Entretien • Frédéric Rouvillois : « Le débat public est forcément une impasse et, au fond, une duperie »
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Entretien avec Frédéric Rouvillois, professeur de droit public et délégué général de la Fondation du Pont-Neuf.
Grand Débat National, possibilité de référendum… Les consultations populaires sont-elles un succès, en France, depuis les États généraux convoqués par Louis XVI ?
La question est double : comment donner la parole au peuple, qui a le sentiment de ne plus l’avoir, et peut-on comparer ce Grand Débat National avec les états-généraux qui se mirent en place à partir du XIVe siècle et se pratiquèrent jusqu’à la Révolution ? La différence fondamentale entre les deux consultations, c’est que dans le cadre des états-généraux chaque ordre, dont le Tiers État, élisait ou désignait des représentants pourvus d’un mandat impératif (les représentants devaient dire ceci ou cela) consigné dans les cahiers de doléances. Les gens qui venaient parler, débattre, choisir des solutions, étaient donc connus, et l’on savait au nom de qui ils parlaient. Dans ce Grand Débat d’aujourd’hui, on ne sait jamais qui parle, de quoi on parle, au nom de qui, si on représente quelqu’un, ou soi-même, ou un lobby quelconque… Cela ressemble en revanche à quelque chose qui fut imaginé sous la Révolution française par l’un de ses pires représentants, celui que l’on surnomma le « mouton enragé », le marquis de Condorcet. En 1792, au lendemain de l’instauration de la république, celui-ci est chargé par ses amis girondins d’élaborer la nouvelle constitution. En scientifique obsédé par la mathématique sociale, il va intégrer dans le projet un dispositif qui ressemble à “notre” Grand Débat à nous, avec tous ses défauts : un système d’initiative législative dans lequel une personne propose une loi à l’assemblée locale dont il est membre, laquelle en débat et, le cas échéant, décide de pousser cette question qui devient alors le sujet de toutes les assemblées locales du département qui, à leur tour, etc. Cela remonte en quelques mois jusqu’au sommet, avec à l’arrivée un objet juridique non-identifiable, la somme pharamineuse des débats et des réponses suscités par la question initiale, qu’il s’agira alors de débrouiller en lui donnant une forme juridique claire. Les ennemis des Girondins expliqueront non sans raison que c’est une idée aberrante : pour établir une seule loi, dit Marat, des millions de personnes auront été tenues sur le qui-vive pendant des mois, éléphant monstrueux accouchant dans la douleur d’une souris dérisoire à la viabilité très incertaine. Selon Marat, qui ne fait pas dans la dentelle, les promoteurs d’une telle méthode mériteraient l’asile ; Condorcet, au Monopoly de la Révolution, ne passera pas par la case prison, ou asile, mais ira directement à la mort, un an et demi plus tard.
Quelques cinquante ans après, un aristocrate allemand, mathématicien lui aussi, Rittinghausen (Photo), imagine un système encore plus farfelu, et encore plus proche du Grand Débat macronien : le peuple est divisé en sections de mille personnes, chaque section s’assemble dans son propre local, nomme son président, débat sur un principe soumis à sa sagacité. La discussion close, le maire de la commune fait le relevé des votes, le communique à l’administration supérieure, etc. L’ensemble des milliers de procès-verbaux remonte peu à peu jusqu’à un Ministère élu par le peuple, dont les services se chargeront d’élaborer une synthèse : « la loi sortira d’une manière organique des discussions mêmes », assure Rittinghausen, d’une manière parfaitement claire et acceptée par tous – puisque toute la population aura le sentiment d’être le véritable auteur de cette loi.
Dans ces deux cas, deux personnalités imaginent des systèmes qui, à chaque fois, conduisent manifestement dans le mur, et pour les mêmes raisons : ils font confiance à la sagesse des individus, à la bonne foi des gouvernants – comme nous en ce moment… – et aux mathématiques, bien sûr, comme nous le faisons avec les algorithmes pour ce qui va sortir du Grand Débat. Mais au fond, comme à l’époque, l’organisation de ce dernier pose la question de ce qu’il recouvre : de la naïveté, comme dans le cas de Condorcet ? De la folie, comme le prétend Louis Blanc à propos de Rittinghausen ? Ou plus simplement de la duplicité, le Grand Débat comme moyen rêvé d’étouffer la parole du peuple par le déchaînement de cette parole ? Des millions d’opinions plus ou moins divergentes sur des sujets plus ou moins variables finissent par s’écraser les unes les autres, ce qui démontrera en définitive que seuls les experts sont capables de dire quelque chose de sensé et que le peuple doit revenir sagement chez lui, remiser ses gilets jaunes et faire confiance aux dirigeants éclairés qu’il a élus – selon l’idée aussi vieille que Montesquieu que le peuple est incapable de se gouverner mais qu’il sait parfaitement désigner les représentants qui gouverneront à sa place.
Macron lance une consultation qui n’a aucune valeur légale, purement consultative. Est-ce une manœuvre de tribun de la plèbe ou de César ?
Chez Macron, le tribun de la plèbe et le César sont les deux faces du même personnage fabriqué, du même Janus artificiel. On est au fond dans la perspective populiste d’un césarisme démocratique : à beaucoup d’égards, Macron est en effet un populiste sans le savoir, ou en le sachant mais ne l’avouant pas, ou juste un peu. Ce terme de jupitérien qu’il a inventé en 2016, n’étant alors pas même candidat, désigne à la fois celui qui incarne le peuple et celui devant lequel le peuple doit se prosterner. Quant au Grand Débat, c’est en définitive le populisme sans les ennuis. César pose des questions au peuple, il le fait parler, mais n’est pas tenu de l’écouter, mais surtout de lui obéir. C’est tout bénéfice, du point de vue politique comme de celui de la communication.
Le Grand Débat fait le pari que quiconque peut intervenir, y compris sur une plateforme numérique. L’immense masse des contributions, qui se comptent déjà en centaines de milliers, fait apparaître que des associations, ou des groupes de pression, ont mobilisé leurs militants : est-ce odieux ou légitime ?
Ni l’un ni l’autre, c’est juste inévitable. Interdire aux lobbys d’intervenir dans le Grand Débat National reviendrait à interdire aux partis d’intervenir dans une quelconque élection.
Le CESE, qui avait lancé sa propre consultation, avait expliqué, après avoir constaté que l’abrogation de la loi Taubira venait en tête des propositions, qu’il tiendrait compte (mystérieuse formulation) d’une évidente action militante.
En un sens, on peut en effet considérer comme anti-démocratique que des groupes, des coagulations de personnes qui défendent certaines idées ou certains intérêts particuliers (d’où le terme de parti, du reste) puissent intervenir dans le processus de décision populaire : pour Rousseau, c’est parce qu’elle procède directement des décisions que chaque individu aura pris librement, sans aucune interférence extérieure, seul face à sa propre conscience, que la volonté générale est forcément juste et bonne, c’est pour cela qu’elle ne peut « errer ». En revanche, soulignent Rousseau et ses successeurs jacobins, dès qu’il y a des partis, dès lors que l’on crée au sein du peuple des groupes spécifiques qui vont empêcher chaque individu de s’exprimer en son âme et conscience, le jeu est faussé, le processus d’accouchement de la volonté générale est bloqué, bref, on n’est plus en démocratie. Mais si on allait dans ce sens, qui est celui que semblent reprendre le CESE et tous ceux qui reprochent aux conservateurs d’agir de concert, alors on devrait en déduire que tout parti politique est incompatible avec la démocratie – ce qui paraît d’autant plus insoutenable que la démocratie, d’un autre côté, ne peut pas se passer des partis.
De son côté, le gouvernement a décidé de garder le maximum de contrôle, juge Dimitri Courant, doctorant en science politique à l’université Paris 8 et à l’université de Lausanne, et spécialiste de la démocratie délibérative. Il a volontairement créé une masse de données sans critères de hiérarchisation, et donc quasi-impossibles à traiter autrement que par l’intelligence artificielle et des algorithmes ou bien par un effectif élevé de personnes mobilisées à plein temps. Pour le citoyen lambda, il est impossible de voter, de commenter ou de mesurer le poids d’une contribution. C’est dommageable, notamment pour la crédibilité du débat.
Pourquoi ajouter un référendum au Grand Débat National, pourvoyeur d’idées superflues pour un dirigeant qui a dit qu’il ne changerait pas de cap ? À quoi sert cette part de démocratie directe, plus contraignante ?
Ce référendum, qui n’est pas un référendum d’initiative populaire, sera strictement encadré, et les questions qui seront posées sont en réalité celles sur lesquelles on pense que le peuple donnera une réponse favorable, a fortiori si c’est un questionnaire à plusieurs questions. Sur un plan institutionnel, la possibilité pour le peuple de s’exprimer directement, de ne plus être ce « souverain captif » qu’évoquait André Tardieu durant l’entre-deux-guerres, revient souvent dans les revendications des Gilets jaunes, et Macron n’a rien à y perdre. Les Gilets jaunes auront l’impression de s’exprimer tandis que les technocrates auront ficelé le référendum de sorte qu’il n’y ait aucune mauvaise surprise à l’arrivée. Et ceci permettra de laisser de côté les véritables outils de la démocratie directe, comme le référendum d’initiative populaire ou, pire encore (mais encore plus démocratique) le référendum révocatoire, qui permet aux électeurs de mettre fin avant terme au mandat d’un de leurs élus, une perspective qui, comme on l’imagine, fait se dresser les cheveux sur la tête à la totalité de la classe politique.
On comprend qu’aucun politique français ne propose cette évolution. En revanche, Macron remet en cause le nombre de sénateurs, par exemple, et tout ce qui touche, en fait, l’organisation de la vie politique autour des partis. Un antiparlementarisme sous-jacent se ferait-il jour ?
Je dirais qu’il y a chez Macron un antiparlementarisme à peine inavoué, comme le montre de manière frappante son projet de révision constitutionnelle du 9 mai 2018, qui représente sur ce point une volte-face spectaculaire par rapport au mouvement de réhabilitation du parlement qui avait été initié par Chirac à partir de 1995. Au lieu de restaurer le corps législatif, on fait marche arrière, notamment sur le droit d’amendement, réduit à la portion congrue. Ensuite, que Macron ait ou non des « convictions » antiparlementaires, peu importe : il sait qu’un antiparlementarisme de bon aloi est assez largement partagé par les Français, qui ne voient plus très bien à quoi servent leurs députés et leurs sénateurs, mais qui en revanche savent parfaitement qu’ils leur coûtent cher. Macron joue donc sur du velours quand il propose de réduire le nombre des parlementaires, et donc de réduire la facture. Sur ce genre de questions, il sait sans risque d’erreur que les Français répondront « Oui », qu’ils soient ou non Gilets jaunes.
Les dirigeants français ont tendance à considérer que le référendum est un plébiscite et, en conséquence, utilisent peu cet outil.
La distinction entre référendum et plébiscite est très contestable. Tout référendum est forcément un plébiscite, sauf quand c’est un référendum automatique ou d’initiative populaire, puisqu’alors c’est le peuple qui se pose la question à lui-même. En revanche, dès lors que la question est posée par quelqu’un, on comprend qu’il n’y a pas vraiment de différence entre référendum et plébiscite : on répondra toujours à la question en fonction de celui qui la pose. Maintenant, ce qu’il faut noter, c’est que la dimension tragique du référendum introduite par De Gaulle en rapport avec la notion de responsabilité politique – autrement dit, je pars si les Français ne répondent pas par « un oui franc et massif » –, cette dimension, donc, qui donne un caractère révocatoire au référendum, a été complètement évacuée par tous ses successeurs. Chirac, lors des référendums de 2000 sur le quinquennat et de 2005 sur la constitution européenne, va jusqu’à préciser à l’avance qu’il restera en place quels que soient les résultats, déclarant que ces derniers ne peuvent avoir aucune incidence sur sa situation. En somme, si le référendum a été écarté par les dirigeants, ce n’est pas en raison de son côté « mise à mort », qu’ils ont écarté depuis belle lurette, mais parce que les élus de la république ont toujours eu une sainte horreur du référendum, qui contredit leur sentiment bien ancré que c’est à eux de décider : à eux, et pas au peuple ! On le voit bien en matière de démocratie locale où, depuis 2003, le référendum local aurait dû être utilisé de manière massive, alors qu’il ne l’a quasiment jamais été : le peuple, pensent spontanément les élus, n’a pas à usurper un pouvoir qu’il leur a légitimement délégué. Vous vous souvenez de la formule des cours de récréation : donner, c’est donner, reprendre, c’est voler.
Dans le cadre d’une démocratie contemporaine où l’on a de plus en plus la faculté de consulter réellement tout le peuple, la forme de ce Grand Débat a-t-elle quelques mérites ?
Non, car le vrai problème, c’est le fait de choisir, de décider. Autant une question posée par référendum permet de savoir qui est d’accord et qui ne l’est pas, autant un débat ne produit que de l’indécision : on ne peut synthétiser juridiquement le débat, pas plus que, selon Rousseau, on ne peut représenter la volonté. Un débat peut et même doit avoir lieu avant de répondre à la question, mais lui-même, en tant que tel, n’est pas susceptible d’être pris en compte. En clair, le débat public, quel qu’il soit, est forcément une impasse et, au fond, une duperie (on l’a vu avec celui qui vient d’être organisé sur la bioéthique). Ceux qui l’organisent savent ce qu’ils veulent obtenir, et le débat n’est là que pour donner au bon peuple l’impression qu’il n’est pas laissé pour compte, une fois de plus. ■
Le fascisme est spécifiquement un phénomène et un système politiques italiens de la 1ère moitié du XXème siècle. Rien d'autre. On a pris la sotte habitude de l'employer à tort et à travers pour désigner un adversaire quelconque - n'importe lequel - à gauche et parfois aussi à droite. Ce ne sont que des formules de propagande simpliste sans valeur ni rigueur intellectuelle ou politique. Et ça ne fait qu'ajouter à la confusion des idées et des esprits dans le débat public. Trivialement exprimé, c'est du n'importe quoi infantile.

Telle est pourtant, de fondation, la démocratie française. Nous ne disons pas : toute démocratie. Nous disons : la démocratie française. Macron nous rabâche sur tous les tons - ton du prêcheur doucereux, voix de velours et regard langoureux de séducteur charismatique ou ton exalté du prédicateur évangélique, gestes saccadés et voix criarde. - qu'il ne veut pas d'une « démocratie de l'émeute ». Mais la démocratie française justement est née de l'émeute et du sang. Faut-il rappeler au Chef de l'État quelles sont les origines historiques de la démocratie française ? Nous serions bien étonnés qu'il puisse nous démontrer qu'elle n'est pas née de l'émeute, violente, sanglante, génocidaire. De l'émeute, de la Terreur et de la guerre. Inutile d'en dresser le détail ni d'en brosser le tableau, n'est-ce pas ? (Photo, Les noyades de Nantes).


L'antisémitisme français traditionnel peut encore survivre à l'état individuel ; il n'est plus un phénomène politique depuis 1945. C'est la Seine-Saint-Denis islamisée que les Juifs quittent en masse, pas le XVIe arrondissement de Paris. L'antijudaïsme catholique a été démantelé par Vatican II. En revanche, des dizaines d'églises sont, depuis des mois, profanées, saccagées, voire brûlées. On aimerait que la police découvre les coupables…
Quant aux « gilets jaunes », ils ont payé très cher leur désorganisation. Ils ont été noyautés, puis submergés par des forces militantes mieux organisées et plus déterminées. Le gouvernement est trop content de leur mettre sur le dos les violences des black blocs et, désormais, l'antisémitisme vociférant des salafistes et des islamo-gauchistes. De son côté, la France insoumise tangue, à l'instar de son chef Jean-Luc Mélenchon, entre vieux réflexes de patriotisme républicain et nouvelles tentations islamo-gauchistes. Le paysage politique est complètement nouveau et terrifiant: c'est pour cette raison que la gauche préfère évoquer entre soi le bon vieux temps.

Marlène Schiappa, secrétaire d’État à l’Égalité entre les femmes et les hommes et à la lutte contre les discriminations (ou, plus familièrement, SEEEFHLCD), et Mounir Mahjoubi, SEMEFMACPCN, justes et justiciers s’il en fut, réclament surtout le concours actif des citoyens pour faire régner la vertu : justice par tous ! Mounir a planifié dans son canevas que « toutes les plateformes ou sites mettant à disposition des espaces de discussion ou de partage de contenu proposent des outils de signalement facilement identifiables et mobilisables en quelques secondes par un utilisateur », le ministère se proposant de tester l’ergonomie des outils de signalement. En 2019, Anastasie est fonctionnaire et ses ciseaux, certifiés par l’Afnor, sont en acier équitable.
Soyez vigilants, repoussez toujours plus loin les bornes de la vertu indignée et de l’amour blessé. Vous n’arrivez pas à faire condamner tous les antisémites ? Criminalisez l’antisionisme. La manœuvre paraît quand même un peu compliquée car cela ferait un délit d’opinion de plus (« L’antisionisme […] c’est autre chose [que l’antisémitisme] puisqu’il s’agit d’un positionnement politique consistant à critiquer la politique d’Israël », comme dit Laurent Nuñez) ? (photo ci-dessous)
Laissez tomber l’antisionisme mais redéfinissez l’antisémitisme. Les députés du groupe d’étude sur l’antisémitisme soumettront donc à l’Assemblée nationale une résolution, à la portée non contraignante, déjà proclamée par Macron, (un peu comme Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières), qui proposera une nouvelle définition de l’antisémitisme intégrant une forme d’antisionisme. « Il s’agit de faire avancer la reconnaissance de ce qu’est l’antisémitisme au XXIe siècle », explique Sylvain Maillard, député LREM et président du groupe.

Quoiqu’il en soit, c’est d’une Algérie ruinée et divisée dont vont hériter ceux qui auront la très lourde tâche de tenter d’éviter le naufrage d’un pays fracturé entre arabisme et berbérisme avec, en arrière-plan, les islamistes en embuscade. Comment pourront-ils redresser un pays frappé au cœur par l’épuisement de ses réserves pétrolières quand 60% des recettes budgétaires et 95% des recettes en devises dépendent des hydrocarbures ? Selon l’Office national des statistiques en date du 12 janvier 2019, durant le 3° trimestre 2018, la branche des hydrocarbures dans son ensemble a baissé de 7,8%, la production de pétrole brut et de gaz naturel a décliné de 3% et le raffinage de pétrole brut de 12%.



L’élimination pure et simple de M. Clain est pourtant un exemple de ce qu’est la meilleure des solutions. Il suffit, pour s’en convaincre, de voir quels problèmes pose le sort des huit cents « ressortissants européens » prisonniers de la coalition en Syrie. Que faire de ces huit cents personnes ? La question embarrasse, peu ou prou, tous les pays concerné
Du coup, la presse française croit pouvoir souligner l’inconséquence de ce dernier qui, outre des frappes ciblées pleinement assumées, refuse le retour aux Etats-Unis de Mme Muthana (photo), vraie Yéménite mais Américaine suspecte, celle-là même qui, sous le pseudonyme d’Oum Jihad (Allah la bénisse) appelait « à faire couler le sang américain » et se félicitait des attentats de Paris. M. Trump prouve plutôt ainsi que la sécurité de son pays lui importe au premier chef et dénonce en creux l’inconsistance politique de ses détracteurs. Il est d'ailleurs, pragmatisme anglo-saxon oblige, imité par nos voisins britanniques : pour
l’empêcher de revenir de Syrie, Londres veut déchoir de sa nationalité Mme Begum, (photo) d’origine bangladaise, fervente admiratrice des décapitations d’infidèles (Allah soit béni) - « pratique autorisée par l’Islam » argumente-t-elle, ce qui devrait retenir l’attention de nos partisans du droit (qu’Allah les éclaire). Certains prétendent voir une Antigone dans chacune de ces deux jeunes femmes ; il est à souhaiter qu’elles
subiront son châtiment et que, pour le bien de la Cité, Créon aura le dernier mot. Dans les deux cas, malheureusement, des arguties juridiques sont brandis par les tenants de l’Etat de droit, qui obtiendront peut-être gain de cause mais démontreront ainsi que le respect aveugle du « droit » est contraire au sens commun le plus élémentaire.
Dans cette perspective, on salue les propos, somme toute modérés, de Mme Arnautu (photo), député(e) RN au Parlement européen de Strasbourg, ce 12 février : « Déchoyons [sic]

Cette affaire, qui n’est pas exactement une affaire d’Etat mais plutôt d’état d’esprit, mérite-t-elle toute l’attention que lui consacrent les médias ? Je n’en suis pas sûr, et je préférerais largement entendre évoquer les vrais débats sur la mondialisation, la place de la France dans le monde, les questions environnementales et sociales, plutôt que les ragots de cour et les rumeurs infâmes qui salissent, sans profit pour la France, la famille présidentielle. L’image de la magistrature suprême de l’Etat en sort abîmée et celle de la France avec elle, et c’est l’un des grands scandales que l’on doit à la République !
Avouons que, dans l’affaire actuelle, nous voilà bien ennuyé de constater que la sauvegarde d’un système oligarchique, sous les ors du palais de Madame de Pompadour, a prévalu sur l’intérêt de l’Etat : les féodaux, au sens médiéval du terme, tiennent l’Etat, et Jupiter, que je crois inspiré autant par Machiavel que par Mazarin, n’arrive pas totalement à s’élever à la hauteur du souverain qu’il aimerait, sans doute, être. Est-ce sa simple faute ou celle d’un système qui a tendance, essentiellement, à « neutraliser » tout ce qui pourrait le fragiliser ? C’est là que l’on mesure la justesse du propos d’Emmanuel Macron dans l’été 2015 quand il évoquait les faiblesses de l’Etat depuis la Révolution : «

Dernières séquences, donc. Alors que l'une des religieuses - la plus fragile, la plus jeune, la plus angoissée - Blanche de La Force (Pascale Audret) est tombée dans le piège des révolutionnaires, a fait défection, s'est soustraite à l'exécution, alors que ses compagnes, appelées l'une après l'autre à la guillotine, y montent en chantant le Veni Creator et que leur chant s'estompe à mesure qu'elles sont l'une après l'autre coupées en deux, lorsque, la dernière Carmélite assassinée, le silence se fait, monte d'un coin de la foule hystérique et assoiffée de sang le même chant, la même pureté, de Blanche qui rejoint ses sœurs et monte à l'échafaud les rejoindre au Paradis...
Dans mes souvenirs, c'était un beau film grave et austère, poignant aussi - mais le sujet l'est tout autant - pas du tout un film à regarder distraitement, un film qui demande un certain état d'esprit, une certaine attention... Un peu comme le lumineux Thérèse d'Alain Cavalier, athée qui a perçu mieux que quiconque le mystère du cloître et de la sainteté... J'avais eu beau lire et relire les beaux dialogues écrits par Georges Bernanos en 1948, juste avant sa mort, sur la base de La dernière à l'échafaud, nouvelle écrite en 1931 par l'écrivain allemand Gertrud von Le Fort descendante d'immigrés français réformés mais convertie au catholicisme, je ne me souvenais plus que le film avait une telle intensité.
Film grave sur des sujets graves, disais-je en introduction : des tas de mystères, la vocation, la clôture, la Foi, le courage, la peur de la mort. Il n'y a pas un moment, dans le film, où on frôle la bassesse ou l'ordinaire, la trivialité des choses ; on est continuellement tiré vers des domaines rares. Comment peut-il se faire que des jeunes filles veuillent épouser le Christ ? Et c'est la première séquence : à Compiègne, au mois de mai 1789, Blanche de La Force (Pascale Audret) et Marie-Geneviève Meunier (Anne Doat), vêtues en mariées deviennent Blanche de l'Agonie du Christ et Constance de Saint Denis martyre, entrent, pour la totalité de leur vie derrière les grilles qui les retirent à jamais du monde et jurent obéissance et soumission complètes à la Prieure de leur Ordre (Madeleine Renaud). Vous ne comprenez pas ? Moi non plus. Et alors ?
Toujours est-il qu'au fur et à mesure que la Révolution spolie, humilie, disperse les religieuses, celles-ci cristallisent leur résistance à l'injure et à la haine. Les carmélites, guidées par leur aumônier (Georges Wilson) ne voient plus devant elles que la perspective du martyre.