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Idées, débats... - Page 409

  • Famille de France • Le Prince Eudes, duc d’Angoulême au château de Vincennes

     
    Son Altesse Royale, le Prince Eudes de France, Duc d’Angoulême, a assisté récemment au château de Vincennes à la commémoration des combats de la Sidi-Brahim de 1845.

    Le frère cadet du prince Jean de France, a assisté, aux côtés des Officiers de l’armée française et des autorités civiles, à la prise d’armes et au défilé des Chasseurs. C’est en effet à Vincennes que fils du roi Louis-Philippe, le prince royal Ferdinand, duc d’Orléans,  à créé en 1838, le 1er Bataillon de Chasseurs à pieds. 

    En 1830, au cours des combats qui se déroulent sous Alger, le Haut commandement constate avec regret l’absence de troupes légères d’infanterie. Cette préoccupation, dominée par les nécessités de la conquête, devient l’idée première des grands chefs militaires de la Monarchie de Juillet et en premier lieu, Son Altesse royale le prince royal Ferdinand, duc d’Orléans. 

    L’héritier du Trône, s’intéresse particulièrement aux questions militaires. Il a l’idée, pour remplacer les anciens voltigeurs disparus depuis 1815, de créer un corps d’infanterie légère portant le nom de Chasseurs d’essai. Il prend l’avis des grands généraux survivants de l’épopée impériale, et, en août 1837, le général Houdetot, aide de camp du Roi, est chargé d’organiser à Vincennes une Compagnie de tirailleurs. Des hommes d’élite sont prélevés dans tous les régiments de la métropole. Les excellents résultats obtenus décident la création, d’abord provisoire en novembre 1838 puis définitive en août 1839, d’un bataillon à six compagnies, les Tirailleurs de Vincennes. La première remise des drapeaux des chasseurs, aura lieu, le 4 mai 1841, aux Tuileries, où les bataillons de chasseurs recevront leur drapeau des mains du Roi Louis-Philippe. 

    Sources
    Noblesse et Royautés & La Couronne
  • Patrimoine cinématographique • Mourir à Madrid

     

    Par Pierre Builly

    Mourir à Madrid de Frédéric Rossif (1963) 

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    Et sur les chemins secs et roux… 

    Les guerres civiles sont à la fois les plus absurdes des guerres, puisqu'on y massacre voisins, frères et cousins, et les plus logiques, puisqu'on sait généralement assez précisément sur qui on tire et pourquoi on déteste le type d'en face, ce qui est rarement le cas quand la Valachie affronte la Suède ou le Brésil, la Malaisie... 

    mourir-a-madrid-aka-to-die-in-madrid-DXN7PB.jpgÀ cet égard, la guerre d'Espagne a été un assez remarquable exercice de détestation totale, puisque, avec 1 million de morts en moins de trois ans, elle a fait presque aussi bien que la Grande Guerre en France en plus de quatre ans, et qu'elle résonne encore suffisamment dans les mémoires et dans les attitudes. 

    Le beau film de Frédéric Rossif a été tourné (je veux dire essentiellement monté et sonorisé, puisqu'il s'agit principalement d'images d'archives) en 1962/63 ; c'était là une époque où la notion même de politiquement correct n'existait pas encore, c'est-à-dire que, tout en prenant fermement un parti, on n'était pas obligé de n'en pas énoncer les limites, les défaillances et les crimes et où on pouvait dire et montrer l'infinie complexité de l'Histoire. 

    maxresdefault.jpgTout en se rangeant clairement du côté républicain, Rossif et l'auteur du commentaire, Madeleine Chapsal n'esquivent pas des réalités qui sont aujourd'hui ensevelies dans l'ignorance collective et le manichéisme : le faible écart des suffrages entre le Front Populaire et la Droite aux élections de 36, les révoltes et les immédiats massacres de milliers de prêtres, de religieuses, de propriétaires terriens, l'assassinat concerté de Calvo Sotelo, leader de la Droite (apostrophé à la Chambre des députés par la Pasionaria d'un sympathique « Cet homme vient de parler ici pour la dernière fois ! » ; il est vrai que la dame se vantait d'arracher le coeur des prêtres avec les dents), et, naturellement, le remarquable terreau de disputes que la cohabitation de socialistes, communistes staliniens, trotskystes, anarchistes allait susciter. 

    117976660-1024x1024.jpgD'où un film aussi passionnant que bien construit ; passionnant parce qu'il n'est coupable d'aucun didactisme, remarquable parce que les images qu'il montre - et que le commentaire, sobre, jamais pesant, laisse librement s'exprimer - sont superbes et significatives, bien construit, parce que Rossif était un monteur très talentueux et qu'il savait aussi, comme le dit très justement la productrice, Nicole Stéphane, dans un des suppléments, choisir les voix et composer comme une partition les différentes séquences, employant sur certains types de sujets les timbres de Jean Vilar, Pierre Vaneck, ou, par exemple, Suzanne Flon dès qu'il s'agit des Brigades Internationales. 

    La musique de Maurice Jarre, habituellement un peu grandiloquente (Docteur Jivago, Lawrence d'Arabie) est ici d'une exemplaire sobriété et alterne avec la reprise de chants d'assaut de la guerre (les très célèbres « Paso del Ebro » et « Cuatro generales »). 

    1423.jpgCe film, que j'ai vu et revu depuis 1963 est, à mes yeux, un indispensable complément des oeuvres historiques solides sur la période, celles de Hugh Thomas (Bouquins) ou de Bartolomé Bennassar (Perrin), qui ne donnent ni dans la polémique, ni dans l'hagiographie d'un camp ou l'autre ; il est excellemment édité, malgré des suppléments un peu décevants ; outre l'interviouve de la productrice, un bref film sur l'Espagne tourné « en leurre » par Rossif pour abuser les autorités franquistes et, dans un second DVD, un film sur la prégnance du passé dans l'Espagne d'aujourd'hui (les disparus des fosses communes) qui, lui, est entièrement à charge et présente donc les défauts de toute œuvre militante qui se prend au sérieux.

    xERO7wGw2u2cLf6aWVP0u6IW5Y3.jpgOn aurait apprécié, pour qui connaît mal ou peu la période, un documentaire de cinq minutes plus pédagogique sur le déroulement de la Guerre. 

    Cela étant, je crois que je regarderai encore souvent ce magnifique Mourir à Madrid qui s'ouvre et se ferme, au son du seul leitmotiv triste d'une guitare, sur la brume du col de Somosierra, où a eu lieu la première bataille pour la possession de Madrid.   

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    DVD autour de 14 €

  • Livres & Histoire • Les vérités cachées de la guerre d'Algérie, le nouveau livre de Jean Sévillia

     

    Sévillia Guerre d'Algérie.jpgLANCEMENT LE 24 OCTOBRE 2018 (416 pages, 23€)

    Plus d’un demi-siècle après l’indépendance de l’Algérie, est-il possible de raconter sans manichéisme et sans œillères la guerre au terme de laquelle un territoire ayant vécu cent trente ans sous le drapeau français est devenu un État souverain

    La conquête et la colonisation au XIXe siècle, le statut des différentes communautés au XXe siècle, le terrible conflit qui ensanglanta l’Algérie et parfois la métropole de 1954 à 1962, tout est matière, aujourd’hui, aux idées toutes faites et aux jugements réducteurs. 

    Sévillia Guerre d'Algérie  2.jpgAvec ce livre, Jean Sévillia affronte cette histoire telle qu’elle fut : celle d’une déchirure dramatique où aucun camp n’a eu le monopole de l’innocence ou de la culpabilité, et où Français et Algériens ont tous perdu quelque chose, même s’ils l’ignorent ou le nient.

    Journaliste, essayiste et historien, auteur de nombreux ouvrages qui ont été des succès de librairie (Zita impératrice courage, Le Terrorisme intellectuel, Historiquement correct, Historiquement incorrect, Histoire passionnée de la France), Jean Sévillia est chroniqueur au Figaro Magazine et membre du conseil scientifique du Figaro Histoire

    Retrouvez toute l’actualité concernant Jean Sévillia sur son site :
    www.jeansevillia.com
    Contact presse : Sandie Rigolt : 06 38 92 71 58 / 01 44 49 79 71 / srigolt@editions-fayard.fr
  • Cinéma • I Feel Good

     

    Par Guilhem de Tarlé

    A l’affiche : I Feel Good, un film de Benoît Delépine et Gustave Kervern, avec Jean Dujardin (Jacques) et Yolande Moreau (Monique).


    GT Champagne !.JPG

    I Feel Good, et moi je me suis senti très mal durant la projection en anticipant la fureur de mon épouse qui ne voulait pas aller voir ce film.

    C'est vrai que la bande annonce était plutôt dissuasive, à la réplique près sur Karl Marx... « c'est  pas (lui) qui va aider à avoir un jacuzzi ou une pergola ».

    Le début est peut-être plaisant, à entendre les boniments de Jacques ; mais c'est ensuite un grand n'importe quoi qui m'a mis très en colère, et j'en veux à ce critique favorable d'une télé amie qui m'a ainsi fourvoyé.

    Je l'aurais donc jeté à la poubelle, lui et sa pochade, si celle-ci n'avait comporté  une condamnation nette du communisme, avec « ses 100.000 morts et son drapeau rouge du sang de ses victimes ».

    9871309.jpgA tout péché miséricorde pardonne Jacques, dont les parents étaient communistes, qui confesse, avec honte, avoir lui-même été partisan de Bernard Tapie !

    Ces réflexions justes, et Yolande Moreau, antisexy  mais vraie gauchiste (ça va souvent de pair), ne m'empêchent pas de vous recommander de ne pas vous laisser prendre par le baratin de Jean Dujardin et d'éviter ce long-métrage  en l’abandonnant dans la recyclerie-déchetterie d'Emmaüs pilotée par Monique.

    Jean-Dujardin-incarne-Jacques-sorte-loser-magnifique-quete-bonne-ideedevenir-riche_0_729_487.jpgQuant à l'abbé Pierre... au risque déplaire je rappellerais ses sympathies très à gauche, qui ne fit preuve publiquement d'aucune charité chrétienne  lors des règlements de compte de l'épuration, ni pour les soldats morts en Indochine (il vota avec les communistes contre  les crédits de rapatriement), ni pour les pieds-noirs et harkis abandonnés ou rapatriés d'Algérie, et je n'ai pas connaissance qu'il s'insurgeât contre  le vote de L'IVG.   

    PS : vous pouvez retrouver ce « commentaire » et plusieurs dizaines d’autres sur mon blog Je ciné mate.

  • Archives • Quand Jean Raspail répondait aux questions de François Davin et Pierre Builly (1978)

    Jean Raspail aux Baux de Provence en 1983. À ses côtés, Pierre Chauvet, Pierre Pujo, Gérard de Gubernatis 

     

     

    Jean Raspail répond aux questions de François Davin et Pierre Builly 

    Nous l'avons connu d'abord par ses livres. Aux Baux 76, nous l'avons entendu nous dire sa confiance dans une certaine remise en cause des conformismes intellectuels régnants. Et son espérance rejoignait la nôtre sans qu'il fût besoin que Jean Raspail appartînt à l'Action Française : ce discours figure dans Boulevard Raspail, son dernier livre. 

    On appréciera le tour très libre, très peu formel, de l'entretien qu'il a accordé à François Davin et Pierre Builly. 

    Si Jean Raspail laisse des questions sans réponse c'est que notre famille d'esprit n'a que peu de goût pour les idéologies et les systèmes. Sur les réalités à défendre, l'accord ne va-t-il pas de soi ? 

     

    2271914902.jpg• Une de vos anciennes chroniques du Figaro m'a particulièrement marqué. Elle date d'environ deux ans, s'intitulait « les signes noirs » et me paraissait assez bien refléter ce que vous pensez, ce que vous dites, ce que vous avez mis dans le « Camp des Saints » ce que vous avez exprimé dans la « Hache des Steppes » et dans le « Jeu du Roi ». Au-delà de la péripétie électoraliste, au-delà du jeu des forces politiques proprement dites, ce que nous pourrions appeler le pays légal, il y a un danger, un risque de déliquescence pour la société française dans toutes ses composantes qui étaient jusque-là restées organisées : par exemple l'éducation, la justice, l'armée, etc. ... 

    Jean Raspail - Si ma mémoire est bonne, j'ai écrit à ce moment-là, et je le crois toujours, que peu à peu des hiérarchies parallèles se sont établies au sein de toutes les organisations sociales : l'armée, l'enseignement, la Justice, l'Eglise. Il me semblait que personne ne le disait à ce moment-là. J'ai eu un petit peu d'avance sur les autres. Pas tout seul d'ailleurs. 

    En effet, vos livres et vos chroniques ont fait irruption dans le marécage, pratiquement les seuls à l’époque. Aujourd'hui il y a beaucoup de monde qui évoque ces sujets. 

    Actuellement les signes dont j'ai parlé me semblent connus de l'opinion, qu'il s'agisse de l'opinion modérée ou majoritaire, comme vous voudrez, ou même, peut-être, d'une partie de la gauche. Ce qui est étonnant aujourd'hui, c'est qu'il n’y a pas de réaction réelle. Tout se passant au niveau politique, plus rien ne se passe au niveau - comment dirais-je ? - des âmes, comme si les pouvoirs en place ne prenaient pas en compte l'âme de la nation. Et cela c’est ce qu’il va falloir essayer de dire. Je prétends par exemple que la jeunesse est complètement abandonnée à elle-même. Il y a des tas de gens qui s'occupent d'elle, les sports, par exemple, ne sont pas mal gérés, l’Education nationale représente un budget énorme … Je me souviens qu'Herzog me disait, alors qu'il était Secrétaire d'Etat à la Jeunesse et aux Sports, que l'argent ne lui manquait pas pour construire des piscines ou des stades, qu'il y en avait partout mais que c'était l'âme qui manquait pour y aller. Il en est ainsi dans tous les domaines. Or, à moins de ne plus être en démocratie libérale, est-ce qu'un gouvernement pourrait avoir un pouvoir sur les hommes ? 

    Est-ce que la nature de la démocratie libérale n'est pas de susciter autour d'elle des contre-pouvoirs ? 

    Certainement cela tient à la nature de la démocratie libérale. D'ailleurs, j'en parle dans les chroniques que j'écris actuellement. J'en ai déjà fait trois. Il en paraît une par mois. J'ai écrit « jeunesse et démocratie », « rites et démocratie », « patrie et démocratie ». Après je ferai « races et démocratie », « Famille et Démocratie », etc. ... toute une série pour savoir où la démocratie peut être bonne... Personnellement, je ne suis pas fasciste, je ne considère pas qu'une démocratie est forcément mauvaise. 

    Tout dépend de ce que vous entendez par démocratie. 

    C'est ce que j'essaie de définir. Pour clarifier ma pensée, disons simplement que je ne suis pas du tout un théoricien, que j'essaie d'être un écrivain qui réfléchit sur les problèmes de ce temps. 

    Vous ne résolvez encore rien. Vous dites : on connaît les signes mais il y aura une nouvelle étape à franchir. Connaîtrait-on les causes de ces signes, que l'on connaîtrait le remède. Mais le remède ne sera connu que lorsqu'on aura une version claire des causes. Que faire pour en sortir ? Jusqu'à présent vous ne voyez pas le comment. 

    Ce qui est embêtant. Il semblerait qu'en ce moment la fameuse distinction de Maurras entre le pays réel et le pays légal n'est plus vraie. Le pays profond ou réel n'est pas du tout traversé par les mêmes courants de sentiment, d'enracinement. On se trouve devant un pays, il n'est pas le seul d'ailleurs, qui était jusqu'à il y a, au fond, peu de temps, industrialisé à 5%. Aujourd'hui le pays réel ou profond, ça ne veut plus dire grand-chose quand on voit par exemple Sarcelles ou n'importe quoi d'autre, toutes ces immenses banlieues ou cette région parisienne où vivent quand même 25% des Français. Je connais bien mon village en Provence que j'habite six mois de l'année. Je suis certain que c'est le pays réel. J'entends mes socialistes au bistrot. Ils feraient rougir Rocard et Mitterrand. Quant au pays profond, il n'est plus tellement profond. Il est devenu d'une effroyable superficialité; on ne sait plus trop par quel bout le prendre. 

    Oui, mais vous dites que la solution ne paraît pas résider dans le libéralisme avancé. 

    Probablement pas. 

    Vous dites je vois les signes, j'étudie les signes ... 

    Je crois que c'est le privilège de l'écrivain. Comme il n'a pas d'œillères, il a plus de liberté pour juger les choses d'un peu haut. Il n'est pas obligé de rédiger un article de journal tous les jours. 

    Votre héros du « Jeu du Roi » en vient à sortir du monde et à se créer un royaume intérieur. Je crois percevoir en lui un fond de découragement ou de pessimisme. Est-ce un peu vous ou uniquement un personnage ? 

    Il y a une certaine : ambiguïté du personnage. Tous les romanciers vous le diront, il y a une part probablement de l'auteur, on ne sait pas très bien où elle est, elle peut se trouver un peu partout. Ce n'est pas explicable. D'autre part un romancier n'écrit pas une histoire que mène uniquement un désir démonstratif. Vous avez vu Dutourd dernièrement. Vous lui avez parlé de Mascareigne. Eh bien ! Il a répondu la même chose. 

    Je ne pense pas que mon héros soit pessimiste dans cette histoire. Je pense que l'univers qu'il trouve ne lui convient pas : il s'en est fabriqué un autre et comme en l'occurrence ce jeune garçon puis cet homme était comme une espèce de romantique d'épopée, habité par la notion, le souci dont sont animés ce que j'appelle, moi, tous hommes bien nés sans aucune référence, bien sûr, à l'aristocratie, il a en définitive une attitude de dépassement qui est la réalisation de la part du divin dans chacun d'entre nous. Or, ne trouvant pas cela dans la société où il vivait, il s'est bâti un univers à part. Ce n'est pas une idée fondamentale­ment originale. Il y a d'autres romanciers qui ont décrit des choses de ce genre. Je ne sais pas politiquement où en est Julien Gracq. Peu importe. Mais dans « Le Rivage des Syrtes », il y a un peu le même souci de dépassement qu'on ne peut plus trouver dans le monde où nous sommes. 

    L'important n'est-ce pas la transmission du flambeau ? 

    Une transmission c'est la flamme qui passe. A la fin du « Jeu du Roi », Jean-Marie parle aussi à l'adolescent : « le jeu s'emparera de ta vie ». Tant que la flamme brûle, l'idée n'est pas morte, l'espoir non plus. 

    Dans votre livre la révolution s'est installée. 

    On me l'a reproché. Certains critiques ont écrit : c'est dommage, il a démoli une partie de son livre en faisant redescendre le lecteur du rêve à la réalité. C'est un reproche qui est presque justifié mais je voyais le livre de cette façon.  

    Votre héros pense peut-être que la contre-révolution exige une réaction sur soi-même. 

    Il faut le comprendre:ce n'est pas un politique. C'est un homme qui réagit. Je crois pourtant qu'il a des justifications politiques; il est dans une situation telle qu'il doit bâtir l'arche et transmettre le flambeau. C'est un peu ce que fait cette droite qu'on appelle extrême. Qui disait qu'il y avait dans l'extrême-droite la fascination du flambeau à transmettre et ce sentiment de l'infime minorité qui détient la vérité ? Je suis certain qu'il y a beaucoup de Français non-engagés politiquement qui éprouvent la même impression. 

    La morosité. le marasme ? 

    Non, mais l'idée de celte pérennité de l'homme et de la part merveilleuse qu'i! doit assumer. Je suis certain que beaucoup le pensent. Seulement comme dans la société moderne c'est de plus en plus difficile à réaliser, il reste le repliement à l'intérieur de soi-même ; qui ne veut pas dire du tout renoncement. En fait, c'est un enrichissement personnel. 

    Cette attitude ne suppose-t-elle pas un minimum de lutte, de présence dans le monde ? 

    Cela veut-il dire quelque chose à ce moment-là ? On m'a posé la même question à propos du « Camp des Saints » qui se termine de façon catastrophique. Tous mes livres ont, c'est vrai, un certain fondement politique. Mais ce sont des romans, non pas des messages, ni des encouragements. Au fond c'est peut-être ce que les gens recherchent, surtout les jeunes gens. Je n'ai pas à le faire pourtant. 

    Votre vocation est plutôt d'attirer l'attention. A propos du « Camp des Saint » justement j'ai vu à la télévision votre tribune avec Max Gallo. Je crois qu'il vous a demandé : « Que préconisez-vous contre cette masse qui arrive ? Envoyer une bombe ou quelque chose d'approchant? Et vous vous êtes un peu réfugié dans : « Moi, je suis écrivain ». Au fond vous avez fait disparaître encore un peu votre responsabilité. 

    Je n'ai pas voulu me laisser entraîner sur ce terrain. Le « Camp des Saints » est une histoire. Ce n'est pas non plus une réponse. Quand on me dit : faut-il les tuer tous, les passer au napalm ou leur envoyer la bombe atomique ? Je ne peux pas répondre oui. C'est quand même plus subtil. Alors j'ai essayé de dire que le « Camp des Saints » est un livre symbolique. Dans l'introduction je dis : ça se passera mais ça ne se passera pas exactement comme ça. En tout cas c'est un problème qui est de plus en plus précis et présent. Qui doit assumer cette responsabilité ? Ils sont là. Ils sont de plus en plus nombreux. Nous le sommes de moins en moins. En ce moment c'est une idée qui commence à passer. 

    185747113.pngVous ne trouvez pas qu'il y a une sorte de réveil de cette « droite », terme assez difficile à définir et très ambigu ? 

    Sur le plan des idées, oui. A l'heure actuelle il y a un réveil exceptionnel de la pensée dite de « droite » à telle enseigne qu'on est en train de se demander, Dutourd l'a écrit d'une façon très amusante il y a quelques semaines : y aura-t-il encore des intellectuels de gauche dans deux ans ? C'est très étrange à voir. Nous parlions du pays profond tout à l'heure : peut-être les écrivains, grâce au seul privilège de leur détachement, anticipent-ils ? Et peut-être le pays dit profond, même dans ses H.L.M. ou ailleurs, comprend-il déjà confusément ces choses. 

    Ils sont allés trop loin: Le projet socialiste sur l'éducation en créant une éducation inégalitaire défavorise le fils de famille bourgeoise. Et quand on évoque le réveil de la droite intellectuelle, disons aussi qu'elle ne s'est jamais endormie. Jusqu'à présent, elle ne voulait pas s'assumer pleinement. C'est chez nous, dans notre famille de Français que la confiance vient car on s'aperçoit que nos écrivains, nos intellectuels reprennent du poil de la bête, ont du succès, qu'on les écoute, qu'on ne leur crache plus dessus et qu'au contraire on les rejoint de plus en plus. Mais ce progrès est significatif à l'intérieur de notre famille de pensée qui commence à être confortée comme on dit. Mais si elle reprend du poil de la bête cela ne veut pas dire du tout qu'elle ait la moindre influence dans le camp adverse. Je suis persuadé qu'elle n'en a aucune. 

    Nous en sommes aux premiers pas d'un renouveau. 

    Et l'on sera victime du phénomène de récupération des idées qui sont les nôtres et qui commencent à compter maintenant. 

    Récupération électoraliste ? 

    Non, pas électoraliste. La guerre se situe au plan des idées. Pour moi, Revel est une espèce de sous-marin qui vient rejoindre une famille de pensée pour jeter une sorte de pont. 

    Vous n'y croyez pas pour Revel, mais pour les nouveaux philosophes ? 

    Les nouveaux philosophes, à mon avis c'est terminé. On ne les a pas attendus pour savoir que penser du marxisme. Leur itinéraire, la publicité faite autour d'eux me paraissent tellement excessifs      et extraordinaires   ! On s'en est servi en fait pendant six mois. Maintenant il faut leur régler leur compte parce qu'il faut faire très attention à ces sous-marins qui récupèrent certaines de nos idées parce qu'elles commencent à s'imposer. Les gens se disent ah ! ah ! ces idées-là sortent. Et voilà que les petits cloportes veulent nous arracher tout cela. On nous a fait le coup bien souvent : la nature, le régionalisme; et pour quantité de choses, on va nous faire le coup aussi. Il faut se méfier drôlement. 

    Une dernière question. Dans « Boulevard Raspail » vous publiez votre discours des Baux de 1976. Vous l'accompagnez d'une introduction où vous marquez la sympathie que vous nous portez. Comment la définissez-vous ? 

    J'avais l'impression d'être chez moi quand je suis allé aux Baux. J'étais dans ma famille, tout au moins dans une partie de ma famille. Moi, un Roi me conviendrait parfaitement.  

  • Avoir des convictions nous expose-t-il à la radicalité ?

     

    Par Edouard de Saint Blimont 

    Les convictions fortes mèneraient à la radicalisation.

    Prétendre détenir la Vérité et la défendre mordicus préparerait le sujet à glisser vers toutes les formes de radicalité. On a là le nœud, jamais démêlé, d’une accusation qui vise de manière indifférenciée aussi bien les islamistes radicaux que ceux qu’on nomme, à dessein, les intégristes catholiques. Ceux-ci ont beau alléguer qu’ils n’ont jamais commis de crimes au nom de leurs convictions, à l’inverse des terroristes islamistes, leur réputation reste entachée du fait qu’ils partageraient avec les autres une tendance intellectuelle fâcheuse : celle de dire haut et fort ce qu’ils pensent être la Vérité. Entre les fous de Dieu qui impactent le quotidien de nos concitoyens par leurs méfaits et leurs outrances et les catholiques soucieux de s’inscrire dans une tradition, le bon sens inviterait pourtant à trancher en faveur des seconds (avoir des convictions ne rend pas criminel) mais ce sont les seconds qui paraissent métaphysiquement plus coupables. Il est assez clair que si l’on a tenu à situer l’origine des dérives terroristes dans une propension au fanatisme, on cherchait surtout à viser en fait ceux qui ont le tort d’avoir des convictions.

    Il ne faut pas situer ailleurs l’origine de la démission de l’Occident face aux barbares, jugés somme toute moins détestables que ceux qui défendent les vérités chrétiennes. Il ne faudra pas demain chercher ailleurs la cause d’une domination de nos sociétés chrétiennes par un islam fanatisé à outrance. Il sera trop tard pour prendre conscience du fait que l’Ennemi était bien l’Islam et non ceux qui, à temps et à contretemps, rappelaient les Vérités qu’il ne fallait pas abandonner.

    C’est la raison pour laquelle il nous a paru important de démêler dans les trois articles qui suivent si d’avoir des convictions nous expose à la radicalité. Nous estimons devoir distinguer trois moments dans le raisonnement :

    1. est-il bien certain, d’abord, que le fanatisme islamiste trouve son origine dans une conviction forte ?

    2. Notre mentalité occidentale n’offre-t-elle pas aussi l’exemple de telles dérives : en ce cas, les convictions fortes doivent-elles être seulement alléguées ?

    LAbecedaire-des-Institutions_PierreManent.jpg3. Il s’agira alors d’examiner le bienfait qu’il y a de disposer de convictions fortes, dans un contexte où, pour parler comme Pierre Manent (photo) « nous procédons à un évidement méthodique de notre être intérieur. Tout ce qui est nôtre, nous le marquons du goudron du soupçon. »

    Le fanatisme islamiste : une affaire de convictions fortes ?

    Peut-on estimer qu’il y a place dans l’univers musulman pour la conviction forte dans la mesure où une conviction authentique s’appuie sur un examen approfondi par la raison des éléments de vérité qu’on présente à l’esprit ? Peut-on être convaincu si la raison ne désigne pas telle vérité comme convaincante ? Platon a distingué ce dont on est persuadé de ce dont on peut être convaincu. Les rhéteurs de l’antiquité grecque sont passés maîtres dans l’art de persuader leurs concitoyens de l’excellence de leurs positions en mettant les auditeurs dans la situation de ne pas avoir à examiner les choses au fond. C’est précisément parce qu’ils mettent leurs « clients » dans la position d’adhérer sans réfléchir que ces derniers embrassent leurs vérités sans sourciller. Il en va tout autrement lorsque Socrate mobilise toutes les ressources intellectuelles de son interlocuteur pour le convaincre de la valeur de ses positions. Socrate ne s’en sort pas avec une popularité accrue mais il aura, du moins l’espère-t-il, convaincu son interlocuteur.

    VI-ES-ART-38434-Benedetto_XVI_a_Ratisbona.jpgLe musulman n’est pas face au Coran ou à son Imam dans la même relation que le public face au rhéteur qui le charme mais sa raison n’en est pas plus sollicitée pour autant puisqu’on cherche à empêcher chez lui l’exercice de la raison, la parole d’Allah étant tenue comme se situant au-delà de toute compréhension, comme l’a bien montré Benoît XVI dans son discours de Ratisbonne (photo). Toute démarche rationnelle d’examen est tenue ici pour intempestive. Ce n’est pas du contenu du discours dont on doit être convaincu mais de la nécessité de le tenir pour ultima verba. Quoi qu’il dise !

    Tenir ce que dit Le Coran et l’Imam pour vrai en se dispensant d’examiner s’il ont des titres à faire valoir pour être crus, sentir qu’on est dans la vérité à proportion de l’effort qu’on fait pour ne jamais examiner le degré de vérité d’une proposition m’a toujours paru comme l’expression même du fanatisme.

    C’est une disposition fondamentale du croyant dans la religion musulmane. Cette disposition anti-intellectualiste qui enraye dès le départ toute prétention herméneutique (par laquelle un esprit examine un texte avec des dispositions critiques) est ruineuse pour l’esprit et elle permet de comprendre que, contrairement à ce que soutient le discours religieusement correct, il n’y a aucune solution de continuité entre le décryptage ordinaire du Coran et les aventures échevelées de certains islamistes. Certes il faut des conditions supplémentaires pour aboutir aux comportements aberrants mais la disposition intellectuelle du musulman expose à de telles dérives.

    Placé dans la situation d’acquiescer et d’obéir sans jamais examiner, on ne mesure pas toujours à quel point l’esprit est fragilisé, comment même la confiance en soi en est ébranlée. Prendre l’habitude de s’ôter de l’esprit qu’il faut examiner les choses pour se faire une idée du monde, finit par incliner le sujet à prendre le chemin d’une mentalité superstitieuse.

    7143264_traore_300x356.jpgC’est l’apport remarquable du livre de Lina Murr Nehmé sur L’Islamisme et les femmes. Dans l’affaire du meurtre de Sarah Halimi par Kobili Traore (photo), dans les massacres du Bataclan, comme dans l’attentat de Saint-Etienne du Rouvray, Nehmé note que ceux qui accomplissent ces méfaits le font pour lutter contre les Djinns, les Sheytan, dont Mahomet dit qu’ils poussent l’homme vers le mal. Obsédés à l’idée d’être dominés par les djinns, les djihadistes tuent pour faire rendre l’âme aux djinns, en récitant le dhikr et les versets coraniques censés les en délivrer.

    Les djihadistes, habités par des convictions fortes ? Plutôt des esprits faibles ou, pour être plus exacts, des individus tellement habitués à ne jamais examiner le fond des choses, que les cauchemars les plus ravageurs finissent par hanter, en permanence, leurs esprits.

    Si notre exposé permet d’apercevoir que la pratique du texte islamique procède d’une mentalité régressive et qu’elle conduit l’esprit à entretenir les superstitions les plus noires, il serait intéressant maintenant de se demander si la radicalisation qui n’est que l’expression spectaculaire d’un esprit en débat avec ses cauchemars se rencontre aussi dans d’autres configurations mentales, étrangères à l’Islam.

    Ce sera l’objet d'un prochain article. 

     Edouard de Saint-Blimont

  • Seul le pont romain a tenu ...

     

    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpgEst-ce à Trèbes, est-ce à Villegailhenc ? Dans l'émotion des événements, les explications n'étaient pas claires aux informations de France Inter d'hier matin.

    L'ampleur de la catastrophe l'était, les descriptions des victimes en faisaient une évidence. Destructions de toutes sortes : maisons, mobilier, réseau électrique, voitures, routes et ponts, la force de la nature avait opéré des destructions inouïes. On n'a pas manqué de mettre en cause le réchauffement climatique, d'incriminer les services publics, comme si l'on pouvait tout prévoir, parer à tout... On ne peut pas s'empêcher.

    800px-Pont_romain_de_Viviers.jpgDans la région, les ponts, nous dit-on, ont été emportés par les eaux. Ils n'y ont pas résisté. Une phrase, jetée au hasard par l'une des personnes interrogées nous a frappé. De quelle commune s'agissait-il ? Ce n'était pas clair. Mais les ponts avaient sauté. Et la petite phrase la voici : « seul le pont romain a tenu ». Voilà qui devrait faire réfléchir les béats de la modernité. Les romains construisaient pour des siècles. Et leurs ouvrages après deux mille ans sont encore debout. Ils font l'admiration du monde. Qu'en sera-t-il des nôtres ?    

  • Histoire & Société • J. C. Buisson dénonce le déshonneur de la gauche à propos de d'Estienne d'Orves et il a rudement raison !

    Sépulture d'Honoré d'Estienne d'Orves, au cimetière de Verrières-le-Buisson (91)

    Par Jean-Christophe Buisson

    Un journaliste qui a du style, une logique, une cohérence, de la culture et des idées. Comme disait Thibon : ça manque ! 

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    CULTURELLEMENT CORRECT : HONORÉ OU LE DÉSHONNEUR DE LA GAUCHE

    0-20111-181009165158054-0-552849.jpgHonoré d'Estienne d'Orves est un des plus grands résistants français. Rallié à de Gaulle dès juillet 1940, quand la majorité parlementaire issue du Front populaire votait les pleins pouvoirs à Pétain et que le Parti communiste se refusait à lutter contre l'occupant en vertu du pacte de non-agression signé par Hitler et Staline, ce brillant officier de marine organisa un réseau de renseignement (Nemrod) avant d'être trahi, arrêté et fusillé par les nazis au Mont-Valérien en août 1941. Un pedigree qui a incité de nombreuses municipalités à donner son nom à des rues, des squares, des places.

    Il y a quelques semaines, le conseil régional des Pays de la Loire a décidé de baptiser à son tour de son patronyme glorieux un nouveau lycée à Carquefou, près de Nantes. Las, le conseil d'administation dudit lycée s'insurge. Motif : ce d'Estienne d'Orves était de droite ! Pire : monarchiste ! Certes résistant, mais monarchiste. L'horreur.

    Appel_Honore_d_Estienne_d_Orves.jpgEt ces idéologues biberonnés à 75 ans d'« historiquement correct » de dénoncer « une faute grave » de la majorité régionale.

    La France : ce pays fou où honorer un résistant devient « une faute grave ». Parce qu'il n'était pas de gauche. Parce qu'il n'était pas du camp des Belin (ex-CGT), Doriot (ex-PCF), Déat (ex-SFIO) et Laval (ex-Parti radical-socialiste).   

    Source : Figaro magazine, dernière livraison. 

    Jean Christophe Buisson est écrivain et directeur adjoint du Figaro Magazine. Il présente l'émission hebdomadaire Historiquement show4 et l'émission bimestrielle L'Histoire immédiate où il reçoit pendant plus d'une heure une grande figure intellectuelle française (Régis Debray, Pierre Manent, Jean-Pierre Le Goff, Marcel Gauchet, etc.). Il est également chroniqueur dans l'émission AcTualiTy sur France 2. Son dernier livre, 1917, l'année qui a changé le monde, vient de paraître aux éditions Perrin.

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    1917, l'année qui a changé le monde de Jean-Christophe Buisson, Perrin, 320 p. et une centaine d'illustrations, 24,90 €.
  • Patrimoine cinématographique • Des hommes et des dieux

     

    Par Pierre Builly

    Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois (2010) 

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    1.jpgDans l'Algérie de 1996, au plus fort de la rébellion islamiste et des crimes de terreur qui ensanglantent au quotidien un peuple pris en otage entre les dirigeants corrompus et les fanatiques barbares, il y a neuf moines bénédictins, cisterciens de stricte observance qui, dans un monastère de l'Atlas, perpétuent la présence chrétienne en Afrique du Nord, et essayent de maintenir praticable un passage avec l'Islam. 

    2.jpgComme le veut la règle de leur Ordre, ils prient à toutes les heures du jour et de la nuit ; ils étudient ; ils travaillent, cultivent les champs, recueillent le miel de leurs ruches. Ils sont tout ouverts à la population musulmane, pauvre, digne, amicale ; ils soignent les enfants et les malades, habillent les miséreux, aident à remplir les papiers ; ils sont fraternels, bienveillants, pleins d'amour ; ils vivent leur Foi dans une région magnifique et austère, au milieu du respect et de l'estime de toute la population. 

    3.jpgMais la folie islamiste est là, partout ; dans la région, dans toute l'Algérie, les barbares assassinent pour un rien, un hidjab non porté, un sourire entre deux adolescents, un enseignements d'instituteurs jugé insultant pour leur interprétation du Coran ; la terreur est là, et le fanatisme, avec son infinie bonne conscience. Et les autorités savent bien que l'ancrage, la persistance du monastère chrétien ne peut qu'appeler l'orage... 

    Nous savons tous ce qui s'est passé : le 27 mars 1996, sept des neuf moines présents sont enlevés et égorgés. Le plus âgé, Luc (Michael Lonsdale), le médecin, avait 82 ans ; le plus jeune, Christophe (Olivier Rabourdin) en avait 36. Tous, au bout de longs débats, de longues interrogations, avaient décidé de rester pour témoigner. 

    Le chemin du martyre n'est pas celui de l'inconscience, et moins encore celui de la fascination morbide et masochiste ; c'est celui de l'acceptation. On ne le gravit pas sans peur et sans angoisse. Peur physique, celle de la violence, des coups, des tortures ; angoisse métaphysique où la question de la place de son sacrifice est posée. 

    5.jpgIl importe assez peu, en fin de compte que les assassins des moines de Thibirine soient les islamistes fanatiques qui tiennent les maquis dans les années Quatre-vingt-dix en Algérie, ou les forces de sécurité de l'État algérien, qui sont exaspérées par la présence des cisterciens et cherchent à discréditer leurs ennemis dans l'opinion internationale ; la grande force, la force lumineuse du film de Xavier Beauvois est très au delà de cette interprétation conjoncturelle : sa grande force est de porter la réalité de la spiritualité. 

    Des hommes, dont plusieurs sont faibles, angoissés, épuisés, des hommes qui quelquefois doutent et, pour beaucoup ressentent le silence de Dieu, des hommes qui choisissent de rester là parce que c'est leur destin, leur choix et leur vocation. Parce que partir, pour se préserver, c'est précisément renier ce pourquoi ils sont venus : témoigner, dans l'absolue nudité de leur présence, de la fraternité des hommes. 

    6.jpgDes hommes et des dieux est un film grave, poignant, d'une tristesse infinie, et d'une infinie sérénité. La scène magnifique du dernier repas pris avant l'irruption des assassins, qui, dans la douceur amicale et l'émotion partagée, peut évoquer la Cène et montre des moines apaisés, réconciliés, déterminés à rester en Algérie quelles que soient les suites de leur décision, est profondément émouvante, et exaltante tout autant. Les visages des neuf moines, dont sept seront assassinés, portent une joie et une sérénité bouleversantes : il savent que leur choix est le plus grand. 

    7.jpgBeauvois filme cela avec mesure et force tout à la fois : la beauté grandiose des paysages, les relations fortes nouées par les moines avec les habitants, la sauvagerie obtuse des assassins, les craintes, les doutes, les personnalités rétives, les angoisses sont incarnés par des acteurs au plus haut de leur talent. Lambert Wilson, prieur souvent cassant, trop conscient de sa supériorité intellectuelle est remarquable ; comme le sont les autres moines, remarquables d'authenticité, notamment le vieil Amédée (Jacques Herlin) ou le brûlant Jean-Pierre (Loïc Pichon), les deux miraculeusement rescapés du massacre ; mais aussi, évidemment, une note spéciale au grand Michael Lonsdale, frère Luc, le médecin de la communauté, dont on connaît l'engagement charismatique personnel, et qui trouve là un rôle à la mesure de son immense talent. 

    Magnifique œuvre, dont chaque séquence est bouleversante.   

    DVD disponible autour de 10 €

  • Patrimoine • Exposition : « Louis-Philippe et Versailles »

     

    Du 6 octobre 2018 au 3 février 2019, le château de Versailles consacrera pour la première fois une exposition d’ampleur à Louis-Philippe et à sa décision de transformer l’ancienne résidence royale de Versailles en un musée dédié à l’histoire de France, inauguré en 1837. 

    Le 6 octobre 1789, lorsque Louis XVI, Marie-Antoinette et la famille royale sont contraints de quitter Versailles, le Château est déserté et cesse définitivement d’être une résidence royale. Héritier de la famille d’Orléans, Louis-Philippe a peu d’histoire commune avec le Versailles de l’Ancien Régime mais marque son intérêt pour le palais dès son accession au trône en 1830. Le nouveau roi des Français s’attache à transformer ce bâtiment monarchique en un monument national dédié « à toutes les gloires de la France ». Il imagine un musée ouvert à tous, à la portée pédagogique, dans lequel les tableaux se lisent comme un livre d’image. Son but est une véritable manœuvre politique : réconcilier les Français, profondément divisés, mais surtout inscrire son règne dans l’histoire nationale. L’exposition retracera le goût de Louis-Philippe et l’implication directe du roi dans les travaux qui ont abouti à l’inauguration des Galeries Historiques le 10 juin 1837. 

    Une plongée dans le Versailles du XIXe siècle

    À travers plus de 200 œuvres provenant d’institutions prestigieuses, l’exposition fera date par sa volonté de proposer aux visiteurs une véritable plongée dans le Versailles du XIXe siècle. L’exposition sera notamment présentée dans les salles d’Afrique et d’autres Galeries Historiques du Château, dont les toiles commandées par Louis-Philippe seront dévoilées au public. En prolongement de l’exposition, un parcours de visite inédit entrainera le public à travers le Château à la découverte de nombreuses salles du musée de Louis-Philippe, ouvertes exceptionnellement. Ainsi, les visiteurs pourront s’immerger dans les salles des Croisades, la salle des États-Généraux, ou encore la salle du Sacre et la salle 1792, toutes deux restaurées pour l’occasion. De plus, des ensembles disparus des Galeries Historiques seront restitués, comme la galerie de sculptures dédiée à Louis XIV au premier étage de l’aile du Midi. 

    « Ce que Louis-Philippe a fait à Versailles est bien. […] C’est avoir donné à ce livre magnifique qu’on appelle l’histoire de France, cette magnifique reliure qu’on appelle Versailles. » – Victor Hugo

     

     1485427667_logo-chteau-de-versailles-positiffw-300x79.jpg

    Exposition au Château jusqu’au 3 février 2019.
    L’exposition est ouverte du mardi au dimanche :
     de 9h à 18h30 (dernière admission à 17h45) jusqu’au 31 octobre.
    • de 9h à 17h30 ( dernière admission à 16h45) à partir 1er novembre. 

    Source : Château de Versailles

  • Patrimoine • Provence : les découvertes varoises d'un professeur de géographie

     
    Par Péroncel-Hugoz
     

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    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpgQuand il n'est pas au Maroc ou en Ibérie, notre collaborateur Péroncel-Hugoz se trouve en sa vigie provençale à mi-chemin du hameau historique des Maurras et de la basilique royale de Saint Maximin. Il y a reçu récemment un nouveau guide consacré en entier à la Provence varoise. Un de plus ? Il a quand même fini par l'ouvrir, puis le lire jusqu'au bout. Il nous résume ci-après ses étonnements. 

    Cent lieux pour les curieux 

    Foin de ces guides à répétition, dans le Midi et ailleurs, qui prétendent « revisiter », « redécouvrir », « redéfinir », voire « remettre en perspective » la Provence, notamment en sa partie varoise ! Bien souvent, ces publications ne sont que des copies - inexactitudes et clichés compris - de livrets antérieurs, remixés, plus ou moins mis à jour et l'apport pour le lecteur est généralement nul. Un confrère ibérique, féru de nos régions méridionales, me confiait il y a quelques mois : « Finalement je me sers du guide Jouanne 1870 où là, au moins, je suis sûr de ne trouver ni idéologie ni erreur. » Il faut dire que ce confrère exigeant avait été froissé de lire, dans un Routard ironique sur Madère ou les Açores, que les arnaqueurs de touristes étrangers y étaient rares, la « morale catholique » étant restée très forte dans ces îles... (sic) 

    Amende honorable 

    Toujours est-il que je n'ai ouvert qu’avec méfiance le nouveau guide Var 100 lieux pour les curieux. Qu'allait-on me faire voir, à moi qui, comme indigène, comme journaliste, arpente mon terroir familial depuis les temps d'enfance, que je passais là avec mes grands-parents et où Mistral, Fabre et d'Arbaud furent parmi mes premières lectures. 

    0.jpgEh ! bien après lecture acribique et de plus en plus intriguée des 160 pages (superbement) illustrées écrites par Bénédicte de La Gueriviere (photo), géographe et urbaniste de terrain, dans le Var, notamment au Conservatoire du Littoral, je reconnais sans barguigner que cette jeune femme, érudite et farfouilleuse, m'a démontré par son travail minutieux qu'environ un tiers des « curiosités » de mon département m'étaient inconnues jusqu'à la lecture de son guide. Quelle joie aussi car je croyais avoir fait le tour de la chaloupe et je découvre qu'il me reste des dizaines de points attractifs à y découvrir ! 

    Marius et Saint-Louis 

    sans-titre.pngOh ! certes Madame de la Guérivière ne m'a pas appris l'existence des remparts escarpés de Rougiers (photo) où vinrent Marius, Saint Louis et Dumas père, ni celle de Correns, ce premier village 100 % bio de France, cher à 2-68-1.jpgSégolène Royal, ni sur Peiresc (photo), ce savant provençal universel du XVIIe siècle, ni sur le point culminant de notre département (le mont Lachens, 1714 m), ni enfin sur la plus grande citerne privée d'Europe, dite « cathédrale de Saint-Martin-de-Pallières » que la famille de Boisgelin a récemment ouverte au public.

    Frejus_pagode-63ed0.jpgMais l'auteur m'a mis sur la piste de curiosités comme la pagode coloniale de Fréjus (photo), le musée champêtre de Bargemon (où, en outre un nouveau curé, aidé par de vrais réfugiés irakiens, des chrétiens bien-sûr, est en train de raviver un ancien pèlerinage marial qui fut jadis aussi populaire que celui de Cotignac) ; je citerai aussi, parmi les découvertes mises en 36694593.jpgrelief par la géographe, le musée sous-marin de la Tour-Fondue(photo), le chemin de croix sous bois de csm_randonnee_lorgues-saint_ferreol_dracenie-var-provence-calvaire_c178adaded.jpgSaint-Ferréol à Lorgues (photo), l'espace Trouin édifié par Le Corbusier au Plan d'Aups, à quelques kilomètres de mon hameau, et, même, pour m’arrêter là, le secret de fabrication bien oublié de l’église Saint-Laurent de Rians, où je suis allé des centaines de fois et dont j’ignorais qu’elle devait son (vilain) néo-gothique XIXe siècle au brave abbé Pougnet, auteur d’une cinquantaine de sanctuaires, tous hélas ! de ce même style grandiloquent et faux qu’on retrouve aussi bien aux Réformés à Marseille qu’à Saint-Augustin à Hippone (Algérie) ou Saint-Louis à Carthage. 

    Laideur ou splendeur, notre géographe-urbaniste n’a pas triché ni blagué : son guide Var est une authentique nouveauté pour les curieux. En route !  ■  

    B. de La Guerivière, Var 100 lieux pour les curieux, éd. Bonneton, 63400 Chamalières, 160 pages illustrées, 15 €.

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    Correns, ce premier village 100 % bio de France, cher à Ségolène Royal

  • Cinéma • Un peuple et son roi

     

    Par Guilhem de Tarlé

    A l’affiche, Un peuple et son roi de Pierre Schoeller, avec Laurent Lafitte (Louis XVI), Louis Garrel (Robespierre), Denis Lavant (Marat), Olivier Gourmet (L’Oncle), Adèle Haenel (Françoise) et Gaspard Ulliel (Basile).


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    Un peuple et son roi, c'est un film d'ambiance (et quelle ambiance !) mais ce n'est qu'un film d'ambiance...

    4070.jpgCertes, la hargne révolutionnaire, particulièrement des femmes, est bien rendue ; certes, l'opposition est bien soulignée des jusqu'auboutistes face à ceux qui proclament la nécessité de savoir arrêter une révolution ; certes, La Fayette n'est pas épargné qui, contrairement à Louis XVI, fait tirer sur la foule (il aura des successeurs) ; le-peuple-et-son-roi_6108316.jpgcertes, la schizophrénie de Robespierre est pointée du doigt qui, comme les épurateurs de toutes les époques, est contre la peine de mort sauf pour ses adversaires ; certes, la trahison du franc-maçon Philippe Égalité, cousin du Roi, est affirmée (le film ne montre pas qu’il sera lui-même guillotiné) ; certes, on a le cœur serré et les larmes aux yeux au roulement de tambour de l'exécution du roi...

    un_peuple_et_son_roi.jpgNous avons néanmoins été très déçus par ce film qui aurait pu être un bon mémento historique alors qu'il est au contraire particulièrement confus et décousu. La mise en scène,  notamment, d’Olivier Gourmet est globalement sans intérêt.

    Bref, je ne regrette pas d'avoir vu ce film, mais je ne le recommande pas.

    Vive le Roi, quand même ! et A bas la Révolution !   

    PS : vous pouvez retrouver ce « commentaire » et plusieurs dizaines d’autres sur mon blog Je ciné mate.

  • Livres • Chateaubriand tel qu'en lui-même ...

     

    Par Christian Tarente

     

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    Chateaubriand, saisi par la gloire comme on l'est par la débauche.

    Il semble qu'on n'en finira jamais avec Chateaubriand.

    Homme d'un temps révolu ou progressiste mesuré ? Ambitieux habile et rancunier ou esprit supérieur et au-dessus de la mêlée ? Catholique sincère ou croyant de circonstance ? Royaliste convaincu ou opportuniste déguisé en réaliste ? Grand écrivain reconnu ou auteur plus apprécié pour lui-même que pour ses livres ?

    Dans les premières pages de sa biographie, Ghislain de Diesbach dresse de lui un portrait qu'il conclut en disant que Chateaubriand aurait pu être la figure la plus marquante du XIXe siècle, avant Byron et Goethe, « s'il avait fait son profit de ce mot de Louis XVIII à son sujet : Qu'il est grand quand il ne se met pas devant lui ! »

    Cette ironique lucidité du roi semble avoir servi de fil rouge à Diesbach, éblouissant biographe, acceptant avec un plaisir non dissimulé de déambuler au travers de cette vie foisonnante dont les diverses séquences ne cessent de se bousculer et de s'entrecroiser : voyageur, soldat, poète, romancier, ambassadeur, ministre, essayiste, pamphlétaire, mémorialiste, de plus couvert de femmes tout en supportant la sienne, Chateaubriand semble avoir tout fait, tout vu, tout lu, tout entendu, menant tambour battant plusieurs vies à la fois.

    En cette année de son deux cent cinquantenaire, on se rappellera que Maurras, son cadet de cent ans exactement, lui a, en jeune iconoclaste, joyeusement et durement réglé son compte dans Trois Idées politiques (1898). Il a perçu dans cet « oiseau rapace et solitaire » un anarchiste anglomane démolisseur du classicisme, incapable de résister aux délices empoisonnés qu'offre le spectacle des décadences et de la mort. Au passage, il dénonça les « pantalonnades théologiques » du Génie du christianisme, d'accord sur ce point avec Napoléon qui n'y trouvait que du « galimatias » !

    Ghislain de Diesbach évoque tous ces épisodes à un rythme soutenu, jusqu'au moment où, après avoir mis en pièces le dernier livre du grand homme, La vie de Rancé, il dépeint sous des couleurs sombres ses dernières années : nous assistons à la décrépitude de ce vieillard, moins accablé par son récent veuvage que par le refus de Mme Récamier, elle-même vieillissante, d'accéder à sa demande en mariage...

    Mais ne restons pas sur cette note peu pimpante. L'ouvrage de Ghislain de Diesbach, qui date de 1998, vient, c'est très heureux, d'être réédité chez Perrin. Il n'a pas pris une ride, et nous fait superbement revivre tout ce que le destin du vicomte François-René a eu de flamboyant, à l'image de son style. Sans jamais renoncer à sa lucidité sur un personnage dont l'incontestable génie, saisi par la gloire comme on l'est par la débauche, fut sans cesse mis à mal par ce besoin frénétique de mise en scène de lui-même.  

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    CHATEAUBRIAND
    Ghislain de Diesbach
    Perrin, 2018, 668 p., 27 €
     

    Christian Tarente

  • Mathieu Bock-Côté : « Racisme anti-Blancs, le déni »

     

    blue-wallpaper-continuing-background-wallpapers-bigest-images - Copie.jpgLe rappeur Nick Conrad, et son clip PLB, pour « Pendez les blancs », s'inscrit dans la longue liste des provocations antifrançaises. Mais pour Mathieu Bock-Côté, cela ne suffit pas à ébranler la certitude de ceux qui ont décidé une fois pour toutes que le racisme était à sens unique.   [Le Figaro, 28.09].  LFAR

     

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    Le rappeur Nick Conrad était à peu près inconnu il y a quelques jours, jusqu'à ce qu'on découvre son clip PLB, où il en appelle à « pendre les Blanc s». La formule, d'une violence extrême, a provoqué sans surprise une vive polémique, qui s'inscrit dans la longue liste des provocations antifrançaises caractérisant l'histoire d'un certain rap. On se souvient de Monsieur R qui, en 2005, disait « baiser la France », voulait la traiter comme « une salope » en plus de « pisser sur Napoléon et le général de Gaulle », de Rohff dans Dirty Hous qui disait : « J'baise l'État depuis tout petit, j'ai pas encore craché » ou de Médine, plus récemment, qui s'enthousiasmait à l'idée de crucifier les « laïcards comme à Golgotha ». On pourrait en évoquer bien d'autres.

    Mais on passe ici du racisme pur et simple à l'appel au meurtre, ce qui pourrait suffire pour clore un procès qui n'est pas celui d'un genre musical mais d'une aversion pour la France qui vire à la haine raciale. L'abjection est totale lorsque est célébré l'assassinat des « bébés blancs ». Il y a là manifestement une quête de transgression qui doit aller jusqu'au bout d'elle-même et qui pourrait quitter un jour le simple domaine de la représentation « artistique ». On ne se vautre pas dans la tentation du mal radical sans réveiller la part la plus sombre du cœur humain. La civilisation construit des digues contre elle, mais certains font tout ce qu'ils peuvent pour les faire céder. Mais cela n'a pas suffi à ébranler la certitude de ceux qui ont décidé une fois pour toutes que le racisme était à sens unique et que les Blancs en étaient toujours coupables, et jamais victimes : c'est même un élément central du dogme multiculturaliste.

    À la télévision comme à la radio, les militants communautaristes, déguisés ou non en universitaires, expliquent inlassablement que le racisme est un système d'exploitation lié à l'expansion européenne et qu'on ne saurait l'en dissocier. En gros, le racisme anti-Blancs serait une impossibilité logique à démonter. On comprend le message : le mâle blanc disposerait ainsi du triste monopole du mal structurel dans l'histoire. Les médias accordent à cette thèse tordue un écho indéniable, comme s'ils souhaitaient la normaliser. Dans cet esprit, la haine raciale contre les Blancs, même si elle est condamnable, ne serait plus qu'un réflexe de survie, ou encore, pour ceux qui ont le plus de culot dans le déni, une manière d'appeler à l'aide contre une civilisation injuste envers ses minorités. C'est d'ailleurs la ligne de défense adoptée par Nick Conrad, qui a présenté sa chanson comme une entreprise pour réveiller les consciences devant le malheur historique du « peuple noir ». La racialisation des appartenances entretenue par une sociologie simpliste venue des États-Unis est désormais banalisée au nom de l'insurrection des banlieues. La France n'est plus une nation mais un territoire qu'on veut pousser vers la guerre des races.

    Nick_Conrad-PLB-400x330.jpgPuisqu'un tel clip est indéfendable et qu'il y a des limites à prendre n'importe quoi pour de l'art, le parti diversitaire et les spécialistes du déni à son service ont misé sur une autre ligne de défense: Nick Conrad serait un rappeur inconnu et il aurait eu vocation à le rester. Comme d'habitude, c'est la supposée « fachosphère » qui est accusée d'avoir sorti des marges une chanson qui aurait dû y demeurer pour monter de toutes pièces une controverse excitant ses obsessions idéologiques. Derrière la colère contre PLB, il n'y aurait rien d'autre qu'une xénophobie mal cachée, fouillant dans l'actualité pour trouver des faits divers l'alimentant. Nick Conrad ne serait qu'un pion dans la stratégie machiavélique de «l 'extrême droite ». C'est moins ce clip qui devrait inquiéter que la réaction qu'il suscite. C'est le même argument qui est utilisé après chaque attentat islamiste : une fois l'attentat condamné de manière plus ou moins rituelle, on s'inquiète surtout de la réaction qu'il pourrait susciter dans la population.

    Irebeus-renois.jpgl faudrait dire clairement ce qu'on se contente généralement de chuchoter : il y a dans une certaine jeunesse issue de l'immigration une haine de la France qui s'inscrit dans une mouvance plus générale de partition du territoire, où se multiplient les zones se dérobant à la fois à la souveraineté nationale et à l'identité française. Et ceux qui en appellent à la reconquête des territoires perdus de la France sont accusés de vouloir soumettre les banlieues au communautarisme majoritaire. Traditionnellement, le colonialisme consistait à vouloir imposer sa culture chez les autres. Dans la logique indigéniste et postcoloniale, cela consiste désormais à vouloir imposer sa propre culture chez soi. Le sens des mots est inversé. Dans cet esprit, la décolonisation n'arrivera à son terme que lorsque les Français seront considérés comme une communauté étrangère chez eux. 

    Mathieu Bock-Côté        

    Le-nouveau-regime.jpgMathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l'auteur d'Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politiqueaux éditions du Cerf [2016] et le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017)
  • Le mot « race » interdit d'usage et de Constitution ? Ce que Thierry Maulnier en a dit ...

     

    « Le racisme, tel que nous l'avons vu remplir les camps d'extermination, était horrible dans ses conséquences et sans doute absurde dans son principe. Il n'existe peut-être aucune race pure, on ne pourrait en créer une, supérieure morphologiquement ou cérébralement, que par minutieux métissages, comme on fait pour les chiens ou les chevaux. Si cela a lieu un jour, ce sera l'oeuvre des savants, non des prophètes politiques. Du reste, l'homme, tout au long de son histoire et sans doute de sa préhistoire, nous apparaît comme un animal de guerre et les guerres font oeuvre de métissage. Mais si les groupes humains, parce qu'ils se font la guerre, ont tendance à se métisser, ils ont tendance aussi à affirmer leur identité, à s'inquiéter, à se protéger lorsqu'ils sont menacés par une invasion de population étrangère. Pour conjurer cette xénophobie toujours prête à se réveiller, faut-il excommunier la notion même de race ? Faut-il nier ce qui est le fruit de l'histoire, de la terre, du climat, de la culture de groupe, des moeurs (endogamie) ? Ne voir dans le Juif comme le veut Sartre, qu'un produit de l'antisémitisme, nier que les aptitudes culturelles des Blancs et des Noirs puissent être différentes, c'est, à la limite, affirmer l'identité du Pygmée et du Tetsu, du Boschiman et de l'Esquimau. Aucune particularité ne peut donner des arguments pour asservir des hommes ou pour les rejeter hors de l'humain, mais le refus de la réalité n'est pas le bon moyen d'avoir prise sur elle. »   

     

    Thierry Maulnier

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    Les Vaches sacrées - Gallimard, 1977