Poutine est revenu ! Le Tsar chez Louis XIV...
Un bon moment de vraie, de belle et bonne télé information, ce lundi 29 mai, avec les excellents commentaires de Pascal Boniface, sur BFM/TV, qui nous a fait vivre, en direct, l'arrivée de Vladimir Poutine à Versailles. Pascal Boniface nous a changés, l'espace de quelques dizaines de minutes, de la médiocrité affligeante, de l'ignorance crasse, de la partialité révoltante de journaleux qui confondent en permanence carte de presse et carte de parti (n'importe lequel, pourvu qu'il soit de gauche et politiquement correct). Merci à lui, et bravo, puisque la dureté des temps fait que, maintenant, quand quelqu'un fait normalement son travail, on est amené à le féliciter pour ce simple fait !
Car l'événement est d'importance : après les cinq années calamiteuses du pitoyable nain qui nous a servi de lamentable semble-président, le nouveau Chef de l'Etat, faisant acte de realpolitik, a invité Vladimir Poutine en France. Mais les relations s'étaient terriblement - et stupidement - dégradées entre nos deux pays frères - frères en Europe et en chrétienté, au moment où l'Islam, pour la troisième fois, attaque l'Europe.
Il n'était donc pas facile de sortir, par le haut, de l'impasse dans laquelle le sous-préfet aux champs, vous savez, ce pauvre François « normal », nous avait engagés, en ce qui concerne nos rapports avec un pays objectivement allié, dans les grandes difficultés du moment présent.
C'est là que Louis XIV intervint ! Eh ! oui, Louis XIV ! Pascal Boniface a eu l’ « intelligence historique » ; il a su élever sa réflexion, et ses commentaires, au niveau qui convenait ; et il a très clairement expliqué que, au point calamiteux où les choses en étaient arrivées, un banal rendez-vous, une simple invitation, fût-elle d'Etat, ne pouvaient pas « recoller les morceaux ».
Il a donc fallu, d'abord, trouver un prétexte pour tendre la main à celui que l'on a sottement humilié hier (« sanctions » débiles et contre productives, puisqu'elles nous pénalisent autant, sinon plus, que la Russie ; affaire des Mistral, qui a entamé notre crédibilité sur le marché très couru de la vente de matériel militaire; critiques de toute façon inopérantes sur l'affaire de la Crimée etc.) : la célébration des trois cents ans de la visite à Versailles de Pierre le Grand, en 1717, a fait l'affaire. Le tsar, à l'époque, voulait moderniser la Russie, il « importait » Versailles à Peterhof, comme tous les princes de cette époque, où la France dominait le monde. Dominait, non par la force brute mais par l'éclatant et magnifique visage de sa civilisation, aimable et aimée, par ses architectes, ses écrivains, ses peintres, ses savants, elle qui était, par ailleurs, « la Grande nation », la Chine de l'Europe, du point de vue démographique...
Certes, cette visite se déroula deux ans après la mort du Roi-soleil, en 1717, et c'est l'enfant-roi Louis XV que Pierre le Grand, en un geste de surprenante bonhomie - surprenante, mais de bon aloi - éleva dans ses bras, bousculant étiquette, protocole et gens guindés de tout poil (on dirait, aujourd'hui, « coincés »).
Mais le palais, lui, reste bien le palais-temple du Roi-soleil, qui attire toujours les foules du monde entier, trois siècles après, tellement il symbolise, représente et, osons-le mot, personnifie le génie français, à l'instar de nos cathédrales, du Mont Saint-Michel ou des châteaux de la Loire.
Et Poutine ne serait pas venu, même à l'Elysée, comme l'a très bien expliqué Pascal Boniface. Les affronts avaient été trop nombreux ; ils avaient duré trop longtemps ; trop de paroles démentes avaient été dites (songeons aux propos honteux d'un Laurent Fabius, qui commence décidément à être bien fatigué...). Le prétexte trouvé, il fallait un lieu qui fût à la hauteur de l'événement, qui exaltât le moment, qui symbolisât qu'une page se tournait, enfin. Un simple palais, fût-ce l'Elysée, ne pouvait convenir, parce qu'il avait été terni pendant cinq ans par un petit sous-préfet aux champs, benêt de surcroît, et parce que c'est de là qu'étaient parties toutes ces attaques aussi grotesques qu'inconsidérées contre notre allié naturel d'aujourd'hui.
L'endroit s'imposait donc de lui-même : les ors de Versailles, la magnificence de Louis-le-Grand-en-tout, comme l'appelait l'immense Pierre Puget.
On songe, alors, au quatrain fameux de Guitry :
On nous dit que nos Rois dépensaient sans compter,
Qu'ils prenaient notre argent sans prendre nos conseils ;
Mais, quand ils construisaient de semblables merveilles,
Ne nous mettaient-ils pas notre argent de côté ?
Oui, Guitry a raison, évidemment. Mais son propos va bien au-delà du simple argent, du simple matériel : Versailles « fonctionne » encore, tel que l'a voulu Louis XIV, pour ce pour quoi il a été imaginé, puis réalisé. Comme un outil de gouvernement, un lieu de pouvoir, un lieu de ce pouvoir royal qui mena une authentique politique de civilisation, qui a "étonné le monde", selon le joli mot de Jean Dutourd. Comme le siège du rayonnement français. Comme l'exemple insurpassable, et du reste insurpassé, du génie national français.
Si l'hypocrisie est un hommage que le vice rend à la vertu, l'invitation faite au tsar d'aujourd'hui par notre Chef de l'Etat est un bel hommage rendu par cette pauvre république idéologique, à bout de souffle, à notre Royauté traditionnelle, qui nous a emmenés si loin, si haut, qu'elle en impose encore aujourd'hui ! •