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Actualité Monde - Page 94

  • Le krach aura lieu : des cygnes noirs de partout !

     

    Par Marc Rousset 

    En matière de prévision économique, une bonne dose de prudence s'impose. Bernard Maris disait qu'un économiste est un monsieur qui est capable d'expliquer le lendemain pourquoi il s'est trompé la veille. Une addition de principes de bon-sens et de connaissance des dossiers conduit toutefois à envisager sérieusement ce qui peut attendre nos sociétés dans un avenir plus ou moins proche. C'est l'exercice auquel Marc Rousset se livre ici pour nous au fil d'une analyse documentée qui intéressera ce qu'on appelait jadis les pères de famille aussi bien, d'ailleurs,  que les patriotes. La racine est la même ! ...   LFAR 

     

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    Jeff Gundlach, lors de la Strategic Investment Conference 2018, a déclaré que « la situation devrait exploser en 2019 ». Il estime que les fondamentaux de l’immobilier sont « plutôt horribles » alors que les taux immobiliers commencent à augmenter, que les déficits américains par rapport au PIB sont trop élevés et que tous les indicateurs pointent vers la hausse de l’inflation. Les avantages sociaux du gouvernement américain qui n’atteignaient pas 5 % du revenu disponible des Américains dans les années 70 atteignent, aujourd’hui, 25 %.

    Quant au très célèbre gestionnaire de fonds d’investissement Paul Tudor, il a déclaré à Goldman Sachs que les seules choses qui valent la peine d’être détenues sont les matières premières, les actifs tangibles ou du liquide. Il critique les baisses d’impôts, les dépenses généreuses du Congrès américain et prédit une augmentation de l’inflation qui provoquera la panique sur les marchés actions. Il a comparé le président de la Fed Jerome Powell au général Custer dans les dernières heures de la bataille de Little Big Horn, « cerné par une horde de guerriers menaçants » : bulles, dettes des entreprises, marché des changes, tribu des cryptos, taux réels négatifs et, derrière lui, le peuple de l’inflation qui l’empêche de battre en retraite !

    La BCE de Mario Draghi se renie, suite à la revalorisation de l’euro et à l’insuffisante inflation en Europe. Draghi remet en question la date butoir d’octobre 2018 ; il vient de déclarer que les achats d’actifs par la BCE cesseront seulement quand l’inflation sera jugée suffisante….

    Si l’on considère les graphiques de la dette mondiale, du Dow Jones, de l’or et des obligations, on constate que la folie douce a commencé à s’emparer des esprits dans les années 1994-1995, avec des courbes qui grimpent à la verticale à une vitesse hallucinante. La dette mondiale était de 30.000 milliards de dollars en 1994 ; elle s’élève, aujourd’hui, à 230.000 milliards de dollars. Le PIB de l’économie réelle est le seul graphique qui se traîne lamentablement vers le bas à un rythme trop lent. Cela sent donc à plein nez le chaos et l’écroulement des actions à venir. 

    Le journal The Economist du 10 février 2018 pressent également un krach financier. Il s’étonne des bulles sur les actions Tesla et Uber car les marchés se refusent à tirer les conséquences de l’envolée des pertes en 2017. Il remarque que l’euro a progressé de 17 % en un an sans que cela inquiète les dirigeants européens. Il est préoccupé par le parcours du bitcoin, passé de moins de 1.000 dollars, début 2017, à près de 20.000 dollars, en décembre, et 6.000, début février 2018, tout comme par l’effondrement d’un fonds de 1,9 milliard de dollars du Crédit suisse indexé sur la volatilité dont la valeur s’est effondrée de 92 %, le 6 février 2018, quand le Dow Jones a perdu 4,6 %. 

    Pour The Economist, le niveau du Dow Jones est 60 % plus haut qu’avant le précédent krach de 2008 et les seules questions en suspens sont le moment du prochain krach (2019, 2020 ou 2021 ?) ainsi que le facteur déclenchant (Tesla ou Uber, hausse du pétrole et regain de l’inflation, avec hausse des taux, ou crise financière en Italie ?).

    L’Italie, avec sa dette publique de 2.200 milliards d’euros (132 % du PIB) et son système bancaire malade (263 milliards d’euros de créances douteuses) ne pourra pas supporter la remontée des taux d’intérêt. Si la Bundesbank se retrouve avec une créance excédentaire « Target 2 » de 800 milliards d’euros, la Banque centrale d’Italie se retrouve avec une dette de 400 milliards d’euros envers la BCE. L’Italie est dans une situation financière gravissime et intenable.

    Pour couronner le tout, il suffit de penser aux risques géopolitiques avec la révolte électorale des Italiens contre l’invasion migratoire, à la nomination du faucon Mike Pompeo comme nouveau secrétaire d’État de Trump qui rêve, comme Israël et le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salmane, d’en découdre avec l’Iran.

    Enfin (cerise sur le gâteau), il est tout à fait probable que Trump va engager une violente guerre commerciale avec la Chine pour la punir de ses infractions aux lois sur la propriété intellectuelle ainsi que pour son excédent, en 2017, de 342,8 milliards de dollars avec les États-Unis.  • 

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    Économiste

    Ancien haut dirigeant d'entreprise

  • Les islamistes de la Ghouta bientôt vaincus

    Bachar al-Assad auprès de ses troupes dans la Ghouta orientale

     

    Par Antoine de Lacoste

     

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    Les jours passent et l’étau de l’armée syrienne se resserre inexorablement sur les 20 000 combattants islamistes de la Ghouta orientale.

    Après deux semaines de bombardements puis deux semaines d’assauts terrestres, les positions islamistes sont aujourd’hui coupées en trois, c'est-à-dire en autant  de groupes islamistes.

    Ces trois tendances ne s’aiment guère et se sont même violemment affrontées à de nombreuses reprises pour la suprématie de la Ghouta.

    De cela les médias occidentaux ne parlent guère préférant, à l’unisson, dénoncer par une obligatoire litanie, « les crimes de l’armée de Bachar », comme si ce n’était pas l’armée syrienne ! On se demande à quoi sert la pluralité de la presse en France, tant celle-ci ne parle que d’une seule voix, avec les mêmes bilans non vérifiés de l’OSDH (Observatoire syrien des Droits de l’Homme), les mêmes slogans (Bachar, « l’homme qui tue son propre peuple ») et les mêmes indignations de circonstance.

    Aujourd’hui, les trois groupes islamistes rivaux tiennent chacun leur ville : Douma pour l’armée de l’islam, soutenue par l’Arabie Saoudite, Arbine pour Faylak al-Rahmane, soutenue par le Qatar et Harasta pour le Front al-Nosra, que plus personne ne soutient.

    Depuis cinq ans, ces groupes tenaient un territoire en continu qui a compté jusqu’à 15 000 km2. Aujourd’hui, ils se partagent à peine 50 km2. Le morcellement de ce territoire en trois parties, empêche maintenant toute alliance, même de circonstance, entre islamistes. Elle rend également vaine toute contre-attaque éventuelle.

    L’issue est donc inéluctable.

    Pour l’assaut final, les Russes ont fait venir des renforts : des Palestiniens favorables à Bachar, issus des camps de réfugiés, et des chiites afghans, rapatriés du front de Deir ez-Zor. Les Iraniens sont tenus à l’écart : ils sont trop autonomes, et les Russes ne veulent pas s’en embarrasser. Ils veulent garder la main pour d’éventuelles négociations suivies de redditions et d’évacuations qui éviteraient plusieurs jours de sanglants combats.

    D’ailleurs, une dizaine de combattants d’Al-Nosra, se sont rendus avec leurs familles le 10 mars, et ont été, comme d’habitude, évacués vers la province d’Idleb, le grand fief islamiste, au Nord-Ouest de la Syrie.

    Quant aux civils, ils sont toujours pris en otage par les islamistes. Plusieurs ont été tués ces derniers jours en tentant de s’enfuir et de forcer les barrages des combattants. D’autres sont passés et ont pu témoigner de leur quasi impossibilité de quitter la Ghouta, tant les tirs des snipers sont redoutables.

    Le rétrécissement du territoire tenu par les islamistes, ne les empêche cependant pas d’envoyer quotidiennement des obus sur Damas. Une dizaine de morts sont à déplorer ces derniers jours.

    Mais ce ne sont pas des « rebelles », alors cela n’intéresse pas nos médias. 

    Retrouvez l'ensemble des chroniques syriennes d'Antoine de Lacoste dans notre catégorie Actualité Monde.

  • Goldnadel a raison ! Et il ose dire les choses : « Le racisme anti-blanc impose l'omerta médiatique »

     Marché aux esclaves noirs en Libye 

     

    Par  

    CHRONIQUE - Gilles-William Goldnadel évoque le racisme anti-blanc, dont très peu de médias ou d'associations osent parler. Selon lui, c'est ce tabou qui explique le silence médiatique autour du scandale d'abus sexuels révélé à Telford. Cette chronique [Figarovox,20.03] dit avec force et un courage certain un grand nombre de simples vérités !  LFAR

     

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    Le racisme antiblanc est le trou le plus noir de l'information comme de la réflexion. Si vous aimez la tranquillité, évitez donc de le nommer. Ou utilisez si possible une circonlocution. Essayez plutôt « détestation anti-occidentale ». 

    Vous éviterez ainsi le chromatisme gênant. On peut parler des noirs, davantage encore du racisme qui les frappe. Mais évoquer le blanc, sauf de manière négative, voilà qui est gênant. Et très inélégant. En parler le moins possible. J'ai connu une époque, pas très lointaine, où les organisations antiracistes autoproclamées contestaient l'existence même de l'aversion du blanc. Lorsqu'on la leur mettait juste dessous leurs yeux, elles la reconnaissaient du bout des lèvres pincées en alléguant le fait que seules des organisations « d'extrême droite » se souciaient de cette question très secondaire. Bref, une pirouette assez primaire. De nos jours, lorsque le temps est clair, certaines condescendent toutefois à se saisir de cas emblématiques, pourvu que le traitement soit discret et homéopathique.

    L'actualité récente me permet, à travers deux exemples, l'un en creux, l'autre en plein, de faire sonder du doigt le trou noir maudit.

    Prenez Mayotte. On a tout dit sur les dernières manifestations d'exaspération de la colère populaire des Mahorais à propos de l'immigration massive et invasive.

    On a dit que cette colère était légitime. On a dit que cette immigration était insupportable pour la population autochtone. On a reconnu sans barguigner le lien entre immigration excessive, illégale et criminalité. On a convenu également qu'elle était facteur de misère sociale, médicale et d'appauvrissement. On a accepté sans pousser de hauts cris de questionner la légitimité du droit du sol. On a reconnu qu'il existait effectivement « des Français de papier » qui avaient indûment instrumentalisé le droit du sol français pour devenir nos concitoyens pour de pures questions d'opportunité financière. On a tout dit, sauf que les Mahorais qui se plaignaient légitimement mais parfois violemment seraient des racistes, des xénophobes ou des populistes extrémistes.

    On voudra bien à présent se donner la peine de comparer le regard compréhensif et même empathique porté par le monde médiatique et politique à l'égard des Mahorais exaspérés avec celui qui embrasse, si l'on ose dire, la population métropolitaine qui, aujourd'hui majoritairement, considère l'immigration illégale et massive comme un facteur d'inquiétude majeure. Encore que les réactions de celle-ci soient infiniment plus calmes que celle de la population mahoraise, qui peut honnêtement nier que le jugement médiatique et politique soit dans le meilleur des cas condescendant et dans le pire haineux et méprisant ? Pour ceux qui ne veulent pas comprendre ce qui explique cette différence de regard, je vais leur mettre crûment la réalité sous les yeux. La population française métropolitaine, à la différence des Comoriens musulmans de Mayotte, est majoritairement chrétienne, blanche et occidentale. Par conséquent plus facilement soupçonnable de racisme, précisément par un préjugé raciste insoupçonné et indicible.

    Mais que j'ose nommer et que j'ai déjà expliqué par l'Histoire.

    À présent, passons au second exemple explicite et extérieur à la France.

    L'excellente revue National Geographic s'est livrée récemment à une autocritique en règle en examinant de quelle manière, au siècle dernier, elle était restée indifférente à la réalité et à la souffrance noires.

    D'un siècle l'autre, d'un excès l'autre, et, parfois, d'une souffrance l'autre. Je ne crains pas en effet d'appliquer cette saine autocritique au présent et à la souffrance blanche que l'on cache, que l'on tait ou que l'on ne veut pas voir.

    C'est ainsi que les exactions contre les fermiers blancs en Afrique australe font partie des territoires occultés de l'information. Au Zimbabwe, la quasi-totalité des fermiers blancs ont été expulsés. De très nombreux fermiers massacrés. L'ex-dictateur Mugabe, récemment déchu, refusait de répondre à un journaliste parce qu'il était blanc. C'est dans ces conditions que la revue Jeune Afrique (et non un journal occidental) a écrit : « Les abus et les erreurs commis par Londres, les colons britanniques et leurs descendants, pour beaucoup restés fidèles à Ian Smith, ont été nombreux. Mais en répliquant avec une politique aussi inconséquente, Mugabe aura surtout ajouté de la souffrance à l'injustice. » De la souffrance blanche. Selon la BBC, cette politique a détruit l'économie du Zimbabwe basée sur l'agriculture, qui est dans une situation catastrophique avec une hyperinflation et une réapparition du choléra.

    Qui pourrait prétendre honnêtement que ce racisme-là a été condamné par la classe médiatique antiraciste ?

    En République Sud-Africaine, la situation n'est aujourd'hui pas meilleure. De très rares articles dans la presse écrite française s'en saisissent pour décrire « le massacre oublié des fermiers blancs ». Les télévisions françaises s'en désintéressent complètement.

    Plus indiscutable et plus récemment encore, le 22 février 2018, l'agence Reuter, dans une indifférence totale, annonçait que « dans un souci de soigner les divisions du passé, le président sud-africain fraîchement élu Cyrille Ramaphosa avait annoncé que l'expropriation de terres sans compensation était envisagée pour accélérer leur redistribution aux Sud-Africains noirs ».

    Si les mots ont un sens, cette annonce aurait dû plonger tous les hommes de bonne volonté, sincèrement désireux d'harmonie entre les peuples, dans un état de consternation ou d'hébétude.

    Si cette mauvaise décision est en effet menée à bien, elle tournera définitivement le dos à la politique de pardon et de réconciliation chère à Mandela et à Declercq. Elle signifiera la fin du pays « arc-en-ciel ». Plus désespérément encore, elle signifiera qu'un règlement politique pacifique basé sur la concorde et non le rapport de force est une chimère. Elle donnera raison aux pessimistes et aux cyniques.

    Mais il y a peut-être encore pire: l'incroyable omerta qui couvre pour l'heure en France les crimes sexuels autour des filles blanches ayant été découverts dans la commune anglaise de Telford.

    Près de mille jeunes filles ont fait l'objet de viols collectifs et de trafic de proxénétisme violent de la part d'hommes issus principalement de la communauté pakistanaise. L'affaire connue depuis plusieurs mois, vient de prendre désormais une dimension extravagante et met en cause la police et les médias.

    À l'époque de « Balance ton porc », où les violences faites aux femmes font l'objet d'une attention obsessionnelle permanente, le silence qui entoure ce drame immonde prend un tour invraisemblablement obscène et scandaleux.

    Je renvoie notamment aux articles du Birminghammail et du Mirror du 11 mars 2018 ainsi qu'à la note Wikipédia en français issue de la note anglaise qui vient d'être complétée: « Suite aux nouvelles révélations en mars 2018 dans le Sunday Mirror, la journaliste Johanna Williams du magazine Spiked, s'émeut que ce qui semble être le pire scandale d'abus sexuels sur des enfants de Grande-Bretagne ait reçu relativement peu de couverture et ne fasse pas la une de journaux tels que le Guardian ou le Times , alors que depuis plusieurs mois, le harcèlement des femmes est dénoncé comme par exemple par le mouvement Me Too dont elle dénonce l'hypocrisie et le silence assourdissant ». Comme de nombreux journalistes anglais le reconnaissent désormais, ces nouvelles révélations sont issues d'enquêtes du Daily Mirror et ont montré que l'étendue des abus était beaucoup plus vaste que ce qui avait été révélé auparavant.

    « Comme dans les autres affaires similaires, les auteurs étaient très majoritairement d'origine pakistanaise et bangladaise et de religion musulmane. Par crainte d'être considérées comme racistes, les autorités ont longtemps refusé d'enquêter » (Steve Bird The Télégraph du 9 décembre 2017).

    Pendant ce temps, les pseudo-antiracistes hystériques et les néo-féministes frénétiques à moralisme chromatiquement variable restent calmes.

    La souffrance, quand elle est blanche, demeure une zone noire interdite de visite. 

    Gilles-William Goldnadel est avocat et écrivain.  

  • La langue française s'enrichit d'un néologisme qui en dit long sur l'évolution du monde

    Xi Jinping, nouvel empereur de Chine ? 

     

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    La langue française s'enrichit d'un néologisme porteur de sens. Et d'un sens politique qui en dit long sur l'évolution du monde. C'est le mot « démocrature ». 

    Il s'oppose à démocratie qui a rapport avec le camp du Bien, le nôtre. Il désigne des régimes qui n’ont que les apparences d'une démocratie. Ils en respectent les rites et les pratiques. Mais ils flirtent avec la dictature. Ce sont des régimes autoritaires. Ils confinent avec le pouvoir d'un seul. Un pouvoir personnel. Y en a-t-il jamais eu d'autre ? Ils organisent un certain culte de la personnalité. La liberté d'expression n'y est qu'apparente. Les grands médias appartiennent à l'État ou à quelques oligarques. La corruption y est courante jusqu'aux marches du Pouvoir. Parfois jusqu'en son sommet. Ces régimes dits « sulfureux » appartiennent au camp du mal. On parle avec eux, au besoin on coopère, parce qu'il le faut bien. Comme l'Allemagne qui confirme la construction de son gazoduc avec la Russie malgré l'état de tension. Il faut bien s'éclairer, se chauffer, faire sa cuisine et approvisionner les entreprises. Mais on le fait du bout des lèvres et du bout des doigts. 

    L'ennui est que ces régimes prolifèrent. Ils sont légion. Les démocraties paisibles, les États dits de droit se font rares. Sont-ils en voie de disparition ? 

    Il y a d'abord l'Afrique, comme il est (presque) naturel. Les tyranneaux s'y ébattent à peu près partout en liberté ou presque. Mais il faut y ajouter l'Amérique centrale et du Sud où dictatures, guérillas et pronunciamientos sont simplement de tradition. Une habitude. Et puis les monarchies pétrolières dans le Golfe. La démocratie n'y signifie rien. Cela fait déjà une bonne partie du monde. Mais par-dessus tout il y a la Russie et Vladimir Poutine, pour qui le mot « démocrature » a été expressément forgé. Peu importe qu'il soit porté aux nues par une large majorité de Russes pour avoir refait la grandeur de leur pays humilié. C'est qu'il tient l'opinion d'une main de fer. Et il y a la Chine. Elle vient de consacrer la présidence à vie de son grand dirigeant, Xi Jinping. Lui aussi afin qu'il dispose d'assez de temps pour refaire de la Chine une grande nation. C’est ce qu’il a lui-même expliqué, hier matin. Et puis il y a même les Etats-Unis dont l'autoritaire et imprévisible président nomme et limoge comme Staline au temps des purges. 

    Au temps de la république en Angleterre, en Hollande, à Venise, Gênes et autres lieux, Louis XIV disait : « Je montrerai qu'il reste encore un roi en Europe ». 

    Restera-t-il encore demain sur la planète beaucoup de démocraties à la mode de l'Europe de l'Ouest où elles semblent s'être comme réfugiées ? Peut-être mais ce n'est même pas sûr. 

    La France elle-même s'est dotée d'un président jupitérien qui décide de tout, restaure la verticalité du Pouvoir, rétablit les symboles monarchiques : le Louvre, Versailles, Chambord, hier l'Académie française ... 

    Quant à la liberté française des grands médias, faut-il en rire ? Ils appartiennent à neuf oligarques macroniens. 

    La corruption d'État propre aux démocratures ? Hier nous apprenions que l'ancien président de la République Nicolas Sarkozy se trouvait en garde à vue dans l'affaire du financement de sa campagne électorale de 2007 par la Libye du colonel Kadhafi ... 

    Faut-il s'étonner ? Y eut-il jamais, hors d'une protection dynastique, de véritables démocraties ? 

    Les temps qui courent ne leur sont guère favorables. « Madame se meurt, Madame est morte » … C'est un peu cela. • 

     Retrouvez l'ensemble de ces chroniques en cliquant sur le lien ci-dessous

    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Notre avant-guerre ?

    La Chine investit près de 200 milliards de dollars/an pour son armée

     

    Ce que nous écrivions il y a 6 mois (19.09.2017) sur cette sorte d'atmosphère d'avant-guerre qui s'étend sur le monde, nous n'avons aucune raison de le démentir... Il semble au contraire que grandit une certaine prise de conscience dans les diverses opinions de l'aggravation des tensions et de la dangerosité du monde. Comme si ce n'était pas suffisant, et comme ce fut le cas dans les années 30 du siècle dernier, les va-t-guerre sont bruyants. Tel François Hollande tout récemment qui plaide pour une intervention française en Syrie. Faudrait-il que nous bombardions Damas avec les Américains, et seuls au besoin ? Cette folie est prônée ici et là. Les gens sages optent pour la paix.   LFAR 

    Publié le 19 septembre 2017 - Actualisé le 19 mars 2018

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    Périodiquement, il faudrait relire Giraudoux, esprit sage et subtil, bienveillant et souriant aux misères des hommes et des peuples, à leurs insuffisances et à ces fatalités qui, à intervalles réguliers, les conduisent dans de terribles malheurs. Par exemple les guerres modernes. Giraudoux en savait quelque chose, qui en avait vécu deux. Mondiales, pour la première fois. Mais on ne lit plus Giraudoux, on l'a oublié ou presque, on ne joue plus son théâtre. A notre société il manque la culture et au théâtre un Jouvet, qui avait fait de Giraudoux l'auteur dramatique de sa vie. 

    Ce qui nous a rappelé Giraudoux ces temps derniers, ce sont les prodromes d'une guerre, qui montent de l'actualité avec leur lot de ridicules, de dérision et de sourde inquiétude. C'est ce dont Giraudoux a superbement traité dans La guerre de Troie n'aura pas lieu. Et qui finalement aura lieu comme chacun sait. 

    Entre 1870 et 1914, on avait déjà cru une nouvelle guerre impossible. On pensait que le perfectionnement des armes la rendait trop meurtrière pour qu'elle fût tentée. On le croyait encore le 2 août 1914. Mais la guerre éclata quand-même le 3. Entre les deux conflits mondiaux on recommença : la tragédie avait été trop terrible entre 1914 et 1918, elle avait fait un trop grand nombre de morts - autour de 20 millions - pour qu'une guerre pût encore se produire. Et aussi on avait créé la Société des Nations, la SDN, ancêtre de notre ONU, pour, de toute façon, l'empêcher. Dérisoire illusion ! Hubert Védrine l'a fort bien dit : les institutions internationales ne sont que des lieux de rencontre. 

    Les grands conflits sont en général précédés de guerres dites régionales. La guerre d'Espagne, où les armées européennes, sauf la nôtre, s'étaient essayées, sur terre et dans le ciel, s'est terminée le 1er avril 1939 ; la Seconde Guerre mondiale éclata le 1er septembre. Nous avons aujourd'hui la guerre de Syrie, dont Eric Zemmour a dit - peut-être avec raison - qu'elle est notre guerre d'Espagne. Mauvais présage … Les aviations russe, américaine et accessoirement française, se croisent dans le ciel syrien, au risque, d'ailleurs, de s'y affronter. Des militaires de mêmes nationalités s'affairent sur son sol.  

    Précèdent aussi les conflits majeurs, ces rencontres entre « grands » où l'on fait assaut de pacifisme et de bons sentiments. Giraudoux, toujours, a restitué cette dramaturgie singulière dans La Guerre de Troie n'aura pas lieu, avec une infinie délicatesse et une lucidité amusée. En 1938, il y avait eu Munich. Nous avons les G7, les G 20, et les conférences au « format Normandie ». Trump, Poutine et Xi Jinping se sont rencontrés à Hambourg en 2017 ; les membres, plus chanceux, du G7 se sont offerts Taormine comme jadis on se retrouvait à Locarno. 

    La politique des « sanctions » fait aussi partie de la panoplie des avant-guerres. Comme il y eut, autour de 1935-1937, les sanctions contre l'Italie, aux funestes conséquences, nous avons les sanctions américaines contre Cuba et les sanctions, d'ailleurs réciproques, des « démocraties » contre la Russie, ou contre l'Iran et, aujourd'hui, les sanctions votées à l'ONU, contre la Corée du Nord. 

    Ajoutons encore à la panoplie des avant-guerre la prolifération des régimes autoritaires. Nous les avons, à Moscou, à Pékin, à Washington et, en un sens, à Paris qui a son Jupiter ... 

    C'est maintenant dans le Pacifique que semble s'être déplacée la perspective de grands affrontements. Loin de notre Europe, et c'est tant mieux. Les missiles de Pyongyang survolent à intervalles rapprochés le Pacifique et le Japon lui-même, qui d'ailleurs, avait occupé jadis la Corée. Elle ne l'a pas oublié. Les 160 000 Américains de l'île de Guam vivent dans la peur qu’un missile nord-coréen leur tombe dessus. Mais chacun sait que derrière la Corée du Nord il y a l'immense Chine et derrière la Corée du Sud et le Japon, les Etats-Unis. Contenue, pour un temps dont on ne peut dire combien il durera, par des motivations commerciales et financières, la rivalité sino-américaine n'en est pas moins un phénomène grandissant, derrière les sourires et les poignées de main. 

    Ces motivations pacifico-pragmatiques, toutefois, n’empêchent pas la course aux armements, dont on croit qu'on ne se servira jamais, comme on avait pensé jadis que la guerre de Troie n'aurait pas lieu. Ni celle de 14-18. Ni celle de 39-45 ! La course aux armements caractérise aussi les avant-guerres et nous conseillerons aux sceptiques de considérer l’ampleur et l’accroissement, étonnants pour les optimistes, des budgets militaires des grandes puissances d’aujourd’hui : les 622 milliards de dollars américains, que Trump vient de décider d’augmenter de 7% ; les presque 200 milliards de dollars chinois ; le programme militaire indien, en passe de rejoindre la Chine sur ce terrain ; sans compter l’éventuel réarmement du Japon, d’ailleurs déjà entamé. Que pèsent, en comparaison, les 44 milliards français et les 48 milliards russes ? 

    Justement, si le pragmatisme devait être abandonné, si un conflit majeur venait à éclater un jour ou l’autre dans les régions du Pacifique que nous avons évoquées, il ne faudrait pas dénier à l’Europe, qui s’est si longtemps épuisée à se battre chez elle, notamment la France, la chance de se trouver, pour une fois fort éloignées du théâtre du conflit, ni, nonobstant toutes alliances,  le droit de s’en tenir soigneusement à l’écart. Chacun sait que la guerre de Troie n’aura pas lieu. Mais si elle avait lieu tout de même ? Nous devrions dire comme Louis XV et rester sur le mont Pagnotte.  • 

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Syrie : Les islamistes se déchirent dans la province d’Idleb

    L'armée turque bombarde des djihadistes dans la province d'Idleb

     

    Par Antoine de Lacoste

     

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    Parmi les poches conservées par les islamistes en Syrie, seule la province d’Idleb a une étendue géographique significative.

    Sa conquête complète en 2015 par le front al-Nosra provoqua d’ailleurs l’intervention russe. Située au nord-ouest du pays, non loin de Lattaquié, cœur du pays alaouite et de Tartous, la base navale russe, son emplacement est stratégique.

    Elle est loin d’être reconquise par l’armée syrienne. Pire : c’est là qu’ont été acheminés les combattants islamistes et leurs familles qui ont accepté de se rendre en divers points du pays, notamment à Alep et le long de la frontière libanaise. Les Russes ont imposé cette méthode aux Syriens, qui permettait d’abréger de nombreux sièges.

    L’inconvénient, c’est que la densité islamiste est telle, que cette province est aujourd’hui un Etat dans l’Etat.

    Les factions djihadistes présentes étant bien souvent en concurrence, les règlements de compte y sont fréquents et, aujourd’hui, deux tendances principales s’y affrontent.

    Jahbat Tahrir Souria est la moins islamiste des deux (mais tout est relatif) et tient au moins les deux tiers de la province. Hay’at Tahrir el-Cham, elle, est l’héritière d’Al-Nosra ; elle tient Idleb, la capitale, où elle fait régner une impitoyable charia, et plusieurs autres villes de moindre importance.

    Deux événements majeurs viennent de se dérouler dans la province. Après plusieurs assassinats réciproques ayant atteint des responsables de ces mouvements, de violents combats se sont déroulés autour de plusieurs check-point. A la surprise générale, des civils s’y sont incrustés, attaquant par derrière des combattants d’Al Nosra et tuant plusieurs d’entre eux.

    Ce fait confirme un basculement : les Syriens ne veulent plus des islamistes et de leur terreur.

    Deuxième événement : les Turcs ont suivi de près tout cela et ont appelé à un soulèvement général contre les successeurs d’Al-Nosra.

    La stratégie turque est claire : mettre la main sur la province d’Idleb, par le biais de milices islamistes à sa solde.

    Cela mettrait un terme définitif au rêve kurde d’un territoire autonome le long de la frontière turque et cela permettrait à Erdogan d’être en position de force pour négocier avec les Russes et les Syriens. Pour tout cela il faut liquider Al-Nosra et successeurs, qui sont parfaitement incontrôlables.

    Dans le même temps, l’armée turque et ses alliés islamistes de l’ASL piétinent à deux pas de là, face à l’enclave kurde d’Afrin.

    Cela contrarie évidemment la stratégie d’Erdogan qui devra choisir entre deux options : intensifier le siège afin de remporter une victoire éclatante, ou négocier avec les Russes et les Syriens pour une option diplomatique qui permettrait de sauver la face.

    Mais pour l’instant, Russes et Syriens se concentrent sur la reprise de la Ghouta, objectif prioritaire aux portes de Damas.   

    Retrouvez l'ensemble des chroniques syriennes d'Antoine de Lacoste dans notre catégorie Actualité Monde.

  • Macron en Inde : Les civilisations très anciennes ne sont pas aisément mondialisables ...

     

    En deux mots.jpgEmmanuel Macron en Inde ne s'est pas travesti comme l'a fait Justin Trudeau.

    On doit avoir gardé chez nous, du monde ancien, un sens du ridicule plus aigu que nos cousins canadiens.

    Qu'importe ! Macron s'est contenté de tomber la veste pour dialoguer en bras de chemise, manches retroussées et cravate, avec des jeunes censés représenter la jeunesse de l'Inde.

    Dans un anglais parfait, mais tout de même de ceux que l'on comprend si l'on est français, il leur a expliqué sa vocation première, qui était de devenir écrivain (to become a writer), ambition assez tôt délaissée pour faire quelque chose d'autre (something else). Exit Paul Ricoeur, voici David de Rothschild, Jacques Attali, Michel Rocard... Sous leurs auspices, Macron sera banquier et / ou haut-fonctionnaire, ministre, et, en dernier ressort, mais sait-on jamais, président de la République. Comme Georges Pompidou, vrai littéraire, agrégé et normalien... 

    Macron entretient encore ses jeunes Indiens de sujets moins égotiques, plus pragmatiques. Il leur expose, leur fait miroiter, qu'il veut faire de l'Inde, en matière économique et technologique, y compris sous l'angle militaire, ce qui n'est sans-doute pas sans avantages ni sans danger, le partenaire stratégique privilégié de la France dans la région ! Certes n'importe qui ne fait pas ce qu'il veut de l'Inde. Mais cette dernière ne risque rien à acquiescer. Quant aux voisins - le Pakistan, le Japon ... et surtout la Chine, la grande rivale de l'Inde - l'avenir dira, lorsque leurs réactions seront connues, s'ils ont accordé ou non à ces avances plus de valeur qu'à des propos de circonstances.

    Les images de cette rencontre de notre président plutôt postmoderne avec les jeunes représentants de l'une des plus anciennes cultures encore vivantes en ce monde, l'une des spiritualités les plus marquantes et aussi l'une des sociétés les plus communautaires, les plus holistes, les moins individualistes qui soient, nous ont semblé avoir quelque chose d'assez singulier.

    Macron a sûrement lu dans les Antimémoires* les dialogues de Malraux avec le pandit Nehru et ses développements sur l'Inde, celle de Bénarès, du Gange, des Ashrams ... L'Inde de Max-Pol Fouchet, d'Hermann Hesse et du prince Siddhârta ... Où les dieux et les castes comptent toujours pour beaucoup, presque tout, les individus pour peu de chose ... L'on est loin de nos sociétés liquides où s'activent Macron et ses homologues. 

    C'est en effet un grand parti nationaliste, traditionaliste et religieux qui gouverne présentement le milliard et demi de citoyens indiens.

    Certes, l'Inde de Gandhi, de Nehru, est une grande démocratie politique. Et se veut telle. Mais selon ses modalités propres. Nehru avait prévenu Malraux : le progrès de l'Inde impliquerait une certaine « occidentalisation ». Mais « en partie seulement ». Et sans-doute pas la plus essentielle.

    Nous ne ferons pas au Chef de l'Etat l'injure de nous demander s'il s'est avisé que l'Inde n'est pas une démocratie, ni une société, encore moins une civilisation, tout à fait comme les nôtres. Pas plus que l'Asie dans sa pluralité et sa généralité.

    Pas plus que l'Homme introuvable de Maistre, les civilisations très anciennes ne sont aisément mondialisables.   • 

    * Gallimard 1967

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    En deux mots, réflexion sur l'actualité

  • Que se passe-t-il vraiment à La Ghouta ?

     

    Par Antoine de Lacoste

     

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    Depuis le 18 février, l’aviation syrienne bombarde à nouveau La Ghouta, cette vaste banlieue qui ceinture Damas. En 2013, à l’apogée de l’insurrection, les islamistes contrôlaient 150 000 km2 de ce territoire où les zones urbaines alternent avec les vergers.

    Cette proximité rendait la vie difficile à Damas, en raison des obus qui tombaient quotidiennement dans la capitale. Depuis, l’armée syrienne a méthodiquement repris le contrôle du terrain perdu.

    Seules deux enclaves islamistes subsistent : une petite au Sud (avec plusieurs centaines de combattants de Daesh) et une plus importante à l’Est,  110 km2 qui échappent à Damas. Quatre-cent- mille civils y vivent.

    C’est cette dernière enclave qui fait l’objet de l’offensive syrienne d’ailleurs pas si récente : depuis plusieurs mois, l’armée a repris plusieurs dizaines de villages et tente de négocier avec les milices islamistes pour une reddition puis un transfert vers Idleb, comme cela avait été le cas à la fin du siège d’Alep.

    Si l’Armée de l’Islam (soutenue par l’Arabie Saoudite) est prête à discuter, ce n’est pas le cas de ses deux concurrents : Fatah al-Cham (l’ex al Nosra, proche d’Al Quaida) et Faylak al-Rahman (affilié aux  Frères musulmans et au Qatar).

    Ces groupes reproduisent exactement la même tactique qu’à Alep : prise en otage de la population (tout civil qui veut quitter la zone est abattu), installation des armes lourdes dans les hôpitaux (pour obliger l’aviation à les bombarder et ainsi discréditer le régime), interception des rares convois de ravitaillement à leur profit.

    L’impact médiatique compte beaucoup dans cette guerre, et est utilisé avec maestria par les insurgés : les fameux casques blancs tant célébrés en Europe, sont tous, sans exception, des militants ou des combattants islamistes. Ce sont eux que l’on voit partout en photo évacuant les blessés après un raid aérien. Les photographes autorisés à opérer dans ces zones sont évidemment triés sur le volet par les islamistes : il ne faudrait pas qu’ils révèlent le dessous de certains montages…

    Quant au bilan des pertes, fourni quotidiennement par nos médias, il est invérifiable mais a une source unique : l’Observatoire syrien des droits de l’homme, l’OSDH. Basé à Londres, il est affilié aux Frères musulmans, et c’est lui qui, depuis le début de la guerre, donne les chiffres des morts et des blessés, docilement reproduit en boucle, sans la moindre vérification. La guerre en Syrie est un magnifique monument de désinformation.

    Cette offensive syrienne était inévitable. Chaque semaine, des obus tombent sur la capitale et cette situation ne pouvait durer. L’armée syrienne, depuis la libération de Deir ez-Zor, peut maintenant concentrer ses efforts sur la Ghouta orientale.

    L’aviation russe, absente depuis des mois dans cette région, est intervenue également. Dans le ballet diplomatique qui entoure cette nouvelle flambée de combats, les Russes veulent aller vite, comme à Alep.   

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  • Les Américains bombardent les Syriens à Deir ez-Zor

     

    Par Antoine de Lacoste

     

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    Le siège de Deir ez-Zor fut un des hauts faits d’armes de la guerre qui ravage la Syrie depuis six ans.

    Après des mois de résistance acharnée, l’enclave loyaliste (un tiers de la ville) avait été libérée par l’armée syrienne, appuyée par l’aviation russe. Daesh était une nouvelle fois vaincue et devait abandonner sa dernière ville importante en Syrie.

    C’était en septembre dernier, sur l’Euphrate.

    Au-delà du fleuve, il y a les champs de gaz et de pétrole, jusqu’à la frontière irakienne. Les Américains sont alors entrés en scène et ont organisé l’occupation par les Kurdes de la rive Est de l’Euphrate. Ce territoire est exclusivement peuplé d’Arabes mais peu importe. Il s’agissait d’empêcher le régime de reconquérir trop de territoire et trop de ressources financières.

    Depuis, les choses étaient figées : l’armée syrienne à l’Ouest, les Kurdes et les conseillers américains à l’Est.

    Mais avec l’offensive turque contre l’enclave kurde d’Affrin (au nord-ouest du pays), plusieurs centaines de volontaires kurdes ont quitté la région de Deir ez-Zor pour rejoindre leurs frères attaqués. L’armée syrienne les a laissés passer.

    Damas a pensé alors, qu’affaiblie, la résistance kurde serait symbolique et qu’un déploiement de force au-delà du fleuve était possible.

    Plusieurs centaines d’hommes ont donc traversé l’Euphrate. L’aviation américaine (pudiquement appelée « aviation de la coalition ») est aussitôt intervenue massivement, tuant plusieurs dizaines de combattants. Parmi eux des chiites iraniens et afghans ainsi que des arabes de la région, membres des milices pro-Damas.

    Ce coup de poker se solde donc par un échec. Les Américains ont clairement indiqué qu’ils continueraient d’occuper cette partie de la Syrie, sans d’ailleurs le moindre mandat ni du régime syrien ni de l’ONU.

    Leur objectif principal est connu : il s’agit d’assurer une présence permanente par le biais des Kurdes afin d’empêcher une implantation durable de l’Iran, nouvel empire du mal pour Washington.

    Bien évidemment, l’offensive turque contre Affrin perturbe leur plan, car il a bien fallu lâcher son fidèle allié kurde dans cette bataille afin de ne pas heurter de front la Turquie, toujours membre de l’OTAN.

    Mais la région de Deir ez-Zor, loin de la frontière turque, n’intéresse pas Erdogan et les Kurdes, couverts par l’aviation américaine, peuvent continuer d’occuper ces territoires et d’engranger les recettes gazières…

    Il n’est toutefois pas certain que cette occupation se poursuive encore longtemps sans accroc dans une région de peuplement exclusivement arabe car chacun sait que Kurdes et Arabes vivent rarement ensemble pacifiquement.

    Pendant ce temps, dans Deir ez-Zor libérée par l’armée syrienne, SS Ignace Aphrem II Karim, Patriarche d’Antioche et de tout l’Orient de l’Eglise syriaque orthodoxe, célébrait une messe dans les décombres de l’église Sainte Marie. La première depuis six ans.  

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    A lire aussi dans Lafautearousseau ...

    Le pire est peut-être à venir 

    par Louis_Joseph Delanglade

  • Bridgewater, le plus grand fonds d’investissement au monde, prédit un krach financier

     

    Par Marc Rousset 

    En matière de prévision économique, une bonne dose de prudence s'impose. Bernard Maris disait qu'un économiste est un monsieur qui est capable d'expliquer le lendemain pourquoi il s'est trompé la veille. Une addition de principes de bon-sens et de connaissance des dossiers conduit toutefois à envisager sérieusement ce qui peut attendre nos sociétés dans un avenir plus ou moins proche. C'est l'exercice auquel Marc Rousset se livre ici pour nous au fil d'une analyse documentée qui intéressera ce qu'on appelait jadis les pères de famille aussi bien, d'ailleurs,  que les patriotes. La racine est la même ! ...   LFAR 

     

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    Bridgewater, le plus grand fonds d’investissement au monde, gère 160 milliards de dollars. Ray Dalio, son fondateur, s’est rarement trompé. En 2007, il avait prophétisé la fin du boom immobilier américain, l’effondrement imminent des banques et l’implosion des marchés du crédit. Selon le Financial Times du dimanche 18 février, Bridgewater est d’avis qu’après le mini-krach récent d’environ 10 %, « une secousse bien plus grande arrive ; les marchés vont entrer dans une nouvelle ère de volatilité »« La fin de l’argent facile » va déclencher une cascade de ventes et un krach financier.

    Les raisons principales sont la peur d’une inflation grandissante, la fin de la politique monétaire d’assouplissement quantitatif et le rendement de presque 3 % des bons du Trésor américain. Les États souverains en quasi-faillite ainsi que les entreprises « zombies » ne supporteront pas le choc à venir de la hausse des taux d’intérêt.

    Les prix des actions et des obligations sont au plus haut et les déficits jumeaux commercial et budgétaire des États-Unis vont continuer à se creuser d’une façon abyssale. Lloyd Blankfein, le président de Goldman Sachs, se déclare soucieux que Trump jette du combustible sur le feu pour les dix prochaines années avec une baisse des impôts de 1.500 milliards de dollars, un plan de modernisation des infrastructures de 1.500 milliards de dollars, une relance des dépenses militaires de 1.200 milliards de dollars et 400 milliards de dépenses nouvelles en 2019, ce qui porterait le déficit de l’État fédéral à 984 milliards de dollars. Ce déficit serait le plus important de l’histoire américaine par rapport au PIB, hors périodes de récession et de guerre.

    Le PER de Shiller, qui compare la capitalisation boursière du S&P 500 américain à la moyenne des bénéfices réels ajustés en fonction de l’inflation, est à un score historiquement élevé de 32. Il est plus élevé que celui du jeudi noir de 1929 et n’a été dépassé que lors de la bulle Internet en 2000. 

    Quant au magazine Capital, il craint que le krach de 2018 ne soit pire qu’en 1987. Les systèmes de vente automatiques et les stratégies de protection du portefeuille avaient joué un rôle primordial lors du krach de 1987. Le phénomène pourrait se reproduire en 2018. Mais les autorités, en 1987, avaient des cartouches dont elles sont aujourd’hui démunies. Les pays occidentaux n’ont plus de marges de manœuvre budgétaires, monétaires ou sur les taux, tandis que la BCE n’a même pas encore mis un terme à son programme de rachats d’obligations européennes. 

    Il n’y a donc plus de prêteur de la dernière chance qui soit prêt à soutenir le système financier mondial. En outre, la Fed est désormais dans l’incapacité légale d’entreprendre les mêmes actions d’urgence qu’en 2008. Le Dodd-Frank Act, adopté à la va-vite sous Obama après la faillite de Lehman Brothers, empêche la Fed de voler à la rescousse de sociétés individuelles en difficultés ou de prêter dans l’urgence à des sociétés non bancaires. La Fed ne peut prêter de l’argent qu’à des institutions assurées, et avec la permission du Trésor.

    En 2008, c’est la Fed qui avait sauvé le système financier européen en créant des dollars pour soutenir le marché interbancaire européen. Le 14 octobre 2008, le montant des « swaps » en dollars passa brusquement de 50 milliards de dollars à 580 milliards de dollars.

    Le paradoxe, c’est que seule la concurrence mondiale exacerbée, qui a pour conséquence la disparition à terme de toutes les industries occidentales, freine la remontée de l’inflation ! Mais depuis 2008 et Lehman Brothers, la dette mondiale globale est passée de 57 % à 327 % du PIB. Face à la faillite de nombreuses entreprises et de nombreux États, dont la France, suite à la remontée des taux d’intérêt à long terme, on pourrait alors assister à l’éclatement simultané des bulles dans les cinq classes d’actif, les trois plus périlleuses étant les cryptomonnaies, les obligations et les actions, suivies de l’immobilier ainsi que des œuvres d’art, biens réels gardant toujours une valeur substantielle si l’on se réfère à la crise hyperinflationniste de 1923 en Allemagne.   • 

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    Économiste

    Ancien haut dirigeant d'entreprise

  • Le pire est peut-être à venir

     

    par Louis-Joseph Delanglade

     

    logo lundis.jpgPoussée de fièvre compassionnelle la semaine dernière, provoquée par la reprise des bombardements de l’aviation syrienne sur les dernières enclaves tenues par des insurgés islamistes, notamment celle de la Ghouta à l’est de Damas.

    Toute la semaine, le « machin » n’aura brui que de cela, la Suède et le Koweit, attelage improbable, ayant donc présenté devant le Conseil de sécurité de l’ONU une motion en faveur d’un cessez-le-feu « humanitaire ». Mardi 20 février, M. Le Drian, ministre des Affaires étrangères, qu’on avait pu juger relativement convenable dans son précédent ministère de la Défense, a alerté la représentation nationale sur la situation en Syrie, allant jusqu’à affirmer que « le pire est devant nous ». Et la France d’enfourcher ce cheval de bataille, M. Macron lui-même prenant l’initiative de co-signer avec Mme Merkel (cela peut aider) une lettre demandant à M. Poutine de ne pas opposer son veto.

    M. Assad cherche, et c’est bien légitime, à rétablir l’autorité de l’Etat syrien sur la totalité d’un territoire aux frontières internationales dûment reconnues. On lui reproche sa brutalité mais les derniers islamistes de la Ghouta méritent-ils mieux ? Quant aux civils, ils sont malheureusement les victimes désignées de toutes les guerres : croit-on - pour s’en tenir à l’exemple bien commode d’une guerre mondiale, la seconde, où le bien est censé avoir triomphé du mal - que l’Armée rouge en Prusse orientale ou les Américains dans le Pacifique l’ont emporté sans d’énormes massacres de populations civiles ? Ce n’est pas du cynisme, c’est un constat, personne n’empêchant d’ailleurs Suède et Koweit de se faire en l’occurrence les avocats des civils syriens. 

    Ceux qui soutiennent directement la Syrie ont le mérite de la clarté. L’Iran, perse et chiite défend un allié naturel, dont la stabilité retrouvée lui permettrait de s’imposer dans la région. La Russie, trop vite enterrée par médias et diplomates occidentaux, fait son retour sur la scène mondiale en cherchant à se ré-approprier son pré carré proche-oriental. En face, c’est plus confus. Concernant les Américains, une seule chose paraît sûre : leurs liens avec Israël et, à un moindre degré, l’Arabie séoudite. Avec leurs alliés turcs, les choses se compliquent : désormais, la diplomatie et les actions militaires de la Turquie sunnite sont essentiellement motivées par  le danger sécessionniste kurde. Alliée des Américains, la Turquie est leur ennemie par Kurdes interposés. 

    Dans cet imbroglio, la France est présente militairement. Il s’agissait de combattre jusqu’à son éradication l’Etat islamique. La disparition quasiment assurée de celui-ci souligne désormais la nécessité d’une politique étrangère cohérente. M. Le Drian affirme (Libération, 23 février) que « ce qui compte, c’est de gagner la paix en Syrie aujourd’hui », en privilégiant l’humanitaire et le diplomatique.  Soit, mais il faudrait donc, sauf à se limiter à des bouffées de compassion dignes du Koweit et de la Suède, rétablir le dialogue avec Damas et, mieux, le lien diplomatique. Il en est grand temps car déjà se profile un embrasement régional d’une autre dimension, l’Iran se manifestant sur deux fronts, par le renforcement de sa zone d’influence sur les frontières libano-israélienne et syro-israélienne et par son soutien actif aux insurgés chiites du Yémen. M. Le Drian, et c’est une bonne chose,  doit se rendre à Moscou le 27 février et à Téhéran le 5 mars. Pour que la paix en Syrie se gagne avec la France, il lui faudrait aussi rétablir un contact direct avec son homologue syrien.  

  • Les bobards de l’intervention occidentale en Libye et au Kosovo

     

    Par Marc Rousset 

     

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    Quelque chose est en train de bouger ou de changer dans le royaume de France. Il est ahurissant qu’ait pu paraître sur la page 18 entière du Figaro du samedi 3 février 2018 un dossier aussi accusateur et politiquement incorrect que l’interview de Rony Brauman, ex-Président de Médecins sans frontières, par le grand journaliste Renaud Girard, Normalien, adepte de la « Real Politik », épris très souvent de vérité et d’un sens minimum de l’honnêteté intellectuelle.

    Rony Brauman vient en effet de faire paraître son ouvrage intitulé : « Guerres humanitaires ? Mensonges et intox » (éditions Textuel). Cette chronique dans le premier quotidien français pourrait être le point de départ d’une commission d’enquête parlementaire française sur les mensonges politico-médiatiques lors de l’intervention en Libye. Les accusations de Rony Brauman sont d’autant plus graves que le Parlement britannique a mené une enquête qui a confirmé la réalité des bobards. L’ancien Président Obama a pu qualifier l’expédition en Libye, tant vantée pourtant par Hillary Clinton, de « plus grande erreur de sa présidence ».

    guerres-humanitaires-rony-brauman-161x300.jpgLes bobards dépassent en intensité ceux des armes de destruction massive de Saddam Hussein pour justifier l’intervention américaine en Irak. On peut mieux comprendre à la lumière de cet ouvrage l’indignation des Russes et le désir de Poutine de ne pas être de nouveau le dindon de la farce en Syrie.

    Contrairement à ce qui a été prétexté, la rébellion armée de Benghazi était parfaitement à même de se défendre et de protéger son territoire. Personne n’a jamais vu, à supposer qu’elle ait existé, la prétendue colonne de chars de Kadhafi. Il n’était de toute façon pas nécessaire de commencer une guerre ; de simples survols de la « colonne fantôme » ou des tirs d’arrêt auraient suffi.

    Le colonel Kadhafi qui prétendait dans ses discours enflammés aller chercher les opposants « ruelle par ruelle », n’avait pas les moyens d’écraser la rébellion de Benghazi. L’attaque de manifestants à Tripoli par les avions de Kadhafi n’a également jamais eu lieu. Sarkozy, Cameron et Obama ont pu cependant déclarer : « Un chef d’Etat qui envoie son aviation contre son peuple n’est plus digne de gouverner ; il doit partir ».

    De même les charniers de Benghazi et de Tripoli n’ont jamais existé. Le représentant de la ligue libyenne des droits de l’homme faisait pourtant état de six mille morts ensevelis à la hâte en une dizaine de jours. La quasi-totalité des médias, des hommes politiques et des intellectuels ont repris et divulgué en 2011 cette fausse information.

    IL y a ceux qui voient ce qu’ils croient et ceux qui, comme les patriotes, croient ce qu’ils voient. La guerre était en réalité voulue par l’Occident. Il s’est passé seulement 5 semaines entre la première manifestation à Benghazi du 15 février 2011 et l’attaque aérienne française du 19 mars. Toutes les tentatives de médiation (Union africaine, Turquie, Sénégal, Afrique du Sud) ont été repoussées. Voilà ce que le politiquement correct et l’infâme BHL appellent une guerre juste !

    A noter qu’il en a été de même pour la guerre déclenchée par l’Otan en mars 1999 qui a bombardé pendant 83 jours Belgrade et les populations civiles serbes alors que la  Serbie souhaitait reprendre le contrôle du Kosovo, son berceau mythique ancestral avec ses monastères, perdu le 28 juin 1389 face à l’empire ottoman lors de la bataille du Champ des Merles, envahi par l’immigration d’origine albanaise devenue majoritaire.

    La véritable raison de l’agression par l’hyper-puissance américaine était alors le désir de justifier le maintien de l’organisation militaire de l’OTAN, de narguer les Nations-Unies, la Chine, l’Europe et la Russie, d’affaiblir l’Europe en favorisant le multi-ethnisme et l’islam, de poursuivre l’expansion militaire à l’Est et d’implanter la plus grande base militaire hors des Etats-Unis de « Bondsteel » forte de 10 000 hommes.

    Le droit de l’hommiste Bill Clinton avait eu alors le toupet de dire : « Nous intervenons pour édifier un Kosovo pacifié et multi-ethnique ».  • 

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    Économiste

    Ancien haut dirigeant d'entreprise

  • Al Nosra abat un appareil russe à Idleb

     

    Par Antoine de Lacoste

     

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    Pour la première fois depuis le début de l’intervention russe en Syrie (septembre 2015), les islamistes ont abattu un avion russe.

    Il s’agit d’un Soukhoï SU-25 piloté par le major Roman Filippov. Il a réussi à s’éjecter mais en pleine zone ennemie. Vite encerclé par plusieurs dizaines de djihadistes, il s’est courageusement défendu avec son pistolet. Sur le point d’être pris, il a préféré se faire sauter avec une grenade plutôt que d’être pris vivant et de soumettre la Russie à un odieux chantage.

    Son sacrifice n’est pas sans rappeler celui d’un autre officier, Alexandre Prokhorenko, mort en mars 2017 pour la reconquête de Palmyre. Encerclé par des combattants de Daesh, il avait commandé à l’aviation russe une frappe aérienne pour mourir en tuant un maximum d’islamistes.

    Depuis cet incident, les Russes ont ordonné à leurs pilotes de voler au dessus de 5000 mètres, distance à partir de laquelle les missiles sol-air sont inopérants.

    Les Russes ont pu récupérer le corps de leur pilote, ce qui en a étonné plus d’un. L’explication est simple : c’est l’armée turque qui s’en est occupée, ce qui en dit long sur son implantation à Idleb et sur son influence sur les islamistes qui avaient récupéré le corps.

    Les spécialistes russes aimeraient aussi examiner les débris de l’avion afin de déterminer l’origine du missile : fabrication américaine, française ? Plusieurs hypothèses sont envisageables et il est important pour la suite des opérations militaires de connaître le type d’armement dont disposent les combattants islamistes.

    Les Américains se sont dits « préoccupés », expression diplomatique signifiant quelque chose comme « ça nous est complètement égal ».

    Ce sont pourtant bien eux qui ont, les premiers, armé des insurgés avec du matériel sophistiqué, par le biais de la CIA. La fiction des combattants « modérés » n’a pas longtemps résisté à l’épreuve des faits. La désinformation occidentale a même été jusqu’à inventer le concept d’ « islamiste modéré » ce qui ne manque tout de même pas de sel. Mais il a fallu attendre fin 2015 et le scandale des insurgés entraînés et armés à grands frais par la CIA, passés chez Daesh aussitôt envoyés sur le territoire syrien, pour que cessent les livraisons d’armes.

    Aujourd’hui, personne ne connait la quantité et la qualité des armes en circulation dans la province d’Idleb, mais on peut pressentir que l’élimination des islamistes du dernier territoire qu’ils détiennent en Syrie ne sera pas simple.

    Les progrès de l’armée syrienne, qui a lancé une grande offensive au sud-est de la province, sont d’ailleurs lents et les islamistes savent qu’après Idleb, il n’y a plus rien pour eux. Leur résistance sera donc farouche.

    Ce qui est sûr, c’est que, depuis la mort de leur pilote, les Russes ont accentué leur pression sur les groupes d’Al Nosra (ou Tahrir el Cham comme on dit maintenant). L’aviation pilonne sans cesse les positions islamistes et il est probable que la reprise de la province d’Idleb soit devenue un objectif majeur pour  les Russes et les Syriens.

    Mais pour cela, il faudra s’entendre avec les Turcs. C’est, entre autres, pour cela que les Russes ont laissé les Turcs attaquer les Kurdes à Affrin.  

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  • Les enjeux de la bataille d’Afrin

    Offensive d'Afrin

    Par Antoine de Lacoste

     

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    Voilà maintenant plusieurs jours que l’armée turque a lancé son offensive contre l’enclave kurde d’Afrin, au nord-ouest de la Syrie. Les résultats ne sont guère tangibles pour l’instant (hormis la destruction stupide d’un site assyrien vieux de 3000 ans inutilement bombardé…).

    Les pertes semblent faibles des deux côtés et les kurdes ne sont pas encore menacés de perdre leur bastion d’Afrin.

    On sait que c’est l’annonce par Rex Tillerson, le secrétaire d’Etat américain, de la prochaine création d’une milice arabo-kurde (surtout kurde en fait) de 30 000 hommes chargée de garder la frontière turco-syrienne qui a déclenché l’ire turque.

    Il n’est en effet pas question pour Erdogan d’accepter à sa porte une telle force payée par les Américains et proche du PKK, le mouvement séparatiste kurde qui opère en Turquie.

    Afin d’éviter des pertes trop importantes, la Turquie a mis en première ligne les hommes de l’ASL, l’armée syrienne libre, qu’elle finance depuis maintenant plusieurs mois. C’est une évolution intéressante.

    En effet, l’ASL nous a longtemps été présentée comme l’opposition syrienne modérée sur laquelle s’appuyer pour reconstruire la Syrie après le départ de Bachar el Assad. Cette fiction a aujourd’hui disparu surtout depuis la bataille d’Alep. Non seulement cette bataille fut le tournant militaire de la guerre mais en plus elle a mis en lumière les multiples exactions des combattants de l’ASL qui tenaient plusieurs quartiers Est de la ville.

    Lâchée par les Américains (qui préfèrent maintenant les FDS kurdes), laminée par les bombardements russes, l’ASL n’avait plus que la Turquie pour ne pas disparaître tout à fait. Celle-ci l’a donc remise en selle à son profit.

    L’ASL est aujourd’hui composée de Turkmènes (insurgés islamistes ethniquement proche des Turcs), des Frères musulmans syriens (l’idéologie originelle d’Erdogan) et de petits groupes rescapés des programmes d’aide du Pentagone qui rêvait alors de renverser le régime syrien.

    Ce mouvement hétéroclite d’environ 7000 hommes tente donc, avec l’armée turque, de mettre fin à l’autonomie kurde qui prévaut à Afrin depuis 2012.

    Même si, pour l’instant, les Kurdes repoussent sans mal les médiocres assauts turco-ASL, leur inquiétude est cependant réelle : ils ont créé une partition de fait qui a provoqué la colère de la Syrie (qui n’avait guère les moyens de l’empêcher) et refusé la médiation russe ; celle-ci en effet passe par un refus de toute partition du pays, or c’est l’objectif ultimes des Kurdes.

    En fait, ils comptaient fermement sur Washington pour demander à Erdogan de ne pas déclencher son offensive. Mais les Américains, peu soucieux d’envenimer davantage leurs relations avec Erdogan, n’ont rien fait.

    Alors, les autorités kurdes se sont résignées à aller à Canossa et ont demandé à la Syrie « d’assumer ses obligations souveraines, de protéger ses frontières des attaques de l’occupant turc et de déployer ses forces armées pour sécuriser ses frontières dans le secteur d’Afrin » !

    Les kurdes parlant d’obligations souveraines de la Syrie : on croit rêver et l’on se dit qu’il n’y a que l’Orient pour nous offrir des revirements aussi improbables…

    Damas se frotte les mains et attend que les Russes et les Turcs se parlent pour trouver un modus vivendi, ce qui arrivera à un moment ou un autre. Plus que jamais le temps joue en faveur de Bachar.

    Quant aux Américains, ils ont, une fois de plus, démontré aux acteurs du théâtre syrien que leur présence dans ce pays est tout à fait superflue.  

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