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Rechercher : Rémi Hugues. histoire & action française. Rétrospective : 2018 année Maurras

  • Dans notre Éphéméride de ce jour (1/2) : Xavier Langlais, qui nous a ”restitué” les légendes du Roi Arthur...

    1906 : Naissance de Xavier de Langlais

     

    27 avril,jean bart,louis xiv,corsaires,insee,airbus,a 380,toulouse-blagnac,aérospatiale,sud-aviation,aéronautique,europeXavier de Langlais a réalisé une très grande oeuvre, très utile, qui nous replonge dans un autre monde, à une autre époque, qu'il a ré-ouverte et comme rendu au grand public : il a tout simplement - mais ce fut un travail considérable, et de quelle qualité ! - réécrit le cycle arthurien dans un français "moderne", donc accessible à tous les publics...

    Il n'a rien inventé, rien corrigé, supprimé, repris. Il s'est simplement - si l'on peut dire... - basé sur les traditions arthuriennes de ce que l'on appelle la matière de Bretagne; comme il le dit lui-même dans sa préface, seule "la manière de conter lui appartient", pour le fond il s'inspire directement des premiers écrits consacrés aux aventures de la table ronde des XIIème et XIIIème siècle (notamment ceux de Chrétien de Troyes) :

    la matière de Bretagne

    Nous disposons donc, maintenant de cinq tomes pour découvrir ou redécouvrir la célèbre légende. Cinq tomes pour nous plonger dans l'univers de la chevalerie.

    Chaque tome est consacré à une partie de la légende arthurienne :

    le tome 1 (Le roman du roi Arthur) nous conte l'origine de Merlin, le sacre du roi Arthur ainsi que le début de son règne, l'origine du Graal, la création de la table ronde, et enfin la disparition de Merlin.

    le tome 2 (Lancelot), comme son titre l'indique, est essentiellement consacré au personnage de Lancelot, avec sa naissance, son enfance, son entrée dans la chevalerie et le début de son histoire d'amour avec la reine Guenièvre.


    le tome 3 (Perceval), s'il est dans sa deuxième partie consacré à l'entrée dans la chevalerie de Perceval, continue de nous conter les aventures de Lancelot et amorce la quête dite "célestielle" qui sera dédiée à la recherche du Graal.


    le tome 4 (La quête du Graal) est entièrement consacré à la fameuse quête célestielle menée par "le meilleur chevalier du monde".


    le tome 5 (La fin des temps aventureux) revient aux aventures "terrestres". Il conte la fin des chevaliers de la table ronde, la mise en péril de la reine Guenièvre et la mort du roi.

     

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    Xavier de langlais a donc rendu un service signalé aux Lettres françaises, à la culture et à la civilisation, non seulement de notre pays, mais du monde, tout simplement. Parce qu'il fut "restituteur'", "renouveleur", comme Joseph Bédier, qui, lui, nous a "rendu" Tristan et Iseut (voir l'Éphéméride du 29 août)...

     

     

    27 avril,jean bart,louis xiv,corsaires,insee,airbus,a 380,toulouse-blagnac,aérospatiale,sud-aviation,aéronautique,europeTrouvères et troubadours, Chanson de Roland, Légendes Arthuriennes, Tristan et Yseult : quatre de nos Éphémérides reviennent sur la naissance de notre littérature nationale et sur ses thèmes fondateurs :

    • l'Éphéméride du 20 avril (sur les Troubadours Bernard de Ventadour et Bertrand de Born);

    • du 27 avril (sur Xavier Langlais et les romans du Roi Arthur);

    • du 15 août (sur la Chanson de Roland);

    • du 29 août (sur Joseph Bédier et Tristan et Yseult).

  • Rebondissement sensationnel dans l'afffaire de l'incendie de Marseille.....

                Nous avons longuement parlé, en septembre, (1) du Légionnaire Fontaine, livré en pâture "aux chiens" (comme l'a dit, en son temps Mitterand), jugé et condamné en un cllin d'oeil, et en direct, par les élus et une très large part du monde médiatique. Son crime ? Il aurait mis le feu aux calanques. Mon oeil ! Son vrai crime: être un soldat loyal et fidèle. La presse -aux ordres du politiquement correct- préfère les "jeunes". On venait justement, peu de temps avant, d'en relâcher deux qui, eux, avaient vraiment mis le feu. Mais comme ce sont des "jeunes"....

                Or, voilà que la même Provence -qui avait, sans retenue ou sans précaution, participé à la curée- lance une nouvelle sensationnelle. Il faut attendre encore un peu, certes, mails il semblerait qu'un rapport d'expertise remette en cause la précipitation et la suprême injustice -coupable, évidemment, forcément coupable, comme dirait l'autre- dont ont fait preuve -Jean-Claude Gaudin en tête- ceux qui ont hurlé à la mort contre l'adjudant Fontaine.

                Si le rapport s'avère vrai -répétons-le, il faut attendre encore un peu, ne faisons pas, justement, comme "ils" ont fait, "eux"...- que va-t-il se passer ? France info, benoîtement, disait au flash de 6h30, ce vendredi 16, peut-être faudra-t-il qu'ils s'excusent.

                Quoi, ce serait tout ? De simples excuses ? Pour tout ce mal, pour tout ce tort causé à un sodat exemplaire ? Et pourquoi pas de lourdes amendes ? Et pourquoi pas des peines de prison -au moins avec sursis- ? Et pourquoi pas des démissions ? Sont-ils au-dessus des lois parce qu'ils sont journalistes, députés et sénateur-maire ?

                D'un côté on libère des "jeunes" qui, sitôt sortis, sont accueillis en triomphateurs dans leurs cités, où ils passent pour des héros, et, de l'autre, on se contenterait d'une ou deux excuses envers quelqu'un qu'on a failli laminer ?

                Nous préférons penser que la Justice doit passer. Envers les "jeunes", d'un côté (qu'on les déchoie et qu'on les expulse !); envers les lyncheurs de l'autre, s'il s'avère que le rapport en question dit vrai et innocente l'adjudant.....

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    (1) : Voici la note que nous avons publiée le 12 septembre, sous le titre "Deux feux à Marseille: deux poidsn deux mesures...."

               Si nous n'en avons pas parlé avant, c'est que nous préférions d'abord y voir plus clair, et non parce que cela ne nous intéressait pas. Le dilemme est bien connu: ou on réagit tout de suite, mais on court le risque d'être démenti par un fait nouveau, ou on attend un peu, par prudence et honnêteté intellectuelle, pour vérifier les infos, mais alors on court le risque d'être catalogué moins réactif.

               Pierre nous avait envoyé le texte d'une lettre ouverte à Jean-Claude Gaudin sur l'affaire du feu déclenché à Carpiagne, suite -disait-on- à un exercice de la Légion étrangère, pendant le mois de juillet. Juste après l'avoir reçu, l'AFP publiait le communiqué que nous reproduisons ci dessous. Et, pour finir, le vendredi 11 septembre, le principal intéressé prenait la parole dans La Provence. On peut donc considérer maintenant que les faits commencent à être établis avec assez de précisions pour demander des comptes, formuler quelques critiques, et lancer des accusations.....

     

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    Vite accusées: la Légion, l'Armée. Et plus qu'accusées: lynchées....

                Voici, dans l'ordre, et constituant un mini-dossier sur l' "affaire", le communiqué de l'AFP, la lettre ouverte à Jean-Claude Gaudin et l'entretien à La Provence

    I : Feu à Marseille. Les mineurs en liberté.

    Les deux adolescents de 14 ans interpellés hier (samedi 6 septembre, ndlr) sur le site de l'incendie qui a détruit six hectares de végétation basse aux portes de Marseille (ci dessous) ont été remis en liberté à l'issue de leur garde à vue, a-t-on appris dimanche de source policière. Ils feront l'objet d'une convocation ultérieure devant le tribunal pour enfants pour "incendie involontaire".

    Ils avaient été surpris la veille par un policier hors service et un apprenti-cuisinier, alors qu'ils jetaient des pétards. Ils avaient ensuite tenté d'éteindre le feu, qui s'est finalement arrêté à quelques dizaines de mètres des habitations à La Batarelle, dans les quartiers nord de Marseille. Les deux mineurs ont un casier judiciaire vierge et sont présentés comme "des jeunes sans histoire".

    Un dispositif terrestre de 150 hommes et la mobilisation de six Canadair avaient été nécessaires samedi pour maîtriser le sinistre, attisé par un fort mistral, qui s'était déclaré vers 16h30 dans une zone péri-urbaine.

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                A la lecture de ce communiqué, le texte envoyé par Pierre est encore plus parlant:

    II : Monsieur le Maire,  

     

                Vous avez publiquement, et sur toutes les chaînes des médias, accusé l’Armée qui a déclenché un feu de broussailles après avoir tiré, à balles traçantes, lors des exercices d’entraînement au camp de Carpiagne. Connaissant votre affection pour Marseille, vous avez dû avoir très peur en voyant le feu arriver aux portes de la Cité. Très en colère, vous avez demandé lors de ces interviews, une punition exemplaire pour le « contrevenant » qui avait commis « une stupide erreur » en entraînant ses hommes dans cette région à risques en cette période. Mais pourquoi crier si fort aujourd'hui contre notre Armée, alors que votre silence complaisant nous a atterrés lorsque, quelques jours plus tôt, le 14 juillet exactement,  ce sont des bandes de vos cités dites défavorisées qui ont mis Marseille en feu créant des incendies - quatorze selon La Provence – tout près des habitations et simultanément aux quatre coins de la ville. 

                Ces  bandes de jeunes ou moins jeunes avaient volontairement mis en péril la vie de vos administrés puisqu’ils avaient jugé important d’allumer leurs incendies près des habitationset leur dessein, à n’en pas douter, était de tuer sans distinction d’âge ou de sexe. Nous savons tous et vous aussi certainement, que, ce faisant, ils répondaient à un appel, sur Internet,  de ces immigrésqui peuplent la France mais la haïssent autant qu’ils haïssent les français. Comment se fait-il,  qu’après ces violences, autrement plus graves, le premier magistrat que vous êtes, ne se soit pas révolté contre ces hordes de dangereux pyromanes ? Vous aviez pourtant matière à demander aux Chef de l’Etat de sévir avec la plus grande fermeté et à l’Armée, Gardes mobiles et autre CRS,  de les déloger manu-militari afin de les traduire devant la justice française. Vous avez préféré passer sous silence les débordements qui s’étaient déroulés dans votre ville, et « vos médias » se sont contentés d’annoncer le nombre de voitures incendiées dans tout l’hexagone, précisant, comme s’il s’agissait d’une banalité, que le bilan avait été bien supérieur à l’année précédente pour la même occasion. 

     

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    Après la virulente "sortie" du Maire de Marseille, François Fillon lui-même....

                Par contre, ayant trouvé un coupable tout désigné pour  "noyer le poisson de la veille", en la personne d’un honnête soldat qui entraînait ses hommes, vous êtes apparu comme par enchantement, drapé dans votre indignation, réclamant réparation  à la stupide Armée qui avait osé menacer Marseille. A vous regarder piquer vos colères devant toutes ces caméras qui passaient près de vous, nous en avons eu le sang tout retourné comme on dit cheznous en Provence.  Car nous, aussi,  nous sommes très en colère ….. Contre vous Monsieur Gaudin. Car nous sommes marseillais et nous aimons Marseille autant,  sinon plus,  que vous. Et Marseille n'est pas seulement qu'un ramassis de voyous qui sèment la terreur dans Notre ville, Monsieur, elle nous appartient également.  Mais il nous semble que vous êtes bien plus zélé à protéger vos  délinquants, même s’ils sont des assassins en herbe,  qu’à protéger et défendre tous vos administrés. Ne verriez-vous en eux que des voix électorales potentielles qui vous aideraient à préserver votre siège lors des futures consultations qui auront lieu dès les premiers mois de 2010 ?

                 Nous vous rappelons que, nous aussi, nous votons. Et nous sommes nombreux à être fatigués de lutter contre cette délinquance qui a envahi notre ville. Nous vivons dans l’insécurité la plus totale à Marseille pendant que vous faites des effets de manches et poussez des coups de gueule pour attirer l’attention des marseillais et des pouvoirs publics contre un homme, un soldat de France,  dont le
    courage et l’honneur ne sont plus à prouver. Votre théâtralisme, votre partialité, votre irresponsable attitude, nous font honte. Ces deux
    affaires ayant eu le même résultat : des incendies, l’un causé volontairement,  l’autre accidentellement dans l’exercice d’une profession, il est encore temps que vous en appeliez à l’Etat, aux ministres et à tous les médias pour revenir sur vos déclarations tonitruantes et rétablir la vérité. L’adjudant Fontaine, de la Légion étrangère,  en entraînant ses hommes aux futurs combats qu’ils livreront contre les ennemis de la France d’abord et de la paix dans le Monde en général n’est pas responsable, SEUL, de cet accident terrible, soit, mais non criminel. Vos protégés, eux, ont provoquédes incendies criminels et vous ne les avez, en aucune manière, condamnés ni poursuivis. 

                 Y aurait-il, pour la ville de Marseille que vous représentez, deux sortes d’administrés ? Deux poids, deux mesures ? Des blancs coupables et  des immigrés innocents ?  Nous attendons rapidement votre réponse, Monsieur le Maire.   

                 III : et que dire, alors, du son de cloche que l'on entend avec l'entretien accordé à La Provence par l'adjudant Fontaine, lynché en direct, plusieurs jours durant, dans la plupart des médias ?

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    La Provence, vendredi 11 septembre
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    détaillée ci dessous, pour une meilleur lecture
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    III
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  • Jean-Pierre Chevènement : « Si la Grèce sortait de l'euro, elle pourrait se redresser » (1/2)

     

    Retour sur d'intéressantes réflexions de Jean-Pierre Chevènement

    Le mois dernier, à la vielle du référendum grec, l'ancien ministre de l'Intérieur et de la Défense confiait au Figaro qu'une sortie éventuelle de la Grèce de la zone euro ne serait pas une catastrophe. Au contraire, elle permettrait au pays de Périclès de se redresser. Le Che prônait déjà l'instauration d'une monnaie commune pour remplacer la monnaie unique. Le point de vue de Lafautearousseau : s'agissant de l'euro comme monnaie unique ou de la construction européenne selon le processus en cours, les réflexions de Jean-Pierre Chevènement nous semblent sur le fond parfaitement fondées. Elles sont celles d'un patriote français.

     

    Le Premier ministre Alexis Tsipras va soumettre le plan d'aide à la Grèce à référendum. Que vous inspire cette décision ?

    Jean-Pierre Chevènement : Cela me paraît être une décision démocratique et légitime. Le plan d'aide est très critiquable. Les institutions de Bruxelles auraient pu bouger sur au moins deux volets. D'abord, le volet financier: le Premier ministre grec demandait qu'on allonge de 5 à 9 mois la durée du plan d'aide actuel. Cela était tout à fait raisonnable. Ensuite, sur le volet de la dette. Des prix Nobel d'économie comme Joseph Stiglitz ou Paul Krugman, mais aussi en France le directeur de la recherche et des études de Natixis, Patrick Artus, qui n'a rien d'un gauchiste, s'accordent à reconnaître que la dette grecque, qui représente 177% du PIB, n'est pas soutenable ni donc remboursable. Il y a une volonté punitive dans ce « plan d'aide » : on voulait par avance donner une leçon au Portugal, à l'Espagne, à l'Italie, voire à la France. Plus largement, il est le symbole de l'échec de la « règle d'or » imposée en 2012 à tous les pays d'Europe après avoir été adoptée par l'Allemagne dès 2009. Mais ce qui vaut pour l'Allemagne ne peut pas valoir pour tous les autres. On touche au vice originel de la monnaie unique qui juxtapose des pays très hétérogènes et fait diverger leurs économies au lieu de les faire converger. Par un mécanisme bien connu, les zones les plus productives ont vu leur production croître tandis que les zones moins compétitives ont vu la leur décliner et se sont donc appauvries. Il y a un défaut de conception au départ dont le résultat était tout à fait prévisible.

    Un certain nombre de dirigeants européens se sont agacés de cette décision. Comprenez-vous cette réaction ?

    Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker a dit: « Il n'y a pas de démocratie en Europe en dehors des traités ». Or le traité de Lisbonne reprend la quasi-totalité, la «substance » comme l'a dit Madame Merkel, du projet de «traité constitutionnel» qui avait justement été rejeté par le peuple français en 2005 par référendum. Par ailleurs, Monsieur Juncker ne me paraît pas le mieux placé pour mener le combat du oui au référendum grec. En effet, il a été un excellent Premier ministre luxembourgeois mais du point de vue du Luxembourg qu'il a organisé, avec succès, comme un véritable paradis fiscal! Cela ne le qualifie pas pour prêcher la solidarité.

    Pourquoi ces démocrates revendiqués semblent-ils autant redouter le choix du peuple ?

    Souvenez-vous de Jacques Delors qui disait en 1992 que les hommes politiques en désaccord avec Maastricht devaient « prendre leur retraite ou faire un autre métier…». Le ver était dans le fruit depuis très longtemps. Pour comprendre la nature profondément antidémocratique de l'actuelle construction européenne, il faut remonter des décennies en arrière au « système » Jean-Monnet, que l'on peut qualifier de « système de cliquets». L'Europe fonctionne par une suite de petits faits accomplis sur lesquels les citoyens ne peuvent plus revenir: on commence par le charbon et l'acier, puis par le marché commun, le droit communautaire, la réglementation de la concurrence, et enfin la monnaie unique pour arriver au « grand saut fédéral ». Les peuples européens sont amenés à se dépouiller peu à peu de leur souveraineté sans en avoir réellement conscience. Petit à petit, ils se retrouvent piégés. Les dirigeants européens ont amené les peuples où ils ne voulaient pas aller sans leur poser franchement la question. A la fin, s'apercevant de la supercherie, ces derniers ont dit non, en France, mais aussi aux Pays-Bas, au Danemark ou en Irlande. Pourtant les dirigeants ont considéré que cela ne valait rien, au regard d'une orthodoxie européenne qu'ils considèrent au-dessus de toute démocratie.

    L'Europe s'est construite par effraction et l'essence du système européen est oligarchique. Le Conseil européen des chefs d'Etat est la seule institution légitime, mais ne se réunit que périodiquement et ne dispose pas d'outils pour traduire ses impulsions. La Commission européenne est composée de hauts fonctionnaires qui ne sont pas élus mais nommés de manière très opaque. Comme l'affirme la Cour constitutionnelle allemande de Karlsruhe, le Parlement européen n'est pas un parlement. Il ne peut pas l'être car il n'y a pas de peuple européen, mais une trentaine de peuples différents. Dès le départ, l'Europe repose sur un postulat non vérifié: on a voulu faire l'Europe contre les nations ; on pensait qu'elle pouvait s'y substituer. Or les nations sont le cadre d'expression de la démocratie. Il faut désormais aller sur la voie de l'Europe confédérale, la seule qui soit légitime et démocratique: celle qu'avait proposée le général de Gaulle en 1962 avec le plan Fouchet. Seule une Europe à géométrie variable, souple envers chaque pays, pourra avancer. Cette nouvelle Europe aurait vocation à déboucher sur une « Europe européenne » et non inféodée. Le traité transatlantique, s'il était adopté, serait un nouveau coup porté à ce qui reste de notre souveraineté. Celui-ci ne comporte pas d'avantages évidents pour la France et nous soumettrait à des normes et juridictions influencées par les Etats-Unis. J'attends que la France fasse entendre sa voix sur un sujet qui du temps du général de Gaulle ne serait pas passé inaperçu.

    Sur le fond, êtes-vous favorable au « Oui » comme Jean-Claude Juncker ou au « Non » comme Alexis Tsipras ?

    Je n'ai pas à me prononcer à la place du peuple grec qui doit prendre ses responsabilités. C'est un peuple courageux. Il l'a montré à plusieurs reprise dans son histoire: dans sa guerre d'indépendance puis, en 1940, face à l'Italie fasciste qu'il a fait reculer et face à l'invasion nazie en 1941. Traditionnellement, il y a un sentiment philhéllène qui s'exprime en France. Je me compte d'ailleurs parmi les gens qui aiment la Grèce car pour moi ce pays représente aussi l'antiquité, le grec ancien, la démocratie. Ne serait-ce que pour avoir eu jadis un accessit au concours général de version grecque, je ne peux pas leur en vouloir ! Sans la Grèce, il manquerait quelque chose d'essentiel à l'Europe.

    Pour le président la Commission européenne, un « non » voudrait dire, indépendamment de la question posée, que la Grèce dit « non » à l'Europe. Partagez-vous ce point-de vue ?

    C'est absurde ! Comment un président de la Commission européenne peut-il parler ainsi ? Il confond la zone euro qui compte dix-huit membres et l'Union européenne qui en regroupe vingt-huit. Il existe donc dix pays qui ne sont pas dans l'union monétaire et qui sont dans l'Union européenne. La Grèce restera dans l'Europe. Et si, elle doit sortir de l'euro, nous devons l'aider à le faire dans des conditions qui ne soient pas trop douloureuses. Si la Grèce sort de l'euro, elle dévaluera sa monnaie qu'on pourrait appeler l'euro-drachme et rester attachée à l'euro dans un rapport stable de l'ordre de 70%. Il faudrait restructurer la dette à due proportion. Cette hypothèse est réaliste et remettrait la Grèce sur un sentier de croissance. Elle rendrait le pays encore plus attractif pour les touristes. Elle permettrait à la balance agricole grecque de redevenir excédentaire, ce qu'elle était avant l'euro et de développer une économie de services notamment dans la logistique et les transports. C'est un pays magnifique, l'un des plus beaux endroits du monde, qui bénéficie d'une véritable attractivité sur le plan géographique et d'un patrimoine historique pratiquement sans équivalent.

    Ceux qui prédisent le chaos en cas de sortie de la Grèce de l'euro jouent-ils la stratégie de la peur ou ont-ils raison ?

    Dans toute dévaluation, il y a des moments difficiles : dans les premiers mois et peut-être dans la première année. Mais ensuite, il y a des facteurs positifs qui interviennent : les produits du pays sont moins chers. Les avantages comparatifs qui sont les siens, sont accrus. Le tourisme par exemple bénéficie d'un effet d'appel. Des entreprises pourraient investir dans une perspective de rentabilité. L'Europe ne peut pas se permettre de rudoyer la Grèce, de l'écraser d'un pied rageur au fond du trou où elle se serait mise d'elle-même. Ce n'est pas raisonnable. Sauf si l'on souhaite dresser les peuples européens les uns contre les autres. Si la Grèce devait être amenée à recréer une sorte d'euro-drachme, il faudrait l'aider par des fonds structurels importants à supporter l'inévitable renchérissement de ses importations dans un premier temps. Et lui donner des facilités pour se redresser. Je pense qu'elle en a la capacité. Encore une fois, c'est un pays qui a beaucoup d'atouts.

    A terme l'éclatement, voire la disparition de la monnaie unique, sont-ils inévitables ?

    La monnaie unique a énormément accru les divergences de compétitivité entre pays européens. Prenons le cas de l'économie française. Elle avait un déficit commercial par rapport à l'Allemagne de vingt-huit milliards de francs en 1983. Aujourd'hui, le déficit de la France sur l'Allemagne serait selon certaines sources (Eurostat) de trente-cinq milliards d'euros. Comme l'euro, représente six fois et demi le franc, le déficit a au moins quadruplé en tenant compte de l'inflation depuis 1983. La monnaie unique, qui a définitivement empêché la France de dévaluer, nous met une sorte de nœud coulant qui se resserre. Nous sommes désormais tombés au niveau d'industrialisation de la Grèce (12 % du PIB). Nos fleurons du Cac 40 se développent, mais à l'étranger.

    Une sortie ordonnée de la zone euro, ou du moins de la monnaie unique est-elle possible ?

    Je suis profondément européen. Mais je ne crois pas que les modalités choisies pour la construction européenne actuelle soient les bonnes. Elles devraient être révisées. C'est très difficile parce que tous ces gens-là ont engagé leur crédit sur la monnaie unique. J'ai fait un petit livre qui s'appelle Le bêtisier de Maastricht. Il faut relire le florilège de déclarations de nos dirigeants de droite et de gauche, nous promettant, la prospérité, le plein emploi, que nous allions rivaliser avec l'Amérique, que le dollar n'aurait qu'à bien se tenir, etc. Une somme d'inepties qui ne peut que susciter le rire ou la commisération lorsqu'on relit tout cela avec le recul. Lorsqu'on a fait fausse route, il faut savoir revenir à la bifurcation et prendre la bonne direction. La monnaie commune pourrait être celle-ci.

    De quoi s'agit-il ?

    L'euro perdurerait comme symbole de notre volonté d'aller vers une Europe toujours plus unie, mais deviendrait monnaie commune et non plus unique. Elle serait valable dans les échanges internationaux en gardant des subdivisions nationales: l'euro-drachme, l'euro-lire, l'euro-mark, l'euro-franc, etc. Certains pays pourraient augmenter de quatre ou cinq pour cent la valeur de leur monnaie interne, d'autres la garder stable et certains, comme la Grèce, la diminuer. Tous les deux ou trois ans, on pourrait procéder à de légers ajustements pour tenir compte des compétitivités relatives qui permettraient de tenir dans la durée. Cette monnaie commune serait le panier des subdivisions nationales. Elle serait cotée sur le marché mondial des devises. Rien de plus simple ; le monde est flexible. Il y aurait une cotation qui interviendrait tous les jours et une certaine stabilité s'installerait entre cette monnaie commune, le dollar et le yuan. Derrière tout cela se profile la réorganisation du système monétaire international profondément malade.

    La France a-t-elle suffisamment pesé sur les négociations ?

    La France aurait pu intervenir d'une voix plus forte pour que le plan défini par l'Eurogroupe ne soit pas aussi dur sur le volet financier et sur le volet de la dette. Je pense que la France a perdu une occasion de faire entendre sa voix comme sur le dossier des sanctions contre la Russie qui nous pénalisent aussi. La vraie menace pour l'Europe n'est pas à l'Est, mais au Sud: c'est Daesh.

    PROPOS RECUEILLIS PAR ALEXANDRE DEVECCHIO 

     

  • Livres • Bienvenue dans le pire des mondes ... Plongée dans les abysses de la pensée dominante

     

    Par Jean-Paul Brighelli 

    Du Brighelli comme on l'aime : plume alerte, directe, détendue; analyses sans concession, percutantes, justes; intelligence en éveil au sens critique redoutable; et, volens nolens, ici résolument antimoderne. Instructif et délectable.  LFAR

     

    2304514035.2.jpgLe 23 ou 24 novembre dernier, j’ai acheté le Monde — je me souviens à peu près de la date, parce que l’événement est tellement rare qu’il fait tache : je n’ai pas trop à cœur de financer l’un des journaux officiels (avec Libé) de la mondialisation décomplexée.
    Gaïdz Minassian y étalait sa bêtise et sa collaboration à la pensée unique dans une critique du livre tout frais sorti, signé du Comité Orwell, Bienvenue dans le pire des mondes (chez Plon, qui a cru vendeur de mettre Natacha Polony sur la couverture : du coup, elle est l’invité préférentielle, et même quand elle est à l’antenne avec Jean-Michel Quatrepoint, c’est elle que Ruquier fait parler, alors même qu’elle n’a pas, dit-elle, « écrit les meilleures parties du livre »).

    Le Comité Orwell est composé de journalistes de tendance souverainiste — entendons qu’ils revendiquent la souveraineté de la pensée, au service de la souveraineté de la France.
    (Et déjà, j’ai bien conscience de ce qu’a d’incongru une telle phrase, à une époque où parler de « la France » est une offense à la diversité, aux communautés, aux indigènes de la République et au libre droit des individus à cracher à la figure de Marianne — et à choisir la servitude volontaire).
    Ils ont souvent côtoyé, justement, Marianne — le magazine, du temps où il n’était pas patronné par cette cornegidouille de Renaud Dély, qui y a ramené tout ce que l’Obs, où il sévissait auparavant, a de boboïsme vendu. Tant pis pour les amis que j’y ai encore, et qui font le gros dos en attendant que…
    Le Comité Orwell, qui compte donc quelques belles intelligences, a rassemblé ses idées en un corps de doctrine, et balaye en 200 pages serrées les questions d’éducation (louanges à un livre qui explique benoîtement aux politiques aveugles que c’est la pierre fondamentale, et que Najat Vallaud-Belkacem est le bon petit soldat de l’apocalypse molle dans laquelle nous entraîne le « soft totalitarisme » — c’est le sous-titre de l’ouvrage — mis en place par la mondialisation, l’Europe bruxelloise, et l’empire américain), d’économie — analyse tout à fait lumineuse —, la démocratie, « nouvel habit de la tyrannie », et de « l’art de dissoudre les peuples » dès qu’ils ne votent pas comme vous voulez. 

    Revue de détail.

    Orwell est convoqué — c’est bien la moindre des choses — dès les premières lignes : « Parler de liberté n’a de sens qu’à condition que ce soit la liberté de dire aux gens ce qu’ils n’ont pas envie d’entendre ». C’est que le radical de liberté a été pas mal galvaudé ces derniers temps, comme s’amuse à le faire (c’est un ouvrage très bien écrit, par des gens cultivés à l’ancienne, autant en profiter) la troisième phrase du livre : « Face à une idéologie dominante « libérale-libertaire », qui fait du libre-échange mondialisé un horizon indépassable et du primat de l’individu sur tout projet commun la condition de l’émancipation… »
    Disons tout de suite que c’est là la ligne de force du livre : l’atomisation du bien commun en appétits individuels, l’exaltation de l’individu afin de mieux l’asservir à ces appétits qui ne sont plus même les siens, mais ceux des firmes qui les concoctent et les leur vendent, et la combinatoire létale du néo-libéralisme (rien à voir avec le libéralisme tel qu’on le trouve par exemple chez Stendhal, où c’est essentiellement un refus de la monarchie constipée de la restauration : le néolibéralisme est « un modèle de libre-échange total et global »), et de cette pensée libertaire, nourrie de déconstruction, de « relativisme culturel » et de pédagogisme, qui s’est infiltrée dans ce qui fut jadis la Gauche et qui est aujourd’hui l’idiot utile de la dissolution nationale et du communautarisme (un gouvernement sensé commencerait par dissoudre le Parti des Indigènes de la république, dont le livre souligne assez qu’il tient un discours raciste). De la vraie liberté, plus de nouvelles. D’où « le sentiment que, par bien des aspects, nous ne sommes plus tout à fait dans ce qu’on peut appeler un régime démocratique ». Bref, la liberté, c’est l’esclavage — mais qui a lu 1984 était au courant.
    Comment ? Vous n’êtes pas pour l’ouverture ? Vous êtes donc pour la fermeture ? Le repli sur soi ? Le pouvoir a le pouvoir de manipuler les mots, il a tout ce qu’il faut de journalistes aux ordres et d’intellectuels auto-proclamés pour ça. Et ceux d’en face, ceux qui ne lèchent pas les cols de chemise de Bernard-Henry Levy, ne sauraient être que des « pseudo-z-intellectuels », comme dit l’autre.

    Pourquoi « soft totalitarisme » ? Par extension sémantique du « soft power » qui a pris le pouvoir dans notre monde sans guerre (sans guerre chez nous, quoique…) en diffusant un modèle culturel unique afin de mieux vendre un système économique unique. La grande réconciliation de Marx et de Gramsci. Le « It’s the economy, stupid » de Bill Clinton nappé d’une sauce TF1 / M6, afin que vous ne réalisiez pas que ce que vous mangez vous mange. Et de convoquer cette fois Huxley : « Un état totalitaire vraiment efficient serait celui dans lequel le tout-puissant comité exécutif des chefs politiques et de leur armée de directeurs aurait la haute main sur une population d’esclaves qu’il serait inutile de contraindre, parce qu’ils auraient l’amour de leur servitude. La leur faire aimer — telle est la tâche assignée dans les Etats totalitaires d’aujourd’hui aux ministères de la Propagande, aux rédacteurs en chefs des journaux et aux maîtres d’école. » C’est dans le Meilleur des mondes, et ça date de 1932. Avant même que le Propagandaministerium donne sa pleine puissance. Le soft totalitarisme est la revanche de Goebbels. La Boétie, je t’entends ricaner dans ta tombe !
    Bien sûr, c’est l’imminence de l’élection présidentielle qui a rendu urgentes la rédaction et la parution de ce livre. « Parce que la France ne peut se permettre de jouer une élection pour rien. Parce qu’elle est au bord de l’implosion, prise en tenailles entre le totalitarisme islamique et le soft totalitarisme dont la première caractéristique est qu’il ne se soucie nullement de cette barbarie qui n’entrave en rien sa progression. » Citoyen, si en avril prochain tu ne fais pas de ton bulletin de vote un pavé à lancer au visage de l’oligarchie qui ronronne aux manettes, il ne te restera plus qu’à te noyer dans le sirop d’oubli que te déversent le GAFA — Google / Apple / Facebook / Amazon — et Microsoft, qui n’entre pas dans l’acronyme, mais qui a su s’offrir l’Education Nationale française pour une poignée de cacahouètes.

    « L’Ecole fut le lieu de baptême de la démocratie ; elle en sonnera le glas ».
    L’accent mis sur l’oral (qui remonte quand même aux années 1960, sous la férule, à la DGESCO, d’un certain René Haby), la répudiation de toute culture autre que le fast food pour neurones atrophiés, et jusqu’à la réforme du collège et son cortège d’EPI, tout concourt à « la destruction des barrières culturelles freinant le déploiement généralisé du néolibéralisme et de son corollaire, la globalisation », et au « formatage des individus pour qu’ils adhèrent avec ferveur au modèle qui leur est proposé dans une insistance toute bienveillante ». Voilà comment en trois décennies ont a transformé en cancre un système éducatif qui fut le meilleur du monde — mais l’élitisme, c’est mal. L’éducation, rappelle les auteurs, fut jadis libérale — rien à voir avec les abus ultérieurs du terme : « Cette expression désigne une conception humaniste de la transmission des savoirs à travers l’étude des grandes disciplines » — voir la lettre de Gargantua à Pantagruel : « Maintenant toutes les disciplines sont restituées, les langues instaurées, le grec sans lequel il est honteux qu’une personne se dise savante, l’hébreu, le chaldéen, le latin. Des impressions fort élégantes et correctes sont utilisées partout, qui ont été inventées à mon époque par inspiration divine, comme inversement l’artillerie l’a été par suggestion du diable. Tout le monde est plein de gens savants, de précepteurs très doctes, de librairies très amples, tant et si bien que je crois que ni à l’époque de Platon, de Cicéron ou de Papinien, il n’y avait de telle commodité d’étude qu’il s’en rencontre aujourd’hui. » Du XVIème au XIXème siècle, magnifique progression. Du XXème au XXIème siècle, remarquable régression. Voici que l’éducation, via les « compétences » imposées par la Stratégie de Lisbonne en 2000 (« les compétences sont la version moderne et technocratique des ces « savoir-faire » et « savoir-être » que des pédagogues bienveillants ont voulu substituer aux savoirs jugés élitistes et discriminants »), n’a plus pour but que de développer l’employabilité des futurs consommateurs — un mot qui commence mal. L’employabilité, mais pas l’emploi effectif. Dans le cauchemar climatisé des transhumanistes, l’espèce humaine se robotisera ou disparaîtra. Déjà Lactalis ne fabrique plus l’infâme truc plâtreux et pasteurisé appelé « camembert Président » qu’avec deux employés. Le reste, c’est le tour de main de la machine.
    Et contrairement à ce que nous serinent la plupart des politiques, « la globalisation n’a pas oublié l’éducation, c’est même son terrain de jeux prioritaire ». Parce qu’il est de toute première urgence de fabriquer les citoyens modèles d’un monde où la volonté des multinationales s’est substituée déjà au pouvoir des Etats — et que c’est l’un des enjeux centraux des échéances à venir : soit vous votez pour des partis qui veulent restaurer l’Etat et la Nation, soit vous êtes morts en croyant être vivants.
    La cible de choix de ses processus déstructurants, ce sont les classes moyennes, dont la lente émergence avait constitué l’histoire du XVIIIème au XXème siècle. Parce que c’est l’envie de culture, associée à l’envie de mieux-être de ces classes mouvantes qu’il faut éradiquer — et qui est le noyau dur de la résistance à la mondialisation. Se cultiver, c’est entrer dans le champ illimité du libre-arbitre. Déculturer le peuple, c’est ce à quoi se sont ingéniées toutes les politiques éducatives depuis trente ans ou quarante ans : le livre analyse en détail ces trois temps forts que furent la renonciation à la convertibilité du dollar en 1971, le tournant de la rigueur en 1983 et la célébration du bicentenaire en 1989, coïncidant avec les premières tergiversations sur le voile islamique et à trois mois près avec la chute de la maison Russie. La méritocratie permettait à quelques fractions du peuple d’accéder à l’élite — qui n’entend plus aujourd’hui laisser la moindre part de gâteau à des enfants exogènes à l’oligarchie dominante. Voter pour les mêmes, c’est se condamner, et condamner vos enfants, à stagner à tout jamais — en fait, à régresser sans cesse jusqu’à ce qu’un salaire universel minimum — les Romains faisaient déjà ça très bien dans les cirques où étaient célébrés les jeux du cirque et de TF1, avec distributions de blé afin de nourrir les (télé)spectateurs — leur permette de végéter sur les mages d’un système qui se goinfrera sur leur dos. On y est presque — la Finlande, ce modèle des anti-modèles qu’on nous sert depuis quinze ans que PISA décide de nos destinées, vient de s’y mettre.
    J’avais pris une foule de notes supplémentaires — c’est un livre très dense, dont chaque phrase fait mouche et ouvre la pensée sur les abysses de la pensée dominante. Jamais Cassandre n’a parlé avec tant d’éloquence. Mais je vais en rester là — vous n’avez qu’à l’acheter, vous ne serez pas déçus. 

    Jean-Paul Brighelli
    Enseignant et essayiste, anime le blog « Bonnet d'âne » hébergé par Causeur.

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    Comité Orwell

  • « La monarchie permettrait de rétablir les équilibres et de garantir les libertés »

     

    Le prince Jean de France, nouveau comte de Paris, est intervenu à plusieurs reprises dans le cours de la Semaine Sainte sur différents organes de presse – Le Figaro, L’écho républicain – pour dire son souci de la France, après l’incendie qui a ravagé Notre-Dame de Paris. C’est ce souci de la France, dégagé de toute visée électoraliste, qui guide la pensée du Prince et qu’il veut bien confier à Politique magazine.

    Monseigneur, comment percevez-vous la campagne des européennes et l’alternative que pose Emmanuel Macron, « moi ou le chaos » ?

    C’est un peu binaire comme vision des choses ! Il faut toujours faire attention aux formules chocs, qui sont là pour marquer les esprits. Il y a certainement d’autres voies, dont une, le concert des nations, qui est une expression qui me plait. Dans le monde tel qu’il est aujourd’hui, le concert des nations et le modèle de construction européenne qu’il suppose devraient être ce qui oriente la campagne. Il y a de nombreux enjeux, dans ces élections. Nous sommes le seul pays où la majorité en place, à chaque élection européenne, est élue de manière très inconfortable. L’Europe est-elle mal aimée, les Français, déjà inquiets pour eux-mêmes, sont-ils très inquiets vis-à-vis de cette instance supranationale qui paraît peu concrète et viser plus le consensus que le bien commun ? Pour le moment, on ressent surtout le désamour caractéristique des Français pour les élections.

    Ils s’expriment autrement, par exemple avec les Gilets jaunes, qui ont montré que certains Français étaient au bord de l’exaspération à force de se sentir ignorés, voire méprisés : comment ressentez-vous l’état du pays ?

    Les Gilets jaunes, si l’on met de côté les débordements qu’on connaît, expriment les multiples fractures qui existent en France, entre riches et pauvres, entre gens des villes et gens des champs, entre ceux qui sont “dans le système” et ceux qui sont hors système, entre ceux qui triment et ceux qui bénéficient de la conjoncture, etc. Ce sont ces oppositions telles qu’elles se sont creusées depuis une trentaine d’année qui surgissent, dans un ras-le-bol général où les Français réclament un travail décent, des écoles pour leurs enfants, une retraite qui leur permette de vivre après avoir donné du temps à leur pays, une couverture sociale suffisante, un environnement agréable et sécurisé… La base, quoi, alors que tout ceci est plutôt laissé de côté par une nomenklatura urbaine hors-sol qui ne comprend pas que ceux qui ne votent pas et ne manifestent pas puissent rêver d’autre chose que de leur projet.

    N’y a-t-il pas aussi chez eux le refus d’une impuissance de l’État à agir sur la réalité ?

    Il y a certainement une impuissance de l’État, puisque l’Union européenne a pris le pas sur le périmètre d’influence de l’État français. D’autre part, l’État ne s’intéresse plus au bien commun, ni au service de la France et des Français. Ce sont deux moteurs qui vont de concert.

    Quand on ne maîtrise plus la monnaie ni la loi, ni la sécurité (80 zones de non-droit, outre les incivilités permanentes !), que reste-t-il ?…

    Je suis d’accord, nous sommes désormais dans une France liquide dans une Europe sous influence comme dit Philippe de Villiers. Cette Europe autoproclamée a en fait été programmée pour et par les États-Unis.

    Outre les Gilets jaunes et leur démonstrations spectaculaires, les enquêtes du Cevipof montrent, depuis dix ans, que les Français ont de moins en moins confiance dans le personnel politique. L’idée d’un gouvernement débarrassé des contraintes de la démocratie participative recueille même un assentiment assez fort. Y a-t-il une impossibilité institutionnelle, en France, à entendre ce genre de discours ?

    Je ne sais pas s’il faut parler d’impossibilité institutionnelle, mais il y a une désaffection des Français pour leurs politiques, qui se sont détournés de leur vocation première et ont laissé le système confisquer tous les moyens d’expression, tous les sujets de débat, au point que la liberté en pâtit. Alors que c’est une liberté nécessaire de pouvoir s’exprimer et d’être entendu. Par ailleurs, dans un tel système, la seule déclinaison possible est une manière de despotisme, éclairé ou non, selon ce qu’en disent des Européens convaincus, comme M. Delors. Alors que « le Prince en ses conseils et le peuple en ses états », c’est-à-dire la monarchie, permettrait de rétablir les équilibres et de garantir les libertés, sans glisser vers le despotisme tel qu’il est aujourd’hui exercé dans les pays où les gouvernements sont dans l’idéologie globalisée du moment.

    Cette crise de confiance, qui amène dans certains pays des réponses institutionnelles particulières, ne vient-elle pas aussi du fait que l’Union européenne doit faire face à deux gros problèmes, une immigration qui fracture les populations nationales et les divise en communautés hétérogènes, sans culture commune, et l’apparition d’un islam public très revendicatif réclamant que les cultures nationales s’adaptent à ses impératifs ?

    L’islam s’accommode très bien de l’idéologie du moment qui entraîne une partition de la population française, en fonction de la religion, des communautés, des intérêts divergents. Cette partition lui permet d’avancer. On ne peut considérer sans inquiétude, voire une certaine angoisse, les pays musulmans aujourd’hui, et le sort réservé à ceux qui n’ont pas cette religion. “L’islam modéré” ne sera qu’une étape, et comme il y a plusieurs islams, on peut qu’être perplexe quant à ce que cela va donner. Il faut évidemment retrouver un socle commun, culturel, historique, religieux.

    L’incendie de Notre Dame et les réactions qu’il a suscité prouvent-ils que ce socle commun existe et n’est que recouvert par la poussière des discours médiatiques ? La France se sent-elle toujours chrétienne dans ses racines sinon dans ses mœurs, avec son histoire et sa culture ?

    J’aimerais penser qu’il s’agit en effet de quelque chose de profond, et que l’idéologie relative du moment ne fait que recouvrir ce socle. On voit que le fonds chrétien ressort, une foi culturelle dans laquelle ont baigné nos hommes politiques.

    Comment le roi peut-il créer et maintenir la concorde nationale dans un pays où une part significative de la population est musulmane ?

    L’inspiration lui viendra quand le moment sera venu ! Ensuite, si le roi est aussi le protecteur des chrétiens, la vertu exige que la foi musulmane puisse s’exprimer sans remettre en cause l’état de droit : ce sera là le point d’équilibre.

    Monseigneur, comment ce roi protecteur des chrétiens peut-il travailler avec une église catholique en crise, d’une part, mais d’autre part très acquise aux valeurs de la république et à une interprétation de plus en plus humaniste du message de l’Évangile ?

    L’Église doit régler clairement et fermement ses problèmes internes, c’est une chose. Sur le second point, depuis Léon XIII, pour ainsi dire, l’Église a changé sa politique générale, qui était de s’appuyer sur les chrétiens pour avancer dans l’espace public. Le nouveau système finit par la dissoudre : dans la lettre des évêques de France, « Retrouver le sens du politique », publiée avant les dernières élections présidentielles. Il n’y a quasiment aucune références théologiques et philosophiques… Il n’y a pas de chapitre sur le travail, alors que c’est une valeur de base pour les chrétiens. L’Église a été évincée, s’est évincée, de toutes les sphères où elle aurait pu et dû marquer sa différence. Son influence est devenue plus limitée.

    Le roi, étant donné le tableau qu’on vient de dresser, devrait-il se borner aux fonctions régaliennes classiques (police, justice, armée, monnaie) ou, au moins pendant un temps de transition, tenir compte de l’importance considérable pris par l’État en France et de l’ampleur non moins considérable des problèmes que l’État n’a pas réglés, comme le désastre environnemental ?

    Bien sûr, c’est nécessaire. Et les rois ont toujours été des têtes de pont en matière environnementale. Il faut s’inscrire sur le long terme. L’environnement, et les questions sociales, et j’ai sur ce sujet la même sensibilité que mon grand-père : le Prince doit s’intéresser à ces questions-là. C’est un élément fort de pouvoir travailler sur ces sujets. Et il n’y a que les Princes qui peuvent agir : seul le roi est capable de poursuivre le bien commun tout en respectant les populations. Mieux vaut être petit, cela dit, comme le dit le prince du Liechtenstein.

    Aujourd’hui, la France n’est pas petite et le gouvernement d’une nation est enserré dans un tissu serré de relations internationales. Comment théoriser un pouvoir national aujourd’hui ?

    La seule chose qui fonctionne, c’est le principe de subsidiarité, qui s’appuie sur la confiance : les hommes sont faits pour vivre ensemble et s’ils s’entendent ils vivent mieux. C’est ça, le bien commun. Aujourd’hui, on pousse l’homme, par l’individualisme, à assumer ses désirs jusqu’à ce qu’on lui supprime ses libertés. Ce qui gouverne nos sociétés, c’est la défiance, l’idée que l’homme est un loup pour l’homme. Il faut changer de philosophie politique. Et on en revient au concert des nations : le concert n’exclue pas les fausses notes mais il y a une partition, une liberté d’interprétation et une volonté de jouer ensemble, chacun avec son talent.

    Monseigneur, comment voyez-vous votre rôle ici, en France, en 2019 ?

    Déjà comme chef de famille, dans une relation apaisée. Et je veux m’impliquer plus dans la vie de mon pays, par la parole et par les actes, avec des relations plus fortes avec l’État et des structures intermédiaires, avec les populations. Je parlerai plus fréquemment, et j’espère que mes actes seront à la hauteur. C’est important que le chef de la Maison de France soit présent.   

    Propos recueillis par Jean Viansson-Ponté et Philippe Mesnard

    Voir dans lafautearousseau ...
    Monseigneur le Comte de Paris, Famille de France
  • Retraites ...

    Par Yves Morel 

    Retraite-800x360.jpgLes leçons de la réforme des retraites par Macron 

    Édouard Philippe a annoncé le gel de la revalorisation des pensions de retraite en 2019. Celles-ci ne seront plus indexées sur l’inflation ; les retraités verront leur pension augmenter de 0,3% seulement, alors que la hausse des prix atteint déjà 2,3%. Leur revenu, déjà rogné par la hausse de la CSG, va donc encore diminuer. Or, on sait que, dans l’immense majorité des cas, il frôle la pauvreté, quand il n’est pas carrément dedans.

    Une réforme des retraites entreprise au détriment des retraités

    Par ailleurs, la réforme des retraites va être mise en chantier. Elle va constituer en l’institution d’une retraite par points de type unique, qui se substituera à tous les systèmes existants et qui fera que chaque euro cotisé « donnera droit » à un point de retraite. Fini, donc le calcul de la retraite sur les six derniers mois de carrière (pour les fonctionnaires) ou les vingt-cinq meilleures années de travail (pour les salariés du privé). Résultat prévisible, selon de nombreux économistes : 90% des salariés atteindront l’âge de la retraite sans pouvoir prétendre à un niveau décent de pension. Un recul social sans précédent. On estime qu’un retraité touchant une pension de 1300 euros va perdre 578 euros annuels, du fait de l’augmentation de la CSG (qui est certainement appelée à se poursuivre) et de la non-indexation des pensions sur la hausse des prix. A cela, il convient d’ajouter les amputations découlant de la suppression de l’abattement fiscal de 10% sur le calcul des revenus imposables, et la suppression de l’avantage accordé à ceux qui ont élevé trois enfants ou plus. Enfin, les pensions complémentaires de retraite risquent bien de diminuer, elles aussi, puisque le système fusionné AGIRC-ARRCO aura la faculté de moduler le niveau des pensions en fonction de la conjoncture.

    Décidément, les retraités ne vont pas connaître des lendemains qui chantent.

    Le choix des forts contre les faibles

    Mais Macron et Philippe assument résolument leur choix, celui – à les en croire – des actifs contre les inactifs (même si les retraités ont travaillé dur pendant plus de quarante ans), du travail productif, de l’investissement « créateur de richesses ». Philippe a déclaré au JDD :

    « Nous assumons une politique de transformation et de maîtrise des dépenses qui privilégie, je le redis, la rémunération de l’activité et qui rompt avec l’augmentation indifférenciée des allocations. C’est par le retour à l’activité et une meilleure rémunération du travail que notre pays sera plus prospère». Donc, tout pour le business, dans le respect de l’orthodoxie budgétaire de Bruxelles. Encourageons les forts et les nantis, pour aller de l’avant, et laissons tomber les passifs, les poussifs, ceux qui se contentent de faire honnêtement leur travail, ceux qui ont le malheur de le perdre (chômeurs) et ceux qui ne peuvent plus travailler (retraités). Vive les winners, à bas les loosers ! »

    Macron est le président des forts, des malins, des délurés, des débrouillards, des futés, des combinards et des bobos, et l’ennemi des inhabiles, des faibles, des fragiles, des distraits, des rêveurs, de ceux qui n’ont pas d’autre ambition que de mener une vie honnête de travail régulier, qui n’ont pas un tempérament d’entrepreneur, qui ne savent pas nager dans le marigot social, qui ne savent pas « s’y prendre », ni « y faire », et qui ont donc besoin d’un filet de sécurité pour ne pas se perdre et connaître la déchéance.

    L’aboutissement social logique d’un monde déshumanisé et individualiste

    Voilà où mène un monde individualiste, déchristianisé, déshumanisé, sans charité, où chacun est seul face aux autres, dans une société qui n’est plus une 590608b6c36188e6718b4615.jpgcommunauté, mais une jungle, dont la seule valeur est l’argent et dont les bourses et les banques sont les temples. Voilà l’aboutissement du grand vent libérateur des sixties et de ce mai 1968, dont Macron s’est fait le laudateur. Il est d’ailleurs révélateur que Daniel Cohn-Bendit, le vieux leader de mai 1968 se sente comme un poisson dans l’eau dans le monde néolibéral d’aujourd’hui, et soit un partisan convaincu de Macron.

    Bientôt, les retraités devront chercher un emploi pour compléter leur maigre pension. Puis, on expliquera qu’il appartient à tout un chacun de se créer lui-même sa propre protection sociale.

    Il y a peu, Macron exprimait son dédain à l’égard d’ « un modèle social qui ne sale plus… et où le summum de la lutte des classes était l’obtention d’une somme modique d’APL ». Son modèle social, à lui, se résume de la façon suivante. On dit aux chômeurs : « créez votre start up ». Vous n’avez pas d’argent : persuadez un banquier de vous accorder un prêt. Vous n’avez pas la fibre d’un chef d’entreprise, ou votre conseiller financier vous refuse un prêt ? Tant pis pour vous. Votre pension de retraite est insuffisante ? Remettez-vous au travail. Laissons tomber ceux qui, n’ayant pas une mentalité d’entrepreneur, se contentent de vouloir un travail et une situation sociale stable. Et préférons les actifs et les « créateurs de richesses » aux retraités.

    L’erreur révolutionnaire et jacobine

    Certes, il convient, ici, d’incriminer le néolibéralisme mondialiste actuel, ce que nous faisons présentement, mais également notre modèle républicain.

    Sous l’Ancien Régime, des corps intermédiaires politiques (municipalités), judiciaires (parlements) et professionnels (corporations) donnaient consistance, souplesse et capacité d’adaptation aux communautés naturelles du royaume, créaient une symbiose entre le pouvoir et la société, et permettait à l’État de remplir ses fonctions régaliennes sans se charger de la responsabilité écrasante de toutes les composantes de la nation. Garant du droit, l’État faisait respecter (définissait, au besoin) les règles de la vie économique et sociale sans se substituer aux agents de celle-ci dans la conduite de leurs affaires. Il existait ainsi un espace social autonome régi par un droit plus coutumier que positif.

    maxresdefault.jpgOr, cet espace disparut sous la Révolution. L’application dogmatique des principes de la souveraineté nationale et de l’égalité de tous devant la loi conduisit à la suppression de ces corps, et institua un face-à-face de l’individu et de l’État. La loi Le Chapelier (14-17 juin 1791) prohiba toutes les formes d’associations que les travailleurs et les employeurs eussent pu créer en vue de défendre « leurs prétendus intérêts communs ». D’une manière générale, la loi ne reconnut que des individus égaux contractant en toute indépendance et seuls responsables de leurs intérêts propres. A ses yeux, les intérêts économiques et professionnels ne pouvaient être que des intérêts individuels. Le champ social se dissolvait dans les deux pôles de l’individu et de l’État. Certes, la situation a bien évolué depuis ce temps. Mais il en est resté quelque chose, une tradition rédhibitoire qui accorde à l’État un rôle essentiel dans le règlement des rapports entre employeurs et salariés, et qui légitime à l’avance son intervention constante et les sollicitations innombrables qui lui sont adressées. Dans son Rapport fait au nom de la commission chargée d’examiner le projet de loi relatif aux coalitions (1864)Emile Ollivier déclare, à propos de la conception que Le Chapelier fit prévaloir 73 ans plus tôt « Nous saisissons à son origine, dans cette théorie exposée par Le Chapelier, l’erreur fondamentale de la Révolution française. De là sont sortis tous les excès de la centralisation, l’extension démesurée des droits sociaux, les exagérations des réformateurs socialistes ; de là procèdent Babeuf, la conception de l’État-providence, le despotisme révolutionnaire sous toutes ses formes ».

    En vain, certains républicains, tels Ferry, puis Gambetta, préconisèrent le règlement ponctuel et pragmatique des problèmes professionnels et sociaux par la libre activité associative et syndicale plutôt que par l’intervention systématique de l’État. Leur conception ne prévalut pas. Les radicaux (Clemenceau) firent ressortir au domaine de compétence des pouvoirs publics le règlement des problèmes sociaux. Grâce à l’adoption, par voie parlementaire, de réformes faisant l’objet d’un programme soumis aux électeurs, les hommes politiques devaient élever la condition matérielle et morale du peuple et engendrer une société égalitaire tenant les promesses de l’idéal de la Révolution. Il est à noter que, dans le camp socialiste, Jaurès fit prévaloir des vues analogues à partir de 1906. Et ce sont elles qui finirent par prévaloir à gauche et chez une majorité de Français.

    Ainsi naquit ce terrible mal français qu’est l’idéologisation et la politisation des questions sociales, et, par voie de conséquence, l’institution d’un pseudo État-providence jacobin, aujourd’hui incapable de remplir sa mission. Et, du coup, toute réforme de notre législation sociale se présente comme un démantèlement de ce dernier et une entreprise de destruction de toute protection des travailleurs, en l’absence de l’existence d’une longue habitude de la pratique de la négociation sociale entre organisations syndicales et patronales dans un esprit dénué d’idées de lutte de classes ou de revanche sociale, et permettant à chacun des partenaires de faire des concessions à l’autre en un souci de défense de l’intérêt commun (celui de l’entreprise et celui de la nation). C’est pourquoi la France échoue, en la matière, là où réussissent (certes difficilement et imparfaitement) des pays où un tel esprit existe, comme les pays scandinaves ou l’Allemagne. Elle échoue parce qu’en 51M2n5qLLML._SX299_BO1,204,203,200_.jpgFrance, la société, c’est l’État, et l’État, c’est la République jacobine avec sa vieille promesse révolutionnaire d’égalité sociale. Cette conception maléfique de l’ordre politique et de la société et de la fusion de l’un et de l’autre a pour conséquence que l’État républicain doit continuer à gérer un système de protection social qui n’en peut plus, qu’il ne peut le réformer qu’en le mutilant ou en le détruisant, et que s’il le fait, il devient, par là même, un pouvoir instaurant délibérément une société inégalitaire, et privilégiant les uns au détriment des autres. Il ne peut se réformer qu’en se niant, en faisant seppuku.

    Voilà à quelle impasse politique et éthique nous a amené notre République, étayée sur le souvenir et les principes de notre grande Révolution, dont nous nous montrons si fiers encore.

    La nécessité de renouer avec l’humain

    La réalisation de la justice sociale dans un esprit communautaire et fraternel compatible avec l’intérêt national ne résidait ni dans un Etat providence jacobin appelé à être condamné par l’ouverture des frontières et la crise économique, ni dans les prétendus effets bénéfiques à long terme d’une politique néolibérale et mondialiste qui favorise les forts et écrase tous les autres (dans le soi-disant intérêt des générations futures, censées tirer parti de ce sacrifice). Elle siégeait dans les corps de métier, les corporations, les associations d’aide et d’entraide, et la pratique d’une négociation inspirée par la solidarité nationale et chrétienne. Cela, nous l’avions sous l’Ancien Régime, et nous l’avons bêtement détruit en 1791. Si nous avions l’intelligence de le retrouver, nous pourrions édifier enfin une politique sociale juste et humaine.   

    Docteur ès-lettres, écrivain, spécialiste de l'histoire de l'enseignement en France, collaborateur de la Nouvelle Revue universelle 
  • La France périphérique et les oubliés de la politique : quel remède ? (partie 3), par Fabrice VALLET (Juriste).

    OPINION. La France des oubliés identifiée par le géographe Christophe Guilluy a explosé à la figure d’un système médiatique aveugle à travers les Gilets jaunes. Comment ce phénomène de déclassement géographique a-t-il été enclenché ? Cette France des gens ordinaires parviendra-t-elle à se faire entendre en 2022 ? Éléments de réponse dans cette analyse en trois volets.

    L’enfermement d’une élite dans son arrogance technocratique ou clanique revient à culpabiliser les laissés-pour-compte de la mondialisation néolibérale, sans solution de rechange depuis 40 ans. Cet autisme venu d’en haut implique une reformulation des propositions citoyennes, notamment celles des Gilets jaunes, pour leur donner une légitimation institutionnelle, mais aussi dans les actes de la vie quotidienne, qui puisse répondre au besoin actuel, d’équité sociale et de défense du bien commun. Si la croissance est nécessaire à la survie du capitalisme, elle apparaît de plus en plus contradictoire avec la survie de l’humanité.

    Il est primordial que se réalise, à l’échelle internationale, une réappropriation du capital, en renationalisant tout ou partie du crédit. La maîtrise du crédit constitue l’un des leviers les plus efficaces dont dispose une collectivité autonome pour orienter la production des biens fondamentaux à travers un cahier des charges lié aux prêts (dans le sens de l’intérêt collectif). Notre société doit offrir aux PME tous les moyens de s’intégrer au marché, par le biais d’un système de crédit populaire destiné à favoriser les investissements les plus bénéfiques pour la collectivité, c’est-à-dire les investissements privilégiant la valeur d’usage réelle et la qualité finale du produit.

    Quelles solutions aux défis de la France périphérique

    D’ores et déjà, dans la formation aux métiers recherchés, il est nécessaire de créer des universités des métiers et arts de vivre, croisant les savoirs et techniques, pour revaloriser la restauration, l’habitat, l’ameublement en transmettant l’histoire de l’art aux jeunes générations. Dans cet esprit, il est temps d’investir dans la rénovation externe, interne et énergétique du bâti ancien en cours d’abandon. La transmission des savoir-faire et expérimentations est à encourager dans le BTP dans le cadre d’un vaste plan de restauration du patrimoine architectural de notre pays. En matière de construction, la rénovation du bâti ancien pourrait s’opérer selon des normes techniques allégées qui prendraient en compte la durabilité des bâtiments, leur esthétique et leur adaptation à des normes écologiques intégrées aux paysages. Une industrie du bâtiment pourrait susciter un plan de mise en valeur des carrières ce qui permettrait de relancer les métiers de la pierre, en lien avec la restauration du patrimoine et d’éventuelles techniques mixtes de construction. De même, reconstruire une filière bois qui soutienne le bâtiment dans toutes ses exigences n’est pas utopique, comme dans la ferronnerie. De plus, on pourrait affecter, de plus, aux opérateurs touristiques des villages anciens et des hôtels à rénover et subventionner les réalisations de maisons végétalisées et de bâtiments à énergie positive.

    Dans les périphéries urbaines et dans les campagnes, un nettoyage et un démontage des installations commerciales ou industrielles pourraient donner lieu à une reconversion de ce tissu économique révolu, en des zones de services de proximité. On pourrait, dans le même sens, réallouer à des entreprises commerciales des pâtés de maisons pour relocaliser des activités de banlieue en centre-ville. En effet, l’installation de populations pauvres au sein des centres des villes moyennes accentue la répulsion touristique, surtout dans les pays, à l’écart des grands flux.

    Dans la filière agricole, il faut défiscaliser la production jusqu’à un certain chiffre d’affaires pour maintenir une agriculture paysanne. Mais aussi favoriser la reconquête des champs et pâturages par le bétail, tout comme favoriser l’abattage local des animaux. Dans ce sens, la recréation d’une filière viande de gibier, comme d’une pêche et d’un élevage fluvial est parfaitement envisageable. En outre, il faut associer les agriculteurs, en réorientant les primes européennes sur la production des paysages, la diversité biologique, la qualité ou la protection des patrimoines ruraux. Bien entendu, il est nécessaire de mettre un moratoire sur les nouvelles destructions de terres agricoles afin de lutter contre l’artificialisation des sols. Dans le domaine de l’aménagement du territoire, il doit revenir aux structures intercommunales de planifier localement les investissements et la répartition des activités économiques en plafonnant les mètres carrés commerciaux de banlieue par un ratio raisonnable relatif au nombre d’habitants des communes.

    Il serait utile, face au modèle économique de la métropolisation, de façonner un autre paysage, en délocalisant plusieurs centaines de milliers d’emplois et d’activités publics au profit des petites villes et moyennes (universités, casernes, hôpitaux, services techniques, prisons, maisons de retraite et centres sociaux). D’ailleurs, l’État pourrait inciter fiscalement les entreprises non exposées à la concurrence internationale à (re)créer des milliers d’emplois de services à la personne, comme des concierges, des gardiens, des pompistes, des contrôleurs, des surveillants, des manœuvres, des transporteurs. Enfin, l’État pourrait soutenir une réindustrialisation sectorielle et régionale dans une douzaine de secteurs prioritaires (matériaux, agroalimentaire de qualité, machines, électronique).

    La pandémie internationale du Covid-19 nous incite à redoubler de vigilance concernant les expérimentations médicales et les manipulations génétiques qui induisent une foultitude d’intérêts étatiques, privés et de groupes d’influence. C’est pourquoi il est absolument essentiel que la recherche sur laquelle se fonde la légitimité alléguée des laboratoires pharmaceutiques soit nationalisée et que les produits médicaux soient contrôlés par la sécurité sociale qui contrôle de bout en bout la validité de la production médicale, son efficacité, son innocuité, et son prix de vente.

    Revenu d’une classe politique gestionnaire de droit divin, autosatisfaite & sourde au malaise populaire, un nouveau comportement politique doit apparaître. Cette nouvelle attitude, faite d’attention, de dialogue, de sympathie et de main tendue, permettra, seule, qu’une alliance de la France entreprenante et du tiers état composé des exclus ou de la France smicardisée advienne lors des prochaines élections présidentielles en France. Concilier « fin de mois » et « fin du monde » est la condition sine qua non pour créer les conditions de la croissance et de la compétitivité au regard des limites des ressources planétaires et des risques écologiques afin de redonner l’espoir qu’un ordre plus juste est possible.

    Les réformes institutionnelles nécessaires à notre temps

    La religion du transhumanisme qui infuse dans nos sociétés nous incite à revenir à la base même de la démocratie. Ainsi, nous devons instituer des assemblées populaires permanentes dans les quartiers, les villages et les entreprises pour surveiller l’activité des élus du peuple, avec droit de révocabilité. La reconnaissance du vote blanc et de l’abstention au moyen d’un quota minimum de votants en deçà duquel l’élection est invalidée, est une proposition valable. Tout comme l’institutionnalisation pour les questions d’organisation des pouvoirs publics, l’indépendance de la nation, l’intégrité de son territoire, les libertés fondamentales, la protection sociale et le droit du travail, d’un Référendum d’initiative citoyenne. Assurer une représentation élue sur une base territoriale et une représentation proportionnelle, sur une base programmatique nationale à tous les niveaux de décision, trace un autre chemin. Convoquer une chambre représentative des mouvements associatifs et syndicaux en lieu et place du Sénat est une nécessité participative. Il existe, enfin, dans nos sociétés, une multitude de fonctions collectives où le recours au tirage au sort parmi les volontaires permettrait de redonner au peuple le sentiment qu’il peut participer au gouvernement de la cité.

    De nouvelles méthodes de gestion des services publics doivent se développer pour faire face à la sclérose d’une administration aux mains d’une féodalité notabiliaire ou de technocrates coupés de la réalité. La logique de projet consiste à construire un champ de forces autour d’un problème et autour d’un individu porteur de projets. Cela permet une gestion de la demande sociale et un partage des risques afin de réduire les coûts. Cela permet de construire un dispositif ad hoc labellisé a posteriori par l’obtention de financements publics. Une autre voie est de traiter les problèmes sociaux au cas par cas. Le système du case manager présente une double caractéristique : d’une part, l’individualisme du cas ou des besoins et d’autre part l’ouverture au privé. Cela permet non seulement d’ouvrir des droits qui tiennent compte des situations personnelles, mais aussi de minimiser les coûts pour la collectivité en instaurant une concurrence entre producteurs de services. Ces deux méthodes de gestion permettent in fine de concevoir des objectifs et de dégager des moyens propres à les atteindre. Il est enfin temps d’établir une corrélation des moyens mis à disposition des services aux résultats escomptés pour satisfaire les besoins du public. Cette prise en considération des personnes avant celle des biens correspond à une exigence fonctionnelle : disposer d’autorités jouissant à la fois de la confiance des populations et de la connaissance précise de leurs territoires d’application, pour établir un nouveau contrat social.

    Retrouver l’appartenance à la collectivité

    Après avoir voulu changer la vie, la politique nationale a changé d’avis, naviguant au gré des vents contraires de la globalisation libérale entre vouloir combattre la finance ou « karcheriser » les racailles, sans que ni l’un ni l’autre ne produise de résultats. Aujourd’hui, après avoir remplacé la solidarité sociale par la charité, en installant un nouveau peuple de damnés dans le chômage à perpétuité, la nouvelle oligarchie tend à substituer, à la question sociale, la question ethnique, par une lutte des races. Revenus de dirigeants dont les promesses n’engagent que ceux à qui elles sont faites, les citoyens entendent faire confiance à une véritable élite qui pense la société et agit, au-delà de ses intérêts immédiats. C’est l’inégalité considérable face au risque qui provoque le ressentiment à l’égard d’autres groupes et de leurs représentants politiques qui tirent les bénéfices du changement en se désintéressant du sort des perdants.

    Depuis 40 ans, les citoyens ont l’impression de se sentir étrangers dans leur propre pays par une perte d’appartenance à la collectivité et la blessure de se trouver sur le marché du non-travail comme des articles en solde, ni repris ni échangé. Dès lors, un leader courageux, simple, audible, accessible, proche des gens, un véritable contrepoids aux puissants, peut devenir le recours. Comprendre la nature véritable d’une société donnée est plus aisé lorsqu’on est contraint de l’observer d’en bas. Sans nul doute, l’année prochaine, la reconstruction en profondeur de la vie politique française passera par des personnalités n’ayant pas exercé de responsabilités politiques, économiques ou administratives. C’est la condition sine qua non pour combler le déficit démocratique et réduire le gouffre entre ceux qui vivent dans le même pays, deux existences distinctes, à l’école, dans la rue, dans le train, dans le hall d’immeuble, derrière la porte de l’appartement.

    Il est temps que chacun soit l’enseignant de son prochain en lui apprenant le secret de ce qu’il est, différent, unique, irremplaçable, et enfin, une culture révélant à chacun comment accueillir la force de résister à la tentation de la haine, le courage du geste fraternel et le pouvoir libérateur de l’amour.

     

    Fabrice VALLET
    Juriste
    Juriste de formation et doté de cinq diplômes d’enseignement supérieur, il dirige actuellement une association d’insertion dans les quartiers prioritaires de Clermont-Ferrand. Il a travaillé pour le Ministère de la Cohésion sociale, de la Justice et pour la Présidence de la République.Il est l’auteur de plusieurs articles, notamment « Sauver notre modèle social aujourd’hui » et « L’Euro : croissance ou chômage ? ». Il a participé à Nuit debout et aux Gilets Jaunes.

    Source : https://frontpopulaire.fr/

  • Fermeture de 14 réacteurs : un gâchis financier, humain et climatique, par Philippe Murer.

    Sources : https://www.causeur.fr/

    http://leblogdephilippemurer.com/

    Un décret du gouvernement du 23 avril, passé inaperçu dans cette période d’épidémie, grave dans le marbre la fermeture de 14 réacteurs nucléaires pour les 15 années à venir[1].

    2.jpgUn terrible gâchis climatique, financier et humain.

    Ces 14 réacteurs représentent le quart du parc nucléaire français. Les centrales nucléaires, décriées par les écologistes, ont pourtant rendu un sacré service au climat en économisant depuis 40 ans de gigantesques quantités d’émission de CO2. Elles rendent aussi un service important à l’emploi et à l’économie française puisque la filière nucléaire emploie 250.000 personnes. Le gâchis financier qui résulterait de leur mise à la casse est lui aussi énorme, la construction des centrales françaises ayant coûté 96 milliards d’euros selon la Cour des Comptes.

    Mettre à la casse de telles unités de production d’électricité, avant leur fin programmée, est un gâchis : gâchis d’argent par dizaines de milliards d’euros, gâchis d’emplois bien rémunérés, gâchis dans la lutte contre le réchauffement climatique.

    Nous n’avons pourtant aucun chemin pour produire de l’électricité en émettant moins de CO2. En effet, stocker les énergies éoliennes et solaires, intermittentes par nature, avec des batteries est irréaliste. L’académie des Sciences a publié en 2017 une étude rappelant que pour stocker 2 jours de besoins électriques d’hiver pour la France, il faut 15 millions de tonnes de batterie contenant 300.000 tonnes de lithium soit 7 fois la production mondiale actuelle de lithium[2]. La façon la plus propre pour remplacer l’électricité des 14 réacteurs est donc de produire de l’électricité avec des énergies renouvelables éoliennes et solaires complétées par des centrales au gaz lorsqu’il n’y a pas assez de vent ou de soleil, la nuit par exemple. Dans le meilleur des cas, à cause des périodes sans vent ou sans luminosité, les éoliennes et les panneaux solaires produiraient 35% de la production d’électricité avec peu d’émission de CO2 et des centrales au gaz complémentaires 65% avec beaucoup d’émission de CO2[3]. Le calcul, simple, montre que ces 14 réacteurs émettent 30 fois moins de CO2 que le couple énergies renouvelables et gaz[4] nécessaire pour les remplacer.

    Si on réalise le programme d’Europe Ecologie les Verts, le remplacement de toutes les centrales nucléaires par des énergies renouvelables et des centrales au gaz, les émissions de CO2 de la France augmenteraient de 121 millions de tonnes de CO2. Ces calculs montrent toute l’absurdité d’un tel projet : chaque année, la France rejetterait 40% de CO2 en plus dans l’atmosphère qu’elle n’en rejette aujourd’hui !

    Le nucléaire a économisé l’équivalent de 22 ans de rejets de CO2 d’un pays comme la France.

    Le nucléaire a beau être brocardé par les « verts », il émet nettement moins de CO2 que l’électricité renouvelable intermittente, obligatoirement complétée par des centrales fossiles. Ce n’est pas pour rien que le champion des énergies renouvelables, l’Allemagne, a ouvert nombre de centrales au gaz (et même au charbon) ces dernières années. Ce pays démarrera d’ailleurs en 2020 une énième centrale… au charbon[5] !

    De 1977 à aujourd’hui, les centrales nucléaires françaises ont économisé 22 ans de rejets de CO2 d’un pays comme la France d’aujourd’hui ou 9 ans de rejets de CO2 d’un pays comme l’Allemagne [6].

    Le nucléaire permet à la France d’être le grand pays industrialisé le plus économe en CO2 : le français moyen émet selon la Banque Mondiale 4,6 tonnes de CO2 par an quand le terrien moyen en émet 5 tonnes par an, l’Allemand 8,9 tonnes par an.

     

    graphique-murer-co2-nations

    Produire massivement de l’hydrogène, l’essence de demain.

    Le nucléaire est donc nécessaire à une production d’électricité avec le minimum d’émission de CO2. Faut il en déduire que les éoliennes et les panneaux solaires ne peuvent servir à rien ? Assurément non.

    Un pays comme la France, ayant une électricité rejetant très peu de CO2, peut installer des éoliennes et des panneaux solaires en nombre. L’électricité produite sera utilisée pour produire sans émission de CO2 de l’hydrogène dans des électrolyseurs[7]. Cerise sur le gâteau pour la France, les centrales nucléaires ne produisent pas toujours à plein régime. Il est possible et très rentable de se servir de cette production d’électricité supplémentaire à coût quasi nul pour produire encore plus d’hydrogène propre.

    Cet hydrogène propre est produit à un coût acceptable et coute moins cher que l’essence si on ne lui met pas sur le dos les taxes excessives sur le carburant. L’hydrogène est bien l’essence de demain.

    Il existe déjà des trains à hydrogène Alstom permettant de remplacer les trains au Diesel. Bizarrement, ce train roule en Allemagne. La SNCF va cependant commander 17 trains Alstom à hydrogène[8]. En utilisant cette technologie, nous pourrons remplacer les bus diesel par des bus à hydrogène en ville, allégeant du coût l’émission de particules fines. Les infrastructures hydrogène se développant, nous pourrons, dans une dizaine d’années, passer aux camions à hydrogène, aux voitures à hydrogène (3 voitures de série existent déjà et Paris compte 100 taxis à hydrogène et bientôt 600[9]). Dans un jour lointain, l’avion à hydrogène et le bateau à hydrogène sont un développement tout à fait réaliste.

    Le système de transport peut donc à terme se passer d’énergie fossile.

    Voilà pourquoi, la fermeture de Fessenheim et la fermeture programmée de nombre de centrales nucléaires françaises est une erreur fatale dans la transition énergétique : c’est un gâchis terrible dans la lutte contre le réchauffement climatique, un gâchis financier et un gâchis humain. Une très mauvaise décision de nos gouvernements qui n’ont malheureusement pas de stratégie réaliste et pragmatique pour que la France se passe à terme des énergies fossiles.

    Le sujet de la transition énergétique et tous les autres sujets de la transition écologique sont développés dans un livre à paraître en mai : « Comment réaliser la transition écologique, un défi passionnant »[10].

    [1] « La France adopte finalement sa feuille de route énergétique » https://www.latribune.fr/entreprises-finance/transitions-ecologiques/nucleaire-photovoltaique-la-france-adopte-finalement-sa-feuille-de-route-energetique-845962.html

     

    [2] « La question de la transition énergétique est elle bien posée dans les débats actuels ? » https://www.academie-sciences.fr/pdf/rapport/lpdv_190417.pdf

    [3] En France, une éolienne produit à plein régime l’équivalent de 2000 heures par an, un panneau photovoltaïque produit à plein régime l’équivalent de 1100 heures par an. En additionnant les deux, ce qui est simpliste mais donne le résultat le plus favorable pour les énergies renouvelables, nous arrivons à 3100 heures par an soit 35% du temps. Le calcul réel est complexe, tient compte de la courbe réelle de consommation nationale d’électricité et de production heure par heure des énergies renouvelables, de la présence de vents et de soleil au niveau local quand il ne l’est pas au niveau national mais les ordres de grandeur sont acceptables.

    [4] La production des 14 réacteurs est de 95 milliards de kilowatts-heure d’électricité par an. Chaque réacteur émet 12 grammes de CO2 par kilowatt-heure produit. Ces 14 réacteurs émettent donc chaque année 4,56 millions de tonnes de CO2 (Calcul : 95*109*12/1012=1,14).

    Une centrale au gaz émet 490 grammes de CO2 par kilowatt-heure produit quand le couple éolienne et solaire émet en moyenne 30 grammes de CO2 par kilowatt-heure produit. Le couple énergie renouvelable centrale au gaz émettra donc chaque année 31,25 millions de tonnes de CO2 (Calcul : 65%*(380*109*490/1012)+35%*(380*109*30/1012)=31,25). Pour remplacer l’ensemble du parc nucléaire français, le même calcul aboutit à un surplus de 125 millions de tonnes de CO2 émis.

    [5] « L’Allemagne va mettre en service une toute nouvelle centrale à charbon en 2020»https://www.bfmtv.com/economie/l-allemagne-va-mettre-en-service-une-toute-nouvelle-centrale-a-charbon-en-2020-1799343.html

    [6] La production nucléaire de la France depuis 1977 est de 14 000 milliards de kilowatts heure. En les remplaçant par des centrales au gaz, puisque les énergies renouvelables n’existent que récemment, l’économie est environ de 6700 millions de tonnes de CO2 (Calcul : 14000*109*(490-12)/ 1012=6692). La France a émis environ 300 millions de tonnes de CO2 en 2019 (source Banque Mondiale). L’Allemagne a émis environ 700 millions de tonnes de CO2 en 2019 (source Banque Mondiale).

    [7] Lire par exemple « H2V prêt à déployer ses deux usines d’hydrogène vert» https://www.lesechos.fr/pme-regions/actualite-pme/h2v-pret-a-deployer-ses-deux-usines-dhydrogene-vert-993002

    [8] A qui va profiter la future commande de 15 trains à hydrogène par la SNCF https://www.usinenouvelle.com/article/a-qui-va-profiter-la-future-commande-de-quinze-trains-a-hydrogene-par-la-sncf.N878830

    [9] Et maintenant, les taxis à l’hydrogène http://www.leparisien.fr/info-paris-ile-de-france-oise/transports/et-maintenant-les-taxis-a-l-hydrogene-24-02-2019-8019378.php

    [10] Edition Jean-Cyrille Godefroy

    Philippe Murer

  • Violences meurtrières : Sauver l’héritage en attendant l’héritier.

    L’éditorial de Phi­lippe Schnei­der (La Lor­raine royaliste)

    La France – et non la répu­blique qui n’est que le nom d’un régime poli­tique – est de nou­veau endeuillée. A Ram­bouillet, un crime abo­mi­nable a eu lieu : une employée de la police a été égor­gée à l’entrée du com­mis­sa­riat.

    Nous pré­sen­tons toutes nos condo­léances à sa famille, à la police natio­nale. Qu’elle repose en paix. Il s’agit de nou­veau d’un crime com­mis par un « isla­miste ». Évi­dem­ment, cela ne peut être évi­té tota­le­ment mais nous ne pou­vons que nous poser des ques­tions lorsque l’on sait qu’il s’agit d’un immi­gré venu clan­des­ti­ne­ment en France. Il était connu et pour­tant il est res­té dans notre pays, trou­vant même un tra­vail. Il n’aurait pas du être là mais expul­sé depuis long­temps ! De manière géné­rale, tous ceux qui viennent en France clan­des­ti­ne­ment devraient sys­té­ma­ti­que­ment être expul­sés sans pos­si­bi­li­té de recours et sans avoir droit à aucune aide finan­cière ni à aucun tra­vail. Ils se mettent d’eux-mêmes hors la loi. Et le gou­ver­ne­ment devrait faire en sorte que cela se sache par­tout dans le monde. Une telle mesure décou­ra­ge­rait auto­ma­ti­que­ment, à condi­tion qu’elle soit appli­quée sans fai­blesse, le désir de venir et donc, du même fait, il n’y aurait plus – ou moins – de vic­times des tra­fics. L’Union Euro­péenne ne serait pas d’accord, dit-on ? Et alors ? Il n’en ait évi­dem­ment pas de même de ceux qui viennent léga­le­ment en France ou de ceux qui y sont déjà léga­le­ment. C’est un autre sujet, mais c’est sans doute toute la poli­tique « migra­toire » qu’il fau­drait revoir.

    Comme pour tous les pro­blèmes, nous devrions les étu­dier en fonc­tion des inté­rêts et du futur de la France et des Fran­çais. Le pro­blème est que nos gou­ver­nants et le pré­sident en pre­mier ne veulent pas que la France ait un « futur ». Ils semblent de plus en plus menés – outre leurs ambi­tions per­son­nelles – par une haine farouche de notre pays. C’est par­ti­cu­liè­re­ment vrai pour Emma­nuel Macron. Nous ne pou­vons que le consta­ter à tra­vers ses propres décla­ra­tions : il avait déjà dit que la France avait com­mis des « crimes contre l’humanité » en Afrique ou ailleurs, ce qui est faux (le seul crime contre l’humanité que la France ait com­mis – son gou­ver­ne­ment répu­bli­cain pour être plus pré­cis – s’est pas­sé sur le ter­ri­toire natio­nal, spé­cia­le­ment – mais pas uni­que­ment – en Ven­dée).  Sont venus ensuite les rap­ports sur l’Algérie et le Rwan­da, tous deux men­son­gers et par­tiaux comme Ber­nard Lugan l’a fort bien démon­tré (voir notre numé­ro 369). Sous cou­vert « d’objectivité », ils étaient faits pour dis­cré­di­ter l’action de la France. Enfin, le pire peut-être, et en anglais, voi­là Macron décla­rant sur une chaîne amé­ri­caine « CBS » qu’il fal­lait « décons­truire » l’Histoire de France. Il se range ain­si par­mi ceux qui se nomment « déco­lo­niaux » et qui veulent que les Fran­çais « s’excusent » pour leurs « erreurs » pas­sées. Et bien non, nous sommes fiers de notre pas­sé, de notre his­toire. Bien sur, il y a eu des moments plus dif­fi­ciles, moins glo­rieux que d’autres, sur­tout depuis 1789, mais la France, dans l’ensemble, ne peut qu’être fière de son pas­sé et les Fran­çais fiers de leurs ancêtres. Et ceci contrai­re­ment à beau­coup d’autres pays !

    En fait, Emma­nuel Macron, en déni­grant la France, se fait le repré­sen­tant du mon­dia­lisme et de son idéo­lo­gie qui ne veut plus de pays indé­pen­dants et dif­fé­rents. Il fait le « job » qui lui a été assi­gné jusqu’à ce qu’il ne fasse plus « l’affaire » et soit rem­pla­cé ! Tous les pays doivent suivre l’américanisme déca­dent tel qu’il se déve­loppe aux USA depuis des décen­nies et s’aggravant depuis l’élection de Biden. Il est vrai que chez eux, contrai­re­ment à nous, il y eut – il y a peut-être encore – du racisme, mais c’est très anglo-saxon, germanique !

    En vou­lant copier les amé­ri­cains, nous fini­rons pas intro­duire chez nous le racisme sous cou­vert « d’antiracisme ». C’est déjà le cas quand nous voyons les actions des « racialistes ».

    Et puis, si nous vou­lons vrai­ment que ces popu­la­tions venues de l’étranger proche ou loin­tain, puissent vivre chez nous, il faut qu’elles s’assimilent. Il faut donc qu’ils apprennent à aimer la France, son pas­sé, son his­toire, qu’ils finissent par se sen­tir, comme nous, les héri­tiers de son  pas­sé pres­ti­gieux. C’est ce que cer­tains appellent le « roman natio­nal » bien que je n’aime pas beau­coup cette expres­sion.  Avec ce que Macron dit et fait, ils n’auront que de la haine pour nous et nous mépri­se­ront avec rai­son, comme d’ailleurs les autres pays ! Mais peut-être est-ce ce qu’il veut pour détruire défi­ni­ti­ve­ment notre pays.

    Mais il ne réus­si­ra pas et ces com­pères répu­bli­cains, pseu­do adver­saires mais vrais com­plices, non plus. La France doit se redres­ser et nous devons y tra­vailler en fai­sant connaître notre his­toire mais aus­si poli­ti­que­ment en fai­sant connaître aux Fran­çais la voie du salut public. Sachons sau­ver l’héritage en atten­dant que l’hériter, notre Roi, reprenne sa place à la tête de notre France.

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

  • Carte blanche à Marc Rousset : La filière gaz et pétrole de schiste français doit être testée de façon urgente !

     

    L’hiver énergétique 2024 sera beaucoup plus difficile à surmonter que l’hiver 2023 car les températures seront probablement moins clémentes et parce que les stocks de gaz n’auront pas été remplis, comme en 2022, avec du gaz russe bon marché de Nordstream.

    « The Shift project », groupe de réflexion français sur la transition énergétique, présidé par le polytechnicien Jean-Marc Jancovici, s’inquiète sur la situation difficile pour la France et l’UE, après 2023. Il prévoit des déficits structurels à venir en matière de gaz. Dans une étude conduite pour le ministère des Armées, le « Shift Project » estime qu’en cas d’arrêt durable des livraisons russes, 40 % des besoins de l’UE ne seraient pas couverts par des contrats d’importation déjà identifiés.

    MARC ROUSSET.jpgOr, suite à l’inacceptable sabotage des gazoducs Nord Stream par l’Angleterre, avec l’accord des États-Unis, il faut s’attendre à des années de faibles livraisons de gaz russe. La seule issue possible consisterait à diminuer fortement la consommation de gaz de l’UE car les livraisons de gaz GNL, en provenance du Qatar et des États-Unis ne seront pas suffisantes La demande de l’Asie est appelée en effet à dépasser celle de l’Europe et une concurrence pour s’approvisionner en GNL entre l’Europe de l’Ouest, l’Asie, et de nombreux pays en développements est à redouter. La concurrence jouera même, de surcroît, entre les pays membres de l’UE.

    Le « Shift Project » s’insurge contre l’aveuglement et la naïveté de l’UE en matière de géopolitique de l’énergie. En Chine, par exemple, 100 % des besoins estimés de gaz en 2025 sont déjà couverts par des contrats à long terme. La France se doit donc d’étudier sérieusement la possibilité du gaz de schiste français, au lieu de se lancer d’une façon aveugle avec Macron dans la croissance des capacités d’énergie renouvelable dont les calamiteuses, polluantes, ruineuses éoliennes imposées d’une façon dictatoriale, contre l’avis des populations, dans les ahurissants et inimaginables actuels projets de loi.

    Il se trouve que la France dispose d’un atout considérable qui est complètement exclu du débat public : l’exploitation du gaz de schiste dont les enjeux ne peuvent écartés pour des raisons idéologiques. Le gaz de schiste américain est exploité depuis la fin des années 2000 aux États-Unis. L’exploitation est actuellement interdite en France, suite aux pressions des bien-pensants, des Khmers verts et des gauchistes, alors que le rapport remis au ministre Arnaud Montebourg ouvrait des perspectives d’avenir.

    Ce rapport souligne tout d’abord les quantités phénoménales de gaz et pétrole de schiste techniquement exploitable dans le sous-sol français. Situés principalement dans le nord-est et le sud-est de la France, les bassins d’extraction français pourraient fournir environ 16 milliards d’équivalents barils de pétrole, soit 26 ans de consommation française. En ce qui concerne le gaz, le potentiel estimé est de 3870 milliards de mètres cubes, soit 90 ans de consommation française. La rente économique de l’exploitation de ces hydrocarbures d’avenir pourrait atteindre 294 milliards d’euros en étant optimiste et au minimum 103 milliards d’euros en étant pessimiste, ce qui pour un pays en faillite, comme la France, présente un intérêt non négligeable.

    Le rapport n’élude pas la question des conséquences environnementales et rejette catégoriquement la technique américaine de la fracturation hydraulique qui nécessite l’utilisation de grandes quantités d’eau ainsi que d’additifs. Le rapport souligne, par contre, et met en avant une autre technique de fracturation de la roche en utilisant de l’heptafluoropropane, gaz non inflammable qui permet de mettre la roche sous pression aussi efficacement qu’avec de l’eau, mais en minimisant les risques pour l’environnement et en limitant les risques industriels. Le sous-sol français est donc doté de réserves d’hydrocarbures considérables qui peuvent être exploitées par des techniques prometteuses et respectueuses de l’environnement.

    L’indépendance énergétique de la France et de l’UE s’en trouverait considérablement accrue. L’UE se suicide économiquement en croyant se libérer de la dépendance énergétique russe, pour se mettre sous la dépendance énergétique des États-Unis, du Qatar, de l’Azerbaïdjan, comme on l’a vu lors du scandale des pots-de-vin qataris au Parlement européen, avec chantage et menaces de ruptures d’approvisionnement en provenance du Qatar.
    De plus, nous importons des États-Unis à un prix astronomique du gaz de schiste que nous avons sous nos pieds, alors qu’il a été extrait avec la fracturation hydraulique que nous refusons d’employer en France. Enfin, en exploitant son propre gaz de schiste, la France éviterait la pollution des océans par les méthaniers et les pertes de gaz lors des processus de liquéfaction dans les pays fournisseurs et de regazéification à l’arrivée dans les ports européens. Ce gaz de schiste français permettrait à la France d’attendre avec plus de sérénité la mise en exploitation en 2035, au plus tôt, des 6 réacteurs nucléaires EPR.

    En négligeant depuis 15 ans notre filière nucléaire, Macron et Cie ont mis à mal la souveraineté énergétique française. La France est obligée d’importer du gaz de schiste américain liquéfié qui pollue l’océan Atlantique et de faire à nouveau fonctionner ses centrales à charbon qui émettent 1058 grammes de CO2 par kWh ! La France doit donc vaincre le tabou de l’exploitation du gaz de schiste qui représente une opportunité unique et vitale dans l’attente de la construction des 6 réacteurs nucléaires en 2035, et plus vraisemblablement en 2040, puisqu’il aura fallu 16 ans pour construire Flamanville !

    Avant de se jeter trop rapidement sur le renouvelable (solaire et éolienne) polluant et trop onéreux, de la même façon qu ’il a fermé stupidement et aussi vite Fessenheim, avec des actuels projets de loi dignes d’un régime totalitaire ne laissant aucune possibilité aux habitants concernés de s’opposer aux divers projets, Macron ferait mieux de faire auditer une exploitation pilote de gaz de schiste en France ! Avec bien évidemment les dernières techniques respectant l’environnement telles que celle de l’heptafluoropropane !

  • Mai 68 • LʼEmpire U.S. contre-attaque [1]

    En exorde du dossier de Lafautearousseau consacré à la crise de mai-juin 1968, il a été fait cas de René Cassin, qui, après la guerre des Six-Jours, en juin 1967, et la conférence de presse du 27 novembre de la même année, fut vent-debout contre de Gaulle –  « son » Général, quʼil avait rejoint à Londres dès 1940 –, comme le montre ce passage du livre De Gaulle et Israël écrit par Daniel Amson :

    « René Cassin allait sʼélever plus vivement encore contre la politique menée par Charles de Gaulle au moment de la guerre des Six Jours. ʽʽLa France sʼidentifie à lʼinjusticeʼʼ, proclamait-il en réponse à lʼembargo sur les livraisons de matériel militaire, décrété par le Chef de lʼÉtat le 2 juin 1967. Puis, après la conférence de presse du 27 novembre suivant – au cours de laquelle le Président de la République qualifiera ʽʽles Juifsʼʼ de ʽʽpeuple dʼélite, sûr de lui-même et dominateurʼʼ –, le ʽʽvieux compagnon de 1940 donnera libre cours à son indignation. »[1]

    Son indignation, on lʼa vu, il lʼexprima sous la forme de la menace. 

    Nous avons émis lʼhypothèse selon laquelle Mai 1968 peut être vu comme une rébellion de la communauté juive française contre de Gaulle, qui « fut souvent perçu – à partir de 1967 – comme un adversaire déclaré du peuple juif. »[2]

    Ce qui contraste avec ce quʼénonce Maurice Szafran quand il avance que « les gaullistes au pouvoir ont noué une idylle politique et militaire avec lʼÉtat dʼIsraël. Les Juifs de France nʼavaient jamais rêvé situation plus douce et confortable. »[3] Le journaliste affirme aussi la chose suivante : « De tous les dirigeants occidentaux, il est celui qui entretient les meilleurs rapports, les plus étroits, les plus intimes avec David Ben Gourion[4]. […] Dans son entourage, des personnalités aussi importantes que Michel Debré, Jacques Chaban-Delmas ou Pierre Messmer ne cachent à personne – et surtout pas au Général – la passion quʼils éprouvent envers Israël, leur estime pour la bravoure de ses soldats, pour cette volonté inaltérable de faire revivre une terre morte. »[5] 

    Outre René Cassin, de Gaulle était ainsi entouré de nombreux fervents défenseurs dʼIsraël, quʼils soient dʼorigine juive comme Michel Debré, ou non, comme Jacques Chaban-Delmas ou Pierre Messmer.

    Mais tenir pour vraie cette hypothèse reviendrait à méconnaître les interactions entre États, à évacuer les questions géopolitiques et au fond à se cantonner à une conception autarcique de lʼanalyse sociopolitique des faits historiques. Mai 68 ne fut pas quʼune affaire franco-française, vouloir la réduire à un point de vue domestique relève de lʼineptie. 

    À voir uniquement en René Cassin, ce « croisé » des droits de lʼhomme, un Français juif, qui avec ses compatriotes et coreligionnaires aurait, à partir de 1967, initié un formidable déchaînement contre lʼami dʼhier – en quelque sorte brûlé celui quʼils avaient adoré –, lʼon omet le côté international, onusien, cosmopolite, de René Cassin. Sa vraie communauté à lui, lʼ« agent officiel du gouvernement de Sa Majesté »[6] depuis la Deuxième Guerre mondiale, ce sont les élites globales mobiles. Sa vraie League, cʼest un empire mondial, lʼEmpire du dollar.

    Brouillé avec de Gaulle lʼeffronté, au comportement hargneux vis-à-vis des Anglo-saxons, René Cassin a-t-il participé à une opération de déstabilisation du Général venue à la fois dʼoutre-Manche et dʼoutre-Atlantique ? Fut-il lʼun des rouages essentiels dʼun parti de lʼétranger visant de Gaulle, essayant de le dégager du pouvoir ? 

    La main invisible de lʼEmpire 

    Une main invisible, anglophone comme Adam Smith, dirigée par les élites mondialistes, a œuvré, si lʼon en croit Jacques Foccart, à lʼirruption de Mai 1968. Dans ses carnets, à la date du 19 mai, il écrit que « concernant les étudiants, il y a un malaise depuis longtemps, le détonateur est venu dʼune organisation internationale : il est certain que lʼhistoire de Cohn-Bendit et de son mouvement révolutionnaire montre une volonté chez des adversaires de notre pays de sʼimmiscer chez nous de lʼintérieur. »[7] Sʼil ne précise pas lʼorigine de cette main, il est persuadé que cette main a agi,.

    Ce que, en tout état de cause, Daniel Cohn-Bendit admit, lorsquʼil apparut en Sorbonne le mercredi 28 mai 1968 nonobstant lʼinterdiction qui lui avait été notifiée de rentrer sur le territoire national en raison dʼun outrage au drapeau tricolore proféré à Londres – tout un symbole –. Ce jour-là il reconnut en effet faire « partie dʼune internationale révolutionnaire »[8]

    Certes, Daniel Cohn-Bendit, qui se définit « comme un Juif de la diaspora »[9], pour qui « la diaspora nʼa pas de nationalité »[10], qui dit quʼil « nʼest ni Français ni Allemand »[11], est un animateur hors pair, un agitateur ô combien talentueux. Avec son Mouvement-du-22-mars, il a réussi à unifier un ensemble hétéroclite dʼétudiants, de lycéens, de jeunes salariés et de révolutionnaires professionnels ; ces derniers, à la fois marxistes et anti-soviétiques, ont au départ méprisé la mobilisation étudiante, au même titre que leurs frères ennemis de la C.G.T. et du P.C.F., avant de sʼengouffrer dans la brèche afin de ne pas « louper le virage » du cours de ces événements. Eh oui, ce ne fut pas seulement les « stalʼ » qui eurent une réticence instinctive lors des premiers soubresauts de lʼagitation juvénile :

    « Parmi les militants des groupuscules présents au Quartier latin, des maoïstes ou des trotskistes affichent leur hostilité aux étudiants petit-bourgeois manipulés par un complot social-démocrate. Ils ne les rejoindront quʼaprès le 13 mai. Entre-temps, le leader de lʼUJC(ml), Robert Linhart, aura sombré dans un délire paranoïde en imaginant le piège du pouvoir en train de se refermer sur la classe ouvrière que les étudiants mènent au massacre »[12].  (Dossier à suivre)    

    [1]  Daniel Amson, De Gaulle et Israël, Paris, PUF, 1991, p. 53.

    [2]  Ibid., p. 9.

    [3]  Maurice Szafran, Les juifs dans la politique française de 1945 à nos jours, Paris, Flammarion, 1990, p. 151.

    [4]  Qui est à cette époque le Premier ministre de lʼÉtat hébreu.  

    [5]  Idem.

    [6]  Antoine Prost, Jay Winter, René Cassin et les droits de lʼhomme : le projet dʼune génération, Fayard, Paris, 2011, p. 140.

    [7]  Jacques Foccart, Le Général en Mai. Journal de lʼÉlysée, II, Paris, Arthème Fayard / Jeune Afrique, 1998, p. 112.

    [8]  Claude Paillat, Archives secrètes. 1968/1969 : les coulisses dʼune année terrible, Paris, Denoël, 1969, p. 206.

    [9]  Émeline Cazi, Le Vrai Cohn-Bendit, Paris, Plon, 2010, p. 34.

    [10]  Idem.

    [11]  Idem.

    [12]  Bénédicte Vergez-Chaignon, « Le tombeau dʼune génération. Quarante de critique de mai 68 », Le Débat, n° 149, février 2008, p. 53. 

     

    Retrouvez les articles de cette série en cliquant sur le lien suivant ... 

    Dossier spécial Mai 68

  • Dans le monde, et dans notre Pays légal en folie : la revue de presse de lafautearousseau...

    Gabrielle Cluzel pulvérise ce pauvre Estrosi ("délirant"), réincarnation - mais "au petit pied" - de Torquemada :

    1. Quand Zemmour se trompe, malgré tout ce qu'il dit d'excellent, et malgré le service immense qu'il rend à la France et aux idées de salut public et de restauration nationale. Il déclare :

    "Depuis les années 60, la gauche tente de détruire une culture française qu’elle juge "bourgeoise", elle veut détruire une méritocratie républicaine qu’elle juge injuste, elle a pour intention de faire de l’école une machine de guerre idéologique à son service."

    Non, très cher Zemmour, ce n'est pas "la gauche", mais "la droite" qui a fait le Collège unique, réalisant l'idéologie mortifère de gauche du plan socialo-communiste-révolutionnaire Langevin-Wallon; cela s'est passé la même année (75/76) où "la droite " (sous Giscard, qui laissa faire Chirac) a ouvert la porte à l'immigration/invasion par les scélérats décrets du regroupement familial et a légalisé l'avortement.

    Que "la gauche" se soit réjouie de ces mesures suicidaires, évidemment. Mais on est bien obligé d'admettre que droite et gauche confondues mènent la même politique du Système : démolir la France. 

    C'est donc le Système, et non "la gauche" (où se trouvent de nombreux patriotes sincères, bien qu'égarés...) qu'il faut combattre, détruire et remplacer par un  retour à notre Royauté traditionnelle, le "régime le plus souple", comme le disait Léon Daudet...

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    2. Covid : l'exemple espagnol... "Je ne vois pas comment démocratiquement les députés et les sénateurs peuvent voter le passe vaccinal à date. Il n'y a pas de rationnel médical" souligne avec raison le docteur Gérald Kierzek :

    (extrait vidéo 2'17)

    https://twitter.com/JL7508/status/1482042918848409603?s=20

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    2 BIS. D'accord avec Vincent Trémolet de Villers :

    Vincent Tremolet de Villers
     
    "La majorité est pressée de faire voter son projet de loi pour des motifs politiques plus que sanitaire. Le décalage entre la dramaturgie parlementaire et la situation épidémique complètement bouleversée par Omicron est visible à l'œil nu."

    https://www.lefigaro.fr/actualite-france/le-passe-vaccinal-n-est-ni-de-la-medecine-ni-de-la-sante-publique-denonce-eric-caumes-20220114?utm_source=app&utm_medium=sms&utm_campaign=fr.playsoft.lefigarov3

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    2 TER : Et, du même docteur Gérald Kiertzek : "La vision de l’hôpital submergé par les non-vaccinés est un fantasme total". Médecin urgentiste, consultant régulier du petit écran pendant la crise sanitaire, et directeur médical de Doctissimo, Gérald Kierzek remet les pendules à l'heure... :

    https://www.gala.fr/l_actu/news_de_stars/un-fantasme-total-gerald-kierzek-fait-une-mise-au-point-sur-les-non-vaccines_484844

     

    5. À trois mois des élections, Macron traficote les prix et les taxes, et va contraindre EDF à baisser son prix de l'électricité. Coût pour EDF : environ 8 milliards, que l'État devra bien compenser, mais seulement une fois l'élection passée. Le seul problème, c'est que "l'État", cela n'existe pas(pas plus que la sacro sainte "gratuité") : l'État, c'est le contribuable, c'est-à-dire chacun de nous, chacun de nos porte-monnaie. Rien n'est gratuit sur terre (en France, pas plus qu'ailleurs), aucune perte de recette n'a lieu sans que, au final, ce soit les citoyens qui payent. Pour se faire ré-élire, Macron jette donc par la fenêtre, à toiut va, NOTRE argent...

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    Piratage, brigandage...

     

    6. "La soupe est bonne" ou : Pays légal pourri !... On se souvient des homards de de Rugy..., voici le "tu as mis du champagne au frais ?" du vice président de l'assemblée nationale, Sylvain Waserman... Oui, Pays légal pourri, Système pourri !

    (extrait vidéo "parlant" de neuf secondes)

    https://twitter.com/mormach/status/1482252382897688577?s=20

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    7. Un petit sourire, pour terminer cette série d'aujourd'hui, avec la querelle grotesque - mais finalement divertissante - de la semaine : Fabien Roussel, du PCF, a voulu défendre la gastronomie française : "un bon vin, une bonne viande, un bon fromage … c’est la gastronomie française et le meilleur moyen de la défendre, c’est de permettre aux Français d’y avoir accès".  Pour une fois qu'un communiste dit des choses "sympathiques", voilà qu'une partie de l'extrême-gauche - aussi radicale que foldingue - et des écolos dévoyés (évidemment, Sandrine Rousseau !...) lui tombent dessus, en qualifiant ses propos d'extrême-droite ! Bêtise, cinglerie, quand tu nous tiens ! Il y en a qui ont vraiment du temps à perdre ! Ces gens-là devraient faire attention : à ce compte-là, "l'extrême-droite"' est partout, en France; attention, danger ! :

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    À DEMAIN !

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  • Dans notre Éphéméride de ce jour (2/2) : un rapide survol des rapports entre la Corse et la France...

    1498 : Naissance de Sampiero de Bastelica, dit Sampiero Corso

     

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    Statue de Sampiero, à Bastelica (Place du Hameau de Santo), par Vital Dubray
     
     

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    Sampiero Corso, ou Sampieru de Bastelica ( fit une grande partie de sa carrière au service de la France, notamment lors de l'expédition française en Corse de 1553.

    23 mai,jeanne d'arc,sampiero corso,helene boucher,dumont d'urville,venus de milo,astrolabe,georges claude,louis le nain,louvre,charles vii,rockefellerIl avait pourtant commencé sa carrière militaire en Italie mais, après la mort de Léon X et son remplacement par Adrien VI (mars 1522), il passa au service de la France (il était à la bataille - perdue - de la Bicoque, le 27 avril 1522). À partir de 1535, il fait partie des proches du cardinal Jean du Bellay, ambassadeur de France à Rome; il se couvre de gloire dans les armées de François 1er, se bat aux côtés de Bayard, et reçoit, en 1547, le grade de Colonel, commandant l’ensemble des bandes corses au service de François 1er (illustration ci-contre : on l'appelait "le colonel aux fleurs de lys") : c'est alors que, selon l'usage de l'époque, il reçoit le surnom de "Corso", qui indique son origine et qui lui est resté attaché...

    Cette époque est caractérisée par la lutte de la France de François 1er puis de son fils, Henri II, contre Charles Quint, empereur d'Allemagne, roi d'Espagne, roi de Naples et de Sicile et par celle des Ottomans contre Charles Quint, la France étant en l'occurrence alliée avec le sultan Soliman le Magnifique.

    Il est donc très important, pour la France d'alors, en Méditerranée, de prendre le contrôle de la Corse, qui relève alors de la République de Gênes, alliée de l'Espagne : Henri II y envoie Sampiero, pour une première expédition : en 1553, à la tête d'une escadre franco-turque, Sampiero débarque dans l'île. Avec ses alliés, les Ornano, famille de son épouse, il remporte quelques succès sur les Génois - commandés par l’amiral Andrea Doria - mais cette guerre tourne court car la France doit faire face au rapprochement entre l’Angleterre et l’Espagne : Henri II rappelle Sampiero en 1555, et un armistice est conclu à Vaucelles en 1556, qui met fin aux hostilités pour cinq ans.

    Malgré la réoccupation de Bastia et de Calvi par Gênes, la Corse reste possession française durant quatre années, mais la défaite française de Saint-Quentin - en 1557 - et la signature du traité du Cateau-Cambrésis - en 1559 - entraînent le retour de la Corse sous la domination de Gênes. Lors de la signature du traité, les émissaires français tentent bien de conserver l’île à la couronne, mais ils doivent y renoncer pour conserver Calais, Metz, Toul et Verdun (dans notre Album L'Aventure France racontée par les cartes, voir la photo "les agrandissements de Henri II"...)

    Henri II meurt en juillet 1559; la France n'est pas en mesure d'entretenir une flotte conséquente en Méditerranée et ne peut plus agir contre la République de Gênes.

    Gouverneur d’Aix-en-Provence en 1560, Sampiero Corso est ensuite nommé ambassadeur extraordinaire à Constantinople, laissant son épouse et ses enfants dans la demeure familiale de Marseille.

    Avec l’accord de Catherine de Médicis, régente, Sampiero revient en Corse en 1564 et, une fois encore remporte quelques combats; mais, sans l’aide significative de la France, il se trouve vite isolé : le 17 janvier 1567, à 68 ans, il est attiré dans une embuscade et tué : sa tête sera exposée par les Génois à Ajaccio...

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    C'est donc depuis bien longtemps que des Corses - les Corses... - servent la France... Avant même la "réunion" de 1768, un Régiment de "Royal Corse" avait été créé :
    dans notre Album Drapeaux des Régiments du Royaume de France, voir la photo Régiment de Royal Corse et les trois suivantes...
     
     
     
    Aujourd'hui, on estime à deux millions le nombre de Corses établis "hors l'île", et, sur ces deux millions, on évalue à environ deux cent mille le nombre de ceux qui vivent à Marseille et dans les environs immédiats, ce qui fait de Marseille... la première "ville Corse" ! L'agora grecque de la cité phocéenne tire d'ailleurs son nom actuel (Place de Lenche) de la famille corse Linciu, qui s’établit à Marseille au XVIème siècle. Thomas Lenche créa la Compagnie du corail, qui se dédiait aux liaisons commerciales entre l'Afrique du Nord et Marseille; pendant les guerres de religion, son neveu, Antoine Lenche, prit le parti des "politiques" (ou "royalistes" : ceux qui soutenaient Henri III de France et Henri III de Navarre, qui devait devenir Henri IV, "Roi de France et de Navarre") : Antoine Lenche était deuxième consul de la cité et mourut assassiné en 1588...
  • RULE BRITANNIA ?, par Georges-Henri Soutou.

    La Grande-Bretagne change de cadre. Sa vision du monde redéfinit les rapports de force, les ambitions géostratégiques et les choix militaires. A-t-elle les moyens de son ambition ? Et y a-t-il encore une place pour la Grande-Bretagne ?

    8.jpgFin mars le gouvernement britannique a rendu publique sa « Revue intégrée de sécurité, de défense, de développement et de politique étrangère ». Elle est accompagnée d’un document spécifique au ministère de la Défense, intitulé « La Défense dans une époque compétitive ». Ces deux longs documents méritent une lecture attentive. D’une part ils représentent la traduction concrète de la politique extérieure post-Brexit annoncée par Boris Johnson avec son slogan de Global Britain, d’autre part ils constituent la meilleure analyse de la part d’un pays occidental, à ce jour, du nouveau contexte militaro-stratégique et des réponses qu’il appelle en termes d’organisation, d’équipements et de stratégie.

    Global Britain, d’abord. Les deux adversaires désignés sont la Russie, à cause de ses ingérences de toute nature, y compris l’empoisonnement de Salisbury, ses manœuvres aéronavales provocantes tout autour du Royaume-Uni et ses menaces contre l’Ukraine ; et la Chine, à cause des menaces qu’elle fait peser sur la liberté de navigation en Mer de Chine et, au-delà, sur les routes maritimes de la région indopacifique, essentielles pour l’Europe.

    Face à Pékin, la principale traduction du concept global est la volonté affichée de revenir dans la zone indopacifique, East of Suez, d’abord sur le plan commercial avec le but de signer de nombreux accords commerciaux, maintenant que la Grande-Bretagne est sortie de l’Union européenne et a retrouvé sa souveraineté douanière, mais aussi afin d’y maintenir la liberté de navigation et de protéger les voies maritimes. Cela se traduira par une présence maritime permanente dans la région, et par l’envoi ponctuel d’un groupe de porte-avions (comme ce sera le cas prochainement avec le Queen Elizabeth). Quand on se souvient du traumatisme suscité par l’annonce, en 1967, du repli des forces britanniques basées à l’Est de Suez, c’est-à-dire par l’abandon de la séculaire Route des Indes, on comprend que cette annonce suscite un écho puissant.

    Redéfinir complètement la chose militaire

    Mais cette orientation résolument globale est-elle réaliste ? Certes, la City, qui va se retrouver plus profondément coupée de l’Europe qu’on ne le pensait au départ, pourra sans doute, grâce à sa souplesse et à ses qualités d’innovation, retrouver un rôle dans ce cadre mondial ; les industriels britanniques devront faire un gros effort pour maintenir leur niveau de recherche et de développement. Mais enfin, c’est jouable. Sauf que l’évocation du passé impérial anglais ne suscite pas forcément l’enthousiasme en Asie, et que la question des moyens, face à la Chine, au Japon et à l’Inde, va se poser.

    La Revue de défense britannique insiste sur les relations de sécurité avec l’OTAN, les États-Unis, la France et l’Allemagne. L’Union européenne est à peine mentionnée, alors que de plus en plus Paris et Berlin font passer leur politique extérieure à travers les cadres bruxellois. Que deviendront leurs relations bilatérales avec Londres dans ce contexte ? On ne reviendra pas à la situation d’avant 2016…

    Si le cadre international envisagé pose beaucoup de questions, et laisse beaucoup d’observateurs sceptiques, en revanche le projet stratégique révèle une vraie prise en compte de certaines réalités militaires nouvelles. L’annulation de la décision de réduire le nombre des têtes nucléaires de 225 à 180, annoncée en 2010, et au contraire la décision de l’augmenter jusqu’à 260, est justifiée par l’aggravation de la menace nucléaire dans le monde. Cette annonce va au rebours des tendances actuelles et en particulier de la conférence de suivi du traité de non-prolifération, prévue en juin prochain. On peut penser que des scénarios de crises ont été étudiés, mais on n’en sait pas plus, les documents mentionnent seulement « le développement des menaces technologiques et doctrinales », ce qui paraît correspondre à l’apparition, en Chine et en Russie, d’armes dites « hypervéloces », capables de changer de direction en cours de trajectoire, qui posent de graves problèmes aux Occidentaux, et aussi à l’annonce de la doctrine russe de « désescalade nucléaire », qui est en fait une doctrine de frappe en premier pour dissuader un adversaire de tenter de prendre pied sur un théâtre sensible.

    Toute une série d’équipements de type nouveau devant être commandée, le budget de la Défense doit augmenter de 14 %. On tire la leçon des échecs britanniques en Irak et en Afghanistan. On comprend que des modèles tactiques éprouvés sont désormais dépassés, et que certains armements, comme les chars lourds, doivent être remis en cause quand des guérilléros peuvent les repérer avec des drones et les détruire avec des missiles légers et rustiques. On place au premier rang la connectivité entre les capteurs, les drones de tous types, les armes, les combattants, les états-majors, et l’accélération du commandement par l’intelligence artificielle, et cela dans tous les milieux, désormais unifiés : espace, air, terre, mer et « cyberespace ».

    D’autre part, l’heure n’est plus aux gros bataillons, présents sur les théâtres vraisemblables ou à leur proximité. On revient à une stratégie « expéditionnaire », en compensant la baisse du nombre des unités par une très grande agilité dans leurs déplacements. L’armée britannique ne tiendra plus des « créneaux », mais enverra des renforts (des « brigades de soutien » seront formées à cet effet) très rapidement, sur des points menacés, avec l’appui de la marine et de l’aviation. Hautes technologies et agilité deviennent les concepts-clé.

    Enfin, on prend pleinement en compte ce que l’OTAN appelle la menace « hybride », c’est-à-dire le mélange d’opérations de subversion, de désinformation et d’actions de forces camouflées, comme les Russes y ont eu recours pour la prise de la Crimée. Un régiment de Rangers va être créé à cet effet, avec la capacité de contrer des menaces de ce genre.

    Les dernières manœuvres de l’OTAN (« Trident » en 2018 vers la Scandinavie, « Defender Europe » en ce moment vers l’Europe centrale et les Balkans) correspondent tout à fait à ces schémas stratégiques et tactiques. L’ambition britannique est de se doter de l’outil militaire le plus moderne d’Europe, comparable en qualité à l’américain.

    Que devient l’Europe ?

    Cela implique de considérables efforts ! Certes, des coopérations sont prévues. La Revue rappelle les deux traités franco-britanniques signés en novembre 2010 à Lancaster House. Le premier concernait la coopération franco-britannique en matière de partage ou de mise en pool d’équipements, ainsi que la coopération industrielle et technologique. Le second, baptisé Teutatès, concernait l’établissement de centres de simulation pour les armes nucléaires, à Valduc et à Aldermaston. On décidait également la mise sur pied d’une « Force expéditionnaire combinée commune », formée d’éléments capables d’être projetés à bref délai, avec un quartier général et une logistique spécifiques et chargée également d’encourager une plus grande cohérence doctrinale et une meilleure interopérabilité des matériels. On décidait enfin de rendre les groupes de porte-avions compatibles, pour faciliter d’éventuelles opérations communes.

    Mais que deviendront les accords de Lancaster House, si les retombées du Brexit continuent à refroidir les rapports entre Paris et Londres ? Et la Revue parle finalement peu de l’Allemagne, et fait l’impasse sur l’Union européenne. Or les très importants efforts à faire en matière de technologies et d’industries de défense ne pourront l’être que par des coopérations au niveau européen, quel qu’en soit le cadre juridique. La réalisation de la Defense Review sera-t-elle à la hauteur de ses ambitions ?

    Et enfin le modèle stratégique présenté est très ambitieux, il concerne à la fois la menace russe et le problème chinois. Tandis que l’Armée de Terre britannique, déjà relativement peu nombreuse, devrait perdre encore 10 000 hommes. Jusqu’à quel point l’agilité et l’intégration des hautes technologies dans un système militaire certes à la pointe des évolutions actuelles et très novateur compensera-t-il la faiblesse des effectifs, face à des défis multiples et croissants ? C’est un problème qui se pose de plus en plus à tous les appareils militaires occidentaux.

    Et quelle place trouvera finalement Londres entre les États-Unis, l’OTAN, et ses alliés du Continent ? Question qui intéresse la France au premier chef !

     

    Illustration : Boris Johnson en route pour présenter au Parlement sa « Revue intégrée de sécurité, de défense, de développement et de politique étrangère » : du souffle, mais une maîtrise incertaine.

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    Source : https://www.politiquemagazine.fr/

  • Le 14 juillet de la honte !

    4199716072 copie.jpgAinsi, par la volonté de François le Normal, des troupes algériennes et vietnamiennes vont défiler sur nos Champs Elysées le 14 juillet prochain.

    Dans son grand mépris ou sa grande ignorance de l'histoire de France, celui qui fait office de Président de la République n'a même pas pensé que ces deux pays ne firent pas partie des belligérants de la guerre de 14-18. Ils étaient alors des territoires français et ses habitants furent mobilisés sous le drapeau français. Il n'y a donc aucune raison pour que les drapeaux du FLN et du Vietminh soient mis à l'honneur pour notre fête nationale.

    Mais le plus grave, c'est que cette invitation constitue une injure et un manque total de respect pour les innombrables morts pour la France dans les conflits d'Algérie et d'Indochine, pour les anciens combattants de ces guerres, les prisonniers détenus et torturés dans des conditions abominables au Vietnam, les Harkis et les Pieds-Noirs pour qui le drapeau FLN restera le symbole de leur martyre, de leurs souffrances et de leur exil.

    Tant qu'à faire, en ce 70 ème anniversaire du massacre d'Oradour-sur-Glane, Hollande aurait pu aussi inviter les anciens de la Division Das Reich à défiler sur les Champs Elysées. Mais ne le répétez pas car s'il l'apprenait, il serait capable de retenir l'idée pour l'année prochaine. 

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