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Idées, débats... - Page 466

  • Culture • L’excellence à la française a 250 ans

     

    Par Camille Pascal

    Camille Pascal fait partie de ces agrégés sachant écrire qui participent éminemment de cette excellence à la française menacée par les équarrisseurs égalitaristes aujourd'hui encore dominants. Le concours de l’agrégation, inauguré en 1766, fête cette année son 250e anniversaire. Camille Pascal rappelle ici opportunément qu'il n'est donc pas une création de la république mais de la monarchie française [Valeurs actuelles, 1.04].  LFAR

     

    Camille%20Pascal_22222222222222.pngDeux siècles et demi après son inauguration, l’agrégation est plus que jamais dans la ligne de mire d’une administration égalitariste.

    Le concours de l’agrégation, inauguré en 1766, fête cette année son 250e anniversaire. Ceux qui pensaient que cette clé de voûte de notre méritocratie républicaine était une invention de Jules Ferry ou, à tout le moins, de Bonaparte, en seront pour leurs frais. L’agrégation est un héritage de l’Ancien Régime, finissant à une époque où l’esprit des Lumières inspirait au despotisme éclairé ses dernières réformes. L’expulsion des jésuites ayant laissé bien des collèges sans maîtres, il fallut les remplacer. L’idée de recruter des enseignants laïcs sur le modèle des mandarins chinois, soumis à un concours difficile, s’imposa. Cette « chinoiserie » à peu près contemporaine de la pagode de Chanteloup a, par la suite, survécu à tous les régimes au point de s’identifier à une République qu’elle a pourtant précédée. C’est ainsi que la figure de « l’agrégé sachant écrire » attachée à Jaurès ou à Pompidou est devenue une sorte de mythe de la vie politique française qui permet, de temps à autre, à un jeune agrégé d’échapper à sa classe pour partir à la conquête du pouvoir et de ses cimes plus ou moins enivrantes.

    Ces carrières aussi rares que fulgurantes masquent une réalité beaucoup moins légendaire. Si l’agrégation reste l’un des concours les plus exigeants au monde, elle est aujourd’hui la victime de l’égalitarisme absurde qui règne depuis bientôt un demi-siècle sur notre éducation nationale.

    Un agrégé de l’université — entendez par là un agrégé reçu au concours externe —, après avoir été soumis à une préparation intensive pendant une période qui peut compter plusieurs années, a non seulement démontré qu’il pouvait être un véritable spécialiste sur les diverses questions inscrites à son programme mais aussi un généraliste capable de faire la démonstration d’une profonde culture. En effet, et sans vouloir offenser quiconque, la leçon « hors programme » qui attend un « agrégatif » d’histoire ou de lettres classiques est à l’épreuve dit de « culture générale » de certains concours administratifs ce qu’une leçon inaugurale du Collège de France est au Jeu des mille francs.

    La France peut donc s’honorer d’avoir formé et de disposer d’un corps d’enseignants d’élite qui ne sont pas uniquement des « éducateurs » ou des « répétiteurs » mais de véritables intellectuels rompus à l’art de la synthèse autant que de l’analyse, et lestés d’une culture qui leur permet de transmettre le coeur de ce qui fait l’identité de notre civilisation et même de quelques autres !

    Pour prix de leurs capacités et de leurs mérites, les agrégés sont payés un salaire qui n’excédera jamais trois fois le Smic et, contrairement à leur statut, une grande partie d’entre eux reste cantonnée en collège par une administration qui se méfie d’eux. La vieille lune communiste qui rêvait d’un seul corps enseignant depuis le primaire jusqu’au lycée a la vie dure.

    À l’heure où la question de la transmission est au coeur du débat public, la France dispose d’une force qu’elle a décidé de sous-employer quand elle ne projette pas de la faire disparaître. Car ne doutons pas qu’après le latin et le grec les agrégés qui enseignent ces matières “bourgeoises” seront les prochains à se trouver inscrits sur la liste des équarrisseurs de l’excellence. 

     Camille Pascal  

  • Livres • Réarmer la France

     

    par Nicolas Julhiet

     

    Rioufol-385x600.jpgIvan Rioufol, plume bien connue des colonnes du Figaro, revient avec un nouvel essai après De l’urgence d’être réactionnaire en 2012. Le titre, La guerre civile qui vient, est aussi provocateur que le précédent. Là encore, pour l’auteur, il y a urgence : la France – comme l’Europe – est face à un péril comme elle n’en a plus connu depuis longtemps : celui de l’islam radical, le « totalitarisme du XXIe siècle ». Les récents attentats ayant rythmé l’actualité, en France, depuis l’affaire Merah en 2012 jusqu’à ceux de novembre 2015, n’en sont, pourtant, que la sanglante partie émergée.

    Toute la face immergée est sondée et analysée par l’essayiste. Il faut voir la longue série des causes : l’abandon de toute politique sérieuse d’immigration au niveau national, qui devrait passer par un contrôle renforcé des arrivants ; la démission des élites face au péril islamiste : « la classe politique, seule ne fera rien. Elle ne croit plus en la France », prévient Ivan Rioufol ; la percée des islamistes radicaux et des islamologues complaisants, partout en Europe ; le travail de désinformation réalisé par les progressistes aveuglés par leur idéologie.

    Ce sont des dizaines d’exemples que l’auteur utilise pour appuyer sa démonstration ; les prodromes sont déjà là de cette « guerre civile qui vient ». Tous les ferments sont, pour lui, réunis. Est-ce, dans ces conditions, un énième essai apocalyptique, destiné à prendre la poussière comme tant d’autres ?

    Eh bien, non ! Ivan Rioufol cherche à trouver des parades, à entretenir l’espoir que cette « guerre civile » peut être évitée, que l’heure appartient aux « insoumis », comme il les nomme, qui doivent se lever : « Le temps est venu pour eux de tenir tête aux démolisseurs de la nation, aux nouveaux conquérants et à leurs porteurs d’eau. » Mais le salut ne viendra, pour lui, ni de l’État, ni de la classe politique, encore moins d’un homme providentiel. « C’est à la société civile elle-même, forte de ses expériences, de ses expertises et de ses indignations » que revient cette lourde charge.

    Notre pays ne peut plus s’offrir le luxe du temps et du choix : « la France, blessée, meurtrie, est à un moment charnière de son destin », avertit Ivan Rioufol. Il invite donc les Français à se réarmer et à se préparer à l’affrontement qui pourrait survenir. Ce sursaut d’optimisme ne prétend pourtant pas échapper à la réalité. La guerre est déjà là et elle ne fait que commencer. 

    La guerre civile qui vient, d’Ivan Rioufol, éditions Pierre-Guillaume de Roux, 198p., 19 euros. 

  • Cinéma • Les Visiteurs 3 ou le vrai visage de la Terreur, vus par Jean-Christophe Buisson

     

    Jean-Christophe Buisson a vu Les Visiteurs 3 - La Révolution. Il estime que Jean-Marie Poiré et Christian Clavier ont pris le parti inédit et courageux de se saisir à bras-le-corps de cette page sombre de l'histoire de France. Sans complexe ni manichéisme [Figarovox - 7.04]. Jean-Christophe Buisson est homme de goût et de jugement. Il n'affiche pas grande inclination pour la période révolutionnaire. Pas plus que nous qui lirons son avis avec attention et ... sympathie.  LFAR 

     

    PHOace7ebf0-cac5-11e3-ae1d-fb39e4002cc5-300x200.jpgDepuis 1870 et l'instauration de la République en France, la Révolution a plutôt bonne presse. Le mot lui-même est synonyme universel de progrès, de nécessité, d'avancée, qu'il concerne un nouveau médicament, la mécanisation des outils agricoles ou les régimes alimentaires. Politiquement, il sonne comme une promesse d'avenir radieux : même le maréchal Pétain, instituant pourtant un régime aux accents résolument contre-révolutionnaires, se sentit obligé de reprendre le terme, invitant la France à se lancer dans une « Révolution nationale ». Et nous ne parlons pas d'Hitler et de sa « révolution nationale-socialiste »… Quant à l'événement lui-même, bien que Lénine, Trotski, Mao, Pol Pot et quelques autres dictateurs sanguinaires s'en fussent réclamés à corps et à cris (surtout ceux de leurs millions de victimes), il n'en garde pas moins, dans les livres d'Histoire comme dans la classe politique ou médiatique dominante, auréolé d'un prestige certain. 1789, c'est neuf, donc c'est bien.

    Bien sûr, une école de pensée contre-révolutionnaire qui va de Louis de Bonald à Charles Maurras s'est attelée, depuis deux siècles, à insister sur ses noirs aspects et ses fâcheuses conséquences. Mais la somme de ses réussites (droit de vote, Droits de l'Homme, abolition de l'esclavage, établissement d'une Constitution, création d'une Assemblée nationale, émancipation des Juifs, liberté de la presse, etc.) est jugée supérieure à celle de ses désagréments (guerre civile en Vendée, guerre contre la moitié de l'Europe, destruction des communautés traditionnelles, confiscation ou destruction des biens du clergé, loi Le Chapelier interdisant les regroupements professionnels et la grève, etc.). Cette vision globalement positive de la Révolution a conduit les cinéastes à la représenter, à de rares exceptions près (le sublime Le Duc et l'Anglaise, d'Eric Rohmer) de manière globalement positive. La Bastille vidée plutôt que les prisons remplies. La joie illuminant le visage des paysans libérés du servage plutôt que la grimace des propriétaires et des prêtres sur le point d'être raccourcis. Des foules qui réclament du pain plutôt que des têtes. La terrine plutôt que la Terreur.

    Dans Les Visiteurs - La Révolution, Jean-Marie Poiré et Christian Clavier, coauteurs du scénario, ont pris le parti inédit et courageux de se saisir à bras-le-corps de cette page sombre de l'histoire de France. Sans manichéisme, sans faux-fuyants, sans complexe. Leur film est un divertissement qui s'appuie sur une tragédie - c'est souvent une excellente recette (voir La grande vadrouille, La Vache et le prisonnier, Monsieur Batignole, etc.). Il débute en janvier 1793 et court jusqu'à la Grande Terreur. On y voit (furtivement mais réellement) des prêtres et des nobles de tous âges emprisonnés, puis conduits à l'échafaud comme des bêtes à l'abattoir. On y voit des hommes et des femmes dont la seule ambition révolutionnaire est de s'emparer du bien des anciens possédants pour en profiter à leur tour, quitte à substituer une inégalité sociale à une autre. On y voit des bourgeois confisquer le processus révolutionnaire pour chiper la place des aristocrates. On y voit un Robespierre glaçant, sinistre, terrifiant (remarquablement interprété par Nicolas Vaude) décider, en compagnie de ses amis du Comité de Salut public réunis autour d'un bon dîner au champagne, qui, demain, méritera la mort (« exterminer les ennemis », disait l'un de ses zélés membres, Couthon, annonçant par là quelques génocides futurs…). On y voit, en face, un preux chevalier du XIIe siècle pétri de valeurs qui ont pour noms courage, honneur, noblesse d'âme (Godefroy Amaury de Malefète, comte de Montmirail, d'Apremont et de Papincourt, dit le Hardi et alias Jean Reno) refuser la fatalité et préférer risquer sa vie que salir son nom en cédant, comme d'autres, à une mode égalitariste et progressiste qui est la négation de son éducation et de son statut de fidèle vassal de Louis VI le Gros. On le voit, à l'annonce de la mort de Louis XVI, se jeter à genoux et réciter le Pater Noster après avoir crié « Le Roi est mort, vive le Roi! ». Pui s'échapper de prison en assommant ses gardes pour gagner Paris afin de libérer Louis XVII de sa prison du Temple et « remettre le Dauphin sur le trône ». Puis s'étonner sincèrement de se retrouver face-à-face à un Noir habillé aux couleurs de la Révolution (« Les Sarrasins sont parmi nous ! »). Et enfin, écrasé par la puissance ennemie, décider de revenir dans son château pour le reprendre, les armes à la main, à ses nouveaux propriétaires car « si tu perds ta terre, tu perds ton âme ».

    Autant de scènes et de formules qui, bien sûr, font hurler les si prévisibles thuriféraires habituels de Robespierre et de la Terreur. Ils trouvent bien entendu ce film « réactionnaire ». Quitte à oublier la somme considérable de saynètes du film ridiculisant (donc dénonçant) aussi les familles d'Ancien Régime engoncés dans leurs rites et leurs mentalités parfois détestables. Mais pour ces gens-là, sur ce sujet-là, il ne saurait être question d'objectivité, de neutralité, d'honnêteté intellectuelle, d'équilibre, de mesure. Leurs slogans n'ont pas changé depuis deux siècles : pas de liberté pour les ennemis de la liberté, la vérité est révolutionnaire, etc. Montrer la Révolution sous son jour sanglant aussi, c'est forcément être suspect d'antirépublicanisme, d'antipatriotisme, de révisionnisme. Même s'il s'agit de cinéma. Même s'il s'agit de la réalité historique. Mais ils n'aiment pas la réalité. Ni celle d'hier ni celle d'aujourd'hui. C'est à cela qu'on les reconnaît. 

    Jean-Christophe Buisson

    Jean-Christophe Buisson est journaliste et écrivain. Il dirige les pages culture et art de vivre du Figaro Magazine. Il est notamment l'auteur d'Assassinés (Perrin, 2013).

  • Histoire & Actualité • Hommage républicain à la Résistance royaliste : Inauguration de la place Mireille-et-Jacques-Renouvin

     

    par Daoud Boughezala
    rédacteur en chef de Causeur

    S'il est plusieurs façons possibles d'être et agir en royaliste - pourvu de ne pas nuire à l'objectif poursuivi - cet article en est un exemple. Intéressant, honnête et bien écrit, comme d'ordinaire les articles de Daoud Boughezala. LFAR

     

    boughezala.jpgIls étaient venus, ils étaient tous là à Saint-Germain-des-Prés ce samedi 26 mars pour honorer un couple de grands résistants en inaugurant la place Mireille-et-Jacques-Renouvin : le maire de Paris Anne Hidalgo, le député frondeur Pascal Cherki, l’adjointe communiste Catherine Vieu-Charier et le maire LR du 6e arrondissement Jean-Pierre Lecoq. Quelque 250 quidams, parmi lesquels des militants d’Action française, des membres de la Nouvelle Action royaliste fondée par Bertrand Renouvin, mais aussi Gabriel Matzneff et Lorànt Deutsch côté people, vibraient au son du Chant des partisans.

    Jean-Pierre Lecoq a longuement rendu hommage au camelot du roi et compagnon de la Libération Jacques Renouvin qui avait participé « à tous les chahuts et bagarres décidés par Léon Daudet et Charles Maurras » dans sa jeunesse avant de se retourner contre ses anciens maîtres, à la signature des accords de Munich en novembre 1938. Le futur héros de guerre gifla publiquement le président du Conseil, Pierre-Antoine Flandin, après que celui-ci avait envoyé un télégramme de félicitations à Hitler.

    Non sans courage, Anne Hidalgo a reconnu la filiation « patriote » et « monarchiste » d’une branche de la Résistance qui s’était élevée contre « la démission de Charles Maurras face à la menace allemande ». Engagé volontaire la guerre venue, prisonnier des Allemands puis résistant FFI après l’armistice, Jacques Renouvin rencontra une dénommée Mireille Tronchon lors d’un sabotage antipétainiste. Particulièrement inspiré, le maire de Paris est longuement revenu sur cet amour né au cœur de la Résistance, entre une jeune démocrate-chrétienne et un « fervent catholique » monarchiste qui multiplièrent les opérations punitives anticollabos. Arrêtés en Corrèze par la Gestapo un jour de janvier 1943, ils se marièrent en prison avant de se séparer, Jacques mourant d’épuisement dans le camp de Mauthausen tandis que Mireille allait donner naissance à leur fils Bertrand, figure du royalisme de gauche.

     

    On connaît le mot de Clemenceau, « la Révolution française est un bloc » ; on peut en dire autant de la Résistance. Si on avait épuré sa mémoire des admirateurs de Staline, des royalistes germanophobes et autres nationalistes tenant d’une France éternelle, l’armée des ombres serait réduite à peau de chagrin. C’est pourquoi le Front républicain, le vrai, devrait s’étendre jusqu’aux royalistes !   

    Daoud Boughezala

  • Livres & Société • La misère du néoféminisme contemporain : Le livre d’Eugénie Bastié va faire hurler les féministes

     

    Eugénie Bastié publie Adieu Mademoiselle, qui sera en librairies le 8 avril et va faire hurler les féministes. Journaliste au Figaro et rédactrice en chef politique de Limite, la « revue d’écologie intégrale », elle avait accédé à la notoriété en crevant l’écran, en septembre dernier, sur le plateau de Ce soir (ou jamais !), lançant à Jacques Attali : « Le vieux monde est de retour Monsieur Attali ! ». Nous avons déjà dit notre sympathie de fond pour la réflexion que mène Eugénie Bastié. Une réflexion qui nous paraît marquée par cette pensée selon la Tradition qui est aussi la nôtre. On lira cette recension de Novopress - et naturellement le livre qu'elle évoque - avec beaucoup d'intérêt.  LFAR  

     

    CeUqV-uWQAAchwF.jpgAvec ce premier livre, qui a justement failli s’appeler La Défaite des femmes, la jeune et talentueuse journaliste s’en prend à la « misère du néoféminisme contemporain » et accuse « l’idéologie postmoderne » de travailler « à la défaite des femmes ». La thèse : alors que l’égalité des droits est actée, que le contrôle de la fécondité est acquis, que la parité a été rendue obligatoire, « les nouvelles ayatollettes entendent poursuivre sans fin le combat, et lutter sans relâche pour un monde déjà advenu. Quitte, pour exister, à promouvoir les pires cauchemars d’Orwell ».

    Selon Eugénie Bastié, les véritables menaces qui pèsent sur les femmes et, plus largement, sur l’humanité tout entière, sont à rechercher du côté des laboratoires de la Silicon Valley, dans le « tapage des Femen », dans le « déni de Cologne », dans les colloques « queer et trans », bref, dans ce mélange de postmodernité politiquement correcte et d’idéologie « transhumaniste » contre lequel s’étaient déjà dressés Eric Letty et Guillaume de Prémare dans leur ouvrage Résistance au meilleur des mondes.

    Cours toujours, Attali, le « vieux monde » retrouve de la vigueur et tu ne le rattraperas plus !   

    NOVOpress 28.03

  • Théâtre • Un vrai moment de théâtre

     

    par Madeleine Gautier

     

    Inspirée du film Potins de femmes, cette adaptation de Didier Caron nous est livrée dans un écrin d’émotions et de charme. Nous sommes en 1981, à la veille de l’élection présidentielle. Thérèse tient, à Paimpol, un salon de coiffure flashy des années 80. Très à l’écoute de ses clientes, certaines d’entre elles deviendront ses amies. Ce rendez-vous de détente pour Magalie, Jeanne, Agnès, Claire et Odette – projecteur de leurs confidences faites de joies, rêves trahis, et difficultés partagées -, laisse entrevoir leur vie dans ce qu’elle a d’incertain, de fragile et de grand à la fois. Comme celle de Jeanne, dont la fille Magalie, mariée, diabétique depuis l’enfance, annonce qu’elle attend un enfant, malgré l’interdiction des médecins. Tout démarre dans la bonne humeur, où l’humour et les bons mots fusent comme des exocets. Mais le drame n’est pas loin et, lorsqu’il éclate, c’est encore le rire libérateur de ces « drôles de dames » qui dynamite la tragédie. La mise en scène de Dominique Guillo, conjuguant habilement légèreté et gravité, nous offre une comédie exquise. Et les six comédiennes, toutes excellentes, nourrissent ce spectacle d’une grande justesse et d’une saisissante humanité donnant à voir un vrai moment de théâtre, intelligent, drôle et très émouvant.

    Coiffure et confidences, comédie de Robert Harling. Adaptation : Didier Caron. Mise en scène : Dominique Guillo. Avec : Anne Richard, Marie-Hélène Lentini, Léa François etc…

    Théâtre Michel
    38 rue des Mathurins - 75008 Paris - Tél : 01 42 65 35 02 

  • Livres • Le secret de Pierre Boutang : retour sur l'ouvrage de Stéphane Giocanti

     

    Pierre Boutang a été et reste l'un de nos maîtres, comme on eût dit plus volontiers en d'autres temps. Mais un maître au sens de George Steiner, un maître duquel on apprend, mais avec qui l'on dialogue, dans une relation vivante, où parfois s'affirment divergences ou développements. Et à la différence des Maurras, Daudet, Bainville, nombre d'entre nous ont approché, connu, écouté, interrogé un Pierre Boutang de chair et d'os, qualités et défauts confondus. L'excellente recension qui suit du dernier ouvrage de Stéphane Giocanti nous le fait redécouvrir tel qu'en lui-même. Nous la devons à Philitt, un site de réflexion philosophique et culturelle qu'il faut, selon nous, connaître et faire connaître. LFAR   

    Après une biographie consacrée à Charles Maurras (Flammarion, 2006), Stéphane Giocanti s’attaque à l’un des plus talentueux disciples du maître de l’Action française : Pierre Boutang (Flammarion, 2016). Ce livre nous permet de découvrir un personnage complexe et souvent sous-estimé, de l’étudiant facétieux au philosophe virtuose en passant par le talentueux polémiste.

    Une des choses qui ravit lorsqu’on évoque le nom de Pierre Boutang, c’est qu’on sait d’emblée – à la différence des intellectuels d’aujourd’hui – qu’on peut le nommer écrivain ou philosophe. Car Boutang, bien qu’il ne soit pas si loin de nous – il meurt le 27 juin 1998 – était incontestablement les deux. Il avait à la fois l’âme d’un poète et celle d’un métaphysicien. Dans sa biographie consacrée à l’auteur d’Ontologie du secret, Stéphane Giocanti dresse le portrait d’un homme dont la complexité déroutera plus d’un lecteur, trop habitué que nous sommes au monolithisme de nos contemporains. D’abord normalien et militant de l’Action française, maréchaliste puis giraudiste pendant la Seconde Guerre mondiale, soutien de De Gaulle dans l’espoir de voir le comte de Paris succéder à ce dernier, disciple de Maurras renonçant petit à petit à son antisémitisme pour finir fervent défenseur d’Israël… Boutang est insaisissable bien que toujours mû par l’idéal monarchique et par son catholicisme.

    Jeune, Boutang se distingue par sa beauté, par sa force physique et par sa verve. Ce Rimbaud aux mains de paysan est aussi espiègle que charmeur. Il envoûte ses professeurs autant que ses camarades. Giocanti nous dépeint avec talent cette période de la vie du philosophe. On ressent nettement la tension inhérente chez Boutang entre sa curiosité intellectuelle inépuisable et son tempérament dionysiaque – qui va de ses nombreuses conquêtes à son besoin de faire le coup de poing. Ainsi, il manque d’être exclu de l’école Normale pour avoir réservé un accueil très spécial à Jean Zay qui venait donner une conférence en Sorbonne « Pour répondre à cette personnalité politique, qui en 1924 a comparé le drapeau français à un « torchecul » dans un poème antimilitariste, l’étudiant répand de haut en bas des murs de l’École quantité de papier hygiénique », raconte Giocanti. Mais dans le même temps, Boutang est un élève brillant, lecteur compulsif qui impressionne ses professeurs que sont, entre autres, Vladimir Jankélévitch, Gabriel Marcel et Jean Wahl. « […] il recopie ou commente Nietzsche, Kierkegaard, Hegel, Platon, Pascal, Bergson, rédige toute une dissertation sur le langage, commente l’article que Jean Wahl vient de consacrer à Karl Jaspers dans la Revue de métaphysique et de morale », souligne le biographe.

    La vie d’étudiant fut également pour Boutang l’occasion de rencontres décisives : Philippe Ariès, Raoul Girardet – tous deux futurs historiens de renom – Maurice Clavel, qui sera un écrivain et journaliste célèbre, puis celle qui deviendra sa femme, Marie-Claire Canque. Giocanti tient à montrer que, si Boutang est très fidèle en amitié, il l’est moins en amour. Le couple était déjà un petit miracle en soi : lui militant Action française, elle imprégnée d’un humanisme de gauche. Mais Boutang ne peut s’empêcher d’user de son charme sur les femmes. Il multipliera les conquêtes, les trahisons qui seront, en partie, à l’origine d’un de ses ouvrages les plus importants Le Purgatoire, son chemin de croix philosophique. « De son mariage, Boutang dira rétrospectivement qu’il a été heureux autant qu’il était possible », note Giocanti qui veut témoigner de ce pessimisme amoureux propre à Boutang.

    Maurras et Boutang_Giocanti.jpg

      Stéphane Giocanti                 Boutang parlant à Maurras

     

    S’il faut trouver un défaut au travail remarquable de Giocanti, il concerne le récit de la Seconde Guerre mondiale. L’auteur perd Boutang de vue pour parler en détail de la rivalité entre le général de Gaulle et le général Giraud. Si cette contextualisation a un sens puisque le « maréchaliste » Boutang a choisi le camp de Giraud pendant la guerre avant de célébrer De Gaulle dans les années 60, Giocanti s’éloigne un peu trop de son entreprise biographique pour aller sur le terrain de l’analyse historique. Pendant un chapitre entier, Boutang est un peu délaissé et on ne le retrouve véritablement que quand l’auteur se décide à aborder l’après 1945. On retiendra néanmoins la position complexe de Boutang dans ce conflit. Boutang reste fidèle à Maurras et soutient le maréchal Pétain. Pourtant, il ne se sent pas du tout proche de l’administration de Vichy et abhorre l’esprit de collaboration. Boutang se mobilisera pour faire sortir du camp de Drancy son ancien professeur Jean Wahl qui lui en sera reconnaissant toute sa vie. L’historien Simon Epstein dira de l’auteur d’Ontologie du secret qu’il fut « résistant à sa manière ». En lisant Giocanti, on comprend d’ailleurs que ce n’est pas le « maréchalisme » de Boutang qui lui a posé problème après la guerre mais bien plutôt son giraudisme. Sans doute aurait-il été ministre, comme Malraux, s’il avait rejoint Londres en 1940, dira de lui un ami.

    L’avènement d’un philosophe

    Boutang a 29 ans quand la guerre se termine. Philosophe royaliste et catholique, il doit ferrailler avec les existentialistes, les structuralistes et les marxistes qui dominent la scène intellectuelle française. Il mènera son combat depuis deux revues qu’il dirigera successivement, Aspects de la France puis La Nation française. Avec ce deuxième titre, Boutang veut donner un nouveau souffle à la pensée monarchique affaiblie depuis la mort de Maurras en 1952. « Le projet est de dépasser ce qui a été tenté à Aspects de la France et de tracer une voie intellectuelle et politique nouvelle. Il s’agit de créer un laboratoire d’idées et un espace de débat, de relever le royalisme politique et doctrinal », précise Giocanti avant d’ajouter que Boutang entendait résumer la ligne éditoriale du journal par une boutade : « Ne pas être trop bête. » Longtemps, cette carrière de polémiste va retarder le destin philosophique de Boutang qui éprouve beaucoup de difficultés à se retirer du monde. Il faudra attendre 1973 – il a alors 57 ans – pour que soit publiée sa thèse Ontologie du secret dans laquelle il a mis toutes ses forces. Ferdinand Alquié salue une « prouesse » tandis que Gabriel Marcel, son vieux maître, évoque un « monument ». De son côté, George Steiner parle d’un « rendez-vous décisif ». « Avec Ontologie du secret, Pierre Boutang s’impose comme un penseur à la fois considérable et singulier. Ce traité, qui est aussi le journal de bord d’une pensée qui se construit, aborde les fondements mêmes de l’ontologie et de la métaphysique, en examinant les articulations entre l’être et le secret », explique Giocanti.

    Dès lors, ce Boutang consacré peut envisager de rejoindre la Sorbonne. Il est élu professeur de métaphysique le 12 mars 1976. Mais son passé de militant politique le rattrape et une campagne est lancée pour l’empêcher d’enseigner dans cette prestigieuse université. Jacques Derrida, Pierre Vidal-Naquet, Pierre Bourdieu ou encore Luc Ferry font partie des signataires. Ils mettent en doute le sérieux philosophique de Boutang et lui reprochent d’avoir ressuscité « la presse d’extrême droite ». L’alliance des libéraux, des marxistes et des structuralistes contre le philosophe royaliste et catholique est un échec. Les défenseurs de Boutang sont nombreux, d’Emmanuel Levinas à André Froisard en passant par René Schérer. Avant que François Mitterrand, alors Premier secrétaire du Parti socialiste, ne rappelle : « […] la liberté de nos adversaires n’est-elle pas un peu la nôtre ? » En dernière instance, c’est le talent de professeur de Boutang, sa générosité aussi, qui légitimeront sa place à la Sorbonne. « Pédagogue de la liberté intérieure, Boutang donne aux étudiants l’occasion de rompre avec le conformisme marxiste et freudien ambiants, mais il leur offre surtout la possibilité d’interroger les textes comme ils ne l’ont pu auparavant, avec des recours à l’étymologie, aux comparaisons entre les langues, et des parallèles inattendus qui surgissent pour éclairer une notion, ouvrir un problème… », souligne Giocanti.

    Universitaire controversé mais respecté, Boutang pourra enfin se consacrer à l’essentiel : la philosophie. Après Ontologie du secret (1973), c’est Le Purgatoire (1976), Apocalypse du désir (1979) ou encore Maurras, la destinée et l’œuvre (1981) qui contribueront à forger sa réputation de penseur de premier plan. Cent ans après sa naissance, la biographie de Giocanti apparaît comme un hommage nécessaire à cet homme hors du commun qui aura traversé le XXe siècle comme une comète. 

    Crédits photo : Rue des Archives/mention obligatoire©Louis Monier

    Philitt

  • Théâtre • Kessel, encore plus grand au théâtre

     

    Camille Dubernet pour Culture-Tops*

    Qui, en un sens, rend un hommage mérité à Joseph Kessel, et, d'autre part, analyse excellemment et signale un spectacle qui vaut certainement la peine d'être vu. LFAR

     

    "Les Cavaliers" était déjà un grand roman. Mais l'adaptation théâtrale de l'oeuvre de Kessel, présentée au Théâtre La Bruyère, lui donne une dimension humaine encore plus exceptionnelle. Coup de foudre.

    L’auteur

    kessel.pngJournaliste, résistant, scénariste, reporter de guerre et romancier, Joseph Kessel fut un aventurier au sens noble du terme. Il a écrit de très belles œuvres comme Le Lion, L’Armée des Ombres et bien évidemment Les Cavaliers (en 1967), que lui a inspiré un long reportage en Afghanistan.

    Pour reprendre les mots de François Mauriac, dans son Bloc-Notes, « Il est de ces êtres à qui tout excès aura été permis, et d’abord dans la témérité du soldat et du résistant, et qui aura gagné l’univers sans avoir perdu son âme. »

    Thème 

    Le jeune et orgueilleux Ouroz participe au tournoi le plus important d’Afghanistan, le Bouzkachi du Roi, un sport très violent pour des cavaliers exceptionnels. Son père, le grand Toursène, maître des écuries du domaine et grand champion du bouzkachi en son temps, lui confie son cheval, le grand Jehol,  pour le tournoi et lui promet de le lui offrir en cas de victoire de l’étalon.

    Mais Ouroz échoue, tombe de son cheval, et se brise la jambe. Il doit alors retourner dans sa province lointaine pour faire face à son père, malgré son humiliante défaite, et alors que son cheval, lui, a gagné avec un autre cavalier. 

    Ainsi commence pour Ouroz, blessé et malade, un long et périlleux voyage à travers l’Afghanistan. Il est accompagné de son fidèle serviteur Mokkhi et de Jehol, son magnifique cheval fou. 

    Points forts

    J’ai tellement aimé cette pièce dans son ensemble qu’il m’est difficile de ne sélectionner que quelques points forts, mais je vais quand même essayer de me prêter à l’exercice...

    Il faut tout d’abord expliquer qu’ayant lu avec passion le livre du même nom, je me demandais par quelle magie et surtout avec quels moyens un metteur en scène pouvait transposer cette épopée à cheval sur les planches d’un théâtre… Mais le défi est brillamment relevé tant par les metteurs en scène que par les quatre comédiens qui semblent véritablement habités par les personnages qu’ils incarnent pour nous.

    Venons-en aux points forts les plus révélateurs : 

    - La scénographie très sobre et unique tout au long de la pièce. Un tapis, un rideau, quelques tabourets, et nous voilà tour à tour dans les montagnes afghanes, les steppes de la province de Maïmana, sur le terrain du grand bouzkachi de Kaboul ou encore au coin du feu avec Ouroz et Mokkhi 

    - Car oui, même les cavalcades de chevaux et la présence continue de Jehol, le grand étalon, le cheval fou, sont vivantes sur la scène du Théâtre La Bruyère. La magie est là. Point de cheval, mais grâce aux talents des comédiens et de Khalid K, on pourrait presque jurer que si, bien sûr, on a vu Jehol galoper aux côtés des autres chevaux du bouzkachi, avant d’emmener son maître blessé sur son dos.

    - Khalid K… il faut absolument parler de Khalid K. Chanteur, musicien, « bruiteur », il est présent à chaque instant de la pièce qu’il accompagne de sa voix, de ses mélopées, pour faire ainsi résonner sur scène et en nous, les galops des chevaux et leur respiration, l’écho des montagnes, le bruit de la nuit, des angoisses et des peurs. Il est tout simplement exceptionnel. 

    Points faibles

    - Un petit bémol peut-être pour la scène de combat entre Ouroz, en transe, et un chien sauvage, que j’ai eu du mal à apprécier. Mais je crois que déjà dans le livre, je n’avais pas aimé cet épisode; alors; ma réaction n’est pas vraiment surprenante !

    - A la sortie du théâtre, les discussions étaient animées, et il faut reconnaître que cette pièce, peu classique et assez proche du conte ou du spectacle africain, ne plaira peut-être pas aux amateurs de théâtre plus conventionnel. Je me demande également si j’aurais autant apprécié sans avoir lu le livre… ?

    En deux mots 

    Je ne peux que recommander ce spectacle qui nous fait voyager loin de Paris, et qui nous révèle la dimension humaine très forte du livre de Joseph Kessel où il serait facile de ne voir que le récit de voyage et d’aventure. C'est un très bel hommage qui est rendu par toute l’équipe à ce grand écrivain, qui est d’ailleurs salué et remercié par les comédiens à la fin du spectacle. 

    Une phrase

    "Ici en Afghanistan, c'est le Bouzkachi qui façonne les hommes, ou qui les détruit."

    Recommandation

    En priorité  En priorité 

    Théâtre

    Les Cavaliers de Joseph Kessel

    Adaptation : Eric Bouvron.

    Avec : Éric Bouvron, Grégori Baquet en alternance avec Benjamin Penamaria, Khalid K. et Maïa Guéritte.

    Mise en scène Éric Bouvron et Anne Bourgeois

    Informations

    Théâtre La Bruyère, 5 rue La Bruyère, 75009 Paris

    Réservation: 01 48 74 76 99

    www.theatrelabruyere.com

    Du mardi au samedi, à 21h. En matinée, le samedi, à 15h30

    * Camille Dubernet est chroniqueuse pour Culture-Tops.

    Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).

  • Exposition ♦ Du neuf avec du vieux et ... les trésors du Prince de Liechtenstein

    Le sublime Hôtel de Caumont. à Aix-en-Provence

     

    PAR OLIVIER D'ESCOMBEAU 

    Les Aixois n'ont gardé qu'un pâle souvenir de ce qui fut jadis « le plus beau conservatoire de France », l'Hôtel de Caumont. Ce joyau de l'architecture du XVIIIe siècle, acheté par la ville au milieu des années 6o, avait été transformé, sous l'impulsion de Marcel Landowski, en conservatoire Darius Milhaud. Le lieu, devenu vétuste et encrassé, résonnait, il y a quelques années encore, des tâtonnements sonores de jeunes musiciens en herbe.

    En 2010, la ville décide de se séparer de ce bâtiment jugé peu fonctionnel. La vente de ce bien ne fut pas, comme on s'en doute, du goût de tous les Aixois. Une sévère polémique s'en suivit, où les édiles de la ville furent accusés de brader le patrimoine commun. À cinq ans de distance, il est pourtant difficile de leur donner tort lorsque l'on visite l'Hôtel de Caumont restitué dans sa splendeur au terme d'un gigantesque chantier. Qui plus est, voici ce lieu ouvert au public sous la bannière d'un opérateur privé bien connu dans le secteur du patrimoine : Culturespaces.

    Car le bâtiment, au terme d'une transaction et de travaux fort coûteux, est tombé dans l'escarcelle de cette société ayant, pour activité, la gestion de sites culturels aussi divers que le Château des Baux, la Cité de l'Automobile de Mulhouse, ou le Musée Jacquemart André à Paris.

    La culture ne nourrit pas son homme, c'est bien connu. Dans un pays où l'État, ces cinquante dernières années, a été l'alpha et l'oméga de l'action culturelle dans le patrimoine ou la création, les initiatives privées (autres que philanthropiques) ont eu bien du mal à prospérer. Culturespaces, qualifié par certains « d'ennemi de la culture », fait figure d'exception. Le rachat et l'ouverture de l'Hôtel de Caumont vient, en quelque sorte, couronner cette persévérance.

    Tenter d'instiller et d'adapter les méthodes du privé dans le domaine patrimonial n'est pas le seul reproche formulé à l'égard de Culturespaces. Car la spécialité de cette entreprise, c'est de gérer, en lieu et place des propriétaires publics ou privés, sites touristiques, Musées, Fondations ou demeures. Réussir, là où d'autres ont immanquablement échoué, se fait au prix de quelques sacrifices : sur-fréquentation des monuments, privatisations à outrance, restaurations des collections passant au second plan, exigences scientifiques en berne. Car il faut que cela paye. Il est de notoriété, parmi les conservateurs du patrimoine, que travailler dans une institution affermée à Culturespaces est une sorte d'enfer sur terre.

    Le cas de l'Hôtel de Caumont tranche avec les autres sites gérés par Culturespaces, près d'une quinzaine à l'heure actuelle. Car ici, point de collections encombrantes et coûteuses à entretenir, pas de professionnels de la culture rétifs et meurtris, pas de propriétaire sourcilleux regardant par-dessus l'épaule du concessionnaire ; mais un espace vide et prestigieux tout entier offert à la programmation et aux privatisations.
    Les trésors du Prince de Liechtenstein — Raphaël, Rubens ou Vernet — présentés dans les salles de l'Hôtel de Caumont ont eu de quoi enchanter l'amateur d'art. Ces magnifiques collections ont traversé des périodes troublées, en particulier au siècle dernier, sans jamais quitter la sphère privée. Un choix emblématique pour la première exposition du joyau de Culturespaces. 

     

    Le Musée Caumont est ouvert tous les jours de l’année de 10h à 18h. Librairie. Petite restauration. Parc-autos à proximité. 3, rue Joseph-Cabassol, à deux pas du cours Mirabeau, 13100-Aix-en-Provence. 

    Sur le même sujet : Exposition • Monarchie et beaux-arts par Péroncel-Hugoz

     

  • Christopher Caldwell : « Les intuitions de Houellebecq sur la France sont justes »

     

    Dans son livre, une Révolution sous nos yeux, le journaliste américain Christopher Caldwell annonçait que l'islam allait transformer la France et l'Europe. Pour FigaroVox [25.03] il réagit aux attentats de Bruxelles. Sa réflexion va souvent à l'essentiel. Nous le suivrons presque en tous points. Même son appréciation sur les Lumières est en fait nuancée. Et, de toute façon, Houllebecq, sans-doute à juste titre, les juge éteintes...  LFAR  

     

    Après Paris, Bruxelles est frappée par le terrorisme islamiste. A chaque fois la majeure partie des djihadistes sont nés dans le pays qu'ils attaquent. Cela révèle-t-il l'échec du multiculturalisme ?

    Peut-être, mais je ne suis pas sûr que le mot « multiculturalisme » signifie encore quelque chose. Il ne faut pas être surpris qu'un homme né européen commette des actes de terrorisme européen. C'est pour l'essentiel une question pratique. Le terrorisme requiert de la familiarité avec le terrain d'opération, le “champ de bataille”. C'est une chose très difficile que de constituer une équipe de terroristes en passant plusieurs frontières pour mener à bien une opération dans un pays étranger - même si cela peut être réalisé, comme les attentats du 11 Septembre l'ont montré.

    Au surplus, l'ensemble des droits et libertés constitutionnels de l'Union européenne, en commençant par Schengen, donne un éventail particulièrement large de possibilités à tout jeune Européen en rupture. Regardez ces terroristes belges. L'artificier Najim Laachraoui est allé en Syrie pour se battre aux côtés de Daech, mais personne n'a su comment il était revenu à Bruxelles. Ibrahim el-Bakraoui a été condamné à 9 ans de prison pour avoir tiré sur un policier en 2010. Mais il a également été arrêté plus récemment par la Turquie à Gaziantep, à la frontière syrienne, et identifié comme un combattant de Daech. Et tout cela est resté sans conséquences.

    Diriez-vous que derrière l'islamisme guerrier de Daesh, l'Europe est également confrontée à une islamisation douce un peu comme dans le dernier livre de Houellebecq, Soumission ?

    Quand j'ai lu le livre de Houellebecq, quelques jours après les assassinats à Charlie Hebdo, il m'a semblé que ses intuitions sur la vie politique française étaient tout à fait correctes. Les élites françaises donnent souvent l'impression qu'elles seraient moins perturbées par un parti islamiste au pouvoir que par le Front national.

    La lecture du travail de Christophe Guilluy sur ces questions a aiguisé ma réflexion sur la politique européenne. Guilluy se demande pourquoi la classe moyenne est en déclin à Paris comme dans la plupart des grandes villes européennes et il répond: parce que les villes européennes n'ont pas vraiment besoin d'une classe moyenne. Les emplois occupés auparavant par les classes moyennes et populaires, principalement dans le secteur manufacturier, sont maintenant plus rentablement pourvus en Chine. Ce dont les grandes villes européennes ont besoin, c'est d'équipements et de services pour les categories aisées qui y vivent. Ces services sont aujourd'hui fournis par des immigrés. Les classes supérieures et les nouveaux arrivants s'accommodent plutôt bien de la mondialisation. Ils ont donc une certaine affinité, ils sont complices d'une certaine manière. Voilà ce que Houellebecq a vu.

    Les populistes européens ne parviennent pas toujours à développer une explication logique à leur perception de l'immigration comme origine principale de leurs maux, mais leurs points de vues ne sont pas non plus totalement absurdes.

    Dans votre livre Un révolution sous nos yeux ,vous montriez comment l'islam va transformer la France et l'Europe. Sommes-nous en train de vivre cette transformation ?

    Très clairement.

    Celle-ci passe-t-elle forcément par un choc des cultures ?  

    C'est difficile à prévoir, mais ce qui se passe est un phénomène profond, anthropologique. Une culture - l'islam - qui apparaît, quels que soient ses défauts, comme jeune, dynamique, optimiste et surtout centrée sur la famille entre en conflit avec la culture que l'Europe a adoptée depuis la seconde guerre mondiale, celle de la «société ouverte» comme Charles Michel et Angela Merkel se sont empressés de la qualifier après les attentats du 22 Mars. En raison même de son postulat individualiste, cette culture est timide, confuse, et, surtout, hostile aux familles. Tel est le problème fondamental: l'Islam est plus jeune, plus fort et fait preuve d'une vitalité évidente.

    Certains intellectuels comme Pierre Manent propose de négocier avec l'islam. Est-ce crédible ? Les «accommodements raisonnables» peuvent-ils fonctionner ?

    Situation de la France de Pierre Manent est un livre brillant à plusieurs niveaux. Il a raison de dire que, comme pure question sociologique, l'Islam est désormais un fait en France. Manent est aussi extrêmement fin sur les failles de la laïcité comme moyen d'assimiler les musulmans, laïcité qui fut construite autour d'un problème très spécifique et bâtie comme un ensemble de dispositions destinées à démanteler les institutions par lesquelles l'Église catholique influençait la politique française il y a un siècle. Au fil du temps les arguments d'origine se sont transformés en simples slogans. La France invoque aujourd'hui, pour faire entrer les musulmans dans la communauté nationale, des règles destinées à expulser les catholiques de la vie politique.

    Il faut aussi se rappeler que Manent a fait sa proposition avant les attentats de novembre dernier. De plus, sa volonté d'offrir des accomodements à la religion musulmane était assortie d'une insistance à ce que l'Islam rejette les influences étrangères, ce qui à mon sens ne se fera pas. D'abord parce que ces attentats ayant eu lieu, la France paraîtrait faible et non pas généreuse, en proposant un tel accord. Et aussi parce que tant que l'immigration se poursuivra, favorisant un établissement inéluctable de l'islam en France, les instances musulmanes peuvent estimer qu'elles n'ont aucun intérêt à transiger.

    « Entre une culture qui doute d'elle-même et une culture forte, c'est la culture forte qui va l'emporter... » écrivez-vous en conclusion de votre livre. L'Europe des Lumières héritière de la civilisation judéo-chrétienne et gréco-romaine est-elle appelée à disparaître ?

    L'Europe ne va pas disparaître. Il y a quelque chose d'immortel en elle. Mais elle sera diminuée. Je ne pense pas que l'on puisse en accuser l'Europe des Lumières, qui n' a jamais été une menace fondamentale pour la continuité de l'Europe. La menace tient pour l'essentiel à cet objectif plus recent de «société ouverte» dont le principe moteur est de vider la société de toute métaphysique, héritée ou antérieure (ce qui soulève la question, très complexe, de de la tendance du capitalisme à s'ériger lui-même en métaphysique). A certains égards, on comprend pourquoi des gens préfèrent cette société ouverte au christianisme culturel qu'elle remplace. Mais dans l'optique de la survie, elle se montre cependant nettement inférieure. 

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    Christopher Caldwell est un journaliste américain. Il est l'auteur de Une Révolution sous nos yeux, comment l'islam va transformer la France et l'Europe paru aux éditions du Toucan en 2011. 

    picture-2540921-61yhv5dr.jpgEntretien par

    Journaliste au Figaro et responsable du FigaroVox. Twitter : @AlexDevecchio

     

  • Décès d'Alain Decaux : selon lui, il y avait 26 millions de royalistes en France en 1788

    Alain Decaux et son épouse au mariage du prince Jean à Senlis en 2009

     

    A l'annonce du décès d'Alain Decaux, qui fut un bon serviteur de l'Histoire, en guise d'hommage, sans-doute celui qu'il nous revient de lui rendre, voici le texte complet d'un excellent article qu'il fit paraître il y a quelques vingt-cinq ans sous le titre : «26 millions de Royalistes. » Il s'agit du premier article d'une série de neuf, écrits chacun par une personnalité différente, et regroupés sous le titre global « Journal de l'Histoire 1788 ». L'ensemble a été publié dans Le Figaro du 13 juillet 1988 au 25 août 1988. Et dans Lafautearousseau le 14 septembre 2007, d'où nous le reprenons. LFAR   

           

    Le 13 juillet 1788, on le sait, un cataclysme tel que nul en France n'en avait gardé la mémoire accabla l'Ouest de la France: la grêle s'abattit partout avec une telle violence qu'elle anéantit la moisson. Fallait-il être grand clerc pour en déduire que le pain, en 1789, serait rare et que donc il serait cher. On n'avait vraiment pas besoin de cela, alors que surgissaient déjà tant de raisons d'inquiétude et non moins de sujets de mécontentement. Quelques temps plus tôt, un voyageur anglais, Arthur Young, agronome de profession et observateur d'instinct, notait: "Une opinion prévalait, c'est qu'on était à l'aurore d'une grande révolution dans le gouvernement." Vers la même époque, un des derniers ministres de Louis XVI, Calonne, avait, dans un rapport adressé au Roi, formulé un diagnostic plus sombre encore: "La France est un royaume très imparfait, très rempli d'abus et, tel qu'il est, impossible à gouverner." Une révolution imminente, un pays impossible à gouverner: pourquoi ?

    L'étrange de l'affaire est que, dans son ensemble, la France ne s'est jamais aussi bien portée. Oubliées, les épouvantables famines qui avaient désolé le règne de Louis XIV, celle de 1709 ayant à elle seule causé deux millions de morts. Éloignées, les grandes épidémies qui, au XVIII° siècle encore, avaient répandu la terreur. Qui plus est -et c'est peut-être l'élément capital- de 1715 à 1792 le territoire national n'a connu aucune invasion étrangère. Que découvre l'étranger qui, en 1788, parcourt la France? Un pays de 26 millions d'habitants -le plus peuplé d'Europe- dont l'opulence le frappe. Une nation en pleine expansion économique. Une agriculture de plus en plus prospère. Un commerce florissant. Paris est, pour le monde entier, l'incarnation d'une civilisation portée à son plus haut degré. Toute l'Europe parle français.

    Le problème, le vrai problème, est que, si la France est riche, l'Etat est ruiné. Du Roi jusqu'au plus humbles des citoyens, les français cherchent éperdument la solution d'une crise dont on sent qu'elle menace jusqu'à l'existence de la nation. Pour le Roi et ses conseillers, cette solution doit rester financière. Pour le plus grand nombre de français, elle ne peut que devenir politique.

    L'évidence des réformes.

    Le colossal déficit accumulé d'année en année depuis si longtemps ne pouvait être réduit à néant que par le vote de nouveaux impôts. Cependant seuls les États Généraux, élus par l'ensemble de la nation, pouvaient voter des impositions supplémentaires. Ils n'avaient pas été convoqués depuis 1614. Fallait-il les réunir ? Le poids total de l'impôt reposait sur le Tiers État. Le clergé et la noblesse en étaient dispensés. L'occasion se présentait d'une plus grande équité fiscale. Fallait-il la saisir ? Le siècle tout entier aspirait, non pas à une révolution mais à des réformes. Le premier, Montesquieu avait souhaité un état libéral. Rousseau avait exposé les principes idéaux d'une démocratie égalitaire. Avec son extraordinaire alacrité, Voltaire avait donné la priorité à la liberté individuelle et à la tolérance. Jamais des théoriciens n'avaient rencontré si prodigieux écho. Toute la France cultivée les avait lus. Pour une raison évidente: ils s'adressaient à des esprits préparés.  

    Depuis plusieurs décennies, la bourgeoisie avait mobilisé une grande partie de la fortune de la France. Elle ne pouvait et ne voulait plus accepter les privilèges réservés à la noblesse, par exemple celui, exorbitant, qui, depuis 1781, accordait aux seuls nobles le droit de devenir officier. Non seulement elle les trouvait injustes mais humiliants. Qui dira la part des humiliations dans la naissance des révolutions ? Les paysans, dans leur majorité, étaient devenus propriétaires de leurs domaines. Mais ils devaient toujours au seigneur dont dépendait autrefois leur terre une incroyable quantité -jusqu'à 70% de leur revenu- de droits en nature ou en argent. Si la bourgeoisie enrageait, la paysannerie gémissait. Les cahiers de doléances qui devaient précéder la convocation des États Généraux allaient unanimement réclamer l'égalité devant l'impôt, l'égalité civile, l'accès aux emplois selon le mérite et non selon la naissance, l'accès de tous aux grades militaires. Tout ce qui pour nous est aujourd'hui la règle. Tout ce qui restait alors à conquérir.

    Demain les États Généraux.

    Comme tout est allé vite! L'année 1788 s'ouvre, le 4 janvier, par un réquisitoire du Parlement contre les lettres de cachet qui permettent, sans jugement et par simple décision royale, de faire arrêter les citoyens. Soutenus par l'opinion, les parlementaires vont plus loin: ils réclament la liberté individuelle comme un droit fondamental. Le 3 mai, le Parlement affirme que le vote des impôts appartient aux États Généraux. En mai et juin, le Parlement de Grenoble entre en rébellion contre l'autorité royale. Le 11 juin, des émeutes éclatent à Dijon et à Toulouse. Le 14 juin, Grenoble réclame la convocation des États Généraux. Le 19 juin, Pau s'enflamme. Le 21 juillet, à Vizille, cinquante ecclésiastiques, cent soixante cinq nobles, deux cent soixante seize membres du Tiers État réclament les Etats Généraux.

    Le 8 août, Louis XVI capitule : les États Généraux seront convoqués pour le 1° mai 1789. Le 16 août, l'État doit suspendre ses paiements. C'est la banqueroute. D'évidence, ceci explique cela. Le 26 août 1788, le Roi rappelle Necker. Le retour aux affaires de ce grand bourgeois, suisse, protestant et libéral, fait croire à un peuple enthousiaste que la France est sauvée. Au début de novembre, une société de pensée qui réunit La Fayette, Mirabeau, Sieyès, Condorcet, Talleyrand, réclame que le nombre des députés du Tiers État soit doublé par rapport à ceux de la noblesse et du clergé. Elle demande que les votes, aux États Généraux, soient comptés par tête et non par ordre. Elle revendique -voilà qui est nouveau- un gouvernement représentatif. Le 27 décembre, Necker accepte le doublement du Tiers.

    Ainsi s'achève l'année 1788. Une immense gratitude monte vers le Roi Louis XVI en qui l'on voit le restaurateur des libertés. Il n'y a pas un seul républicain en France. "Nous sommes nés pour chercher le bonheur", écrit Madame Roland. Il n'est, pour préoccuper les esprits pessimistes, que cette catastrophe climatique qui a anéanti la moisson. Les optimistes répondent que dans un an on n'en parlera plus.

    Dans un an, le 13 juillet 1789... A.D. 

  • A demain, Jeanne !

     

    Par Alban Gerard  

    Dimanche 20 mars, le Puy du Fou a accueilli l'anneau de Jeanne d'Arc. Pour Alban Gérard, en ces temps d'exacerbation du fait religieux, le retour d'un anneau sorti du passé nous confronte avec simplicité à la question de la transcendance de notre nation [Figarovox - 21.03]. « En ces temps d'exacerbation du fait religieux » cette question - à laquelle chacun apportera sa réponse - a, dans tous les cas, que l'on soit ou non croyant, une importance toute particulière.  LFAR  

    A l'anneau de Jeanne de retour sur la bonne terre de France, les cieux ont réservé un retour triomphal. Exilé depuis six siècles outre-Manche, cet anneau gravé des noms de « Jhesu Maria» , arraché de haute lutte par le Puy du Fou lors d'une vente aux enchères il y a quinze jours, fait l'objet d'une singulière cérémonie sur les terres vendéennes du célèbre parc.

    Sont-ce les couleurs vives des étendards flottant au bout des lances du cortège de chevalerie, ou les cimiers frémissant des casoars des officiers volontaires défilant aux accents de la marche médiévale de Robert Bruce ? Un souffle mystérieux est à l'œuvre. L'histoire rêvée d'une France lointaine retrouve pour quelques heures un peu de son panache !

    Car certes, les bénévoles du cortège sont costumés comme des figurants de peplum hollywoodien, certes les haut-parleurs diffusent du Brave Heart aux moments choisis pour faire vibrer notre fibre patriote ; certes la « foule » des cinq mille curieux s'apparente plus à une grande sortie de messe de province qu'à une marche pour la dignité.

    Et pourtant, nos dirigeants auraient beaucoup à apprendre de ce qui s'est passé. Les commémorations se font rares en France. Oui elles existent, mais, hors armistice, on est dans l'ordre de la mémoire communautaire, la revendication identitaire, loin de la communion nationale. La commémoration pour le retour de l'anneau de Jeanne fait figure d'exception. Pas de revendication dans le public, juste la joie de retrouver une pièce symbolique du patrimoine dont il est héritier. Comme il semble loin le temps des précautions de Chirac et Villepin en 2005 préférant annuler la commémoration d'Austerlitz plutôt que de subir les foudres de lobbies communautaires antillais aussi chétifs que revendicatifs !

    D'ailleurs, dans la foule l'émotion est réelle, et ne résulte pas seulement de la mise en scène spectaculaire. Cet anneau, comme nous le rappellent les différents intervenants*, est confisqué à Jeanne d'Arc lors du procès de Rouen par l'évêque Cauchon, afin d'empêcher tout culte voué à celle qui sera canonisée bien plus tard, en 1920, par l'Eglise catholique dans un souci de réconciliation avec l'Etat. Symbole matériel rappelant le courage de notre héroïne nationale, ou selon le terme choisi par Philippe de Villiers, unique relique de celle qui fut le plus grand trait d'union de notre histoire, entre Dieu et le peuple de France ?

    Mais la force d'une telle célébration réside bien plus encore dans l'audacieux pari de réveiller l'idée enfouie d'une France profondément spirituelle. L'anneau de Jeanne, signe d'une alliance mystique - elle aurait vu en songe Sainte Catherine en le touchant - d'un dessein divin pour la nation française ? Si chacun est libre d'interpréter l'objet comme il l'entend, le « mystère de Jeanne » ne peut être abordé sans envisager la question des racines chrétiennes de notre pays. Des racines dont on peut attester l'origine historique, mais dont l'actualité est sujette à de chatouilleux débats. Et le retour de l'anneau sorti du passé en ces temps d'exacerbation du fait religieux nous confronte avec simplicité à la question de la transcendance de notre nation. 

    Alban Gerard   

    Responsable d'activité dans un groupe de protection sociale, Alban Gérard est le fondateur des Gavroches.

    Les Gavroches convoquent l'imaginaire des Misérables pour réinventer un roman national. Ces enfants des barricades, amoureux des arts, s'engagent pour replacer le débat politique dans la rue et créer le dialogue.

    * Philippe et Nicolas de Villiers, Franck Ferrand, Jacques Trémolet de Villers  

    Remerciements à Pierre Builly qui nous a signalé cette excellente tribune.

  • Théâtre • Comédie du pouvoir

     

    par Bruno Stéphane-Chambon

     

    Nous arrivons au printemps et pour le fêter, l’association Le Parti d’en rire, qui réunit des amoureux du théâtre, nous convie à une représentation qui s’annonce jubilatoire.

    La troupe a pris ce pseudonyme en souvenir du sketch de Francis Blanche et Pierre Dac qui avait créé, dans les années 1950, Le parti d’en rire, un parti politique humoristique qui avait donné lieu à une chanson célèbre sur la musique du Boléro de Ravel. Cet hymne parodique avait été repris ensuite avec succès par les 4 Barbus.

    En compagnie d’amis et de sa fratrie, l’animateur de la troupe, Joseph Darantière, a écrit une comédie inédite qui illustre les arcanes de la politique actuelle et les tractations menées en coulisse pour de prochaines élections : Le discours du président.

    Par-delà le simple désir d’amuser, l’auteur de la pièce, après une mission humanitaire auprès de la fondation Martin de Porres, en Colombie, s’est engagé à récolter des fonds destinés à achever le développement d’une école, à Anolaima, dans le département de Cundinamarca. Les enfants démunis y reçoivent une bonne formation scolaire, adaptée à leur environnement naturel. Les fonds servent aussi à parrainer un enfant dont la famille ne peut assurer les frais de scolarité.

    On pourra donc se rencontrer de façon conviviale pour encourager ces jeunes comédiens qui choisissent l’humour corrosif et allègre plutôt que la pensée correcte et morose qui affecte la jeunesse germanopratine.

    Mise en scène de François-Xavier Joyeux, avec Anne-Laure de Reviers ; Marie Verny ; Marie-Ange Darantière ; Thérèse Darantière ; Michel Darantière ; Joseph Darantière, Victor Carpentier, Paul-Louis de Roincé, Philippe Huten, Côme de Vannoise et Hugues Lefer.

    Théâtre Le Passage Vers les Etoiles,
    17, Cité Joly Paris 11ème
    Le vendredi 8, samedi 9, mardi 12, mercredi 13 et jeudi 14 avril à 20h.
    Téléphone : 09 50 00 60 17
    passageversetoiles@free.fr
    Pour vos réservations en direct : http://lepartidenrire.com/reservations/
    Pour les contacter : denrireleparti@gmail.com
    Pour en savoir plus sur l’association : http://lepartidenrire.com/ 

     

  • Après deux ans aujourd'hui, présence de Jean-François Mattéi

    Jean-François Mattéi chez Charles Maurras parle du Chemin de Paradis
     
     
    Jean-François Mattéi nous a quittés le 24 mars 2014. Deux années ont passé.
     
    Grand philosophe, d'une culture immense mais d'une simplicité et d'une urbanité rares, Jean-François Mattéi connaissait bien Lafautearousseau, il l'appréciait, le lisait, et y écrivit volontiers.
     
    C'est le mardi 23 mai 2013 que lafautearousseau publia le premier article que lui donna Jean-François Mattéi, traitant d'un sujet qu'il connaissait bien et qui lui tenait à coeur, la théorie du genre... On pourra s'y reporter. [Le Père Goriot et la Mère Vauquer]. D'autres textes suivirent, dont un intéressant échange avec Pierre de Meuse sur le statut de l'universel. Et Jean-François Mattei est intervenu à maintes reprises dans nos cafés politiques à Marseille et Aix en Provence et en de multiples autres occasions : colloques à Paris, aux Baux de Provence, soirées du 21 janvier à Marseille, hommage à Maurras à Martigues, etc. On en trouvera de nombreuses traces dans nos vidéos. De même dans nos grands textes* qui ont publié de larges extraits [25 au total] de son important ouvrage Le regard vide - Essai sur l'épuisement de la Culture européenne.

    Le 4 février 2014, à peine plus d'un mois avant de nous quitter, Jean-François Mattei avait donné au Café actualité d'Aix en Provence, une conférence qui fut sans-doute l'une de ses dernières interventions publiques en même temps que l'une des plus brillantes où, à travers son diagnostic sur la crise des fondements de notre civilisation, se trouve remarquablement exposée sa conception de l'ordre des cités, des sociétés et de la civilisation en général. On l'écoutera avec profit et, pour ceux qui ont connu Jean-François Mattei, avec émotion.  

     

     

     

    * Grands Textes et Le regard vide, par Jean-François Mattei 

    Voir aussi l'éphéméride de ce jour

    et

    Décès de Jean-François Mattéi : par dessus tout, une perte pour la pensée française

  • Vidéo - Événement : l’arrivée de l’anneau de Jeanne d’Arc au Puy du Fou !

     

    Boulevard Voltaire était au Puy du Fou dimanche 20 mars pour assister au retour de l’anneau de Jeanne d’Arc en France…

    Regardez ce reportage extraordinaire et écoutez l’émotion des Français qui témoignent de leur amour pour sainte Jeanne !

     

     10 minutes

    Merci à Boulevard Voltaire de notre part, nous qui célèbrerons Jeanne d'Arc, le dimanche 8 mai prochain et qui n'oublions pas que la Fête Nationale de Jeanne d'Arc fut instituée [10 juillet 1920) gâce aux campagnes de l'Action française et des Camelots du Roi. Remerciements surtout et gratitude envers Philippe de Villiers et le Puy du Fou. 

    Boulevard Voltaire