Conférence de Patrick Buisson, vendredi dernier en soirée au Cercle de Flore.
Au Cercle de Flore, c'est à dire à l'Action Française, dans ces locaux du 10 rue Croix-des-Petits-Champs où l'AF a vécu vaille que vaille les soixante ou soixante-dix dernières années de son histoire. Donc la moitié. Pas toujours au niveau d'intelligence politique suffisant pour peser sur les esprits et sur les événements. Toujours avec courage et fidélité. Et souvent de ces retours d'intérêt et de passion française que l'Action Française parvient régulièrement à éveiller parmi les jeunes de diverses époques. On sait que tel est le cas ces temps-ci, ce qui, par contrecoup, réveille les moins-jeunes.
Buisson sait de quoi il retourne : son père était Camelot du Roi. Il connaît la maison. Ecole de pensée et mouvement. Et il n'est pas homme à négliger les héritages. Familiaux, intellectuels et politiques. Si NKM a jamais dit une vérité, ce fut lorsqu'elle alerta bruyamment sur le fait que Buisson ne voulait pas faire gagner Sarkozy mais les idées de Charles Maurras. Si nous étions tentés d'y acquiescer, Buisson rectifierait à bon droit : Non ! Les idées de salut national.
Dans cette petite salle, l'une de celles où l'AF vit sa vie ordinaire, après une présentation à laquelle il trouvera des allures de casier judiciaire, Patrick Buisson, d'emblée, parle de grande politique, comme l'eussent fait Maurras, Bainville ou Boutang, mais avec toutes les ressources ajoutées de l'historiographie contemporaine, singulièrement enrichie au cours du demi-siècle écoulé.
D'emblée, il renvoie la République d'aujourd'hui à son origine - le populicide vendéen, la Terreur, la dictature totalitaire d'une oligarchie, le mépris du peuple - et cette origine - nécessaire, non pas contingente, fondement, non pas accident - à la République dans son incarnation présente. Car l'une et l'autre se répondent, se correspondent. Cette dialectique sans cesse activée, sans cesse appliquée à tous les aspects possibles de la question sociale et politique française, cette dialectique maintenue au long d'une conférence plutôt longue mais qui ne lasse jamais, apparaît à l'auditeur subjugué, d'une redoutable efficacité. D'un bout à l'autre de l'histoire, de l'origine à son aboutissement provisoire actuel, la République est un bloc. Sa nature est dans son origine comme dans ses avatars. Son origine détermine sa logique et la rend intelligible.
L'auditoire n'ignore rien de Patrick Buisson. L'on sait bien que cet homme qui analyse la République avec une telle sévérité, une telle radicalité, a été au cœur du pouvoir. Qu'il avait convaincu celui qui le convoitait puis l'avait emporté et le détenait, d'une stratégie de rupture et de salut. Laquelle n'a pu aboutir à cause de la faiblesse de caractère et de conviction du président de la République et sans-doute aussi à cause des pesanteurs du Système. De sa volonté de persévérer dans son être.
Après la conférence, repas à quelques-uns avec Buisson, où la conversation se prolonge. L'un des convives (le président de l'historique Union Royaliste Provençale) pose cette question : « si vous deviez conseiller les royalistes, que leur diriez-vous ? »
Réponse de Buisson : « Macron a liquidé les partis ; il entend restituer au pouvoir sa verticalité ; il construit une monarchie républicaine. Fort bien. Nous voulons mener les choses à leur terme ; nous réclamons une monarchie véritable ».
Une stratégie Buissson pour les royalistes ? Un vrai programme ! •