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LAFAUTEAROUSSEAU - Page 1271

  • Culture • Loisirs • Traditions

  • Rire ou sourire un peu ... même s'il n'y a pas vraiment de quoi

     

    Le dessin d'Ixène : « Opération ‘' en même temps ' '» [Le Figaro]

  • Lecture & Voyage • Sur les chemins de chez nous

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

    Publié le 19.12.2016 - Actualisé le 23.07.2017

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    Peu importe qui il est. Désireux d’accomplir la promesse qu’il s’était faite sur son lit d’hôpital (« si je m’en sors, je traverse la France à pied »), un jour, il s’est mis en marche. Pas façon Macron, façon chemineau, comme un personnage de Giono. A pied donc, de Tende à La Hague, une belle diagonale du Mercantour au Cotentin, du 24 août au 8 novembre 2015, en empruntant au maximum les chemins les plus improbables, les plus délaissés, les plus retirés de la vraie France profonde. En est résulté un petit livre qui, en contrepoint du récit de cette pérégrination, propose une véritable réflexion sur la France d’aujourd’hui.

     

    Fuyant le « clignotement des villes » et méprisant les « sommations de l’époque » (en anglais, comme il se doit à l’ère de la globalisation : « Enjoy ! Take care ! Be safe ! Be connected ! »), le voyageur met en pratique une stratégie de « l’évitement ». Eviter quoi ? Ce qu’il appelle « le dispositif ». D’abord visible à l’œil nu : c’est la France des agglomérations telle que l’ont voulue les « équarrisseurs du vieil espace français », ZAC et ZUP des années soixante ayant enfanté les interminables zones pavillonnaires et les hideuses zones commerciales. Laideur partout.

     

    XVM344ffd0c-80af-11e6-8335-81b4993a1518-805x453.jpgCe réquisitoire implacable contre le saccage du territoire rejoint la dénonciation de la mondialisation, cette « foire mondiale » qui ruine un terroir « cultivé pendant deux mille ans ». Aux « temps immobiles » a succédé un « âge du flux » dont le « catéchisme » (« diversité », « échange », « communication ») est véhiculé par l’arrivée d’internet et la connexion généralisée. Temps immobiles : une nuit passée au monastère de Ganagobie (« Les hommes en noir […] tenaient bon dans le cours du fleuve. En bas, dans la vallée, les modernes trépidaient ») ; ou la vision du Mont-Saint-Michel (« C’était le mont des quatre éléments. A l’eau, à l’air et à la terre s’ajoutait le feu de ceux qui avaient la foi »).

     

    Faisant sienne la vision de Braudel selon laquelle la France procède d’un « extravagant morcellement » humain et paysager, l’auteur dénonce ensuite le « droit d’inventaire » que s’arrogent  « les gouvernants contemporains », notamment « les admirateurs de Robespierre » qui,  favorables à « une extension radicale de la laïcité », veulent « la disparition des crèches de Noël dans les espaces publics » (et pourquoi pas des milliers de calvaires ?) pour les remplacer par … rien du tout, le néant, la mort.

     

    Ce n’est certes pas un livre de propagande, ni un bréviaire idéologique mais bien l’œuvre d’un loup solitaire. Un livre qui peut sembler défaitiste, voire nihiliste (« je me fous de l’avenir »), au mieux nostalgique. Voir dans l’auteur un énième avatar du « bon sauvage » serait pourtant bien réducteur. On l’imagine mieux prêt à « chouanner » (selon le mot de Barbey qu’il rapporte lui-même). C’est sans doute là sa véritable portée : « Sur les Chemins noirs » de Sylvain Tesson est l’œuvre d’un antimoderne de bonne race qui nous aide à retrouver le chemin de chez nous. 

     

    Sur les chemins noirs. Sylvain Tesson, Gallimard, 144 p., 15 €

  • Idées & Société • Alain de Benoist : Bataille des idées ? La gauche a perdu, mais la droite n’a pas gagné !

    Manuel Valls déclare que « la gauche a perdu la bataille des idées ».  

     

    Par Alain de Benoist

    Cet entretien donné à Boulevard Voltaire [22.07] dit avec justesse, lucidité et pertinence ce qu'il faut savoir de la situation des idées en France, à l'heure actuelle. Nous partageons cette analyse qui met en lumière a contrario le travail restant à accomplir pour qu'il y ait vraiment bataille des idées et qu'elle conduise à une réelle rupture avec la doxa dominante à droite comme à gauche. La première Action française nommait cela contre-encyclopédie. Peut-être devrions-nous parler aujourd'hui d'une anti-doxaLFAR   

     

    3650118671.7.pngManuel Valls déclare que « la gauche a perdu la bataille des idées ». C’est une bonne nouvelle ?

    Quelle bataille ? Il est vrai que la gauche n’a plus rien à dire, mais la bataille des idées dont parle Manuel Valls n’a jamais eu lieu. Non parce que cette gauche devenue muette reste largement hégémonique dans les médias, et qu’elle n’apprécie pas qu’on cherche à la contredire, mais parce que la droite n’avait ni le désir, ni la volonté, ni les moyens de participer à une bataille de ce genre. La droite n’avait tout simplement rien à dire – ou peu s’en faut. Le domaine des idées n’obéit pas au principe des vases communicants. Vous avez vous-même cité François Huguenin : « La droite a refusé le combat des idées car elle n’en a plus. » C’est ce que Pierre-André Taguieff remarquait lui aussi récemment : « La gauche a perdu la bataille des idées, mais la droite ne l’a pas gagnée. »

    On pourrait, ici, faire un parallèle avec la fin du système soviétique. L’URSS ne s’est pas écroulée sous les coups de boutoir du « monde libre » mais sous l’effet de ses propres contradictions internes. Si la gauche n’a plus rien à dire, si elle a perdu son identité en désertant le combat culturel, ce n’est pas que la droite a réfuté ses idées, c’est que ses idées ont épuisé le cycle de leurs virtualités possibles, et surtout qu’elle a délibérément abandonné le socle idéologique qui faisait sa force, et nourrissait son imaginaire, en se ralliant plus ou moins honteusement au libéralisme économique et au système du marché.

    Depuis la Manif pour tous, il y a quand même une indéniable effervescence intellectuelle à droite. Épiphénomène ou lame de fond ?

    Il y a, en effet, quelques ébranlements ici ou là, mais on est loin du compte. Où sont les Taine, les Tocqueville et les Renan du XXIe siècle ? La droite n’aime déjà pas beaucoup les intellectuels, ces coupeurs de cheveux en quatre qui ont la faiblesse de croire que les révolutions culturelles ont des conséquences plus durables que les révolutions politiques. Les partis politiques, eux, pensent que les idées divisent et qu’entretenir le flou est la meilleure manière de rassembler. La droite d’aujourd’hui est idéologiquement déstructurée. Dans le passé, elle s’est laissée gagner par les idées de ses adversaires sans les reconnaître pour ce qu’elles étaient. Elle n’a jamais conçu de stratégie culturelle, car elle ne sait même pas ce que cela veut dire. Elle a cru qu’elle deviendrait « respectable » en multipliant les concessions. Elle cède aujourd’hui plus que jamais aux modes idéologiques qui ont historiquement affaibli toutes ses défenses immunitaires, à commencer par l’universalisme philosophique, l’idéologie des droits de l’homme et l’idéologie du progrès. 

    La recomposition politique à laquelle on assiste actuellement annonce-t-elle aussi une recomposition idéologique ?

    Ce serait une excellente nouvelle, à condition qu’on puisse y croire, mais je doute que la scène politique soit propice à une refondation idéologique. Par nature, elle entretient plutôt la confusion. Il paraîtra sans doute excessif à beaucoup de dire que, lorsqu’on a telle ou telle position politique, on doit savoir aussi comment interpréter les plus récents acquis de la physique théorique ou de la biologique moléculaire. Et pourtant, il n’y a pas de conception du monde qui n’englobe pas tous les domaines de connaissance et de pensée. Mais sans aller si loin, on pourrait au moins exiger qu’en matière anthropologique, on ait un minimum de cohérence. Quelle idée se fait-on de l’homme ? Une idée philosophiquement classique ou une idée idéologiquement moderne ? Celle d’un être politique et social par nature ou celle d’un individu porteur de droits qui ne serait sur terre que pour maximiser son meilleur intérêt ? La société s’explique-t-elle par la sociabilité naturelle de notre espèce ou n’est-elle qu’un agrégat d’atomes individuels régi par le contrat juridique et l’échange marchand ?

    L’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, qui symbolise la réunification du libéralisme sociétal de gauche et du libéralisme économique de droite, pourrait en principe favoriser une clarification en faisant comprendre une fois pour toutes que le libéralisme est intrinsèquement « progressiste » et non pas conservateur, pour reprendre un mot qui revient à la mode. C’est ce qu’explique très bien Guillaume Bernard : « La combinaison du libéralisme et du conservatisme peut, de prime abord, apparaître séduisante : le libéralisme pour l’économie, le conservatisme pour la société. Mais c’est méconnaître la doctrine libérale, qui s’appuie sur l’individualisme et le subjectivisme. C’est en soi et par soi que chacun détermine son bien. Il n’existe pas de valeur objective, mais uniquement des consensus issus de la rencontre de volontés. Le libéralisme porte en lui la destruction des traditions sociales, alors qu’il n’est nullement nécessaire de s’y adonner pour combattre la spoliation fiscale des familles et des entreprises. » C’est ce qu’il faudrait comprendre si l’on veut gagner la « bataille des idées ». Les Républicains, eux, se veulent les représentants « de la droite et du centre ». Encore un oxymore ! 

    Intellectuel, philosophe et politologue

     
     
    Entretien réalisé par Nicolas Gauthier
  • Histoire • 1803: Bonaparte, demande aux Princes de la Maison de France de renoncer à leurs droits dynastiques

     

    Par Matthias Beaufort*

    Le 26 Février 1803, alors que le comte de Provence, chef de la Maison de France, était en exil en Pologne à Varsovie, un message venu au nom de Bonaparte, Premier Consul, vint demander au chef de la Maison de France et aux Princes de son sang de renoncer à leurs droits dynastiques au Trône de France.

    En échange de cette renonciation, Bonaparte promettait une rente à vie à l’ensemble des Princes. Cette tentative est comparable à celle menée cinq années plus tard en Espagne lorsque Ferdinand VII abdiqua le Trône en faveur de Napoléon Ier qui le donna à son frère Joseph.

    La réponse du comte de Provence (datée du 28 Février) fut d’une clarté absolue :

    Je ne confonds pas M. Bonaparte avec ceux qui l’ont précédé ; j’estime sa valeur, ses talents militaires ; je lui sais gré de plusieurs actes d’administrations ; car le bien que l’on fait à mon peuple me sera toujours cher ; mais il se trompe, s’il croit m’engager à transiger sur mes droits : loin de là, il les établirait lui-même s’ils pouvaient être litigieux, par la démarche qu’il fait en ce moment.

    J’ignore quels sont les desseins de Dieu sur ma race et sur moi : mais je connais les obligations qu’il m’a imposées par le rang où il lui a plu de me faire naître ; chrétien, je remplirai ces obligations jusqu’à mon dernier soupir ; fils de Saint Louis, je saurai, à son exemple, me respecter jusque dans les fers ; successeur de François Ier, je veux du moins pouvoir dire comme lui : Nous avons tout perdu fors l’honneur.

    Et plus bas de cette réponse est rajoutée la phrase : Avec la permission de mon oncle, j’adhère de cœur et d’âme, au contenu de cette note. Signé : Louis-Antoine d’Artois, duc d’Angoulême.

    Après avoir été éconduit par le chef de la Maison de France, ce dernier informa de cette visite incongrue son frère le comte d’Artois (futur Charles X) qui était chargé d’en faire part au Princes de la Maison de France. Le 22 Avril 1803, tous réunis (à l’exception duc d’Enghien, et du prince de Conti qui n’ont pu rejoindre le groupe) autour du comte d’Artois, les Princes de la Maison de France signèrent la déclaration suivante :

    Nous Princes, soussignés, frère, neveu, cousins de S. M. Louis XVIII, roi de France et de Navarre, pénétrés des mêmes sentiments dont notre Souverain Seigneur et Roi se montre si dignement animé dans sa réponse à la proposition qui lui a été faite de renoncer au trône de France, et d’exiger de tous les Princes de sa maison une renonciation à leurs droits imprescriptibles de succession à ce même trône, déclarons :

    Que notre attachement à nos devoirs et à notre honneur, ne peuvent jamais nous permettre de transiger sur nos droits ; nous adhérons de cœur et d’âme à la réponse de notre Roi.

    Qu’à son exemple, nous ne nous prêterons jamais à la moindre démarche qui puisse nous faire manquer à ce que nous nous devons à nous-mêmes, à nos ancêtres, à nos descendants.

    Déclarons enfin, que positivement certains que la grande majorité des Français partage intérieurement tous les sentiments qui nous animent, c’est en leurs noms comme au nôtre, que nous renouvelons devant Dieu, sur notre épée et entre les mains de notre Roi, le serment sacré de vivre fidèles à l’honneur et à notre légitime Souverain.

    Wanstead-House, le 23 Avril 1803.

    Signé :

    • Charles-Philippe de France, comte d’Artois.
    • Charles-Ferdinand d’Artois, duc de Berry.
    • Louis-Philippe d’Orléans, duc d’Orléans.
    • Antoine-Philippe d’Orléans, duc de Montpensier.
    • Louis-Charles d’Orléans, comte de Beaujolais.
    • Louis-Joseph de Bourbon, prince de Condé.
    • Louis-Henri-Joseph de Bourbon-Condé, duc de Bourbon.

    Le 22 Mars 1803, le duc d’Enghien écrira au Chef de sa Maison pour adhérer publiquement aux deux déclarations. 

    Il n’est pas utile de souligner qu’aucun descendant du roi d’Espagne, Philippe V, n’a été associé à cette déclaration, et que selon le premier paragraphe de cette déclaration, ils ne sont pas assimilés aux Prince de la Maison de France. Preuve une fois de plus, que Louis XVIII et Charles X excluaient bel et bien leurs cousins de la la branche Espagnole de toutes prétentions dynastiques au trône de France.   

    Source : Gallica / Maison de France. D’un certain « Monsieur F ». Livre adressé à Monsieur Bayard de Plainville, député de l’Oise en 1815.

    La Couronne

  • Culture • Loisirs • Traditions

  • Famille de France • Prince Jean : « Je veux rendre hommage aux membres de nos familles qui vivent un handicap »

     

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpgLes trente-six ans du foyer de Blanche – l’Arche d’Aigrefoin

    « Cette fin de semaine, le foyer de ma sœur Blanche fêtait ses trente-six ans. Les foyers de l’Arche sont organisés en différentes maisons d’une dizaine de personnes handicapées et de leurs accompagnateurs. Celui dans lequel vit Blanche porte le nom de Magnificat, qui correspond tout à fait à la joie et la bonne humeur qui régnaient en ce quatorze juillet.

    Cette fête marque aussi un changement fort pour elle. Cela fait trente-trois ans qu’elle est résidente à l’Arche et elle va maintenant rejoindre une autre maison sur le même site qui accueille les plus anciens avec une assistance médicalisée. 

    Blanche a grandi à Magnificat, c’est là qu’elle se sent chez elle. Comme notre frère François qui réside à l’Arche de Paris, elle est toujours heureuse de pouvoir sortir régulièrement nous voir. Cependant c’est grâce à l’Arche qu’ils ont construit leur environnement d’adulte avec leurs amis, leurs activités au Centre d’Aide par le Travail et leurs loisirs. 

    Ces invitations sont toujours pour nous des moments privilégiés qui sortent de l’ordinaire, dans une joyeuse effervescence comme vous le verrez sur certaines photos. 

    Je veux rendre un hommage particulier aux membres de nos familles qui vivent un handicap et qui nous apportent tant. Ils nous communiquent une vraie joie fraternelle ; une belle leçon d’humanité à un moment où beaucoup d’entre eux n’arrivent pas jusqu’à la naissance parce qu’ils ne sont pas désirés. Je le dis ici, leur vie vaut vraiment la peine d’être vécue … et pour moi, que serait ma vie sans eux ? »  • 

     

    Jean de France, duc de Vendôme
    Domaine Royal, le 17 juillet 2017 

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    La joie partagée avec Blanche de l'anniversaire du foyer Magnificat

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    Les résidents du foyer Magnificat

    Le site officiel du Prince Jean de France

  • Société & Spiritualité • À défaut de savoir prier ...

     

    Par Mathieu Bock-Côté

    Cette méditation qui intéresse et émeut a été donnée dans le Journal de Montréal du 10 juillet 2017. Elle mêle réflexion personnelle, démarche spirituelle et regards sur le monde actuel. Peut-être Mathieu Bock-Côté s'en défendrait-ils, mais nous trouvons ces derniers regards dans la veine des grands antimodernes.  Le lecteur avisera.  LFAR

     

    2760774407.2.jpgJ’ai visité aujourd’hui la magnifique co-cathédrale Saint-Jean, à La Valette, à Malte. Elle est époustouflante. Je rêvais de la voir depuis longtemps. Une église comme celle-là est faite pour traverser les siècles. Nous fabriquons aujourd’hui un monde jetable, à l’obsolescence programmée : ce qui dure nous effraie, on s’y sent prisonnier, même si, par ailleurs, l’homme moderne cherche partout des ruines qui parlent au cœur. Il y a dans le cœur humain un désir de transcendance. Qu’on me permette de citer Saint-Exupéry, dans Citadelle : « vous les voyez, les hommes de toutes les contrées du monde, courir à la recherche de ces réussites de pierre que vous ne fabriquez plus. Ces greniers pour l’âme et le cœur. Où avez-vous vu l’homme éprouver le besoin de courir le monde pour visiter des entrepôts ? » L’homme n’est pas qu’une créature prosaïque et il cherche peut-être moins dans ce qui reste du passé un exotisme à bon marché que des traces d’éternité.

    Qu’on me permette aussi de citer Daniel-Rops, dans L’Église de la cathédrale et de la croisade qui m’accompagne ces jours-ci dans mes bagages : « Si, avec le Claudel du Soulier de Satin, on se demande « ce qui leur a pris, à ces croquants, à ces manants, à  ces grippe-sous, à ces cul-terreux », pour dresser par le monde tant de merveilles, la seule réponse tient en deux mots : ils croyaient ». L’homme a besoin de croire à quelque chose d’autre que lui-même pour révéler tout son génie. C’est souvent parce qu’il croit au ciel qu’il peut embellir la terre. Inversement, l’homme enfermé en lui-même et moqueur devant le sacré, quelle qu’en soit la forme, a bien des chances de se condamner à l’assèchement existentiel. On ne gagne rien à voir dans la religion une simple manifestation d’irrationalité. Je ne dis pas qu’il faut avoir la foi, elle ne se commande pas, et même lorsqu’elle se présente, il suffit souvent de chercher à la saisir pour qu’elle se dissipe. Je dis qu’il faut au moins comprendre quelles aspirations de l’âme humaine elle révèle. Quant à moi, j’aime savoir que dans le monde, des hommes et des femmes prient pour nous. Et cela, même si je ne suis pas certain de comprendre à quoi ils croient.

    Pourtant, je confesserai cela : à aucun moment, aujourd’hui, dans cette magnifique église, je n’ai senti le besoin de me recueillir. Peut-être était-ce parce que nous étions des milliers de touristes à l’occuper ? C’est possible. Rien n’est plus étranger au silence de la prière que se sentir plongé dans une masse humaine qui flâne. Je ne suis jamais vraiment parvenu à me recueillir à la basilique Notre-Dame non plus. Mais au fond de moi, je sens que ce n’est pas que cela. « À défaut de savoir prier », pour le dire avec Dominique de Roux, je sais toutefois quand j’ai un besoin intime de m’agenouiller devant la croix, même si je me sens ridicule dès que je me relève en me demandant à quel théâtre mystique je viens de me livrer. Et c’est moins dans les églises majestueuses que dans de toutes petites églises, sans prétention, comme on aime dire : elles témoignent moins de la puissance de l’homme que de son humilité devant un monde qui se présente à lui comme un mystère. Le génie du christianisme est aussi un génie de la faiblesse comme beauté. Je suis aussi bouleversé par la beauté de ces croix plantées ici et là, comme on en trouve dans plusieurs régions du Québec : comment ne pas y voir une marque de la plus belle espérance ?

    Qu’on ne voit pas dans cette petite confession une marque d’hostilité à l’endroit des belles et grandes cathédrales. Elles peuvent aussi nous hypnotiser. Je me souviens d’avoir passé une ou deux heures (j’avais perdu un peu le sens du temps) devant la cathédrale de Strasbourg. Je ne parvenais pas à m’y arracher. Je ne bougeais pas. Je la regardais et j'étais soufflé par tant de beauté. Il s'agit en fait de trouver les endroits les plus susceptibles d’amener l’homme à entrer dans une méditation silencieuse où il peut s’arracher pour quelques instants aux contingences de ce monde et plonger en lui-même pour accéder à ce qu’il peut souhaiter être sa part éternelle. Chacun y va selon sa nature, probablement. Je ne sais plus qui disait qu'il y a une géographie du sacré mais cette intuition me semble féconde. Il y a certainement des lieux qui nous poussent davantage à la prière que d'autres et je constate simplement que d’une ville à l’autre, je les cherche confusément, et je suis chaque fois ému de les découvrir. 

    Mathieu Bock-Côté  

  • Histoire • Le miracle de Jeanne d'Arc

    « La grande idée de Jeanne fut le sacre de Reims »  Jacques Bainville 

     

    Par Jean Sévillia

     

    1393915541.jpgLe 22 février 1429, Jeanne d'Arc quitte Vaucouleurs. Le 5 mars suivant (selon la chronologie de Maurice Vachon), elle a sa première entrevue, à Chinon, avec le roi Charles. Le 29 avril, elle atteint Orléans qui est délivrée le 8 mai. Le 17 juillet, à Reims, Jeanne assiste au sacre de Charles VII. Le 10 septembre, elle doit renoncer à prendre Paris. Le 23 mai 1430, devant Compiègne, elle tombe aux mains des Bourguignons qui la livrent aux Anglais. Ces derniers accèdent au voeu des clercs qui veulent juger la Pucelle pour sorcellerie et par là même atteindre le roi Charles qui lui doit son sacre. Le procès, instruit à Rouen, s'ouvre le 21 février 1431. Face à ses accusateurs, la jeune fille se défend, jamais ne cède. Le 24 mai, en entendant la sentence de mort, elle faiblit toutefois. Reconduite dans son cachot anglais au mépris de la parole qui lui a été donnée d'être gardée par des femmes, elle subit une tentative de viol. Quatre jours plus tard, elle remet ses habits d'homme. Considérée comme relapse, elle est brûlée vive, le 30 mai 1431, sur la place du Vieux-Marché. Elle n'avait pas 20 ans. Deux ans de vie publique, cinq siècles de postérité.

    Dans un livre paru en 1993, aujourd'hui réédité, Gerd Krumeich, spécialiste allemand de la Grande Guerre, s'intéresse au mythe Jeanne d'Arc : de Voltaire à Michelet et de Péguy à Bertolt Brecht, d'innombrables écrivains ont eu leur interprétation de la Pucelle, laquelle a inspiré les catholiques comme les républicains, le socialiste Jaurès comme le nationaliste Barrès, le royaliste Maurras comme le trotskiste Bensaïd (1).

    Contradictions ? Non, inépuisable richesse du personnage. La relecture des minutes du procès de Jeanne par l'avocat et essayiste Jacques Trémolet de Villers, parue l'an dernier, est désormais clisponible en poche : un précieux document historique assorti d'une leçon politique et spirituelle (2).

    Et voici, inédit, un considérable dictionnaire que tous les passionnés de Jeanne d'Arc s'offriront car il contient tout ce que l'on sait sur elle : 2 000 pages, prodigieux travail au service de celle qui incarne, disent les auteurs, « un idéal de pureté hors du commun » (3).  

    IMG.jpg

    (1) Jeanne d'Arc à travers l'Histoire, de Gerd Krumeich, Belin, 410 p., 24 €.
    (2) Jeanne d'Arc. Le procès de Rouen, de Jacques Trémolet de Villers, Tempus.365 p.. 9 €.
    (3) Dictionnaire encyclopédique de Jeanne d'Arc, de Pascal-Raphaël Ambrogi et Dominique Le Tourneau (dir.), Desclée de Brouwer. 2 012 p., 49 C.

    Figaro magazine 7.07.2017

  • Patrimoine • Au hameau « Les Maurras », rapprochement inattendu entre sport, santé, détente et Charles Maurras !

     

    Publié le 8 avril 2017 - Actualisé le 22 juillet 2017

    Ne dit-on pas « Mens sana un corpore sano » ? : les beaux jours arrivent, et, avec eux, le désir de retrouver la nature.

    Pour les amateurs de marche à pied-randonnée, ou de VTT, savez-vous qu'il existe, dans cet endroit de Haute Provence dont sont partis, il y a bien longtemps, les ancêtres des Maurras, un circuit sport-santé ?

    Il se trouve dans la petite - mais charmante... - commune de Saint Julien le Montagnier, dans le Haut Var, commune située sur l'aire du Parc naturel régional du Verdon, à deux pas du très beau lac d'Esparron-sur-Verdon.

    En voici une très rapide présentation :  

    Circuit « Les Maurras » :

    Itinéraire en boucle. (9,485 Km) - Dénivelé : 102 mètres - Durée : environ 5 heures.

    Départ depuis l’Office de Tourisme (Parking).

    Intérêts du sentier :

    Les Paysages

    Caractéristiques de l’arrière-pays provençal, ils sont contrastés en toute saison. Vous parcourrez les plaines agricoles avec cultures céréalières, de la vigne et de la truffe pour découvrir un magnifique panorama sur le village perché de St Julien et ses moulins à vent.

    La Flore

    La végétation est encore typique des Préalpes calcaires : forêts de pins sylvestres, pins d’Alep, chênes blancs et chênes vert. garrigue provençale, flore sauvage méditerranéenne, xérophile et aromatique nous rappellent la richesse des parfums de la Provence.

    Le Patrimoine

    Les attraits paysagers et floristiques de ce circuit s’ajoutent au patrimoine rural : le lavoir des Fontettes (XIXe siècle), la fontaine et la chapelle situées à Saint-Pierre ; l’oratoire Saint-Eloi (1948), l’oratoire Saint-Denis (XIXe également), le lavoir des Phélines (1880), l’oratoire Saint-Marc. De plus, l’itinéraire du circuit permet de découvrir la Bastide Neuve, sans oublier le pont de pierre autrefois très emprunté.

    Alors, à vos vélos, à vos chaussures de marche, et... bonne randonnée ! 

    Commune de Saint Julien le Montagnier

  • Le Sang prévaut toujours sur l'Or

     

    En deux mots.jpgCe que signale, entre autres choses, sous l’écume de l’événement, la crise qui vient d'opposer le chef de l'Etat et le chef d'Etat-Major des Armées, c'est le retour de la question militaire au premier plan. 

    L'idéologie de la fin de l'histoire et l'économisme dominant après l'effondrement du bloc communiste, avaient relégué l'armée au rang de survivance quasi symbolique. Quelle utilité, désormais ? 

    Le réveil de l'Islam et de ses violences sur tous les continents, la résurgence des nationalismes - américain, russe, chinois, indien, etc. - nous ramènent aujourd'hui à la réalité. Laquelle restitue à l’armée son rôle et son importance. C'est bien parce qu'Emmanuel Macron n'a pas perçu cette évolution qu'il a déclenché, pour huit cent cinquante millions d'euros, une crise qui, â l'évidence, a tourné à son désavantage. 

    Durant la Grande Guerre, observant la désorganisation complète du secteur bancaire et financier, Bainville notait qu'en définitive le Sang prévaut toujours sur l'Or. « Ce qui sortira le plus affaibli de cette crise, écrivait-il, c'est la puissance de l'Or. Et cela doit être quand il apparaît que la première valeur de toutes, c'est le Sang. »   

    Ce n'est pas exactement ce à quoi l'on vient d'assister, encore que dans cet épisode, Emmanuel Macron a remporté une victoire qu'il paie au prix fort. 

    Il pourrait ainsi arriver un moment, qui s’est déjà vu, où, sous la pression des nécessités, un chef militaire de valeur prévaudra dans l'esprit des Français sur un politicien de rencontre. Ce n'est pas nécessairement ce qui pourrait nous arriver de mieux. Mais c'est ce qui pourrait advenir tout de même faute d'un pouvoir politique dont la légitimité ne serait pas contestée.  •

  • La République totalitaire en marche

     

    Par Bernard Pascaud *


    3619899554.jpgAnalyse initialement publiée dans le numéro de juin de Restauration Nationale

    La machine à perdre électorale a une nouvelle fois fonctionné.

    Seul un candidat libéral-libertaire, mondialiste, immigrationniste pouvait l'emporter. Alors même que les Français réclament plus de frontières, de protection, de défense de l'identité nationale et d'arrêt de l'immigration. Il n'y a là aucun déficit de démocratie. Il y a le résultat logique du régime d'opinion et, par conséquent, de ceux qui la font : les médias et la finance. Un bon marketing politique a permis à l'enfant gâté de l'emporter : prise en compte de la volonté de renouvellement, ambiguïté des positions laissant espérer à tout le monde, démobilisation des opposants, utilisation de réflexes conditionnés (moi ou « Oradour »...). Si ce n'avait pas été Macron, c'eût été Fillon, cet autre candidat maastrichtien.

    Certes on peut se réjouir du laminage des partis traditionnels, ceux dits de gouvernement. Ils n'ont que ce qu'ils méritent. Le « dégagisme » procure ses petites joies. Hélas, cette petite satisfaction, cause d'un fort report des voix vers le candidat d'En marche, a été analogue à celle de l'enfant lassé de ses vieux jouets et fasciné par le tout beau tout nouveau. Il a fallu une forte dose d'immaturité politique et d'amnésie précoce pour associer Macron au concept du renouvellement. Le désenchantement viendra car l'ancien banquier n'aura pas le pouvoir de changer le plomb en or. Ce président n'est pas celui des Français, pas même celui de la majorité d'entre eux. Il est celui des bobos des grandes métropoles. Nullement celui du pays réel, notamment de cette France périphérique jugée inadaptée au processus de globalisation. Ce mépris affiché du peuple n'enlève pourtant rien à la légitimité démocratique du nouvel élu, pas plus que les 24 millions d'électeurs qui se sont abstenus. Ainsi l'exige le respect des valeurs républicaines. Pardon, mais quelle mascarade que tout cela !

    Macron est encore moins le président de la France. Pour cela il y faudrait d'abord la référence à un sol et donc à des frontières, fruits d'une construction persévérante et moyen de protection souveraine en même temps que d'identité. Mais de frontières, il ne saurait en être question pour un cerveau acquis au mondialisme et au fédéralisme européen. Du coup plus d'esprit de défense. Une Florence Parly, remplaçant la Goulard, précédemment prévue et éjectée, est là pour se charger de la basse besogne de l'intégration des Armées, dont elle est la ministre, au grand tout européen. C'était bien la peine d'aller à Orléans célébrer l'héroïne nationale et nous infliger ensuite des ministresses disant ouvertement ne pas « se sentir françaises ». Il y faudrait aussi la référence à un peuple, ce qui suppose la reconnaissance des corps qui le constituent à commencer par la famille dont l'intitulé n'apparaît plus dans aucun ministère. Il y faudrait enfin la référence à une culture, mais dans son discours de Lyon du 7 février, le candidat Macron a affirmé qu' « il n'existe pas de culture française ». Qu'allait-il donc faire au Puy du fou, ce haut lieu d'enracinement culturel français ?

    Ainsi le personnage incarne-t-il tout à la fois le pire de la droite économique et le pire de la gauche sociétale. Il y a de quoi s'inquiéter. Les bonnes surprises, s'il y en a, seront marginales. Ainsi après le trio infernal du quinquennat précédent (Peillon, Hamon, Vallaud-Belkacem), Blanquer apparaît-il à l'Education nationale d'un moindre sectarisme. Ce n'est pas difficile ! Le fait important est que le président désormais en place jouit d'une position renforcée : les élections ont scellé la faillite du P.S, des L.R et du F.N, l'assemblée lui est soumise, le Premier ministre et les ministres également grâce à la puissance bureaucratique. Certains observateurs voient là un retour à l'esprit du début de la Ve République : désir de renouvellement et réalité du pouvoir exercé conjointement par l'Elysée et la technocratie. Si on ajoute à cela le nouveau clivage séparant les réfractaires et les partisans du monde globalisé, ceux-ci étant au pouvoir et méprisant les premiers, on mesure le risque d'une République totalitaire en marche.

    Il serait illusoire de compter sur l'oligarchie européenne pour corriger ce processus. En France une véritable opposition va-t-elle émerger ? Il est peu probable qu'elle vienne des L.R, lesquels se rallient, d'ailleurs, ou se divisent en sous-partis. Ce qu'il reste de patriotes dans notre pays n'a pas d'autres solutions que de faire l'effort d'un travail intellectuel et de trouver un paradigme commun. Dans cette tâche nous avons beaucoup à apporter.  

    * Président de la Restauration Nationale

  • Un mauvais coup porté à la France  

     

    TRAVAUX DIVERS - Largeur +.jpgLe conflit qui s’est publiquement ouvert entre le président de la République et le Chef d’Etat-Major des Armées et qui s’est conclu hier par la démission de ce dernier, est un mauvais coup donné à la France.  

    Particulièrement dans sa situation : à l'intérieur, la menace terroriste rampante et, tout aussi graves sinon plus, les risques de violences communautaires, religieuses ou ethniques ; à l'extérieur, plusieurs engagements périlleux, possiblement aventureux, africains et proche-orientaux ; à quoi s'ajoutent de redoutables perspectives de futures vagues migratoires massives venant d'Afrique noire et s’ajoutant aux précédentes, devenues habituelles et qui d’ailleurs perdureront, si elles ne sont pas accrues, par exemple  par l’implosion algérienne tout à fait prévisible etc.  

    Face à ces dangers, l'on sait, sans besoin de développer, que nos armées sont, comme on a pris l’habitude de le dire, à l'os et qu'en particulier, leur équipement est dans un état de délabrement lamentable. Il fallait veiller à ne pas l'affaiblir davantage. 

    Un Etat n’est jamais prudent de diminuer les dépenses militaires, - notamment les programmes d’équipement - sous prétexte d’une situation de paix relative. La sagesse consiste à savoir que ces états sont précaires ; qu’ils ne sont pas éternels ; et, d’autre part, que les programmes d’équipement militaires ne sont réalisables qu’à moyen ou long terme. Les derniers présidents de la République ont manqué de cette prudence comme de cette sagesse. 

    C’est dans ces conditions que le général de Villiers a défendu, à huis-clos, devant la commission de la Défense nationale de l’Assemblée, le budget des Armées. Et qu’Emmanuel Macron l’a brutalement et publiquement réprimandé, le conduisant pratiquement à la démission. « J’obéis par amitié » disait Lyautey. Et on peut observer dans Saint-Simon la nature des dialogues entre Louis XIV et Vauban. L’autorité du grand roi – pour incontestée qu’elle soit et sans besoin d’être rappelée – se teintait de camaraderie d’armes. Au point d'étonner le lecteur d'aujourd'hui.    

    Ce n’est pas ainsi que s’est manifestée l’autorité d’Emmanuel Macron à l’égard du chef d’Etat-Major des Armées. Et le voici l’objet, le centre, de toutes les critiques. En butte à la réprobation de l’opinion et au malaise qu’il rencontre dans l’Armée dont Pierre de Villiers était un chef respecté. Bien au-delà du général lui-même, ledit malaise s’établit désormais globalement entre Emmanuel Macron et les Armées dont il est constitutionnellement le chef, la rupture de confiance semblant consommée.   

    On reprochera sans-doute désormais bien des choses à Emmanuel Macron, qu’il aurait mieux fait d’évaluer avant d’agir : à tort ou à raison, sa jeunesse, son inexpérience ; pire : son autoritarisme, sa mégalomanie et son égocentrisme seront mis en avant. L’on se rappellera assez vite qu’il a, en fait, été plutôt mal élu et qu’il ne dispose à l’Assemblée que d’une majorité désignée par une minorité de Français.   

    Emmanuel Macron s’apercevra alors qu’il est bien difficile d’être Jupiter en République. Et qu’il l’est plus encore d’y être tenu pour légitime. L'unanimisme macronien aura fait long feu. 

  • Alain de Benoist a raison : Morale et politique - saints et ascètes sont rarement des machiavéliens !

    Le cardinal Mazarin par Philippe de Champaigne - Peut-être le plus corrompu et le plus grand de nos ministres 

     

    Par Alain de Benoist

    Sur morale et politique, Alain de Benoist, dans cet entretien intéressant donné à Boulevard Voltaire [18.07], opère les distinctions nécessaires. Celles-là même que nous avons rappelées nous aussi dans Lafautearousseau à maintes reprises, au fil des récentes affaires. Corruption, mensonges, tartufferie, sont des reproches d'ordre moral, secondaires au regard du politique. Les vérités qu'exprime ici Alain de Benoist ressortent d'une très ancienne sagesse du gouvernement des Etats ; elles imprègnent notamment l'Ancien Régime. La sous-morale qui infeste aujourd'hui médias, opinion et soi-disant élites constitue comme une drogue débilitante de toute action politique. Elle n'intéresse pas les esprits politiques et même leur répugne.  LFAR    

     

    3650118671.7.pngDès son élection, Emmanuel Macron a fait de la « moralisation de la vie politique » son cheval de bataille. Là-dessus, Richard Ferrand et le couple François Bayrou-Marielle de Sarnez ont été obligés de quitter le gouvernement dans les conditions que l’on sait. Vous en pensez quoi ?

    Honnêtement, rien du tout. Les histoires d’emplois fictifs, de comptes en Suisse, d’attachés parlementaires, de mutuelles bretonnes et que sais-je encore ne sont là que pour amuser la galerie. Elles ne sont là que pour distraire, au sens pascalien, une opinion publique qui n’est déjà plus depuis longtemps en état de distinguer l’historique de l’anecdotique. Leur seul effet positif est de discréditer toujours un peu plus une classe politique qui a effectivement démérité, mais pour de tout autres raisons. En dehors de cela, elles conduisent à croire que la vie politique doit se dérouler sous l’œil des juges, en même temps qu’elles généralisent l’ère du soupçon au nom d’un idéal de « transparence » proprement totalitaire. Et le mouvement s’accélère : on reprochera bientôt aux ministres de s’être fait offrir des caramels mous et d’avoir oublié de déclarer leur collection de moules à gaufres dans leur déclaration de patrimoine.

    Quant aux lois destinées à « moraliser la vie publique », elles resteront à peu près aussi efficaces que celles qui prétendent moraliser la vie financière. Depuis le scandale de Panama (1892) – pour ne pas remonter plus haut -, les « affaires » ont de tout temps émaillé la vie politique. Pour y remédier, on légifère à grand bruit mais dans le vide. En bientôt trente ans, ce ne sont pas moins de dix lois différentes qui ont été adoptées à cette fin, depuis la loi du 11 mars 1988 sur la « transparence financière de la vie politique » jusqu’à celle du 9 décembre 2016 relative à la « lutte contre la corruption », en passant par celle du 29 janvier 1993 sur la moralisation des campagnes électorales et des procédures publiques. Aucune de ces lois n’a empêché de nouvelles « affaires » de surgir. Il en ira évidemment de même de celle que prépare le gouvernement.

    Serait-il plus immoral de se faire offrir des costumes en douce (François Fillon) que d’attaquer la Libye (Nicolas Sarkozy), avec les résultats politiques que l’on sait ?

    Évidemment pas, mais avec cet exemple, vous abordez indirectement la véritable question qu’il faut se poser : celle des rapports entre la politique et la morale. Tout le monde, bien entendu, préférerait être gouverné par des dirigeants intègres plutôt que par des corrompus. Mais la politique n’est pas un concours de vertu. Mieux vaut une franche fripouille, voire une sinistre crapule qui fait une bonne politique (il n’en a pas manqué dans l’Histoire), qu’un brave homme aux qualités morales incontestables qui en fait une mauvaise (il n’en a pas manqué non plus) – et qui, du même coup, discrédite jusqu’à ses qualités. La politique a pour but d’atteindre des objectifs politiques, pas des objectifs moraux. Ce qui a manqué à Louis XVI, c’est d’être aussi Lénine et Talleyrand. Les saints ou les ascètes sont rarement des machiavéliens !

    La vérité est que les qualités politiques et les qualités morales ne sont pas de même nature. Elles n’appartiennent pas à la même catégorie. La politique n’a pas à être gouvernée par la morale, car elle a sa propre morale, qui veut que l’action publique soit ordonnée au bien commun. Elle n’est pas ordonnée à l’amour de tous les hommes, ou à l’amour de l’homme en soi, mais se préoccupe d’abord de ce que peut être le destin de la communauté à laquelle on appartient. À ceux qui pensent avoir tout dit lorsqu’ils ont proclamé que « tous les hommes sont frères », rappelons que la première histoire de frères est celle du meurtre d’Abel par Caïn. 

    La politique morale, émotionnelle et lacrymale, la politique des bons sentiments est en fait la pire politique qui soit. La politique qui consiste à multiplier les ingérences « humanitaires » au nom des droits de l’homme aboutit régulièrement à des désastres, comme on peut le voir aujourd’hui au Proche-Orient. Celle qui nous commande d’accueillir avec « générosité » tous les migrants de la planète confond tout simplement morale publique et morale privée. Celle qui consiste à gloser sur les « valeurs » pour mieux ignorer les principes est tout aussi invertébrée. Le politiquement correct relève lui aussi de l’injonction morale, pour ne rien dire de la « lutte-contre-toutes-les-discriminations ». Cette politique morale prend malheureusement toujours plus d’ampleur à une époque où le « bien » et le « mal », tels que les définit l’idéologie dominante, tendent de plus en plus à remplacer le vrai et le faux. Là comme ailleurs, le politique doit reprendre ses droits.

    Et Simone Veil au Panthéon ?

    Simone Weil n’y est pas. 

    Intellectuel, philosophe et politologue

     
    Entretien réalisé par Nicolas Gauthier
  • Disparition : Max Gallo, l'historien amoureux de la France

    Max Gallo et le Prince Jean de France  à la Sainte Chapelle [2009]

     

    L’académicien français Max Gallo est mort le 18 juillet 2017 à l’âge de 85 ans. Il avait dialogué avec le Prince Jean, dans Le Figaro magazine, en novembre 2009 (Photo). Max Gallo venait de publier un livre d'histoire des premiers capétiens, le Prince Jean son ouvrage Un Prince français. On pourra retrouver trace de leur entretien - Jean d'Orléans et Max Gallo, la France au coeur - dans Lafautearousseau*.

    Pour Figarovox, Paul-François Paoli a évoqué, dès hier soir, son souvenir dans l'intéressant article repris ci-dessous.  LFAR

     

    Atteint de la maladie de Parkinson depuis plusieurs années, Max Gallo nous a quittés mardi, à l'âge de 85 ans. Historien de vocation mais aussi romancier et essayiste à succès, Max Gallo était entré à l'Académie française le 31 mai 2007, où il avait succédé à son ami Jean-François Revel. Une consécration pour ce fils d'immigrés italiens, né à Nice le 7 janvier 1932, quivouait à la France un véritable culte, qu'il exprimera à travers son œuvre et son action politique.

    Après avoir obtenu un CAP de mécanicien ajusteur puis un bac mathématique et technique au lendemain de la Libération, Max Gallo allait poursuivre des études littéraires et développer une passion pour l'histoire qu'il étudie à l'université. Devenu agrégé, puis docteur en histoire, il enseigne au lycée Masséna à Nice et à l'université de cette même ville et enfin donne des cours à Science Po Paris à partir de 1968. Une ascension sociale et intellectuelle commence pour ce jeune provincial qui a très fortement ressenti les différences de classe et ne se sent pas à l'aise avec les enfants de la bourgeoisie parisienne. Ayant adhéré à 17 ans au Parti communiste qu'il identifie à la Résistance, il rompt après la mort de Staline et devient un anticommuniste convaincu tout en continuant de se situer à gauche jusque dans les années 1990. Ses premiers romans, notamment Le Cortège des vainqueurs, publié en 1972, qui raconte la destinée d'un jeune fasciste italien jusqu'aux années 1975, sont imprégnés par les drames politiques de son temps. Depuis la célèbre Baie des Anges, saga niçoise publiée en 1976, qui connaîtra un grand succès - plus de 700 000 exemplaires vendus - à La Machinerie humaine, suite de 11 romans publiée entre 1992 à 2002 qui peut se lire comme une enquête sur la France des années 1990, l'œuvre romanesque de Max Gallo, qui compte une cinquantaine de romans, est toujours liée aux enjeux d'une histoire collective à laquelle des individus en quête de destin sont confrontés.

    «Dans mes romans, le plafond est bas, il pèse, il écrase, mais mes personnages se battent quand même. Beaufort, le personnage principal de La Part de Dieu (1996, Fayard), est un homme apparemment sans espoir. Il a perdu sa fille et ne se fait plus guère d'illusions sur l'amour. Malgré tout il se bat. Pour quelle raison? Il est simplement plus digne pour un homme de rester debout le plus longtemps possible», écrit-il.

    Ayant dû faire un choix entre sa vie à Nice à la fin des années 1960 et son existence à Paris, Max Gallo choisit la seconde option, laquelle ne sera pas sans conséquences sur sa vie de famille. Le jeune Niçois devient parisien, et bientôt une figure de la vie intellectuelle parisienne.

    Il écrit d'abord des romans de politique-fiction sous le pseudonyme de Max Laugham. En 1971, il prête assistance à Martin Gray pour la rédaction d'Au nom de tous les miens, histoire romanesque d'un jeune rescapé du camp de Treblinka. Le livre rencontre un immense succès. Ce sera pour Gallo le premier d'une très longue série de best-sellers.

    Puis à partir des années 1980, cet écrivain infatigable publie des biographies consacrées à Robespierre, Garibaldi, Jaurès ou Jules Vallès.

    Sa série de quatre tomes sur Napoléon, publiée en 1997 chez Robert-Laffont (Le Chant du départ, Le Soleil d'Austerlitz, L'Empereur des rois, L'Immortel de Sainte-Hélène), est un des points culminants de sa carrière d'auteur aussi populaire que prolifique: désormais Max Gallo privilégie systématiquement la part de lumière de l'Histoire de France. Ses livres visent explicitement à célébrer, à élever plutôt qu'à critiquer. C'est pour l'ancien professeur le seul moyen de faire aimer la France à la jeunesse, notamment d'origine immigrée.

    Doté d'une énergie physique exceptionnelle, l'homme est debout à l'aube. Il travaille comme un chef d'orchestre. Devant lui, des chevalets où sont disposés les matériaux historiques et biographiques de ses travaux en cours. Gallo tape directement ses ouvrages sur une vieille machine à écrire, comme il le ferait sur un piano. Ses livres dépassent bientôt la centaine de titres.

    Parallèlement à son travail d'écrivain prolixe, Max Gallo poursuit une carrière d'éditorialiste à L'Express, qu'il rejoint à partir des années 1970 sur la demande de son ami Jean-François Revel, puis il prend la tête de l'éphémère Matin de Paris dans les années 1980.

    Après la victoire de François Mitterrand en 1981, l'écrivain adhère au Parti socialiste et se présente aux élections municipales de Nice qui l'opposent à Jacques Médecin durant une campagne violente qui verra son adversaire l'emporter. Ayant rencontré Mitterrand dans une émission d'Apostrophes, il garde de la politique une vision singulière, nourrie par l'histoire. Devenu secrétaire d'État et porte-parole du gouvernement en 1983 (il se dote d'un directeur de cabinet nommé François Hollande), il ne tarde pas à marquer des distances avec le Parti socialiste, où il ne s'est jamais senti à son aise, dira-t-il plus tard. Il réprouvera ce qu'il appellera le cynisme de Mitterrand concernant la montée du Front national tout en poursuivant sa carrière de député européen.

    En 1983, il publie une tribune retentissante intitulée Le Silence des intellectuels, initiative spectaculaire à gauche, qui montre que son auteur n'entend pas se faire dicter sa parole et son comportement.

    Il rompt officiellement avec le PS en 1992 pour fonder le Mouvement des citoyens avec Jean-Pierre Chevènement, parti dont il devient le président et participe à la campagne du non au traité de Maastricht avec Philippe Seguin. Durant les élections européennes de 1999, il soutient Charles Pasqua et Philippe de Villiers à la tête d'un éphémère Rassemblement pour la France. Enfin, en 2002, il participe activement à la campagne présidentielle de Jean-Pierre Chevènement et intervient comme orateur dans ses meetings, regrettant toutefois que son ami n'ait pas réussi à faire le lien avec les «Républicains de l'autre rive», ceux de la droite souverainiste.

    Sa participation régulière à l'émission L'Esprit public de Philippe Meyer, avec Jean-Louis Bourlanges et Yves Michaud, en font une voix familière et aimée des Français. Il se révèle un formidable pédagogue et, fort de son délicieux accent niçois, un excellent conteur.

    Durant ces années, Max Gallo engage une réflexion sur la destinée de la France et développe l'idée d'une «crise nationale» qu'il compare à la guerre de Cent Ans, crise qui aurait débuté après la Première Guerre mondiale et se poursuit aujourd'hui. Il publie plusieurs livres liés à ce thème, notamment Fier d'être français puis L'âme de la France, histoire de la nation des origines à nos jours, pour dénoncer la notion de repentance historique qui se développe à partir des années 2000 et encourt l'ire de ceux qui lui reprochent de mettre en doute le fait que le rétablissement de l'esclavage aux Antilles par Napoléon relève du «crime contre l'humanité». Max Gallo sera poursuivi en justice mais ses accusateurs seront déboutés.

    Il participe aussi à la polémique engagée en 2005 par un groupe d'historiens, dont Pierre Nora et Jacques Julliard, qui refusent, au nom de la «liberté pour l'histoire» une réécriture du passé à l'aune des lois mémorielles, notamment celles ayant trait au « crime contre l'humanité ». Cette évolution vers la droite conduira l'auteur de la Lettre ouverte à Robespierre sur les nouveaux Muscadins, pamphlet paru en 1986, peu avant le bicentenaire de la Révolution française, à reconsidérer l'événement dans un sens plus critique. Avec le temps, Max Gallo, tout en restant jacobin, s'est rapproché de la vision de François Furet.

    En 2007, il soutient la candidature de Nicolas Sarkozy qu'il qualifiera de «républicain d'autorité» et rédigera plusieurs grands discours sous son quinquennat, notamment celui consacré au dernier poilu de la guerre de 14, Lazare Ponticelli.

    Quand il entrera à l'Académie française, le 31 janvier 2008, reçu par Alain Decaux, le président de la République sera présent, privilège rare sous la Coupole.

    Toutes ses activités d'acteur de la vie publique ne le détournent pas de son travail d'écrivain qui publie parfois jusqu'à trois livres par an. Il multiplie les grandes séries consacrées ici à la vie du général de Gaulle, là à celle de Saint Louis, Louis XIV, Victor Hugo, Richelieu. La Résistance, le Moyen Âge, les premiers temps de la chrétienté, rien ne paraît étranger à cet esprit insatiable, curieux de tout savoir, de tout comprendre.

    En 2013, il convient avec son éditeur et ami Bernard Fixot qu'il publiera durant les cinq années qui viennent une série sur le premier conflit mondial, chaque volume portant spécifiquement sur une année de guerre. Dès la fin de 2014, les cinq volumes sont déjà écrits, et bientôt publiés. Son rythme de travail défiait les lois de l'édition. Seule la maladie le contraindra à ralentir son activité et ses publications en rafale.

    Républicain dans l'âme et gaulliste de conviction, Max Gallo se définissait comme catholique. À ses yeux l'identité de la France, mais aussi de l'Europe, était inséparable de l'empreinte chrétienne et il ne cachait pas ses inquiétudes quant à la progression de l'islam, un thème que l'on retrouve d'ailleurs dans un de ses romans, La Part de Dieu.

    Homme d'une puissance intellectuelle exceptionnelle, porté par le succès, il aura vendu plusieurs millions d'ouvrages en un demi-siècle - Max Gallo aura marqué son époque en devenant un intellectuel dont les points de vue comptaient.

    Dans Histoires particulières (CNRS, 2009) et dans ses Mémoires, L'oubli est la ruse du diable, il rendit un hommage appuyé à son père qui lui avait inculqué l'amour de la France et le culte de la volonté qui peut permettre à un homme de vaincre la fatalité de l'origine. Il aimait voir en lui l'exemple d'une histoire d'immigration réussie par le travail et l'intégration. « Français de préférence », comme l'avait écrit Aragon…

    Son inlassable activité, ses livres en cascade cachaient un drame intime: le suicide en 1972 de sa fille de seize ans. Cette blessure était toujours à vif. Elle ne fut pas étrangère à son retour à la religion comme il l'avait confié dans la préface d'un de ses livres. Max Gallo cherchait l'apaisement à sa souffrance de père dans le travail. Il va le trouver, désormais, dans le repos éternel.  

    Paul-François Paoli

    Il trace son sillon : le Prince va à la rencontre des gens