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Rechercher : Rémi Hugues. histoire & action française. Rétrospective : 2018 année Maurras

  • Zemmour et Macron : même combat ?, par Charles Saint-Prot.

    L’Action Fran­çaise est un espace de débat et c’est la rai­son pour laquelle nous publions ce brû­lot contre Eric Zem­mour de notre ami Charles Saint-Prot. D’aucun trou­ve­ront injustes, exa­gé­rées voire inexactes cer­taines des accu­sa­tions conte­nues dans ce texte. Mais au sein du mou­ve­ment monar­chiste, ont tou­jours exis­tées les contro­verses, notam­ment sur les ques­tions d’actualité poli­tique.

    2.jpgIl est pro­bable qu’une réponse sera appor­tée dans un pro­chain article, car aujourd’hui, l’attitude de l’AF est d’observer avec inté­rêt ce phé­no­mène des pré­si­den­tielles qui semblent voir un réveil des par­ti­sans de l’indépendance natio­nale qui ne trouvent pas d’issues dans les vieux par­tis pré­exis­tants. Pour autant, sur la ques­tion de l’Islam, la ques­tion n’est pas de juger une reli­gion, mais de mesu­rer son impact sur une socié­té sécu­la­ri­sée dont la reli­gion fon­da­trice est deve­nue hon­teuse et repen­tante. Si le trop plein d’Islam nous menace, c’est sur­tout à cause de l’absence de France. (NDLR)

    M. Zem­mour se qua­li­fie volon­tiers de néo-conser­va­teur, on ne voit pas pour­quoi il ne s’affirme pas tout sim­ple­ment conser­va­teur (« un mot qui com­mence mal » disait Phi­lippe d’Orléans, pré­ten­dant au trône de France, vers 1900). Sans doute cède-t-il à la détes­table manie de tra­ves­tir les mots pour se dis­si­mu­ler, comme de pré­ten­dus esprits sub­tils tentent d’expliquer que le terme de natio­na­lisme serait « démo­dé », trop conno­té avec une époque révo­lue, bref « poli­ti­que­ment incor­rect », il fau­drait plu­tôt par­ler de « sou­ve­rai­nisme » ou on ne sait quoi. En sui­vant cette démarche assez lâche, on pour­rait aus­si rem­pla­cer le mot de nation par celui de com­mu­nau­té et le mot État par celui de pres­ta­taire de services.

    En véri­té le conser­va­tisme est le vieux réflexe petit-bour­geois de ceux qui n’aiment pas le peuple et veulent un sys­tème ultra­li­bé­ral ne pro­té­geant que leurs inté­rêts par­ti­cu­liers. Bien enten­du les par­ti­sans de Zem­mour adhèrent à toutes les bille­ve­sées à la  mode. Voi­ci res­sur­gir le mythe de l’unité des droites, celui de la des­truc­tion de l’État confon­du avec une bureau­cra­tie tatillonne qui est pré­ci­sé­ment le contraire de l’État juste au ser­vice du bien com­mun et , bien sûr, la poli­tique d’hostilité à l’Islam oubliant la magni­fique leçon de Fran­çois 1er allié du Sul­tan otto­man. Il faut le dire et le répé­ter le pro­blème est l’immigration pas l’Islam.

    Les par­ti­sans de Zem­mour adhèrent à la finan­cia­ri­sa­tion de l’économie et trouvent très sub­til leur idole qui pré­tend ne pou­voir « ouvrir tous les chan­tiers à la fois » parce qu’il veut sur­tout mener son com­bat contre les musul­mans du monde entier plu­tôt que s’occuper de l’économie au sujet de laquelle il affirme que « ce ne  sera pas la révo­lu­tion » (Marianne du 10 au 16 sep­tembre 2021) , ce qui signi­fie qu’il se sou­cie des petits comme d’une guigne.

    On remar­que­ra éga­le­ment que ce soi-disant défen­seur de la France ne dit rien de la néces­saire sor­tie de notre nation d’une Otan qui n’est que le bras armé de l’hégémonisme amé­ri­cain. Il se tait sur les innom­brables aban­dons de sou­ve­rai­ne­té com­mis par le régime (le der­nier en date étant l’incroyable mise à mort du « cloud sou­ve­rain » au pro­fit des GAFAM, les cinq grandes firmes amé­ri­caines domi­nant le mar­ché du numé­rique). Zem­mour est déses­pé­ré­ment muet sur la néces­si­té impé­rieuse de quit­ter l’Union euro­péenne, machin au ser­vice de l’impérialisme alle­mand ; de recou­vrer notre sou­ve­rai­ne­té juri­dique ou de sor­tir de l’euro. Il y a pour­tant une impos­ture à se pré­tendre à la fois  gaul­liste et euro­péiste (comme Bar­nier), comme si on peut être à la fois natio­na­liste et anti-fran­çais, gaul­liste et pétai­niste, bona­par­tiste et monarchiste…

    De fait, tout le pro­gramme de M Zem­mour se réduit à une haine obses­sion­nelle  de l’Islam. Pour le reste, il est l’homme des grandes banques. Jona­than Nader son conseiller finan­cier est pas­sé chez Roth­schild avant d’être chez Mor­gan .  Julien Madar qui s’occupe de lever des fonds est aus­si un ancien de la banque Roth­schild. Tous ont connu Macron dans cet antre de la « finance ano­nyme et vaga­bonde ». Un ancien publi­ci­taire macro­niste, Frank Tapi­ro, sou­tient main­te­nant Zem­mour « sans avoir rom­pu avec Macron » Et, c’est encore un ancien diri­geant des « jeunes avec Macron », Nico­las Zyser­mann qui est tré­so­rier de l’association des Amis de Zemmour.

     Comme l’écrit Jérôme Sainte-Marie dans le quo­ti­dien L’Opinion du 30 sep­tembre 2021  la pré­sence de Zem­mour ren­force Emma­nuel Macron. Il éloigne de Marine Le Pen l’électorat de Fillon et la droite de l’argent ; celle de la bour­geoi­sie égoïste la plus bête de monde, nos­tal­gique d’Adolphe Thiers, le mas­sa­creur de la Com­mune et chantre de cette répu­blique bour­geoise et  conser­va­trice  ne res­pec­tant que les inté­rêts des pos­sé­dants, qui décla­rait le 13 novembre 1872 devant les dépu­tés : « La Répu­blique sera conser­va­trice ou ne sera pas »

     

    Charles Saint-Prot

    Essayiste, notam­ment auteur de L’État-nation face à l’Europe des tri­bus aux édi­tions du Cerf

    Source : https://www.actionfrancaise.net/

  • Éphéméride du 1er juillet

    1303 : Fondation de l'Université d'Avignon

     

     

     

     

    802 : Charlemagne reçoit l'éléphant blanc offert par Haroun-al-Rachid

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    Fresque romane, Musée du Prado, Madrid

     

    C'est évidemment, dans la perspective d'une vision géopolitique ambitieuse qu'il faut replacer les contacts noués entre Charlemagne et le lointain sultan; tout comme la tentative - avortée... - d'épouser l'Impératrice Irène de Constantinople : en réalité - et comme l'a très bien montré Jacques Bainville - les deux premières dynasties franques - la Mérovingienne (Clovis...) et la Carolingienne (Charlemagne...) - souhaitaient restaurer l'Empire romain, et se sont - en partie - épuisées à courir après cette chimère.

    A quoi il faut ajouter la terrible plaie des partages du royaume, à chaque décès du souverain.

    Voilà pourquoi les deux premières dynasties, malgré des débuts brillants, ont toutes deux échoué : c'est à la troisième - celle des Capétiens - qu'il reviendra de réussir, dans la tâche plus modeste, certes, mais plus réaliste, qu'elle s'était fixée : construire la France...

    http://lesitedelhistoire.blogspot.fr/2011/03/abul-abbas-lelephant-blanc-de.html

     

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    1303 : Fondation de l'Université d'Avignon

     

    C'est Boniface VIII qui, très peu de temps avant de mourir (des suites de son conflit avec Philippe le Bel et de "l'affaire d'Agnani"...) fonda l'Université d'Avignon, six ans à peine avant que son successeur, Clément V ne vienne installer la Papauté dans la ville.

    Boniface VIII voulait concurrencer la Sorbonne, jugée trop proche du pouvoir de son ennemi juré, le roi de France, Philippe le Bel. Les écoles qui existaient déjà (médecine, théologie, arts grammaticaux…) furent fédérées autour de quatre facultés et connurent très vite un grand développement, avec la présence des papes en Avignon : rivalisant avec les universités de Montpellier et Toulouse, l'Université toute récente accueillit 17.000 étudiants ! 

    En 1608, une jeune fille, venue de Barcelone, Juliana Morell y fut reçue Docteur en Lois, devenant ainsi la première femme docteur d'Europe.

    L'idée novatrice du Pape était que, pour obtenir ses diplômes, un étudiant devait avoir fréquenté sinon toutes, du moins les principales Universités européennes d'alors (Bologne, La Sorbonne, Oxford, Salamanque...). Cette intuition sera, en quelque sorte, à la base du projet d'échanges inter-européen d'étudiants qui verra le jour, à la fin du XXème siècle, sous le nom de Projet Erasmus...

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    http://univ-avignon.fr/universite/presentation/

     

     

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    1374 : Mort de Thévenin de Saint-Légier

     

    Pendant près de trois siècles, il y eut, à la Cour de France, des Fous du Roi, dont l'emploi était un véritable Office.

    On ne connaît pas le nom des premiers Fous de la Cour, mais on les connaît à partir de Charles V : celui-ci écrivit en effet aux maire et échevins de la ville de Troyes pour leur annoncer la mort de son Fou et pour leur demander de lui en envoyer un autre, "suivant la coutume".

    Charles V eut, à partir de ce moment deux Fous : le premier fut inhumé à Saint-Germain-l'Auxerrois, mais son tombeau n'existe plus.

    Par contre, on voit toujours, à Saint-Maurice de Senlis, la tête de Thévenin de Saint-Légier, avec cette épitaphe :

     

     Cy gist Thévenin de Saint-Légier, fou du roi notre sire, qui trépassa le premier Juillet 1374 : priez Dieu pour l’ame de ly.


    Henri IV eut quatre Fous : Sibilot Chicot, maître Guillaume, Angoulevant, et Mathurine; ceux d'Henri II étaient Brusqui et Thoni.

    Le Fou le plus connu de tous fut celui de François 1er : Triboulet, paysan de son état, qui s'appelait en fait Févrial ou Le Feurail, toujours coiffé de sa marotte (bonnet de plusieurs couleurs avec des grelots).

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    Triboulet, fou de Louis XII et de François 1er, Chantilly, musée Condé
    (Fonds : Dessins) par Jean Clouet, 1545 (crayon noir/sanguine)

     

    Rabelais le décrit comme "Proprement fol et totalement fol, fol fatal, de nature, céleste, jovial, mercuriel, lunatique, erratique, excentrique, éthéré et junonien, arctique, héroïque, génial...".

    Un jour, l'amiral de Chabot l'ayant menacé de coups de bâton, François 1er intervint et lui dit : "Ne crains rien, si quelqu'un osait porter la main sur toi, je le ferais pendre dans le quart d'heure qui suit.". À quoi Triboulet répondit : "Ah Cousin (il appelait le roi ainsi), ne pourriez-vous pas, je vous prie, le faire pendre un quart d'heure avant qu'il m'étripe".

    Une autre fois, risquant d'être exécuté pour avoir offensé une maîtresse de François 1er, celui-ci lui laissa le choix de sa mort; Triboulet dit alors : "Bon sire, par Sainte Nitouche et Saint Pansard, patrons de la folie, je demande à mourir de vieillesse". 

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    Le dernier Fou de cour - à l'époque de Louis XIV - fut l'Angely, venu des Pays-Bas. Plein d'esprit et de talent, il touchait, par an, 25.000 écus ! Boileau à écrit de lui :

     

    "Et l’esprit le plus beau, l’auteur le plus hardi
    N’y (à la cour, ndlr) parviendra jamais au sort de Langely."

     

    Mais ses railleries incessantes finirent par le faire chasser de la Cour : avec lui s'arrêta, donc, cette période d'environ trois siècles où, à ces personnages burlesques, tout était permis, y compris d'apostropher les Grands, et le monarque lui-même !

     

     

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    1751 : Parution du premier tome de L'Encyclopédie...

     

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    En septembre 1819, Chateaubriand fit paraître un petit ouvrage, assez peu connu de nos jours, intitulé De la Vendée, dont voici les premières lignes :

    "L'ancienne constitution de la France fut attaquée par la tyrannie de Louis XI, affaiblie  par le goût des arts et les mœurs voluptueuses des Valois, détériorée sous les premiers  Bourbons par la réforme religieuse et les guerres civiles, terrassée par le génie de  Richelieu, enchaînée par la grandeur de Louis XIV, détruite enfin par la corruption de  la régence et de la philosophie du XVIIIe siècle.  
    La révolution était achevée lorsqu'elle éclata : c'est une erreur de croire qu'elle a  renversé la monarchie ; elle n'a fait qu'en disperser les ruines, vérité prouvée par le peu  de résistance qu'a rencontré la révolution. On a tué qui on a voulu ; on a commis sans  efforts les crimes les plus violents ; parce qu'il n'y avait rien d'existant en effet, et qu'on  opérait sur une société morte..."

     

    Si l'on n'est pas obligé d'accepter la totalité de l'analyse de Chateaubriand, dans son premier paragraphe, et sa vindicte surprenante, s'étendant de Louis XI à Louis XIV, sa dernière affirmation sur "la philosophie du XVIIIème siècle", elle, ne fait aucun doute.

    1er juillet,léon daudet,maurras,bainville,martigues,provence,chemin de paradis,action française,kleber haedensEn 1837, Balzac ne jugera pas autrement. Dans un petit ouvrage également, et également peu connu de nos jours, Rois de France, il a analysé avec justesse les méfaits et les ravages de ce qu'il appelle, à bon droit, "la secte" des Encyclopédistes. Lafautearousseau a donné quatre extraits de ce petit ouvrage, sous forme de "bonnes feuilles". Le premier de ces extraits traite justement, pour le règne de Louis XV, de l'apparition de cette secte et de la nocivité de son action :

     

    1er extrait : La « secte » des Encyclopédistes, la décomposition morale - élites et société - au XVIIIe siècle (pages 75 à 79)

    (les trois autres extraits traitent de Louis XVI, et de ses erreurs face à la Révolution; de l'infanticide perpétré contre Louis XVII; et des qualités de Louis XVIII...)

     

     • Et, dans notre Album Maîtres et témoins (III) : Léon Daudet, à propos des Encyclopédistes, voir la photo "L'important est d'avoir un vrai corps de doctrine"

     

     

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    1914 : 19.240 tués : Le jour le plus meurtrier de la Grande Guerre pour l'armée britannique...

     

    Souvent appelée - à juste titre... - "le Verdun des Britanniques", la Bataille de la Somme, qui débute ce premier juillet 1914, et qui devait briser le front allemand, se révèle très vite être un échec cuisant : 19.240 soldats du Royaume Uni et du Commonwealth seront tués en cette seule journée, 2.082 seront portés disparus, 35.493 seront blessés...

    Et tout cela, au bout du compte, pour une avancé territoriale dérisoire ! :

     

     http://geopolis.francetvinfo.fr/la-bataille-de-la-somme-le-1er-juillet-1916-le-verdun-des-britanniques-110885

     

    (Pour l'armée française, le jour le plus meurtrier de la guerre fut le 22 août 1914 : 27.000 tués ! Voir l'Éphéméride du 22 août)...

     

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    À Thiepval, le Mémorial de la Bataille de la Somme...

     

     

  • Islam et féminisme (suite et fin, 4/4), par Annie Laurent

    Annie_Laurent.jpgLe jeudi 16 juin dernier, nous donnions ici-même le premier texte de cette série de trois que consacre Annie Laurent au thème Islam et féminisme.

    Voici aujourd'hui la deuxième partie (et la fin) du troisième de ces textes, que vous pouvez retrouver ici :

    • Islam et féminisme (1/3), par Annie Laurent

    • Islam et féminisme (2/3), par Annie Laurent

    • Islam et féminisme (3/3), première partie, par Annie Laurent

    Un grand merci et un grand bravo à Annie Laurent, qui nous éclaire aussi parfaitement et aussi régulèrement...

    François Davin, Blogmestre

    1A.jpg

    Tout en déniant à la doctrine islamique la moindre responsabilité dans le statut inégalitaire de la femme (cf. PFV n° 91), Zeina El-Tibi, Nayla Tabbara et Asma Lamrabet admettent l’existence de traitements injustes envers elle et la nécessité d’y remédier. Leur combat s’inscrit dans une démarche féministe qu’elles affirment compatible avec l’islam.

    LES CAUSES DU DÉCLIN

    Les trois auteurs attribuent à des causes humaines (coutumes ancestrales, déviations, interprétations erronées, calculs politiques) l’origine de cette situation.

    Z. El-Tibi consacre un chapitre de son ouvrage aux deux principales « causes de la stagnation ».

    1 – Le tâqlid (imitation aveugle) consiste à adopter des coutumes extérieures ou archaïques (p. ex. celles des Mongols, des Perses puis des Turcs ottomans dont le pouvoir s’est imposé à l’espace arabe à partir du XVIème). « Le tâqlid est le choix de la facilité, de la paresse et du refus d’exercer son intelligence […]. Il privilégie la routine, il favorise donc l’obscurantisme ». Or, aujourd’hui, déplore l’auteur, on constate « un retour de ce tâqlid dans de nombreuses communautés musulmanes ».  

    2 – La bid’a (innovation blâmable), émanation du tâqlid, consiste à s’éloigner du Coran et de la Sunna (Tradition mahométane). Elle est le fait « de rajouter à la religion des éléments qui n’existent pas dans les textes fondamentaux », d’innover et de déformer ces derniers. « Et la condition de la femme, plus que toute autre question, a donné lieu à d’innombrables innovations blâmables (…), toutes plus fantaisistes les unes que les autres ». L’auteur y ajoute « la progression des superstitions », « les pesanteurs sociologiques » et « l’engourdissement », accumulés « durant le déclin ottoman et la période coloniale » (La condition de la femme musulmane, Cerf, 2021, p. 124-133).

    Après avoir rappelé les promesses du mouvement réformiste du début du XXème siècle et les progrès accomplis par certains régimes musulmans installés lors des indépendances (ibid., p. 134-162), Z. El-Tibi relate l’apparition récente d’« idéologies extrémistes » (régime des ayatollahs en Iran, Talibans afghans, pakistanais et africains, salafistes arabes, etc.) qui ruinent ces évolutions en prenant la religion en otage, raison pour laquelle elle conteste l’usage du mot « islamisme », à ses yeux réduction de l’islam à un système politique (ibid., p. 163-175).

    Quant à A. Lamrabet, elle regrette, en ce qui concerne le mariage, l’importance accordée par le fiqh (droit jurisprudentiel) à des concepts empruntés aux coutumes patriarcales (obéissance absolue de la femme, tutelle despotique du mari, chosification des femmes) et le verrouillage des « latitudes offertes par le message spirituel de l’islam lors de la codification des sciences du Hadith » (les paroles et les actions de Mahomet) (Islam et femmes. Les questions qui fâchent, Gallimard, 2017, p. 70). Or, souligne-t-elle, « les hadiths ne peuvent en aucun cas abroger le Coran, fait admis par les fondateurs des principales écoles juridiques » (ibid., 108-109).

    LE FÉMINISME ISLAMIQUE

    Afin de remédier à la situation actuelle, l’urgence est « de retrouver l’islam, la force de son message, et de reprendre l’effort d’adaptation auquel il convie », assure Z. El-Tibi (op. cit., p. 200). Pour elle, la solution consiste à renouer avec la pratique de l’ijtihad, méthode consistant en un « effort d’interprétation » fondé sur le libre-arbitre. Selon la tradition de l’islam, elle fut pratiquée par Mahomet lui-même, puis par les quatre premiers califes, appelés « les bien guidés », et par les juristes des quatre écoles qui ont posé les règles générales du droit musulman ; elle est donc « dans les gènes de l’islam » et « synonyme de son dynamisme » (ibid., p. 202).

    L’auteur estime que ce rôle incombe au « pouvoir politique en symbiose avec les oulémas (savants) des grands centres de la pensée islamique », en particulier El-Azhar en Égypte (ibid., p. 208). Mais elle ne souligne pas les limites de cette institution, considérée à tort comme dotée de prérogatives magistérielles et ouverte à la modernité (cf. PFV n° 80 : El-Azhar, « phare de l’islam sunnite » ; PFV n° 81 : El-Azhar, entre politique et religion). Et surtout, elle omet de préciser que la « porte de l’ijtihad » a été fermée au XIème siècle par le calife El-Qadir (992-1031) car contraire au dogme du Coran « incréé » proclamé par l’un de ses prédécesseurs, Moutawakkil (847-861). Cf. A. Laurent, L’islam pour tous ceux qui veulent en parler (mais ne le connaissent pas encore), Artège, 2007, p. 24 ; Dominique et Janine Sourdel, Dictionnaire historique de l’islam, PUF, 1996, p. 682.

    Z. El-Tibi s’oppose en outre aux « nouveaux penseurs » musulmans contemporains, tels que Rachid Benzine et Abdelwahhab Meddeb, coupables à ses yeux de vouloir « déconstruire » l’islam pour en créer un nouveau.  « Il est remarquable qu’on ne trouve pratiquement aucune analyse solide et convaincante de la part de ces écrivains qui prétendent soigner l’islam de ses “maladies” sans avoir su porter le bon diagnostic ni recourir aux bons remèdes ». Pour elle, cette démarche est contraire à celle des « réformistes » (ibid., p. 201).  

    Le mouvement réformiste, apparu au Proche-Orient au tournant des XIXème et XXème siècles, est à ses yeux une référence puisque son projet consistait à « repenser l’islam », non en le réformant ou le déconstruisant mais en le débarrassant « des gangues accumulées pendant des siècles de décadence ». Elle relève les écrits de certains de ses membres favorables à l’amélioration de la condition de la femme, surtout en matière d’éducation (ibid., p. 134-147).

    Il convient cependant de souligner l’ambiguïté du réformisme : certains de ses militants, surtout des hommes, se sont largement inspirés de « l’imitation des pieux ancêtres », contribuant ainsi à l’émergence des idées salafistes qui combattent toute modernisation du statut de la femme (cf. PFV n° 65 Un réformisme ambigu).

    N. Tabbara, elle aussi favorable à l’ijtihad, approuve l’exégèse « holistique » adoptée par des féministes musulmanes pour justifier la réinterprétation des versets problématiques relatifs aux rapports hommes-femmes. Il s’agit de placer telle ou telle prescription dans une perspective générale, la croyance en un Dieu juste, pour éviter la sacralisation des textes dits « seconds », c’est-à-dire « des interprétations faites par des hommes au Moyen Âge mais ayant été sacralisées avec le temps ». Elle s’appuie sur la remarque de l’une de ces féministes selon laquelle « Dieu a créé l’époux – et non pas l’épouse – à partir d’une seule âme ». « Grammaticalement, le féminin précède ainsi le masculin », en conclut N. Tabbara (L’islam pensé par une femme, Bayard, 2018, p. 102-125).

    Quant à A. Lamrabet, présidente du Groupe international d’étude et de réflexion sur la femme en islam, dont le siège est au Maroc, son pays natal, qualifiée de « référence du féminisme islamique », elle soutient les revendications des femmes qui veulent être reconnues comme juristes pour interpréter le Coran, la tradition et la charia, mais aussi pour exercer des fonctions religieuses : imams, voire muftis (La Croix, 2 août 2013).

    C’est cependant en 1990, dans la foulée de la révolution iranienne, que le féminisme islamique contemporain s’est structuré. Présent sur tous les continents, le mouvement organise des congrès internationaux. Réunies à Barcelone (Espagne) en 2006, 400 militantes ont émis cette revendication : « s’approprier le Coran et imposer une lecture non sexiste des textes » (Le Monde, 8 novembre 2006). Dans un autre congrès, Abdelnour Prado, président du Conseil islamique catalan, a justifié cette démarche : « Nous voulons valider le “féminisme islamique” comme un discours émergent et le renforcer dans les pays musulmans et dans les minorités musulmanes des pays occidentaux » (La Croix, 26 octobre 2010).

    UNE IMPOSTURE INTELLECTUELLE

    Sous ce titre, Razika Adnani, philosophe franco-algérienne, tout en militant pour la réforme de l’islam (cf. son livre Pour ne pas céder, éd. Publisher, 2021), montre l’erreur qui consiste à vouloir inscrire le combat pour l’émancipation féminine « à l’intérieur du cadre religieux musulman », les incohérences et l’inefficacité qu’implique cette conception et l’inefficacité qui en résultent inexorablement.

    « Le féminisme islamique prend l’islam comme source de légitimité de son combat et pour cadre délimitant son champ et une femme musulmane ne peut, dans ce cas, revendiquer un droit que s’il est validé par l’islam ». Il en résulte que « pour les féministes islamiques, les discriminations dont sont victimes les femmes dans les sociétés musulmanes ne sont pas dues à l’islam, mais au contraire à une sortie de ses enseignements et du chemin tracé par le prophète. Quant à la cause, elles l’attribuent à l’interprétation masculine erronée des textes coraniques […]. Les féministes islamiques font certes de la rhétorique mais n’arrivent pas à prouver que les inégalités existant dans les textes coraniques ne sont pas des inégalités ». Et « pourquoi une interprétation féminine serait-elle plus valable et plus juste qu’une interprétation masculine ? ».

    Tout en soulignant le problème « d’honnêteté morale et intellectuelle » que soulève une telle conception, la philosophe en déduit cette évidence : « Il est pourtant plus efficace de reconnaître les inégalités qui existent dans les textes et de les déclarer caduques tout comme cela a été fait pour d’autres recommandations du Coran ». Elle fait ainsi allusion à la possibilité, reconnue par le Coran (2, 106 ; 13, 39), d’abroger certaines de ses dispositions relatives à diverses modalités de la vie, dont les relations hommes-femmes (A. Laurent, L’islam…op. cit., p. 35). 

    En outre, poursuit R. Adnani, en inscrivant leur combat dans le cadre islamique, ces militantes veulent « démontrer que leur féminisme n’est pas importé de l’Occident ». C’est pourquoi « elles ont besoin de prouver qu’elles sont musulmanes et surtout qu’elles ne revendiquent pas les mêmes droits que ceux que les femmes revendiquent en Occident », ce qui est exprimé par le port du voile de certaines d’entre elles. Mais, ce faisant, « elles se contredisent avec elles-mêmes car le voile est une pratique discriminatoire à l’égard de la femme » (Marianne, 8 juin 2021).

    DANGER D’OCCIDENTALISATION

    Il faut rappeler qu’à ses débuts, il y a un siècle, le combat des musulmanes avides de liberté et de dignité n’était pas teinté d’idéologie revancharde : elles ne reniaient pas leur féminité et n’aspiraient pas à être « comme » des hommes. Ce qui comptait pour elles c’était d’abord d’en finir avec le mépris enseigné par les textes sacrés de l’islam. Peu à peu cependant, le féminisme à l’occidentale, avec ses outrances, s’est frayé un chemin dans les sociétés musulmanes, comme l’ont montré les Femen défilant les seins nus dans les rues de Tunis en 2013, avec le soutien de féministes européennes.

    Cette évolution a suscité la réaction des militants islamistes, tel l’Égyptien Youssef El-Qaradawi, fondateur à Dublin du Conseil européen de la Fatoua et de la Recherche : « Quand l’homme se féminise et que la femme se virilise, c’est le signe du chaos et de la dégradation des mœurs » (Le licite et l’illicite en islam, éd. Alqalam, Paris, 1992).

    La méfiance envers le féminisme s’exprime aussi chez certaines musulmanes, comme le montre l’enquête effectuée dans la péninsule Arabique par Arnaud Lacheret, docteur en sciences politiques. Bien qu’engagées dans la vie professionnelle et ouvertes à des réformes, les femmes interrogées disent ignorer le concept de féminisme ou ne pas en comprendre le sens, une partie d’entre elles allant jusqu’à l’identifier à une tentative d’occidentaliser leur culture ou de donner des leçons à l’islam. Cf. La femme est l’avenir du Golfe, éd. Le bord de l’eau, 2020, p. 150-152.

    Riffat Hassan, Pakistanaise, professeur à l’Université de Louisville (États-Unis), auteur de plusieurs livres sur la défense des droits des femmes, constate également, dans une conférence donnée en 2007, cette méfi

  • Bernard Lugan prévient : L’Afrique du Nord est dans une phase d’implosion, d’explosion, de perdition…

     

    Bernard Lugan vient de publier aux éditions du Rocher une Histoire de l’Afrique du Nord. Il explique pour Boulevard Voltaire [5.07] les préalables nécessaires à la mise en œuvre d’une vraie politique avec cette région, loin de la stratégie « des pieds en dedans » qui prévaut actuellement… Il expose aussi la situation de pré-implosion de l'Afrique du Nord, notamment de l'Algérie, très grave sujet souvent évoqué dans Lafautearousseau. •

    Histoire de l’Afrique du Nord

    Lire aussi dans Lafautearousseau

    LIVRES • Histoire de l'Afrique du Nord : un nouveau livre de Bernard Lugan

     


    Bernard Lugan :"L'Afrique du Nord est dans une... par bvoltaire

  • En vente à la Librairie de Flore.

    1808265901.16.jpgUne nuit de février 1999, Philippe Pharamond de Bourbon, descendant des Capétiens, est sacré Roy de France en la cathédrale de Reims. Mais la France endormie n’a rien su de l’équipée qui, depuis l’Atlantique, l’a mené à cheval à Saint-Benoît-sur-Loire, puis Saint-Denis, échappant au limier des Renseignement Généraux que le ministre de l’Intérieur a mis à ses trousses.

    Mêlant l’histoire à la légende et le merveilleux au réel, nous entraînant de l’énigme de la Sainte Ampoule à la France des autoroutes et des multinationales, Jean Raspail nous conte ici, bondissante comme un thriller, une histoire de chevalerie au plus haut sens du mot, une histoire épique, catholique et royal.

    https://www.librairie-de-flore.fr/produit/sire/

  • Sur TV Libertés, les mouvements nationalistes en Belgique de 1950 à 2000 - Synthèse n°17 avec Hervé Van Laethem.


    Militant actif de la cause nationale en Belgique francophone, Hervé Van Laethem est le porte-parole du mouvement "Nation". Fin connaisseur de l'histoire politique de son pays, en particulier celle de la droite de conviction, il est l'auteur d'un ouvrage intitulé "Les mouvements nationalistes en Belgique de 1950 à 2000" dans la prestigieuse collection des Cahiers d'Histoire du nationalisme (Synthèse éditions).

    Il est aujourd'hui l'invité de Roland Hélie et de Philippe Randa pour cette nouvelle émission "Synthèse" au cours de laquelle nous retrouverons le professeur Pierre de Laubier et sa chronique "L'abominable histoire de France".

    Vous pouvez vous procurer le livre de Hervé Van Laethem ici :

    https://synthese-editions.com/produit...

  • Aux Mercredis de la NAR : #82 - Gabriel Martinez-Gros pour son livre ”De l'autre côté des croisades”.


    En Orient, au XIIe et XIIIe siècle, l’Empire islamique en lutte contre lui-même affronte deux puissances impérialistes qui le prennent en tenaille : les Mongols à l’Est, les Francs à l’Ouest.

    Spécialiste de l’islam médiéval, Gabriel Martinez-Gros discerne sous la violence des affrontements guerriers le travail de la raison dans l’histoire du monde oriental, qu’éclaire la dialectique du Bédouin et du Sédentaire mise en évidence par Ibn Khaldoun. 

    Après son histoire de L’Empire islamique du VIIe au XIe siècle, le nouveau livre que nous présente Gabriel Martinez-Gros, De l’autre côté des croisades, jette un éclairage nouveau et passionnant sur l’histoire du monde médiéval, sur les enjeux territoriaux et maritimes des puissances qui s’affrontent et sur les véritables ambitions des chevaliers puis des rois venus d’Europe occidentale.

  • Du 2 au 22 Décembre, à Voiron (en Isère) : Exposition et conférence à Voiron Exposition Vous êtes désireux d'en apprendr

    (Merci à nos amis du Centre Lesdiguières, qui nous ont transmis cette information, que nous relayons bien volontiers, à notre tour...)

    La Grande Aventure des Chrétiens d'Orient | Diocèse de Nantes

    Exposition et conférence à Voiron

    Exposition

    Vous êtes désireux d'en apprendre plus sur les chrétiens d'Orient, leur histoire et leurs traditions liturgiques ?

    Venez les découvrir à Voiron au cours de l'exposition

    La Grande Aventure des chrétiens d'Orient, 2000 ans d'histoire"

     

    Du 2 au 22 décembre 2023

    tous les jours de 9h à 17h

    Église Saint Bruno, place de la République, 38500 Voiron.

    Entrée libre

    Conférence Histoire abrégée de l'Arménie et du Haut-Karabagh par Salim Dermarkar

    Le 13 décembre 2023 à 20h

    Maison Saint Pierre à Voiron

  • Retraites : une réforme en trompe-l’œil, par François Reloujac*

    Présentée comme une réforme de fond devant pérenniser le système français de « retraite par répartition », le projet proposé par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, après être passé de justesse à l’Assemblée nationale, a été provisoirement rejeté en commission par le Sénat… pour de mauvaises raisons !

     

     

    Cette nouvelle réforme des retraites, proposée par le Gouvernement, n’est en fait qu’un ajustement comptable reposant sur des hypothèses qui ne résultent que de la politique du chien crevé au fil de l’eau et sur des solutions qui ne sont qu’autant de faux-semblants. 

     

    METRO NOULOT CAVEAU.JPG 

    Le projet de loi se veut une « réforme structurante » du système de retraite, permettant de sauvegarder le système français de « retraite par répartition » jusqu’en 2060, au moins ! Objectif ambitieux qui a eu du mal à convaincre les députés et qui a soulevé le scepticisme parmi les sénateurs membres de la Commission préparatoire. Chef d’œuvre de « motion » du parti socialiste, le texte ne satisfait personne. Il est vrai qu’il repose sur des hypothèses improbables, qu’il ne fait qu’accroître l’ambiguïté fondamentale du système français et qu’il méconnaît – pour ne pas dire qu’il nie – le seul fondement du financement des retraites.

     

     

    Des hypothèses improbables...

     

    Ces hypothèses improbables sont celles retenues par le Conseil d’orientation des retraites (COR) qui s’est contenté de projeter les tendances actuelles, sans chercher à savoir si elles sont ou non réalistes. Ces hypothèses considèrent l’état comme un simple spectateur des tendances récentes, incapable d’influencer en quoi que ce soit l’évolution du pays..

    Le projet retient un taux de fécondité moyen de 1,95 enfant par femme entre 2015 et 2060. Autrement dit, d’ici à 2060, les générations de Français ne pourront pas se renouveler, ni même se maintenir et cela en dépit du fait que l’espérance de vie passera de 82,2 à 88 ans pour les hommes et de 87,2 à 92,3 ans pour les femmes. La population française devrait donc diminuer dans les années à venir, sauf à être compensée par un solde migratoire considéré par le COR comme constant sur la période à 100 000 étrangers supplémentaires chaque année. C’est-à-dire qu’à partir de 2036 ou 2037, le nombre d’étrangers s’installant en France sera supérieur au nombre des naissances d’autochtones, que ceux-ci soient Français depuis une ou deux générations, ou plus. Dans ses statistiques, le COR estime par ailleurs que le « taux de chômage à long terme » pourrait baisser jusqu’à 4,5 %, autrement dit que le gouvernement a trouvé le système permettant, non seulement d’« inverser la courbe du chômage » comme l’a promis le président Hollande pour 2013, mais encore de relancer une économie qui serait nettement plus efficace que pendant les « Trente Glorieuses » ! Malgré ces projections merveilleuses, « il n’y aurait plus que 1,5 actif pour un inactif de plus de 60 ans en 2060, contre 2,1 en 2010 ». 

    Au-delà de ces chiffres, il apparaît que les statistiques retenues ne reposent que sur des extrapolations des calculs actuels, comme si les politiques des gouvernements se succédant ne pouvaient avoir aucune influence, qu’ils soient de droite ou de gauche… ou d’ailleurs ! 

     

     

    ... pour maintenir un système ambigu

     

    On nous présente aujourd’hui le système français comme un régime de retraite par répartition. Mais, par nature, un système de retraite par répartition est un système équilibré. Si les retraites de ceux qui ne travaillent plus, dépendent uniquement de la solidarité des jeunes générations, le total des rentes versées doit strictement être égal au montant total des cotisations prélevées. Il en résulte que soit les pensions doivent varier algébriquement en fonction du montant des cotisations versées par les actifs et du nombre de ces actifs, soit les cotisations des actifs doivent varier en fonction du montant des pensions à verser et du nombre des pensionnés. Dès lors que le taux de fécondité retenu (1,95 enfant par femme) ne permet pas le renouvellement des générations, ou le niveau des pensions devra inéluctablement baisser, ou le niveau des cotisations pesant – directement ou indirectement – sur les actifs devra augmenter. Mais, dans un tel système, le montant des « cotisations » de retraite versées par les actifs ne donne droit à aucun niveau de pension ultérieure pour ceux qui cotisent. Ils ne mettent pas d’argent de côté pour leurs vieux jours, ils ne font qu’accomplir un devoir de solidarité vis-à-vis de ceux qui les ont précédés. Autrement dit, il est faux de dire que le montant de la retraite à laquelle chacun pourrait avoir droit demain dépend du montant de ses cotisations. Dans la mesure où l’on veut rattacher le montant des pensions de retraite à celui des cotisations versées, on n’est plus dans un système de retraite par répartition mais dans un système de retraite par capitalisation qui ne dit pas son nom.

    Dans ces conditions, si la date de départ à la retraite a pour effet de définir à partir de quand chacun pourra jouir de la solidarité des plus jeunes, la durée de cotisation permet seule de définir la durée minimale d’effort demandée en faveur des aînés et la quote-part acquise dans les droits à cette solidarité. Dans ces conditions, il n’est pas anormal de moduler cette durée de cotisation en fonction de l’utilité du travail pour la société ou de sa pénibilité, mais cela n’est ni plus ni moins normal que de tenir compte de ces facteurs dans le montant des rémunérations versées au cours de la vie active.

    Ajoutons que, dans le cadre actuel et compte tenu des régimes particuliers, un véritable système de retraite par répartition amènerait à diviser par plus de deux le montant des pensions versées aux retraités de la SNCF, mais à augmenter le montant de celles versées aux membres des professions libérales !

     

     

    Car il n’est de richesse que d’hommes

     

    Le seul point commun à tous les systèmes de retraite  c’est le niveau de production réelle du pays et la nature de cette production. Globalement, les retraités ont des consommations qui s’apparentent fondamentalement à celles des actifs. Dès lors, un système de retraite pérenne repose toujours, dans tous les pays et à toutes les époques, sur deux composantes essentielles : le nombre d’actifs et la nature de leur production. Il en résulte qu’une réforme du système ne peut reposer que sur ces deux seuls éléments que sont la politique familiale et le rapport entre le nombre d’actifs dans le système « productif » et de ceux dans le système « administratif », qu’il soit privé, para-public ou totalement public.

    En effet, à terme et surtout dans les périodes difficiles, on ne peut demander un effort de solidarité qu’aux personnes qui ont des raisons extra-économiques de se sentir solidaires. Et quelle raison plus solide existe-t-il que celle du sang ? Si l’on ne demande pas d’abord à l’enfant d’aider ses parents dans le besoin, comment pourra-t-on le demander à l’étranger ? Ce n’est que sur la solidarité familiale et nationale que l’on peut vraiment compter pour assurer la relève de la population et donc la continuité du pays et de ses valeurs.  

    *Article paru dans Politique magazine n° 123 , novembre 2013

  • Nouvelles du Blog : visiteurs uniques, visites, pages lues : les records de fréquentation à nouveau battus...

            Et les statistiques de Viméo confirment celles de Hautetfort : de l'Amérique à l'Asie, en passant par l'Afrique et, tout de même aussi, l'Europe, les vidéos sont de plus en plus téléchargées. Si les États-Unis et la Grande-Bretagne sont, après la France, les deux pays qui téléchargent le plus, nous faisons de beaux scores en Belgique, au Canada, en Thaïllande, en Suisse, en Allemagne, en Espagne et en Italie.

            Et les chiffres deviennent non négligeables en Autriche, Pologne, Ukraine, Hollande, Suède, Corée du Sud, Russie, Maroc, Brésil, Argentine, Australie, Viet-Nam, Japon, Liban, Luxembourg, Hongrie, Irlande, Portugal, Roumanie, Grèce. Ensuite, les chiffres sont plus faibles, mais ce n'est peut-être - on peut toujours espérer... - que le frémissement des débuts ? Quoi qu'il en soit, et même s'il n'y a, symboliquement, qu'un seul téléchargement dans sept pays (Syrie, Colombie, Sri Lanka, Congo, Inde, Hong Kong et Lithuanie) il y a au total 85 pays dans lesquels des téléchargements de nos vidéos ont lieu (1). Qui a dit "Ce n'est qu'un début, continuons le combat !...." ?

            Qui sont ces personnes ? Là, évidemment, nous n'en savons plus rien, car les statistiques de Viméo s'arrêtent ici, et se bornent à donner les chiffres de téléchargement (pas les adresses des téléchargeurs !). A noter, toutefois, car c'est important, Viméo distingue la simple écoute d'une Vidéo de son téléchargement. Nous n'avons retenu ici que les téléchargements, beaucoup plus significatifs que les simples écoutes, dont le nombre est encore beaucoup plus élevé (2)....

            De toute évidence, avec des chiffres pareils, que ce soit en France ou à l'étranger, il semble bien que nous avons "fait le plein" du monde royaliste, et que nous commençons à "mordre" sur l'extérieur. On le voit bien, du reste, avec certains commentaires qui, de toute évidence, sont - dans la forme et dans le fond - composés par des gens qui n'ont pas nos "tics" de pensée et d'écriture, ni nos références....

            C'est - évidemment - tant mieux, et c'est - non moins évidemment - dans cette direction qu'il faut poursuivre nos efforts.... 

            Merci à vous, sans qui rien de tout cela ne serait arrivé.

            Nous avons, pour notre part, la ferme intention de remplir encore cette malle au trésor que nous voulons faire de notre/votre Blog, véritable bouteille à la mer, lancée à la disposition de qui voudra cliquer pour savoir ce que pensent, veulent et proposent les royalistes pour notre France qui va mal.

            La présentation de notre Site, dans plus très longtemps maintenant, sera un moment important de la nouvelle étape de notre développement en 2011. Cela fait deux années que nous avons, à chaque fois, doublé notre lectorat. On ne pourra bien sûr pas continuer ainsi à "doubler" indéfiniment car, évidemment, cela jouant sur des quantités de plus en plus grandes, c'est de plus en plus difficile. Mais on peut, malgré tout, rêver et se lancer des défis. Même si on ne les réalise qu'en partie, ce sera toujours un gros progrès....

            Alors, en 2011 - tous ensemble ! tous ensemble ! comme on le scande dans les manifs... - on double encore une fois le lectorat ? Nous, on prend le pari. Et vous ?....

            Bonne année à vous tous, et à lafautearousseau !

    (1) : pour celles et ceux que cela intéresse, en voici la liste (en complément des précédemment nommés): Bosnie-Herzégovine, République Dominicaine, Taïwan, Bulgarie, Tunisie, Sénégal, Cambodge, Arabie Saoudite, Turquie, Emirats arabes unis, Bénin, Egypte, Finlande, Norvège, Algérie, Mexique, Île Maurice, Qatar, Slovaquie, Vatican, Israël, Chine, Uruguay, Pérou, Tchéquie, Mali, Lettonie, Djibouti, Koweit, Malte, Chili, Kenya, Cameroun, Cote d'ivoire, Costa rica, Danemark, Croatie, Afrique du Sud, Andore, Bélarus, Bolivie, Singapour.

    A noter trois curiosités du "classement Viméo" : deux "pays" sont marquées "unkown", pour 878 et 535 téléchargements chacun : bizarre...; la Tchécoslovaquie est notée à côté de la Tchéquie et de la Slovaquie : re bizarre...; et la Réunion, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie sont considérés comme des états indépendants : sacrés anglo-saxons !.... Même en enlevant, donc, ces six "pays", on arrive à un total de 79 pays où des téléchargements ont lieu. N'est-ce pas encourageant et prometteur ?.....

    (2) : pour l'ensemble des Vidéos, les plus consultées et les plus téléchargées sont - pour l'instant... - les vidéos des Cafés actualité et celles d'Hilaire de Crémiers....

  • Jeudi 11 Mars, Jeudi 18 Mars, France 3, 20 h 35: Henri IV, un roi vers la paix...

                   Jean-Philippe Guérand, dans Le Pélerin du 6 mars, propose une bonne présentation du télé-film européen -en deux parties- que nous allons avoir la chance de regarder sur France 3. On le voit, l'Année Henri IV, à laquelle nous avons déjà plusieurs fois fait écho, commence à prendre une ampleur de bon aloi...

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    Logo officiel de l'année Henri IV
    Tous renseignements: http://www.societe-henri-iv.eu/

                   Voici la présentation du telefilm, par Jean-Philippe Guérand, que nous reproduisons telle quelle.....           

                Une coproduction internationale invite à redécouvrir Henri IV qui apaisa la France dans le contexte sanglant des guerres de religion. La fiction en deux parties donne, le 11 mars à 20 h 35, sur France 3, le coup d’envoi d’une série de célébrations, quatre siècles après son assassinat, le 14 mai 1610.

     

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    Julien Boisselier incarne Henri IV et Armelle Deutsch, la reine Margot.
     
     
     

                L’accession d’Henri de Navarre au trône de France continue de fasciner nombre d’historiens… et d’hommes politiques. La postérité a retenu du personnage sa promesse de permettre à ses compatriotes de manger à leur faim – la fameuse poule au pot –, ses célèbres sentences : « Ralliez-vous à mon panache blanc » ; « Paris vaut bien une messe. » Jusqu’à l’édit de Nantes, signé le 13 avril 1598.

                Ce monarque moderne, qui réussit à instaurer la paix dans le royaume de France en affrontant l’adversité et la violence, a inspiré le romancier allemand Heinrich Mann, frère aîné de l’écrivain Thomas Mann. Sous la montée du nazisme, Heinrich Mann, en exil à Pau, avait consacré une biographie à Henri IV, qui a dû faire face au conflit entre catholiques et protestants, jusqu’à changer de religion cinq fois au cours de sa vie.

                En filigrane, l’auteur, hanté par les démons de son époque, y dressait un parallèle entre le massacre de la Saint-Barthélemy et la nuit de Cristal (1). Cette résonance a incité le réalisateur allemand Jo Baier à se battre pendant dix ans pour tirer du livre un téléfilm en deux volets (2). Heureuse coïncidence, celui-ci arrive sur les écrans au moment même où l'on commémorera, en mai, le quatre centième anniversaire de l'assassinat d'Henri IV par François Ravaillac.

                France Télévisions voit dans cette coproduction internationale une manière de pallier la baisse des ressources des chaînes européennes, désormais contraintes de s'associer pour financer des fictions ambitieuses riches en décors, en costumes et en figurants. Henri IV a ainsi bénéficié d'une enveloppe confortable de près de 20 millions d'euros, soit le triple du budget moyen, pour soixante-douze jours de tournage.



    Une passion torride et éminemment politique

     

     

     

                Pour ce téléfilm, l'Allemagne, la France, la République tchèque (où ont été tournées les scènes de bataille) et la Catalogne ont uni leurs forces en bonne intelligence. Hors de question, par exemple, que l'interprète du bon roi Henri ne soit pas français ! En l'occurrence, il s'agit d'un excellent comédien vu surtout au cinéma : Julien Boisselier ( Je vais bien, ne t'en fais pas ; Le convoyeur ). Celui-ci a dû apprendre à monter à cheval en un mois... et affirme qu'on ne l'y reprendra plus ! Afin d'entrer dans la peau de son personnage, qu'il campe de 20 à 45 ans, l'acteur avoue avoir « beaucoup lu », très influencé au final par Henri IV, le roi libre, de François Bayrou (Éd. Flammarion).

                Les deux femmes de la vie du monarque sont également incarnées par des Françaises. Dans la première partie, Armelle Deutsch a l'honneur de succéder dans le rôle de la reine Margot à Jeanne Moreau et à Isabelle Adjani. La passion torride et éminemment politique de l'héroïne avec le prince gascon donne ici lieu à des étreintes particulièrement crues. Dans la seconde, Chloé Stefani incarne Gabrielle d'Estrées, la favorite morte empoisonnée. L'une et l'autre retiennent de cette expérience « la volonté du réalisateur de les pousser vers un jeu théâtral en leur demandant de parler haut ». Sur le tournage, les comédiens s'exprimaient dans leur langue ; les Allemands ayant un mode de diction plus appuyé que leurs homologues français. De plus, Joachim Król (le poète Agrippa d'Aubigné) ou Hannelore Hoger (Catherine de Médicis) sont des vedettes dans leur pays.

                Julien Boisselier a pu vérifier leur renommée en se rendant au dernier Festival de Berlin, en février. Une version de deux heures et demie d'Henri IV a été présentée, en soirée de gala, avant sa programmation dans deux cents salles en Allemagne, le 18 mars. Côté français, pas de sortie prévue sur grand écran pour l'instant car, selon le producteur Christian Charret, « les fresques historiques ne font plus recette au cinéma ».



    (1) C’est le nom donné à un pogrom lancé à l’initiative du régime nazi contre les juifs dans tout le Reich (Allemagne plus les territoires annexés : Autriche et Sudètes), dans la nuit du 9 au 10 novembre 1938.

    (2) La première partie est diffusée le 11 mars et la deuxième le 18 mars sur France 3.

  • Education : En finir avec l'imbécile dévalorisation du travail manuel...

                L'Ecole est à l'image de la société française : après plus d'un siècle d'idéologie républicaine, elle ressemble, comme toutes les autres composantes du corps social, à ce que Pierre Debray avait un jour appelé La cathédrale effondrée.

                Il ne s'agit donc pas de la réformer mais de la reprendre (1). Boutang nous a ouvert la voie avec son Reprendre le Pouvoir. Mais ce n'est bien sûr plus seulement le Pouvoir qu'il faut maintenant re-définir et re-inventer, afin qu'il débouche sur "un ordre légitime et profond".

                C'est tout l'ensemble de la société, subvertie depuis plus d'un siècle, qu'il faut rebâtir sur des bases saines et non plus idéologiques. Et qu'il faut libérer des théories fumeuses. Au premier plan, bien sûr, l'Ecole, que ces théories fumeuses ont amené au désastre que chacun constate....

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               La première des pistes qu'il faudra suivre -non pas l'unique, mais certainement l'une des principales...- sera d'en finir avec l'absurde et imbécile dévalorisation du travail manuel. Et son corollaire : la non moins absurde et non moins imbécile imbécile promotion systématique des études théoriques longues.   

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               Pour illustrer cela, nous avons choisi de diffuser le témoignage de Ronan, futur boulanger, 21 ans. Il a répondu aux questions d'Isabelle O'Neill (2). Le titre de son intervention annonce la couleur : L'apprentissage en alternance. "Enfin du concret". En voici un extrait :

               "J'ai toujours beaucoup aimé l'école, les copains, la vie de lycée... C'est pour ça qu'après mon bac, je me suis inscrit en gestion à Poitiers. L'idée, c'était d'élargir mes connaissances avant de réaliser mon rêve d'enfant et de devenir boulanger. Mais j'ai arrêté mon DUT en milieu de deuxième année: à moins d'être ultramotivé, la gestion, cela ne donne pas toujours envie de se lever le matin ! A côté de ma soeur, qui s'éclatait en CAP Tapissier, j'avais l'impression d'être encore plus infantilisé qu'au lycée. C'était tout juste si les profs ne mettaient pas des petites croix quand les exercices n'étaient pas faits.....

               Je suis donc revenu à mon idée première : la boulangerie. Là, au moins , c'est concret. Et avec le principe de l'apprentissage, on est directement aux prises avec la vraie vie. Aux compagnons du devoir  (www.compagnons-du-devoir.com), où je prépare mon CAP, nous alternons six semaines en entreprise et deux semaines de cours. Finie la rigolade !

               C'est moi qui ai trouvé la boulangerie dans laquelle je travaille depuis le mois de juillet, à Paris. C'est un des bénéfices de l'apprentissage : non seulement on se forme à un métier, mais on apprend à se débrouiller seul. Et on gagne sa vie surtout ! Je suis super fier de ne plus vivre aux crochets de mes parents... et d'avoir une télévision plus grosse que la leur !

               Mais je ne l'ai pas volée : je travaille comme un fou -on produit mille baguettes par jour - dans des conditions pas toujours faciles....."

              Tout est dit : il y a plus de bon sens et de vraie sagesse chez Ronan que chez tous les idéologues de tous nos IUFM mis bout à bout ! Encore sont-ils très grassement payés, pour amener des milliers de jeunes, chaque année à l'échec.

               Les lycées et collèges, et en conséquence mécanique les Facultés sont pleins de jeunes qui en sont pas réellement demandeurs. Ils n'ont ni l'envie véritable ni les moyens de suivre des études longues. Et pourtant ils y sont parce que le système le veut. On lira avec profit l'article de Chantal Delsol, Mensonges, mensonges, que nous publions demain.

              L'une des solutions pour reprendre l'Ecole - encore une fois pas la seule, mais certainement l'une des principales... - sera de vider ces Lycées, Collèges et Facultés de tous ces jeunes qui y sont parqués à grands frais, direction l'échec assuré et l'ANPE.

             Ronan, lui s'en est sorti : il s'est libéré par le bon sens. Un jour, ce sera tous les jeunes français qu'il faudra libérer de l'idéologie et des mensonges, et la France avec eux.....

    (1) : Voir les deux notes "Simple report ou reculade sur le fond ? Les vrais problèmes que pose l’affaire de la « Réforme Darcos » : « reprendre » l’école, et ne pas craindre d’aller à la castagne…", dans la Catégorie "Education".

    (2) : Le Pélerin, 1° janvier 2009, numéro 6579, pages 44/45.

  • Niger : derrière la mort des soldats américains, l’opposition Peul-Touareg et l’ « embouteillage » sécuritaire

     

    Par Bernard Lugan

     

    611995209.jpgLe 4 octobre 2017 un élément américano-nigérien à ossature de forces spéciales est tombé dans une embuscade à quelques kilomètres de la frontière entre le Niger et le Mali, près de Tongo Tongo, un village situé à proximité de Tillabery.

    Cette embuscade a fait 4 morts parmi les soldats américains et au moins cinq parmi les Nigériens ainsi que plusieurs blessés. Les véhicules de la patrouille ont été détruits. Qui se cache derrière cette attaque marquant un palier supplémentaire dans le conflit sahélien ?

    Pour la première fois, des assaillants viennent donc de s’en prendre ouvertement et dans un combat frontal à une force occidentale. Qui plus est, à des forces spéciales. Jusque-là, les pertes essuyées par les forces françaises étaient essentiellement provoquées par des IED, mines placées sur les axes empruntés par les convois ou les patrouilles. Nous sommes donc en présence d’une montée en puissance des jihadistes car l’embuscade était bien organisée, ses auteurs fortement armés et équipés de véhicules et de motos. Après l’attaque, les assaillants se sont volatilisés dans la savane.

    L’attaque s’est produite dans une zone particulièrement propice aux embuscades où les forces armées nigériennes ont déjà subi de lourdes pertes. La question qui se pose est double.

    I. Qui sont les auteurs de cette attaque ?

    Les autorités nigériennes accusent les groupes jihadistes maliens, notamment deux organisations, l’Etat islamique du Grand Sahara (EIGS) et le Jamat Nosrat al-Islam, nouveau mouvement apparu au mois de mars 2017 et dont le chef est Iyad ag Ghalid, un chef touareg malien de la grande tribu des Ifora passé au jihadisme et affilié à Al-Quaida.

    Or, nous devons bien voir que dans cette région, le paravent islamique cache le cœur de la question qui est une fois de plus l’ethnie. Comme je ne cesse de le dire depuis plusieurs années, le jihadisme sahélien est d’abord, la surinfection d’une plaie ethnique. Ici, tout se greffe en effet sur l’opposition entre Peul (Fulani), Touareg, Touareg Imghad et autres groupes, engagés dans une féroce compétition, d’abord pour le contrôle des trafics, mais aussi des points d’eau et des pâturages. Depuis plus d’une année, sous paravent islamique, se cache en réalité une terrible guerre ethnique qui oppose ces deux populations d’éleveurs nomades et qui a fait des dizaines de morts.

    Dans cet imbroglio, certains Fulani (Peul) se sont jihadisés afin de pouvoir lutter contre leurs rivaux et concurrents, notamment, mais pas exclusivement, les Imghad. Ces derniers qui ont été armés par le Mali pour lutter, certes contre les jihadistes, mais d’abord contre les Iforas, profitent de la situation pour s’en prendre à leurs rivaux ethniques.

    Les jihadistes ont beau jeu d’attiser ce conflit millénaire. Ils légitiment ainsi la réaction des Peul par les grands jihad des XVIIIe-XIXe siècles, quand le paysage politique de l’ouest africain sahélien fut remodelé par leurs ancêtres qui constituèrent alors de vastes Etats inspirés par le jihad. Alimentés à la fontaine du mythe, bien des jeunes peuls se sont mis à rêver à des destins comparables à ceux d’Ousmane Dan Fodio (1754-1817), fondateur de l’Empire de Sokoto, de Seku Ahmadu (1773-1844), qui créa l’empire peul du Macina ou encore à Omar Tall dit el-Hadj-Omar (1796-1864) fondateur de l’empire Toucouleur ou Torodbe qui s’était fixé pour but l’islamisation de l’Ouest africain.

    Alors, certes, ce sont bien des jihadistes qui ont mené la sanglante embuscade du 4 octobre 2017. Mais en prenant appui sur la marqueterie ethnique régionale. Il est donc une fois de plus essentiel de voir ce qui alimente ce jihadisme. Pour cela, cessons d’analyser la situation en termes « globaux » ou en parlant de déficit de démocratie, de « développement » ou autres fadaises ânonnées ad nauseampar le politiquement correct ou le psittacisme journalistique. Autrement, le combat sera perdu par avance.

    II. Du danger de l’ « embouteillage sécuritaire »

    Dans de précédents articles ou communiqués, j’avais fortement mis en garde contre la multiplication des structures de lutte anti-jihadiste au Sahel. Elles constituent en effet une juxtaposition de forces dont la coordination est moins rapide que la prise de décision unique par les responsables jihadistes.

    Le coup très dur qui vient d’être porté aux forces spéciales américaines illustre hélas mon propos. Ces dernières ont deux emprises régionales, à Aguellal et à Diffa, plus des éléments équipés de drones à Agadez ainsi qu’une emprise sur l’aéroport de Niamey. Leur connaissance du terrain est technique et disons-le « livresque ». Il leur manque la « profondeur historique » et pour tout dire cette connaissance de la géopolitique ethnique régionale que notre vieille Infanterie de marine, la « Coloniale », possédait sur le bout des doigts.

    Aux forces américaines, viennent s’ajouter régionalement diverses composantes onusiennes, d’autres issues de l’Eurocorps. Ce mille-feuilles sécuritaire est également composé d’armées nationales, de forces conjointes issues de ces mêmes armées nationales, de milices ethniques anti-jihadistes et maintenant du G5 Sahel…Un véritable volapük militaire qui prête le flanc à toutes les catastrophes. D’autant plus que ces forces enchevêtrées et qui, toutes, luttent en principe contre les jihadistes, doivent de plus être coordonnées avec la colonne vertébrale du dispositif qui est Barkhane...

    Depuis la nuit des temps, l’expérience a pourtant appris trois choses aux militaires :

    1. La nécessité de l’unité du commandement

    2. La connaissance du terrain

    3. L’identification de l’ennemi que l’on combat.   

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    Le blog officiel de Bernard Lugan

    Le 7 octobre 2017

  • L'AGRICULTURE ou les premiers Écologistes, par Frédéric Winkler.

    Les paysans et les viticulteurs du Midi ne pensent pas autrement quand ils dénoncent les technocrates distingués qui ont fabriqué les règlements européens. Et ils décrivent leur situation avec des mots qui pourraient être calqués sur le sentiment de bien des Français, dans bien des domaines : « La viticulture provençale enfermée depuis cent ans dans un corset orthopédique qui l'étouffe, contrôlée, étiquetée, suradministrée, surfiscalisée, noyautée, écrasée, confisquée, endettée, et pour finir embrigadée dans cette galère du Marché Commun où on l'a fait entrer de force pour pouvoir signer un règlement financier qui profitait à d'autres ». Une dénonciation à la Proudhon, tels sont les problèmes de nos viticulteurs, de nos paysans.

    frédéric winkler.jpgAujourd'hui, ils sont soumis à une Politique Agricole Commune réactualisée en 2013 mais qui profite toujours (malgré quelques nuances) plus aux gros producteurs qu'aux autres, des problèmes qui touchent aussi de nombreuses autres professions, d'ailleurs. Le monde agricole est soumis aux dictats européens comme à l'industrie agroalimentaire (de la multinationale propriétaire des semences et productrice d'OGM à la grande distribution qui impose ses prix et ses volontés...) afin qu'il ne soit plus libre mais dépendant du Marché et de ses règles…
    SURVIVANT ?
    « Pour les prolétaires qui se laissent amuser par des promenades ridicules dans les rues, par les plantations d'arbres de la liberté, par des phrases sonores d'avocats, il y aura de l'eau bénite d'abord, des injures ensuite, enfin de la mitraille, de la misère toujours ! » (Auguste Blanqui - Cadeau de Paul Genestie ). Chaque jour, les bureaucrates de Bruxelles décident comment te faire disparaître car tu n'es pas assez « productif » ou tu ne te « plies » pas assez aux règles du Marché... Depuis longtemps déjà les technocrates ont décidé ta mort. Tu as été et tu es toujours trahi par les « grands » syndicats disant te représenter (en particulier la FNSEA), qui finissent toujours par manger dans la main de tes adversaires…Tu dois disparaitre car le système ne veut pas d'hommes libres préservant la saine tradition, racines de tes pères. Tu dois rentrer dans le moule libéralo-socialiste du « métro-boulot-dodo » pour le conformisme égalitaire où l'on admet mal le droit à la différence. Tout doit être « nivelé » pour aboutir à une forme de socialisme d'Etat mondialisé, de « communisme de Marché », disait un pamphlétaire il y a quelques années : ainsi, l'agriculteur est-il devenu un simple maillon d'une grande chaîne agroalimentaire qui lui échappe complètement. Le vieux félibre de Martigues écrivait : « Le socialisme d'Etat présente cette particularité distincte de liguer les travailleurs contre la société et contre l'Etat. Esclaves de l'Etat, parasites de la société. L'Etat détruira la société à leur profit. Et la société ne leur inspirera aucune reconnaissance. L'Etat qui assumera l'ingrat office de répartir entre eux le profit de ses exactions et de sa flibuste, non sans y introduire un minimum d'ordre, prendra ainsi une figure de gendarme, tout d'abord un peu ridicule, puis odieux. Un Etat tenu pour exacteur ; une société figurée en marâtre ; des travailleurs qui gronderont qu'on leur demande tout sans rien leur donner en échange, tels sont les trois produits de la politique sociale de toute démocratie. Il n'y a de place là-dedans pour rien d'humain : ni patriotisme, ni simple amitié. » Aujourd'hui, cet « Etat » est aussi le simple commis de Bruxelles, d'une Union européenne mondialisée à défaut d'être indépendante. De gré ou de force, tu seras contrôlé, administré, surveillé, amendé, enrégimenté un peu plus que tu n'es déjà, cela fait longtemps que la République désire ta mort, mais ne te laisse pas faire, recherche bien l'origine de tes maux, et agis ! Les idées rousseauistes furent imposées avec le sang de tes pères, t'en souviens-tu ? Davy de Virville disait : « si chaque paysan connaissait seulement cinq degrés de sa généalogie, la république aurait vécu ; la légende de la misère du Peuple Français avant la Révolution s'écroulerait comme un château de cartes ».
    Après les armées de métier des rois qui laissaient tranquille le paysan dans sa terre, la conscription révolutionnaire arracha la jeunesse des champs pour la faire mourir au bout du monde au nom de ses principes destructeurs. Ce que dénonçait magnifiquement Anatole France : « La honte des Républiques et des Empires, le crime des crimes sera toujours d'avoir tiré un paysan de la paix de ses champs et de sa charrue et de l'avoir enfermé entre les murs d'une caserne pour lui apprendre à tuer un homme ». Ils subiront le contrecoup des fausses promesses de 89 et les gouvernements successifs en passant par de Gaulle : « Quand il n'y aura plus que 10% d'agriculteurs, tout ira bien », frères paysans, gardiens et défenseurs de notre environnement, ne soyez plus dupe. Ta disparition est donc programmée de longue date par ceux-là même qui réclament ton bulletin de vote. La satire veut que tu mettes au pouvoir ceux qui te détruiront. Comme disait Lénine : « Il faut arracher le paysan à l'idiotisme de la vie des champs » (l'objectif socialiste pour 1995, était l'abaissement de 7 à 3% de la population active paysanne). On te taxe, puis on te surtaxe puis, tu dois jeter ton lait, tuer tes vaches, arracher tes vignes, on te dit d'arrêter de cultiver, de laisser la terre en friche mais alors ! « Ces hommes-là ont détruit douze millions de paysans. Ils ont pollué les rivières, désertifié les campagnes et saccagé les paysages dessinés par dix mille ans de civilisation agraire. Ils font vivre l'enfer aux animaux torturés aux hormones, gavés aux farines et enchaînés en batteries. Ils renvoient à la friche les champs, empoisonnent doucement les gens avec de mauvais aliments et acculent à la disparition le peuple des paysans. »(J.C.Martinez). Quand la République ne peut t'éliminer directement, elle le fait en douceur, « légalement », de peur qu'un jour le Chouan (« Les chouans poussent un raid à Tours », Libération 21/09/90) qui est en toi se réveille et prenne sa fourche ou sa faux contre « ces poux qui nous courent sur le ventre ». La république détruit la paysannerie, métier jadis libre par excellence et dont la vocation est de nourrir son prochain. Cet univers croule aujourd'hui sous les charges et les contraintes étatiques les plus diverses. L'emprise des trusts financiers se fait de plus en plus sentir, tandis que la nourriture industrielle veut remplacer la traditionnelle production du monde agricole. L'Union européenne dirige l'économie Française : « Geler la terre », laisser en friche, la bétonner (plus de 80.000 hectares de terres arables urbanisées chaque année en France) quelle honte ! Exode rural, pollution, désertification, abandon des communautés rurales, arrachage des vignes, quotas laitiers, destruction du cheptel, reconversion, remembrement... : c'est le martyre de la terre et de ceux qui la travaillent avec passion !
    N'oublions jamais que le monde rural est la sève de notre peuple et sa disparition sera sans retour... et qu'en France, la formule « Pas de pays sans paysans » est essentielle.
    F. Winkler (Projet de Société, à suivre)

  • Google, ou la révolution transhumaniste via le Big Data

     

    Par Eric Delbecque           

    A l'occasion de la sortie du livre de Christine Kerdellant Dans la Google du loup, Éric Delbecque décrypte dans cette tribune [Figarovox, 13.03], le projet de « fusion » entre le vivant et le digital porté par le géant de l'informatique américain. Ne nous y trompons pas : l'entreprise est - volens nolens - une révolution anthropologique menée par ce qu'Eric Delbecque nomme à juste titre un capitalisme sauvage darwinien et froid qui pourrait se révéler terriblement destructeur.  LFAR 

    Christine Kerdellant a relevé un beau défi Dans la Google du loup (Plon)! Elle met le doigt là où Google pose véritablement problème, à savoir sur la révolution anthropologique du transhumanisme… Pour ce qui concerne sa participation à la société de surveillance globale que fabriquent un certain nombre d'acteurs publics et privés, l'affaire est entendue depuis des années… Sous l'administration Obama, les dirigeants de Google se rendirent à la Maison-Blanche 230 fois! Ils confirmèrent en 2013 que les agences gouvernementales de l'Oncle Sam les sollicitaient annuellement - dans le cadre du Patriot Act - pour surveiller 1000 à 2000 comptes. En janvier 2015, la firme vedette du Web a reconnu avoir fourni au Ministère de la Justice américain l'intégralité des comptes Google de trois membres de Wikileaks.

    Il paraît dès lors compliqué de penser qu'une idéologie sécuritaire explique à elle seule l'extension de l'ombre de Big Brother sur le monde. Les géants du numérique du secteur privé (les GAFA : Google, Amazon, Facebook, Apple) participent largement à la manœuvre, plus ou moins volontairement (pas pour des raisons politiques, mais économiques). Nous assistons à l'émergence d'une société de surveillance de masse dont l'État n'est pas le centre mais l'un des maillons. Sa stratégie en matière de renseignement doit se lire comme un fragment d'un système cybernétique (au sens de science du contrôle) beaucoup plus vaste, où le capitalisme financier californien et numérique occupe une place décisive. Séparer ce dernier du complexe militaro-sécuritaro-industriel de l'Oncle Sam devient de plus en plus difficile, voire hasardeux.

    L'intérêt plus décisif du livre de Christine Kerdellant est ailleurs. Il explore de manière très accessible et percutante le cœur du projet Google, ou plutôt sa signification philosophique profonde. Derrière les joyeux Geeks de la Silicon Valley s'exprime la volonté de réifier l'humanité, de l'enchaîner à une raison calculante. Cette dernière va nous émanciper nous répète-t-on, nous libérer - via le Big Data - des limites de notre condition, nous délivrer de la mort et transformer notre existence en un jardin de fleurs. Mais lorsqu'on choisit d'examiner de plus près les conséquences des propositions de Google, on découvre une perspective d'avenir moins réjouissante.

    En réalité, c'est l'infiltration du capitalisme sauvage, darwinien et froid comme l'acier qui se laisse apercevoir dans le dessein clairement transhumaniste de Google. Derrière le slogan de « l'homme augmenté », on discerne une posthumanité clivée entre une hyperclasse, capable de se payer l'immortalité (la filiale du géant de Mountain View, Calico, veut « tuer la mort ») et la « surhumanité », et le reste de la population mondiale, qualifiable de « chimpanzés du futur » pour reprendre la formule du cybernéticien britannique Kevin Warwick.

    Tout cela est alimenté par le storytelling sur la « singularité » technologique (ou simplement la singularité). Ce dernier est un concept se définissant de la manière suivante : à partir d'un certain point de son évolution, la civilisation humaine pourrait franchir un seuil conduisant à une accélération inédite de la dynamique technologique. De nombreux spécialistes pensent que ce bond est lié à l'intelligence artificielle. Une fois cette étape franchie, le progrès sera l'œuvre d'intelligences artificielles en constante progression autonome. Un film a matérialisé cette abstraction : Transcendance, de Wally Pfister (2014), avec Johnny Depp. Ce dernier y incarne un scientifique génial spécialisé sur l'intelligence artificielle. Mais une organisation extrémiste, le RIFT (groupe révolutionnaire d'indépendance vis-à-vis de la technologie), tire sur lui avec une balle radioactive, qui ne lui laisse pas plus d'un mois à vivre. Pour survivre, il choisit de télécharger sa conscience dans un ordinateur.

    La singularité induirait des changements tels sur la société que l'individu humain d'avant la singularité pourrait difficilement les appréhender ou les anticiper. Les hommes risqueraient alors de perdre la maîtrise de leur destin (on rejoint là des scénarii mille fois envisagés par la science-fiction). En 2008, Ray Kurzweil (embauché depuis par Google) a fondé aux États-Unis l'université de la Singularité (dans la Silicon Valley). Le concept trouve ses sources dans les travaux sur la cybernétique de John von Neumann. La singularité acquit une certaine popularité dans les années 1990 grâce à Vernor Vinge. La possibilité même et la date de cet événement hypothétique soulèvent des débats. Plusieurs futurologues et transhumanistes l'attendent pour la troisième décennie du XXIe siècle. Mais ces hypothèses sont régulièrement critiquées pour leur manque de solidité scientifique. On comprend bien en revanche pourquoi Google et quelques autres ont tout intérêt à promouvoir ce thème ! Il fait signe vers nos rêves de puissance et d'éternité, matérialisés par le cyborg.

    Le cyborg est une fusion de l'homme et de la machine, et l'intelligence artificielle une tentative de reproduction du fonctionnement du cerveau humain à l'intérieur d'un ordinateur. Dans ces deux cas, il s'agit d'une véritable intrusion de l'univers mécanique et numérique à l'intérieur de la chair et de l'esprit. Ils représentent une menace sur la nature même de l'humanité dans la mesure où ils pourraient modifier notre rapport aux autres et au monde. Nos perceptions, nos sentiments, notre expérience charnelle de la réalité à travers nos sens seraient susceptibles d'être profondément transformés, voire annihilés. Si cet interfaçage homme/machine semble enthousiasmer les partisans les plus radicaux de l'ère digitale, il suscite l'appréhension d'une très grande part de nos contemporains.

    Au bout du compte, Christine Kerdellant fournit un dossier bien documenté permettant de se construire une opinion. Elle explique clairement qu'îl ne s'agit pas de formaliser une quelconque technophobie, mais de lire derrière le storytelling avantageux de Google une application au monde du vivant en général, et à l'être humain en particulier, d'une conception agressivement marchande du monde et de l'esprit. Cette dernière menace d'élaborer lentement une Big Mother au sourire figé et numérique qui ne rendra pas présent le rêve émancipateur prométhéen des Lumières mais risque de nous faire perdre le sens de l'humanité.   

    « C'est l'infiltration du capitalisme sauvage, darwinien et froid comme l'acier qui se laisse apercevoir dans le dessein clairement transhumaniste de Google. » 

    Eric Delbecque 

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    Éric Delbecque est président de l'ACSE et Directeur du département intelligence stratégique de SIFARIS, auteur de: Le bluff sécuritaire. Essai sur l'impuissance française (Éditions du Cerf, 2017)