l'on désigne aujourd’hui par différents néologismes d'ailleurs parfaitement corrélés : universalisme, droits-de-l’hommisme, immigrationnisme, multiculturalisme, antiracisme, discrimination positive diversitaire, prétendu antifascisme, etc. Consciemment ou non, c'est au nom de ces idéologies ou sous leur prétexte que l'on a ouvert le pays à tous les vents. A toutes les sortes de populations venues d’ailleurs en masse, et à toutes les violences.

    Ensuite, la politique immigrationniste à motivations économiques d'un certain capitalisme, que le MEDEF incarne. 

    Les masses immigrées attirées en France auront ainsi servi de main d'œuvre à bon marché tirant tous les salaires vers le bas, et aujourd'hui, pour plusieurs milliers d'individus, de troupes de choc aux organisations d'ultragauche, anarchistes et trotskistes. Ou encore de recrues pour le djihad et les attentats.

    La violence affecte plus ou moins toutes les sociétés. Elle ne cesse jamais d'être au cœur de l'homme. Mais, comme on le voit aux États-Unis, elle atteint des paroxysmes structurels, dans les peuples où doivent cohabiter des ethnies, des cultures, des religions, des civilisations, des races, des origines géographiques, fort différentes, et souvent opposées. La question raciale a installé depuis longtemps la violence au cœur de la société américaine. Il était prévisible qu'elle l'établirait aussi chez nous. Car si les races sont niées par les élites bienpensantes, elles ne le sont nullement chez les gens. Normaux ou ordinaires, comme on voudra.

    Ainsi l'on pourrait dire : « Si vous voulez la paix civile, ayez des populations homogènes. Si vous les voulez hétérogènes, vous ne couperez pas à la violence ». 

    Aujourd'hui, chez nous, elle est partout.  

     

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Mai 68 : Présentation

    Si, lorsquʼil sʼagit de donner un sens à cet événement, Mai 68 est lʼobjet dʼune controverse féroce – tant à propos de la cause de lʼirruption de la crise que de lʼimpact quʼelle a produit sur la société française –, ses laudateurs et ses contempteurs sʼaccordent pour en souligner lʼimportance décisive. Tous partagent le point de vue selon lequel ce moment de « communication explosive »[1] fut un « événement matriciel »[2], cʼest-à-dire fondateur, initiateur de quelque chose de nouveau, une rupture en somme. Pour Régis Debray, cʼest le « renaissance » de la « République bourgeoise »[3], quand Jean-Claude Michéa la qualifie de « Grande Révolution libérale-libertaire »[4]. Ces deux figures de la gauche intellectuelle rejoignent ainsi le camp de ceux qui, issus de la droite, font le procès de Mai 68. 

    En janvier dernier, dans un éditorial au ton très polémique, le directeur de Libération, Laurent Joffrin, sʼattaquait à une certaine gauche, coupable selon lui dʼêtre à lʼorigine dʼun « réquisitoire oblique qui impute à 68, sous des oripeaux révolutionnaires, le triomphe du marché, lʼouverture des frontières au libre-échange, qui aurait livré le pays aux grands vents de la mondialisation américanisée, sapé la souveraineté nationale pour le compte des multinationales. »[5] Or comme eux il considère que Mai 68 était une « fausse révolution, […] une révolte contre les traditions qui contestaient la liberté individuelle »[6]. Dans un autre périodique typiquement bobo, lʼhebdomadaire Télérama, Olivier Pascal-Mousselard et Vincent Rémy insistent sur le rôle joué par « une jeunesse en plein boom » qui provoqua un « séisme » sans précédent, faisant entre la France dans une « pétillante modernité »[7]. Dans leur texte ces deux derniers comparent, comme le premier dans son éditorial, Mai 68 à 1789. 

    Tel est donc le postulat de départ de ce dossier : comme lʼaffirment aussi Henri Mendras et Patrick Buisson, Mai 68 est peu ou prou assimilable à une seconde révolution française, qui transforma profondément les structures anthropologiques, culturelles, morales, économiques et politiques de la France contemporaine. Une nouvelle phase, au fond, du « Grand remplacement », le vrai : la substitution du culte ancestral – catholique, apostolique et romain – par celui des droits de lʼhomme, la laïcité.   

    [1]  Maurice Bantigny, La Communauté inavouable, Paris, Éd. du Minuit, 1983, p. 135.

    [2]  Ludivine Bantigny, « Assignés à hériter : quelques mouvements étudiants en miroir (1968-2006), in Ludivine Bantigny et Arnaud Baubérot (dir.), Hériter en politique : filiations, générations et transmissions politiques (Allemagne, France et Italie, XIXe – XXIe siècle), Paris, PUF, 2011, p. 296.

    [3]  Modeste contribution aux discours et cérémonies officielles du dixième anniversaire, Maspero, Paris, 1978, p. 10.

    [4]  LʼEnseignement de lʼignorance et ses conditions modernes, Castelnau-le-Lez, Climats, 1999, p. 46.

    [5]  Libération, 20-21 janvier 2018.

    [6]  Idem.

    [7]  Télérama, 23 décembre 2017-5 janvier 2018.

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    Dossier spécial Mai 68